SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
26 avril 2025
par Momar Dieng
MACKY SALL SOUS PRESSION OCCIDENTALE, FINIT PAR CONDAMNER L'INVASION DE L'UKRAINE
Le président – également patron en exercice de l’UA - n’aura pas tenu longtemps la posture de neutralité (au moins dans le choix des mots) qu’il avait défendue au nom du Sénégal et de l’Afrique dans le conflit
Le président Macky Sall – également président en exercice de l’Union africaine - n’aura pas tenu longtemps la posture de neutralité (au moins dans le choix des mots) qu’il avait défendue au nom du Sénégal et de l’Afrique dans le conflit entre l’Ukraine et la Russie. Au cours de sa conférence de presse hier à Dakar en compagnie du Chancelier allemand Olaf Scholz, le chef d’Etat sénégalais a lâché les mots qui suivent :
« En Afrique, nous voulons la paix même si nous condamnons l’invasion… Nous ne voulons pas être alignés… Nous travaillons pour une désescalade… ».
Dans cette séquence de la conférence de presse avec le chancelier allemand, les mots « Russie » et « Ukraine » n’ont pas été prononcés…
Ce propos - « nous condamnons » - est une première depuis l’invasion de l’Ukraine par les troupes russes le 24 février 2022 et appelée « opération militaire spéciale » du côté du côté du Kremlin. L’argument de la neutralité repose sur la volonté du continent de contribuer à trouver des solutions pour la paix dans cette guerre au cœur du continent européen. A cet effet, le président sénégalais envisage d’ailleurs de se rendre à Kiev ou Moscou (où à Moscou puis à Kiev) suivant un calendrier non encore publié.
Lors de la session de l’assemblée générale des Nations-Unies du 2 mars 2022, une résolution exigeant que la Russie cesse sans délai le recours à la force contre l’Ukraine avait été massivement votée par 141 pays, rejetée par 5 autres. Mais 35 pays dont le Sénégal s’étaient abstenus.
Pour soutenir politiquement l’Ukraine, les Etats-Unis et l’Union européenne ont mené une intense campagne auprès des pays réticents à rejoindre la coalition de sanctions économiques, commerciales et financières contre la Russie. A cet égard, plusieurs émissaires américains dont l’ambassadeur auprès de l’Union africaine à Addis-Abeba ont séjourné à Dakar en mars et avril pour convaincre le Sénégal de lâcher sa posture de neutralité.
Avec la double casquette que porte Macky Sall (président du Sénégal et de l’UA), une question se pose : qui du Sénégal ou de l’Union africaine est engagé par cette condamnation de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ?
LE 25 MAI 1963, L'OUA VOIT LE JOUR
Le 25 mai 1963, les dirigeants du continent portent l’Organisation de l’unité africaine (OUA) sur les fonts baptismaux. Envoyé spécial de JA, Béchir Ben Yahmed livre alors son analyse sur cet organisme panafricain auquel succèdera l’Union africaine (UA) e
Jeune Afrique |
Béchir Ben Yahmed |
Publication 25/05/2022
À l’aéroport d’Addis-Abeba, dimanche 26 mai à 7 heures du matin, je regardais les chefs d’État faire leurs adieux à Haïlé Sélassié. Cinq heures auparavant seulement, ayant signé la charte africaine, ils regagnaient leur hôtel sous les acclamations.
Je me demandais, en voyant les portes des avions se fermer sur les chefs d’État, les Boeing, les Caravelle, les DC6 et les Iliouchine, décoller un à un et s’engager dans des directions différentes, ce que pensaient ces hommes qui venaient de vivre ensemble des moments importants et de prendre des engagements précis. Je me demandais aussi, l’émotion dissipée, ce qui resterait de cette grande réunion.
Maturité et jeunesse
Pour avoir vécu la conférence parmi les chefs d’État et leurs collaborateurs, je crois pouvoir dire ceci.
1. Chefs d’État, délégués, journalistes sont venus à la conférence dans l’ensemble assez sceptiques, appréhendant l’affrontement de tempéraments trop divers, le choc entre conceptions opposées de l’indépendance nationale, de l’unité africaine ou des rapports de l’Afrique avec l’étranger. Nous sommes tous repartis optimistes. Le niveau des hommes, et donc de la discussion, le désir visiblement sincère qu’ont montré les uns et les autres de s’entendre et de progresser ensemble ou, à tout le moins parallèlement, ont convaincu les plus sceptiques : l’idée de l’unité africaine a sa résonance, la solidarité africaine est une réalité, le progrès en Afrique est une sérieuse possibilité.
Les différences entre Africains blancs et Africains noirs, entre anglophones et francophones existent, mais elles ont tendance à s’estomper devant le passé colonial commun, le présent semblable et un avenir nécessairement interdépendant.
