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24 avril 2025
Société
PARIS CONCLUT AU SUICIDE DE MAMADOU MOUSTAPHA BA
Alors que le parquet de Dakar poursuit ses investigations, la justice française est formelle : l'ancien ministre du Budget s'est volontairement jeté sous une rame de métro parisien. Une conclusion appuyée par des preuves vidéo, selon Africa Intelligence
(SenePlus) - Une enquête d'Africa Intelligence, publiée le 14 novembre 2024, révèle les divergences franco-sénégalaises dans l'affaire du décès de l'ancien ministre des Finances Mamadou Moustapha Ba, survenu à Paris début octobre.
Les autorités françaises privilégieraient clairement la thèse du suicide. Selon les sources judiciaires citées par Africa Intelligence, les enregistrements des caméras de vidéosurveillance du métro parisien montrent que l'ancien ministre s'est jeté sous une rame, "sans l'intervention apparente d'un tiers". L'identification du corps, rendue complexe par son état, n'a été possible qu'après le signalement de sa disparition par son épouse le 23 octobre.
La justice sénégalaise, elle, maintient le mystère. Après avoir reçu le rapport français dans le cadre de l'entraide judiciaire, le parquet de Dakar a ordonné le 10 novembre l'ouverture d'une enquête, évoquant des "éléments qui sont de nature à attester que la mort n'est pas naturelle". La découverte d'une supposée plaie à la gorge alimente les suspicions des magistrats sénégalais qui, contrairement à leurs homologues français, n'excluent pas la piste criminelle.
Le contexte politique ajoute une dimension troublante à ce décès. Quelques jours avant sa mort, l'ancien ministre avait exprimé, d'après Africa Intelligence, ses craintes sur une boucle WhatsApp réunissant d'anciens membres du gouvernement. Il y affirmait selon le magazine que son téléphone avait été "cloné" et qu'il était "sous surveillance", déconseillant à ses anciens collègues de le contacter.
Ces appréhensions survenaient dans un climat de tensions avec le nouveau pouvoir. Le 27 septembre, le Premier ministre Ousmane Sonko avait publiquement mis en cause l'ancien ministre, l'accusant d'avoir manipulé les chiffres des finances publiques sous la présidence de Macky Sall. Le chef du gouvernement dénonçait alors une "corruption généralisée", révélant que le déficit budgétaire réel atteignait 10,4% du PIB, contre les 5,5% officiellement annoncés, et que la dette publique s'élevait à 76,3% du PIB au lieu des 65,9% déclarés.
La dépouille de Mamadou Moustapha Ba a été rapatriée à Dakar le 4 novembre, puis remise à sa famille qui l'a inhumée le 13 novembre dans son fief de Nioro du Rip, pendant que se poursuivent les investigations sur les circonstances exactes de sa disparition.
VIDEO
FRANCE-AFRIQUE, UNE CONFIANCE BRISÉE
Une vaste enquête démontre que le rejet de la France en Afrique francophone repose sur une analyse lucide des rapports de force. Des doubles standards diplomatiques à l'emprise économique, c'est tout l'héritage françafricain qui est remis en cause
(SenePlus) - Le rapport "De quoi le rejet de la France en Afrique est-il le nom ?"*, fruit d’une enquête menée dans six pays d’Afrique francophone (Bénin, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Niger et Tchad) par l'ONG "Tournons La Page" en collaboration avec le Centre de Recherches Internationales (CERI) de Sciences Po., met en évidence une opposition quasi unanime à l’encontre de la politique française sur le continent. Plus de 470 militants de la société civile ont été interrogés, complétés par des focus groups approfondis.
Le principal enseignement est clair : la défiance envers la France est profonde et systémique. Ce rejet n’est pas perçu comme une simple émotion ou un « sentiment anti-français » – une expression jugée inappropriée – mais comme une réponse rationnelle à des pratiques néocoloniales persistantes.
Les raisons d'une cassure
L’intervention militaire française, notamment au Sahel à travers l’opération Barkhane, est largement critiquée. Dans des pays comme le Niger, la présence des troupes françaises est perçue comme une forme d’occupation, aggravant plutôt que résolvant les crises sécuritaires. La méfiance est amplifiée par des épisodes tels que la reprise de Kidal au Mali, souvent interprétés comme des atteintes à la souveraineté nationale.
L’économie est au cœur des critiques. Le rôle des multinationales françaises et l’utilisation du franc CFA sont vus comme des outils de domination économique. Les contrats miniers, le commerce de détail dominé par des entreprises françaises, et la dépendance structurelle au système financier français alimentent un rejet grandissant, particulièrement chez les jeunes générations.
Les participants dénoncent les doubles standards dans la politique française. Alors que Paris se positionne en défenseur des droits humains, elle est souvent perçue comme soutenant des régimes autoritaires pour préserver ses intérêts économiques et stratégiques.
La montée des alternatives
Le rapport souligne une attraction croissante pour d'autres puissances, notamment la Russie. Dans l'opinion des participants, cette dernière est perçue comme une alternative crédible, en raison de son soutien militaire sans ingérence perçue dans les affaires intérieures. Toutefois, certains craignent que Moscou ne remplace simplement une domination par une autre.
