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22 avril 2025
International
par Pape Samba Kane
PRÉSIDENTIELLE AU SÉNÉGAL : LA FRANCE VEUT JOUER EN ÉTANT SÛRE DE GAGNER
EXCLUSIF SENEPLUS - Paris tenterait à travers le décret français retirant la nationalité à Karim Wade de se racheter une conduite en Afrique après avoir perdu de nombreux soutiens. Mais son implication malavisée risque d'aggraver son déficit d'influence
La France veut-elle redorer son blason en Afrique sur le dos du Sénégal ? D'Europe 1, à RFI-France 24, en passant par une bonne partie de la presse écrite, le tout largement relayé par des sites internet dédiés ou non, les médias français s'en donnent à cœur joie sur le Sénégal, dans une sorte de bashing systématique, depuis le report de l'élection présidentielle au Sénégal ; et avec une telle frénésie, d'ailleurs, que des mots, quelque peu tabous pour eux et, à vrai dire, démodés, comme "Françafrique", "pré-carré", y sont convoqués à tout-va. Même le retoquage, par notre Conseil constitutionnel, du décret présidentiel du 3 février n'y a rien changé. Cela, après que le Quai d'Orsay, pour la première fois de toute l'histoire politique de notre pays, eut pris une position tranchée contre une décision de nature si éminemment politique d'un pouvoir en place chez nous, et réclamé la tenue de l'élection présidentielle à date. Cela, juste après l'annonce du Président Macky Sall. Il n'avait même pas attendu le vote de la loi par l'Assemblée nationale, prévu pour le lendemain seulement.
Face à des options politiques ou décisions gouvernementales contestées de son ancienne colonie chouchoute, la France s'était toujours réfugiée derrière une langue de bois d'ébène, quand elle n'avait pas été, de façon nette ou nuancée, en parfait accord avec ses gouvernants.
Avec la complexité de la situation ayant découlé de cette décision de reporter l'élection, elle-même partie d'une affaire inédite ou d'affaires toutes inédites chez nous, pas la moindre prudence n'a été observée par un pays étroitement lié au nôtre, et dont le moindre cillement d'yeux de ses officiels, même de second rang, sur ce qui se passe chez nous, est scruté et interprété dans tous les sens, souvent de façon subjective, parfois irrationnelle ! - Pas seulement de ses officiels d'ailleurs : la présence la plus remarquée lors du rassemblement de l'opposition, vendredi dernier, 16 février, en France est celle de Jean-Luc Mélenchon, leader de La France insoumise. De quelque façon, la France n'est jamais loin de nos affaires ; parfois, hélas, à la demande de nos politiques de tous bords.
Aujourd'hui plus que jamais, quand, touchée coulée sur le plan géopolitique par... Wagner - des "mercenaires" qu'ils disent -, elle cherche à quoi s'agripper pour surnager, ces railleries des médias français m'interpellent pour deux raisons, l'une relevant de la situation globalement inconfortable de l'ancienne puissance coloniale en Afrique de l'Ouest francophone, où les fondations mêmes de sa politique s'effondrent pilier après pilier, et de façon accélérée ; l'autre partant de ses relations étroites avec notre pays, dont une des manifestations - qui, me semble-t-il, est passée inaperçue aux yeux des observateurs - est directement liée à ce report de l'élection présidentielle - et donc forcément, à toutes ses consequences présentes et à venir. C'est ce décret portant déchéance de la nationalité française pour Karim Wade.
Parlons de cette dernière déjà !
Thierno Alassane Sall, qui avait saisi le Conseil constitutionnel sur la double nationalité de Karim, semblait bien en peine d'en apporter la preuve. Le Conseil constitutionnel, pour sa part, qui avait déjà enregistré et validé la déclaration sur l'honneur du candidat du PDS sur sa nationalité sénégalaise exclusive, n'a pas vocation, et certainement pas compétence d'enquêteur...
Ce décret venu de France - et qui apportait surtout la preuve qu'au moment de sa déclaration sur l'honneur Karim était encore français - n'avait assurément pas pour but de sauver la candidature du fils d'Abdoulaye Wade. Au contraire, et l'autorité française qui l'a fourni le savait très bien. Car au cas où il y aurait eu une brèche quelconque, Karim serait tombé, comme Mme Wardini, sous le coup de la loi, pour parjure.
On peut spéculer dans tous les sens sur ce décret, venu comme un cheveu sur la soupe déjà riche d'ingrédients étranges de cette élection présidentielle inédite au Sénégal, par les complications qu'elle charrie.
La France, par ce coup presque pour rien, sauf qu'il représente la goutte de trop ayant fait déborder le vase vers ce report controversé, tient à sa quête fiévreuse de se remettre dans le jeu en Afrique ! À trop bon compte, il me semble. Elle, qui ne sait plus où elle habite sur le continent noir, étant en train d'être chassée de partout sous les quolibets - "France dégage !", et autres haro - cherche à se remettre avec plus de confort autour de la table du poker géopolitique africain - et le Sénégal, quel que soit le régime qui s'y installera après celui de Macky Sall, en restera une carte majeure. Seulement, elle le fait avec une frénésie parfaitement improductive. Comme dernièrement après le coup d'État militaire au Niger, avec les mouvements de menton du président Macron. On a vu comment cela s'est terminé, la France est allée à Canossa face aux putschistes. - Pour en finir avec ce chapitre, au moment où je vais boucler ce texte, j'apprends par un quotidien (Dakar Times du 19/2) qu'il faut ajouter au grief des Occidentaux envers le Sénégal des accords militaires signés avec la Russie de Poutine par Macky Sall.
Marianne devrait prendre acte que les temps ont changé, peut-être prendre du recul, réfléchir plus longuement à comment se trouver une nouvelle place autour de la table. Avec une nouvelle mentalité. Jouer en étant sûr de gagner - comme elle en à l'habitude en Afrique depuis les indépendances - est la meilleure définition que l'on puisse donner au mot tricher.
