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23 février 2025
par Jean-Louis Corréa
DE LA PROTECTION DES LANCEURS D’ALERTE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le lanceur d’alerte est-il cette « balance » des temps modernes adepte de « la vindicte à portée de clics » ou est-ce plutôt ce citoyen épris de justice et de vérité que sa conscience martyrise à ne pas dénoncer les abus ?
Le président de la République, dans son adresse à la Nation du 3 avril 2024, a indiqué la nature des réformes institutionnelles qu’il souhaitait, dans les temps proches, entreprendre. Parmi ces différentes mesures, une en particulier a, plus que les autres, retenu mon attention. L’idée d’une loi visant la protection des lanceurs d’alerte.
Plus connu sous la dénomination anglaise de whistleblower, le lanceur d’alerte est un individu qui adopte une posture en raison de sa conscience heurtée par des faits contraires à la loi au sens large. Un tel vœu, s’il venait à se concrétiser, ferait entrer le Sénégal dans une ère de gouvernance ouverte et citoyenne, rarement promue sous nos latitudes. Toutefois, cet outil de renforcement de la redevabilité et de la transparence sera plus efficace si accompagné par une loi consacrant les libertés publiques en général et l’espace civique en particulier.
Dans un contexte de production de pétrole et de gaz, la protection des lanceurs d’alerte participe d’un contrôle citoyen accru, afin de veiller à ce que les ressources nationales soient gérées de façon orthodoxe. On pourra entendre la volonté d’élaborer une loi sur la protection des lanceurs d’alerte en contemplation de la directive n°1/2009/CM/UEMAO portant Code de la transparence dans la gestion des finances publiques au sein de l’UEMOA.
L’annonce présidentielle a donné lieu à une grande joie sur les réseaux sociaux, les justiciers numériques et autres détectives digitaux à la petite semaine se pensant découvrir un nouveau créneau : lanceur d’alerte. On pouvait lire sur X d’aucuns dire qu’avec la loi à venir sur la protection des lanceurs d’alerte, le métier de « balance » avait un avenir au Sénégal et d’autres d’ergoter sur la possibilité de filmer et divulguer les sempiternelles scènes quotidiennes de civils corrupteurs encanaillés avec les corrompus à habits imposés.
Mais le lanceur d’alerte est-il cette « balance » des temps modernes, adepte de « la vindicte à portée de clics » ou est-ce plutôt ce citoyen épris de justice et de vérité que sa conscience martyrise à ne pas dénoncer les abus et autres violations qu’il constate ?
Que nos justiciers des réseaux se calment. Le lanceur d’alerte est une réalité autre, bien comprise sous d’autres cieux que nous allons passer en revue, sans prétention à l’exhaustivité.
Contexte d’émergence
Plaçons l’apparition des lanceurs d’alerte dans un contexte global marqué par un besoin accru de transparence, remède principal contre les théories du complot qui ont la vie dure et dont certains « professeurs » médiatiques sont les prophètes au Sénégal. Contre les théories du complot favorisées par l’époque à laquelle nous sommes rendus, le meilleur remède est la transparence d’autant plus que « nos contemporains se sentent coupés du passé, incertains face à l’avenir, méfiants et désorientés à l’égard du présent ». Entre experts officiels, contre-experts et alter-experts, pour s’éviter que l’on puisse valider ce type d’assertion conspirationniste « ce n’est pas le gouvernement qui gouverne le Sénégal, on ne sait pas qui tire les ficelles », il est important de faire la promotion de l’open governance.
L’ouverture (open) et la transparence (transparency) sont devenues de critères de mesure des politiques publiques et de leur aptitude à servir utilement les populations. La lutte contre la corruption a trouvé dans les lanceurs d’alerte un puissant allié.
Pratiques comparées du lanceur d’alerte
On ne saurait parler de lanceur d’alerte sans commencer par les États-Unis d’Amérique, terre de naissance et lieu de la pratique la plus aboutie du whistleblowing. Dans le système américain, le whistleblowing permet de lutter contre toute sorte d’abus, les gaspillages, les actes illégaux, les mauvais comportements et autres traitement inadéquats.
Dans ce pays, il existe plus d’une dizaine de lois au niveau fédéral et bien plus au niveau des États fédérés visant la protection des lanceurs d’alerte, entre garantie de confidentialité, récompenses financières et protection contre les mesures de rétorsion. L’objectif visé est d’encourager les citoyens à dénoncer les fraudes et autres pratiques illicites ou illégales.
