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22 avril 2025
International
MACKY SALL CONSPUÉ
"Il doit partir au plus vite, on veut tourner la page". Ce sentiment d'exaspération est largement partagé au Sénégal après l'annulation du scrutin par le président alors que la résistance s'organise face à ce que d'aucuns qualifient de dérive autoritaire
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 26/02/2024
Le refus du président sénégalais Macky Sall d'organiser l'élection présidentielle comme prévu initialement le 25 février dernier n'a fait qu'empirer la crise politique que traverse le pays depuis plusieurs mois. Selon plusieurs acteurs de la société civile rencontrés par un journaliste de L'Humanité dans la capitale Dakar, cette décision "illégale" du chef de l'État ne fait que cristalliser la colère croissante d'une partie de la population contre sa gouvernance jugée de plus en plus autocratique.
"Il doit partir au plus vite, on veut tourner la page", déclare sans détour El Hadj, un habitant du quartier de Yoff rencontré par le journaliste. Un sentiment largement partagé au Sénégal où Macky Sall est de plus en plus "honni" depuis qu'il a reporté sans fixer de nouvelle date le scrutin présidentiel dont le premier tour devait se tenir le 25 février. Une décision que le Conseil constitutionnel a jugée contraire à la loi, enjoignant au chef de l'État d'organiser l'élection dans les "meilleurs délais". Pourtant, lors de son allocution télévisée le 22 février, Macky Sall est resté évasif, refusant de fixer une nouvelle date et préférant évoquer de manière floue un "dialogue apaisé".
Ce report fait culminer la colère contre la dérive autocratique du président Sall depuis 2019. Cette année-là marque un tournant avec l'attaque judiciaire lancée contre Ousmane Sonko, figure de l'opposition et candidat déclaré à la présidentielle, au travers d'une affaire de "viols" finalement non étayée. En mars 2021 puis juin 2023, son arrestation puis sa condamnation fallacieuse avaient déclenché de vastes manifestations à travers le pays, durement réprimées.
Selon le bilan dressé par Seydi Gassama, directeur d'Amnesty Sénégal, la répression excessive des autorités depuis trois ans a fait au moins 60 morts, dont 55 par balles, un chiffre qui pourrait dépasser la centaine selon les organisations de défense des droits humains. Quatre personnes ont encore été tuées par balle lors de la manifestation du 9 février contre le report de l'élection.
Parmi les organisations en première ligne contre la "politique néocoloniale" de Macky Sall et sa "décrédibilisation de tous les contre-pouvoirs", le Frapp (Front pour une révolution anti-impérialiste populaire et panafricaine) mène un "combat farouche". Son coordonnateur Daouda Guèye dénonce aussi bien les "violations des libertés et de l'État de droit" que "le pillage des multinationales". Lui-même affirme avoir été torturé par la police en 2022 après une manifestation.
La répression s'abat également sur d'autres acteurs comme les journalistes, citoyens, défenseurs des droits humains ou étudiants. Même ceux qui ont soutenu Macky Sall se sentent aujourd'hui "désolés" face à sa "dérive autoritaire", à l'image d'Abdou Khafor Kandji du collectif Y'en a marre. Ce collectif citoyen, tout comme le nouveau mouvement "Aar Sunu Election", rejettent la "tentative de diversion" proposée par le chef de l'État le 23 février pour sortir de crise.
Les autorités religieuses, comme l'archevêque de Dakar, ont également critiqué le report du scrutin, signe de l'ampleur de la contestation dans la société sénégalaise face à la "volonté fascisante de contrôle" dénoncée par le professeur Oumar Dia. Selon plusieurs observateurs, la mobilisation croissante de la société civile témoigne de sa "résilience" et de sa "capacité de résistance" face à l'autocratie grandissante du régime de Macky Sall.
LE DANGER D'UN REPORT PROLONGÉ DES ÉLECTIONS
Maurice Soudieck-Dionne évoque deux scénarios possibles après le 2 avril : soit la remise en marche rapide du processus électoral, soit une situation de "président de fait" générant "toutes les incertitudes" pour la paix
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 25/02/2024
Le professeur agrégé en sciences politiques Maurice Soudieck-Dionne a accordé une interview à RFI ce dimanche au sujet du dialogue national reporté au Sénégal. Selon lui, le refus de participer exprimé par 16 des 19 candidats de l'opposition à la présidentielle est "tout à fait cohérent et logique" compte tenu du contexte.
En effet, le président Macky Sall a appelé les acteurs politiques et sociaux à un dialogue les lundi 28 février et mardi 1er mars, afin de fixer une nouvelle date pour l'élection présidentielle initialement prévue le 24 février. Or, cette date avait dû être reportée suite à l'invalidation, par le Conseil constitutionnel, d'un décret pris à dernière minute par Macky Sall pour modifier les règles du parrainage. Pour Maurice Soudieck-Dionne, "le président est en train de faire du dilatoire" au lieu d'organiser le scrutin dans les délais comme le demande le Conseil constitutionnel.
De plus, le chercheur pointe du doigt le fait que Macky Sall "veut mettre ensemble les 19 candidats qui ont été définitivement retenus par le conseil constitutionnel et ceux qui ont été recalés lors du parrainage alors qu'ils sont au nombre de 44". Or, selon la Constitution sénégalaise en son article 92, "les décisions du Conseil constitutionnel sont insusceptibles de recours et s'imposent à toutes les autorités administratives et juridictionnelles et à tous les pouvoirs publics". Ainsi, en voulant rassembler candidats acceptés et rejetés, le président violerait encore une fois la loi fondamentale.
