Apres le mandat de dépôt infligé à son client, Me Bamba Cissé a fait face à la presse. Selon Pressafrik, la robe noire qui dénonce une injustice flagrante à l'encontre du mise en cause estime que Ngagne Demba Touré mérite le respect. Il a également déploré des chefs d’accusation sans aucune logique.
«Aujourd’hui également, c’est, un jour, triste pour la justice, un jour triste pour les hommes de droit parce que nous avons été poignardés dans le dos. Ngagne Demba Touré est devenu aujourd’hui un détenu politique et il est ajouté à ce nombre impressionnant de détenus politiques, l’acteur qu’il est principal du parti Pastef », a déclaré Me Bamba Cissé, rapporte Pressafrik. L'avocat a renseigné que son client Ngagne Demba était très mal après le verdict l'envoyant en prison prononcé par celui là même qui l'a formé. « La famille judiciaire est aujourd’hui aux abois, elle est meurtrie par ce qu’un membre essentiel de la famille a été placé sous mandat de dépôt par ce juge même qui l’a formé dans le cadre de l’exercice de son métier de greffier. C’est pourquoi Ngagne Demba Touré a très mal après la délibération. Nous n’avions pas demandé à être au-delà de la loi ni en de ça de la loi, mais nous voulions un traitement équilibré et à équidistance des parties», a-t-il rapporté. « On a vu une ordonnance dans laquelle un juge s’est permis d’insulter quelqu’un dans le cadre de son audition en le traitant de lâche. Ngagne Demba Touré mérite le respect. Aujourd’hui, le greffe est meurtri et le greffe est un pan essentiel de la justice, l’avocature, la magistrature ne sont pas plus importantes que le greffe. Aujourd’hui, c’est le bras de la justice qui a été coupé. C’est la main de la justice qui a été arrachée. Ngagne Demba Touré est aujourd’hui, malheureusement, en prison et nous craignons la fin d la justice normale et la prolongation d’une justice aux abois et c’est le cas aujourd’hui », a dénoncé l'avocat.
Me Cissé a déploré une injustice flagrante lors de l'audition de Ngagne Demba Touré et parle d'accusations sans aucune logique. «Il y avait une injustice flagrante, Pourquoi, un mandat de dépôt dans ce contexte actuel où le président de la République a lui-même annoncé la couleur disant qu’il allait pacifier l’espace politique et réconcilier les Sénégalais. Cette décision est très grave. Même Ngagne Demba Touré est beaucoup plus chargé par le juge du deuxième cabinet qu'Ousmane Sonko. On parle des propos profilés à l’encontre d'Antoine Diome, des chefs d’accusation sans aucune logique, mis sur la tête d’un jeune greffier. C’est une honte pour la justice. Il faut qu’on revienne aux fondamentaux de la justice aujourd’hui un couteau a été placé sur le dos de la justice », a-t-il fustigé.
LES CONTRADICTIONS DE MACKY SALL
Pour Maurice Soudieck Dione, le président contredit l'annulation de la loi sur le report en intégrant les "recalés". Il fait par ailleurs preuve d'incohérence sur le fondement juridique de son décret et sur le caractère lié de sa compétence électorale
Le Professeur agrégé en Sciences politiques à l’université Gaston Berger de Saint-Louis Maurice Soudieck Dione a relevé des contradictions dans l’adresse du président de la République. Selon lui, Macky Sall ne tire pas toutes les conséquences de la décision du Conseil Constitutionnel.
«C’est un entretien qui fait un peu le tour de l’actualité et de la décision cruciale du report de l’élection présidentielle du 25 février2024. D’abord, la première chose que l’on remarque, c’est que le président est resté une semaine sans s’exprimer alors que le Conseil constitutionnel avait dit qu’il fallait fixer une date pour l’élection présidentielle dans les meilleurs délais. Ce temps aurait pu être mis à profit vu qu’on est dans une situation d’urgence. La deuxième lecture qu’on peut faire, c’est que le président de la République demande à ce qu’on organise des concertations. Il avait d’abord dit qu’il organise des consultations. Maintenant, on passe des consultations à des concertations ou à un dialogue comme il le dit. Dans ce dialogue, on met ensemble des intérêts tout à fait contradictoires parce qu’on a les candidats retenus définitivement par le Conseil constitutionnel mais le président de la République a rajouté les candidats «spoliés» du parrainage. Là aussi, on ne comprend plus.
