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23 avril 2025
Société
LA FRANCE AVOUE ENFIN LE MASSACRE DE THIAROYE
Dans une lettre à Diomaye, Macron qualifie pour la première fois de "massacre" la tuerie perpétrée contre les tirailleurs africains en 1944. Le président sénégalais espère désormais "un engagement total" de la France dans la recherche de la vérité
(SenePlus) - Dans un geste historique, le président Emmanuel Macron reconnaît officiellement le "massacre" de Thiaroye dans une lettre adressée à son homologue sénégalais Bassirou Diomaye Faye, quatre-vingts ans après les événements tragiques du 1er décembre 1944.
Dans une interview exclusive accordée à France 2 ce 28 novembre 2024, le président sénégalais a révélé cette avancée significative : "J'ai reçu aujourd'hui une lettre du président Macron dans laquelle il reconnaît que ce fut en effet un massacre". Dans cette lettre citée par RFI, le chef de l'État français écrit que « la France se doit de reconnaître que ce jour-là, la confrontation de militaires et de tirailleurs qui exigeaient que soit versé l'entièreté de leur solde légitime, a déclenché un enchaînement de faits ayant abouti à un massacre. »
Cette reconnaissance officielle marque un tournant décisif dans l'histoire franco-sénégalaise, après des décennies de silence et de minimisation des faits.
Selon une enquête approfondie du Monde, le drame s'est déroulé à l'aube du 1er décembre 1944, lorsqu'un impressionnant dispositif militaire - comprenant un millier de soldats, trois automitrailleuses, un char et deux blindés - a encerclé le camp où dormaient les tirailleurs africains. L'opération s'est soldée par une fusillade meurtrière contre ces soldats qui réclamaient simplement le paiement de leurs indemnités après avoir servi sous l'uniforme français pendant la Seconde Guerre mondiale.
Le bilan humain de cette tragédie reste controversé. Si les autorités militaires de l'époque n'ont reconnu que 35 morts, l'historienne Armelle Mabon estime le nombre de victimes "entre 300 et 400". Un rapport militaire de l'époque, mentionné par Le Monde, fait état de "508 cartouches tirées" sur une "foule compacte", suggérant "un carnage de grande ampleur".
Le président Bassirou Diomaye Faye voit dans cette reconnaissance une opportunité historique : "Ce pas consistant à reconnaître que c'est un massacre doit ouvrir la porte à une collaboration parfaite pour la manifestation de toute la vérité sur ce douloureux événement de Thiaroye", a-t-il déclaré à France 2. Il souligne cependant que "quelque chose a été caché" et espère désormais "un engagement total" de la France dans la recherche de la vérité.
Cette reconnaissance fait écho aux déclarations récentes de l'ancien président François Hollande qui, dans un entretien à RFI plus tôt cette semaine, avait déjà qualifié les événements de "massacre", précisant qu'il s'agissait d'une "répression à la mitrailleuse" et non d'une simple manifestation qui aurait dégénéré.
La reconnaissance officielle du massacre par Emmanuel Macron intervient alors que de nombreuses zones d'ombre persistent encore, notamment en raison d'archives manquantes ou inaccessibles. Elle marque néanmoins une étape cruciale dans le processus de reconnaissance et de réconciliation entre la France et le Sénégal, ouvrant potentiellement la voie à de nouvelles investigations sur ce chapitre tragique de l'histoire coloniale française.
L'ÉTONNANT REBOND D'AIR SÉNÉGAL
Six mois après une sortie de piste qui avait fait 11 blessés, la compagnie obtient le renouvellement de sa certification internationale de sécurité. Un sésame qui lui permet de maintenir ses accords avec des partenaires comme Royal Air Maroc ou Air France
(SenePlus) - Dans un développement significatif pour l'aviation civile ouest-africaine, Air Sénégal vient d'obtenir le renouvellement de sa certification Iosa (Iata Operational Safety Audit) jusqu'au 25 novembre 2026. Ce renouvellement, effectif dès le 26 novembre, intervient dans un contexte particulier marqué par un incident majeur survenu plus tôt cette année.
La certification Iosa, véritable sésame pour les compagnies aériennes internationales, représente un gage de sécurité rigoureux. Selon les informations de Jeune Afrique (JA), ce processus implique la validation de pas moins de 1 057 points de contrôle, couvrant huit domaines essentiels de l'exploitation aérienne, notamment la maintenance et la formation des équipages. "Une première réunion de travail en présentiel est suivie d'un certain nombre d'échanges entre les auditeurs et la compagnie", détaille le média, soulignant la rigueur du processus.
L'obtention initiale de cette certification en août 2023 avait ouvert de nouvelles perspectives pour le transporteur national sénégalais. La compagnie avait ainsi pu négocier des accords stratégiques avec plusieurs partenaires de renom : un accord de partage de code avec Royal Air Maroc et Air Côte d'Ivoire, ainsi qu'un accord interligne avec Air France permettant aux passagers de poursuivre leur voyage vers d'autres destinations françaises depuis Paris. Toutefois, Jeune Afrique précise qu'à ce jour, seul l'accord avec Royal Air Maroc est pleinement opérationnel.
Un incident majeur qui soulève des questions
Le renouvellement de la certification intervient pourtant dans le sillage d'un incident sérieux. Dans la nuit du 8 au 9 mai, un Boeing 737-300 affrété par Air Sénégal auprès de la compagnie privée Transair est sorti de piste lors d'un vol Dakar-Bamako, causant onze blessés. L'appareil en question, âgé de plus de 30 ans et acquis fin 2023 auprès de la compagnie roumaine Tarom, faisait l'objet de critiques récurrentes de la part des passagers, comme l'attestent les témoignages recueillis par JA.
Cette situation soulève des interrogations sur les procédures d'audit. Un expert du secteur, cité par le journal, apporte un éclairage crucial : "Lors de leur passage, les auditeurs Iosa ne rentrent pas dans les avions affrétés, ils vérifient simplement que l'acteur qu'ils contrôlent a bien effectué son propre audit de la compagnie à laquelle il recourt".
L'enquête menée par Jeune Afrique n'a pas réussi à établir si l'appareil Transair impliqué dans l'incident disposait des certifications requises. De plus, la chronologie exacte de l'audit Iosa par rapport à l'incident reste floue, l'IATA ayant déclaré que "toutes les données concernant ce genre d'audit sont confidentielles".
Fait notable relevé par le journal : selon les données de Flightradar24, Air Sénégal a cessé d'utiliser les appareils Transair depuis le 13 mai, suggérant une révision significative de sa politique d'affrètement.
Le précédent des accidents majeurs
Jeune Afrique rappelle que d'autres accidents graves dans l'histoire récente de l'aviation africaine n'ont pas non plus entraîné de remise en cause des certifications. Le crash du Boeing 737 MAX d'Ethiopian Airlines en mars 2019 et celui du McDonnell Douglas DC-9-83 de Swift Air exploité par Air Algérie en juillet 2014 n'ont pas affecté le statut Iosa de leurs opérateurs respectifs. Dans ces cas, les enquêtes ont conclu à une défaillance logicielle pour le premier et à une réaction inadaptée de l'équipage pour le second.
L'incident impliquant le vol Transair affrété par Air Sénégal reste actuellement sous investigation par le Bureau d'enquête et d'analyse sénégalais, dont les conclusions pourraient avoir des implications significatives pour les pratiques d'affrètement dans la région.