Maurice Soudieck-Dionne détaille les deux scénarios possibles après le 2 avril, date de fin du mandat de Macky Sall : soit la remise en marche rapide du processus électoral, soit une situation de "président de fait" générant "toutes les incertitudes" pour la paix au Sénégal. Interrogé sur les sujets à l'ordre du jour du dialogue, le professeur affirme que fixer une date consensuelle est "impossible" et que discuter de l'après-mandat de Macky Sall prend un tour particulier si les élections ne sont pas relancées.
Concernant la participation au dialogue, Maurice Soudieck-Dionne précise que "la société civile n'y va pas", tout comme "les 16 candidats". Macky Sall ne discutera donc principalement qu'avec son propre candidat Amadou Ba et ses soutiens Idrissa Seck et Boun Abdallah Dionne.
Enfin, interrogé sur une date recevable pour le scrutin, l'universitaire estime que "le temps perdu" entre le décret présidentiel et aujourd'hui "doit être comptabilisé" et rajouté aux délais, afin de respecter les principes constitutionnels d'un scrutin avant la fin du mandat de Macky Sall le 2 avril.
par Latyr Diouf
CONTRE L’ADOUBEMENT GÉNÉRALISÉ DU CRÉTINISME
Ceux qui rejettent la concertation feignent d’ignorer les concours d’incidents qui nous ont menés à ce stade et réclament une date. La décrispation amorcée ne sera peut-être pas sans compromission, de part et d’autre
Ma position est simple et constante : tous ceux qui, sans coup férir, sont capables de croire et d’affirmer, que nos misères sociales, économiques, politiques, culturelles et toutes les péripéties de la démocratie sénégalaise, notamment les rebondissements vertigineux autour de l’élection présidentielle de 2024, sont exclusivement imputables à Macky Sall (l’homme et l’Institution), se trompent fatalement.
Le seul crédit d’une telle conviction (d’un tel biais, à mon avis) est le nombre de fanatiques que les circonstances ont, hélas, considérablement accru. C’est, au choix, de l’opportunisme, de la mauvaise foi, de la paresse, de l’hypocrisie, de la manipulation, de la bêtise, de l’ignorance, de l’intimidation et, de plus en plus, de la haine pure. La terreur qui paralyse le pays depuis, au moins mars 2021, n’est pas à chercher ailleurs que dans ce raccourci facile du patriotisme convenu.
Bien-sûr, il n’est pas question de considérer que le président de la République est exempt de toute responsabilité. Je peux, aisément, dresser un historique d’actes manqués depuis 2012 et lui attribuer, suivant mon interprétation, une part logique et conséquente dans cette malheureuse confusion. Mais, malgré les inventaires à la Prévert qui lui prêtent les intentions les plus farfelues, aucun de ses pourfendeurs ne peut, raisonnablement, se prévaloir plus patriote que lui.
Puisque le patriotisme se résume, de plus en plus, à dénigrer facilement les institutions, à confesser hâtivement et courageusement sa honte et sa tristesse devant la situation politique déplorable que traverse le Sénégal, aucun compatriote (pas de jeu de mots svp, j’essaie d’être sérieux !) ne devrait indexer l’autre. Nous souffrons, globalement, de notre égoïsme, de notre impuissance collective, de notre rapport problématique à l’intérêt général, au travail, à la vérité, au droit, au respect de l’autre, à la bienveillance, à l’amour (oui !). Ceux qui ont l’âme lyncheuse et influençable devraient se regarder, d’abord, dans une glace, avant de se choisir un bouc émissaire.
Peut-on encore consentir sans sourire à l’expression « Vox populi, vox Dei » (La voix du peuple est la voix de Dieu) ? Même au Sénégal, même sur les réseaux sociaux ? Pour moi, c’est, de plus en plus, complexe. Popularité n’est pas vérité. L’Histoire le prouve aisément. La simplification peut être dangereuse, surtout quand elle nourrit le populisme en se bordant de justifications médiocres (factuelles, disent-ils), de la caution intellectuelle de quelques célébrités et de l’accès facile aux médias. La note risque d’être encore plus salée, si nous persistons dans la surenchère de déclarations courtes aussi outrancières qu’inopérantes.
Un individu peut toujours se prétendre peuple mais il n’exprime jamais que ses valeurs intrinsèques (ses désirs, son égo, ses limites) et, très souvent, il sublime ses propres inadaptations. Sans étaler les miennes, petite précision sur ma situation d’énonciation. J’étais à Dakar le 3 février au moment où le président de la République abrogeait le décret convoquant le corps électoral pour le scrutin présidentiel prévu le 25 février 2024 suscitant l’ire empressée, empruntée, excessive et imprudente d’une opposition versatile (dont certains voulaient le report) et le désarroi de beaucoup de Sénégalais et au-delà. J’y étais encore quand le Conseil constitutionnel rendait sa décision annulant le décret présidentiel.
Cette proximité relative avec Dakar, foyer ardent des emballements nationaux, ne donne pas forcément de privilège dans l’analyse. L’essentiel se passe au cœur des Institutions de la République qui ont toujours des raisons que le peuple ignore. Mais, qui garde les gardiens, d’ailleurs ? Le reste se joue, en roue libre, dans la jungle des réseaux sociaux. Le seul constat que j’ai tiré de la rue dakaroise, c’est le dispositif impressionnant de maintien de l’ordre.