D’abord, il y a un problème de droit qui se pose. Le président de la République avait dit lui-même, lorsqu’il avait reçu ces recalés du parrainage, que l’article 92 de la Constitution dispose très clairement que les décisions du Conseil constitutionnel sont insusceptibles de recours et s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. Aujourd’hui, le Président revient ensuite pour prendre encore ces recalés au parrainage et les amener dans un dialogue avec les candidats qui ont été définitivement retenus, ça veut dire qu’il ne tire pas toutes les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel qu’il dit vouloir appliquer. Ce n’est pas parce que le Conseil constitutionnel a censuré la loi sur le report et le décret qui va avec que le président en appelle à des concertations. Donc, là aussi, c’est une contradiction. Vous ne pouvez pas à la fois approuver et désavouer le Conseil constitutionnel. Approuver le Conseil constitutionnel parce qu’on a appelé les candidats définitivement retenus mais aussi désavouer le Conseil en disant que les recalés du parrainage doivent aussi participer aux concertations alors que la décision est définitive et que personne n’a le droit de la remettre en question et c’est ce que le Président avait dit lorsqu’il avait reçu les recalés du parrainage».
«Autre chose également, le président dit que son décret s’est basé sur la loi mais là aussi, c’est inexact parce qu’en réalité, le décret a précédé la loi. Donc, le décret ne peut pas avoir précédé la loi et s’être basé sur la loi pour être pris. C’est une contradiction».
«Autre chose également, c’est que le Conseil lui a fait savoir que le décret que vous prenez, ce n’est pas un pouvoir discrétionnaire encore moins un acte de gouvernement mais c’est une compétence liée en application de la loi électorale et de la Constitution. Donc, on a toutes ces contradictions qu’il faut relever dans l’adresse du Président de la République». «Il y a aussi cette date fatidique du 2 avril. Or, le Conseil constitutionnel en censurant la loi portant report de l’élection présidentielle parce qu’il y a une incidence en ce sens que cela proroge le mandat du Président de la République, cela entraine la censure du décret. C’est comme si le décret que le président avait pris pour arrêter le processus était illégal ou même non avenu parce qu’une compétence liée. Ce n’est pas un pouvoir discrétionnaire. Ça ne veut pas dire que j’ai envie de convoquerle corps électoral, je le convoque. Je n’ai pas envie de le convoquer, je ne le convoque pas. C’est une compétence liée. Il est dans l’obligation de convoquerle corps électoral parce que c’est ce que lui demande de faire la loi électorale et la Constitution.
Donc, ce qu’il y avait lieu de faire, c’est de mettre en mouvement le processus et que même si le processus est mis en mouvement et qu’on arrive à organiser le premier tour du scrutin avant la fin du mandat du président de la République, on peut concevoir qu’il y aurait une poursuite continue de l’effectuation du scrutin. Si on va au 2nd tour, on est toujours dans cette dynamique d’organisation d’une élection. En ce moment, l’article 36 de la Constitution qui dit que le président de la République sortant reste en fonction jusqu’à l’installation de son successeur, a du sens mais. En revanche, si l’élection n’est pas organisée avant le 2 avril et qu’entre-temps, le mandat du Président de la République expire, on est dans une autre configuration, c’est là où on va se retrouver dans une crise politique qui peut être grave parce qu’en ce moment, le Président de la République va détenir un pouvoir de fait. C’est-à-dire un pouvoir qui ne peut être fondé ni sur la légalité ni sur la légitimité».
MACKY SALL DANS LE CLAIR-OBSCUR
Le Sénégal est-il en train de foncer tout droit vers la situation de chaos politique décriée par le Pr Abdel-El Kader Boye dans l’entretien qu’il a accordé à Sud quotidien, mercredi dernier ?