LES PRÉCISIONS DE LA POLICE NATIONALE SUR LES SUPPOSÉES RESTRICTIONS D'ENTRÉE AU SÉNÉGAL
Dans un communiqué, la Police nationale a fermement démenti les rumeurs de restrictions d'entrée, précisant qu'aucune mesure de ce type n'a été mise en place et réaffirmant l'engagement du Sénégal en faveur de l'intégration régionale.
À travers un communiqué de presse, la Police nationale a indiqué que, depuis quelques heures, des informations parues à travers une certaine presse ont fait état des mesures de restriction d’entrée sur le territoire sénégalais appliquées par les services de la Direction de la Police de l’Air et des frontières concernant des ressortissants d’un pays de la sous-région.
Mais, elle a tenu à préciser que ces informations sont "dénuées de tout fondement".
La Division communication et des relations publiques de la Police précise qu'"à ce jour, aucune mesure de restriction ou de fermeture des frontières n’a été prise par les autorités compétentes".
Mieux, ajoute la source, "dans le cadre de l’exécution de ses missions de contrôle de l’immigration, la Police nationale veille à l’application rigoureuse des dispositions en la matière", rappelant que, conformément au protocole de la Cedeao et son acte additionnel, la carte d’identité biométrique Cedeao fait partie des documents requis dans le cadre de la mobilité au sein de l’espace communautaire.
Toutefois, "soucieux de l’atteinte de l’objectif d’intégration régionale et fidèle à ses traditions d’hospitalité, le Sénégal continue de faire valoir la flexibilité en termes de conditions et de modalités d’entrée sur son territoire des ressortissants des États de la sous-région en général et des pays limitrophes en particulier", conclut le communiqué.
SIX MOIS DE PRISON FERME REQUIS CONTRE MOUSTAPHA DIAKHATÉ
Le parquet a estimé que le prévenu avait franchi le Rubicon en quittant le domaine de l’adversité politique pour sombrer dans l’animosité.
Dans son réquisitoire, le représentant du ministère public a précisé qu'il n'y a aucun traitement inéquitable, notamment en comparaison avec le cas d'Azoura Fall. Il a souligné que son chef de parquet est actuellement à Bruxelles et qu'il n'a reçu aucune instruction, ce qui exclut tout caractère politique à ce procès.
Il s'agit d'une auto-saisine, déclenchée par les invectives de Moustapha Diakhaté à l'encontre d'un groupe de personnes.
Concernant la première infraction, le parquet a estimé que le prévenu avait franchi le Rubicon en quittant le domaine de l’adversité politique pour sombrer dans l’animosité. Selon Google Traduction, le mot "alkou" signifie "damné", "condamné aux peines de l'enfer", et il est donc péjoratif.
Le second délit est lié à l'atteinte à la paix publique. Les propos de Diakhaté ont provoqué un tumulte sur les réseaux sociaux. Traiter publiquement ses semblables de damnés est une atteinte aux bonnes mœurs, selon le représentant du parquet. Ce dernier a requis une peine d'un an de prison, dont six mois ferme, ainsi qu'une amende de 300 000 FCFA.
PRÈS DE TROIS FEMMES SUR DIX VICTIMES DE VIOLENCES AU SÉNÉGAL
Une enquête de l’ANSD révèle un taux de prévalence alarmant de 31,9% sur les violences subies par les femmes au cours des 12 derniers mois, avec une disparité marquée entre les milieux urbains et ruraux.
iGFM - (Dakar) L’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) a révélé les résultats de son enquête sur les violences faites aux femmes. Les chiffres font froid dans le dos.
Au Sénégal, près de 3 femmes sur 10 ont subi au moins une forme de violence (physique, psychologique, sexuelle ou économique) au cours des 12 derniers mois. C’est ce qu’a révélé l’Enquête nationale de référence sur les violences faites aux femmes, publiée ce mois de novembre. Soit un taux de prévalence de 31,9%.
L’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd), qui auteure de l’enquête, informe que les résultats, selon le milieu de résidence, montrent que les femmes qui résident en milieu urbain semblent avoir plus subi de violences récentes durant es 12 mois précédant l’enquête, que celles qui vivent en milieu rural. En effet, cette proportion est de 36,9% en milieu urbain contre 24,9% en milieu rural.
Aussi, au cours des douze derniers mois, plus d’un tiers des femmes, âgées de 15 ou plus au Sénégal (31,9%) ont subi un type de violence. Et c’est malheureusement dans la région de Diourbel que cette prévalence récente est la plus élevée (42,6%). Avec un taux de prévalence de 15,1%, la région de Fatick est celle dans laquelle les violences faites aux femmes sont moins prégnantes.
LA RÉVOLUTION DES NITTU DAARA
Médias, politique, recherche : les produits des écoles coraniques s'imposent dans des espaces auparavant réservés aux élites issues du système français. Longtemps cantonnés dans des rôles subalternes, ils s'émancipent désormais de l'héritage colonial
Très présents dans les médias, la politique, le secteur privé et dans le monde universitaire, les "Nittu Daara" sont en train de bousculer la hiérarchie et un espace qui était souvent réservé aux produits de l'école française. Et la troisième édition de la journée nationale des daara célébrée aujourd'hui est juste une nouvelle étape dans cet "affranchissement" de ces produits des daara.
Cantonnés depuis longtemps dans des rôles "primitifs" de prise en charge du destin des enfants talibés dans les écoles coraniques, les "Nittu Daara" ne devaient pas sortir de cette "délimitation historique", survivance d'une dichotomie coloniale. Ainsi, l'administration qui était alors fille de cette colonisation devait être composée uniquement de fonctionnaires issus de l'école dite française. Et cette séparation a continué même après les indépendances malgré quelques embellies dans l'enseignement et la diplomatie.
Mais depuis quelques années, force est de constater que les "Nittu daara" sont en train visiblement de faire leur mue au Sénégal. Ils s'affranchissent de plus en plus de cet ostracisme historique. Dans les médias par exemple, ils commentent l'actualité politique. Sortant peu ou prou de leur zone de confort habituelle qui est la prêche et les écoles coraniques, ils donnent de plus en plus leurs points de vue sur les affaires de la cité.
C'est dans ce cadre qu'il y a eu l'avènement de figures médiatiques comme le chroniqueur Bara Ndiaye, élu récemment député. Clivant mais très visible dans l'espace médiatique, ce dernier s'est bâti une réputation grâce à ses analyses politiques et son sarcasme détonnant. Et ses prises de position sur le plan politique en faveur du Pastef ont fait de lui par la force des choses une des figures de proue du "Projet".
D'autres "Nittu daara" comme Mbacké Sylla, Maodo Faye, Mansour Diop, imam Mouhamad Al amine Dramé s'essaient aussi à l'analyse politique et se disputent l'espace médiatique avec les autres chroniqueurs attitrés.
Dans le même ordre d'idées, force est de constater que beaucoup de personnalités issues des daara se sont engagées ces dernières années en politique. Et cet état de fait est plus saillant encore avec le Pastef avec le Mouvement des "Domou Daara" des Patriotes (MODAP) qui est une entité influente de cette formation politique.
Serigne Mboup, symbole d'une "intégration" réussie
D'ailleurs à l'issue des élections législatives, plusieurs parmi eux vont entrer à l'hémicycle. Un acteur politique comme Serigne Modou Boussou Dieng avait même sa propre coalition lors de ces législatives. Mais celui qui incarne à merveille cette "intégration" réussie est sans doute l'homme d'affaires Serigne Mboup. Chef d'entreprise prospère, l'ancien pensionnaire de Koki a réussi aussi son entrée en politique devant le maire de la ville de Kaolack, sans oublier qu'il était aussi candidat lors de la dernière élection présidentielle.
