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23 novembre 2024
Société
QUAND L'IA BLANCHIT OBAMA
Derrière le masque de l'objectivité mathématique se cache une réalité troublante : les algorithmes sont profondément biaisés. Le Monde Diplomatique lève le voile sur un scandale technologique qui pose des questions fondamentales sur la société
(SenePlus) - L'intelligence artificielle serait-elle le reflet amplifié de nos propres préjugés ? C'est la question centrale que pose Le Monde Diplomatique dans son édition de novembre 2024, à travers une enquête détaillée qui déconstruit le mythe de la neutralité technologique. "Quoi de plus neutre, dit-on, qu'un ordinateur ? Erreur : derrière leurs verdicts froids, algorithmes et automates encapsulent tous les biais des humains qui les conçoivent", avertit d'emblée le mensuel.
L'exemple le plus frappant de ces biais concerne l'IA Pulse, développée en 2020 par l'université Duke aux États-Unis. Le Monde Diplomatique révèle comment ce système, censé dépixelliser des images, "tendait à blanchir les personnes de couleur au point d'engendrer un 'Obama blanc'". Cette défaillance n'est pas anodine et trouve son origine dans un effet domino technologique : Pulse utilisait StyleGAN, un autre système d'IA développé par Nvidia, qui "surreprésente spontanément les hommes blancs du fait de son propre apprentissage."
"Si l'algorithme de Pulse ne contenait aucun biais intrinsèque, il intègre indirectement ceux de StyleGAN : lorsqu'il dépixellise le visage réel de M. Barack Obama, le programme en fait un homme blanc", explique le journal, mettant en lumière comment les préjugés se transmettent d'un système à l'autre.
Le mensuel souligne que ces biais ne sont pas de simples erreurs de programmation. "Sans en avoir nécessairement conscience, les ingénieurs transposent les biais discriminatoires inhérents aux conditions dans lesquelles sont produites les données qui nourrissent la machine", analyse Le Monde Diplomatique. Cette situation est d'autant plus préoccupante que "les machines ne sont-elles pas réputées objectives et dépourvues d'idéologie?"
Les implications concrètes de ces biais dépassent largement le cadre théorique. "Certains justiciables, victimes des algorithmes de police prédictive qui intègrent des variables discriminatoires, apprendront à leurs dépens qu'il n'en est rien", avertit le journal.
Une opacité inquiétante
Plus alarmant encore, Le Monde Diplomatique révèle que la compréhension même de ces systèmes échappe aux experts. "'Expliquer' le fonctionnement de modèles d'IA, c'est-à-dire traduire la réponse du système en une série d'étapes reliées entre elles par ce qu'un être humain peut interpréter sensément comme des causes ou des raisons" est devenu secondaire. Cette explication "ne compte plus désormais au nombre des préalables pour la mise en service d'un modèle, mais joue le rôle de cerise sur le gâteau."
Le journal va plus loin en révélant que "même les chercheurs les plus pointus peinent à saisir ce qui se passe dans la boîte noire des algorithmes." Cette situation pose une question démocratique fondamentale : "Comment le législateur peut-il établir des normes d'évaluation de systèmes dont nul ne sait comment ils fonctionnent, notamment dans les secteurs sensibles de la santé ou de l'éducation?"
Le Monde Diplomatique interroge : "Incombe-t-il aux entreprises privées de décider seules des objectifs poursuivis par ces IA?" Ces choix "technico-politiques fondamentaux justifieraient pourtant une délibération collective et un contrôle public plus étroit."
Le journal rappelle que ces systèmes sont développés par "une poignée d'acteurs dont les capacités financières et l'expertise en politique industrielle talonnent celles de certains pays du G20." Cette concentration du pouvoir technologique pose des questions démocratiques fondamentales.
Vers une redéfinition nécessaire
Face à ces enjeux, Le Monde Diplomatique plaide pour une remise en question profonde de notre approche de l'IA. Le journal suggère même d'abandonner le terme "intelligence artificielle" au profit d'"automates computationnels", une expression "nettement moins flatteuse mais plus juste puisque ces machines atteignent leurs objectifs en calculant le meilleur moyen de réitérer des résultats passés."
L'écrivain britannique James Bridle, cité par le mensuel, pose la question essentielle : "Pouvons-nous imaginer des technologies de l'information et de la communication qui ne nous exploitent, ne nous trompent et ne nous supplantent pas?" La réponse, selon Le Monde Diplomatique, passe nécessairement par "une séparation de l'État et du marché" et une reprise en main démocratique de ces technologies qui façonnent notre avenir.
Le journal conclut que l'agrégation de masses de données ne peut remplacer la réflexion démocratique et le dialogue critique. Un rappel crucial à l'heure où l'IA s'immisce toujours plus profondément dans nos vies quotidiennes.
CHANGEMENT SYSTÉMIQUE ET ÉMIGRATION
Empêcher les jeunes de voyager ne devrait pas être une priorité de développement pour le Sénégal. Il faudrait l'encourager jusqu'à ce l'on puisse créer les conditions favorables pour que les jeunes puissent vivre et travailler dans la dignité chez eux
Le changement systémique n'est pas la continuation du présent ni la prolongation du passé. Le changement systémique implique une transformation profonde des manières de penser, des attitudes et des comportements. Dans ce cadre il est du devoir des intellectuels Sénégalais et Africains de repenser la question de l'émigration. Je vous dis d'emblée que l'émigration des jeunes vers l'Europe ou l'Amérique n'est pas le problème des États africains.
Empêcher les jeunes de voyager ne devrait pas être une priorité de développement pour le Sénégal. Au contraire, il faudrait l'encourager jusqu'à ce l'on puisse créer les conditions favorables pour que les jeunes puissent vivre et travailler dans la dignité dans leur propre pays. Leur demander de rester dans un pays sans emplois décents et sans revenus est une façon de les asphyxier.
Je suis pour l'émigration des jeunes à la recherche de meilleures conditions de vie. Si nous interrogeons l'histoire, les européens et les américains sont venus dans nos pays à la recherche de nouvelles richesses qu'ils ont trouvées, exploitées et continuent de le faire. Ils étaient venus avec des armes pour s'imposer. Si les Européens et les américains veulent se barricader, c'est leur problème et pas le nôtre. Nos enfants veulent seulement circuler librement et découvrir d'autres territoires du monde. N'est-ce pas noble ? Ils veulent jouir de leur dignité et de leurs droits humains.
Nos États devraient plutôt travailler avec les États Européens et Américains pour qu'ils cessent de faire chavirer les pirogues des jeunes provenant de nos pays. Ou alors lorsque les pirogues chavirent, que les secours soient rapides et efficaces. Il semble que les marines européennes peuvent créer des vagues pour décourager la traversée avec comme conséquences dramatiques le chavirement des pirogues et les nombreuses morts. Le Frontex est une réponse policière pour empêcher les jeunes de partir. Au lieu de cela il faudrait utiliser l'argent du Frontex pour délocaliser des usines et des technologies pouvant employer les jeunes sur place avec les mêmes avantages.
