TASSINIÈRE FIÈRE DE SES TRADITIONS
La localité fut la porte d’entrée des colons via l’embouchure du fleuve. Aujourd’hui, elle garde les vestiges du temps colonial, tout en restant fidèle à sa longue tradition d’apprentissage et de maîtrise du Coran
Dans le Gandiole, le village de Tassinère reste un symbole du passé. La localité fut la porte d’entrée des colons via l’embouchure du fleuve. Aujourd’hui, Tassinère garde les vestiges du temps colonial, tout en restant fidèle à sa longue tradition d’apprentissage et de maîtrise du Coran.
À quelques mètres de la mosquée de la localité, la boutique de Baye Ba est le lieu de rassemblement des gens du village. En quête de fraîcheur et de quiétude, en cette matinée de grande chaleur, plusieurs personnes sont assises à l’ombre d’un arbre. De temps à autres, quelqu’un passe et distribue des salamalecs. À Tassinère, l’un des trente villages qui composent la commune de Ndiébène Gandiole, dans le département de Saint-Louis, tout le monde se connaît. La plupart des familles se sont installées ici depuis des générations. « Tassinère est la capitale du Gandiole. La plupart des localités qui sont dans la zone des Niayes sont issues du Gandiole, notamment Lompoul, Fass Boye et Potou », explique Diadji Sarr, pêcheur de métier et grand historien de cette contrée du Nord du Sénégal. Selon lui, Tassinère était la porte d’entrée des Blancs (Portugais et Français) à Saint-Louis. « La plupart des localités n’avait pas de port d’attache et ici comme nous sommes frontaliers avec la mer et l’embouchure du fleuve Sénégal, les bateaux venaient accoster sur la côte », fait savoir Diadji Sarr.
Le lieu était aussi un grand comptoir de commerce où acheteurs et traitants se donnaient rendez-vous pour échanger des marchandises. De célèbres traitants y séjournaient. « La maison où j’habite actuellement faisait partie des comptoirs de commerce ainsi que d’autres places du village », rapporte Youssou Diop, assis à même le sol.
Les vestiges de la présence des Blancs sont bien visibles dans ce village. Notamment l’école primaire qui reste une fierté des populations. « C’est la première école rurale de l’Afrique occidentale française. Elle a vu le jour en 1927 », rappelle quelqu’un avec assurance. Signe de cette présence prématurée de l’école française, les Gandiolais sont toujours fiers de rappeler que le premier inspecteur noir, Mapathé Diagne, est issu de la contrée. « Lui, c’est mon grand-père », coupe un vieil homme à la calvitie naissante dès qu’il a entendu ce nom. En plus de l’école, le phare qui fait face à la mer fait partie des symboles de Tassinère. L’édifice, toujours fonctionnel, avec ses 25 mètres de longueur serait le plus ancien phare d’Afrique de l’Ouest. « Ce phare continue de guider les bateaux et autres embarcations parce qu’à partir de 19 heures, il commence à clignoter et il est visible sur 30 à 40 kilomètres d’ici », signale Souleymane qui fait office de gardien de ce lieu de mémoire. De temps à autre, selon lui, le service des phares et balises du port de Dakar effectue des entretiens et autres réparations.
Dans ce village paisible, situé au cœur du Gandiole, les wolofs vivent en parfaite harmonie avec les maures et les peulhs. Même si la pêche et l’agriculture restent les deux principales activités, ce village dispose d’atouts touristiques non exploités. « Le parc de la Langue de Barbarie et la réserve de Gueumbeul se trouvent ici en plus des marées où on peut faire de la pisciculture, mais tout cela ne nous profite pas beaucoup », regrette Diadji Sarr, ajoutant qu’aucun projet d’envergure n’est installé à Tassinère. « Nos élites nous considèrent comme un vivier électoral rien de plus. Tassinère ne dispose pas de ministre ou de directeur national », dénonce avec amertume le bonhomme.