A la veille de la fête de la Korité, à l’occasion des fêtes de fin d’année et à la veille de la fête de l’indépendance du 04 Avril, le chef de l’Etat a la tradition de gracier des détenus. Des libérations toujours suivies d’un pic dans les agressions ou les cambriolages voire les meurtres. le Sénégalais fait face à une recrudescence des agressions à Dakar. La recrudescence actuelle des actes de violences aurait-elle un lien avec les grâces présidentielles ?
Selon le pénaliste Abdoulaye Santos Ndao, «la grâce est prévue dans l’article 47 de la Constitution. Elle est le pouvoir qu’a la plus haute autorité politique d’un pays d’accorder une indulgence à un condamné. Elle a pour effet de supprimer, de transformer, ou de réduire la peine qu’un condamné aurait dû subir. La grâce emporte seulement une dispense d’exécution de tout ou partie de la peine, mais ne prive pas la victime d’obtenir réparation du préjudice causé par l’infraction». Cela dit, bien que la grâce relève d’une prérogative constitutionnelle reconnue au Président, «les conditions d’octroi sont limitativement énumérées par la loi. Les crimes ou certains délits aggravés sont exclus du domaine de la grâce» explique notre pénaliste d’après qui « le Président, on lui présente une liste, il peut se tromper ». C’est pourquoi, dit-il, le travail doit être mené avec dextérité par la Division des Affaires criminelles et des Grâces du ministère de la Justice. « Le choix des détenus et la durée de la condamnation jouent. Le détenu ne doit pas être un récidiviste ni la condamnation définitive. Evidemment, le phénomène criminel est diversifié et il peut en partie avoir un lien avec ces grâces ».
D’après le président du Forum du justiciable, Babacar Bâ, «la réinsertion sociale des détenues graciés pose problème. Il n’y a aucune mesure d’accompagnement. Ils sont livrés à eux-mêmes après. Or, pendant leur séjour en milieu carcéral, on devait par exemple les mettre dans des activités rentables pour que, une fois libérés, on leur donne leur du. Parce que si tu ne bénéficies d’aucune aide, d’aucun soutien, et que tu as des problèmes d’accueil dans la famille biologique ou adoptive, tu peux retourner à la case départ et devenir un récidiviste», a-t-il expliqué tout en demandant aux Sénégalais d’avoir le réflexe de la dénonciation et de ne plus protéger les suspects ou les agresseurs qui vivent avec eux dans les familles. M. Bâ estime que le ministère de l’Intérieur doit renforcer davantage les moyens de prévention et d’intervention nécessaires pour juguler la recrudescence de la délinquance sur toute l’étendue du territoire national.
MOR MBAYE PRÉCONISE UN NDEUP NATIONAL CONTRE L'INSÉCURITÉ
Cet exorcisme national a toujours été et demeure la conviction du psychologue-clinicien
Le pays a besoin d’un «Ndeup national»! Cet exorcisme national a toujours été et demeure la conviction du psychologue-clinicien, Pr Serigne Mor Mbaye. Selon lui, les agressions physiques ne sont pas un phénomène nouveau sous nos cieux, mais seulement la continuité d’une «névrose répétitive» devenue de plus en plus choquante.
Aujourd’hui, la politique a pris le dessus sur tout. On a comme l’impression qu’elle prime même sur notre sécurité. Pour preuve, on disserte à longueur de journée sur le sujet des parrainages pour les élections législatives du 31 juillet prochain. Au même moment, le peuple sénégalais se meurt. On tue à tout va. L’insécurité a atteint son paroxysme. Des hommes et des femmes sont pourchassés, agressés, violentés, brutalisés, assommés et assassinés dans la rue, dans leurs lieux de travail, et parfois jusque chez eux. Des personnes innocentes sont froidement éliminées. Les crimes ne sont plus commis à des heures… de crime. Mais en plein jour. A Dakar, la série noire des meurtres se suit et se ressemble. Durant les trois jours du weekend, trop de sang a coulé dans la capitale et dans une partie de sa banlieue. Personne n’est aujourd’hui à l’abri de ces agressions physiques mortelles. Les scènes se sont passées entre Ouakam, Ouagou Niayes, Pikine et Diamagueune Sicap Mbao. Après le crime crapuleux sur Fatou Kiné Gaye dans son lieu de travail à Pikine Rue 10, vendredi dernier, et dont l’auteur n’est autre que son collègue de travail, il y a eu le cas d’un jeune homme du nom de Papy Niang poignardé à mort par son ami le jour suivant. Cela se passait à Ouakam. Dans la journée du dimanche, c’est le jeune Khabane Dieng qui était tué avec un tesson de bouteille par le frère jumeau d’un lutteur. Les faits ont eu pour cadre Diamaguène, une commune de la banlieue. L’autre affaire similaire concerne un jeune attaqué et grièvement blessé devant chez lui à Ouagou Niayes. Quatre cas d’agressions physiques dont trois meurtres en 72 heures. Sans compter le fléau des agresseurs en motos qui dictent actuellement leur loi dans la capitale.
