UN OBJECTIF, MILLE APPROCHES
PROJETS ET PROGRAMMES POUR L’ABANDON DE L’EXCISION

Ils sont nombreux, les projets et programmes qui interviennent dans le Fouladou et qui jurent avoir réussi à faire reculer ou abandonner la pratique de l’excision. Malgré tout, la pratique a toujours cours, parce qu’à l’évidence, certaines approches sont inopérantes.
Les femmes du département de Vélingara ont organisé la journée qui leur est dédiée. A l’occasion, elles ont débattu du thème de l’excision. Selon Adama Coulibaly Ngom, «le choix de ce thème se justifie parce que la pratique a toujours cours dans le département».
Et le conférencier du jour, Mamadou Bâ, secrétaire général de la mairie, de confirmer en notant : «La pratique est entrée dans la clandestinité, si les adeptes de la pratique ne décident pas tout simplement de franchir les frontières nationales pour faire exciser leurs filles en Gambie, en Guinée-Bissau ou en Guinée Conakry.»
Après avoir fait l’historique de la pratique de l’excision en Afrique, le conférencier a insisté sur la nécessité de revoir certaines approches dans le combat pour son abandon. Il dit : «Il y a plusieurs projets qui luttent contre l’excision. Si nous tenons compte du nombre de déclarations d’abandon qui sont faites au Sénégal, nous devons en être à plus de 98% de taux d’abandon. La réalité est loin de là.»
Cet enseignant a la conviction que tout le monde est conscient que ce n’est pas «une pratique recommandée par la religion musulmane et que l’aspect chirurgical est mauvais pour la femme». Le hic : «Certains projets et programmes s’adressent aux hommes, aux autorités administratives ou brandissent la loi de janvier 1999 qui pénalise la pratique.»
Selon un autre intervenant à cette conférence, «d’autres projets ont une approche «messagiste». Ils viennent demander aux communautés d’abandonner la pratique parce que ce n’est pas bon et les auteurs pris et leurs complices courent des peines d’emprisonnement de 6 mois à 7 ans de prison».
D’autres, comme ce fut le cas avec Sister Fa (artiste chanteuse) tout récemment, «collectent des millions de francs pour, annuellement, venir organiser des concerts tout en lançant des messages appelant à stopper la pratique. Ceux qui assistent à ces concerts, les jeunes, n’ont aucune influence sur la pratique». Et puis, selon Mamadou Bâ, «une pratique millénaire ne peut pas être abandonnée sur un coup de baguette magique. Il faut du temps et de la capacité de persuasion.»
Selon toujours M. Bâ, prenant exemple sur lui-même, dont la fille a été excisée à son insu par ses parents il y a plusieurs années, «ce sont les mamans et les grands-mères qui décident dans de pareilles situations. Elles sont garantes de la perpétuation des traditions. Ce sont elles qu’il faut rencontrer, communiquer avec elles, provoquer des rencontres entre elles et les jeunes filles et les hommes aussi. Débattre du pour ou contre de la pratique, des aspects négatifs et positifs (car il y en a) et voir ce qu’il faut abandonner dans nos cultures et ce qu’il faut conserver, de manière très consciente. A l’école, les jeunes doivent être préparés à la nécessité de laisser tomber cette pratique».
Il y a nécessité aujourd’hui, de faire l’audit de tous ces programmes et projets qui prétendent lutter contre l’excision, les pousser à partager et à harmoniser leurs approches... pour enfin réussir à libérer les filles du Fouladou de la menace de passer au couteau de l’exciseuse du coin du département ou des pays limitrophes.