Ce sont les lanceurs d’alerte qui ont exposé le Watergate, l’échec de la guerre du Vietnam, dénoncé les fraudes comptables massives qui conduit à la chute de Enron et WorldCom au début des années 2000 ; qui ont exposé les comptes bancaires suisses secrets et les dangers de la nicotine, entre autres scandales.
En Europe, l’Union européenne a adopté la directive 2019/1937 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union européenne. Cette directive a été transposée par plusieurs États membres de l’UE. Pour le Conseil de l’Europe : « le cadre national devrait favoriser un environnement qui encourage à faire ouvertement tout signalement ou toute révélation d'informations. Nul ne devrait éprouver de crainte de soulever librement des préoccupations d'intérêt général »
Mais en France, déjà en 2016, la loi Sapin 2 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, transposant la quatrième directive européenne de lutte contre le blanchiment et la corruption, assurait la protection des lanceurs d’alerte. Selon ladite loi « Un lanceur d'alerte est une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d'un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d'un acte unilatéral d'une organisation internationale pris sur le fondement d'un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice grave pour l'intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance. »
En Afrique, rares sont les pays à s’être doté d’une loi de protection des lanceurs d’alerte. Ce mécanisme de promotion de la bonne gouvernance semble perturber la quiétude de nos dirigeants. À notre connaissance, le Ghana a été l’un des premiers pays en Afrique de l’Ouest à se doter, dès 2006, d’un Whistleblowers Act (Act 270). Le Liberia (Whistle-blowers and witness protection bill of 2017) et l’Afrique du Sud (Protected disclosures Act n° 26 of 2000) sont aussi à identifier comme terre d’accueil du whistleblowing en Afrique. Dans ces trois pays, il y a la loi mais aussi un organe spécialement dédié à sa mise en œuvre. Dans un pays comme le Kenya, il n’existe pas de loi spécifique mais des dispositions législatives sont applicables aux lanceurs d’alerte.
Comme on peut le constater, jusqu’à plus ample informé, il n’y a pas, en Afrique noire francophone, d’État ayant une loi ou un dispositif de protection des lanceurs d’alerte, ce que des recherches approfondies pourraient infirmer ou confirmer.
Portrait-robot du lanceur d’alerte
La qualification de lanceur d’alerte est réservée à une catégorie de personnes. Entre les personnes physiques et les personnes morales, seules les premières sont concernées. Ce qui exclut les associations, les syndicats, a fortiori les dénonciations anonymes.
Dans certaines législations, comme au Liberia, en Afrique du Sud, le lanceur d’alerte doit être un employé (ou ex-employé) d’un service public ou privé. Dès lors, avant de dénoncer en public, il doit saisir sa hiérarchie afin de trouver des solutions aux faits constatés. En cas d’inaction de l’autorité publique, la divulgation publique est légitime.
En outre, le lanceur d’alerte ne peut révéler ou dénoncer que des faits dont il a une connaissance personnelle, ce qui exclut les faits portés à sa connaissance par un tiers dont il se fait le porte-parole.
De même, les révélations ou les dénonciations faites par le lanceur d’alerte sont généralement désintéressées, ce qui exclut toute forme de rémunération (dans le modèle américain, une récompense est envisageable), et faites de bonne foi, sans intention de nuire. Ce qui se comprend aisément, le lanceur d’alerte dénonce des faits portant gravement atteinte à l'intérêt général.
Afin de garantir sa protection, la qualité de lanceur d’alerte est une cause d'irresponsabilité pénale. Sa qualité le rend irresponsable pénalement de l'atteinte qu'il porterait à un secret protégé par la loi, à l’exclusion du secret de la défense nationale, du secret médical ou du secret des relations entre un avocat et son client, en divulguant son information.
Pour vivre heureux, il faut vivre caché
Assertion ne saurait être plus fausse dans la gestion de la chose publique. Pour vivre heureux, il ne faut plus vivre caché. A l’ère de l’ouverture, se traduisant par l’anglicisme « open » préfixe à la mode et prétexte à de nombreuses politiques publiques, open access, open data, open science, l’action non révélée équivaut à une action suspecte voire non réalisée.