Abdoulaye Wade, politicien hors classe et juriste chevronné, coach et principale ligne de défense de son fils, lucide, lui - et c'est soit dit en passant - à choisi cette belle confusion apportée par Paris pour remettre son parti en jeu dans une partie dont il avait été exclu, tout en faisant oublier, dans le brouhaha généralisé, le parjure de fiston. Et ça, ça va être absorbé, dissous dans le dialogue prévu. La très rapide remise en liberté de Mme Rose Wardini l'augure parfaitement.
Macky, lui, et son parti, boivent du petit lait.
Parce que, même si la dernière carte du président a été annulée par le Conseil constitutionnel, la nature hypertrophiée de notre présidentialisme a fait que les sept sages n'ont pu que (ne pouvaient que) remettre la main à Macky Sall, aujourd'hui encore à la tête de son administration, celle-ci chargée d'organiser l'élection, à une date que Sall choisira, le plus rapidement (certes) possible. Vu sa position inconfortable, il ne le fera pas sans concertation avec son opposition, et tous ces gens qui grenouillent autour des politiques pour grappiller de la renommée ou du cash, et que l'on nomme "société civile". Ainsi, le président Sall redevient maître du jeu politique, un jeu qu'il devra quitter le 2 avril prochain, quoi qu'il en soit.
Seulement, à cause de ce présidentialisme... royal - dont nous sommes tous comptables et que personne ne veut vraiment changer - mille possibilités lui sont ouvertes de peser sur l'avenir politique immédiat de ce pays ; surtout si l'on prend en compte toutes ces spéculations autour des raisons qui fondent ces libérations en veux-tu en-voilà de ces centaines de prisonniers dits politiques.
Si la France de Macron, dont on dit aussi qu'elle ne lui a jamais pardonné d'avoir ouvert sa porte à Marine Le Pen - principale menace pour Macron à l'horizon - a jeté ce pavé dans la mare, pensant ainsi sauver ses derniers meubles par la réhabilitation de Karim Wade, et jouer donc, par ricochet, la carte d'une opposition radicale donnée favorite - et depuis quelques temps couvée par ses médias -, eh bien, c'est tout l'effet contraire qui s'est produit...
On verra ce que le pouvoir marron beige et ses alliés feront (politiquement s'entend et dans le cadre de la loi) de l'aubaine d'avoir à fixer une date pour l'élection, qui leur est retombée entre les mains, fournie par un Conseil constitutionnel qui ne pouvait pas faire autrement, n'ayant pas pour vocation d'organiser des élections (et donc d'en fixer la date), mais de les arbitrer !
15 CANDIDATS EXIGENT LA TENUE DE L'ÉLECTION AVANT LE 2 AVRIL
Les candidats considèrent que la liste des 20 prétendants validée en janvier par le Conseil constitutionnel doit être respectée. Ils déplorent qu'aucune mesure n'ait été prise par les autorités pour exécuter la décision de cette institution
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 19/02/2024
Quinze des vingt candidats retenus en janvier dernier pour l'élection présidentielle sénégalaise ont exigé dans un communiqué consulté par l'AFP que le scrutin ait lieu au plus tard le 2 avril prochain, date d'expiration officielle du mandat du président sortant Macky Sall.
Selon une source fiable de l'Agence France-Presse, les candidats assurent que la liste des vingt prétendants entérinée par le Conseil constitutionnel en janvier reste intangible. Ils constatent "avec amertume" que depuis la décision de l'institution "aucun acte n'a été posé par les autorités dans le sens d'exécuter celle-ci", peut-on lire dans le communiqué signé notamment par l'ancien maire de Dakar Khalifa Sall et le candidat anti-système Bassirou Diomaye Faye.
Cette prise de position intervient alors que les Sénégalais ignorent toujours la date du prochain scrutin présidentiel après l'invalidation par le Conseil constitutionnel de la décision du chef de l'État Macky Sall de reporter l'élection. Ce dernier a toutefois assuré vendredi son intention de "mener sans tarder les consultations nécessaires pour l'organisation de l'élection dans les meilleurs délais", comme le requiert la plus haute juridiction du pays.
Les quinze candidats signataires du communiqué, parmi lesquels ne figurent pas le Premier ministre Amadou Ba ni les anciens chefs de gouvernement Idrissa Seck et Mahammed Boun Abdallah Dionne, exigent donc que le second tour de la présidentielle se tienne au plus tard le 2 avril prochain, date d'expiration du mandat en cours.
par l'éditorialiste de seneplus, pierre sané
LE PRÉSIDENT DOIT DEMANDER PARDON AU PEUPLE SÉNÉGALAIS
EXCLUSIF SENEPLUS - Il nous appartient de nous assurer qu’il nous organisera une élection sans « tricheries ». Ce qui demeure un défi majeur y compris le jour du scrutin. La vertu n’est pas une marque de fabrique de ce régime
Au Sénégal, on se dirigeait cahin-caha vers une élection présidentielle qui devait enfin clore un magistère heurté et en ouvrir un nouveau plus serein. Comme précédemment le processus électoral avait été marqué par les controverses habituelles liées au Code électoral, au fichier, à la participation d’Ousmane Sonko, au système de parrainage, etc. Rien de nouveau. Le président avait encore convoqué un dialogue visant à produire un accord porté ensuite par un projet de loi et un passage à l’Assemblée. S’étant enfin assuré de l’exclusion d’Ousmane Sonko, le président avait émis un décret convoquant le corps électoral à une date permettant l’investiture du nouveau président dans les délais constitutionnels. Le Conseil constitutionnel avait achevé son travail en validant 20 candidatures et en suscitant les mécontentements usuels. La campagne électorale pouvait enfin commencer, annonçant le début de la fin. Les Sénégalais, le peuple souverain attendaient patiemment ce rendez-vous de la délivrance.
Et puis patatras !
Le 3 février, le président nous annonce d’un ton péremptoire, en trois minutes et avec deux heures de retard, « J’annule tout ». Pourquoi ? A cause d’accusations de corruption épinglant deux membres du Conseil. La majorité parlementaire dans la précipitation en profita pour allonger la durée du mandat du président en lui servant son fameux « dessert.» Le tout en trois jours et en violation flagrante des dispositions intangibles, constitutionnelles.