Serigne Cheikh Tidiane Sy «Al Maktou», Sidy Lamine Niasse, Serigne Mansour Sy « Jamil», ces précurseurs
Toutefois, il est important de noter que même si ces figures sont les plus visibles dans l'espace médiatique, il y a plusieurs « Nittu daara » qui ont eu des intégrations réussies dans ces sphères jusqu'à présent très réservées aux «francisants». Ils sont nombreux à être dans la finance, le secteur privé, mais aussi dans le monde académique comme le tout nouveau Directeur des Affaires religieuses et de l’Insertion des diplômés en langue arabe, Djim Drame qui est maître de recherches titulaire à l’Institut Fondamental d’Afrique Noire (IFAN). Il y a aussi Professeur Abdou Aziz Kébé qui n'est plus à présenter sur le plan intellectuel mais aussi la jeune garde incarnée par Dr Sidy Jamil Niane.
Chargé de recherche titulaire en islamologie, Seydi Diamil Niane a soutenu une thèse en islamologie au Département d’études arabes de l’Université de Strasbourg en septembre 2017 sur « Le conflit idéologique entre le wahhabisme et la confrérie soufie Tijāniyya au sud du Sahara : le Sénégal en exemple. Actuellement il est chercheur à l'IFAN. Par ailleurs, il faut dire que même s'il y a des efforts à faire pour atteindre un syncrétisme réussi entre l'école française et les daara, il faut souligner que beaucoup d'eau a coulé depuis l'époque où des figures emblématiques comme Serigne Cheikh Tidiane Sy Al «Maktoum», qui est le premier «Nittu daara» à créer un parti politique vers les années 50, Sidy Lamine Niasse, Serigne Mansour Sy Jamil étaient les seules embellies dans la grisaille. Désormais la mayonnaise commence à prendre.
PAR Boubacar Biro Diallo
HABITAT À DAKAR : ENTRE DÉFIS PERSISTANTS ET SOLUTIONS À RÉINVENTER
La modernisation des modèles existants comme les SICAPS et la Société HLM, couplée à une réorientation sociale du projet Diamniadio, pourrait ouvrir la voie. Une transformation qui nécessite une vision politique claire
Dakar, à l’instar de nombreuses grandes villes africaines, fait face à une crise aiguë du logement. La pression démographique, conjuguée à une urbanisation rapide et souvent désordonnée, a exacerbé les inégalités sociales. La flambée des loyers et l’insuffisance de logements sociaux plongent les jeunes professionnels et les familles défavorisées dans une quête incessante d’un habitat décent.
Malgré des efforts notables, comme ceux des SICAPS, de la Société HLM ou encore du projet ambitieux de Diamniadio, la demande croissante de logements abordables reste largement insatisfaite. Ces initiatives offrent des enseignements précieux qui, s’ils sont renforcés et adaptés, pourraient guider vers des solutions durables.
SICAPS et Société HLM : Héritage et défis actuels
Les SICAPS : Offrir des terres viabilisées à faible coût
Les Sociétés Immobilières pour la Construction et l’Aménagement de Parcelles Sociales (SICAPS) ont été mises en place pour fournir aux familles modestes des parcelles viabilisées à des coûts accessibles. Elles ont permis à de nombreuses familles de construire leur propre maison dans des zones périphériques comme Pikine, Yeumbeul ou Guédiawaye.
Cependant, ce modèle a rencontré des obstacles majeurs :
Insuffisance des infrastructures : L’absence de routes, d’écoles, ou encore de centres de santé dans ces zones a compromis leur viabilité.
Spéculation foncière : Les parcelles, bien que destinées à des ménages modestes, sont souvent revendues à des prix exorbitants.
La Société HLM : Un acteur historique en quête de renouveau
Depuis les années 1970, la Société Habitations à Loyer Modéré (HLM) a joué un rôle essentiel dans la création de logements collectifs à Dakar. Des quartiers comme Grand Yoff, Fass ou les Parcelles Assainies témoignent de l’impact de cette institution.
Toutefois, l’institution doit faire face à :
Une demande dépassant largement son offre.
Des projets inadaptés aux besoins actuels des jeunes actifs.
Une coordination insuffisante avec d’autres partenaires du secteur immobilier.
Diamniadio : Une solution ambitieuse mais sélective
Le pôle urbain de Diamniadio représente une tentative audacieuse du gouvernement sénégalais pour décongestionner Dakar. Cette ville nouvelle se veut un modèle d’urbanisme moderne, intégrant zones résidentielles, économiques et universitaires.
Les points forts :
Diamniadio a déjà permis le développement de résidences modernes et d’infrastructures telles que le Train Express Régional (TER).
En attirant des entreprises et des investisseurs, la zone a contribué à une décentralisation progressive.
Les limites :
Coût élevé des logements : Une majorité des habitations construites sont inaccessibles aux ménages modestes.
Manque d’infrastructures sociales : Les écoles, hôpitaux et espaces verts restent insuffisants, limitant l’attractivité pour les familles.
Inclusion sociale absente : Peu de logements sociaux sont intégrés dans les projets en cours.
Si Diamniadio doit devenir un véritable modèle de développement urbain, il est impératif de revoir sa stratégie pour inclure des logements accessibles à tous.
Pistes pour un habitat durable et inclusif
Pour répondre aux défis du logement à Dakar, il est essentiel d’adopter une approche globale et inclusive :
Moderniser les modèles existants :
Renforcer les SICAPS avec des financements innovants et des partenariats public-privé.
Repenser la stratégie de la Société HLM pour répondre aux besoins des jeunes et des familles modestes.
Encourager un développement équitable à Diamniadio :
Imposer un quota de logements sociaux dans tous les projets immobiliers.
Développer des infrastructures sociales pour améliorer la qualité de vie.
Soutenir les coopératives d’habitat :
Inspirées des succès internationaux, ces structures permettent à des groupes de construire ensemble des logements durables et abordables.
Créer un fonds national pour le logement social :
Ce fonds pourrait financer des projets destinés aux populations vulnérables, en partenariat avec des bailleurs de fonds internationaux.
Renforcer la régulation immobilière :
Mettre en place des politiques de plafonnement des loyers pour lutter contre la spéculation foncière et protéger les locataires.
La crise du logement à Dakar n’est pas seulement un problème urbain, mais une urgence sociale et économique. En s’appuyant sur les acquis des SICAPS, de la Société HLM et sur les opportunités offertes par Diamniadio, le Sénégal peut tracer un chemin vers un avenir où chaque citoyen dispose d’un toit décent.
Cette transformation nécessite une vision politique claire, une collaboration active entre les secteurs public et privé, et surtout, une participation des citoyens pour construire ensemble un avenir inclusif.
L’heure est venue de transformer la crise en opportunité. Qu’attendons-nous pour agir ?
par Mody Niang
POUR FAIRE FACE AUX MANŒUVRES DU PRÉSIDENT-POLITICIEN
Sept ans après sa première parution dans les colonnes de WalfQuotidien, cette contribution retrouve une actualité saisissante, avec des idées toujours actuelles
Sept ans après sa première parution dans les colonnes de WalfQuotidien, la contribution de Mody Niang retrouve une actualité saisissante. Le texte "Appel autour d'une esquisse de programme alternatif commun pour faire face aux manœuvres du président-politicien", initialement publié en trois parties en septembre 2017, a été rediffusé ce 27 novembre 2024.