Avec 12,8 milliards d'euros de budget, le Frontex passe son temps à armer nos marines pour retenir nos jeunes dans la précarité. Comme dans tous les autres domaines de coopération, les européens décaissent de l'argent pour acheter des biens que seules leurs entreprises peuvent fabriquer. Les armes et encore les armes. L'argent reste donc chez eux, nous en avons quelques miettes qui paient la solde des agents de sécurité pour violenter nos propres jeunes. Cet argent est énorme et pourrait servir à la construction d'usines et aux transferts de technologies. Les jeunes resteront s'ils trouvent leur intérêt à rester et non si on les force. C'est cela qui serait une transformation systémique.
Continuer à interdire les jeunes de voyager est un non-sens sans issue car ils continueront de partir. Les chinois encouragent leurs jeunes à émigrer en leur soutenant. Les Allemands font de même en créant des fonds pour que leurs jeunes puissent entreprendre dans les pays en voie de développement. Pour réduire la pression liée à la démographie, au chômage, beaucoup de pays européens encouragent leurs gens à partir. Pourquoi devons-nous continuer à empêcher nos jeunes de tenter leurs chances ailleurs ?
Chers jeunes désirant émigrer, partez mais ne mourrez pas dans la mer. Si vous voyagez dans des conditions quasi certaines que vous allez mourir avant d'arriver à votre destination, alors vous aurez raté votre trajectoire de vie et votre ambition. Préparez-vous mieux sérieusement et ne partez pas à l'emporte-pièce. Aux piroguiers et capitaines, assurez-vous que vos embarcations sont solides et capables d'arriver à destination. Vous devez aussi être plus responsables et plus méticuleux dans la préparation des voyages.
Vous transportez des êtres humains qui représentent l'espoir de toute une communauté. Vous-mêmes, capitaines, vous avez un savoir-faire acquis sur de nombreuses années de durs labeurs. Préservez votre savoir-faire et vos vies. Encore une fois l'émigration n'est pas notre problème. C'est le problème de ceux qui veulent s'enfermer. Pourquoi devons-nous continuer à penser exactement comme le veulent les Européens et les Américains ?
Nous devons faire notre propre analyse des situations présentes et à venir, conceptualiser nos propres approches, les défendre et les mettre en œuvre sans complexe. L'émigration vers des territoires plus développés est bien pour nos jeunes et pour notre économie. Les montants annuels des transferts d'argents de nos expatriés sont supérieurs aux montants de l'aide au développement. Si toutes les frontières du monde étaient ouvertes comme Dieu l'a dessiné et voulu, les êtres humains seraient plus heureux, plus libres et plus épanouis. Eh oui Dieu a créé le monde ouvert sans barrières ni frontières.
Petit Gueye est auteur, consultant et coach de leadership transformationnel, ancien maire de Sokone.
LE CUD CRIE À LA CENSURE À L'UCAD
Le Collectif des universitaires pour la Démocratie peste contre l'interdiction de l'organisation de ses rencontres citoyennes pour les prochaines législatives. Cette initiative devait permettre aux étudiants de mieux comprendre les enjeux électoraux
À quelques jours des élections législatives, le Collectif des universitaires pour la Démocratie (CUD) se voit interdire l'organisation de rencontres citoyennes pourtant soutenues par la Direction générale des élections. Une décision que le Collectif qualifie de "révoltante" et "liberticide" à travers le communiqué suivant :
"STOP À LA CENSURE
Le Collectif des universitaires pour la Démocratie (CUD) regrette et dénonce l’interdiction par le Directeur du Centre des œuvres universitaires de Dakar (COUD) de la tenue des rencontres citoyennes en vue des élections législatives prévues pour la période du 11 au 15 novembre dans le campus social de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). Cette interdiction est d’autant plus révoltante qu’elle est fondée sur l’argument fallacieux de la sécurité ; la même rhétorique qui fut déroulée dans la récente période sombre pour censurer toute forme d’expression au sein de l’espace universitaire.
Les rencontres citoyennes ont été pensées par l’Observatoire État de droit du CUD, en partenariat avec la Direction générale des élections (DGE), pour contribuer dans la diffusion de la bonne information et tenir des discussions avec les étudiants autour de la citoyenneté électorale. Sur les cinq jours, il devait s’agir d’une part de la distribution des supports d’informations fournis par la DGE, notamment des exemplaires du code électoral, d’autre part de la tenue de débats sur des thématiques arrêtées à l’avance comme celles relatives aux modes de scrutin (majoritaire et proportionnel), la campagne électorale dans le campus social, la faible représentativité des étudiants dans le fichier électoral, etc. Toutes ces informations ont été communiquées à la direction du COUD à travers la demande d’autorisation qui a été déposée.
Le CUD considère cette interdiction comme une censure de la liberté d’expression dans un espace public, ainsi que du droit d’accès à l’information et rappelle que cette attitude liberticide ne saurait prospérer. Les autorités devraient participer à instaurer un climat de confiance qui aiderait les Sénégalais à guérir de leur traumatisme plutôt que de l’aggraver.
Le Comité directeur"
PAR Boubacar Boris Diop
DE POUSSIÈRE ET D'ÉTERNITÉ : POUR OUZIN ET CHACUN
EXCLUSIF SENEPLUS - Nés à quelques maisons d'écart, Babacar Mbow et Ousseynou Bèye ont partagé bien plus qu'une enfance. De leur bibliothèque de quartier aux luttes politiques, ils ont tracé un profond sillon dans la conscience nationale
Ceux qui ont connu séparément ces deux êtres d'exception pourraient s'étonner de les voir associés dans un seul et même hommage. Rien n'est pourtant plus naturel car "Chacun" et "Ouzin", nés à quelques maisons l'un de l'autre, ont été façonnés dans le même moule. Et ce moule, c'est tout simplement notre enfance médinoise placée sous le signe d'une saine insolence et d'une curiosité intellectuelle précoce. Il est dès lors aisé de comprendre pourquoi je conçois avant tout cet exercice - dont l'impérieuse nécessité n'a jamais fait l'ombre d'un doute dans mon esprit - comme un amical devoir de mémoire.
C'est avec émotion que l'espace culturel "Kër Maam Sàmba" de Ngor a accueilli le 18 octobre 2024 une cérémonie du souvenir dédiée à Serigne Babacar Mbow. Le choix a été ainsi fait de marquer non pas l'anniversaire de sa disparition mais plutôt celui de sa naissance et l'événement a été un hymne à une vie où l'action a constamment été, pour parler comme le poète, "la sœur du rêve". Pape Samba Kane avait du reste donné le ton en rappelant dans un bel article les années libertaires de "Chacun", celles où, cheminant avec nonchalance parmi les gars de la marge, il s'était soudain mis à prendre plus au sérieux la solidarité avec les déclassés que la lutte des classes qui l'avait pourtant hanté pendant les décennies précédentes. En cette fin de journée à "Kër Maam Sàmba" il a certes été question du bâtisseur de Mbàkke-Kajoor mais aussi, bien évidemment, de celui que j'appelle "Ponkalum Ndeem-Maysa" dans Doomi Golo, autrement dit le géant de Ndem-Meissa, également glorifié par Seydina Insa Wade qui lui fut très proche. Et comme bien souvent, la phrase si inspirée de Mao Wane a été reprise en écho : "Nous avons tous fait un seul et même rêve et "Chacun" a réalisé ce rêve."
Le très turbulent camarade Mao ne croyait pas si bien dire et je m'en vais expliquer ce que j'entends par là.