Le récent temps fort de ce feuilleton préélectoral est le face-à-face du président de la République avec la presse nationale le 22 février. J’ai trouvé Macky Sall digne mais affligé à juste titre. Loin devant le pétrole et le gaz, qui suscitent tant de convoitises et de fantasmes, la plus grande richesse du Sénégal est sa crédibilité internationale. Elle a permis au volontarisme du chef de l’Etat, par le truchement du Plan Sénégal émergent, d’obtenir des résultats tangibles encore insuffisamment et injustement appréciés. A travers le bashing extrême qu’il a subi alors qu’il avait à cœur d’assumer une lourde responsabilité (politiquement discutable, peut-être, au regard des délais) en repoussant les élections, c’est l’image du Sénégal qui a été ternie. Non, le Sénégal ne mérite pas que certains pays se permettent de lui remonter les bretelles, Macky Sall, non plus ! Sa peine non feinte est compréhensible.
Des morts furent encore à déplorer, hélas ! L’urgence, aujourd’hui, est de dépasser cette situation qui n’arrange que les « rentiers du chaos ». Répondre à l’appel au dialogue du lundi 26 février me semble la meilleure chose à faire au vu des circonstances. Ceux qui rejettent la concertation feignent d’ignorer les concours d’incidents qui nous ont menés à ce stade et réclament une date. Même si le grand nombre d’aspirants à diriger le Sénégal sans, manifestement, en avoir l’envergure est un des symptômes du malaise, l’eau destinée à éteindre un incendie n’a pas besoin d’être potable (cf. Idrissa Seck pendant la Covid). La décrispation amorcée ne sera peut-être pas sans compromission, de part et d’autre, et les précédents qui pourraient en découler hantent déjà notre futur « commun vouloir de vie commune », mais le retour à la stabilité de notre République serait à ce prix. Amen !
Enfin, au cours de l’entretien, le président a laissé entendre qu’il n’excluait pas de s’établir au Maroc pour ne pas gêner son successeur. J’aimerais mieux qu’il reste au Sénégal pour profiter de la reconnaissance qu’il mérite pour les incontestables services rendus à la Nation. N’ayant pas pu le voir en tête à tête depuis très longtemps malgré mes demandes répétées, je me consolais à l’idée de pouvoir lui rendre visite après son mandat et de le trouver un week-end en bermuda dans sa maison de Fatick. J’aimerais tellement savoir quelles raisons d’État poussent un homme politique aussi aguerri et aussi averti que lui à se passer de certains de ses partisans parmi les plus sincères, les plus loyaux et les plus compétents et à promouvoir d’improbables intrigants qui sont pour beaucoup dans cette défiance qui sape la confiance et mine la société jusqu’à des niveaux insoupçonnés.
Latyr Diouf est président du Comité Electoral de l’Essonne, Vice-Coordonnateur élu de la CCR France.
LA PRESSION MONTE DANS LA RUE
Plusieurs centaines de personnes ont manifesté samedi à Dakar pour exiger du président Macky Sall d'organiser l'élection présidentielle avant la fin de son mandat le 2 avril
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 24/02/2024
Plusieurs centaines de Sénégalais ont manifesté samedi à Dakar pour exiger du président Macky Sall d'organiser l'élection présidentielle avant la fin de son mandat le 2 avril, rapporte l'Agence France-Presse (AFP).
Les élections, initialement prévues le 24 février, avaient été reportées à une date indéterminée par le président Sall début février, suscitant un tollé de l'opposition qui y voyait un "coup d'État constitutionnel". "Nous voulons des élections, Macky Sall dictateur", ont scandé les manifestants réunis à l'appel de la coalition d'opposition F24, selon l'AFP.
Parmi eux, Ibrahima Niang, 34 ans, a déclaré à l'agence de presse : "Je manifeste pour une seule chose: que Sonko soit libéré. Que Macky Sall cesse d'utiliser la force contre les manifestants". Ousmane Sonko, candidat de l'opposition les plus populaire, est en effet sous le coup d'une mesure de contrôle judiciaire depuis février.
Le rassemblement, qui a drainé des centaines de personnes selon l'AFP, s'est déroulé dans le calme. Les forces de sécurité, pourtant réputées pour disperser violemment les manifestations non autorisées par le passé, sont restées à distance. Un climat de tension règne au Sénégal depuis le report du scrutin, qui a provoqué des manifestations meurtrières.
Le Conseil constitutionnel, plus haute autorité juridictionnelle du pays, a invalidé la décision de report du chef de l'Etat. Mais en suspendant la date de l'élection au "dialogue national" prévu cette semaine, Macky Sall entretient le flou sur le calendrier électoral, dénoncent ses opposants. La plupart des acteurs politiques refusent d'ailleurs de participer à cette réunion, la jugeant de "tentative de diversion".
Après 12 ans de pouvoir, le président Sall, qui ne se représente pas, assure qu'il quittera ses fonctions le 2 avril comme le prévoit la Constitution. Mais dans ce climat politique tendu, l'opposition craint qu'il ne cherche à s'accrocher au pouvoir en cas de report des élections au-delà de cette date butoir.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL SOMMÉ D'AGIR
Aar Sunu Election demande instamment aux Sages de "prendre ses responsabilités" en fixant une date pour l'élection. La coalition exhorte le juge constitutionnel à "ne pas rester les bras croisés face au refus du chef de l'État d'appliquer la loi"
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 24/02/2024
La coalition d'organisations de la société civile, regroupée au sein du collectif "Aar Sunu Election", a saisi hier le Conseil constitutionnel pour exiger la fixation sans délai d'une date pour l'élection présidentielle au Sénégal. Dans leur requête, les membres d'Aar Sunu Election dénoncent le manque de volonté affiché par le président Macky Sall de respecter la décision de la plus haute juridiction en la matière.
Cette action collective regroupe des associations citoyennes, des syndicats, des organisations religieuses et des personnalités indépendantes, tous unis dans leur attachement aux principes démocratiques et à l'Etat de droit.
