NOUVELLE PROCESSION DES FEMMES DU BOIS SACRE DE LA CASAMANCE
Bien que le leader du Pastef ait recouvré la liberté, ces dernières ont fait encore une longue procession mardi à travers les rues de Ziguinchor, tout noir habillées, tapant sur des calebasses et entonnant des chansons
Apparemment, l’affaire Ousmane Sonko est loin d’être finie chez les femmes du Bois sacré de la Casamance. Bien que le leader du Pastef ait recouvré la liberté, ces dernières ont fait encore une longue procession mardi à travers les rues de Ziguinchor, tout noir habillées, tapant sur des calebasses et entonnant des chansons effrayantes.
Pour rappel, ces gardiennes des temples sacrés s’activent depuis qu’a éclaté cette affaire de viol dont Ousmane Sonko est accusé. Dans beaucoup de villages de la Casamance, des femmes leaders des croyances traditionnelles se sont retirées dans les forêts pour voir plus clair dans cette affaire. Dans l’un de ces villages, situé dans le département de Bignona dont nous ne dévoilerons pas le nom, la retraite a même duré plusieurs jours, on ne trouvait que des hommes et des enfants dans ce village durant trois jours, informe une source bien informée. Et selon cette même source, à leur sortie, ces femmes sont rentrées au village avec ‘’la certitude’’ que Ousmane Sonko était victime d’un complot pour briser sa carrière politique. Aussi, ont-elles lancé un mot d’ordre pour le défendre. C’est ce qui expliquerait leurs processions notées ces derniers jours à travers les rues de Ziguinchor et d’autres localités de la région. Des processions qui apparemment ne sont pas encore finies, du moins c’est ce que laisse croire celle notée avant-hier matin qui a attiré l’attention de beaucoup de Ziguinchorois, alertés par les clameurs des marcheuses.
Une procession où on ne voyait que de vieilles femmes qui ont vécu leur temps. Il fallait avoir beaucoup de sang froid pour les approcher tellement leur air était grave. Et les journalistes ne pouvaient qu’observer la procession car ces gardiennes du temple ne parlent jamais même pas à leurs proches et particulièrement aux hommes. D’ailleurs, les hommes ne les approchent pas en de pareilles circonstances, à leur vue tout le monde s’empresse de s’écarter de leur voie de passage pour éviter tout contact physique avec elles, indique un ancien qui explique que seuls quelques rares initiés et notamment des gardiens de bois sacrés peuvent décrypter les messages qu’elles lancent à travers leurs chansons et autres rites.
Ces femmes ne sortent que quand l’heure est grave
Et notre spécialiste d’ajouter que ces femmes ne sortent que quand l’heure est grave. A l’en croire, elles ne défendent jamais quelqu’un qui est dans le tort fût-il leur fils. En général, si elles se mobilisent c’est pour résoudre des problèmes graves qui peuvent perturber la quiétude de la société, renseigne-t-il. C’est souvent le cas quand il y a des fléaux graves, comme les maladies infectieuses comme le coronavirus, la tuberculose, les cycles de sécheresse ou les malentendus au sein de la communauté ou des conflits inter-communautaires. Notre interlocuteur rappelle par exemple le rôle joué par ces femmes pour juguler le problème lié à l’invasion des criquets pèlerins qui avaient fait des ravages dans presque tout le Sahel au début des années 2000. ‘’Vous avez vu à l’époque, elles s’étaient fortement mobilisées pour faire des prières et autres sacrifices au niveau de tous les sanctuaires traditionnels de la région pour sauver les récoltes. À l’arrivée, les criquets n’y sont pas arrivés’’ rappelle t-il avant d’ajouter que beaucoup de problèmes graves ont été réglés dans la discrétion par ces femmes. Il avance, à ce sujet, que depuis la nuit des temps, quand il y a une guerre qui éclate en Casamance, ces femmes sont en première ligne soit pour l’ arrêter soit pour accompagner une des parties en conflit si elles estiment que celle-ci mène une guerre légitime. Et pour ce sujet précis, il souligne que leur position détermine souvent l’issue d’un conflit, soulignant que, dans le passé, plusieurs villages ont été sauvés par l’intervention de ces femmes lors de conflits communautaires.