L’incroyable légèreté des raisons avancées avec désinvolture et la mauvaise foi manifeste ont suscité un tollé général dans le pays ainsi qu’à l’international. La riposte s’est alors organisée autour d’un non massif et résolu. La répression est encore une fois violente avec un usage excessif de la force par la gendarmerie, causant la mort de trois jeunes sénégalais tués par balles réelles et s’ajoutant aux soixante victimes des répressions sanglantes de juin 2021 et mars 2023. Macky Sall s’est alors rendu compte qu’il s’était engouffré dans une impasse et a commencé a se chercher désespérément une porte de sortie. Comment se sort-on d’une voie sans issue ? Pourtant le panneau de sens interdit était clairement affiché !
Le Conseil constitutionnel s’étant ré-approprié ses compétences a statué que Macky Sall et sa majorité parlementaire avaient violé la Constitution du pays et le Conseil a procédé purement et simplement a l’annulation des textes soumis. Injonction ayant été donné à l’exécutif de poursuivre le processus électoral et d’organiser l’élection dans les délais permettant d’éviter une vacance dans l’exercice de la fonction présidentielle. Ce à quoi le président s’est engagé.
Va-t-il s’y tenir ? Il faut dire qu’il y a une rupture de confiance entre le peuple et son président. Faut-il le croire ?
Car la question qui interpelle, c’est pourquoi ? Pourquoi avoir crée cette crise dont les conséquences sont désastreuses ? En matière de vies perdues, de blessés, de nouvelles cohortes d’arrestations, de pertes économiques, de dysfonctionnements institutionnels, de dégringolade de la réputation internationale du Sénégal ? A deux mois de son départ de la tête du pays ?
Pourquoi ? Ignorance coupable de la Constitution ? Violation délibérée de notre pacte fondamental ? Assurance que le Conseil constitutionnel allait entériner cette forfaiture ? Peur obsessionnelle de perdre le pouvoir au profit d’une alternative populaire et déterminée ? Sans réponse à ces questions quelles garanties avons-nous que le président va se soumettre aux injonctions du Conseil constitutionnel ?
Il semblerait que le discours du 3 février ait été une réponse angoissée à la probabilité d’une victoire du candidat du Pastef. Contrairement à ce que disent certains, Macky Sall n’avait rien planifié, n’a rien anticipé et n’a pas de stratégie de sortie de crise. Il s’agite dans l’improvisation au jour le jour à la recherche de voies de contournement de la loi et des règles, et de pare-feux pour contrer les incendies qu’il a lui même allumés. C’est un homme sans convictions avec une prédilection pour les coups tordus, mais il reste affligé du handicap de l’incompétence. Le seul cap qui l’obnubile, c’est la conservation du pouvoir le plus longtemps possible et la main basse sur le pétrole. « Apaisement », « Dialogue », « Réconciliation » ne sont que des parades destinées à gagner du temps.
Va-t-il se résoudre maintenant à suivre le droit chemin en commençant par demander pardon aux familles de toutes ces victimes abattues par sa police ?
Il n’y a que deux possibilités pour une nouvelle date du scrutin : les dimanches du 3 mars ou du 10 mars. C’est un problème technique auquel les « services compétents » doivent s’atteler comme requis par le Conseil constitutionnel. Nul besoin de dialogue. Avait-il dialogué avant de convoquer le corps électoral initialement ? Avait-il dialogué avant d’annuler cette convocation ?
Le dialogue semble être “l’arme fatale”de Macky Sall.
L'Arme fatale (Lethal Weapon) est une comédie policière américaine réalisée par Richard Donner et sortie en 1987. C'est le premier opus d'une série de quatre films, poursuivie avec L'Arme fatale 2 (1989), L'Arme fatale 3 (1992) et L'Arme fatale 4 (1998). Même réalisateur, mêmes acteurs (Mel Gibson, Dani Glover) même histoire, même scénario, même épilogue. On s’en lasse ! D’ailleurs, un 5ème film initialement prévu en 2020 n’a toujours pas vu le jour. Ce qui sera probablement le sort du nouveau dialogue qu’on nous annonce.
Notre président s’inspire d’une comédie policière pour nous servir une comédie politique à répétition et de très mauvais goût. Car dans une démocratie, le dialogue est permanent et ne saurait être circonscrit à un événement circonstanciel au palais de la République. Le dialogue requiert une certaine disposition d’esprit fondée sur une culture démocratique, animé par une bonne foi réelle et une capacité d’écoute sincère. Attributs qui font cruellement défaut à notre président.
Comment convaincre le peuple qu’on est ouvert au dialogue lorsqu’on ferme la télévision Walfadjiri à sa guise et qu’on bâillonne les “sans voix”? Se privant ainsi de la possibilité de les entendre sans filtre ? Comment convaincre la classe politique lorsqu’on interdit l’accès à la télévision nationale de candidats validés pour l’enregistrement de leurs messages de campagne ? Ou lorsqu’on aboutit en prison pour un post Facebook comme le Secrétaire général du Pastef ?
Quelle est l’opportunité d’un dialogue après avoir pris une décision qu’il faut maintenant avaliser et où il s’agit en fait d’en gérer les conséquences ? Par ”consensus presidentiel” ? Qu’est-ce que ce dialogue fondamentalement asymétrique ou les conclusions sont portées au président pour décision selon son bon vouloir ? C’est quoi ce dialogue ou les communicants du pouvoir se sont immédiatement mis à caqueter : Sonko « inflexible » face à la « mansuétude » du président ?
Au Sénégal, on réprime violemment pour « préserver la paix », on gaze les manifestants pacifiques pour les amener à « dialoguer », on tue pour « contenir la violence », on libère des détenus innocents pour faire de la place pour de nouvelles cohortes de détenus tout aussi innocents et ce pour “apaiser” la situation. Une terminologie plus appropriée serait :”Otages”.