Dans leur lettre datée du 23 février 2024, adressée au président du Conseil constitutionnel, Mamadou Badio Camara, les membres de la coalition saluent d'abord sa décision du 29 janvier qui a annulé la loi modifiant le code électoral ainsi que le décret préfixant les élections législatives au 31 juillet 2024. Mais ils déplorent l'absence de réaction concrète du pouvoir exécutif depuis lors pour organiser le scrutin présidentiel tel que prescrit par la plus haute juridiction du pays.
Plus loin, la lettre pointe du doigt les tentatives de diversion du chef de l'Etat, Macky Sall. "Après sa récente interview à la presse, il est devenu évident pour nous que le président n'a aucune intention d'appliquer la décision du Conseil constitutionnel" affirme le texte, citant notamment la proposition floue de "dialogue" avancée par Macky Sall au lieu de fixer une date pour l'élection.
Face à cette situation inquiétante, Aar Sunu Election demande instamment au Conseil constitutionnel de "prendre ses responsabilités" en fixant lui-même une date pour l'élection présidentielle. La coalition rappelle au président du Conseil, Mamadou Badio Camara, qu'il a le pouvoir de le faire selon l'article 81 de la loi organique qui régit cette institution.
Les organisations membres exhortent ainsi le juge constitutionnel à "ne pas rester les bras croisés face au refus du chef de l'État d'appliquer la loi". Elles souhaitent qu'il "procède aux aménagements nécessaires pour faciliter le scrutin avant le 2 avril", comme l'avait déjà fait le Conseil dans le passé lors de précédentes crises électorales.
LES PRINCIPAUX CANDIDATS MAINTIENNENT LEUR OPPOSITION DIALOGUE
Mise au point cinglante du FC25 : "nous refusons de cautionner (le coup d'État constitutionnel de Macky Sall, qui se déploie, entre autres, à travers) un processus (électoral) qui manque de transparence et d'équité"
Dans une déclaration sans concession datée de ce samedi 24 février, les candidats du regroupement FC25 rectifient les propos qui leur ont été prêtés et réaffirment avec force leur détermination à ne pas s'associer aux concertations initiées par le pouvoir.
"Déclaration de démenti ferme
Nous tenons à réfuter catégoriquement les allégations contenues dans l'article publié ce samedi sur le site de emedia, affirmant que les candidats du FC25 participeront au dialogue sur la date de l'élection présidentielle. Ces informations sont totalement fausses et ne reflètent en aucun cas la position des candidats concernés.
Le FC25, regroupant les candidats validés par le Conseil constitutionnel, maintient sa décision de ne pas participer à ces concertations. Notre position est ferme et inchangée : nous refusons de cautionner (le coup d'État constitutionnel de Macky Sall, qui se déploie, entre autres, à travers) un processus (électoral) qui manque de transparence et d'équité.
Les prétendues déclarations attribuées à Abdoulaye Seydou Sow dans l'émission Jakaarlo de la Tim sont incorrectes et trompeuses. Aucune rencontre entre les candidats du FC25 et le président n'a été programmée avant le lancement du dialogue. (Après avoir décliné fermement l'invitation de Macky Sall, nous avons avons décidé d'une part, de saisir le Conseil constitutionnel et, d'autre part, d'aller à la rencontre du peuple pour organiser avec lui le véritable dialogue du peuple).
Nous rappelons que notre décision de ne pas participer à ces discussions est motivée par notre engagement envers la démocratie et le respect des principes fondamentaux de transparence et d'égalité des chances pour tous les candidats.
Nous exhortons les médias à faire preuve de responsabilité dans la diffusion d'informations et à vérifier soigneusement leurs sources avant de publier des articles susceptibles de semer la confusion parmi le public.
Le FC25 demeure uni dans sa décision de ne pas participer au dialogue sur la date de l'élection présidentielle, et nous restons fermes dans notre engagement à défendre les intérêts du peuple sénégalais et à œuvrer pour des élections libres et équitables."
Les Signataires :
Aliou Mamadou DIA
Mamadou Lamine DIALLO
Elhadii Mamadou DIAO
Cheikh Tidiane DIEYE
Déthié FALL
Pape Djibril FALL
Diomaye Diakhère FAYE (représenté par son mandataire Amadou BA)
Malick GAKOU
Serigne MBOUP
Aly Ngouille NDIAYE
Daouda NDIAYE
Anta Babacar NGOM
Khalifa Ababacar SALL
Thierno Alassane SALL
Habib SY
Boubacar Camara
CÔTE D'IVOIRE, 51 PRISONNIERS GRACIÉS
Alassane Ouattara a "informé le Conseil national de sécurité (CNS) de sa décision d'accorder la grâce présidentielle à des personnes civiles et militaires condamnées pour des infractions commises lors des crises post-électorales ..."
Cinquante-et-un prisonniers civils et militaires ont été graciés jeudi soir en Côte d'Ivoire par le président de la République, dont le général Brunot Dogbo Blé, condamné dans l'affaire des "disparus du Novotel", l'enlèvement et le meurtre en 2011 de quatre personnes, dont deux Français.
Alassane Ouattara a "informé le Conseil national de sécurité (CNS) de sa décision d'accorder la grâce présidentielle à des personnes civiles et militaires condamnées pour des infractions commises lors des crises post-électorales et pour atteinte à la sûreté de l'Etat", selon un communiqué du CNS qui précise que 51 personnes étaient concernées. Parmi elles, figure Brunot Dogbo Blé, condamné en avril 2017 à 18 ans de prison pour son implication dans l'affaire des "disparus du Novotel".