«Une violence continue»
C’est la peur constante et préoccupante chez les Sénégalais. D’autant que ces agressions virent le plus souvent à des bains de sang. Des assassinats qui commencent à prendre de l’ampleur. La psychose s’est même emparée des Dakarois, et une panique générale s’est installée dans les quartiers. Pourtant, le phénomène n’est pas nouveau. Le psychologue clinicien, Pr Serigne Mor Mbaye, considère que c’est la «continuité d’une névrose répétitive devenue de plus en plus choquante. Le pays est en crise. Il y a une violence continue qui s’exprime dans les relations interpersonnelle et collective. Dans les relations institutionnelles et au niveau de tous les espaces, il y a une tonalité de violence inouïe qui conduit à la mort et à l’assassinat. Il y a à la fois une crise des valeurs et une crise personnelle.
Au Sénégal, 60 % des jeunes ont moins de 25 ans. Ils sont dans un sentiment de désespérance. Mais nous, on est trop évènementiel. Il y a deux décennies, on avait dit que la société sénégalaise s’enfonce dans une crise profonde».
«Je ne parle pas dans le vent»
Vingt années se sont donc écoulées depuis que le psychologue-clinicien a eu ces mots prophétiques. Depuis lors, le phénomène a pris des proportions inquiétantes. «Les gens ont une grande fragilité mentale liée à une crise sociale et une crise des valeurs. Un ensemble qui affecte la santé mentale des Sénégalais. Du coup, on a un problème avec la maitrise et l’estime de soi...». En d’autres termes, le Sénégal, se désole-t-il, n’est plus un pays apaisé où les gens sont apaisés. «Le Sénégal se situe aujourd’hui dans une situation d’incertitude. La majeure partie des Sénégalais se trouve aujourd’hui dans un sentiment de désespérance. C’est un pays de sauve-qui-peut où les valeurs se sont effritées et où il y a de moins en moins de contrôle social sur les individus et où l’Etat a failli sur la sécurité des personnes et des biens», regrette Pr Mbaye. Il rappelle que, il y a une trentaine d’années, il avait demandé qu’on investisse dans les polices de sécurité et la médiation afin de mieux gérer certains problèmes. Un plaidoyer qu’il dit maintenir toujours. Il pense que lorsque dans un pays le bien commun n’est plus sacré, lorsque les ressources sont dilapidées..., il «nous» faut réinventer un autre système en travaillant sur l’émergence de valeurs à travers l’éducation de base, apaiser les institutions telles que l’école, le milieu du travail».
«Le pays a besoin d’un Ndeup national»
Le psychologue-clinicien ne mâche pas ses mots. Il affirme que la société sénégalaise est devenue désolante et désespérante. Il recommande de «régler la demande sur ces demandes désespérées». Mais sa grande préoccupation du moment, c’est un «Ndeup national» pour le pays. «Il faut un Ndeup national au Sénégal. Il y a deux décennies, je disais qu’il faut un Ndeup national. Je ne parle pas dans le vent. Je parle de l’expérience de mon métier et de la société telle qu’elle évolue», réaffirme-t-il tout en proposant de «revisiter les institutions devenues de plus en plus pathogènes».
SEULE L'APPLICATION DE LA CHARIA PEUT RÉGLER LE PROBLÈME, SELON SEYDA BINETOU DIOP
L'autodéfense ou la justice populaire ? A mesure que se multiplient les agressions mortelles dans la capitale et sa banlieue, voire le pays tout entier, les Sénégalais commencent à lyncher des «inconnus» qu’ils accusent de «voleurs» ou «d’agresseurs»...
Les Sénégalais ont commencé à se faire justice eux-mêmes. Ils menacent même de tuer, voire de carrément égorger, tout agresseur qui serait pris en flagrant délit. Une justice populaire à laquelle s’oppose toutefois l’islamologue Seyda Binetou Diop. Elle pense que seule l’application de la loi divine, la Charia, peut aider à couper la racine du mal.
A mesure que se multiplient les agressions mortelles dans la capitale et sa banlieue, voire le pays tout entier, les Sénégalais commencent à lyncher des «inconnus» qu’ils accusent de «voleurs» ou «d’agresseurs»...