Au fond, le président appelle à un dialogue pour négocier une amnistie générale destinée bien sûr à couvrir ses propres crimes et ceux de ses complices. Encore faudrait-il qu’ils demandent pardon au préalable. Et que dire de sa dernière trouvaille, son appel immoral à l’armée ?
Quand Macky Sall s’essaie à la subtilité, sa balourdise naturelle reprend le dessus. La menace et le chantage sont tellement lumineux que tous les Sénégalais comprennent aussitôt. Il nous dit en français facile, soit vous acceptez mon décret d’annulation et de report, soit je remets les clés du palais à l’armée.
Nous Sénégalais propriétaires de ce pays, propriétaires du pétrole et du gaz, propriétaires de ce palais, propriétaires de ce mandat, n’avons pas notre mot à dire
Quelle outrecuidance ! Quelle morgue ! Quelle arrogance!
Il pense ainsi pouvoir réaliser son ambition déclarée de réduire l’opposition à sa plus simple expression en installant au moment de son départ un régime militaire pour parachever son obsession. De fait, il traite désormais tous les Sénégalais en ennemis, puisqu’ils se sont rangés majoritairement du côté de l’opposition
A-t-il renoncé ?
Ce président aura tout simplement été une calamité pour le Sénégal. Chaque fois qu’il commet une illégalité, il nous surprend encore en tombant plus bas. Et quand il atteint le fond, il continue à creuser tel un forcené. Et certains veulent aller dialoguer avec un homme qui déclenche un coup d’État et après aspire à le prolonger avec un putsch. Faire une passation de service volontaire avec un gradé de l’armée ? On aura tout vu.
Quand on est dans une impasse, il faut tout simplement admettre qu’on s’est trompé de chemin et faire demi-tour avant qu’il ne soit trop tard. Un président a le droit de faire preuve d’humilité et de demander pardon.
Mais je ne suis pas sûr qu’il pourra trouver cette disposition dans son fumeux“code d’honneur“ou ce qu’il en reste. Il nous appartient donc de lui imposer le chemin et de nous assurer qu’il nous organisera une élection sans « tricheries », ce qui demeure un défi majeur y compris le jour du scrutin. Car la vertu n’est pas une marque de fabrique de ce régime.
Le Conseil constitutionnel a indiqué la voie de sortie de l’impasse.
Par Dialo DIOP
QUI DONC A PEUR DU SUFFRAGE UNIVERSEL EN AFRIQUE ?
Tel un poing dans un gant de velours, Macky Sall appelle l’opposition véritable à un énième « dialogue national », tout en la réprimant férocement et en la menaçant aujourd’hui d’un possible coup d’Etat militaire (1/2)
Première partie : Senghor, père du système du parti-État
Tel est pris qui croyait prendre, dit la fable !
Ivre de son pouvoir absolu, le président sortant Macky Sall, usant et abusant de la force et de la ruse, est tombé dans son propre piège. Il est en effet passé maître dans l’art pervers de dire et de se dédire, de faire puis de défaire, de signer telle quelle la Charte de gouvernance démocratique des Assises Nationales comme candidat, avant d’y annexer des réserves fictives une fois installé au palais présidentiel, prétextant qu’il ne s’agit « ni de la Bible, ni du Coran », de se proclamer « gardien de la Constitution » tout en la foulant aux pieds chaque fois que de besoin, etc.
Sentant sa fin prochaine, voilà qu’il s’affiche désormais en apprenti-dictateur, évoluant ouvertement vers une dictature déclarée et assumée : tel un poing dans un gant de velours, il appelle l’opposition véritable à un énième « dialogue national », tout en la réprimant férocement et en la menaçant aujourd’hui d’un possible coup d’Etat militaire !
Mettant ainsi brutalement fin à la prétendue « exception sénégalaise » en Afrique, avec l’effondrement désormais évident de la vitrine trompeuse du tant vanté « modèle de stabilité démocratique », au terme d’une longue agonie de plus d’un demi-siècle…
Une rétrospective historique s’impose, même réduite à la seule dimension politico-électorale de la question démocratique en Afrique, avec le Sénégal pris pour « type de description »
Rappelons d’abord qu’au temps de la domination coloniale directe, le droit de vote était réservé à une minorité de « citoyens français » (dont une poignée d’autochtones et de métis), l’immense majorité des « sujets indigènes » en étant « légalement » exclue par le sinistre Code de l’Indigénat, qui ne sera aboli qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale (1946).
Par la suite et jusqu’à la cascade des fausses indépendances octroyées, consécutives à l’unique et retentissant « Non » historique de Sékou Touré au pseudo-référendum de Charles de Gaulle (1958), c’est le régime hybride du « double collège » électoral qui va prévaloir.
Depuis lors, nous continuons à subir une domination indirecte de type néocolonial. Au sein de l’ancien empire français d’Afrique, le mode privilégié d’accession au pouvoir d’Etat, et de sa transmission, reste le modèle dévoyé d’Haïti, première république libre, c’est-à-dire non esclavagiste, des Amériques et de la Caraïbe (1804) : coups d’Etat à répétition, avec ou sans assassinat du président déchu, élections truquées et donc violentes, dictature du clan Duvalier (père et fils) avec ses milices armées (Tonton macoutes), trafics en tous genres, etc.
Signalons à titre de comparaison, qu’aux États-Unis d’Amérique, après l’abolition formelle de l’esclavage à la fin de la Guerre de Sécession (1865), les Africains déportés vont devoir poursuivre leur lutte d’émancipation durant un siècle supplémentaire avant d’arracher le droit de voter (1965), un an après l’obtention des droits civiques ayant mis fin à la ségrégation raciale dans les lieux publics ! Tandis qu’en France républicaine, le même droit de vote n’a été reconnu aux femmes qu’en 1947 !
Soulignons, par ailleurs, que le plus ancien mouvement africain de libération, l’ANC d’Afrique du Sud fondé en 1912, (avant la révolution bolchévique en Russie) fut le dernier à accéder au pouvoir en n’arrachant le droit de vote au régime d’apartheid afrikaner qu’en 1994 (après la désintégration de l’URSS) ! Un scrutin sans listes électorales ni carte d’électeur, qui s’est déroulé paisiblement dans l’ensemble du pays, sauf au Kwazulu Natal dont le chef Buthelezi s’est désespérément opposé au principe majoritaire du suffrage universel : une personne, une voix.