Pour restaurer une relation de confiance, le rapport recommande une refonte complète de la politique africaine de la France :
- la fin despratiques perçues comme néocoloniales ;
- le plein respect des souverainetés nationales ;
- le soutien des transitions démocratiques sans manipulations.
par l'éditorialiste de seneplus, Amadou Elimane Kane
LA CONSCIENCE PANAFRICAINE OU L’IDÉE D’UN CONTINENT AFRICAIN DÉBARRASSÉ DE LA BIBLIOTHÈQUE COLONIALE
EXCLUSIF SENEPLUS - La volonté de l’ouvrage de Séverine Awenengo Dalberto sur la Casamance est d’installer le doute dans nos esprits. Si la vision historique reste occidentale, le propos est déformé, distordu, détourné de sa fonction initiale
Amadou Elimane Kane de SenePlus |
Publication 14/11/2024
« Ainsi l'impérialisme, tel le chasseur de la préhistoire, tue d'abord spirituellement et culturellement l'être, avant de chercher à l'éliminer physiquement. La négation de l'histoire et des réalisations intellectuelles des peuples africains noirs est le meurtre culturel, mental, qui a déjà précédé et préparé le génocide ici et là dans le monde » - Cheikh Anta Diop
Quand il s’agit de publier des recherches scientifiques et historiques de l’histoire du continent africain, et du Sénégal en particulier, il convient d'articuler le récit aux réalités africaines et épistémologiques de la pensée qui définit le mode culturel du territoire en question, sans s'aliéner des idéologies européocentristes qui sont à l’œuvre. Quand cette histoire, mille et une fois détournée, se retrouve dé-fragmentée à travers un épisode historique, dont nous n’avons aucune maîtrise, la problématique devient caduque.
Dans l’essai, à l’apparence scientifique et historique de Séverine Awenengo Dalberto, L’idée de la Casamance autonome - Possibles et dettes morales de la situation coloniale au Sénégal, il est intéressant de lire les chapitres pour constater que l’étude s’appuie sur une période définie par le code colonial et que les propos qui en ressortent deviennent un récit qui va à l’encontre de la vérité historique. Circonscrire les recherches documentaires à la seule vision coloniale est un procédé idéologique qui nous indigne.
En effet, comment croire à un questionnement qui ne tiendrait pas compte de la frise historique réelle de l’histoire africaine ? Les frontières coloniales existent depuis 1884, suite à la répartition européenne définie par la Conférence de Berlin. Or, l’Afrique pré-coloniale a bel et bien existé et, si les conflits n’étaient pas absents, ils n’avaient pas le caractère déstructurant imposé par les ravages de la colonisation.
Cette démonstration sur la volonté d’autonomie de la Casamance est une vision qui part du modèle colonial et qui, malgré un apparat de défense de nos valeurs, n’est en réalité qu’une posture néocoloniale. Comme dit l’adage, le chemin de l’enfer est pavé de bonnes intentions.
Pour revenir à l’ouvrage, il y a deux aspects majeurs qui installent férocement le doute. Le premier est celui de l’origine des sources documentaires qui sont pour la plupart issues des archives françaises et coloniales[1]. Plus loin, l’auteure indique qu’il faut toutefois porter un regard nouveau sur les Archives nationales du Sénégal, comme si cette source était la seule à devoir être remise en cause. Tout comme on observe les ressources cartographiques, réduites à leur plus simple expression, et tirées d’adaptation de la réécriture coloniale. Cette volonté est clairement énoncée : Pour écrire cette histoire, il faut donc porter un regard nouveau sur une documentation coloniale pourtant très pratiquée, remettre l'archive sur la table [...][2]
Il aurait été pourtant intéressant de considérer la situation géographique, sociale et historique en retournant aux origines, celles de la Sénégambie telle qu’elle se présentait avant la découpe coloniale et aussi s’autoriser à replonger dans les arcanes historiques de l’empire du Ghana et aussi de l’empire du Mali, ne serait-ce que par un court chapitre qui en tiendrait compte.
Or, ce n’est pas le cas. L’étude démarre à partir des sources postérieures à la seconde guerre mondiale et aux conflits d'intérêts installés par les forces politiques de la décolonisation qui doivent s'entendre pour éviter la débâcle. Ainsi, ce n’est pas relire la documentation coloniale qui nous préoccupe mais bien celle de faire émerger notre histoire à partir de son socle historique.
La seconde physionomie du livre qui nous interpelle est celle de la sémantique employée. L’autonomie de la Casamance semble prononcée dans le “secret”, exprimée sur un mode mineur, à travers des énoncés modestes[3] par le pouvoir colonial qui qualifie la région comme un espace unifié de tradition et d’isolement, de fétichisme et d’anarchie[...].[4] C’est ce que semblent révéler les écrits administratifs coloniaux avec le mépris de l’époque.
Pour ce qui concerne les archives sénégalaises, l’auteure se contente de dire combien cela a été difficile d’y accéder et les relègue au niveau de l’intime, opposé à celles de la grande Histoire coloniale largement documentée. Pour la fin de cette introduction, elle renvoie alors dos à dos les forces en place, déjouées par l’esprit colonial, la nouvelle présidence de Léopold Sédar Senghor et la volonté des indépendantistes.
Plus loin encore et à l’appui des archives des services de renseignement français, l’auteure indique que la Casamance séparatiste est considérée comme une énonciation contre-hégémonique formulée, “en coulisses”, par une très petite minorité d’acteurs politiques subalternes.[5]
Est-il vraiment nécessaire, dans le contexte actuel d’une unité encore fragile, d’utiliser ce type de sémantique pour parler de l’autonomie de la Casamance ? On sait combien la lutte a été rude et meurtrière pour faire revenir la paix en Casamance et au Sénégal.
La volonté de l’ouvrage est d’installer tout simplement le doute dans nos esprits, c'est la division qu’il suggère plutôt que la pseudo-réalité de la volonté d’autonomie de la Casamance. Il semble que l’auteure veuille à tout prix imposer sa propre vision, son propre imaginaire indépendantiste, au détriment de la réalité historique et contemporaine.