Cette republication fait suite à un récent article de l'auteur, "Encore bravo peuple sénégalais, cette fois pour votre cohérence !", paru le 21 novembre 2024. Dans ce texte, Mody Niang souligne la persistante pertinence de ses analyses passées, notamment concernant la réforme nécessaire du système de rémunération des agents publics.
À sa demande, nous republions cette contribution dont les idées, selon l'auteur, "restent actuelles et exactement miennes aujourd'hui plusieurs années après".
Appel autour d'une esquisse de programme alternatif commun pour faire face aux manœuvres du président-politicien
En janvier 2017, je lançais un appel à mes compatriotes, appel dont le titre était : « Pour un large front républicain, face aux apparences bavardes et trompeuses de la nauséabonde gouvernance du président-politicien ». En lançant cet appel, que Le Quotidien et WalfQuotidien m’avaient publié respectivement les 14 et 16 de ce mois, je ne me faisais aucune illusion sur les réactions positives qu’il pouvait provoquer chez mes compatriotes, dont la lecture n’est pas le point fort pour nombre d’entre eux. Je ne m’étais pas tout à fait trompé : des réactions, il y en a eu, mais pas beaucoup. Je ne m’en suis pas découragé pour autant. J’ai décidé de le redimensionner et d’en faire trois contributions publiées par WalfQuotidien et dont la première est celle-ci. Je rappelle que j’introduisais ainsi le prétentieux Appel des 14 et 16 janvier :
« Il a gagné ses élections législatives, de la manière que l’on sait, et se retrouve avec une majorité confortable, voire écrasante. Il a reconduit son Premier ministre et nommé un gouvernement de 39 membres qui siègent, au conseil des ministres, à côté de quatre ministres d’État sans portefeuille, payés quatre (4) millions de francs CFA par mois. Quarante-trois ministres, sans compter les ministres conseillers spéciaux et ministres conseillers dont personne ne connaît le nombre exact, peut-être pas même celui qui les a nommés. Nous sommes loin, très loin d’un gouvernement de 23 à 25 membres au plus qu’il s’engageait à nommer, ‘’pour plus d’efficacité’’. Plus de gouvernement encombrant dont les membres se bousculent dans la salle du Conseil des ministres, affirmait-il avec force, mais sans conviction. On en a le cœur net aujourd’hui. »
J’annonçais ensuite que je n’allais surtout pas m’attarder sur les élections législatives les plus carabinées qu’on ait jamais organisées dans ce pays, au moins depuis le Code électoral de 1992. Ni sur la parole de ce président-politicien qui ne vaut plus rien, qu’il renie à la moindre incartade, au gré de ses intérêts politiciens du moment. En matière de wax-waxeet, il dépasse son prédécesseur de plusieurs crans[1]. Sans état d’âme donc – en a-t-il en réalité –, il a nommé un gouvernement de continuité de 43 membres, un gouvernement très politique, très politicien, qui a pour mission exclusive de le faire réélire dès le premier tour. C’est un secret de polichinelle qu’il craint un second tour, encore plus une défaite, comme la peste et le choléra, et mettra tout en œuvre pour l’éviter. Il mettra tout en œuvre, vraiment tout, pour juguler cette lugubre catastrophe. Il ne lésinera sur aucun moyen, aucun vraiment pour atteindre cet objectif.
Des moyens, il en a à foison, en usera et en abusera. Il dispose, outre son fameux décret, de Fonds spéciaux pratiquement illimités. D’ores et déjà, il a fait de certains ministères – du moins selon certains observateurs – de véritables vaches dont les mamelles regorgent de lait au point de raser le sol. C’est le cas, en particulier, du Ministère des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, et de celui du Pétrole et des Énergies, confiés à deux de ses très proches, Abdoulaye Daouda Diallo et Mansour Élimane Kane. Un autre proche, Ministre de l’Économie, des Finances et du Plan, leur facilitera la tâche s’il y a lieu, et il y aura sûrement lieu. Ce ministre, Amadou Ba, ancien Directeur général des Impôts et Domaines (DGID), joue un rôle essentiel dans la mal gouvernance financière du pays.
Une autre vache à lait ou que l’on peut considérer comme telle, la Caisse de Dépôt et de Consignation (CDC), qui gérerait plus de 200 milliards de francs CFA et d’énormes ressources foncières, est confiée à son frère cadet. Pourtant, il avait pris l’engagement formel – un de plus sans lendemain – à ne jamais prendre un décret pour le nommer à quelque fonction que ce soit. Selon de nombreux observateurs, ce frère serait loin, très loin d’avoir le profil de l’emploi. En outre, son nom a été cité dans plusieurs affaires non encore élucidées. Malgré tout, et malgré son engagement solennel public, il l’a bombardé à ce poste stratégique. Je ne suis pas sûr que le président Macron en ait un. Mais, s’il en avait, il ne lui viendrait jamais l’idée de le nommer à un poste aussi important. Ce serait un gros scandale en France, où il laisserait sûrement beaucoup de plumes. Plus que des plumes d’ailleurs.
De nombreuses directions, agences et autres structures (Centre des Œuvres universitaires de Dakar, Société nationale de la Poste, Port autonome de Dakar, Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes, etc.), joueront probablement leur partition dans la mission confiée à Bennoo Bokk Yaakaar, et principalement à l’APR, de faire réélire leur mentor dès le premier tour, le 24 février 2019. Á la tête de ces structures, on retrouve notamment deux de ses très proches, responsables de l’APR. Il s’agit, bien entendu, de Cheikh Oumar Ane et de Ciré Dia, respectivement Directeur général du Centre des œuvres universitaires (COUD) et de la Société nationale de la Poste.
Le président-politicien dispose de nombreux autres atouts pour réaliser son rêve. Il s’appuie, en particulier, sur un ministre (de l’Intérieur) et une administration (centrale comme territoriale) pratiquement acquis à sa cause. On peut aussi compter parmi ses atouts une Commission électorale nationale autonome (CÉNA) à bout de souffle. S‘y ajoute sa capacité de manipulations amplifiée par une télévision aux ordres exclusifs de son parti, de sa famille et, à un moindre degré, de ses alliés dociles qui se contentent des miettes qu’il veut bien leur distribuer.
Il ne s’arrête pas en si bon chemin. Il dispose d’ « atouts » multiformes dont la détestable transhumance qu’il exploite à fond. Cette tâche est facilitée par l’attachement morbide d’une certaine classe politique, d’une certaine société civile et de nombreux chefs dits religieux, à l’argent et aux honneurs. Or, de l‘argent, le président-politicien et son clan en ont à foison. Ils disposent, il convient de toujours le rappeler, d’un énorme trésor de guerre, dont le moins des avertis des Sénégalais sait comment il est alimenté. S’y ajoute son fameux décret qu’il a toujours en bandoulière pour ouvrir la porte des « honneurs » aux hommes et aux femmes qui n’ont plus cure du sens de l’honneur et de la dignité.