Le désir de transparence à partie liée avec l’idéal déclaré d’un monde où le soupçon serait déclaré impossible, « l’apparence étant parfaitement conforme à la réalité ». Mais comme le révèle P.-A Taguieff, « l’impératif de transparence est porteur d’équivocité…dans le monde de la transparence…les authentiques vertueux et les naïfs de bonne volonté côtoient les Tartuffe, les manipulateurs, les menteurs, les démagogues ».
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DIATOU CISSE ÉTRILLE LES PRIVILÈGES DES ÉLITES
La journaliste dénonce les dérives d'un système rongé par une caste au sommet de l'État. Fonds politiques indécents, retraites présidentielles faramineuses, avantages matériels injustifiés... Son plaidoyer pour l'équité fait des vagues
Le débat sur les privilèges accordés aux anciens responsables politiques sénégalais est à nouveau relancé. Lors d'une émission télévisée sur la TFM, la journaliste Diatou Cissé a souligné qu'il était nécessaire de "revoir ces points-là".
Selon elle, "rien ne justifie que vous soyez président du conseil économique, vous partez, on vous donne trois millions par mois. Un ancien président de la République, on lui donne si je ne m'abuse, cinq millions. C'est du détournement légalisé."
Diatou Cissé fait ici référence aux larges privilèges financiers attribués aux anciens présidents de la République et présidents d'institutions au Sénégal. Elle dénonce des sommes "excessives" et "au non de quoi" ces personnalités perçoivent de tels montants.
"Il y a des agences, les gens, certains ont sept millions, d'autres ont cinq millions. Les hausses salariales par-ci et par-là ont déstabilisé la grille de salaire de la fonction publique. Comment on peut être ancien président et ne pas avoir une maison ?", s'interroge-t-elle, pointant le caractère "gabégique" de l'État sénégalais depuis les libéraux.
Selon la journaliste, ces privilèges "induits ou excessifs" contribuent à "vampiriser" l'État sénégalais et mobilisent des ressources qui pourraient être allouées à des politiques publiques prioritaires comme l'emploi des jeunes.
DÉCÈS DE BOUN DIONNE, MACKY SALL SALUE LA PERTE D’UN GRAND CADRE ET COMPAGNON
Sa réaction ne pouvait tarder. Le Président Macky Sall a dit toute sa peine d’apprendre le décès de Mahammed Boun Abdallah Dionne à Paris.
Sa réaction ne pouvait tarder. Le Président Macky Sall a dit toute sa peine d’apprendre le décès de Mahammed Boun Abdallah Dionne, hier, à Paris.
Dans un post sur X, l'ancien chef de l'Etat du Sénégal écrit : «Le Sénégal perd un cadre de grande valeur et moi un compagnon de longue date. Mes condoléances émues à veuve Caty et à sa famille. Je salue sa mémoire. Paix à son âme.» La politique les a éloignés depuis quelques mois. Son ancien Premier ministre avait choisi d’être candidat et donc de ne pas soutenir Amadou Ba.
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AYIB DAFFÉ APPORTE DES PRÉCISIONS SUR LA FORMATION DU NOUVEAU GOUVERNEMENT
La liste du premier gouvernement du nouveau régime n’est pas encore dévoilée. Au moment où les supputations fusent, Ayib Daffé, le secrétaire général adjoint de Pastef a apporté quelques précisions.
La liste du premier gouvernement du nouveau régime n’est pas encore dévoilée. Au moment où les supputations fusent, Ayib Daffé, le secrétaire général adjoint de Pastef a apporté quelques précisions.
«À mon avis, on est dans les délais raisonnables pour former un gouvernement», a déclaré Ayib Daffé. Le secrétaire général adjoint du parti Pastef, qui s’exprimait sur la Rfm, estime que dans cette situation, «parler de retard est inapproprié». Car, dit-il, que «des gouvernements ont été formés sur plus d’une semaine».
La question que l’on se pose aujourd’hui, c’est à quelle date ou à quelle heure sera diffusée la liste du gouvernement de Ousmane Sonko : «Elle peut être publiée aujourd’hui comme demain», a-t-il indiqué.