Tout semble fait pour aboutir à une sorte de conclusion dénaturée qui ne tient nullement compte des traces coloniales comme contre-vérité de l’historicité africaine. Ce sont ici des recherches biaisées et relevant de procédés idéologiques qui ne s’appuient pas sur notre préoccupation d’aujourd’hui, celle de l’unité africaine. Ce livre instrumentalise notre propre mode de pensée en utilisant la Casamance comme objet de recherche, un sujet explosif en ce moment, qui ne possède aucune véracité et qui ne sert qu’à dévoyer le récit unitaire dont notre imaginaire a besoin. C’est bien la question de notre récit qui doit trouver sa place pour stabiliser notre vivre ensemble encore fragile.
Tout comme la proposition du titre est problématique car il suppose encore un lien d’interdépendance entre le Sénégal et la France. L’autonomie qui est, dans sa définition, la situation d'une collectivité, d'un organisme public dotés de pouvoirs et d'institutions leur permettant de gérer les affaires qui leur sont propres sans interférence du pouvoir central est un trompe-l’oeil.
Comment se fait-il qu’au XXIe siècle, ces postures idéologiques trouvent encore un écho dans la production éditoriale ? C’est dans ce sens que nous réfutons le travail de Séverine Awenengo Dalberto et nullement pour être dans une polémique creuse ou vide. Ce qui nous attache, c’est encore et toujours la vérité historique puisée dans notre propre récit et pas celui de la pensée coloniale.
Ainsi, si nous voulons entrer de plain-pied dans la phase réelle de notre propre récit, il convient de mettre à terre tous ces procédés idéologiques qui ne servent qu’à nous désunir une fois de plus. Si la vision historique reste occidentale, le propos est déformé, distordu, détourné de sa fonction initiale pour servir une fois de plus les intérêts en jeu, ceux des forces impérialistes qui continuent d’agir, à notre insu, pour réorganiser un discours corrompu de fausses intentions. Dans la conclusion de l’ouvrage, l’auteure n’oublie pas d’évoquer l’accession au pouvoir du parti Pastef avec l’élection de Bassirou Diomaye Faye et avec la nomination de son premier ministre Ousmane Sonko qui a défendu un projet souverainiste[6].
Ainsi, on voit bien comment la pensée néocoloniale continue d’agir pour entamer la confiance des Sénégalais, et par-delà des Africains, à se détourner de leur propre voix, de leur propre démocratie pour faire perdurer des idées réactionnaires et de balkanisation qui n’ont rien à voir avec notre conscience qui s’attache à défendre nos valeurs panafricaines, d’éthique, de justice, d’unité et de solidarité.
Amadou Elimane Kane est enseignant, écrivain poète et chercheur en sciences cognitives.
[1] Fonds des archives diplomatiques de Nantes et des Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine en France.
[2]L’idée de la Casamance autonome. Possibles et dettes morales de la situation coloniale au Sénégal, Séverine Awenengo Dalberto, éditions Karthala, 2024, introduction, p.26
La campagne électorale actuelle, marquée par des violences et des arrestations, trahit les attentes d'une population en quête de débats constructifs. Cette escalade préoccupante pose la question de la maturité démocratique du pays
À l'aube d'un tournant électoral plein de promesses, la campagne sénégalaise s'est transformée en un théâtre de tensions où la violence a éclipsé les débats d'idées. Ce qui aurait pu être une compétition d’échanges constructifs nourrie par des visions et des programmes ambitieux pour le pays s’est rapidement envenimé. Arrestations, affrontements entre militants et provocations verbales ont pris le dessus, plongeant les électeurs dans un climat de défiance. Comment en sommes-nous arrivés-là et quelles sont les conséquences de ce basculement pour la démocratie sénégalaise ?
La campagne électorale qui avait commencé sous les auspices de débats contradictoires s'est transformée en une scène marquée par des épisodes de violence, tant verbale que physique. Initialement, les Sénégalais s'attendaient à des échanges constructifs centrés sur des programmes solides et des propositions concrètes pour faire face aux nombreux défis et opportunités auxquels le pays est confronté. Chaque coalition vantait la qualité de ses plans, espérant convaincre les électeurs de sa capacité à transformer radicalement le Sénégal.
Pour Pastef, obtenir la majorité signifiait l'instauration de réformes profondes, tandis que l'opposition prévenait des conséquences désastreuses si le régime en place remportait le scrutin, invitant les électeurs à miser sur leurs candidats en raison de leur expérience.
Mais très vite, les premiers heurts à Dakar ainsi que l’arrestation et le procès de Bougane Guèye Dany à Tamba ont marqué un tournant dans cette campagne, qui a glissé vers un terrain fertile pour les affrontements. De nombreux observateurs estiment que ce basculement est presque inévitable, car les scènes de violence sont plus spectaculaires et génèrent davantage d’attention, notamment sur les réseaux sociaux où elles deviennent virales en un clin d'œil. Cette dynamique est accentuée par l’appétit d’une partie de l’opinion publique sénégalaise, qui trouve dans ces dérives une certaine essence de la politique.
Des personnalités polarisantes
Le climat tendu de cette campagne électorale s’explique aussi par la personnalité de figures politiques comme Ousmane Sonko et Barthélemy Dias connus pour leur tempérament fougueux et parfois belliqueux. Leur style combatif n'a fait qu'alimenter les tensions, transformant des discussions qui auraient pu être centrées sur les programmes en échange d'accusations et de menaces.