Dans une vidéo devenue virale, des jeunes de Grand Yoff, reprochant à un «inconnu» d’avoir poignardé un des leurs au cou, l’ont roué de coups et attaché à un poteau. Dans une autre vidéo, un autre incriminé a même eu la malchance de recevoir une brique sur la tête. Sans compter ce jeune qui, interpellé dans une maison, au milieu de la nuit, a été obligé d’étaler ses talents de danseur dans un environnement pas favorable. Presque nu, il ne lui restait que sa culotte, et chaque pas de danse a été accompagné d’un coup de cravache ou de ceinture. Une justice populaire qui commence à s’exercer dans certains quartiers à Dakar. «Je ne suis pas du tout d’accord avec eux. Juger, c’est le rôle de l’Etat. Les Sénégalais ne doivent pas agir ainsi. Ce n’est pas bien. Le justicier ne construit pas un pays. Il peut le défaire même. Car, on peut se tromper de cible et s’attaquer à un innocent «, dixit la conférencière religieuse Seyda Binetou Thiam qui plaide pour l’application de la charia.
La prêcheuse de la Tfm (Télévision futurs médias) demande à l’Etat d’agir et empêcher cette justice populaire qui ne présage rien de bon. Parce que, dit-elle, le pays est en danger. Mais sauvé par «les versets du Coran psalmodiés à longueur de journée dans les daara, dans certaines familles et à la mosquée. Qu’on ne minimise pas cela. C’est quelque chose de très important dans le pays. Malheureusement, au Sénégal, on ne donne aucune importance aux hommes religieux et à l’éducation coranique. Même dans les programmes de télévision ou à la radio, on les met à des heures de très faible audience. Il n’empêche, on continue à jouer notre rôle d’enseignement des préceptes islamiques, de la religion musulmane qu’est l’islam», a-t-elle expliqué.
Selon toujours «Ya Seyda», «si on avait appliqué à la lettre les préceptes de l’Islam, on n’allait jamais en arriver à la situation où on en est aujourd’hui. Si on n’y prend garde, ça risque de s’aggraver», prévient notre interlocutrice tout en précisant n’avoir jamais demandé de mettre un Etat islamique au Sénégal, mais d’appliquer la charia. «On doit appliquer la charia. Je vis la charia en moi et pour toujours. Si j’étais élue présidente de la République du Sénégal, l’application de la charia allait être ma priorité première ».
Dans ce raisonnement, elle dit fustiger le manque de considération et de respect envers l’autre qui prévaut dans notre pays. «Personne ne respecte personne. On est obnubilé par l’avoir au détriment de l’acquisition de connaissances qui fonde l’homme. Les gens n’ont aucune éducation. Ils sont égoïstes et ne pensent qu’à la richesse. Or, le Prophète Mouhamed (PSL) a toujours demandé d’aider son prochain. Il y a aussi une crise des valeurs. Mais c’est aussi lié à la situation sociale du pays».
Seyda Binetou Thiam, convoquant un hadith, rappelle que le Prophète (PSL) avait demandé que si quelqu’un voit un interdit de Dieu, qu’il essaye de l’enlever d’abord avec la main. Si ce n’est pas réglé, on essaie avec la parole. Si cela persiste, que la personne s’en offusque intérieurement et profondément. Elle rappelle aussi que son pouvoir aujourd’hui, «c’est la parole» et elle ne compte «jamais se taire» tant qu’elle est en vie. Continuez donc à prêcher pour notre plus grand bonheur, Sayda !
LA PAUVRETÉ ET LES PROBLÈMES SOCIAUX ONT UNE CORRÉLATION AVEC LES AGRESSIONS
Selon les psychologues Khalifa Diagne et Papa Ladjické Diouf, Le problème est systémique et la responsabilité partagée entre l’Etat et les parents de cette jeunesse désœuvrée, inconsciente et adepte de l’argent facile et d’autres pratiques illicites
Le problème est systémique et la responsabilité partagée entre l’Etat et les parents de cette jeunesse désœuvrée, inconsciente et adepte de l’argent facile et d’autres pratiques illicites telles que la toxicomanie. C’est l’avis des deux psychologues Khalifa Diagne et Papa Ladjické Diouf qui affirment qu’il y a une corrélation entre la pauvreté, les problèmes sociaux et ces cas d’agressions au Sénégal.
KHALIFA DIAGNE, PSYCHOLOGUE : « On ne peut pas dire que le Sénégal est devenu un Etat voyou »
«Même s’il est vrai qu’on assiste à une recrudescence des cas d’agressions ces derniers jours, il serait exagéré d’en arriver à conclure que le Sénégal est devenu un État criminogène. La raison est toute simple : le pourcentage des Sénégalais victimes d’agression est très marginal comparé à celui des Sénégalais qui vaquent tranquillement à leurs occupations. Sur les questions de violences (agressions, meurtres, vols, etc.), il y a des indicateurs scientifiques qui permettent de déterminer le niveau et de tirer des conclusions. Et à mon avis, si l’on en tient compte, en dépit de la situation qui prévaut actuellement dans notre pays, on ne peut pas dire que le Sénégal est devenu un État voyou. Ce qui est arrivé à une certaine frange de notre jeunesse qui s’adonne à la délinquance et qui commet des agressions est un problème systémique. La responsabilité est partagée entre toutes les instances de socialisation qui jouent mal leur rôle. Aux bancs des accusés, il faut mettre l’Etat qui est responsable du système éducatif et des programmes. Mais également les parents dans les familles dont sont issus les jeunes délinquants.