Pour en revenir au Sénégal officiel, chacun sait qu’après le « Oui » frauduleux lors du référendum gaulliste et l’éclatement provoqué de l’éphémère Fédération du Mali, le 20 août 1960, c’est l’élimination machiavélique de l’aile nationaliste du premier gouvernement de l’Union Progressiste Sénégalaise (UPS), incarnée par le Président du Conseil Mamadou Dia et celle de ses compagnons d’infortune, victimes du faux coup d’Etat du 17 décembre 1962, qui va faire basculer durablement le pays dans l’impasse du néocolonialisme senghorien.
Dès 1963 et dans la foulée du pseudo-référendum constitutionnel truqué, l’élection présidentielle senghorienne du 1er décembre va se solder par le massacre de centaines de citoyens par l’armée, à partir d’hélicoptères, aux Allées du Centenaire notamment…
Une tragédie occultée dans la mémoire collective, marquant pourtant l’avènement du système de Parti-Etat, qui perdure jusqu’à nos jours. Ce monolithisme politique va se doubler d’un monolithisme syndical, au lendemain de la grève générale des étudiants et des travailleurs de mai-juin 1968, sanctionnée par la dissolution de l’UNTS au profit de la CNTS, adepte de la « participation responsable ». Ainsi, ce que l’on pourrait appeler la première année blanche scolaire et universitaire au Sénégal date-t-elle de 1969. Mais, la persistance de cette crise politique, économique et sociale va contraindre le président Senghor d’abord à se doter d’un Premier Ministre (Abdou Diouf : 1970), puis à tolérer la création d’un parti non pas d’opposition, mais dit de « contribution » (PDS d’Abdoulaye Wade :1974). Il va, par contre, s’opposer jusqu’au bout à la reconnaissance du Rassemblement National Démocratique (RND) de Cheikh Anta Diop, de 1976 à 1981, n’hésitant pas à recourir à une « loi constitutionnelle » sur mesure, selon laquelle il n’existerait que trois courants de pensée politique dans le monde contemporain: le « socialisme démocratique» pour son propre parti devenu socialiste (PS), le « libéralisme démocratique » imposé au PDS Me Wade, qui se réclamait jusqu’alors du « travaillisme », et enfin le « marxisme-léninisme » proposé au RND.
Si Me Wade s’est plié à ce diktat idéologique, Cheikh Anta Diop s’y refusa catégoriquement, s’étonnant de l’absence du panafricanisme dans cette « nomenclature idéologique » ad hoc !
Tout au contraire, fort de son bon droit et récusant l’option de la clandestinité, il va poursuivre au grand jour l’édification d’un parti de masse. N’hésitant pas à interpeller le chef du parti-Etat par lettre ouverte ou à lancer le journal du RND, Siggi qui deviendra Taxaw, afin d’échapper à une interdiction pour faute d’orthographe ; ou bien à pétitionner massivement, à l’intérieur du pays comme à l’étranger, pour la légalisation du parti, ou encore à pousser à la fondation du premier Syndicat des Cultivateurs, Éleveurs et Maraîchers du Sénégal, qui fonctionne encore près d’un demi-siècle plus tard…
Par ailleurs, il convient de relever qu’avant sa démission pour prendre une retraite politico- administrative en France, le proconsul français Senghor a pris le soin d’installer au pouvoir son Premier Ministre Abdou Diouf, à la faveur d’une autre manipulation constitutionnelle par voie parlementaire, (article 35 ancien) lui permettant d’achever le mandat en cours…
Cependant, dès son accession au sommet de l’Etat, le successeur désigné fit mine de prendre le contrepied de son bienfaiteur. Notamment, en initiant une certaine ouverture du jeu politicosyndical et médiatique. Au-delà d’un multipartisme élargi, et non pas intégral, inauguré par la reconnaissance du RND, il va favoriser un pluralisme syndical ainsi qu’une relative liberté de la presse tant écrite qu’audio-visuelle, notamment à la radio-télévision d’Etat. Malgré ces avancées démocratiques limitées, cet héritier politique de Senghor va suivre ses pas pour l’essentiel ; d’abord en persistant dans la violation délibérée de l’article 32 ancien de la Constitution, qui interdisait le cumul des fonctions de chef de l’Etat et de chef de Parti : un « maa tey » fondamental, base même du système du Parti-Etat et source de tous les abus de pouvoir. Cette disposition légale restera néanmoins lettre morte jusqu’à la survenue de l’alternance en l’an 2000. Sauf que le nouveau président Wade, en bon politicien opportuniste, la contournera en supprimant purement et simplement cette incompatibilité dans sa Constitution de 2001 ! De plus, cette dernière, qui a institué le droit à la marche pacifique, sera par la suite annulée de facto, par l’interdiction de manifester au centre-ville de Dakar sur simple arrêté de son ministre de l’Intérieur du moment, Ousmane Ngom…
De même, l’on ne saurait passer sous silence la tragédie du 16 février 1994 qui, au terme d’un meeting légal tenu à Gibraltar sur demande du RND, dans le cadre de la Coordination des Forces Démocratiques (CFD), donnera lieu au massacre d’au moins une demi-douzaine de policiers innocents par des éléments infiltrés, au Triangle Sud : un crime de sang demeuré impuni à ce jour…
Enfin et surtout, après vingt ans au pouvoir, le président Abdou Diouf va solliciter un septennat supplémentaire, ce qui lui sera fatal à l’issue d’un second tour remporté par une coalition de coalitions de l’opposition au sein d’un « Front pour l’Alternance » (FAL 2000).
A l’image de son prédécesseur, il va s’offrir une retraite dorée en métropole, tous deux embrigadés au service de la « défense et de l’illustration » de la culture française !