Pourtant, beaucoup de citoyens espéraient assister à des débats prometteurs, notamment lorsque Sonko avait publiquement interpellé Amadou Ba, ancien Premier ministre, l'invitant à un face-à-face pour discuter des enjeux économiques du pays. À la veille de la campagne, en mi-octobre 2024, Ousmane Sonko, Premier ministre et leader de Pastef, avait lancé un appel direct à Amadou Ba via un tweet, proposant un débat public contradictoire sur des sujets économiques majeurs.
Cette proposition suivait une conférence de presse d’Amadou Ba, dans le cadre de sa campagne pour les élections législatives du 17 novembre. Sonko s'était réjoui de ce qu'il considérait comme la sortie de l’ombre du candidat malheureux de la Présidentielle de février 2024, l’accusant d'avoir jusqu’alors évité les confrontations directes en s’abritant derrière des chroniqueurs et autres mercenaires de la plume.
La tension entre les deux hommes, qui dominent la scène politique sénégalaise, s'est exacerbée au fil des années, particulièrement lors de la dernière Présidentielle remportée au premier tour par Bassirou Diomaye Faye. Amadou Ba, qui avait terminé deuxième, n'a pas tardé à répondre à l'invitation de Sonko, soulignant que le débat était un signe de la vivacité démocratique. L’ancien ministre de l’Économie et des Finances, qui avait aussi été chef du gouvernement, a défendu son bilan, affirmant que le régime précédent ne pouvait pas être tenu pour seul responsable des difficultés économiques actuelles.
Le débat proposé par Cheikh Omar Diallo, ancien conseiller d’Abdoulaye Wade et fondateur de l'École d'art oratoire et de leadership de Dakar, devait se dérouler dans un format strict de 90 minutes, avec une retransmission prévue sur la Radiotélévision sénégalaise. Les deux protagonistes devaient répondre à des questions posées par des intervieweurs de leur choix, sous la modération d'un journaliste désigné.
L'idée d'une confrontation directe et intellectuelle avait suscité beaucoup d'intérêt, mais des complications administratives ont freiné sa tenue. Le président du Conseil national de régulation de l’audiovisuel, Mamadou Oumar Ndiaye, a souligné que ce débat risquait de rompre l’égalité de traitement entre les candidats, un principe pourtant protégé par la loi électorale. Malgré cette contrainte, Sonko a soutenu que de telles formalités ne devraient pas constituer un obstacle insurmontable.
Un espoir déçu pour les électeurs
Malheureusement, les violences qui ont émaillé la campagne ont relégué au second plan ces débats potentiellement enrichissants. L'arrestation de Bougane Guèye Dany a exacerbé les tensions, créant un climat où la violence a pris le pas sur les échanges programmatiques. Les confrontations entre militants de Pastef et ceux de la coalition Sàmm Sa Kaddu sont devenues monnaie courante, nourrissant un cycle de représailles.
De nombreux acteurs de la société civile et des personnalités politiques ont appelé au calme, craignant que ces violences ne compromettent l'intégrité du processus électoral. Pourtant, la viralité des incidents sur les réseaux sociaux continue de stimuler cette atmosphère tendue, laissant peu de place aux discussions de fond.
Ce basculement vers la violence est d'autant plus regrettable que les enjeux abordés dans les rares moments de débat avaient une importance capitale. La dette publique, le déficit budgétaire, la fiscalité et la gestion des ressources minières et énergétiques sont autant de questions qui méritent un examen approfondi.
De même, la Vision 2050 du gouvernement, récemment présentée, aurait pu être l'objet de critiques constructives si les échanges avaient conservé un ton plus civilisé.
Les promesses de changements radicaux, portées par chaque camp, ont été éclipsées par des stratégies de dénigrement et des attaques personnelles. Même les questions de développement durable, d’intérêt général pour le Sénégal, n’ont pas trouvé la place qu’elles méritaient dans le discours électoral.
La polarisation politique et l'accent mis sur les confrontations physiques ont un coût. Non seulement elles détournent l'attention des vrais débats, mais elles risquent aussi d'entamer la confiance des citoyens envers le processus démocratique. La crédibilité des institutions est en jeu, et les observateurs craignent que ce climat délétère ne se prolonge après le scrutin.
Pour plusieurs observateurs avertis, des initiatives pour restaurer un débat plus serein et axé sur les programmes existent, mais elles nécessitent une volonté politique ferme et un engagement de tous les acteurs pour pacifier les échanges. Des efforts devront être déployés pour recentrer l'attention sur les propositions concrètes et le développement socioéconomique du pays.
Pour de nombreux Sénégalais, la déception est palpable. L'espoir de voir des candidats discuter des réformes économiques, de l’éducation, la migration ou encore de la santé publique a été remplacé par la crainte de nouvelles violences. Les citoyens, qui attendaient des solutions aux problèmes quotidiens, se retrouvent face à un spectacle où la force brute semble l'emporter sur la force des idées.
La campagne de novembre 2024 laissera un goût amer à ceux qui croyaient encore en la possibilité d’un débat démocratique apaisé. Le défi, pour les prochains scrutins, sera de rétablir la priorité des échanges de fond sur les confrontations de forme. Seule une réflexion collective sur les pratiques politiques pourra permettre d’y parvenir, et redonner espoir à un électorat de plus en plus désabusé
À ZIGUINCHOR, SONKO EN TERRAIN CONQUIS
De 3000 voix en 2017 à 75% des suffrages en 2024, l'ascension du chef de Pastef dans la ville est vertigineuse. Le Premier ministre y règne aujourd'hui en maître absolu. Un contraste saisissant avec la situation de ses opposants
(SenePlus) - En cette mi-novembre 2024, à l'approche des élections législatives, la ville de Ziguinchor offre un spectacle politique sans équivoque. D'après un reportage de Jeune Afrique (JA), le Premier ministre Ousmane Sonko y vise un score quasi unanime, entre "90 et 95%" des suffrages, une ambition que même ses proches jugent "un brin exagérée", tout en souriant.
