LES MALAISES EN EPS SONT GÉRÉS PAR DES CHARGÉS DE COURS
Révélations du prof de sports Djiby Sall Diop
Un bon professeur d’éducation physique et sportive (Eps) doit avoir un minimum de connaissances scientifiques, c’est-à-dire être bien formé, pour pouvoir sécuriser les élèves en cas de malaise, selon le prof d’Eps Djiby Sall Diop qui dénonce le recrutement de chargés de cours dans les établissements scolaires pour faire office de profs de gym.
Bacary Baldé, élève en classe de 5e secondaire au CEM de Ouakam 2, est dé- cédé l’autre mardi quelques minutes après avoir fait un malaise. Son père, qui a recueilli des confidences de camarades de classes de son défunt fils, parle d’un épuisement physique. L’élève aurait été contraint par son professeur d’éducation physique de faire 20 tours du terrain de sport de l’école. Le Témoin n’a pas encore pu avoir la version de l’accusé, ni celle de l’administration de l’école. Mais il faut dire que ce qui est arrivé au jeune Bacary Baldé n’est pas un cas isolé. Dans nos écoles, beaucoup d’élèves ont été victimes de malaise en plein cours d’éducation physique et sportive. La plupart du temps, ils ne succombent pas à ces malaises.
Le professeur d’éducation physique et sportive au lycée communal de Kédougou, Djiby Sall Diop, affirme avoir eu un cas de malaise d’un élève pendant l’exercice physique. Ce pas plus tard que samedi dernier. A l’en croire, ce genre d’incidents seraient fréquents dans les établissements scolaires. Un syndicaliste enseignant, qui préfère garder l’anonymat, fait part d’un cas dont il aurait été témoin. Lui-même aurait d’ailleurs été victime d’un malaise. «En classe de seconde, j’ai été victime de ça. On a fait 18 tours de 400 mètres. On avait un camarade qui s’est subitement arrêté de courir. Notre professeur lui a dit que si tu ne termines pas les tours, tu auras un zéro. Il a essayé de continuer, mais il vomissait jusqu’à ramper. Cela m’a révolté et j’ai quitté les rangs pour de bon. Il m’a donné des zéros pendant toute l’année. En classe de première, notre professeur d’EPS ne m’a jamais vu, pourtant il m’a exempté d’épreuves physiques. En terminale, je n’étais pas exempté, mais le jour des examens, j’ai eu moins 8. C’est-à-dire 02/20 en EPS. Tout simplement parce que les professeurs d’éducation physique nous en voulaient à mort», a-t-il narré.
L’encadrement doit être bien outillé
Pourtant, l’activité physique à l’école est très importante pour le corps humain et excellente pour la circulation sanguine, les poumons et la respiration. En plus d’aider à prévenir l’obésité, elle permet aussi de garder une forme physique et de s’éviter certaines maladies. Mais attention, on ne doit pas la faire pratiquer n’importe comment à un élève. L’encadreur doit d’abord avoir des connaissances scientifiques sur la physiologie et l’anatomie de la personne, selon notre prof d’Eps. «Nous intervenons sur le corps humain. Donc il faut connaitre l’organisme, son fonctionnement, sa structuration. Il convient aussi d’appré- hender la manière de penser chez l’individu, sa façon d’évoluer et l’environnement où il évolue. Pour intervenir sur le corps, il faut avoir des connaissances minimales dans les domaines scientifique, médical ou autres», estime Djiby Sall Diop, professeur d’éducation physique et sportive (Eps) au lycée communal de Kédougou où il en est à sa deuxième année de service. D’après lui, le cours d’éducation physique permet de donner une meilleure santé et plus de capacités intellectuelles aux élèves à travers l’activité physique et sportive. «On s’appuie sur les pratiques de l’activité sportive pour éduquer les enfants. Ce qui nécessite une certaine connaissance du corps de la personne qui est un peu complexe si on fait référence à la psychologie, à la psychologie, c’est-à-dire le fonctionnement) et à l’anatomie ou structure de la personne.
Des domaines à maitriser par le maitre ou le professeur d’éducation physique et qui s’apprennent pendant les six ans de formation après un concours d’entrée très sélectif « précise Djiby Sall Diop. Il invite ainsi à mieux former les professeurs pour mieux sécuriser les élèves en cas de malaise, par exemple. Malheureusement, déplore-t-il, les autorités ou les responsables d’établissements continuent de prendre des raccourcis et engagent des chargés de cours dans les écoles. « Beaucoup de professeurs d’éducation physique à Dakar n’ont pas fait une formation d’activité physique et sportive. Ce sont des enseignants avec un niveau d’initiateur dans des disciplines données comme le football et le basketball et qui sont engagés comme professeurs d’EPS dans les écoles. C’est facile, certes, mais c’est à prohiber pour éviter certains incidents et accidents», insiste notre interlocuteur tout en demandant que les visites médicales à l’école soient plus rigoureuses pour, ditil, mieux aider les enseignants dans leur travail. «En début d’année scolaire, on fait des visites médicales *.
Encore que c’est juste oral. Il n’y a pas de diagnostic posé. Ce sont des questions-réponses entre l’élève et le spécialiste de la santé avec des questions du genre «Es-tu malade ? As-tu des antécédents...?» Et c’est sur la base de ce questionnaire qu’on certifie l’aptitude ou l’inaptitude des élèves. Un entretien qui amène les chargés de cours à autoriser l’élève à faire l’activité ou à ne pas faire l’activité sportive à l’école». Issu de la 39e promotion de l’INSEPS de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, le fonctionnaire Djiby Sall Diop, en service à Kédougou, explique que les élèves inaptes avec des papiers justificatifs sont toujours mis de côté pendant les cours d’éducation physique et sportive. Or, l’idéal, estime-t-il, serait de leur faire pratiquer l’activité «parce que c’est important pour eux. Dans les classes, on trouve des asthmatiques, des drépanocytaires, des diabétiques...des élèves qui ont des problèmes de santé, à on doit proposer des contenus adaptés à leur santé. On est formé à ça à travers la matière dénommée l’activité physique adaptée à la santé (Apas). Selon l’état de santé de la personne, il peut y avoir un contenu adapté à son besoin.
Par exemple, quand tu es un hypertendu, c’est-à-dire que tu as une pression artérielle qui augmente, le sport peut la réguler». En donnant un cours magistral sur l’importance de pratiquer l’activité physique, le prof Djiby Sall Diop considère que le sport à l’école participe à l’amélioration de l’état de santé de l’élève. Il pense ainsi que tous les élèves devraient pratiquer l’activité physique à l’école. «Ce n’est pas pour rien que l’Etat investit dans l’activité sportive à l’école. Elle permet d’avoir une bonne santé, de l’équilibre, une capacité physique et morale. C’est donc important que les élèves fassent cette activité. Tous les élèves, si nécessaire, devraient la faire. L’EPS vise en effet à améliorer la santé physique et morale des enfants et adolescents à l’école. Il est dit que les enfants sont formés à être compétents.
L’EPS contribue à développer la capacité physique et morale des élèves. Mais cela passe par un corps professoral bien formé, des professeurs bien formés et qui ont la capacité de suivre tous les élèves à l’école». Malheureusement, et si l’on se fie aux déclarations de Djiby Sall Diop, nos écoles pullulent de chargés de cours qui n’ont que des notions sommaires en Eps ! Avec tous les risques qu’ils font courir aux élèves…