Dès son avènement tardif, le prétendu « Pape du Soppi », d’emblée ivre de pouvoir, va réduire le changement promis au simple renouvellement partiel du personnel politicien dirigeant, tout en pratiquant sans aucune gêne une continuité aggravée dans sa politique tant intérieure qu’extérieure. Deux exemples suffisent pour en témoigner :
D’une part en début de mandat (2002), survient le naufrage du bateau le Joola, avec environ deux mille morts. Ce qui en fait la plus grande catastrophe de l’histoire de la marine marchande en temps de paix, quoique le navire fût sous commandement militaire…
Ce traumatisme massif a marqué la rupture du contrat de confiance qui, croyait-on, liait le père Wade à « son peuple ». En tout cas, une cassure brutale aggravée par la gestion calamiteuse des suites humaines et administratives de la tragédie, avec la tardiveté des secours, le refus de renflouer l’épave et surtout le traitement scandaleux réservé au rapport accablant de la commission d’enquête.
D’autre part en fin de mandat, cet adepte autoproclamé du « panafricanisme » va jeter le masque lors de l’agression tripartite franco-anglo-étatsunienne (OTAN) contre le chef de l’Etat libyen, Mouammar Kadhafi (2011). D’abord en sabotant la mise en œuvre de la résolution consensuelle du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine en faveur d’une médiation entre belligérants libyens, ensuite et surtout en conduisant son infâme mission à Benghazi, accompagné de son fils Karim et sous escorte aérienne militaire française, avec une couverture en direct des radio-télévisions françaises…De ce fait, le père Wade aurait dû être traduit devant la Haute Cour de Justice pour flagrant délit de haute trahison de l’Afrique. Deux décennies plus tard, les peuples soudano-sahéliens continuent de payer un lourd tribut humain, économique et écologique pour cette forfaiture demeurée impunie.
Pourtant, ce n’est pas ce crime aux conséquences dévastatrices pour notre continent qui va coûter son trône au président Wade, mais plutôt sa tentative à peine voilée d’organiser une succession de type dynastique en faveur de son fils bien-aimé. Ceci, sous le couvert d’une énième manipulation de la Constitution via la Chambre d’enregistrement parlementaire.
Il aura fallu le soulèvement massif du peuple de Dakar et sa banlieue, un mémorable 23 juin 2011, autour de la bien nommée Place de Soweto (une fois n’est pas coutume !), où siège l’Assemblée nationale, pour le contraindre à renoncer à son projet de révision scélérate. Ce désaveu populaire du président sortant, briguant un troisième mandat inconstitutionnel, se verra confirmé quelques mois plus tard par une humiliante défaite électorale au second tour, face à une nouvelle coalition de coalitions qui, ironie de l’histoire, bénéficiera à un de ses anciens poulains, injustement banni !
L'UA ACTE L'EXCLUSION OFFICIELLE D'ISRAËL DE L'ORGANISATION
Israël n'est désormais plus le bienvenu à l'Union africaine. Après une expulsion mouvementée il y a un an et les critiques contre son offensive à Gaza, l'État hébreu se voit définitivement privé de son statut d'observateur
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 18/02/2024
Après des années de tensions, l'Union africaine (UA) a officiellement retiré son statut d'observateur à Israël lors de son sommet qui s'est tenu du 17 au 18 février 2024 à Addis-Abeba, en Éthiopie. Cette décision marque la fin d'un long débat sur la présence de l'État hébreu au sein de l'organisation panafricaine.
L'incident qui avait précipité ce retrait de statut s'était produit en février 2023. Une délégation israélienne avait alors été expulsée sans ménagement de l'Assemblée générale de l'UA alors que se tenaient les discussions entre chefs d'États africains. L'Afrique du Sud et l'Algérie s'opposaient fermement au statut d'observateur d'Israël. Cependant, la question n'avait pas été officiellement tranchée à l'époque.
Un an plus tard, le débat a été définitivement clos suite à l'opération militaire d'Israël dans la bande de Gaza en octobre 2023. "Le dossier concernant l’accréditation d’Israël est clos", a déclaré un haut cadre de l'UA cité par Le Monde. La porte-parole de la commission de l'UA, Ebba Kalondo, a précisé que "Israël n’est pas invité au sommet" . Après deux ans en tant qu'observateur, Israël se retrouve donc exclu de l'institution.
À l'inverse, l'Autorité palestinienne était au centre des discussions. Le Premier ministre palestinien Mohammad Shtayyeh, invité à la tribune, a reçu de longs applaudissements pour son discours sur la défense de la Palestine face au colonialisme. Les dirigeants africains présents ont vivement condamné les actions d'Israël à Gaza, qualifiées de "plus flagrante violation du droit humanitaire international" par le président de la Commission de l'UA, Moussa Faki Mahamat.
L'Afrique du Sud, à l'origine du dépôt d'une plainte contre Israël devant la Cour internationale de justice (CIJ) pour "génocide" contre les Palestiniens, a été félicitée. En janvier 2024, la CIJ a effectivement donné raison à Pretoria sur ce point, une victoire "célébrée" à l'UA selon la chercheuse Liesl Louw-Vaudran.
Toutefois, l'influence d'Israël sur le continent africain reste importante, fruit d'années de diplomatie intensive depuis les années 2010 selon Le Monde. Bien que banni formellement, des représentants israéliens ont encore été aperçus à Addis-Abeba pendant le sommet. Israël continue à entretenir des relations étroites avec de nombreux pays africains dans les domaines de la sécurité, du renseignement et de la défense.
DIOMAYE PRÉSIDENT EXIGE LE RESPECT DE L'ÉCHÉANCE PRÉSIDENTIELLE
La coalition veut une date de vote avant le mandat la fin du mandat de Macky Sall. Elle exige aussi plus de transparence et la libération de ses candidats emprisonnés
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 18/02/2024
La situation politique reste tendue après la décision du Conseil constitutionnel censurant le report des élections et annulant la révision constitutionnelle visant à prolonger le mandat du président Macky Sall. Dans un communiqué publié le 17 février, la coalition Diomaye Président dirigée par le candidat Bassirou Diomaye Diakhar Faye s'est fait l'écho des attentes du peuple sénégalais en matière de transparence et de respect du calendrier électoral.