La dixième ville du Sénégal n'est pas un territoire comme les autres pour le leader du Pastef. C'est ici qu'il a grandi, ici qu'il fut élu maire en janvier 2022, avant sa démission en mai dernier pour endosser ses fonctions de Premier ministre. Selon JA, sa progression électorale y est spectaculaire : de modestes débuts avec 3000 voix aux législatives de 2017, il est passé à 57% à la présidentielle de 2019, avant que son dauphin Bassirou Diomaye Faye n'atteigne les 75% en mars dernier.
Le contraste avec ses opposants est saisissant. La tête de liste adverse, Charlotte Dior Gomis, mène une campagne laborieuse. L'hebdomadaire panafricain rapporte une scène révélatrice : lors d'une réunion électorale, une seule militante était présente, attendant "depuis une heure" au point de rendez-vous. La candidate elle-même reconnaît sa surprise d'avoir été investie : "J'ai déposé mon dossier sans penser que je pourrais être investie tête de liste !"
Au cœur des enjeux figure la loi d'amnistie votée en mars. Lors de son passage à Ziguinchor, Sonko a été catégorique : "Ce qui nous intéressait, c'était de sortir les enfants de prison, pas de créer l'impunité pour les assassins", rapporte Jeune Afrique. Cette promesse d'abrogation résonne particulièrement dans une ville marquée par les violences de 2023.
L'histoire tragique de Souleymane Sano illustre la complexité de la situation. Ce militant du Pastef, tué à 25 ans lors d'une manifestation en juin 2023, est devenu un symbole. Son père, également membre du parti, soutient paradoxalement la loi d'amnistie qu'il souhaite voir abrogée. Selon le reportage, il votera pour le pouvoir avec un objectif précis : permettre au Pastef d'obtenir "la majorité absolue" nécessaire à la suppression de cette loi.
Le passage de Sonko à la mairie fait l'objet d'analyses contrastées. Sur les douze chantiers promis, seuls deux ont été lancés, "mineurs" selon son ancien adjoint Djibril Sonko. Ses partisans mettent en avant un "bilan immatériel", notamment la rebaptisation des rues pour "restaurer la dignité nationale", bien que certaines aient depuis retrouvé leur nom d'origine par décision préfectorale.
Le climat politique actuel contraste avec les tensions passées. Seydou Ousseynou Mandiang, coordinateur du parti à Ziguinchor, se réjouit : "Cette campagne, c'est une fête pour nous. Il y a tellement plus de sérénité que lors des campagnes précédentes, marquées par les intimidations et la violence."
ALIOUNE BADARA MBACKÉ CONDAMNÉ À 45 JOURS DE PRISON FERME
Le prévenu était accusé de coups et blessures volontaires sur la personne de son ex épouse, Dieynaba Sangaré, ayant entraîné une incapacité temporaire de travail de 21 jours
Le médecin-chef du District de Matam, Docteur Alioune Badara Mbacké, a été condamné, jeudi, à une peine de prison de 45 jours ferme et une amende d’un million de francs CFA pour voie de fait et complicité dans l’affaire qui l’opposait à son ex épouse.
Le prévenu Alioune Badara Mbacké était accusé de coups et blessures volontaires sur la personne de son ex épouse, Dieynaba Sangaré, ayant entraîné une incapacité temporaire de travail de 21 jours.
A l’issue du procès qui a duré plusieurs heures, le juge a condamné le principal prévenu, Docteur Alioune Badara Mbacké à une peine de prison de 45 jours ferme et une amende d’un millions de francs CFA à payer solidairement avec les trois autres co-prévenus dans l’affaire l’opposant à son ex-épouse, Dieynaba Sangaré.
Dans son réquisitoire, le procureur avait demandé à ce que le Médecin-chef soit condamné à trois mois de prison, dont un mois ferme et deux pour ses co-accusés, poursuivis pour séquestration, enlèvement et non-assistance à une personne en danger.
Le procès qui a été renvoyé à deux reprises s’est tenu en l’absence de la plaignante, Dieynaba Sangaré actuellement en prison, à Dakar.
LA NOUVELLE GÉOGRAPHIE ÉLECTORALE
La région de Dakar concentre une puissance électorale considérable face à des régions entières qui peinent à faire entendre leur voix. Cette fracture territoriale, révélée par la nouvelle carte électorale, dessine les contours d'un pays à deux vitesses
(SenePlus) - Selon les données de la Direction générale des élections (DGE) publiées par APA News le 13 novembre 2024, le Sénégal compte 7 033 850 électeurs sur son territoire national, hors diaspora.
Le poids prépondérant de l'axe Dakar-Thiès
La répartition géographique montre une forte concentration dans l'ouest du pays. L'agglomération dakaroise domine largement le paysage électoral :
Dakar : 707 816 électeurs
Pikine : 391 278 électeurs
Rufisque : 277 865 électeurs
Guédiawaye : plus de 200 000 électeurs
Cette concentration urbaine représente un enjeu majeur en termes de représentation politique.