LES CONFESSIONS D'UN GARDIEN DE BUT SÉNÉGALAIS VICTIME DE RACISME EN ESPAGNE
Cheikh Sarr, gardien sénégalais du Rayo Majadahonda (D3 Espagne), a été suspendu deux matchs après avoir réagi à des insultes racistes lors d'une rencontre de football en Espagne.
iGFM (Dakar) Cheikh Sarr, gardien sénégalais du Rayo Majadahonda (D3 Espagne), a été suspendu deux matchs après avoir réagi à des insultes racistes lors d'une rencontre de football en Espagne. Cet incident, survenu le week-end dernier lors d'un match contre Sestao, soulève une fois de plus la question du racisme dans le sport. Le joueur de 23 ans a décidé de s'exprimer sur cette épreuve et sur son engagement contre le racisme, lors d'une interview dans Marca reprise par Afrikfoot.
Pour avoir sauté dans la tribune adverse pour s'expliquer avec l'individu l'ayant insulté à plusieurs reprises, Cheikh Sarr a été expulsé. Choqués par l'incident, ses partenaires avaient d'ailleurs refusé de poursuivre le match, retournant aux vestiaires en signe de solidarité envers leur gardien, condamnant des “insultes racistes inacceptables” et une “honte absolue“. Cette attitude lui a donc valu une suspension mais elle a également été payée au prix fort par son club du Rayo Majadahonda, qui a vu trois points retirés de son classement en plus d'une défaite par forfait et de 6000 euros d'amende.
Mercredi, Cheikh Sarr s'est exprimé dans une interview avec Marca, discutant des conséquences de l'acte qui a mené à sa suspension. “Les trois points perdus me font beaucoup souffrir“, confie-t-il, soulignant l'impact de la sanction sur lui et son équipe. Dans son verdict, la Fédération de football espagnole a admis que Cheikh Sarr avait subi une “offense grave“, mais a jugé inappropriée sa manière de réagir, suggérant qu'il aurait dû “suivre les procédures officielles“.
"J'ai agi ainsi parce que j'étais affecté..."
Dans son témoignage, l'ancien international U20 avec le Sénégal révèle son désarroi. “Nous, qui sommes sur le terrain, parfois nous ne pouvons pas endurer et nous agissons sans réfléchir. J'étais affecté et c'est pour cela que j'ai agi ainsi“, dit-il, reconnaissant l'importance de lutter contre le racisme et l'effet de ses actions.
“Si cela m'arrive à nouveau, je ne réagirai pas comme je l'ai fait et je saurai comment me comporter. Ma fille mérite un monde meilleur. Je me bats et je me battrai pour elle“, avait-il aussi communiqué dans un post sur Instagram publié avant l'annonce de sa suspension.
Quoi qu'il en soit, sa suspension intervient alors que les médias ibériques encourageaient les instances à ne pas sanctionner Cheikh Sarr si l'Espagne “souhaitait vraiment mettre fin au racisme” dans ses stades. “La victime ne peut pas être sanctionnée“, titrait par exemple le très connu quotidien sportif Marca mercredi, avant la décision de la RFEF. Cheikh Sarr s'était également exprimé mardi lors d'une conférence de presse, indiquant que ce qu'il avait subi “était quelque chose d'horrible, quelque chose que je ne pouvais pas supporter, d'une grande tristesse“.
“Défendre ma dignité vaut plus que tout”
La situation du natif de Dakar souligne les défis rencontrés par les athlètes face au racisme. En choisissant de s'exprimer, Sarr lutte non seulement pour sa propre dignité mais aussi pour celle de tous ceux qui ont été confrontés au racisme dans le sport et ailleurs. Ses mots, “défendre ma dignité vaut plus que tout“, agissent comme un appel à combattre le racisme sous toutes ses formes.
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LA FIN DE LA PROCRASTINATION MONÉTAIRE AU SÉNÉGAL ?
Martial Ze Belinga déconstruit le mythe de la "pérennité" du franc CFA. Pour le chercheur camerounais, l'argument de la continuité défendu par les partisans du statu quo monétaire ne tient plus face aux aspirations de souveraineté des nations africaines
Pendant des décennies, les autorités africaines ont repoussé l'échéance d'une réforme des systèmes monétaires hérités de la colonisation. Selon Martial Ze Belinga, chercheur indépendant en économie et en sciences sociales, cette attitude relève de la « procrastination », un report permanent d'une décision pourtant nécessaire.
"On est habitué à fonctionner dans un système dont on sait qu'il n'est pas optimal, dont on sait qu'à terme on devra changer, mais on diffère en permanence le moment de décider et de faire un choix", analyse- t-il à propos du franc CFA.