Le président de la République qui était attendu sur la nouvelle date de l’élection présidentielle initialement prévue le 25 février prochain a informé hier, jeudi 22 février, lors d’un entretien qu’il a accordé aux représentants de quatre organes de presse nationaux, que cette date ne sera pas connue avant les concertations qu’il a convoquées. Par ailleurs, tout en rappelant avec insistance que son mandat prendra fin le 2 avril prochain, Macky Sall a cependant laissé planer le doute sur la question de son départ à la tête de l’Etat à partir de cette date marquant la fin de son contrat avec le peuple sénégalais en soulignant qu’il « est clair qu’il n’ y aura pas de vide institutionnel, parce qu’on ne peut pas laisser le pays sans président de la République ».
Le Sénégal est-il en train de foncer tout droit vers la situation de chaos politique décriée par le Professeur titulaire de classe exceptionnelle de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques et ancien Recteur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Abdel-El Kader Boye dans l’entretien qu’il a accordé à Sud quotidien, mercredi dernier ? Tout porte à le croire. En effet, alors que tout le pays est suspendu à son décret devant fixer la nouvelle date de cette élection présidentielle initialement prévue pour le 25 février prochain et qui cristallise la tension politique depuis la tombée de la décision 1/C/2024 du Conseil constitutionnel demandant aux autorités compétentes de fixer cette date dans les « meilleurs délais », le président Macky continue de maintenir le suspense. La preuve, interpellé lors d’un entretien qu’il a accordé aux représentants de quatre organes de presse nationaux hier, jeudi 22 février, le président de la République, Macky Sall, a informé que cette date ne sera pas connue avant les concertations qu’il a convoquées.
« Pour la nouvelle date, elle sera connue après concertation. C’est au président de prendre le décret convoquant le collège électoral, fixant la nouvelle date. Ce décret ne peut être pris avant que la concertation ne se fasse. Donc, la date de la présidentielle sera retenue après cette concertation nationale qui devrait durer deux jours et qui démarrera lundi prochain (26 février) », a-t-il informé tout en faisant remarquer par ailleurs que cette date « dépendra des positions à concilier entre ceux qui veulent l’élection maintenant et ceux qui veulent qu’on prenne quelques jours pour revoir le processus avant d’aller à l’élection. A la fin, le Conseil constitutionnel à qui il appartient de dire ce qui doit être fait le fera et tout le monde devra s’y accorder ».
«MA MISSION SE TERMINE LE 2AVRIL», MAIS «IL EST CLAIR QUE LE PAYS NE PEUT PAS RESTER SANS PRESIDENT»
Auparavant, le chef de l’Etat tout en précisant avec insistance que son mandat prendra fin le 2 avril prochain, a cependant laissé planer le doute sur la question de son départ de la tête de l’Etat à partir de cette date marquant la fin de son contrat avec le peuple sénégalais. « Le 2 avril sera la fin de mon contrat avec le peuple sénégalais. Ma mission se termine le 2 avril, que ça soit clair. Ayant prêtant serment le 2 avril 2019, je suis conscient que mon mandat prend fin le 2 avril 2024. Je compte m’en arrêter à ce mandat », a-t-il martelé avant de faire remarquer qu’il « est clair que le pays ne peut pas rester sans Président » mais aussi «qu’il ne peuty avoir de successeur tant qu’il n’y a pas d’élection ». « Je compte, après le 2 avril, quitter mes fonctions de président de la République. Maintenant, il est clair qu’il n’y aura pas de vide institutionnel, parce qu’on ne peut pas laisser le pays sans président de la République. Je souhaite que les acteurs qui vont se réunir avec moi dans le cadre du dialogue, pour l’intérêt supérieur de la nation, dans ce contexte bien particulier, puissent voir comment nous allons enjamber. Si un consensus peut être obtenu sur la suite, c’est souhaitable. Pour cela, j’écouterai ce que le dialogue dira et après le dialogue certainement, le Conseil constitutionnel pourrait être amené à clarifier», a-til indiqué.