QUAND LA VIOLENCE CONJUGALE SE FEMINISE…
Aujourd’hui, la femme sénégalaise bat et tue son mari.
Le grand fossé qui existe entre les normes religieuses et les pratiques quotidiennes qui fondent le mariage, notamment la polygamie, la méconnaissance des tenants et aboutissements des liens du mariage, le non-respect des critères de choix d’une bonne épouse, la mésentente sexuelle sans compter la disparition des valeurs sociales… Tout cela fait qu’aujourd’hui, la ligne qui séparait la masculinité de la féminité s’est rétrécie, pour ne pas dire qu’elle tend à disparaitre de façon progressive. Le Témoin fait le point sur ce phénomène des temps nouveaux avec des Sénégalais lambda, des sociologues, des islamologues et associations de maris battus, pour mieux comprendre ce qui, de jour en jour, réveille l’esprit « criminel » qui dort chez la femme.
Les faits divers macabres où les femmes tiennent le (mauvais) rôle central se multiplient et sont devenus banals. Aujourd’hui, la femme sénégalaise, hier soumise et fataliste, brûle et tue son homme. Le drame de Hann Maristes où la Aïda Mbacké a brûlé vif son mari et ce qui s’est passé tout dernièrement à Yeumbeul où un agent d’une compagnie pétrolière du nom de Mangoné Léye a failli être tué par sa femme lorsqu’il a annoncé à cette dernière son désir de prendre une seconde épouse, sont les derniers exemples en date de cette furie vengeresse, pour ne pas dire criminelle, de nos femmes. D’autres faits divers aussi cruels les uns et les autres remplissent les pages Société des quotidiens. On pourrait aussi citer cette femme qui, à Thiaroye, a charcuté à l’aide d’une machette sa nouvelle coépouse. Elle est d’ailleurs dans l’attente du verdict de son procès devant le tribunal de Pikine-Guédiawaye. Le paradoxe, c’est que si, jusqu’à un passé encore récent, ce sont les hommes qui se signalaient par des crimes et autres atrocités, de nos jours, et plus en plus, ce sont les femmes qui défraient la chronique au rayon cruauté. L’une des causes en est qu’aujourd’hui, nous vivons dans un monde où copier et adopter les comportements d’autres sociétés est devenu une banalité. Ces postures sont facilitées par les réseaux sociaux ! Au Sénégal, on ne parvient plus à différencier l’homme de la femme.
L’identité sexuelle exprimée est d’une ambiguïté inquiétante aussi bien dans l’habillement, le langage, l’activité professionnelle… Disons dans presque tous les aspects de la vie ! On a mal assimilé les influences venues des autres notamment des occidentaux. Nous nous sommes appropriés ce que ces derniers ont de plus pernicieux. Hélas ! La situation est même devenue alarmante. Les mouvements féministes, la lutte contre la misogynie et le machisme tendent à rendre le sexe et le genre totalement homogènes. Permettant ainsi de déclassifier les cases homme ou femme. Au nom de la liberté, dit-on, certains réclament même la suppression du genre tel que connu, où alors une plus grande diversité de genre, de telle sorte que le sexe ne définisse plus le genre.