Des disparités régionales marquées
L'analyse de la carte révèle d'importants contrastes :
Les régions côtières et occidentales concentrent la majorité des électeurs
L'est et le sud-est du pays présentent des effectifs plus modestes (Kédougou : 41 434 électeurs)
La région de Saint-Louis au nord maintient un poids électoral significatif avec 383 046 électeurs
La question de la représentation équitable
Cette répartition soulève plusieurs questions démocratiques :
- La représentation des zones rurales face au poids des grandes villes
- L'équilibre entre les différentes régions du pays
- La prise en compte des besoins spécifiques des territoires moins peuplés
LE MAÏS, DIAMANT VERT DE L’AGRICULTURE SÉNÉGALAISE
Le maïs est devenu le ‘’diamant vert’’ de l’agriculture sénégalaise, a affirmé ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Elevage, Mabouba Diagne, saluant sa contribution au développement de la filière avicole
Le maïs est devenu le ‘’diamant vert’’ de l’agriculture sénégalaise, a affirmé ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Elevage, Mabouba Diagne, saluant sa contribution au développement de la filière avicole
‘’Le maïs est devenu le diamant vert de l’agriculture. Notre pays, chaque année, importe plus de 100 millions de litre de lait, l’équivalent de 55 000 vaches laitières et de 20 000 ha d’enfilage de maïs. Cela montre combien cette filière-là est vitale. Pour produire les 62,5 millions de poulets de chair, avec 80% de maïs, c’est un autre facteur pour démontrer l’importance du maïs’’, a-t-il notamment fait valoir.
Il affirme qu”’il est temps que les Africains prennent conscience que le maïs est maintenant le diamant vert”. Le plus grand pays producteur de maïs est aussi le plus grand pays producteur de lait, de viande, d’œufs à couver, entre autres produits importants dans la vie des hommes et des animaux, a-t-il insisté.
Mabouba Diagne s’exprimait, mardi, tard dans la soirée, lors d’une visite à Dinguiraye, où il a remis des sujets d’ovins et de poussins à des membres de la Fédération des producteurs de maïs du Saloum (FEPROMAS). Il a également remis des financements dans le cadre du Projet d’appui à l’insertion des jeunes ruraux agri-preneurs (Agri-Jeunes Tekki Ndawñi).
Mabouba Diagne a par ailleurs visité des périmètres agricoles, notamment un champ de 50 ha de mil, de maïs et d’arachide à Keur Omar Bambara, dans la commune de Latmingué, et une vallée rizicole à Keur Dame, une commune de Ndramé Escale.
‘’Le marché de l’élevage de porcs est estimé à 70 milliards de francs CFA pour 700 000 têtes, avec, au minimum, 400 000 tonnes de maïs, soit 80 000 ha, 14 000 emplois’’, a-t-il fait savoir.
Il dit être ‘’absolument convaincu’’ qu’en travaillant, côte à côte, avec la FEPROMAS, en adoptant la stratégie des coopératives agricoles communautaires, les défis de l’autosuffisance et de la sécuritaire alimentaires sur l’agriculture et l’élevage pourraient être relevés.
‘’Cette année, le président de la République et le Premier ministre nous ont soutenus avec 120 milliards de francs CFA en termes d’intrants agricoles. Nous nous sommes lancés un défi d’arrêter les semences écrémées, parce qu’on a une stratégie robuste en matière de semences certifiées’’, a souligné Mabouba Diagne.
Il a remercié le directeur de l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA), Moustapha Guèye, qui, depuis son avènement, a mis à disposition 150 000 tonnes de semences pré-base.
‘’J’ai l’intime conviction qu’avec cette allure, dans les deux ou trois années à venir, nous allons relever les défis de l’autosuffisance en semences certifiées’’, a estimé le ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de l’Elevage.
Il assure connaître les raisons pour lesquelles dans certaines parties du pays les semences n’ont pas produit les rendements escomptés. ‘’C’est parce qu’on a distribué des semences écrémées qui ne donnent pas forcément les mêmes rendements que celles certifiées’’, a-t-il avancé.
‘’Cette année, on va adopter pas mal de changements, en essayant d’emmener les engrais et les semences le plus rapidement possible. Espérons qu’en janvier-février, au maximum, les semences et les engrais seront disponibles pour permettre aux producteurs et aux éleveurs de les avoir à temps’’, a promis Mabouba Diagne.
‘’Nous sommes convaincus que dans le référentiel 2050 qui est en train d’être mis en place, l’agriculture et l’élevage sont au cœur de ce dispositif’’, a-t-il insisté, ajoutant que l’agriculture et l’élevage sont au centre des priorités des autorités sénégalaises.
Par Ibou FALL
IL LE SURNOMMAIT DEJA «SERIGNE NGOUNDOU»...
Quand un Premier ministre appelle à la violence, ça fait le tour de la planète : les agences de presse en ont fait leurs choux gras et dans le monde entier, les chancelleries se demandent ce qui arrive au Sénégal pour qu’il marche sur la tête…
C’est la dernière ligne droite : les Sénégalais votent dans quatre jours, le dimanche 17 novembre 2024, histoire d’envoyer une bande de joyeux drilles et de drôles de rigolos au Parlement. Manifestement, c’est le deuxième tour de la présidentielle qui arrive au petit trot…
On apprend dans la foulée qu'Anta Babacar Ngom se comporte comme un loubard de banlieue et qu’une plainte lui tombe sur son joli minois, avec les compliments de Pastef. Je m’en doute un peu qu’elle soit dangereuse : enfant, c’est un boa son animal de compagnie dans la nature sauvage où elle gambade loin de toute civilisation. Elle pourrait décapiter un coq d’un coup de dent ? Faut faire gaffe, elle est peut-être en plus ceinture noire de karaté…
Quant à Barthélemy Dias, qui joue les «Boy Dakar», selon le candidat Ousmane Sonko, c’est encore pire : sa petite armée et son arsenal ont de quoi effrayer même le plus aguerri des rebelles… D’ailleurs, selon Barth’, le maire de Dakar, au début des affaires troubles qui secouent le pays en 2021, Ousmane Sonko est venu chez lui tout larmoyant, sous prétexte que ce gangster de Macky Sall le menace de faire incendier sa cabane de la Cité Keur Gorgui.