Le 4 avril 2011, au plus fort de la crise post-électorale en Côte d'Ivoire, un commando venu de la présidence, alors aux mains des partisans de Laurent Gbagbo, avait fait irruption à l'hôtel Novotel d'Abidjan, capitale économique en proie aux combats, s'emparant de quatre personnes, dont deux Français. Ce commando avait emmené son directeur, le Français Stéphane Frantz Di Rippel, son compatriote Yves Lambelin, directeur général de Sifca, le plus grand groupe agro-industriel ivoirien, l'assistant béninois de celui-ci, Raoul Adeossi, et le Malaisien Chelliah Pandian, directeur général d'une filiale de Sifca.
Selon l'enquête, les quatre hommes ont été emmenés au palais présidentiel, torturés et tués. Leurs corps ont ensuite été jetés dans la lagune d'Abidjan. Celui d'Yves Lambelin est le seul à avoir été formellement identifié. La libération de M. Dogbo Blé était réclamée depuis plusieurs années par Laurent Gbagbo, lui-même gracié en août 2022, qui estime qu'il était un "prisonnier d'opinion".
"Décrispation"
"C'est un acte qu'on ne peut que saluer. Ca ne peut que participer à une décrispation, à un retour d'un climat politique qui doit être normalisé. Mais il y a encore beaucoup à faire", a réagi auprès de l'AFP Me Habiba Touré, porte-parole du Parti des peuples africains - Côte d'Ivoire (PPA-CI), la formation de M. Gbagbo.
Cette décision du président Ouattara intervient conformément à "son engagement d'oeuvrer résolument à la consolidation de la paix" en Côte d'Ivoire, précise le CNS, dans le communiqué. Un autre nom important figure parmi les listes des graciés: Souleymane Kamagaté, alias "Soul to Soul". Cet ancien chef du protocole de l'ex-Premier ministre Guillaume Soro avait été condamné à 20 ans de prison, confirmés en appel il y a un an, pour "tentative d'atteinte à la sûreté de l'Etat". Deux autres proches de M. Soro sont aussi concernés, l'ancienne ministre Affoussy Bamba et son ex-chef de la communication Moussa Touré.
Guillaume Soro, ancien allié du président ivoirien Alassane Ouattara, est accusé d'avoir fomenté avec ses partisans une "insurrection civile et militaire" lors de son retour avorté dans son pays en décembre 2019. Après un exil de quatre ans, il est depuis fin 2023 retourné en Afrique, et se trouve entre le Niger, le Burkina et le Mali.
Jeudi, le président ivoirien, a par ailleurs souhaité que soit érigé un "Mémorial en hommage aux victimes des graves crises" que le pays a connues ces dernières années. Outre la crise post-électorale de 2010-2011 qui avait fait plus de 3.000 morts, la Côte d'Ivoire a connu des troubles lors de la présidentielle de 2020 qui avait vu la réélection d'Alassane Ouattara pour un troisième mandat controversé.
Les violences avaient fait 85 morts et 500 blessés. Depuis, le pays connaît une période d'apaisement politique avec plusieurs élections tenues dans le calme. La prochaine présidentielle doit se tenir en octobre 2025.
VIDEO
AAR SUNU ELECTION BOYCOTTE LE DIALOGUE
Accusant Macky Sall de plonger le Sénégal dans le chaos, la plateforme de défense du scrutin refuse de cautionner ce qu'elle qualifie de "simulacre". Elle demande au Conseil constitutionnel d'agir pour sortir le pays de l'impasse
La plateforme Aar Sunu élection (protéger notre élection), un regroupement d’organisations se réclamant de la société civile, a annoncé, vendredi, à Dakar, sa décision de ne pas participer au dialogue national auquel appelle le président Macky Sall et rejeté par seize des dix-neuf candidats retenus par le Conseil constitutionnel.
Le chef de l’Etat a appelé à des concertations avec les forces vives de la nation afin de résoudre la crise politique née de l’interruption de facto du processus électoral à la veille du démarrage de la campagne électorale pour la présidentielle initialement prévue le 25 février.
“Aar sunu élection informe l’opinion nationale et internationale qu’elle ne participera pas à un simulacre de dialogue qui relèverait de la compromission, sèmerait les germes de la division et ne pourrait aboutir à aucun consensus au vu des intérêts divergents des parties invitées”, ont indiqué les membres de cette plateforme, par la voix de Thiaba Camara Sy.
Les responsables de Aar Sunu élection rencontraient les journalistes au lendemain d’une sortie publique du chef de l’Etat lors de laquelle il a invité les forces vives du pays à prendre part à un dialogue devant se tenir lundi et mardi afin de déterminer une nouvelle date pour l’élection présidentielle et trouver les voies et moyens de permettre au pays de dépasser la crise politico-institutionnelle qu’il traverse.
“Cette posture du président de la République risque de plonger le Sénégal dans le chaos en créant les conditions d’une instabilité institutionnelle, économique et sociale dont le pays mettrait du temps à se relever”, a alerté Mme Sy, en lisant une déclaration devant des journalistes.
Disant tirer les conséquences des propos du chef de l’Etat lors de son entretien en direct à la télévision publique (RTS) avec des médias sénégalais, Aar Sunu election invite le Conseil constitutionnel à prendre ses responsabilités en fixant une nouvelle date pour l’élection présidentielle.
Les responsables de la plateforme d’organisations se réclamant de la société civile ont ainsi fait part de leur volonté d’organiser un rassemblement samedi à Grand Yoff, un quartier de Dakar.
Ils ont également demandé à chaque électeur de se rendre, dimanche 25 février, à son bureau habituel de vote en guise de protestation contre le report du scrutin.
Aar Sunu election dit envisager d’appeler à une journée villes mortes sur toute l’étendue du territoire, mardi.