A cela s’ajoute la disparition de certaines valeurs sociales qui conféraient à l’homme où à la femme le statut de son genre à savoir un langage particulier, en tout cas une certaine façon de s’exprimer, un comportement physique spécifique, l’intégration du sens de la responsabilité sous l’autorité d’une famille qui veille au respect des principes de base, le changement de modèle social institutionnalisé à travers le concept des droits humains incluant l’idéal d’égalité entre les hommes et les femmes, entre autres. Des hommes utilisent certaines expressions qui, dans l’opinion générale, étaient associées à la femme. Il n’y a presque plus d’activités qui appartiennent strictement à un sexe et ainsi de suite
Disparition progressive de l’identité sexuelle
Pour le sociologue Djiby Diakhaté, l’explication à cette « masculinisation » des femmes est simple. « Nous sommes dans une société où la ligne qui séparait la masculinité de la féminité est en train de se rétrécir, de disparaitre progressivement. Avant, il y avait un type d’éducation qui avait essentiellement pour objectif de conférer à l’individu une identité sexuelle remarquable. Dès le bas âge, on éduquait le jeune garçon de manière à l’amener à se rendre compte qu’il est un garçon, qu’il est un homme. Or, un homme, c’est un comportement, une attitude, une façon de parler, de s’habiller, de se coiffer… Le garçon intériorisait cela par ce processus d’insertion psychologique... Aujourd’hui, les façons de parler deviennent identiques, les hommes s’habillent, se tressent et mettent des boucles d’oreille de la même manière que les femmes. Cette identité sexuelle remarquable est en train de disparaitre ».Le spécialiste des faits sociaux estime qu’il est donc difficile, de nos jours, de distinguer l’homme de la femme dans certaines situations. Or, le statut d’homme sous-entend, dans notre société, la domination, la virilité, la suprématie et la puissance. Aujourd’hui la tendance s’est inversée. La « puissance » de la femme est en train de prendre le dessus sur celle de l’homme. Notamment dans la vie de couple où la puissance rivalise d’ardeur avec la « férocité ». Et où des coépouses s’éborgnent, se mordent, s’entretuent et s’aspergent d’eau ou d’huile chaudes. Et où l’épouse va jusqu’à brûler vif celui qui l’a choisie parmi tant d’autres femmes pour être sa compagne pour la vie. Comme cela s’est passé avec la dame Aïda Mbacké Moukabaro qui, dans le courant du mois de novembre, a écourté la vie de son époux en le brûlant vif. Une réalité de violences que vivent aujourd’hui beaucoup d’hommes dans leur vie conjugale.
La « férocité » de la femme sur l’homme
Les femmes trottent très souvent sur l’intégrité morale et même physique de leurs hommes. Qui subissent d’abord une emprise psychologique qui les affaiblit. Une faiblesse que la femme exploite avec des menaces puis une violence physique allant même jusqu’à gifler, griffer ou donner des coups de talon, de pilon ou de louche aux conjoints. Par peur d’être taxés de maris « faibles, complexés et impuissants » au sens large des termes, les hommes ont honte de faire part de ces violences conjugales subies à leur entourage. Seuls les plus courageux osent en parler. Comme ceux, à l’image de l’artiste comédien Charles Foster, qui se sont constitués en un réseau dénommé : « Association des maris battus » pour dénoncer leur situation de « maris terrorisés, maltraités et humiliés » par des conjointes violentes. Et qui ne se contentent plus seulement d’être des mégères. On assiste aujourd’hui à une féminisation de la violence physique entre conjoints (mari et femme) et entre coépouses. Des violences perpétrées par une femme contre son mari, ou par une femme contre sa coépouse.
Pourtant la marque de fabrique de la femme — du moins, dans nos sociétés — serait la délicatesse, la soumission et le respect ! Hélas, aujourd’hui, ces valeurs tendent à s’effriter de jour en jour pour céder la place à l’esprit criminel ! Les femmes sénégalaises d’aujourd’hui mordent bêtement, brûlent vif, ébouillantent leurs conjoints ou leur coépouses voire tuent froidement, et de la manière la plus odieuse ! Des actes ignobles que Dieynaba Keïta Diakité, femme au foyer et mère de deux bouts de bois de Dieu, ne souhaiterait même pas à son pire ennemi à plus forte raison celui qu’on dit aimer. D’ailleurs son mari, Abdoulaye Diakité, se demande, lui, « comment peut-on regarder une personne que l’on a choisie comme celle qui mérite d’être notre moitié pour lui faire une chose aussi ignoble que répugnante consistant à lui verser de l’eau ou l’huile chaude dessus voire d’autres formes de violences ? ». Le sieur Diakité pense qu’on assiste tout simplement à une crise profonde des valeurs qui, dit-il, le dépasse.