Calmos, quand on a Barth’ à ses côtés dans Dakar, autant jouer «Officier n’a pas peur», lui dira celui qui n’est alors que maire de Baobabs, Sacré-Cœur et Mermoz. Il lui aurait même «appris des choses»
Entre Nègres, on se comprend…
C’est le «Dômi ndèye» Barth’, d’ailleurs, qui l’accompagne quand il doit aller répondre à la Justice, dans les affaires Adji Sarr et Mame Mbaye Niang. Bref, ils seront comme cul et chemise, à tel point que lorsque Yewwi askan wi va à l’assaut des Locales, quand Khalifa Sall propose Soham Wardini, Ousmane Sonko, du haut de ses 15% de la Présidentielle de 2019, impose son «frère d’une autre mère» Barthélemy Dias. Alors que Pastef, ou plutôt lui, le toutpuissant Pros, doit s’emparer de la citadelle dakaroise, qui est l’antichambre du Palais de l’avenue Senghor, à quelques centaines de mètres de ses ambitions présidentielles.
Grave faute politique que Pastef ne finit pas de payer…
Bref, il est aujourd’hui question entre eux de s’étriper et Ousmane Sonko, dans le style du matamore qui le caractérise, déclare la guerre à son ancien allié, en comptant sur la diligence des Forces de l’ordre, après avoir pointé du doigt le manque d’autorité du chef de l’Etat, parti à Ryad débattre des affaires israélo-arabes pendant que son pays prend feu. Rien de nouveau sous notre ciel, il le surnomme déjà «Serigne Ngoundou»
Sauf que quand un Premier ministre appelle à la violence, ça fait le tour de la planète : les agences de presse en ont fait leurs choux gras et dans le monde entier, les chancelleries se demandent ce qui arrive au Sénégal pour qu’il marche sur la tête…
Tiens, ça tombe bien, le FMI, qui regarde à la loupe les chiffres que présente le Sénégal depuis les fracassantes révélations de son chef de gouvernement, lequel révèle que son Administration est un temple de faussaires, eh bien, le Fmi, donc, suspend tout versement à juin 2025, le temps que la Cour des comptes certifie les chiffres.
Moi, je serais du FMI, dans la foulée, je ferais aussi certifier ISO 9000 la Cour des comptes, le Conseil constitutionnel, le gouvernement et le chef de l’Etat. Sait-on jamais ?
Est-ce donc pour cela que l’Union européenne est devenue une vierge effarouchée ? Les sempiternels accords de pêche ne seront pas renouvelés et la coopération se met en mode sommeil à compter du… 17 novembre. Comme le hasard est curieux ! Tout ceci ne nous explique pas comment nous en sommes arrivés là.
Mais cette semaine, il y a un début d’explication sorti du taiseux Amadou Ba, devenu politicien en campagne, donc très bavard… Dans un entretien, la tête de liste de Jamm ak njariñ explique que durant la présidentielle de mars 2024, lorsqu’il annonce que l’affaire Sonko serait jugée dans les cent jours qui suivraient son installation, juste après, il reçoit un appel du Président Macky Sall qui comprend qu’il a l’intention, une fois élu, de nommer Ousmane Sonko Premier ministre…
Bien sûr, ça tombe sous le sens : Amadou Ba et les garnements de Pastef sont en cheville depuis 2014 ; il est leur âme damnée, leur taupe, leur candidat… Ce serait l’une des raisons pour lesquelles, après 2019, Amadou Ba quittera l’attelage gouvernemental.
C’est déjà suspect, quelques années auparavant, lorsqu’il est question de licencier le turbulent syndicaliste Ousmane Sonko de la Fonction publique, que Amadou Ba, ministre des Finances, le déconseille au Président, pour éviter d’en faire un martyr. Une simple sanction au pire, au mieux, une affectation hors de Dakar ferait l’affaire, lui conseille-t-il. C’est louche, quand on sait que Amadou Ba est celui qui demande la main de Anna Diamanka, la plus célèbre du harem…
Macky Sall sera intraitable. Ainsi démarre l’aventure Sonko…
Il faudra que du beau monde se déploie pour que l’ancien ministre des Finances, en disgrâce après un exil aux Affaires étrangères, revienne dans la cour du Prince.
Macky Sall, au fond, ne lui fait pas vraiment confiance lorsqu’il en fait son candidat pour la Présidentielle de 2024. Il faut aussi reconnaître qu’il renonce à présenter sa troisième candidature de mauvaise grâce…
Ça en fait beaucoup pour une seule tête ?
A partir de là, tout part en couilles : Karim Wade, Ousmane Sonko et… lui-même hors-course, le Conseil constitutionnel devient vénal, et le pays est au bord de l’implosion. Et donc, report d’élection, amnistie générale pour les crimes commis depuis 2021 avec en prime l’élargissement de Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye. Le fameux «Protocole du Cap Manuel» dont tout le monde parle mais que peu de personnes ont vu, est la dernière pièce du puzzle qui va se rassembler le 17 novembre 2024.
La vérité des vainqueurs n’est jamais la même : à quel Sénégal se fier, dès le 18 novembre 2024 ?