Le chercheur camerounais considère que malgré les discours rassurants sur la stabilité apportée par cette monnaie, les faits sont têtus : en près de 80 ans d'existence, le franc CFA n'a pas permis l'émergence économique des pays qui l'utilisent. Un constat cuisant pour les défenseurs d'un outil vendu comme protecteur des économies africaines.
Désormais, l'élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidence du Sénégal pourrait marquer la fin de cette longue tergiversation. Portée par un vent de souveraineté, la nouvelle équipe dirigeante affiche sa ferme intention de tourner la page du franc CFA, perçue comme un vestige néocolonial.
Deux options sont sur la table selon Ze Belinga : une sortie collective au sein de la CEDEAO vers l'éco, la future monnaie commune, ou une sortie en solitaire pour doter le Sénégal de sa propre invention. Une perspective qui effraie certains observateurs, redoutant d'éventuelles représailles à l'instar de celles subies par des dirigeants récalcitrants par le passé.
Mais pour le chercheur, le Sénégal, de par son poids démographique, économique et sa légitimité démocratique, à tous les atours pour être le pays pionnier qui entraînera d'autres nations africaines sur la voie de la souveraineté monétaire.
DÉCÈS DE BOUN DIONNE
L'évacuation précipitée de l'ex-Premier ministre en France pour raisons médicales avait alimenté les spéculations. Premier ministre de 2014 à 2019, le candidat à la présidentielle avait dû interrompre sa campagne, frappé par la maladie
(SenePlus) - L'ancien Premier ministre Mahammad Boun Abdallah Dionne est décédé vendredi 5 avril 2024 en France à l'âge de 65 ans, des suites d'une maladie. Candidat à l'élection présidentielle du 24 mars dernier, sa mort plonge le Sénégal dans le deuil.
Tombé malade durant la campagne électorale, il avait été évacué en France dans la nuit du samedi 23 au dimanche 24 mars 2024 pour des soins. De quoi le contraidre notamment à interrompre sa campagne électorale. La dégradation de son état de santé avait alors alimenté diverses rumeurs.
Acteur de la vie politique sénégalaise, Mahammad Boun Abdallah Dionne aura notamment occupé le poste stratégique de Premier ministre pendant plus de 5 ans, soit de juillet 2014 à mai 2019 auprès de l'ex-président Macky Sall. L'ingénieur informaticien et auditeur libre a dernièrement pris ses distances avec Macky Sall, en décidant de briguer la magistrature suprême après le choix par ce dernier d'Amadou Ba comme candidat de la majorité présidentielle.
OUSMANE SONKO VA DÉMISSIONNER DE SON POSTE DE MAIRE, AFFIRME CHEIKH OUMAR DIAGNE
Pour le président du parti Rassemblement pour la Vérité/And Ci Dëgg et allié, le Premier ministre va démissionner de son poste car la charge de maire est incompatible avec celle de Premier ministre.
Très attendu pour démissionner de son poste de maire de la ville de Ziguinchor, Ousmane Sonko est toujours dans l’élaboration de la liste de son nouveau gouvernement qu’il doit soumettre au Président Diomaye Faye.
Des critiques qui commencent à enfler et qui proviennent du camp de l’ancien régime.
Cependant, pour Cheikh Oumar Diagne, président du parti Rassemblement pour la Vérité/And Ci Dëgg et allié, le Premier ministre va démissionner de son poste car la charge de maire est incompatible avec celle de Premier ministre.
«Je ne sais pas s’il a démissionné ou pas de sa mairie mais je sais qu’il va le faire car il est foncièrement contre le cumul de postes. Pour preuve, pour le cas de Birame Souleye Diop, il a parlé à plusieurs reprises avec lui pour lâcher un de ses postes de maire ou de député. En plus, sa charge de Premier ministre est incompatible avec celle de Premier ministre. Le président Bassirou Diomaye Faye a démissionné de son poste de secrétaire général de PASTEF et Sonkova en faire de même. De plus les textes du PASTEF leur interdisent le cumul », a-t-il affirmé
Il estime également que l’équipe derrière le nouveau président va respecter ses promesses faites avant d’accéder à la magistrature suprême car pour lui «ceux qui veulent créer cette polémique devraient trouver mieux puisque il y a d’autre combat qui attendent et qui devraient les intéresser que d’agiter la question du cumul de poste déjà réglé».