Nous reviendrons sur ces nombreux « atouts ». En attendant, nous pouvons affirmer, en nous fondant sur des faits précis, que ce président-politicien est pire que tout : il est la concentration de tous les vices que l’on peut imaginer. Il ne reculera devant aucune vilénie pour se faire réélire par tous les moyens, y compris par les plus illégaux. Cette réélection est pour lui et pour son clan une question de vie ou de mort. Sa nauséabonde gouvernance a tellement accumulé de scandales qu'il craint comme la peste d'être battu. Car, il sait que, dans ce cas, ce sera la pire des catastrophes pour lui et les siens. Son vieux prédécesseur et sosie a sur lui l'avantage de l'âge: le Sénégal se mettrait toute la communauté internationale sur le dos, s'il embastillait un vieillard de 90 ans (pourtant il le méritait largement). Lui, Macky Sall est jeune, du moins relativement. En cas de défaite, il sait ce qui l'attend, lui, sa famille, ses amis responsables APR, et nombre de membres de sa très soumise coalition Bennoo Bokk Yaakaar. Il mettra tout en œuvre pour éviter cette lugubre perspective (pour eux, bien entendu). Il a commencé d'ailleurs à mettre en place les stratégies les plus tordues pour être réélu dès le premier tour. Il compte déjà sur trois chevaux boiteux pour réaliser ces vilaines stratégies : le parrainage, la pauvreté et l'analphabétisme pour près de 50% de nos populations. Avec le parrainage, il va faire invalider – si on le laisse faire évidement – toutes les candidatures qui sont susceptibles de constituer de rivaux sérieux capables de lui compliquer sa sale besogne ? Pour cela, il peut compter sur un conseil constitutionnel dont la majorité de nos concitoyennes et de nos concitoyens considèrent que ses membres lui sont soumis. Et tout indique qu'ils ont raison, si considère certains antécédents. Le président-politicien compte sur d'autres magistrats impliqués, par leurs fonctions, dans le processus électoral.
Outre ce mur pratiquement infranchissable pour les candidats qui peuvent le gêner, il enfourchera le second cheval : la pauvreté de nos populations, du moins de nombre d'entre elles. C'est devenu un secret de polichinelle qu'il est assis sur un énorme trésor de guerre alimenté, pour l’essentiel, par nos pauvres deniers. Il est pratiquement sûr que c'est avec l'argent qu’il va se faire plus facilement réélire. Comme son vieux prédécesseur et sosie, il croit que nous avons tous un prix. N'est-ce pas que c'est ce vieux prédécesseur (prédateur) qui disait, à propos de nous Sénégalaises et Sénégalais, « quenous avions du mal à nous souvenir de notre dîner de la veille, et que nous ne croyions qu'à l'argent et aux honneurs ». Et, c'est à partir de cette conception peu valorisante qu'il nous a gouvernés pendant douze longues années. Son successeur et « fil » a emprunté la même voie. Depuis plusieurs mois, il fait montre d'une « générosité » déferlante et débordante. Au vu et au su de tout le monde, il reçoit des délégations au palais de la République (devenu le « poulailler de la république ») et distribue des millions de francs à tout va. Ses ministres et autres directeurs généraux et directeurs lui prêtent main forte tous les vendredis, quand ils « descendent sur le terrain », conformément à ses instructions. Son épouse n'est pas en reste : elle étonne, elle aussi, par sa « générosité » sans borne.
Le président-politicien exploite aussi sans état la pauvreté de nos populations par ses bourses dites familiales qui sont une véritable escroquerie politique. Le montant de cette bourse est de 25.000 francs CFA que reçoivent, tous les trois mois, des chefs de familles triés sur le volet. En d'autres termes, en un an, nos « privilégiés », à la tête d'une famille qui peut compter jusqu'à 30 à 40 membres, perçoivent 100.000 francs CFA. Cent mille francs tous les ans, distribués à la tête du client ! Et on les menace de perdre ce « privilège », s'ils ne votent pas le moment venu pour le « généreux » président-politicien car, s'il n'était pas réélu, les nouveaux gouvernants supprimeraient la bourse familiale dès les premiers mois de leur gouvernance. Il faut insister surtout sur l'escroquerie politique que constitue cette fameuse bourse de sécurité familiale. Rappelons que le montant est de 25.000 francs par trimestre, 25.000 francs de nos impôts, de notre sueur. Pendant ce temps, le ministre du président-politicien reçoit chacun, pour seule indemnité représentative de logement, un million (1.000.000) de francs CFA par mois, sans compter son salaire dont le montant est de quatre (4.000.000) de millions de francs. Je ne m’attarde pas sur les véhicules rutilants, le carburant qui coule à flots, et les autres nombreux avantages invisibles.
Je ne passerai pas sur trois ministres d’État qui tournent les pouces auprès du président-politicien. Outre leur indemnité de logement d’un million, ils perçoivent, selon mes dernières informations, un salaire mensuel de cinq 5.000.000) millions de francs et nous coûtent annuellement 180.000.000 de francs (eux trois). Presque pour rien. Pour rien d’ailleurs, sinon pour mobiliser les militants. Combien de ministres sont-ils nommés par le président-politicien ? Combien de ministres conseillers ? Combiens de conseillers spéciaux ? Combien de chargés de mission ? Combien d’ambassadeurs dits itinérants et qui ne sortent pratiquement jamais du pays ? Lui-même, qui nomme, ne le sait pas. Combien sont-elles, les agences nationales dont les directeurs généraux parfois venus de nulle part, perçoivent des salaires mensuels de quatre à cinq millions et parfois plus, sans compter les budgets qu’ils gèrent comme leur propre argent ? Dans ces conditions-là, est-il seulement décent de nous tympaniser avec cette maigre bourse dite familiale de 100.000 francs par an ? Notre président-politicien exploite aussi à fond l’analphabétisme de nos populations, en les manipulant et en frappant leur imagination à longueur d’années, en particulier lors de ses interminables inaugurations d’infrastructures. De ces infrastructures coûteuses et pratiquement sans impacts positifs significatifs sur la majorité des populations. Si on commençait par l’autoroute « Ila Touba », qui va nous coûter 416 milliards de francs CFA ! Elle relie Thiès et Touba, distantes de seulement 112 km, à travers un terrain sablonneux et avec comme seuls obstacles quelques rares arbres. Quand elle sera terminée, elle sera sûrement exploitée à leurs seuls profits par les Marocains, les Turcs, les Français ou les Chinois.
Si les populations de la ville de Touba avaient à donner leur avis, elles n’auraient sûrement pas choisi cette autoroute-là. Différentes télévisions nous ont présenté Touba, lors des pluies diluviennes de ces cinq ou six derniers jours. Pratiquement, toutes les maisons, les commerces, les stations d’essence, etc., étaient envahis par les eaux de pluie mélangées aux eaux usées nauséabondes. Beaucoup de gens sont sortis de leurs maisons. Pourtant, combien de milliards le politicien sénior et le politicien Jr ont-ils déclaré avoir investis dans l’assainissement de la ville ? Où sont-ils passés, ces milliards-là ? L’assainissement est un véritable problème pour Touba, une véritable priorité. Une autoroute, même de dernière génération – la trouvaille de nos politiciens – n’était sûrement pas la préoccupation des populations. Á la place, elles préfèreraient de loin l’assainissement de leur ville. Elles auraient aussi opté pour l’eau potable qui leur fait terriblement défaut. Une ville comme Touba avec, dit-on, deux à trois millions d’habitants sans eau potable alors que, à quelques encablures, à Touba Bogo exactement, git une abondante nappe phréatique d’eau douce qui pourrait faire boire les populations pendant cent ans au moins, dit-on. Elles auraient aussi choisi sans hésitation la réhabilitation, l’équipement des infrastructures sanitaires, et leur dotation en médicaments, en équipements, en personnels qualifiés et en nombre suffisant. L’hôpital de Matlaboul Fawzéni serait alors prioritaire. Comme « Ila Touba », le président-politicien a opté pour un autre investissement de prestige, un investissement lourd. Il s’agit de ce fameux Train Express (TER) régional qui va nous coûter les yeux de la tête : plus 1000 milliards francs CFA pour relier l’Aéroport international de Diamniadio à Dakar, sur 54 km. Un TER dit de dernière génération alors que, pour tout patrimoine en matière de chemin de fer, nous n’avons que le branlant « petit train bleu ».