PAR Cheikh Anta Babou
L’AFFAIRE GÉNÉRAL KANDE, LORSQUE L’HISTOIRE SE RÉPÈTE
Les exemples du Lieutenant-Colonel Mademba Sy et du Commandant Faustin Preira constituent des précédents historiques. Ils rappellent que l'excellence reconnue de l'armée sénégalaise n'exclut pas l'existence de rivalités internes
L’affectation du Général de Brigade Souleymane Kandé comme attaché militaire à l’ambassade du Sénégal à New Delhi en mai 2024 continue de défrayer la chronique. La déclaration récente du Premier ministre Ousmane Sonko lors de son meeting de Campagne à Zinguichor, mettant en garde les politiciens qui seraient tentés de politiser la situation n’a fait qu’attiser l’attention sur le cas. Chacun y va de sa théorie.
Pour certains, le général est la victime d’une cabale d’officiers supérieurs plus anciens que lui, jaloux de son ascension fulgurante. Pour d’autres, il payé le prix de son outrecuidance lorsque, avec le soutien du président Macky Sall, il ignora les instructions de son supérieur hiérarchique, le chef d’Etat Major Général des Armées (CEMGA) Birame Diop, aujoudhui ministre des Forces Armées, pour lancer une offensive d’envergure contre les rebelles en Casamance.
D’autres encore l’accusent d’être un opposant encagoulé du nouveau régime et même insinuent qu’il préparait un coup d’État.
L'ampleur que la presse et l’opinion publique donnent à ce cas peut laisser croire que nous avons affaire à une situation inédite. Pourtant, il n’en est rien. Avant le Général Kandé, deux officiers supérieurs de l’armée du Sénégal ont été affectés, contre leur gré, comme attaché militaire au niveau des ambassades du Sénégal, dans des circonstances similaires.
Le Lieutenant-Colonel (LC) Mademba Sy est le premier officier supérieur sénégalais à être nommé attaché militaire contre sa volonté. LC Mademba Sy était avec le LC Jean Alfred Diallo les deux seuls officiers de ce rang dans l’armée sénégalaise lors que le pays acquiert son indépendance en 1960. Le LC Mademba Sy qui, comme LC Jean Alfred Diallo, a servi dans l’armée française, était un officier particulièrement brillant et populaire parmi les officiers et les militaires du rang. Il avait, cependant, la réputation d’être très ambitieux et il ne cachait pas sa volonté de devenir un jour CEMGA et peut être même chef de l’Etat. On le soupçonnait d’être de connivence avec un groupe d’officiers qui travaillaient pour lui et qui s’activaient à saper l’autorité du LC Jean Alfred Diallo, son rival, nommé CEMGA lors de la crise de 1962.
Le président Senghor, conscient de cette rivalité et du danger qu’elle représentait pour la jeune armée nationale, avait éloigné LC Sy en le faisant nommer chef l’Etat Major de l’Union Africaine et Malgache de Défense (U.A.M/D), dont le quartier général était à Ouagadougou. Lorsque le LC Diallo a été promu CEMGA, le LC Sy demanda son affectation à Dakar pour, dit-il, aider son camarade dans l’effort de construction de la nouvelle armée nationale, mais il n’a pas reçu l’approbation du CEMGA. Après avoir quitté son poste à l’U.A.M/D, LC Sy qui souhaitait retourner au Sénégal fut affecté à Paris comme attaché militaire à l’ambassade du Sénégal en France. C’était une première dans l’histoire de la jeune diplomatie sénégalaise. Il restera à ce poste jusqu’en 1969.
La même année (1963) que le LC Mademba Sy a été affecté à l’ambassade du Sénégal à Paris, le président Senghor prit la même décision concernant un autre cadre de l’armée, le Commandant Faustin Preira. Le Cmdt Preira qui avait des états de service impeccables dans l’armée française a joué un rôle crucial pendant la crise de 1962. Il commandait alors le bataillon de parachutistes basé à Rufisque. En ce jour fatidique du 17 décembre 1962, qui a marqué le paroxysme de la crise au sommet de l’Etat opposant le président de la République Léopold Sédar Senghor et le président du Conseil Mamadou Dia, la gendarmerie, la garde nationale et l’armée, répondant aux ordres des deux protagonistes de la crise, se faisaient face au niveau du palais présidentiel, du bâtiment de l’Assemblée nationale et de la radio nationale. Le soutien de l’armée en général et surtout des parachutistes commandés par le commandant Preira au président Senghor a été décisif pour éviter une guerre fratricide au sein des forces de sécurité et pour la victoire finale du président de la République sur le président du Conseil.
Cependant, le cmdt Preira comme son camarade LC Mademba Sy, acceptait mal la tutelle du CEMGA Diallo. Lorsque ce dernier lui envoya un soldat pour servir de liaison entre son unité et l’Etat Major, il refusa de le recevoir. Cet acte d’insubordination lui coûtera son commandement et 45 jours d’arrêt de rigueur. Après avoir purgé sa peine, le président Senghor décida de le nommer attaché militaire à l’ambassade du Sénégal à Washington. Il refusa pour un moment d’obtempérer et sollicita un soutien dans les milieux politiques et religieux, y compris le calife général des mourides Serigne Falilou Mbacké, mais en vain. Il finira par rejoindre son poste.
Ces événements que je viens de décrire n’altèrent en rien l’identité fondamentale de l’armée sénégalaise dont le patriotisme, le professionnalisme et la loyauté aux autorités civiles en font un modèle respecté à travers le monde. Il faut simplement reconnaître que l’armée est un corps social vivant composé d’hommes et de femmes talentueux et ambitieux. Il est tout à fait normal que le choc des ambitions crée parfois des soubresauts. Mais durant plus de soixante ans d’existence, l’armée a démontré qu’elle a des ressources pour gérer ses contradictions internes sans nuire à la stabilité de l’Etat.
Cheikh Anta Babou est Professeur d’histoire, University of Pennsylvania.