Tout d'abord, la coalition a tenu à présenter ses "condoléances attristées au peuple sénégalais", faisant référence aux morts lors des récentes manifestations contre le report du scrutin. Elle a affirmé partager "la peine et la douleur que vivent tous nos compatriotes" dans ce "contexte douloureux".
Sur le fond, la coalition s'est félicité de la décision du Conseil constitutionnel qui, selon une citation du communiqué, "consolide nos acquis démocratiques et raffermit le pacte républicain remis en cause par le report illégal du scrutin". Elle a en particulier souligné l'annulation de la loi visant à prolonger le mandat du président et la confirmation que "la date de l'élection ne peut être reportée au-delà de la durée du mandat".
C'est pourquoi la coalition "exige le respect strict de cette échéance indépassable dans la détermination d'une nouvelle date du scrutin", qui devra donc se tenir "impérativement avant l'expiration du mandat du président de la République (le 2 avril)".
Elle a également appelé à "une plus grande transparence du processus électoral" à travers une "vérification accrue du fichier électoral et des mécanismes de surveillance et de supervision du vote". Le communiqué précise également que "tous les candidats doivent être soumis au principe constitutionnel de l'égalité de traitement", estimant que la libération du candidat Bassirou Diomaye Diakhar Faye est une "exigence populaire et respectueuse de la Constitution".
La coalition Diomaye Président a par ailleurs demandé la libération "urgente" d'Ousmane Sonko, leader de l'opposition, tout en se félicitant de celle des autres "détenus politiques". Elle a appelé à libérer les "prisonniers politiques encore injustement incarcérés".
Elle a enfin invité "les forces vives de la nation à rester vigilantes" et interpellé "la communauté internationale" afin de faire respecter par le gouvernement sénégalais "ses engagements internationaux" et les "droits fondamentaux des citoyens".
LE SOMBRE DIAGNOSTIC DE CLÔTURE DU SOMMET DE L'UNION AFRICAINE
Le 37e sommet de l'Union africaine, qui s'est achevé le 18 février à Addis-Abeba, a laissé transparaître de sérieuses inquiétudes quant à la déstabilisation croissante que connaît le continent
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 18/02/2024
Le 37e sommet de l'Union africaine, qui s'est achevé le 18 février à Addis-Abeba, a laissé transparaître de sérieuses inquiétudes quant à la déstabilisation croissante que connaît le continent, selon les propos tenus en clôture par l'ambassadeur Bankole Adeoye, Commissaire du Conseil paix et sécurité de l'organisation.
Comme le rapporte RFI dans son compte rendu, M. Adeoye a fait part des craintes exprimées par les chefs d'État et de gouvernement participant à ce sommet au sujet de la multiplication des putschs militaires en Afrique ces derniers mois. Il a notamment cité les six pays actuellement suspendus de l'UA pour ne plus respecter la voie démocratique : trois pays du Sahel (Mali, Burkina Faso, Guinée), le Gabon et le Soudan.
Le commissaire a rappelé la politique de "zéro-tolérance" adoptée par l'Assemblée face aux changements anticonstitutionnels de pouvoir, avec la suspension systématique des pays concernés. Il a également insisté sur le soutien apporté par l'UA aux processus de transition afin de restaurer l'ordre constitutionnel, via des programmes menés avec des partenaires comme le PNUD.
Tout en reconnaissant les défis, Bankole Adeoye a souligné les progrès accomplis sur la voie du renforcement démocratique, avec pas moins de 13 élections observées l'an dernier et 15 à venir cette année. Il a aussi mis en avant la nécessité d'opérationnaliser la Force africaine en attente pour intervenir dans les crises, ainsi que le rôle clé joué par le président angolais dans le dossier de la RDC.
En dépit de ces avancées, ce sommet a aussi montré les divisions persistantes entre nombre d'États membres sur certains des conflits évoqués. À l'heure où l'UA rejoint le G20, certains observateurs s'interrogent sur sa capacité à trouver des positions communes face aux enjeux sécuritaires du continent.
L'ASSEMBLÉE NATIONALE DÉNONCE UN REVIREMENT JURISPRUDENTIEL DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
Selon le parlement, l'annulation de la loi actant le report de la présidentielle constitue "une immixtion dans le domaine réservé du législatif" et "porte atteinte à la souveraineté du pouvoir constituant parlementaire"
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 18/02/2024
L'Assemblée nationale du Sénégal a vivement réagi à la décision rendue le 15 février dernier par le Conseil constitutionnel concernant le report de l'élection présidentielle. Dans un communiqué publié le 18 février, l'institution parlementaire dénonce "un revirement jurisprudentiel" de la part du juge constitutionnel.
En effet, par cette décision, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelle la loi portant dérogation à l'article 31 de la Constitution, adoptée à la majorité qualifiée par l'Assemblée nationale le 5 février. Cette loi visait à corriger les "nombreux dysfonctionnements" constatés dans le processus de validation des candidatures à la présidentielle, selon les termes du communiqué parlementaire.
Pour l'Assemblée nationale, la censure de cette loi constitutionnelle "remet en cause la souveraineté du pouvoir constituant de l'institution parlementaire".
Tout en prenant acte de la décision du juge constitutionnel, l'Assemblée nationale réaffirme son "attachement aux valeurs de démocratie et plus particulièrement à la séparation des pouvoirs", selon le communiqué.
LE SÉNÉGAL APPELÉ À PLUS D'EXEMPLARITÉ DÉMOCRATIQUE
"Pour avancer réellement, et accéder au statut de démocratie impeccable, dont il se flatte, le Sénégal devrait cesser de se comparer à son environnement francophone, pour se mesurer aux démocraties anglophones, lusophones du continent"
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 18/02/2024
Selon Jean-Baptiste Placca, éditorialiste à RFI, le Sénégal devrait s'inspirer des démocraties anglophones et lusophones d'Afrique, comme le Cap-Vert voisin, afin de faire progresser durablement son système démocratique.