Concernant les lenteurs dans la publication de la liste du nouveau gouvernement, Cheick Oumar Diagne estime qu’il n’y a pas de lenteur. Ousmane Sonko est toujours dans les délais d’autant qu’il est en train de peaufiner sa liste qui doit refléter leur politique. Pour le chercheur, «le nouveau gouvernement sera réduit, il ne sera pas un gouvernement de partage de gâteau mais de travail».
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CEDEAO, TERRE PROMISE DU JOURNALISME DE REDEVABILITE
Malgré les différentes entraves au journalisme d’investigation, aujourd’hui beaucoup d'outils permettent de l’exercer et l’Afrique de l’Ouest est pratiquement une terre vierge pour faire de l‘investigation, estime le journaliste Maxime Domegni.
Maxime Domegni s’est passionné très tôt pour le journalisme d’investigation en tant que jeune reporter. Maxime a travaillé et travaille encore pour de grandes organisations qui promeuvent le journalisme de redevabilité. Aujourd’hui en plus du terrain, il est aussi formateur dans des écoles de formation en journalisme.
Sa carrière commencée au Togo, il a eu ses expériences les plus profondes en journalisme d’investigation au sein de l’emblématique journal L’Alternative qui a fini par devenir encombrant pour le régime de Lomé.
En marge de la cérémonie de relance de l’Alternative à Dakar, AfricaGlobe Tv l’a interviewé sur ses expériences ainsi que les défis du journalisme d’investigation dans la région ouest-africaine.
Pour lui, le contexte est favorable plus que jamais pour de l'investigation en Afrique de l'Ouest grâce aux nouveaux outils issus l'évolution technologique et ce en dépit de l’aversion de certains dirigeants pour les journalistes.
En tout cas pour Maxime, l'investigation est sans doute l'avenir du journalisme. L'intelligence artificielle (IA) ne peut voler le boulot d'un journaliste d'investigation. L'IA ne menace que le journalisme de communique de presse.
Né dans le sillage du mouvement ‘’Yeewu Yeewi’’ pour la libération des femmes, fondé en 1984, et dont il s’inscrit dans la continuité quarante ans après, le Collectif des féministes du Sénégal (CFS) est porté par des femmes âgées entre 25 et 40 ans.
Né dans le sillage du mouvement ‘’Yeewu Yeewi’’ pour la libération des femmes, fondé en 1984, et dont il s’inscrit dans la continuité quarante ans après, le Collectif des féministes du Sénégal (CFS) est porté par des femmes âgées entre 25 et 40 ans. Celles qui incarnent aujourd’hui le féminisme ont raconté à l’APS leur parcours et leur engagement pour la cause féminine.
De la réalisatrice à la juriste consultante en passant par la bibliothécaire archiviste, l’écrivaine scénariste et la communicante, toutes s’affichent pour prendre la parole et faire entendre leur voix sur la lutte pour les droits des femmes. La toile, l’écran et les réseaux sociaux sont les outils les plus investis.
Adama Pouye : la lutte contre les agressions sexuelles dans les transports a débuté pour elle sur Facebook et d’autre réseaux sociaux. A vingt-sept ans, la diplômée de l’Ecole des bibliothécaires, archivistes et documentalistes (Ebad) s’est fait remarquer par ses post virulents sur les réseaux sociaux pour dénoncer les agressions sexuelles dans les transports en commun.
Un engagement qui sonne comme un déclic dans le parcours féministe et évolutif de Adama Pouye, débuté en 2019. C’est l’année où elle créa le mouvement ‘’Boulma rissou’’ (Ne te frottes pas à moi en wolof). Un mouvement né de cette lutte sans merci qu’elle mène avec des féministes telles que Aminata Liben Mbengue, Maïmouna Astou Yade, Amy Sakho.
Documentaliste à l’Institut français de Saint-Louis, elle s’associe lors d’une campagne de sensibilisation avec des transporteurs des bus tata Aftu (mini bus de Dakar) et de Dakar Dem Dikk (DDD), l’entreprise de transport public.
Elle met ensuite sur pied l’Association féministe ‘’Awas’’ (‘’la voix’’ en farsi iranien), avec sa sœur jumelle Marième Pouye et d’autres féministes dans le but d’élargir le champ de lutte pour les droits des femmes.