Autour de leur seizième année, des gamins de la rue 5 X Blaise Diagne et environs sont tombés amoureux d'un coin de terre dans un village de la Petite-Côte dénommé Samgedj - orthographe hélas non garantie - au point de vouloir faire de ces quelques hectares en friche une somptueuse latifundia. Pendant des nuits et des journées entières notre imagination quelque peu déréglée a fait s'élancer vers les cieux des milliers de plants d'orangers, de manguiers et même d'arbres fruitiers exotiques et nous avons discuté tout feu tout flamme de la meilleure manière de prendre soin de notre chimérique bétail et de rentabiliser la volaille qui ne l'était pas moins. C'était complètement fou car autant que je me souvienne nous ne nous sommes rendus sur place que deux fois. Qui étaient donc ces adolescents pas vraiment tranquilles ? Ouzin et son jumeau Assane alias "Grand Laze" étaient de l'aventure, de même que "Ben" Diogaye Bèye ou le regretté Makhtar Mbaye-Doyen ; votre humble serviteur était lui aussi dans le coup tout comme, bien entendu, "Chacun" ainsi que le plus sauvage anarchiste jamais enfanté par la Medinaa, feu Assane Preira Bèye qui avait d'ailleurs trouvé un nom assez conquérant pour notre juvénile utopie : "Ëllëg Samgedj !". Dans cette affaire, c'est Preira qui avait été à la manœuvre du début à la fin tandis que, chose intéressante, le futur Maître de Ndem restait plutôt en retrait. On peut même se demander si Babacar Mbow y a seulement repensé au moment où Sokhna Aïssa et lui faisaient d'un somnolent village du Bawol un formidable lieu de vie et d'initiatives sociales aussi originales les unes que les autres. C'est que le bien curieux épisode de Samgedj est probablement sorti de toutes les mémoires et il ne m'est revenu à l'esprit que ces jours-ci, lorsque ces adieux à deux amis très chers m'ont obligé à me replonger dans mes plus lointains souvenirs. Mais, même évanescent, ce moment reste capital en ce qu'il permet de mieux comprendre les fantastiques réalisations ultérieures du disciple de Cheikh Ibra Fall de même que le parcours militant exemplaire d'Ouzin.
Et nous n'en étions pas à une extravagance près : à une époque où la mode était aux "Assoc's" et où l'on ne pouvait presque draguer aucune fille si on ne se faisait pas appeler Bebel, Johnny ou Elvis, nous avons créé, bien avant les actuelles ASC, le "Culture et Loisirs Club". Les deux principaux animateurs du CLC étaient déjà "Chacun" et Ouzin. On aura peut-être du mal à le croire mais ce club d'enfants éditait un journal culturel - ronéoté, cela va de soi - qui affichait sur la couverture de chaque numéro la même phrase de David Diop, qui sonnait déjà comme le cri de ralliement de prétentieux artistes en herbe : "La littérature est l'expression d'une réalité en mouvement, elle part de la réalité, la capte, saisit ce qui n’est que bourgeon et l'aide à mûrir." On devinera sans peine pourquoi ce magazine s'appelait "Le bourgeon"... Peut-être s'en trouve-t-il encore deux ou trois exemplaires dans les archives de l'IFAN où, sérieux comme ce n'était pas permis, nous allions parfois le déposer.
Le CLC avait également monté une bibliothèque au domicile des Bèye et les samedis après-midi nous y organisions dans la cour des séances de lecture collective à haute voix. Nous choisissions de préférence de courts récits comme L'étranger de Camus ou Sous l'orage de Seydou Badian Kouyaté afin de nous réserver le temps d'en discuter un peu avant de clore la session. Je me souviens que La métamorphose de Kafka nous avait vivement impressionnés et que Tchen, le héros de La condition humaine fascinait tout particulièrement Ouzin. Je ne serai nullement surpris de l'entendre des années plus tard reprendre au détour d'une discussion philosophique la phrase que Malraux met dans la bouche de son jeune révolutionnaire tourmenté et impatient que l'on a d'ailleurs dit inspiré par Chou-En-Laï : "Heureusement, on peut agir..." Sacré camarade Ouzin ! Je peux témoigner que jusqu'aux dernières heures de ta vie, le 21 juillet 2024, tu ne t'es jamais réveillé un seul matin sans te demander ce que tu pourrais bien faire ce jour-là pour aider les personnes de ton entourage ou rendre meilleure la société sénégalaise.
Notre bibliothèque était cependant bien pauvre comparée à celle de la "Maison des Jeunes et de la Culture" - sise alors à l'actuel emplacement de la mosquée omarienne. Nous y avions pratiquement élu domicile. Ravis de notre assiduité, Médoune Diop, son directeur, membre actif de l'UPS que nous traitions de réactionnaire sans savoir exactement ce que cela voulait dire, nous avait autorisés à y monter un ciné-club. Si j'ai bonne mémoire, Et la neige n'était plus d'Ababacar Samb Makharam et Hiroshima, mon amour d'Alain Resnais furent les deux films les plus fréquemment mis en discussion lors de ces soirées ouvertes au public. C'est là que nous avons vu le maladroit Sarzan de Momar Thiam - d'après le conte éponyme de Birago Diop - et À bout de souffle de Godard. C'était quelque chose, sa séquence finale, cette fuite éperdue, apparemment vers nulle part, de Belmondo... Tant de romans et de films, objets de nos vives querelles, ont en grande partie contribué à faire de Ben Diogaye Bèye un cinéaste, de Serigne Babacar Mbow un essayiste et de moi-même un romancier.
C'était la grande époque du PAI clandestin et le fait que des gamins d'un quartier populaire aussi emblématique que la Medina aient un tel penchant pour les débats d'idées ne pouvait pas échapper à l'attention de ses chasseurs de têtes. C'était d'autant plus évident que Magatte Thiam, une des éminentes figures de ce parti marxiste-léniniste, était apparenté à la famille Bèye tout comme d'ailleurs un autre de ses camarades, le futur avocat Charles Guissé. Ils venaient nous initier patiemment aux splendeurs du matérialisme dialectique et dans la foulée un cercle de discussion plus politique et social que littéraire fut mis en place. En plus des visites régulières de Magatte Thiam et Charles Guissé, nous y reçûmes plusieurs fois un aîné comme Amady Ali Dieng et en une occasion au moins un certain Abdoulaye Wade. Aucun de nous n'a jamais milité au PAI mais c'est bien cette formation politique qui a envoyé notre ami Assane Preira, jeune scientifique surdoué, faire ses études d'ingénieur dans la petite ville de Lauchhammer en Allemagne communiste. Il lui avait fallu transiter par le Mali de Modibo Keita et je me souviens comme si c'était hier de nos adieux sur le quai de la gare de Dakar, une scène que j'ai du reste fidèlement rapportée dans Le Temps de Tamango.