En effet, c’est l’Etat et les familles qui sont principalement responsables de l’éducation des enfants et des jeunes. Leur mission c’est d’en faire des citoyens modèles. Leurs failles donnent une jeunesse désœuvrée, inconsciente et adepte de l’argent facile et d’autres pratiques illicites. De toute évidence, il y a toujours une corrélation entre la pauvreté, les problèmes socio-économiques et les cas d’agressions. Ce, dès lors que l’agresseur commet son acte pour soustraire de façon frauduleuse les biens d’autrui. Un jeune est souvent instable sur le plan psychologique et caractérisé particulièrement par des émotions négatives lorsqu’il ne peut pas travailler pour subvenir à ses besoins et reste sans perspectives. C’est-à-dire s’il n’a aucun espoir pour son avenir. C’est pourquoi il faut non seulement bien préparer les enfants à l’école et dans les familles en leur donnant des savoirs, des savoir-être et des savoir-faire. Mais également créer les conditions de leur insertion professionnelle pour leur permettre d’avoir des revenus décents. Sinon, toute situation de précarité engendre chez eux frustration et révolte pouvant conduire à des agressions et des vols qu’ils vont concevoir psychologiquement comme un comportement légitime».
PAPA LADJICKÉ DIOUF, PSYCHOLOGUE : « Cette recrudescence d’agressions coïncide avec l’après-Covid »
«Les criminels peuvent avoir différents profils et divers motifs. Il est difficile de déterminer un profil type de criminel sénégalais. En revanche, la violence est présente partout dans notre société et les plus vulnérables sont les femmes et les enfants. C’est clair que la recrudescence des agressions coïncide avec l’après COVID et ses conséquences économiques sur les petits emplois. Les responsables en sont certains jeunes qui vivaient de l’économie de la lutte et les familles démunies, la tension politique dans le pays. À cela s’ajoute certainement la question de la toxicomanie. Ces différents éléments peuvent augmenter l’indifférence au sens moral et l’agressivité chez les jeunes touchés par la situation décrite plus haut. Cela dit, il existe des psychopathes et des pervers parmi nous. Ce qui relève de pathologies». Il existe un nouvel adage porté par les lutteurs: « dama bëgga teràl samay wayjur». Le « tekki » est un énorme poids psychologique chez beaucoup de jeunes hommes ! « Tekki» et « téral » sont deux poids psychologiques et émotionnels qui pèsent énormément sur les épaules des jeunes (surtout les hommes) dans une société de culture patriarcale. Nous devons travailler en alliés autour des modèles d’éducation et des valeurs humaines (surtout la Compassion). Beaucoup vivent avec des traumas et des troubles de personnalité issus de blessures d’enfance à cause de la violence dans les familles ».
LES SÉNÉGALAIS ONT-ILS DES RAISONS D’AVOIR PEUR ?
Le pays est plongé depuis quelques jours dans une psychose générale ! Les Sénégalais ne se sentent plus en sécurité. Que ce soit dans la rue, leurs lieux de travail et jusque chez eux, ils ont peur de se faire agresser voire tuer.
Le pays est plongé depuis quelques jours dans une psychose générale ! Les Sénégalais ne se sentent plus en sécurité. Que ce soit dans la rue, leurs lieux de travail et jusque chez eux, ils ont peur de se faire agresser voire tuer. L’insécurité est grandissante et personne n’est à l’abri au moment où les politiques sont plus préoccupés par les législatives du 31 juillet prochain ou un éventuel troisième mandat présidentiel. En attendant, Dakar et sa banlieue ont vécu un week-end macabre. En seulement 72 heures, trois personnes dont une dame ont été froidement tuées à Pikine, à Diamaguène et à Ouakam. Une recrudescence de la violence qui ne serait pas une chose nouvelle, à en croire le psychologue clinicien Pr Serigne Mor Mbaye. Les Sénégalais ont-ils réellement des raisons d’avoir peur ou cette psychose est-elle largement exagérée ? Des psychologues le pensent tandis que les populations, elles, en plus de préconiser le rétablissement de la peine de mort entreprennent de mettre en place une justice populaire, histoire de régler leurs comptes aux agresseurs et autres tueurs. Décryptage avec des psychologues, des juristes, des médecins et des acteurs de société civile...
ENTRE L’ÉTABLISSEMENT DE MILICES DE QUARTIER, LE RÉTABLISSEMENT DE LA PEINE DE MER ET LA LOI DU TALION : Les Sénégalais déterminés à mettre en terme aux tueries sauvages
Ces derniers jours, l’insécurité gagne du terrain au Sénégal. Les Sénégalais, qui ont de plus en plus peur, demandent le rétablissement de la peine de mort abolie en 2004. En attendant, ils entendent se constituer dans les quartiers en collaboration avec les forces de l’ordre pour dissuader les agresseurs.