Décalage entre la norme et la pratique
Quant au sociologue Djiby Diakhaté, il convoque le « décalage qui existe entre les normes religieuses et les pratiques quotidiennes du mariage qui sont édictées pour donner une orientation à nos couples ». Il considère que, « autant nous disons que c’est la religion qui constitue la base du lien du mariage, oriente et organise le fonctionnement du couple, autant, dans nos conduites quotidiennes, nous posons des actes qui n’ont absolument rien à voir avec les principes du mariage. En réalité, il ne faudrait pas que, lorsque l’homme choisit la polygamie, cela repose essentiellement sur des considérations de type physique ou matérialiste. Et dire que ma femme s’est enlaidie, qu’elle est devenue vieille, qu’elle me crée des problèmes, donc je vais chercher une seconde épouse. Il ne faudrait pas non plus que la femme dise que je n’accepterai pas du tout d’avoir une coépouse parce que je serais mal vue dans ma communauté ». Il se demande même s’il y a réellement une rupture correcte des considérations spirituelles qui fondent le mariage notamment la polygamie. Ces considérations qui invitent à respecter normalement les règles sociales et religieuses qui organisent le mariage. « On ne peut pas avoir avec la religion une relation de type opportuniste ». Telle est la philosophie de notre interlocuteur pour qui les dogmes sont à respecter comme tels. Non sans souligner que la femme doit certes accepter de jouer le jeu mais que l’homme doit surtout faire preuve d’équidistance et de communication dans cette atmosphère de vie à deux ou polygame.
Critères de choix d’une bonne épouse
Seulement beaucoup d’hommes ne disent pas la vérité aux femmes qu’ils veulent prendre comme épouses. C’est l’avis de l’islamologue Iran Ndao qui reste convaincu qu’ « un homme qui n’est pas dans la capacité de bien entretenir une femme ne doit jamais s’engager à en épouser deux, trois voire quatre ». Et le célèbre prédicateur religieux de rappeler les critères du choix d’une bonne épouse. Ce sont entre autres, selon lui, la bonté de cœur, l’éducation, la richesse, le niveau de croyance en Dieu pour que, dans la famille, y règnent la paix et la stabilité. « Malheureusement, le choix pour le meilleur et le pire ne repose plus sur ces critères », a-t-il déploré. Et son collègue prêcheur Oustaz Taïb Socé de renchérir. « En s’engageant aujourd’hui en mariage, on ne met plus le côté amour et affectif en avant. Mais plutôt le matérialisme ». Taïb Socé plaide d’ailleurs pour le retour aux valeurs et recommande surtout d’« éviter les appartements toi et moi pour aller vivre chez les beaux-parents ». Une meilleure manière pour lui de régler les conflits à temps. « Quand un jeune couple est guidé par une grande personne, les deux conjoints déraillent rarement. Et apprennent mieux les règles de base qui fondent le mariage. Ce qui va épargner aux conjoints des conséquences fâcheuses comme le divorce ou encore les violences physiques qui peuvent finir par mort d’homme ». Comme c’est arrivé avec le cas Khadim Ndiaye brûlé vif par sa femme. Ce qui fera dire au président de l’Association des maris battus, Charles Foster, lui également « homme battu », que toute femme et tout homme doivent connaitre les tenants et les aboutissants du mariage avant de s’engager pour le meilleur et pour le pire. Pour avoir eu à subi les affres de sa femme — l’affaire, qui avait fait grand bruit à l’époque, avait même atterri au tribunal —, M. « Kakatar » pense que c’est le mariage dans toute sa dimension qui doit être revu avec une communication permanente entre les conjoints. Lesquels devraient être accompagnés et guidés dans ce défi. Comme on le voit, le mariage, ce n’est pas une affaire simple !.