LA FERME QVS DELESTEE DE 90 HA PAR UNE SOCIETE IMMOBILIERE, 1 000 EMPLOIS MENACES
Au moment où l’état du Sénégal fait de la relance de l’agriculture une de ses priorités, pour booster la croissance économique, l’existence d’une ferme agricole située dans la commune de Keur Moussa, département de Thiès, est menacée par une société immob
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Au moment où l’état du Sénégal fait de la relance de l’agriculture une de ses priorités, pour booster la croissance économique, l’existence d’une ferme agricole située dans la commune de Keur Moussa, département de Thiès, est menacée par une société immobilière. il s’agit de la Société Qualité végétale (QVS) qui risque, si l’on n’y prend garde, d’être délestée de 90 ha par la Société Nouvelle ville (SNV), avec à la clé un millier d’emplois menacés.
La Société Qualité Végétale (QVS) exploite, depuis près de 5 ans, 110 ha de terres agricoles, dans la commune de Keur Moussa et précisément dans le village de Thiambokh. QVS s’est donc installée dans ce qui est aujourd’hui une ferme agricole qui emploie plus de 1 000 personnes, et qui contribue à l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire, après avoir obéi à toutes les normes administratives. C’est sur la base d’un protocole d’accord en date du 7 juin 2019, entre le Direction des Eaux, Forêts, Chasses et de la Conservation des Sols (DEFCCS), pour la mise en valeur agro-forestière d’une partie de la forêt classée de Thiès et valable pour une durée de 5 ans renouvelable. «Ce délai nous a permis d’aller chercher des partenaires, pour pouvoir mener à bien l’exploitation de ces terres, en terme d’agriculture. C’est ainsi qu’un investissement de plus de 4,8 milliards de Fcfa a été consenti, pour la construction de forages, de bassins de rétention pour permettre l’irrigation», a indiqué Mbaye Seck, Directeur Technique du Directeur. Mais un conflit foncier entre QVS et la Société Nouvelle Ville (SNV) risque de tout remettre en cause.
Et pour cause, la SNV réclame, sur la base d’un décret d’attribution qui date de 2022, la paternité de 90 ha sur les 110 exploités par QVS, pour y ériger des logements sociaux, alors que la zone est classée non aedificandi par une étude technique. Il signale que ledit décret ne contient aucune coordonnée quant à l’appartenance administrative du site en question et c’est sur cette base qu’elle a paradoxalement obtenu une autorisation de lotir. Il s’y ajoute que, selon le décret, le site est logé dans le département de Mbour, alors qu’il se situe en réalité dans la commune de Keur Moussa, département de Thiès et précisément dans la zone du village de Thiambokh.
Il renseigne que c’est d’ailleurs l’Agence Nationale de l’Aménagement du Territoire (ANAT) qui a établi la carte de localisation du site et a ainsi confirmé qu’il se trouve effectivement dans la commune de Keur Moussa ; ce qui a été attesté par le schéma cadastral, avec le Numéro d’Identification Cadastral 0722030312300001. Il renseigne que la SNV a déjà usé d’un forcing, avec l’assistance des forces de l’ordre, pour s’accaparer de 45 des 90 ha en question, alors que les semis avaient commencé et une pépinière a même été détruite lors de cette opération.
Et la superficie déjà prise s’est traduite par une répercussion négative sur le rendement de cette année et une diminution drastique du personnel, ce qui veut dire en clair qu’il y a eu d’énormes pertes d’emplois. Et si la Société Nouvelle Ville met à exécution sa menace de prendre 45 autres hectares, se désole-t-il, cela se traduira par la perte d’environ un millier d’emplois. «Il appartient maintenant à l’Etat d’arbitrer, pour qu’une solution pérenne soit trouvée, d’autant plus que c’est l’Etat lui-même qui a, en toute transparence, mis ces terres à la disposition de QVS, pour une durée de 25 ans. Et s’il donne les mêmes terres à un autre, cela veut dire que c’est lui qui doit arbitrer. Nous avions lancé un appel à l’endroit du président de la République sortant, pour qu’il contribue à la clarification de cette situation. En ce qui nous concerne, nous sommes disposés à la négociation, à se retrouver autour d’une table, pour trouver une solution définitive», a-t-il ajouté.
Selon lui, ce dossier semble dégager un parfum de corruption, mais fort heureusement, le tout nouveau président de la République fait de la lutte contre la corruption une de ses priorités. Il reste en tout cas convaincu qu’avec la nouvelle équipe gouvernementale, la loi du plus fort n’aura plus cours dans ce pays.
«MOBILISATION DES POPULATIONS RIVERAINES POUR DIRE NON À LA DISPARITION DE LA FERME»
«Nous lançons un appel solennel à l’endroit du président de la République Bassirou Diomaye Faye, sur qui nous comptons beaucoup. Nous avons de l’espoir en tant que jeunes, conscients du fait que seul le retour vers l’agriculture permettra d’atteindre au moins l’autosuffisance alimentaire», a-t-il poursuivi. En tout cas, les populations riveraines se sont mobilisées pour dire non à la disparition de la ferme qui constitue leur gagne-pain au quotidien.
Pour Malick Ciss, Chef de village de Thiambokh, conseiller municipal à Keur Moussa, président de la commission agriculture et élevage, cette situation est en parfaite contradiction, avec l’ambition affichée par l’Etat de donner des emplois aux jeunes, à travers le programme « Xëyu Ndaw yi». «Si vraiment cette ambition est sincère, il ne faut pas laisser toutes ces terres entre les mains d’un promoteur qui travaille pour ses propres intérêts. Personne ne peut comprendre la mise en œuvre, au vu et au su de l’Etat, d’une initiative qui va mettre en péril des milliers d’emplois», a-t-il ajouté. Ce qui est aussi, à ses yeux, de nature à encourager les jeunes, pourtant disposés et déterminés à gagner leur vie dans leur terroir, à emprunter les chemins chaotiques de l’émigration clandestine. «Nous n’avons que l’agriculture pour vivre et c’est d’ailleurs pourquoi nous voulons que ce périmètre soit pérennisé. Nous n’accepterons jamais qu’un individu vienne s’approprier tout ce patrimoine commun. Nous refuserons jusqu’à la dernière énergie», ont déclaré en chœur les populations.