ACHILLE MBEMBÉ SALUE L'EXCEPTION SÉNÉGALAISE
Pour le directeur de la Fondation de l'innovation pour la démocratie, ce pays représente bien plus qu'un simple laboratoire politique : il incarne une "cité ouverte pour l'intelligence africaine". Un statut unique qui s'accompagne de nouveaux défis
(SenePlus) - Le philosophe et historien camerounais Achille Mbembé a livré une analyse approfondie de la démocratie sénégalaise lors de la signature ce jeudi 31 octobre, d'une convention entre l'Agence universitaire de la Francophonie (AUF) et la Fondation de l'innovation pour la démocratie, dont il est le directeur.
"Le Sénégal a été et reste une cité ouverte pour l'intelligence africaine", a déclaré Mbembé, soulignant la singularité démocratique du pays. Pour l'intellectuel, l'histoire démocratique sénégalaise, enracinée "bien avant les indépendances", s'inscrit dans une trajectoire unique qui fait du pays un "exemple symbolique" dans le débat politique africain.
Le récent changement à la tête de l'État sénégalais renforce selon lui cette position particulière. Toutefois, Mbembé insiste sur la nécessité de "traduire cette promesse dans des actes, des institutions et toute une série de réformes qui permettront d'aller de l'avant".
L'universitaire identifie deux priorités majeures pour l'avenir démocratique du pays : l'inclusion des femmes et des jeunes, qu'il qualifie de "catégories subordonnées de nos sociétés". "Une partie de notre avenir dépend effectivement de la libération de ces deux catégories et de l'exploitation des potentialités immenses et riches dont elles sont déposées", affirme-t-il.
Cette vision s'inscrit dans un projet plus large porté par sa Fondation, qui vise à développer un enseignement de haut niveau sur la démocratie en Afrique. "L'enseignement, l'apprentissage et la formation sont des leviers importants de réinvention de la démocratie en Afrique", soutient Mbembé, déplorant le manque actuel de "formations intégrant la construction de savoir-faire et savoir-être démocratiques" dans les institutions africaines.
Le programme, actuellement en phase pilote, implique quatre universités dont l'Ucad. Il ambitionne de créer une "communauté continentale d'enseignants chercheurs" capable de développer une pensée endogène sur la démocratie africaine, contrant ainsi l'idée qu'elle serait "un pur objet d'importation, extérieur à l'histoire africaine".