Adama a été éduquée dans un cocon familial ‘’sécurisé’’ où il y a qu’un seul homme à la maison, son père, et où on fait comprendre à toutes les possibilités qu’une fille peut avoir dans la vie.
Mais le choc eut lieu lorsqu’elle sortit du cocon familial avec des messages d’un autre son de cloche. Par exemple, il y a l’école où on demande aux filles de balayer les classes et pas les garçons. Et pour ne rien arranger, ces derniers ‘’sont mis en avant dans les gouvernements scolaires et autre instantes dirigeants’’, dénonce Adama Pouye qui assume son féminisme une fois à l’université de Dakar, à l’Ebad.
Aujourd’hui, la co-coordinatrice du collectif des féministes du Sénégal, la plus jeune d’ailleurs du bureau de douze membres de cette organisation, a lancé en 2021 un forum exclusivement féminin à Saint-Louis. Le but : promouvoir les initiatives des femmes dans la littérature, l’entreprenariat, le numérique où elles doivent s’investir et la nécessité d’avoir un cadre d’échange pour les droits des femmes.
La réalisatrice sénégalaise Mamyto Nakamura, pour qui le cinéma est un outil de plaidoyer pour parler aux femmes, est engagée dans le mouvement féministe du Sénégal, depuis 2012. Elle se sert de sa caméra pour “réparer certaines injustices faites aux femmes et plaider en leur faveur”.
En témoignent les multiples podcasts réalisés sur les articles discriminatoires du Code de la famille à l’endroit des femmes et diffusés en zone rurale de façon gratuite pour ouvrir le débat et donner aux femmes le courage de se raconter et de s’exprimer sans être jugées.
Son dernier film documentaire ‘’Au nom du sang’’ (sorti en janvier), sélectionné au prochain Festival film femme Afrique, prévu du 26 avril au 4 mai, traite du viol dans l’espace familial. Autant dire qu’il en dit long pour celle qui, aujourd’hui, suit les pas de sa mère, Fatou Diop, ”bajenu gox” (marraine de quartier), très réputée à Louga, sa ville natale.
C’est d’ailleurs là que Mamyto Nakamura officie pour faire passer ses messages. Elle qui a pris le nom de ‘’Hiros Nakamura’’, personnage de fiction de télévision américaine qui a le pouvoir de fermer les yeux et de voyager dans le temps. ‘’J’aurais aimé voyager dans le temps pour réparer certaines injustices faites aux femmes et filles’’, lance Mamyto Nakamura, qui se définit comme ‘’une féministe communautaire’’.
‘’On est toute féministe, il s’agit de s’engager ou de ne pas le faire’’, souligne celle qui s’est engagée dans cette voie pour être au service de sa communauté et faire tout pour que les femmes occupent les devants.
L’épanouissement des femmes, leur sécurité, le travail, l’autonomie financièrement, l’indépendante à travers les idées et les envies restent le fil rouge de son combat.
Même chose pour Maïmouna Astou Yade dite ‘’Maya’’, à qui le surnom de féministe radicale irait bien. Elle est la fondatrice exécutive de ‘’JGen Sénégal’’ (JGEN women global entrepreneurship), une structure créée en 2016 et qui regroupe de jeunes féministes.
Elle se classe parmi les ‘’féministes hyper radicales’’, surtout face au patriarcat, dit-elle. Son engagement pour la cause des femmes est partie d’une privation de parole en public dont elle a été victime. Mais pour Maya, ‘’on est tous féministe dans l’âme’’, même s’il faut un déclic pour l’affirmer.
Depuis 2020, la consultante, juriste de formation, s’active dans la construction du mouvement féministe au Sénégal et dans l’Afrique francophone. Elle se bat, dit-elle surtout, ‘’ pour éliminer toutes sortes de violences basées sur le genre au Sénégal’’.
La mission des femmes réunies autour de JGen Sénégal est de ‘’décoder les codes sociaux’’, et dans une approche innovante avec le collectif des féministes du Sénégal, d’aller à la rencontre des communautés pour déconstruire le mythe construit autour du féminisme.
