UN LONG METRAGE ENTRE RESILIENCE ET RESISTANCE DE LA FEMME
Pour l’avant-première de son 5e long métrage, «Sira», la réalisatrice burkinabè, Apolline Traoré a choisi Dakar.
Pour l’avant-première de son 5e long métrage, «Sira», la réalisatrice burkinabè, Apolline Traoré a choisi Dakar. La grande salle du Ciné Pathé a d’ailleurs refusé du monde jeudi dernier, en présence de l’ambassadeur du Burkina-Faso au Sénégal, Jacob Ouédraogo, et de celui du Mali au Sénégal. Un film actuel vu le contexte de terrorisme qui hante le Sahel. La réalisatrice qui a pointé sa caméra en mettant en exergue la parole de la femme, sa résistance et sa résilience, a été bien appréciée par les férus du 7e art.
«Sira» est le 5e long métrage de la réalisatrice burkinabè Appolline Traoré. Ce film relate l’histoire d’une «jeune fille peule, violée et abandonnée dans le désert» par un chef terroriste. Elle décide alors de tout donner pour se venger en déjouant les plans macabres des terroristes. Le film a été projeté en avant-première au cinéma Pathé de Dakar, ce samedi. Le public venu en masse a été plongé dans ce drame pendant plus d’une heure, écrit et réalisé par Apolline Traoré, avec des acteurs principaux tels que Nafissatou Cissé, Mike Danon, Lazare Minoungou, Nathalie Vairac et Ruth Werner. L’assistance a vécu le film intensément. On entendait ainsi des chuchotements dans la salle : «Non ils sont cruels !», «Oh le Sahel !»… Certains même, dans le feu de l’action, poussaient un cris : «Wouy, il va le tuer, méchant terroriste». Des réactions qui pouvaient se comprendre, puisque «Sira», l’actrice principale, est une jeune fille peule et sa tribu traversent le désert pour se rendre dans un village où son fiancé, Jean-Sidi l’attend pour l’épouser. Soudain, tous les hommes sont violemment massacrés par une bande qui surgit de nulle part. Violée et laissée pour morte dans le désert, «Sira» se retrouve seule face à son instinct de survie. Elle trouve refuge dans une grotte. Elle découvre dans ce désert que le camp des terroristes est dirigé par Moustapha, le meilleur ami de son père, et Yéré, son violeur. Entre amertume, désolation et désir de vengeance, «Sira», qui va devoir assumer qu’elle est enceinte de son agresseur, décide de tout faire pour déjouer les plans macabres des terroristes. Tandis que sans qu’elle ne le sache, son fiancé est parti à sa recherche… Ce film d’Apolline Traoré, entre résilience et résistance, a remporté l’Etalon d’argent de Yennenga lors du dernier Fespaco au Burkina-Faso. L’Etat du Sénégal a participé à cette coproduction à travers le Fopica.
RÉACTIONS… RÉACTIONS… RÉACTIONS
Nataly Vairac, actrice : «C’est un film qui m’a demandé beaucoup de travail»
«Je me sens sénégalaise, je suis touchée que le film soit présenté à Dakar. J’étais touchée pendant les réactions parce que je voyais la différence entre un public comme le Burkina, comme Adjina qui a été touché par les attaques. Et nous, par la grâce de Dieu, nous sommes encore préservés, donc tout était émouvant, ma famille était dans la salle. C’est un film qui m’a demandé beaucoup de travail, car je ne suis pas peule, je suis originaire de la Guadeloupe. Mais en tant que comédienne noire, femme, on doit se battre, investir nos rôles pour sauver notre humanité».
Pr Magueye Kasse, critique «Ce qui m’a frappé surtout, c’est l’originalité de sa thématique»
«J’ai vu le film pour la 2e fois puisque j’étais à l’édition du Fespaco quand le film a eu l’Etalon d’argent. Mais ce qui m’a frappé surtout, c’est l’originalité de sa thématique. Elle aborde beaucoup de questions de société, de transition dans nos espaces régionaux. Elle constitue pour moi une très bonne relève pour le cinéma africain. Puisqu’on a l’habitude de voir des réalisateurs et très peu de réalisatrices. On a l’habitude de voir des thématiques qui ne nous incitent pas à la réflexion. Dans ce film ‘’Sira’’, il y’a énormément de choses comme la lutte contre l’incroyance, contre toutes les menaces qui pèsent dans la sousrégion ouest africaine. Ensuite, la volonté d’émancipation de la femme, sa prise de parole de la femme. Donc, je salue son courage d’aborder des thèmes qui n’étaient pas évidentes, surtout dans le contexte d’aujourd’hui où il y a le terrorisme, le djihadisme, l’utilisation de la religion pour pervertir les mentalités. Nous avons beaucoup d’espoir en Appolline. Notre cinéma ne peut pas être un cinéma pleurnichard, un cinéma comme on le fait à Hollywood ou ailleurs. Nous devons affirmer notre identité africaine dans un media qui s’appelle le cinéma».
Critique Ces impairs qui troublent la qualité du film
Cependant, aucune œuvre humaine n’étant parfaite, hormis le décor naturel du film tourné dans le désert de la Mauritanie, le thème très intéressant, il y a des hauts et des bas. Il y a un problème de raccord, des détails qui ne passent pas. Par exemple au niveau du costume qui n’est pas bien travaillé. L’autre aspect, c’est un problème d’harmonie, l’idée des tentes étaient trop clean, on ne sentait pas ce côté misérable des terroristes, etc. Aussi, par la manière de faire de Sira, on sent qu’elle n’est pas une actrice. Par exemple, la séquence après le viol, elle se lève pour marcher et on ne sentait pas la véracité de l’action, son regard n’est pas un regard juste. Peut-être une erreur de casting, car c’est son premier rôle. Il y a des maladresses de débutante (…). Il y a aussi la partie dans laquelle un des acteurs se flagelle, sodomise les hommes, l’homosexualité en quelque sorte qui fait tiquer la salle. Peut-être que c’était une manière pour la réalisatrice de montrer que les terroristes ne sont pas des personnes normales, mais on pouvait se passer de cette scène ou le montrer d’une autre manière. Il y a également une scène très dure d’une prisonnière qui montre la cruauté des terroristes.