UN TRAFIC MACABRE DE CLITORIS EXCISÉS SÉVIT EN CÔTE D'IVOIRE
100 000 francs CFA : c'est le prix que peut atteindre un clitoris excisé sur le marché noir en Côte d'Ivoire. Plus qu'un simple organe, il devient un ingrédient prisé pour des "philtres d'amour" et des onguents censés apporter richesse et pouvoir
(SenePlus) - Selon une enquête récente de DW Afrique, un commerce sinistre de clitoris excisés persiste dans certaines régions de Côte d'Ivoire, malgré l'interdiction officielle de l'excision depuis 1998. Ce trafic, alimenté par des croyances occultes, met en lumière les défis persistants dans la lutte contre les mutilations génitales féminines dans le pays.
Dans la région de Touba, au nord-ouest de la Côte d'Ivoire, le clitoris excisé est devenu une marchandise prisée pour ses supposées vertus magiques. Labe Gneble, directeur de l'Organisation nationale pour l'enfant, la femme et la famille (Onef), explique : "Après l'ablation, ces organes sont utilisés pour des pratiques fétichistes ou spirituelles ou mystiques. Pour avoir du pouvoir, être fort politiquement, être fort socialement, être fort spirituellement, on les utilisera également pour faire des philtres d'amour."
Le prix d'un clitoris excisé peut atteindre 100 000 francs CFA, dépassant le salaire minimum en Côte d'Ivoire. Cette partie du corps féminin est généralement réduite en poudre et mélangée à des plantes pour créer un objet supposé conférer richesse et pouvoir.
Malgré l'interdiction légale, l'excision reste une pratique courante dans certaines régions du nord et de l'ouest du pays. Labe Gneble révèle des statistiques alarmantes : "Malheureusement, selon les dernières données statistiques en notre possession, qui datent de 2021, il ressort que la prévalence est encore à 36,7 %. On avance, on régresse."
L'excision, généralement pratiquée entre l'enfance et l'adolescence, est encore considérée comme un rite de passage à l'âge adulte dans certaines communautés. Cependant, ses conséquences sanitaires peuvent être mortelles, notamment en raison des conditions d'hygiène souvent précaires lors de l'ablation.
Bien que l'ampleur réelle du trafic de clitoris soit difficile à évaluer, son existence souligne les obstacles persistants à l'éradication de l'excision en Côte d'Ivoire. Une habitante de Katiola, dans le nord du pays, affirme dans les colonnes de DW Afrique que traditionnellement, le clitoris excisé devrait être enterré ou remis aux parents, suggérant que le trafic reste une pratique marginale.
La loi ivoirienne considère ce trafic comme un crime passible de plusieurs années de prison, au même titre que l'excision elle-même. Cependant, l'application de ces lois reste un défi sur l'ensemble du territoire ivoirien.