Son modèle reste aujourd’hui la sociologue Fatou Sow, ‘‘une figure emblématique du féminisme’’ dont elle admire la posture, mais surtout la préservation de sa culture et des valeurs sénégalaises. ”A chaque fin de rencontre entre féministes, elle se précipite pour rentrer et quand on l’interpelle pour savoir pourquoi, elle répond : +Je vais aller m’occuper de ma famille+. En bonne sénégalaise et malgré son engagement, elle garde sa culture et c’est ce qui est admirable”, magnifie Maya.
Elle se donne comme ambition d’accompagner les plus jeunes pour qu’elles puissent grandir avec l’opportunité d’en apprendre plus sur le féminisme africain.
Car pour Maïmouna Astou Yade, même s’il y existe un féminisme universel, il en existe aussi qui spécifique à l’Afrique parce que les Africaines ont des priorités spécifiques.
Et ce n’est pas Amina Seck qui dira le contraire, elle qui se bat pour l’égalité femme-homme à travers l’écriture. La romancière et scénariste sénégalaise ne saurait dire comment elle est devenue féministe, mais est convaincu des raisons pour lesquelles elle est féministe. ‘’J’ai toujours défendu les droits humains depuis mon enfance. En grandissant, j’observais les femmes, les filles et plus particulièrement ma mère. J’ai donc compris qu’il y avait une inégalité qu’il fallait combattre’’, confie-t-elle à l’APS.
La fondatrice de “Les Cultur’elles” (une agence pour la promotion des arts et cultures au féminin) et organisatrice du Salon du livre féminin de Dakar fait un travail de ‘’déconstruction’’ à travers son art. ‘’Je mets en lumière toutes les femmes qui évoluent dans le milieu des arts et de la culture. Mes projets personnels (livres et scénarios) racontent les femmes aux femmes et hommes. Je forme et encadre beaucoup de personnes dans le domaine de la création (l’écriture)’’, déclare-t-elle.
Celle qui est devenue une militante pour les droits des femmes grâce à son parcours, son vécu et aux circonstances, fonde son engagement sur la paix et le respect de tous, plus particulièrement des femmes.
‘’Je n’ai pas de limite. J’évolue dans le milieu des arts, nous avons donc deux statuts dans la société, celui d’être une femme et aussi d’être artiste qui n’a que son art pour s’exprimer et vivre dans la dignité. Et nous savons tous qu’il existe toutes les formes de violence dans le milieu artistique’’, dénonce-t-elle. Amina Seck estime que le féminisme a du chemin à faire, que ce soit au Sénégal ou dans d’autres pays africains.
‘’En ce qui concerne le Sénégal, tant que le code de la famille n’est pas revu, beaucoup de combats seront vains. Ce qui serait vraiment dommage pour tout le chemin parcouru jusqu’à là sur les luttes pour les droits des femmes. Le code de la famille constitue un mur que seules les autorités peuvent briser pour donner aux femmes ce qui les sont dus’’, estime-t-elle.
Une autre féministe qui partage les mêmes conviction est Eva Rassoul Ngo Bakenekhe, pour qui le combat pour la déconstruction passe par l’éducation. La militante féministe qui se défit comme quelqu’un qui refuse de rentrer dans une moule, plaide pour une déconstruction dans l’éducation. ‘’Apprendre aux enfants à être humain’’, lance-t-elle.
La Camerounaise qui vit au Sénégal depuis une quinzaine d’années, précise que son combat se résume à voir comment faire pour que l’éducation féministe qui renvoie à l’éducation des enfants, puisse atteindre tous les enfants, aussi bien les garçons comme filles. La journaliste s’active davantage aujourd’hui dans la communication et rêve d’un monde plus ‘’humaniste’’ où l’on apprendra ‘’au garçon à être un homme accompli et à la fille de même pour arriver à un monde juste’’.
Eva Rassoul estime que le féminisme n’est différent en rien des autres combats menés dans nos sociétés. Celle qui se réclame féministe est entrée dans le mouvement pendant l’Affaire ”Adji Sarr”, l’ex-employée d’un salon de beauté qui avait accusé de viol le leader de l’ex-PASTEF, Ousmane Sonko.
‘’Féministe, je le suis depuis longtemps, parce que lorsqu’on est journaliste, il faut s’imposer dans les rédactions, et pour aller sur le terrain, toujours défendre ses positions, briser les codes’’, souligne-t-elle.
Elle regrette toutefois que parfois dans les combats des féministes, ‘’les plus grands pourfendeurs soient des femmes’’.