A l’entrée de la boutique du sieur Ousseynou Diallo, sise à l’Unité 15 des Parcelles assainies, trois jeunes gens, dont deux conducteurs de motos « tiak tiak», discutent la peur au ventre. Ils se disent préoccupés, hantés même, par le phénomène des agressions à Dakar. «Pas plus tard qu’hier, les agresseurs s’en sont pris à une dame qui était dans son véhicule. Il parait qu’elle avait une somme d’argent avec elle. Pour s’en emparer, les agresseurs ont même cassé le pare-à-brise du véhicule», raconte l’un d’eux, témoins des faits. Et l’autre de revenir sur le cas de Papi Niang poignardé à mort à Ouakam par son ami. «Regarde ce qui s’est passé à Ouakam. On tue sans états d’âme et pour un rien», s’est-il indigné. «C’est pourquoi, je n’accepte plus de faire des livraisons dans des zones à risques. Aujourd’hui, je joue la carte de la prudence. On n’est plus en sécurité. Et les agresseurs sont partout», a affirmé Alassane, un «tiak tiak». «Deuk bi kay, wooratoul», a renchéri le préposé au comptoir de la boutique, Ousmane Diallo.
L’insécurité, avec la recrudescence des cas d’agressions physiques mortelles, est au sujet de toutes les discussions aujourd’hui. Un sujet qui ne laisse aujourd’hui aucun Sénégalais indifférent. Astou, pagne mal noué sur un corps flottant dans une robe trois quart qui cache mal ses seins, ouvre grandement les yeux. Elle participe sans même être invitée à la discussion. Elle, c’est l’affaire de la caissière Fatou Kiné Gaye sauvagement tuée dans son lieu de travail à Pikine Rue 10, en banlieue dakaroise, qui la préoccupe. «Tuée par son propre collègue de travail ! Je n’arrive pas à y croire. C’est comme un rêve ou suivre un film d’enquête», commente cette cliente avant de tendre une pièce de 50 francs au boutiquier. Elle vient acheter un sachet d’eau de javel. Avant de prendre congé des lieux, elle demanda aux deux «tiak-tiak» de s’armer de beaucoup de prudence. «Inchallah. Merci», lui a répondu Alasane entrain de se débarbouiller. La main droite agrippée à un fer accroché à la porte de l’enseigne, son ami et collègue « tiaktiak » surveille d’un coin de l’oeil sa moto qu’il venait de garer à côté. «Si je pouvais la faire entrer ici (ndlr: dans un coin de la boutique), ce serait plus sûr», dit-il au boutiquier qui accepte la sollicitation. Les motos sont aussi les cibles des agresseurs qui les suivent parfois jusque dans les maisons. Alassane, lui, se dit surtout tourmenté par le fait que, quand les criminels attaquent quelqu’un, même si c’est en plein jour, personne ne réagit. Il pense que le temps de la mobilisation a sonné. «Nous ne pouvons plus supporter le fait d’être agressés en plein jour. Organisons des marches sur toute l’étendue du territoire», préconise-t-il.
Une grande mobilisation à la place de l’Obélisque ou bien dans chaque commune, c’est la proposition faite aussi par Meissa Ndiaye, charretier et vendeur de produits halieutiques. «Les gens pensent que seuls les ‘tiak tiak’ sont attaqués. Nous aussi on est obligé de jouer les guerriers pour nous en sortir. Là où on s’approvisionne, il faut être un vrai guerrier, laisser passer certaines provocations, sinon, on peut y perdre la vie», a-t-il révélé ajoutant que ce sont tous les Sénégalais qui sont en danger désormais. C’est pourquoi, et à défaut d’une grande mobilisation d’envergure nationale, Mara Diagne, tailleur de profession, pense qu’il urge aujourd’hui de s’organiser dans les quartiers et se faire justice soi-même. «J’ai toujours été contre la violence populaire. Malheureusement, ceux qui tuent, ce n’est pas la prison qui va leur faire peur. Il faut que les populations s’organisent pour mettre fin à ces tueries. Si l’Etat ne peut pas gérer notre sécurité, nous allons le faire nous-mêmes. Tout un chacun d’entre nous doit être policier et gendarme dans son coin «, a-t-il proposé pensant que seule la masse populaire avec l’appui des forces de sécurité peuvent faire retourner la situation à la normale. Junior Faye est partisan d’une parfaite solidarité entre populations et forces de sécurité. Face au règne de la terreur et de l’insécurité que nous imposent les voleurs, assassins et meurtriers, «il faut d’avantage s’organiser pour sauver des vies. Je ne prône pas le sauve-qui-peut mais tout corps menacé est tenu de se défendre» dit-il. Tidiane Diallo est lui aussi favorable à cette police de quartier.