Dans son éditorial du 17 février, il estime que "pour avancer réellement, et accéder au statut de démocratie impeccable, dont il se flatte, le Sénégal devrait cesser de se comparer à son environnement francophone, pour se mesurer aux démocraties anglophones, lusophones du continent".
Selon l'éditorialiste, la crise politique récente autour du report des élections a mis en lumière certaines faiblesses des institutions sénégalaises. "Peut-être n'ont-ils pas, en leurs institutions, la confiance qu'ils proclament", souligne-t-il, en questionnant la capacité du Conseil constitutionnel à s'imposer face au pouvoir exécutif.
Toutefois, la décision du Conseil constitutionnel invalidant le report du scrutin a "désamorcé la crise" et démontré, selon M. Placca, l'importance de disposer "d'institutions fortes", à l'image des démocraties anglophones et lusophones qui "respectent davantage les décisions de leurs juridictions suprêmes".
L'éditorialiste conclut en appelant le Sénégal à s'inspirer des "efforts" fournis par des pays comme le Cap-Vert pour parvenir à un système démocratique "impeccable". Une remise en question nécessaire selon lui pour renforcer durablement l'État de droit et la confiance des citoyens en leurs institutions.
PAR Ciré Clédor Ly
INQUIÉTUDES ET LIBRE OPINION D’UN MILITANT DES DROITS DE L'HOMME
EXCLUSIF SENEPLUS - Si aucune date n’est fixée pour le jour de l’élection, la situation sera davantage plus confuse et les effets pervers du coup d’Etat institutionnel avorté se feront sentir
Le Sénégal a été considéré comme le pays le plus stable en Afrique, en raison de ses valeurs républicaines et de son ancrage à la démocratie ainsi qu'à l'État de droit.
ous les régimes politiques qui se sont succédé ont pu conjurer les crises politiques, grâce à l'usage d'une violence d'État strictement proportionnée et nécessaire au rétablissement de l'ordre et de la sécurité publique.
Celui qui nommait aux emplois civils et militaires disposait de la force publique, mais avait toujours à l’esprit la primauté du droit, l’impérieuse nécessité du respect de l'équilibre des pouvoirs, la cohésion sociale dont le cousinage réel ou mythique était un socle garant de la paix et de la stabilité.
La paix et l’image du Sénégal étaient à leurs yeux inestimables ; la concertation, le dialogue national ou la médiation valaient leur pesant d'or et rétablissaient toujours une entente durable ainsi que la cohésion.
Malheureusement, le pays a sombré dans les bas-fonds d’une déchéance démocratique, de l’effondrement de l’État de droit, de la dégénérescence de l'ensemble de ses institutions,de la décadence culturelle et, jamais le peuple sénégalais n’a été victime d’autant de cruautés et d'atteintes aux libertés, dans Les libertés publiques et le droit à la justice, la liberté d’expression jusqu’à la liberté de penser, la liberté et le droit d'association, ont été confisqués par des hommes politiques et des magistrats ; le sang a coulé à flots pour la confiscation du pouvoir, une ligue des institutions ayant à n’en pas douter une unité de dessein s’est créée et renforcée, pour contenir le désir, le choix et l’aspiration des Sénégalais à une rupture et à un changement structurel.
L’appel au dialogue ne doit nullement occulter la face hideuse de Janus, et être une occasion pour continuer intelligemment de laisser la bride autour du cou d’innocentes victimes, avec des libertés provisoires en lieu et place de non-lieux qui restituent la dignité humaine et mettent fin à l'injustice collective parce que, vécue et ressentie par tous ceux qui, au Sénégal comme hors de nos frontières, ont suivi les événements douloureux.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a une fois de plus, raté son rendez-vous avec le peuple, lequel lui assigne le devoir de veiller sur le respect de la Constitution et des valeurs qu'il a lui même bien énoncées à l’Attendu 19 de sa décision 1/C/24, rendue le 15 février 2024, car l’attendu 20 suivant laisse un goût d’inachevé et une incertitude, qui ne pérennisent pas la relative stabilité observée par les citoyens depuis qu’il a été saisi de la question sous-jacente du respect du calendrier électoral.
La réponse à cette dernière question était pourtant tranchée et scellée, lorsque le Conseil a annulé la loi votée par l'Assemblée nationale et le décret abrogeant celui qui avait fixé la date des élections au 25 février 2024, car le décret d’abrogation disparaissait avec ses effets juridiques, et celui abrogé était désormais censé ne l’avoir jamais été.
Ainsi, vu l’intérêt majeur du contentieux qui lui était soumis, ainsi que ce qui pouvait être considéré comme une évidence à savoir que la loi votée par l'Assemblée nationale était incompatible et inconciliable avec d'autres dispositions de la Constitution et la sacralité de la disposition tripotée, le conseil Constitutionnel a aussi tardé à rendre sa décision, alors que l’hypothèse d’un second tour n’est pas exclue par la loi électorale, même si les Sénégalais ont massivement exprimé leur choix d’en finir avec le système actuel dès les premières heures du scrutin.
Si le scrutin est transparent et loyal, le Conseil constitutionnel n’aura probablement pas à proclamer les résultats définitifs au-delà du 2 avril 2024, ni à s’inquiéter d’un peu probable second tour.
Par ailleurs, le 20e attendu de la décision du Conseil constitutionnel est une boîte de Pandore. Si aucune date n’est fixée pour le jour de l’élection conformément aux lois en vigueur et pour la reprise à zéro de la campagne électorale le 25 février 2024, la situation sera davantage plus confuse, chaotique, et les effets pervers du coup d’Etat institutionnel avorté se feront sentir, sans compter le risque pour le nouveau président élu de ne pas présider la fête de l’indépendance du 4 avril 2024.
Les peuples mûrissent toujours des épreuves cruelles que leur font endurer ceux qui ont la charge et la mission de les servir. Ils apprennent de leurs erreurs dans le choix de leurs dirigeants politiques et le mode de désignation de leurs juges.