Ces deux infrastructures, « Ila Touba » et le TER, sans doute fortement surfacturées, ne nous coûteront pas moins de 1500 milliards de francs CFA, qui auraient pu être orientés plus utilement ailleurs. Le président-politicien a malheureusement d’autres préoccupations, à ses yeux de loin prioritaires : terminer les deux infrastructures et d’autres, pour les inaugurer en janvier 2019. Le président-politicien va mobiliser alors toute la République et même au-delà du pays. Il saisira l’opportunité pour manipuler comme il sait le faire en pareilles circonstances. Il va, en particulier, frapper fortement l’imagination des populations les moins averties avec son TER et l’Autoroute « Ila Touba » flambant neuf. On imagine parfaitement l’ampleur que prendront ces deux cérémonies et l’impact qu’elles pourront avoir sur des populations analphabètes et même sur d’autres, qui ne s’attarderont pas sur les coûts exorbitants, les probables fortes surfacturations de ces deux infrastructures. Celles-ci ne nous coûteront pas, nous l’avons déjà indiqué, moins de 1500 milliards de francs CFA, qui auraient pu servir bien plus utilement à relier Dakar et Ziguinchor par voie de train et réhabiliter les chemins de fer Dakar-Thiès, Thiès-Saint-Louis, Thiès-Kaolack, Kaolack-Guinguinéo, Louga-Linguère, etc. Une gare pourrait être construite alors à Diamniadio d’où partirait un embranchement de moins de trente kilomètres, qui rejoindrait l’Aéroport international Blaise Diagne. On se passerait ainsi de ce coûteux et impertinent TER, au profit de la renaissance d’activités économiques tout au long des voies nouvelles ou réhabilitées. Tout au long de ces voies ferroviaires aujourd’hui mortes, les gares grouillaient de monde au moment du passage des trains, qui étaient l’occasion de déploiements d’activités économiques importantes. Nous aurions préféré ce choix lucide à quelque infrastructure de dernière génération que ce soit. Selon un proverbe wolof bien de chez nous, « ku sa ab sèr jottul, doo boot ay gámb ». Traduit en français, ce proverbe donne : « Quand on ne dispose pas du minimum, on ne doit pas avoir l’outrecuidance de prétendre au maximum. »
Nous devons donc rester vigilants devant les infrastructures du président politicien. Une gouvernance ne se réduit pas à construire des infrastructures, surtout quand elles sont fortement surfacturées. Une gouvernance, c’est aussi des valeurs, des principes. Et c’est lui-même, le président-politicien, qui faisait pareille déclaration lors de la campagne électorale pour l’élection présidentielle de 2012. Elu, il la jette par-dessus bord avec tous les engagements qu’il avait pris et toutes les promesses qu’il avait faites. Tout le monde se les rappelle et je n’y insisterai pas. Le candidat devenu malheureusement président de la République est tout autre : nos valeurs cardinales ne retiennent plus son attention. Il n’y croit même plus finalement. C’est du moins l’impression qu’il donne. En particulier, la parole donnée n’a plus pour lui aucune espèce d’importance. En tout cas, sa parole à lui ne vaut plus un copeck. Une expression est de plus en plus employée chez nous : « Waxi Macky Sall, du ma ci dòor sama doom. » En d’autres termes, dans les maisons, dans les bureaux, lors des manifestations, partout dans le pays, personne n’accorde plus aucune espèce d’importance à sa parole. Pas seulement d’ailleurs ! C’est sa propre personne qui est contestée maintenant. Il ne bénéficie plus du respect dû à un président de la République car, il ne se comporte plus comme tel, s’il s’est jamais comporté comme tel d’ailleurs. Il est tout le contraire de la sobriété, de la transparence, de la vertu. Il a désacralisé la fonction présidentielle comme d’autres fonctions importantes. Il a transformé le palais de la République en siège de son parti et de sa coalition. Des gens venus de nulle part y entrent et en sortent à longueur de journée. Parfois, il devient carrément une arène lutte où des gens se battent rageusement pour se partager l’argent qu’il leur a donné à l’issue de leur audience.
Il est devenu comme un roi, un buur qui fait ce que bon lui semble. Il est particulièrement friand de louanges et est bien servi par la meute de griots et de minables courtisans qui l’accompagnent dans toutes les cérémonies, principalement lors de ces innombrables et folkloriques inaugurations d’infrastructures. Non content des tombereaux de louanges qu’on déverse sur sa personne, il permet même à ses griots de couvrir publiquement l’opposition d’injures. Demain, ils l’insulteront avec sa distinguée épouse et couvriront de louanges ses opposants qu’ils insultent aujourd’hui. C’est cela le Sénégal qu’il nous a construit pendant plus de six ans.
Je n’oublierai pas l’esquisse de quelques pas de danse, plus précisément sa danse lors de l’inauguration de l’Aréna, curieusement applaudi par les présidents d’institutions, les ministres, les députés et, pratiquement toute la République. Ses minables courtisans, prenant le devant des critiques qui n’allaient pas manquer, se sont mis rapidement à le défendre, avec l’argument éculé que le président Nelson Mandela dansait, que le président Cyril Ramaphosa lui aussi danse. Les pauvres ne savent pas que nous sommes au Sénégal, pas en Afrique australe où la danse des chefs fait partie de la tradition. Au Sénégal, le chef, le buur, le kilifa ne dansent pas. Fii ci Senegaal, kilifa du fi fecc. Xel nangu wu ko fi. Jekkul, rafetul. On m’a raconté qu’un Damel du Kayor dont je ne me souviens plus du nom, aurait été destitué pour avoir seulement esquissé quelques pas de danse. Notre président-politicien, grisé par le pouvoir et préoccupé au plus haut point par sa réélection, ne sait plus faire la distinction entre la décence et l’indécence, le licite et l’illicite, lu xel nangu ak lu xel nangu wul. Nguuru rek a ko ñor. Traduit en français, cela signifie qu’il piétine toutes nos valeurs, et que seul le pouvoir l’intéresse.
Le président-politicien va donc manipuler, manipuler, frapper fortement les imaginations en usant d’autres subterfuges comme la « modernisation des cités religieuses », la « couverture maladie universelle », les « bourses de sécurité familiale », « La délégation générale . . . . . . à la solidarité nationale », « Le Fonds de Solidarité nationale », etc. Pour ne s’arrêter que sur la « modernisation des cités religieuses », des dizaines, voire des centaines de milliards du contribuable y sont engloutis sans contrôle, gérés exclusivement par un couple, à partir du « cabinet d’architecture » de la présidence de la République. Imagine-t-on une telle structure, installée à l’Elysée, pour construire ou moderniser des Églises et des chapelles ?