Il est normal avec un tel départ dans la vie de se retrouver très vite pris dans le tourbillon de la politique et s'il est un moment de notre jeunesse où les destinées de "Chacun" et Ouzin se sont confondues au point de n'en faire qu'une, c'est bien celui-là. Tous deux ne croyaient qu'en l'action directe et n'ont jamais hésité à pousser ce désir de résultat concret et immédiat jusqu'à ses conséquences extrêmes. Le temps viendra où les énormes risques pris par Babacar Mbow pourront être racontés et - il est bon de le savoir - le frêle Ouzin a tenu tête des jours durant à des tortionnaires bien décidés à le faire passer à table. Ce qui différenciait ces deux-là, c'est que "Chacun" y allait toujours avec le cœur et une secrète conviction de la vanité de l'existence humaine alors que le "camarade Ouzin" était un pur cérébral, raisonneur en diable. Peu bavard mais trop humain pour être hautain, n'élevant jamais la voix, il n'en était pas moins animé en toutes circonstances par une viscérale envie de convaincre. Sa façon d'analyser avec une froide rigueur les phénomènes sociaux et les événements politiques, d'anticiper les probables contre-arguments de son interlocuteur pour les anéantir l'un après l'autre, forçait l'écoute de tous et sa capacité à emporter l'adhésion des uns et des autres en faisait rapidement un leader naturel dans les nombreux groupes dont il était toujours l'un des membres les plus déterminés. Lui et moi n'avons pas toujours été d'accord sur tout - loin s'en fallait - mais jusqu'à la fin j'ai accepté sans le moindre problème son autorité intellectuelle. Bien des fois il m'a dissuadé d'exprimer publiquement mes vues pas vraiment consensuelles sur tel ou tel sujet et a posteriori ses conseils, que j'ai toujours suivis sans rechigner, se sont avérés salvateurs. Merci, Maître, d'avoir si souvent su me retenir au moment où j'allais lâcher de grosses conneries. De n'être plus en mesure de me bagarrer avec toi sur telle ou telle question nationale m'amène parfois à douter, le temps d'un éclair, de la réalité de ta disparition. Cela cause une petite souffrance, fugace mais vive, qui donne presque envie de sourire de la bonne blague que pourrait bien être, à la fin des fins, notre présence sur cette terre.
Au milieu des années soixante, chaque fois qu'il y avait des troubles à l'université de Dakar, des réunions supposées clandestines se tenaient dans la vaste concession des Bèye dont une entrée donnait sur la rue 3 et l'autre sur la rue 5. J'ai le très net souvenir d'Abdoulaye Bathily, leader estudiantin en vue de l'époque, venant présider l'une d'elles. Les relations entre Ouzin et Bathily se sont prolongées bien au-delà de cette période, dans le feu des luttes syndicales, et l'ancien Secrétaire général de la LD a été l'un des premiers à m'appeler le matin même de la disparition d'Ouzin. Notre ami commun René Lake venait de l'informer de mes liens particuliers avec le défunt et il avait réussi par mon entremise à présenter directement ses condoléances à la famille, ce à quoi il tenait tout particulièrement. Les textes d'adieu de Bathily et Mansour Aw, écrits pour toute une génération, ont su dire avec force l'abnégation d'un citoyen à l'engagement sincère que chaque frère d'armes pouvait si aisément prendre pour un confident ou même pour un quasi frère de sang.
Quant à Serigne Babacar Mbow, il faut remonter aux toutes premières années de sa vie pour avoir une idée claire de son singulier destin. Je crois bien que c'est un de nos "grands" de la Médina du nom de Lamine Gaye qui, le voyant passer avec une jeune fille, lui a lancé sur un ton moqueur : "Ah ! C'est chacun avec sa chacune !" Cette innocente taquinerie allait être l'acte de naissance d'un surnom de légende. Ceux qui s'émerveillent aujourd'hui de son exceptionnel parcours doivent savoir que dès sa plus tendre enfance tout a réussi à "Chacun". En voilà un qui était vraiment né sous une bonne étoile ! Son père, l'austère et grave Omar Ndoya Mbow, était un entrepreneur prospère - je crois me rappeler qu'il avait construit entre autres le cinéma Al Akbar - et puisque nos parents à nous peinaient à joindre les deux bouts, nous n'étions pas loin de le considérer comme l'homme le plus riche du monde. Il y avait de quoi : alors que nous devions nous contenter de nos anangoo délavés et de nos culottes courtes, "Chacun" se pavanait déjà en costard et cravate dans les rues du quartier. En ce temps-là on croisait d'illustres basketteurs, footballeurs ou athlètes à chaque coin de la Medinaa - Ouzin et Grand Laze ont du reste été des internationaux de volley-ball et notre ami Djiby Diop passe aujourd'hui encore pour le plus grand handballeur sénégalais, voire africain, de tous les temps. Si je rappelle cette réputation de vivier de sportifs de la Medinaa, c'est pour montrer qu'il suffisait à "Chacun", ailier au pied gauche magique, de le vouloir pour devenir une des légendes du football sénégalais. Lamine Diack l'avait bien compris, qui s'arrangeait pour l'emmener lui-même tous les jours à l'entraînement du Foyer France Sénégal, revenant avec lui à "Niangène" après chaque séance. Mais Babacar Mbow, qui n'était pas du genre à laisser qui que ce soit décider de son itinéraire de vie, a très vite dévié de la voie ainsi tracée pour lui. Faire une carrière de footballeur ne l'intéressait juste pas et par la suite il a complètement cessé d'y penser. En voici une preuve parmi d'autres : alors que la passion du foot accompagne la plupart des fils de la Medinaa pendant toute leur existence, lui le plus doué d'entre tous ne savait sans doute plus distinguer à la fin de sa vie entre le grand Barça et l'Olympique de Ngor. Ce n'était cependant pas par arrogance car il ne se serait jamais permis de mépriser les choix des autres. Il était tout simplement passé à une autre dimension du réel, non pas supérieure - il n'y a aucune hiérarchie en matière de passions humaines - mais radicalement différente. Au plan politique aussi, Serigne Babacar avait complètement cessé d'être de notre bas monde. Ce n'est pas lui qu'on aurait pu intéresser aux querelles politiciennes qui nous excitent bien plus que nous ne voulons l'admettre. Je m'en suis bien rendu compte à l'occasion d'un séjour à Mbàkke-Kajoor en compagnie de Ndiack Seck, Pape Samba Kane et Ouzin. Au cours d'un petit aparté, il m'avait annoncé la visite d'une personnalité politique vouée aux gémonies - à tort ou à raison - par la rumeur publique. J'ai essayé de l'inviter à la prudence mais c'était peine perdue car il n'avait jamais entendu parler de ce monsieur dont le nom avait pourtant été sur toutes les lèvres au cours des mois précédents !