Le Sénégal est en proie à une crise politique née de l’annonce du report de l’élection présidentielle devant déboucher sur le choix d’un successeur au président Macky Sall, au pouvoir depuis 2012 et qui a renoncé à briguer un nouveau mandat de 5 ans.
Vendredi, plus tôt dans la journée, seize des 19 candidats retenus par le Conseil constitutionnel ont fait part de leur décision de ne pas répondre au dialogue convoqué par le chef de l’Etat.
La convocation de cette concertation est le procédé choisi par Macky Sall préalablement à la détermination d’une nouvelle date pour l’élection présidentielle.
Il s’était notamment engagé le 16 février à pleinement exécuter une décision du Conseil constitutionnel invitant les autorités compétentes à fixer une date pour l’élection présidentielle, après que la juridiction a constaté l’impossibilité de l’organiser le 25 février, comme initialement prévue.
Dans cette même décision, le Conseil constitutionnel a jugé ‘’contraire à la Constitution’’, l’adoption par l’Assemblée nationale, d’une loi repoussant au 15 décembre prochain la tenue du scrutin.
Cette loi parlementaire a été votée le 5 février, deux jours après que le président de la République a annoncé, lors d’un discours à la nation, l’abrogation du décret par lequel il avait convoqué les électeurs aux urnes le 25 février.
En prenant cette décision, le 3 février, il a invoqué des soupçons de corruption concernant des magistrats parmi ceux qui ont procédé à l’examen des 93 dossiers de candidature et jugé recevables 20 d’entre eux.
S’adressant à la nation, le chef de l’État a souhaité l’organisation d’’un dialogue national ouvert, afin de réunir les conditions d’une élection libre, transparente et inclusive dans un Sénégal apaisé’’.
Les accusations de corruptions ont été portées par des députés du groupe parlementaire du PDS (Parti démocratique sénégalais), dont le dossier de candidature de son leader, Karim Wade a été déclaré irrecevable par le Conseil constitutionnel en raison de la double nationalité française et sénégalaise du fils de l’ancien président Abdoulaye Wade.
Au Sénégal, il faut être de nationalité exclusivement sénégalaise pour briguer la magistrature suprême, selon la loi électorale. Les membres du groupe parlementaire Liberté et démocratie ont demandé et obtenu la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire pour faire la lumière sur les allégations de corruption et de connexions douteuses.
L’ouverture d’une information judiciaire a mis fin aux travaux de cette commission d’enquête parlementaire.
Quatre personnes ont perdu la vie dans les violences qui ont émaillé les manifestations de protestation contre le report annoncé de l’élection présidentielle. Ces victimes ont été enregistrées à Dakar, Saint-Louis et Ziguinchor lors de heurts ayant opposé des protestataires aux forces de l’ordre.
Ces évènements ont été suivis quelques jours plus tard par une vague de libérations d’activistes et de militants arrêtés dans le cadre d’activités en lien avec leur engagement politique.
LE VIDE SE CREUSE AUTOUR DE MACKY
Le président misait tout sur ce dialogue. Mais 16 candidats lui tournent le dos d'entrée. Leur boycott isole le chef de l'État et le prive de sa dernière planche de salut. Le spectre d'une crise constitutionnelle majeure se profile à l'horizon
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 23/02/2024
Les concertations nationales convoquées en urgence par Macky Sall pour sortir de l'impasse électorale touchent déjà un mur. Refusant d'avaliser les "manœuvres dilatoires" du chef de l'Etat, les principaux candidats à la présidentielle ont fait faux bond à l'invitation au dialogue. Un désaveu cinglant qui hypothèque d'ores et déjà les chances de succès de cette initiative, et fait planer le spectre d'une crise sans précédent après le 2 avril prochain.
Pourtant, Macky Sall, qui s'était engagé à ne pas se représenter pour un troisième mandat, avait misé gros sur ces 48h de débats pour trouver une issue consensuelle. Conscients de la pression croissante de la rue et de la question qui entoure désormais la légitimité de son pouvoir, le président espérait apaiser les tensions en ouvrant le dialogue avec ses opposants. Mais c'était sans compter sur leur détermination à obtenir le respect des délais constitutionnels pour le scrutin.
Un à un, les principaux candidats, dont Ousmane Sonko, leader charismatique de l'opposition aujourd'hui écroué, ont fait savoir qu'ils ne se rendraient pas aux discussions. Une défiance exacerbée par l'incarcération de plusieurs figures de l'opposition, mais aussi par le souvenir encore vif des émeutes meurtrières nées des accusations de fraude en 2021. Selon un constitutionnaliste sénégalais interrogé par l'AFP, "cette configuration radicalise les positions de part et d'autre, alors que le temps presse déjà pour éviter le pourrissement de la crise".
Car après la fin de son mandat, le 2 avril, le Sénégal pourrait se trouver plongé dans un vide juridique inédit. Normalement, la Constitution prévoit que le président de l'Assemblée assume l'intérim. Mais aucun scénario n'a été écrit pour un cas comme celui-ci. Le seul arbitre possible serait alors le Conseil constitutionnel, qui devrait ordonner l'organisation immédiate d'un nouveau scrutin. Sauf que la défiance à l'égard des institutions risque de compliquer sa tâche.
Sur le terrain, la pression monte aussi. Nombreux sont ceux qui redoutent que cette crise électorale interminable ne dégénère à nouveau en violences, après celles de ces dernières semaines déjà là l'origine de trois morts. Dos au mur, Macky Sall n'a désormais plus que quelques semaines pour trouver un accord et éviter le chaos. Mais après l'échec de sa main tendue, les scénarios de sortie de crise s'amenuisent dangereusement.