Le cœur meurtri, il affirme que «personne n’est aujourd’hui en sécurité. Même sous nos propres toits nous sommes menacés. En plein jour, les gens sont agressés. On se croirait dans un film hollywoodien. Nous sommes tous complices parce que nous avons toujours été passifs et inactifs face à ces agressions. La stratégie est simple, que les gens s’organisent dans les quartiers et zones pour faire face à ces bandits. Nous devons prendre nos propres responsabilités car c’est nous qui sommes tués». Mais, au-delà du reflexe d’autodéfense prôné par certains Sénégalais qui entendent se constituer en justiciers, beaucoup demandent le rétablissement de la peine de mort devenue une demande sociale très forte. Mbaye Diagne, la bouche remplie de «pain-ndambé», fait passer difficile son message. «Nous exigeons qu’une loi rétablissant la peine de mort soit votée à l’Assemblée nationale au risque de boycotter ces législatives. Il faudrait qu’on soit exigeants.
Dafa djot (Ndlr, il est temps). Dagnoo sonn (nous sommes fatigués). «. Face à ces violences physiques, voire ces agressions mortelles, Modou Ngom, lui, ne demande pas l’application de la peine de mort, mais une correction très sévère voire une torture exercée sur n’importe quelle personne ayant commis un meurtre volontairement.
MAMADOU DIAW REÇOIT LE PRESTIGIEUX PRIX JOHN F. KENNEDY DU CORPS DE LA PAIX AMÉRICAIN
Elle n’est pas du même ordre, certes, que le trophée continental conquis par Sadio Mané et ses coéquipiers en début d’année au Cameroun, mettant fin à une très longue diète des « Lions » et à une faim de victoire des Sénégalais, il n’en reste pas moins que la distinction décrochée de haute lutte par notre compatriote Mamadou Diaw a Washington honore notre pays tout entier. Et au-delà, sans doute, le continent africain.
En effet, il vient d’être récompensé du prestigieux John F. Kennedy Service Award. Créé en 2006, ce prix honore tous les cinq ans, à travers le monde, cinq membres du Corps de la Paix américain, pour leur service exceptionnel, leur leadership, leur engagement, leur travail acharné et leurs sacrifices ayant contribué à l’avancement de la mission et des valeurs du Corps de la Paix et au développement des communautés. Notre distingué compatriote fait donc partie des cinq récipiendaires de la cuvée 2022. Des récipiendaires choisis à travers le monde entier, Mamadou Diaw étant le seul Africain parmi eux. Il a reçu son prestigieux prix le 19 de ce mois dans la capitale fédérale américaine. Encore une fois, ce prix n’est décerné que tous les cinq ans. Authentique fils de la banlieue, plus précisément de la commune de Tivaouane-Sao, Mamadou Diaw a effectué ses études primaires à l’école de Diamaguène et ses études secondaires au lycée Blaise Diagne, deux établissements où il comptait parmi ses condisciples un certain…
Mamadou Oumar Ndiaye. C’est au lycée Blaise Diagne qu’il a obtenu, en 1978, son baccalauréat en série D (actuelle S2) avec la mention Bien. La même année, Il a été lauréat au concours général plus précisément en histoire. Bénéficiaire d’une bourse d’excellence de l’alors Fonds Européen de Développement (FED), Mamadou Diaw, surnommé « Tapha » par ses amis de la banlieue, a poursuivi ses études universitaires en Italie, à la Faculté d’Agronomie et de Sciences Forestières de l’Université de Florence où il a décroché son diplôme d’Ingénieur des Eaux et Forêts avec la mention Très Bien plus les félicitations du jury et la dignité de publication du mémoire. Il a ensuite intégré l’Institut Agronomique d’outre-mer de Florence d’où il est sorti avec un diplôme de spécialisation en cartographie pour la gestion des ressources naturelles en Afrique subtropicale.
De retour au Sénégal, Mamadou Diaw a commencé sa carrière professionnelle en travaillant, de 1984 à 1993, dans la lutte contre la désertification, pour le compte du Projet de boisement Villageois de Louga et le Projet de Reboisement du Sénégal, respectivement financés par la FAO et l’USAID. Pendant cette période, il a suivi un cours post-universitaire de spécialisation en tenure foncière et gestion des ressources naturelles en Afrique subsaharienne au Land Tenure Center de l’Université de Wisconsin, Madison, aux Etats Unis.