Dans notre génération, les choix partisans définitifs ont été souvent précédés ou accompagnés par la mise en place de clubs culturels très politisés, "Lat-Dior" chez Ouzin à la Medinaa, "Africa" chez Ousmane William Mbaye à Jëppël et "Frantz Fanon", sans aucun doute le plus important et le mieux organisé, à notre maison familiale des HLM1. Babacar Mbow résidait toujours à la Medinaa et était donc théoriquement membre de "Lat-Dior". Mais il refusait déjà de se laisser brider et circulait librement d'un club à l'autre. Il était accueilli partout à bras ouverts et se comportait non pas comme le copain de tout le monde mais bien comme le meilleur copain de chacun, soit dit sans jeu de mots. Il faut savoir que le "Chacun" de ce temps-là respirait la joie de vivre avec ses moqueries, sa tendance à foutre le bordel et ses formidables éclats de rire. Il n'en était pas moins fasciné par des forces secrètes soupçonnées d'on ne sait quelles sombres manigances pour infléchir nos choix de vie. Quand donc avait-il pris la décision de ne jamais se laisser impressionner par personne ? Cette force de caractère se traduisait par un goût prononcé pour les défis plus ou moins absurdes. C'est ainsi qu'au cours de "vacances révolutionnaires" dans un village du Saalum, voyant un charmeur de serpents à l'œuvre, il fendit la foule et sous le regard ahuri du magicien, s'empara du reptile et se mit à l'enrouler autour de son cou. La légende s'en est un peu mêlée puisqu'on a affirmé par la suite que le charmeur de serpents est mystérieusement décédé au cours de la même nuit ! Ce qu'il faut surtout retenir de cette histoire, c'est la force mentale de "Chacun" qui lui a permis, dans les moments cruciaux de son existence, d'imposer sa volonté aux êtres et aux événements. En tant qu'écrivain, je peux bien avouer aujourd'hui que je n'ai pas eu à aller chercher bien loin les personnages les plus désaxés - au sens le plus strict, et pas forcément péjoratif, du terme - de mes romans. J'avais pour ainsi dire "Chacun" à portée de plume. Ou Assane Preira. Ou "Ben". Et la Léna de mon premier livre de fiction s'inspire d'une militante à la beauté quasi surréelle avec son éternelle coiffure afro, une pasionara en quelque sorte, dont nous étions tous follement amoureux. Eh bien, "Chacun" en était plus follement amoureux que nous tous au point de la surnommer dans ses moments de rêverie poétique "La femme sans chair".
Un autre souvenir de ces années tout à fait spéciales.
En 72 ou 73, "Chacun" est venu passer près d'un mois à la maison que Souleymane Ndiaye "Jules" et moi-même avions louée sur la rue de France à Saint-Louis. La police était sur ses traces à l'époque et il devait poursuivre sa route vers la Mauritanie où il comptait se faire oublier. Tout s'est bien passé et à vrai dire Jules et moi n'étions de dangereux agitateurs qu'entre les murs de nos salles de classe du lycée Charles de Gaulle. L'histoire aurait toutefois pu se terminer par un désastre puisque, via un cousin inspecteur au commissariat de la Pointe-Nord que nous hébergions, notre domicile était très fréquenté par des policiers et l'un d'eux, devenu un copain, ne nous quittait presque jamais, campant littéralement chez nous de l'aube à minuit. Eh bien, j'apprendrai quelque trente ans plus tard, en lisant un article de Mamadou Oumar Ndiaye, que le bonhomme était accusé d'avoir battu à mort Omar Blondin Diop à la prison de Gorée et que les potentiels commanditaires de son crime l'avaient affecté à Saint Louis pour qu'il s'y fasse oublier ! Cela faisait éprouver un sentiment étrange de se rappeler après plusieurs décennies à quel point "Chacun" - qui de toute façon ne nourrissait jamais de préjugés envers un être humain - appréciait ce policier. Je tiens à ajouter pour être juste que ce dernier, décédé lui aussi il y a quelque temps, a toujours nié les accusations formulées contre lui.
Si Babacar Mbow a su enfanter des mondes, c'est parce qu'il était fondamentalement un poète. Parmi les vers qu'il aimait marteler avec une force inouïe, pour son propre plaisir ou celui de son entourage, ceux-ci sont restés gravés dans ma mémoire : "Affaires en foule/Remue-ménage et phénomènes/Le jour s'en va peu à peu déclinant/J'aime la patrie de Lénine au bord de la Volga/J'aime la patrie de Lénine militante et combattante." Que pouvait bien signifier ce bout de texte si délicieusement rythmé ? Selon "Chacun", il provenait d'un poème de Maïakovski mais je ne le croyais qu'à moitié. Il y avait sûrement un peu de lui là-dedans. Quoi qu'il en soit, j'ai toujours trouvé une si mystérieuse beauté à ces vers que j'ai profité du premier prétexte narratif pour les glisser tels quels dans Le Cavalier et son ombre.
Tout cela montre pourquoi l'idée d'un colloque sur Serigne Babacar Mbow, soulevée à "Kër Maam Sàmba", fait si pleinement sens. Il avait réussi sans se forcer à faire de sa vie réelle une œuvre d'art tout en transformant ses cogitations parfois délirantes en œuvres concrètes, d'une remarquable utilité publique.
Il paraît que quand Ouzin nous a quittés, Djiby Diop - l'ex-champion de handball mentionné plus haut - a interpellé les compagnons d'enfance présents : "Qui d'entre nous a jamais entendu Ousseynou Bèye sortir une insulte de sa bouche ?" (Kan ci nun moo mas a dégg Uséynu Béey mu saaga ?) C'était une question à la fois simple et extrêmement brillante, du genre de celles qui vous imposent un temps d'arrêt pour faire défiler dans votre esprit les scènes de la vie d'un être humain et dans ce cas précis finir par admettre que eh bien, aussi incroyable que cela puisse paraître, personne n'a jamais vu Ouzin s'emporter ou encore moins se laisser aller à proférer des obscénités. Cela s'appelle avoir de la classe. J'ajouterai simplement que c'était tout aussi inconcevable pour "Chacun" et ce, longtemps avant qu'il ne devienne Serigne Babacar Mbow. Bien que fermement attaché à ses certitudes, il jugeait indigne de lui de se montrer agressif et on pouvait même parler à son propos d'une certaine douceur. S'il a très tôt considéré Assane Preira Bèye comme son frère jumeau - par l'âge et par un goût partagé pour les dérapages métaphysiques - "Chacun" avait le plus grand respect pour la puissance intellectuelle et la force de conviction d'Ouzin.
Quelques semaines après la disparition de Serigne Babacar, Codou, Ndiack et moi-même avons rendu visite à Ouzin et Penda à Kër-Masaar. Ils nous ont alors appris que "Chacun" et Sokhna Aïssa étaient venus y passer une journée avec eux. À l'évocation de ce qui avait été de toute évidence une pudique cérémonie des adieux, le regard d'Ouzin a brillé d'un singulier éclat - je ne l'oublierai jamais - et nous avons tous reparlé ce dimanche-là de "Harlem", de Ndeem-Maysa et de Mbàkke-Kajoor, c'est-à-dire de l'essentiel. De ce qui, en triomphant du temps et de la mort, donne paradoxalement à toute vie humaine du sens et un parfum d'éternité.
LE GRAND FLOU DE L’AVENIR MILITAIRE FRANÇAIS AU SENEGAL
Si Sonko juge leur présence "incompatible avec la souveraineté", Diomaye adopte une approche plus pragmatique. Jean-Marie Bockel, émissaire d'Emmanuel Macron, attend le verdict des législatives pour engager les discussions
(SenePlus) - Dans un entretien accordé à RFI cette semaine, Jean-Marie Bockel, ancien secrétaire d'État et Envoyé personnel du président Emmanuel Macron pour la reconfiguration du dispositif militaire français en Afrique, dévoile les contours de sa mission diplomatique, notamment concernant l'avenir de la présence militaire française au Sénégal.
La question sénégalaise apparaît particulièrement délicate dans ce dossier. Alors que plusieurs pays comme le Tchad, le Gabon et la Côte d'Ivoire ont déjà fait l'objet de discussions avancées, le Sénégal reste en attente. "Il y a eu ces déclarations qui ne nous ont pas échappé", reconnaît Jean-Marie Bockel, faisant référence aux propos du Premier ministre Ousmane Sonko sur l'incompatibilité entre souveraineté nationale et présence de bases militaires étrangères.