PAR Babacar Diop Buuba
MULTIPLE PHOTOS
ARMÉE NATION : COLONNE VERTÉBRALE DE LA RÉPUBLIQUE OU CINQUIÈME COLONNE ?
EXCLUSIF SENEPLUS - Mai 68 a marqué un tournant dans l'histoire du Sénégal avec l'implication des militaires pour résoudre la crise. Depuis, l'armée navigue entre réserve politique et participation au développement. Mais où se situent ses limites ?
Contribution sur le rôle et la place des forces de défense et de sécurité (FDS) pour l’État de droit, la justice, la solidarité et le développement
Le 14 février 2024, un quotidien du pays, Bës bi, (p. 5 à 8) en l’occurrence, a profité de la fête de la Saint-Valentin pour citer, entre autres acteurs à aimer, les forces de défense et sécurité : « La patrie est arrosée entretenue, maintenue par les forces de défense et de sécurité (FDS), ces militaires et paramilitaires qui en sont aujourd’hui le dernier rempart.
Ces acteurs illustrent l’exception sénégalaise, la méritocratie, 64 ans de compagnonnage entre l’armée et la patrie en péril, une armée politiquement neutre, mais pas indifférente ».
Nous avons eu l’occasion de partager nos points de vue, sur la place et le rôle des principaux acteurs et porteurs d’enjeux, dans la vie des sociétés en général, sénégalaise en particulier.
Les quatre (4) groupes : (i) la société civile, (ii) acteurs économiques, (iii) organisations politiques et (iv) leaders coutumiers, religieux culturels, ont reçu des traitements dans nos écrits[1]
La présente contribution a l’ambition de faire un focus sur la colonne vertébrale ou cinquième colonne : les forces de défense et de sécurité
Vue de l’intérieur, formation, réflexion stratégique et champs d’intervention
A ma connaissance, le premier acteur du dedans qui a osé, écrire au Sénégal, sur le sujet, de manière académique, est le général de corps d’armée puis ambassadeur et acteur des Assises Nationales (2008-2009), Mamadou Mansour Seck. Son ouvrage porte le titre « Nécessité d’une armée », Harmattan Sénégal, 2012. L’ouvrage est en fait sa thèse soutenue en 1974 à l’École Supérieure de Guerre aérienne de Paris (ESGA).
Le chapitre I est consacré au passé (préhistoire, antiquté et histoire de France), le second à l’après-guerre et au présent, non seulement dans les pays industrialisés, mais aussi aux pays en voie de développement, encore mieux, à des questions majeures, comme les rapports des armées aux questions politiques, socioéconomiques (chap. III)
Dès l’avant-propos, le Général reconnaît que notre monde est en déséquilibre sans partage, ni solidarité suffisante, et « l’armée seule ne peut résoudre les injustices, par contre elle représente une garantie contre la cupidité des hommes et participe à l’intégration nationale, surtout dans les pays en voie de développement. Une armée républicaine participe aussi à la stabilité de la Nation ».
Mieux, il a eu le courage de se prononcer sur le conflit en Casamance et n’a pas hésité à indiquer des voies de dépassement en trois (3) volets : politique, économique et sécuritaire.
Il a analysé la composition socio-culturelle de l’armée, fait des développements sur ses fonctions et prestations (p.57 à 65) à l’intérieur et en dehors du Sénégal. Sa conclusion est pleine de sagesse :
« Les hommes, mieux éduqués, mieux formés réclament toujours plus de liberté sans toujours savoir jusqu’où ne pas aller trop loin. Il faudra alors penser à endiguer leurs excès parce que, par nature, ils ne sont pas très sages. D’où la nécessité, encore là, d’une force de maintien de l’ordre, dans chaque pays, capable, éventuellement de faire face aux grandes catastrophes ». (op.cit. P. 77)
Le second qui s’illustre, dans l’analyse des faits politiques, est feu le général Lamine Cissé qui a livré témoignages et analyses dans ses « Carnets secrets d’une alternance, avec le titre : Un soldat au cœur de la démocratie, édition, GIDE PPE, Paris 2001.
Dans cet ouvrage, il explique, dans l’avant-propos, les circonstances dans lesquelles, le Président Abdou Diouf l’a nommé Ministre de l’Intérieur, chargé de la Décentralisation, en lui donnant la responsabilité d’organiser des élections d’une importance majeure (législatives en mai 1998, sénatoriales en janvier 1999, présidentielle à deux tours en février et mars 2000).
L’ouvrage informe sur les suspicions (chap. II), les tensions (chap. III), la fanfare du pouvoir (chap. V), le pou sur la tête (chap. VI), guerres et paix (chap. VII) et l’exigence démocratique (chap. VIII).
Les annexes sont très précieux, car ils permettent de mesurer le rôle de la société civile dans le FAC (Front d’Action de la Société Civile) alors autour du CONGAD, de la RADDHO, du Forum Civil et du RADI) et aussi les dispositions particulières qu’il a prises pour conduire la mission sans oublier les résultats.
Le général Cissé est d’avis qu’il est « essentiel de favoriser l’enracinement de la démocratie dans nos pays. Cet idéal ne pourra s’épanouir en Afrique que si nos dirigeants civils et militaires manifestent concrètement la volonté d’appliquer les règles qui la fondent » (op. Cit. P13).
L’auteur rappelle les circonstances dans lesquelles, l’armée a eu à observer le jeu politique au Sénégal et les relate dans sa biographie qui lui a permis d’avoir une bonne formation intellectuelle, citoyenne et militaire (chap. I, p. 15 à 39, Jour de pluie sur le Sahel).