Pour étayer sa thèse, il nous cite l’exemple d’un village du département de Bignona (nous préférons taire son nom) qui était sur le point de perdre une bataille, dans les années 70, contre un village voisin avec qui il se disputait des terres. Les hommes de ce village étaient sur le point de se faire massacrer par leurs adversaires parce que leurs munitions étaient finies. ‘’Quand, les femmes de ce village qui était en mauvaise posture ont eu vent de cette situation, elles sont intervenues sur le champ en amenant des stocks de munitions dont personne ne connaissait la provenance pour sauver leurs maris qui s’apprêtaient à se rendre à l’ennemi’’ confie notre interlocuteur. Il cite un autre exemple : le rôle joué et que continuent de jouer ces femmes du Bois sacré dans la recherche d’une solution pacifique au conflit casamançais.
La partition des femmes de la Casamance dans le retour de la paix
Aujourd’hui, si l’on note une paix assez relative en Casamance qui dure depuis plusieurs années, en grande partie, c’est grâce à ces femmes qui agissent sans tambour ni trompettes au niveau des forêts nuit et jour pour que la paix revienne. Si vous demandez aux négociateurs de la paix comme Robert Sagna et son groupe qui jouent le rôle d’interface entre le gouvernement et le Mfdc, ils vous diront que ces femmes les ont considérablement aidés dans leur grande mission en leur permettant d’ouvrir les portes les plus hermétiques dans leurs actions de conciliations. Ils vous diront également que ce sont ces femmes qui les avaient aidés à dénouer la situation, quand les combattants du Mfdc fidèles à César Atoute Badiate avaient enlevé une équipe de démineurs parmi lesquels il y avait des femmes.
À l’époque, tout le monde craignait que ces femmes otages subissent des choses dégradantes, mais elles avaient été bien traitées et sont rentrées saines et sauves dans leurs villages’’. Donc, si ces femmes du Bois sacré s’impliquent dans cette affaire de Sonko et Adji Sarr, il y a de l’espoir que ce problème connaisse un dénouement heureux et ainsi éviter au Sénégal d’autres troubles, poursuit-il. Et de mettre en garde les personnes qui auraient trempé dans le conflit contre le leader du Pastef : si réellement ce dernier est innocent, elles doivent avoir peur car elles n’en sortiraient pas indemnes. Brrr… ‘’Quand il y a un problème de cette nature, l’intervention de ces femmes entraîne souvent des conséquences ; les personnes qui ont voulu faire du tort à un membre de la société ou à une partie de celle-ci pour des intérêts quelconques le payent souvent très cher. Soit elles contractent des maladies incurables ou sont atteintes de paralysie qu’elles vont traîner jusqu’à la fin de leur existence. C’est pourquoi ces femmes sont redoutées de tous ici en Casamance. Elles sont surtout redoutées parce qu’elles sont capables d’identifier les malfaiteurs qui sont à l’origine d’un problème et de les punir à la mesure de la faute commise’’, relève t-il.
Et selon toujours notre spécialiste des affaires ésotériques en Casamance, les femmes du Bois sacré, comme souligné en haut de cet article, sont convaincues qu’Ousmane Sonko fait face à complot ourdi par des personnes malintentionnées qui veulent nuire à sa carrière politique et c’est la raison pour laquelle elles ont décidé de s’opposer à cette injustice. Par conséquent, il faut s’attendre à des rebondissements extraordinaires dans les jours à venir, confie notre interlocuteur qui parie que toutes les personnes qui connaissent l’histoire du bois sacré en Casamance ne se mêleront jamais de cette affaire de peur que ‘’l’herbe sèche ne brûle l’herbe verte. Vous n’entendrez par exemple jamais les responsables politiques de la Casamance se prononcer par rapport à cette affaire pour ne pas être pris comme complices. Mieux, certains d’entre eux ont même commencé à démissionner pour éviter tout risque’’.