Toutefois, la position sénégalaise semble plus nuancée qu'il n'y paraît. Lors de sa visite à Paris le 20 juin, le président Diomaye Faye a tempéré cette approche. "Il a eu l'occasion de dire au président Macron, qui évoquait la possibilité de partir, que non, qu'il fallait simplement nous laisser le temps d'établir une position claire sur le devenir de la base militaire", rapporte l'envoyé spécial.
Cette transformation s'inscrit dans une refonte plus large du dispositif militaire français en Afrique. M. Bockel précise : "Nous devons garder un dispositif socle qui permette, au niveau de l'accès, de la logistique, de la capacité, de remonter en puissance [...] chaque fois que c'est nécessaire, à la demande du partenaire."
La France semble privilégier une approche qualitative plutôt que quantitative, comme le souligne une citation rapportée par M. Bockel d'un président africain : "Ce qui compte, ce n'est pas le nombre de soldats français demain dans ma base, c'est ce qu'on va pouvoir faire encore mieux ensemble."
Pour le Sénégal, les discussions concrètes devraient s'engager après les élections législatives de novembre. "Au lendemain de l'élection du mois de novembre, il y aura un moment important où les responsables sénégalais pourront dire aux responsables français 'voilà ce que nous souhaitons, le moment est venu pour en parler'", indique Jean-Marie Bockel.
L'ancien secrétaire d'État distingue clairement "ce qui peut être dit dans une période de changement" et "ce qui pourra se faire au lendemain d'une élection", suggérant que la position finale du Sénégal pourrait être plus pragmatique que les déclarations initiales ne le laissaient présager.
par Fatoumata Hane
DE LA CENSURE DE LA RECHERCHE ACADÉMIQUE EN DÉMOCRATIE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le livre de Séverine Awenengo Dalberto, que j’ai lu, est loin d’être le brûlot que l’on décrit. Cette censure contribue au particularisme de la Casamance, nourrissant les imaginaires que ce livre s’attache à déconstruire
Le livre de Séverine Awenengo Dalberto, que j’ai pris le temps de lire, est bien loin d’être le brûlot que l’on veut nous présenter ! Ces dernières années, le « pluriversalisme décolonial » a conduit de nombreux chercheurs, africains comme européens, à interroger la fabrique des savoirs et la production des connaissances sans avoir à se justifier ou risquer d’apparaître comme des imposteurs.
S’appuyer sur des théories complotistes ou des arguments misogynes et racistes est la posture la plus simple pour imposer une position, influencer l’opinion ou promouvoir une censure inconcevable dans une démocratie qui se revendique ouverte et majeure. Cette censure contribue au particularisme de la Casamance, nourrissant les « imaginaires » que ce livre s’attache à déconstruire. Elle participe également de la servitude intellectuelle à laquelle la politique cherche à nous contraindre. Cette menace pèse non seulement sur le métier d’historien, mais sur l’ensemble des sciences humaines et sociales, marquant un déclassement de la production intellectuelle.
Instrumentaliser un objet de recherche revient à construire un récit biaisé, bien plus dangereux que de simplement interdire la commercialisation d’un livre – qui, paradoxalement, bénéficie d’une promotion accrue – dans un pays où peu de gens lisent et dans un contexte où les plateformes numériques facilitent la diffusion des publications. Au point que certains témoins ayant participé à l’ouvrage hésitent aujourd’hui, invoquant une temporalité mal adaptée au contexte actuel du Sénégal. Je reprends à mon compte ce que dit Mbougar Sarr sur le temps: il n’y a pas de moment idéal pour publier. Le temps politique n’est pas celui de la science, pas plus que le temps qui rythme la société. Cette recherche a débuté en 2000, et certains aspects ont déjà fait l’objet de publications par la même autrice ainsi que par d’autres collègues chercheurs.
Va-t-on reprocher à Armelle Mabon son livre sur le massacre de Thiaroye ? Assurément, non ! Les enjeux sont ailleurs : le Sénégal devrait, sur cette question, exiger la déclassification des rapports militaires afin que cette histoire soit connue et que la France s’acquitte de ses dettes matérielles et morales.
Pour en revenir à mon propos, ce livre dont je ne ferai pas une note de lecture, interroge l’historicité de l’idée d’autonomie de la Casamance dans les imaginaires coloniaux. Les sources utilisées (archives offrant diverses interprétations) contribuent à façonner et figer l’unité territoriale du Sénégal. L’idée d’autonomie, soutenue dans une perspective utilitariste et économique par les colons, nourrit en retour les imaginaires de la « différence casamançaise » qu’elle consolide. Le refus de l’autonomie est sans cesse réaffirmé, car elle ne servait que des ambitions personnelles, politiques et économiques. L’autonomie reste donc une hypothèse théorique ; les politiques actuelles rappellent à bien des égards les dispositifs mis en place pour consacrer l’unité territoriale et l’ancrage de la Casamance au Sénégal.
On observe une concordance entre les politiques de désenclavement et la valorisation du potentiel économique, ayant valu à la région le premier plan quadriennal du Sénégal en 1959 et, plus récemment, les importants programmes d’investissement au cours de ces vingt dernières années. Les politiques successives de décentralisation se basent sur cette autonomie des territoires qui en font des possibles territoriaux. L’Acte III de la décentralisation le consacre à travers trois de ces principes que sont la subsidiarité, la péréquation et l’autonomie de chacune des collectivités territoriales. Il y a une différence, plus que conceptuelle, entre autonomie et indépendance. Je passe sur la contribution des élus de la Casamance aux manifestations politiques : leur vote pour le « Oui » à l’indépendance du Sénégal révèle l’unicité de notre histoire politique et sociale. Qu’est-ce qui fait peur dans l’interprétation des archives et des sources historiques : la réactivation des imaginaires sur le rattachement de la Casamance au Sine-Saloum, ou l’effort de construction d’un récit et de production d’une histoire qui nous libèrent de toutes sortes de mystifications ?
Professeure Fatoumata Hane est Socio-anthropologue, Uasz.
Par Fadel DIA
TRUMP: LE TRIOMPHE DE LA BOUFFONNERIE !
Comment expliquer que dans le pays où on est le mieux informé du monde, plus de 70 millions de citoyens aient, aussi inconsidérément, accordé leurs votes à un homme au discours décousu et au ras des pâquerettes, truffé d’âneries et de non-sens ?
C’était l’évènement médiatique - et pas seulement- du moment, scruté par des centaines de millions de personnes dans le monde, dont certaines avaient la boule au ventre, et voilà qu’il s’achève par la victoire de Donald Trump ! Il a donc gagné, plus vite et plus largement que prévu par les instituts de sondage, et son retour ne nous rassure guère, ne serait-ce que parce que le premier à s’en réjouir est Benyamin Netanyahou qui est comme lui, sous le coup de poursuites judiciaires, si enthousiaste qu’il affirme que c’est « le plus grand retour de l’histoire ».