Le président-politicien et son clan ne reculeront donc devant aucun obstacle, fût-il la loi, pour s’assurer une victoire confortable en 2019, et dès le premier tour. Ils vont rivaliser d’ardeur à acheter des consciences à coût de milliards de francs CFA. Ils nous ont déjà administré la preuve de ce dont ils sont capables dans ce domaine-là. Ils vont enfourcher d’autres chevaux de bataille pour renforcer la machine infernale qui va les conduire directement à la victoire. Ces gens-là ne sont surtout pas des enfants de chœur, et il faudra plus que la croix et la bannière pour leur barrer la route vers la réalisation de la mission qu’ils se sont fixée. Gagner ou périr, telle est leur devise.
Malgré les nombreux dysfonctionnements qui les ont entachées, les élections législatives du 30 juillet 2017 ont été révélatrices à plusieurs égards. Elles nous ont laissé l’impression que l’opposition, par ses divisions parfois artificielles et, partant, stériles, n’est pas encore à la hauteur des enjeux. Pour nombre de nos compatriotes, ses membres sont davantage attachés à des intérêts particuliers qu’à l’intérêt général. Pour d’autres, les élections législatives du 30 juillet n’ont pas permis de faire émerger des rangs de l’opposition, un homme ou une femme susceptible de pouvoir faire face au président-politicien et à sa redoutable machine électorale. Un homme ou une femme, même de qualité, n’y suffirait pas d’ailleurs. Il faudrait d’abord s’orienter vers l’élaboration d’un programme alternatif à celui que le président-politicien est en train de mettre en œuvre, et qui s’appellerait « Programme alternatif commun (PAC) ». Ce texte a pour, entre autres objectifs, d’appeler autour de l’élaboration de ce « PAC ». Comment l’élaborer ? Avec qui l’élaborer ? Comment rassurer nos compatriotes, qui ne croient plus à la parole des politiciens ? Comment gagner leur confiance et les convaincre que les porteurs de ce programme ne seront pas comme les autres, que leurs différents engagements ne finiront pas dans la poubelle, comme le sont ceux du président-politicien et de son prédécesseur ? Quelle femme ou quel homme portera-t-il (elle) le « PAC », une fois qu’il sera élaboré ? Comment sera-t-il (elle) désigné (e), etc. ? C’est à toutes ces questions, et à d’autres, que l’auteur de cet appel tentera de répondre, avec ses idées, ses maigres idées de profane qu’il continuera de développer dans la contribution suivante.
[1] Pourtant, aujourd’hui, Moustapha Diakhaté s’acharne sur ce qu’il appelle les waxwaxeet d’Ousmane Sonko, en oubliant carrément ceux qui ont jalonné la gouvernance de ses prédécesseurs, qu’il a accompagnés au moins pendant vingt ans. Si Ousmane Sonko est un . . .. . ., les deux premiers l’étaient infiniment plus. Yalla xam na ko et Moustapha Diakhaté est loin, très loin de l’ignorer.
PAR Alassane Sy
FIN DES ACCORDS DE PÊCHES SÉNÉGAL-UE, SO WHAT ?
La filière thon, dont le marché mondial devrait atteindre 52,73 milliards de dollars en 2031. Mais pour saisir cette opportunité, le pays doit repenser entièrement sa stratégie, de la capture à la transformation
Il y a quelques semaines la fin des accords de pêche entre le Sénégal et l'Union Européenne a fait le buzz pour utiliser le terme plus à la mode. Des déclarations ont fusé de partout allant des politiciens en quête de populisme aux Sénégalais lambda souvent profanes dans le sujet.
Je retiens et salue à sa juste valeur scientifique celle de Madame la ministre des Pêches Fatou Diouf, qui ne me surprend guère car émanant d'une véritable professionnelle. Elle disait en résumé : Nous sommes en train de faire une évaluation de ces accords et nous ne sommes pas pressés et nous attendons le résultat pour savoir les plus et les moins. Voilà la démarche qu’il faut mais en attendant que Peut-on tirer de bénéfique au non renouvellement de ces accords pour le Sénégal ?
Ma modeste personne essaie de faire une analyse en s'appesantissant sur ce que nous devons faire pour tirer profit de la fin de ces accords.
- Ces accords concernent la pêche du thon en majorité et dans une moindre mesure le merlu. Notre contribution sera focalisée sur le thon.
Les thons font partie des Scombridae (famille de poissons et nous notons au plusieurs espèces aux Sénégal dont Auxis thazard ou Auxide (40- 55 cm taille commune),Euthynnus alletteratus ou Thonnine commune (80 – 100 cm ) ,Katsumonus pelamis ou Bonite à ventre rayé ( 60 – 70 cm ),Thunnus obesus ou thon obèse (jusqu’ 200 cm),Thunnus albacares ou Thon albacore (200 cm) …
Leur principale caractéristique est leur adaptation à la nage rapide (40 à même 80 km /h pour certaines.
Les thons effectuent des migrations trophiques (liée à leur alimentation en général des petits poissons pélagiques comme la sardinelle ou yaboye) ou génésiques parfois importantes. Ils sont le plus souvent grégaires et très voraces et ont cette particularité exceptionnelle chez les poissons qui est la régulation de la température interne du corps qui peut dépasser de 10 degrés la température ambiante.
Ces poissons sont souvent présentés aux consommateurs au niveau des marché dans un piteux état du fait de la dégradation rapide de certains critères de qualité organoleptiques ;
Beaucoup de sénégalais ne sont pas adeptes de la consommation du thon pour les raisons ci-après :
Le thon, avec la manipulation et l'exposition au soleil et étant un poisson gras, voit la texture de sa chair perdre toute sa fermeté et se ramollir (il suffit d’appuyer sur la peau avec un doigt pour le constater), une odeur sensée être légère devient très forte et la peau très belle et luisante du poisson devient terne.
A noter que le thon fait partie des poissons dont la chair accumule certaines substances toxiques comme le mercure, les PCB (polychlorobiphényles polluants organiques persistants qui se désagrègent très peu dans l’environnement et s’accumulent dans différents milieux et en particulier le sol) et les toxines.
Une forte accumulation du mercure dans le corps humain peut provoquer une insuffisance rénale et des lésions gastro-intestinales.
De même, le thon fait partie des espèces riche en histidine pouvant favoriser une forte production d’Histamine dont l’intoxication peut provoquer des urticaires, des rougeurs de la peau, des démangeaisons etc.
Ainsi cette perte de qualité peut entrainer une augmentation de la concentration de ces substances dont le taux originel peut dépendre de la zone de pêche pour certains éléments.
Le Sénégal, à l’instar du monde, a depuis des années règlementé le taux résiduel admis de ces substances dans ces différentes espèces et le ministère de la Pêche veille au grain aussi bien au niveau des plages que des usines exportatrices. Ces dernières sont obligées de s’aligner sur la règlementation des pays de destination des produits s’il y a une différente avec les textes nationaux.
Que devons-nous faire ?
- Réapprendre aux pêcheurs et acteurs surtout artisans la meilleure manière de conserver le thon dès la capture, surtout jusqu’à la vente. Ainsi le consommateur lambda pourra acheter et consommer cette espèce sans aucune peur de se retrouver le lendemain aux urgences.
- Sensibiliser et sanctionner, surtout les pécheurs artisans qui font le plus gros des débarquements, la pêche des juvéniles qui sont en général la nourriture naturelle des thons. Ainsi le problème de distance de pêche pourra être résolue car les thons vont se rapprocher de plus en plus de nos côtes. Les conséquences seront entre autres une moindre consommation de carburant et des poissons plus frais débarqués Certains bateaux canneurs, pour ne pas dire tous, étaient obligés de venir dans la baie de Hann pour pêcher ces juvéniles utilisés comme appâts vivants.