Son apprentissage citoyen et sa carrière dans le génie militaire l’avaient préparé à réussir sa mission. Le résultat est connu : première alternance politique au Sénégal, la victoire du candidat de l’opposition Abdoulaye Wade face au président sortant Abdou Diouf
Le travail des historiens de métier permet de compléter la documentation et d’approfondir la réflexion sur le rôle de l’armée dans les crises politiques.
Retenons que de l’antiquité à nos jours, les armées ont permis de défendre des institutions politiques, de renverser des régimes, depuis l’Égypte pharaonique jusqu’aux États modernes, en passant par la période intermédiaire.
Le regard des historiens
Dans l’avant-propos de la seconde édition de son ouvrage sur « Mai 68 à Dakar », le professeur Abdoulaye Bathily, ancien enfant de troupe, puis étudiant enrôlé de force, puis ministre de la République, a consacré des pages à la question des forces armées et de sécurité au cours des événements de Mais 68 (voir extraits en photos d’illustration 2,3 et 4). Il a aussi produit des études sur les armées, la politique dans le cadre du CODESRIA (Conseil pour le Développement de la Recherche en Sciences Sociales en Afrique).
Notre collègue Oumar Guèye a produit un ouvrage sur Mai 68 au Sénégal, Mai 1968 au Sénégal ; Senghor face aux étudiants et au mouvement syndical, Karthala, 2012 (voir extraits en photos d’illustration 5, 6, 7, 8, 9. Il revient sur le rôle des deux armées française et sénégalaise.
Dynamiques nouvelles
Ce qui est intéressant dans le contexte actuel, c’est la succession des coups d’Etat en Afrique de l’Ouest et leurs caractères politiques, prononcés les tentatives de solidarité, voire de fédérations des soldats.
On peut ajouter pour reprendre une formulation de notre collègue Bakary Samb de Timbuktu Institute « Les coups d’État en Afrique sont devenus des moments de respiration démocratique » :
« Ce qu’on voit derrière ces juntes qui viennent au pouvoir est un signe d’une désaffection par rapport aux États incarnés par des civils et une conséquence de la mal gouvernance, de l’absence de démocratie qui se résume chez nous à l’aspect électoral. On a vu d’autres aspirations qui sont aujourd’hui prises en charge par les tenants. Autre chose également, on a vu qu’il y a un discours populiste qui surfe les déceptions par rapport aux régimes civils précédents, mais aussi sur un contexte international. Cette désaffection est le signe aussi d’un rejet du modèle occidental devant propager des valeurs. Ces Occidentaux, par rapport à ces mêmes valeurs, ont été eux-mêmes inconséquents à un moment. Finalement, ce sont les intérêt stratégiques immédiats qui ont toujours guidé leurs choix. Il y a non seulement un problème de démocratie, mais aussi de crédibilité du discours sur la démocratie. Par rapport à cela aujourd’hui, sous sommes dans une situation qu’on pourrait qualifier d’hybride et de paradoxale. Ces juntes ont joué avec une stratégie très claire. Par exemple au Mali, qui a toujours trouvé des boucs émissaires avec la France, Barkane, la CEDEAO et les soldats ivoiriens ou encore la MINUSMA, on voit que les militaires au pouvoir sont dans une logique de légitimation. En effet, le fait de mettre en avant l’idée selon laquelle leur souveraineté serait menacée, comme on le sait, mécaniquement, quand il y a menace extérieure autour d’un leadership qui s’est mis en opposition par rapport à un régime civil qui a duré au pouvoir »
Au Sénégal, certains analystes ont interprété une allusion du président Macky Sall sur l’attention à porter à « d’autres forces organisées » comme une invite faite à l’armée pour prendre le pouvoir au cas où les partis politiques et la société civile ne reviennent pas à la raison, en acceptant sa proposition pour un nouveau dialogue inclusif.
Pour le moment, les forces de défense et de sécurité ont la latitude d’exercer leurs droits de vote ; elles sont concurrencées dans certains rôles par des nervis aux services d’organisations politiques, elles ont été secouées dans certaines de leurs composantes par les affaires politiques avec des sanctions disciplinaires ou des disparitions physiques. Il faut souhaiter que l’esprit républicain et laïc puisse continuer d’inspirer la grande muette et ses sœurs dans leurs combats pour la sécurité nationale et leur contribution au développement social, économique et culturel.
En tout état de cause, il faut souhaiter et œuvrer avec l’élection présidentielle en 2024, à la victoire du camp de l’alternative qui s’engage à appliquer les conclusions des Assises Nationales et les recommandations de la Commission Nationale de Réforme des Institutions (CNRI). Ainsi une des premières mesures à prendre serait de revenir sur les crimes impunis, les condamnations injustes et demander pardon, au nom de la Nation aux familles des victimes. Ainsi la Nouvelle République à conduire partira sur de bons auspices.
Babacar Diop Buuba est Coordonnateur du mouvement citoyen
Taxaw Temm - Stand up – Debout.
[1] A propos dans la société civile, je renvoie à ma contribution dans M23 - chronique d’une révolution citoyenne, CONSUP, les éditions de la Brousse, 2014 sour le titre «La société civile et la refondation politique, économique et socio-culturelle, op. Cit. , p. 65 à 72
Concernant les relations entre les acteurs économiques et politiques, j’ai développé mes analyses dans les «Syndicats dans l’histoire; regards et partition universitaire,», Harmattan Sénégal 2019
Pour les questions spirituelles, idéologiques, religieuses, je renvoie à mon texte sur l’autorité des textes religieux dans les batailles politiques, idéologiques, in Propos d’Un Africain sur l’Antiquité, PUD, 2014, p. 298 à 308