La victoire de Trump nous surprend et nous laisse sur notre faim, et avec des questions dont nous n’avons pas les réponses. Comment expliquer que dans le pays où on est le mieux informé du monde, plus de 70 millions de citoyens aient, aussi inconsidérément, accordé leurs votes à un homme qui n’est pas seulement le plus vieux président élu à la tête de leur pays, mais un homme au discours décousu et au ras des pâquerettes, truffé d’âneries et de non-sens ? Même si Trump a fait ses meilleurs scores chez ses concitoyens les moins instruits, tous ceux qui ont voté pour lui ont fait ce choix en connaissance de cause. Ils l’avaient vu à l’œuvre pendant quatre ans s’amuser à ébranler les fondements de leur démocratie et à saper leur cohésion, à renier tous les engagements souscrits par leur pays et à donner des cauchemars au climat et à la science.
Comment comprendre que Trump ait été porté au pouvoir par un vote populaire et recueilli l’adhésion des jeunes et celle, comme jamais avant lui, des minorités afro-américaine et hispanique ? Pourtant ce milliardaire, né avec une cuillère en argent dans la bouche, ne s’intéresse qu’à lui-même et est incapable d’appréhender la détresse des plus démunis et il a martelé des diatribes contre les immigrés traités « d’animaux qui souillent le sang des Américains » et les a menacés d’expulsions massives, quitte à enfreindre la loi et les règles humanitaires !
Comment comprendre que le jeu électoral se soit autant dégradé aux Etats-Unis, au point de se transformer en foire d’empoigne et en bataille de chiffonniers ? Tout au long de la campagne électorale, longue et ennuyeuse, rien pratiquement n’a été dit sur la nécessité de préserver la paix dans le monde et de mettre fin aux injustices quand on est la première puissance du monde, sur la jeunesse ou sur la culture, sur les menaces qui pèsent sur notre environnement, alors que nous vivons les plus grandes catastrophes naturelles de ces dernières années. Elle n’a pas été l’occasion d’un débat d’idées, d’une confrontation de projets comme il sied à une démocratie mais, du moins de la part de Trump, celle de déverser des injures, des insanités ou des arguments phalliques, par la parole et les gestes, des mensonges grossiers et des accusations sans fondement. Le plus étonnant c’est que Trump n’a pas pâti de ses excès de langages, sans doute parce qu’il est, avec Netanyahu, le seul homme politique dont les outrances passent comme lettres à la poste. Il a en tout cas fait la preuve qu’en politique, du moins avec lui aux Etats-Unis, les c......., ça marche ! A ce jeu-là, Kamala Harris ne pouvait que perdre, elle, partie si tard avec le triple handicap d’être femme, noire et fille d’immigrés !
Comment comprendre ce dévoiement de la démocratie qui fait que de plus en plus aux Etats-Unis, ce n’est pas celui qui a le meilleur programme, le plus honnête ou le plus compétent, qui a des chances d’être élu, mais qu’il faut d’abord être riche à millions ? Plus de 17 milliards de dollars (soit plus d’une fois et demi le budget du Sénégal ) ont été dilapidés pendant la campagne électorale, dont un tiers dans la publicité, 1 milliard pour la bataille électorale dans le « swing state » le plus disputé, la Pennsylvanie ! La victoire de Trump c’est le résultat de la coalition de deux milliardaires : l’homme le plus riche du monde, l’ancien immigré irrégulier Elon Musk, n’est pas seulement l’homme qui murmure à l’oreille de Trump, il a mis à son service son réseau X et ses 200.000 followers, il a injecté à lui seul 200 millions de dollars dans sa campagne qu’il a tenté de transformer en jeu de course hippique.
Comment comprendre, enfin, qu’au moins depuis l’intrusion de Donald Trump sur la scène politique, que ce soit la démocratie américaine tout entière qui se décrédibilise au point que ses citoyens ont l’impression de vivre dans une vulgaire république bananière ? La campagne électorale comme le vote, se sont déroulés dans la violence et le déni dans un pays qui compte autant d’armes que de citoyens, marqués de tentatives d’assassinat, de paranoïa de la fraude électorale, de querelles d’avocats, d’infox et de fake news, avec caméras de surveillance, snipers sur les toits et déploiement du FBI... Il y a quatre ans les Etats-Unis n’ont pas pu faire ce que le Cap-Vert ou Maurice font depuis leur indépendance, ce que le Botswana a fait il y a quelques jours : une transition courtoise, un passage de pouvoirs respectueux des règles de la démocratie.
Donald Trump avait promis que s’il était réélu, il se ferait « dictateur » pendant un jour, et force est de lui reconnaitre qu’il fait souvent ce qu’il avait dit qu’il ferait. Mais ça, c’était avant. C’était avant qu’il ne se retrouve à la Maison Blanche avec une majorité populaire alors qu’il se préparait à contester les résultats, et qu’il a l’assurance d’avoir à sa botte le Sénat, la Chambre des Représentants et la Cour Suprême, cela peut donner des idées quand on a un ego comme le sien. Alors si Wall Street jubile, après avoir retenu son souffle, nous n’avons pour notre part, nous le reste du monde, mais aussi les femmes américaines et les étrangers installés aux Etats-Unis, et de manière générale tous ceux qui sont épris de paix, de liberté et de justice, aucune raison de sauter de joie…
A moins qu’un grand miracle ne se produise : Donald Trump est fondamentalement un homme imprévisible, il est capable du pire et il l’a prouvé, et s’il faisait son Thomas Beckett et devenait capable du meilleur ?
LA CAMPAGNE FANTÔME DE MACKY SALL
Par téléphone et messages WhatsApp, l'ex-président tente de garder la main sur son parti à 3000 kilomètres de distance. Une stratégie qui déstabilise ses troupes. "En politique, le contact et la chaleur humaine comptent", confie un membre de l'APR
(SenePlus) - L'ancien président Macky Sall, qui avait pourtant promis de se retirer de la vie politique en quittant ses fonctions en mars dernier, mène aujourd'hui une campagne électorale inédite depuis le Maroc. Désigné tête de liste de la coalition d'opposition Takku Wallu pour les législatives du 17 novembre, il tente de maintenir son influence à distance.
Le Monde rapporte une scène révélatrice survenue le 26 octobre à Thiès, près de Dakar : des militants de l'Alliance pour la République (APR) sont regroupés autour d'un téléphone, écoutant leur leader s'exprimer via le député sortant Abdou Mbow qui fait office de relais. Cette situation a suscité des commentaires ironiques dans les médias sénégalais qui ont baptisé l'initiative "campagne WhatsApp", relate le quotidien français.
Le journal précise que le 30 septembre, la coalition Takku Wallu, rassemblant notamment l'APR et le Parti démocratique sénégalais (PDS), avait officialisé la candidature de Macky Sall comme tête de liste nationale, démontrant ainsi son influence persistante malgré son exil marocain.
Le Monde cite la "Lettre à mes compatriotes" diffusée le 6 novembre, dans laquelle Macky Sall justifie son retour politique : "Nous constatons que l'économie est en berne", écrit-il, critiquant "le populisme" et les "contre-vérités [qui] tiennent lieu de mode de gouvernance." Il y explique son retrait initial par "courtoisie républicaine", s'étant "imposé un temps de recul et de réserve."
Toutefois, rapporte le quotidien français, l'ancien président reste évasif sur les raisons de sa campagne à distance. Un cadre de l'APR confie au Monde, sous couvert d'anonymat : "Nous étudions les possibilités, mais l'hypothèse de sa présence sur le territoire pour la campagne des législatives est peu probable."