- Pour la petite histoire il y a une trentaine d’année on notait, à certaines périodes, la présence de beaucoup de thon non loin du phare des mamelles jusqu’à la baie de Ouakam et on pouvait contempler le spectacle de leurs voltiges. Mon père, étant adepte de pêche à la ligne à ses heures perdues, remplissait la malle de son Renault 8 de grosses pièces de thon qu’il péchait à la cuillère derrière le monument de la Renaissance là ou un hôtel est en train d’être construit.
- Renforcer notre armement national avec une redynamisation des thoniers afin que l’Industrie locale puisse être approvisionnée en quantité et en qualité.
- Aider l’Industrie de la Transformation (hors conserve) à valoriser cette espèce sans risque et ainsi booster les exportations aussi bien en frais que congelés. Surtout insister sur la qualité car le thon bien que très prisé dans le Monde avec une forte valeur ajoutée obéit à des critères draconiens de qualité pour les raisons évoquées plus haut. Ainsi une Grande valeur ajoutée sera créée dans cette chaine de valeur.
Le prix du thon frais sur nos plage peut aller en moyenne de 500 F CFA à 3500 F CFA selon les espèces.
En France par exemple dans les poissonneries ces prix peuvent être de 12 euros (7872 FCFA) pour le thon blanc à 25 euros (16 400 F CFA pour le thon rouge. Pour ce dernier ne fois découpée ce prix peut évoluer à 48 euros (31488 F CFA).
Dans certaines boutiques une darne de 400 gr de Thon Rouge peut aller jusqu’à 30,8 euros (20200 F CFA).
Il y a donc une véritable chaîne de valeur à mettre en place pour redynamiser l’industrie de la transformation des Produits halieutiques au lieu d’exporter le produit entier brut.
La Division Valorisation de la Direction des Industries de Transformation des Produits de la Pêche du ministère de la Pêche devrait donc être renforcée afin de mieux encadrer les acteurs dans ce sens.
- Redynamiser l’industrie de la conserve de thon en faisant venir, dans un premier temps et si nécessaire pour, des Géants Mondiaux de cette industrie au Sénégal comme ce fut le cas avec la reprise de la SNCDS par le groupe Dongwon (plus grande entreprise de Pêche de la Corée du Sud) devenu SCASA (juste un exemple). Nous devons donc avoir plus d’industrie de cette envergure. Ce qui se transforme ailleurs peut bien être fait sur place dans les mêmes standards Qualité.
Notons que la taille du marché du thon a été évaluée à 40,12 milliards USD en 2019 et devrait passer en 2023 à 41,23 milliards USD en 2023 et 52,73 milliards USD en 2031.
Un des principaux stimulants de ce marché est la demande mondiale en conserve de THON mais aussi les plats préparés.
- Renforcer les moyens de recherche du CRODT (Centre de Recherche Océanographique de Dakar Thiaroye) de l’ISRA afin de lui permettre de remplir ses missions dont entre autres l’évaluation de nos stocks pour permettre aux autorités de prendre les meilleures décisions.
- L’Union Européenne a pris comme prétexte les défaillances constatées dans la lutte contre la Pêche illicite, non déclarée et non règlementée (INN). Cette pêche, une des principales menaces pour les écosystèmes et l’économie bleue, représente une part importante de l’économie Mondiale avec environs 15 % des captures.
Pour cette raison la Direction de la Surveillance et de la Protection des Pêches (DPSP) du Ministère de la Pêche et l’Armée Nationale à travers la MARINE et l’Armée de l’Air doivent être renforcer en moyens humains et matériels (dont vedettes et avions de surveillance)
Sur ce point et pour les Générations Futures il est du devoir du gouvernement de rectifier ce qui peut l’être et nous pouvons faire confiance en Madame la ministre Fatou Diouf qui fait partie des références académiques en matière de Lutte contre la Pêche illicite, non déclarée et non réglementaire.
Cependant et en attendant de mettre en place certaines actions des questions se posent :
- Que feront-nous du surplus de stock que le Sénégal ne pourra pas exploiter compte tenu de l’une des spécificités du Thon qu’est la Migration ?
- Avons-nous présentement les moyens de contrôler ce stock afin que d’autres bateaux clandestins ne se substituent aux navires européens dans les mêmes zones ?
- Faudrait-il accorder des licences à d’autres pays hors UE en revoyant les quantités et les prix ?
Le débat reste ouvert et sans nulle doute le Ministère, après son évaluation des accords précédents apportera des éléments de réponses.
Voilà ma modeste contribution sur ce sujet et qui est une goutte d’eau dans la mare. Je reviendrai sur l’espèce merlu dans un prochain post.
32 ans d’expérience dans les produits de mer transformation et d’exportation
Technicien supérieur de l’ex-Institut supérieur des Sciences et techniques halieutiques (ISSTH) de la CEAO de Nouhadibou.
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LES MENSONGES DE THIAROYE
Une enquête du Monde révèle un dispositif impressionnant déployé ce matin-là : un millier de soldats, des blindés, des mitrailleuses face à des hommes qui réclamaient leur solde. Bilan ? 300 à 400 victimes, bien loin des 35 morts officiellement reconnus
Le Monde livre une reconstitution minutieuse du massacre de Thiaroye, survenu le 1er décembre 1944 près de Dakar, où l'armée française ouvrit le feu sur ses propres tirailleurs. Une enquête approfondie qui révèle les nombreuses contradictions dans les archives militaires et met en lumière l'ampleur réelle de ce drame longtemps minimisé.
Selon la reconstitution du Monde, basée sur les archives militaires, l'opération débute avant l'aube. Un dispositif impressionnant est déployé : un millier de soldats, dont 120 Français, trois automitrailleuses, un char et deux blindés encerclent le camp où dorment les tirailleurs. À 7h15, entre 800 et 1000 hommes sont rassemblés sur l'esplanade centrale.
La version officielle de l'époque, rapportée dans les documents militaires, évoque une rébellion violente nécessitant l'usage de la force. Mais les historiens consultés par Le Monde, notamment Armelle Mabon, pointent de nombreuses incohérences dans les rapports officiels. "Aucun officier ne disait la même chose. Ça a été commandé par des écrits sur ordre", révèle l'enquête.
L'un des points les plus controversés reste le bilan humain. Si les autorités militaires n'ont reconnu que 35 morts, les recherches historiques suggèrent un nombre bien plus élevé. Armelle Mabon, citée par Le Monde, estime qu'il y aurait eu "entre 300 et 400" victimes, se basant notamment sur la manipulation des chiffres d'embarquement au port de Morlaix.
"508 cartouches ont été tirées", note un rapport du colonel Carbillet cité par le quotidien. Pour les historiens, ce volume de tirs "sur une foule compacte" suggère "un carnage de grande ampleur". Le drame pose également la question de la préméditation, certains documents évoquant une "mission de réduire les mutins".
Le Monde souligne que de nombreuses zones d'ombre persistent, notamment en raison d'archives manquantes ou inaccessibles. "Je suis convaincue que ces archives existent, mais qu'elles sont des archives que j'appelle interdites ou secrètes", affirme une historienne citée dans l'enquête. Une certitude demeure cependant : ce 1er décembre 1944, l'armée française a délibérément ouvert le feu sur ses propres soldats.