Selon les témoignages recueillis par Le Monde, Macky Sall maintient fermement le contrôle des opérations malgré son éloignement. "Il suit tout de très près", affirme Omar Youm, proche et cadre de l'APR, cité par le journal. Sa stratégie se concentre sur la défense de son bilan présidentiel (2012-2024) et l'attaque frontale des premiers mois de gouvernance du Pastef.
Face à cette situation sans précédent, Le Monde rapporte que l'APR a dû repenser sa stratégie. "On parie sur le porte-à-porte plus que sur les meetings. On pousse les militants de base à aller à la rencontre des citoyens", confie un député sortant au quotidien français. Le journal cite également Mamadou Lamine Sarr, chercheur en sciences politiques, qui rappelle : "L'APR a longtemps été une machine électorale d'une grande efficacité. Il leur reste un savoir-faire en la matière. Leur présence dans le Sénégal profond est forte."
Le Monde fait état d'un malaise croissant au sein du parti. "En politique, le contact et la chaleur humaine comptent. Là, cette dimension est absente", avoue un militant dans les colonnes du journal. Un autre membre du parti confie : "Malheureusement, on ne trouve personne qui remplace vraiment Macky dans ce rôle de leader. Il a fondé l'APR et dirigé le pays pendant douze ans."
Pendant ce temps, son adversaire Ousmane Sonko, Premier ministre et cofondateur du Pastef, profite de cette absence pour multiplier les apparitions publiques, allant jusqu'à organiser le 29 octobre une démonstration de force à Fatick, fief historique de Macky Sall.
UN BALLON D'OR AU COUTEAU
Quarante et un points, c'est l'infime marge qui sépare Rodri de Vinicius Jr.. Le milieu de terrain de Manchester City s'impose avec 1 170 points sur 1 485 possibles, devant le Brésilien du Real Madrid (1 129 points)
(SenePlus) - France Football et L'Équipe révèlent ce samedi les détails du vote du Ballon d'Or 2024, marqué par un duel haletant entre Rodri et Vinicius Jr.
Le verdict est tombé avec une marge infime : seulement 41 points séparent le lauréat espagnol Rodri (1 170 points) de son dauphin brésilien Vinicius Jr. (1 129 points), sur un total possible de 1 485 points. Cette faible différence témoigne de l'intensité de la bataille pour le prestigieux trophée.
Le podium est complété par Jude Bellingham (917 points), autre pensionnaire du Real Madrid, qui devance largement son coéquipier Dani Carvajal (550 points). Le Real Madrid place d'ailleurs quatre joueurs dans le top 10, avec également Toni Kroos en neuvième position.
La surprise vient peut-être de Kylian Mbappé, sixième avec 420 points, qui recule de trois places par rapport à l'édition précédente, tout comme Erling Haaland, cinquième avec 432 points. L'écart est saisissant entre le trio de tête et le reste des nommés : plus de 620 points séparent Rodri du quatrième, Carvajal.
L'Espagne, championne d'Europe, domine le classement avec cinq joueurs dans le top 15 : Rodri, Carvajal, le prodige Lamine Yamal (8e), Dani Olmo (13e) et Nico Williams (15e). L'Angleterre suit avec trois représentants : Bellingham, Kane (10e) et Foden (11e).
Fait notable, deux des trente nommés n'ont reçu aucun point : Artem Dovbik, pourtant meilleur buteur de Liga avec Gérone, et Mats Hummels, finaliste de la Ligue des champions avec Dortmund. L'autre Français de la liste, William Saliba, termine 24e avec 8 points.
Le classement reflète une saison marquée par les performances exceptionnelles de Manchester City et du Real Madrid, avec une domination espagnole qui s'explique notamment par le sacre de la Roja à l'Euro 2024. La mince différence de points entre Rodri et Vinicius Jr. restera comme l'une des plus serrées de l'histoire du trophée.
AMADOU BA, L'ÉMANCIPATION D'UN EX-PREMIER MINISTRE
Les législatives du 17 novembre sont devenues son terrain de reconquête politique, loin de l'ombre de son ancien mentor Macky Sall. Face aux escarmouches d'Ousmane Sonko, l'ancien Premier ministre révèle une combativité insoupçonnée
(SenePlus) - L'ancien chef du gouvernement tente de s'imposer comme le véritable leader de l'opposition. Les élections législatives anticipées du 17 novembre pourraient marquer sa rupture définitive avec l'ombre tutélaire de Macky Sall.
Le ton est donné dès le 21 octobre, quand Ousmane Sonko lance un défi inattendu à son prédécesseur à la primature : un débat public contradictoire. Contre toute attente, Amadou Ba accepte, non sans ironie : "Manifestement, j'ai vu juste en affirmant que M. Ousmane Sonko éprouve une nostalgie sans doute légitime de ma modeste personne."
Bien que le débat n'ait finalement pas eu lieu - le CNRA y ayant mis son veto - cette séquence révèle, comme le rapprorte Jeune Afrique (JA), une nouvelle facette d'Amadou Ba. L'homme réputé discret et mesuré montre désormais les crocs. Quand Sonko le traite de "voleur", il réplique en le qualifiant "d'éternel opposant lent et incompétent, ne faisant que du bavardage."
"Nous sommes en train de découvrir un autre Amadou Ba, qui est plus libre et se met de plus en plus dans la peau du leader de l'opposition", se réjouit Oumar Sow, ancien conseiller présidentiel devenu cadre de la coalition Jamm Ak Njariñ, cité par JA.
Cette métamorphose s'explique par une rupture majeure : Amadou Ba a quitté l'Alliance pour la République (APR) et la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY), emmenant avec lui le Parti socialiste et l'Alliance des forces de progrès. Mi-septembre, il lance son propre mouvement, "Nouvelle responsabilité", destiné à devenir un parti politique.
"C'est quelqu'un qui n'a plus de contraintes. Il n'a plus les mains liées et peut maintenant tracer sa voie", confie À Jeune Afrique, un ancien collaborateur à la primature. Un autre allié renchérit : "C'est un mal pour un bien qu'il ait échoué à la présidentielle. Cela lui a donné l'occasion de prendre davantage son destin en main."
Toutefois, cette émancipation n'est pas sans obstacles. Selon le magazine panafricain, les investitures pour les législatives ont créé des frustrations, notamment chez Oumar Sow, relégué à la 27e place sur la liste nationale : "Je fais partie des rares personnes qui ont soutenu Amadou Ba et je me sens trahi", confite-t-il à JA.
À en croire Jeune Afrique, l'enjeu de ces législatives dépasse la simple confrontation avec Sonko. "Ce que veulent Amadou Ba et ses nouveaux alliés, ce n'est pas de battre Ousmane Sonko. C'est arriver devant Macky Sall", analyse un observateur. Une affirmation que réfute Oumar Sow, toujours dans les colonnes de JA : "Nous n'avons que faire des leaders qui sont hors du pays et s'adressent aux Sénégalais depuis WhatsApp. Nous, nous sommes sur le terrain et notre objectif, c'est d'être les premiers."
Pour l'ancien Premier ministre, qui avait obtenu 35% des suffrages à la présidentielle, ces législatives représentent une opportunité de renaissance politique. Reste à voir si cette stratégie d'émancipation portera ses fruits dans les urnes.