De l’agroforesterie à la santé communautaire
En mai 1993, Mamadou Diaw a intégré le Corps de la Paix Américain. En sa qualité de Directeur Adjoint, il a eu à concevoir, négocier, gérer et exécuter des projets dans le domaine de l’agroforesterie et la gestion des ressources naturelles, de la biodiversité, de l’éducation environnementale et de l’écotourisme. En 2008, il a migré dans le secteur de la santé au sein du Corps de la Paix en gérant des projets de santé communautaire touchant la santé de la mère et de l’enfant, la santé de la reproduction et la lutte contre le paludisme. Cette nouvelle responsabilité a poussé Mamadou Diaw à entreprendre de nombreuses formations dont un cours post-universitaire de spécialisation en eau et santé, à l’Université Hébraïque de Jérusalem. Il enchainera avec des études diplômantes en santé, d’abord en décrochant un Master 2 en santé environnementale à l’Université de Versailles avec la mention Assez Bien ; et un doctorat en santé communautaire avec les félicitations du jury à l’Université Paris-Saclay. Pendant sa carrière au Corps de la Paix, Mamadou Diaw a eu à former, coacher et inspirer plus de mille volontaires américains et des centaines de membres des communautés, des agents des Eaux et Forêts, des enseignants, des infirmiers et sages femmes.
En outre, son travail a contribué au développement de plus de mille villages à travers notre pays. La carrière de Mamadou Diaw au Corps de la Paix a été récompensée par de nombreuses distinctions au sein de la mission diplomatique américaine au Sénégal. Le couronnement, on l’a dit, c’est qu’il a reçu le 19 de ce mois, à Washington, la plus prestigieuse distinction du Corps de la Paix, le John F. Kennedy Service Award. Toutes nos félicitations à ce brillant compatriote à travers lequel l’expertise sénégalaise est honorée une fois de plus !
LE COUSINAGE A PLAISANTERIE COMME MOYEN DE REGLEMENT DU CONFLIT
«La culture, un outil de consolidation définitive de la paix en Casamance.» Tel est le thème des ces journées culturelles de l’Association Abadji-To.
Le Sénégal est l’un des rares pays au monde qui dispose d’un puissant levier de règlement de conflit et de pactisation des peuples appelé «cousinage à plaisanterie». Un levier très souvent activé et mis en branle dans la partie sud du pays, la Casamance, où la culture constitue le plus clair moyen d’expression des peuples. Des communautés qui, depuis la nuit des temps, continuent encore et toujours de perpétuer les traditions culturelles et cultuelles, legs de nos ancêtres. Ce fut le cas le 13 juin dernier à Kafountine dans le cadre de la 1ère édition des journées culturelles de l’Association Abadji-To, une entité qui regroupe les populations des villages de Tendouck, Mlomp, Kabiline et des îles Karone.
«La culture, un outil de consolidation définitive de la paix en Casamance.» Tel est le thème des ces journées culturelles de l’Association Abadji-To. Mathématiquement un village légendaire (Abadj-To) qui polarise l’ensemble des populations des villages de Tendouck, de Mlomp, de Kabiline et des îles Karone et qui constitue aujourd’hui des cousins à plaisanterie. Pour Fabourama Sagna, le président d’Abadji-To, ce cousinage, entretenu et développé depuis des temps ancestraux, a survécu à travers les siècles et se vit encore de nos jours malgré les coups de boutoir de la modernité et de la globalisation universelle. «Tu ne verseras point le sang du cousin ; Tu ne défieras point le cousin ni dans des sports de combat, ni dans un conflit ; Tu ne refuseras point la médiation du cousin en cas de conflit interne, etc.» Voilà quelques-uns des préceptes qui sous-tendent ce cousinage et qui mettent en relief, selon Fabourama Sagna, la dimension de régulation des peuples pour une commune volonté du «vivre ensemble en harmonie».
Un outil fondamental de régulation sociale
Et au-delà des socio-cultures composant la communauté Abadj-To, cette organisation sociale, de l’avis de son président, peut donc s’avérer un puissant outil de développement socioéconomique pour la restauration de la paix. «Sous ce rapport, elle constitue une stratégie tendant à la réconciliation des populations de la Casamance entre elles pour amorcer le pardon dans les cœurs et les esprits», a-t-il indiqué lors de la cérémonie de lancement de ces journées à Kafountine. Car pour Fabourama Sagna, la réconciliation suppose l’instauration d’un dialogue, donc d’un échange entre frères à l’image d’Abadji-To. C’est pourquoi, à la lumière de ces quelques traits culturels de la société diola, ces journées culturelles ont pour objectif, selon lui, d’actionner un des leviers devant permettre d’ouvrir la voie à des activités culturelles, économiques, éducatives et sportives de leur communauté. «C’est un cadre de concertation et de dialogue entre les peuples de la fatrie à plaisanterie», martèle le président d’Abadji-To pour qui la pérennisation de cet outil exige l’implication et l’engagement constant d’un sang neuf. Suffisant pour Fabourama Sagna d’en appeler à cette vaillante jeunesse : «Appropriez-vous l’Association Abadj-To car ses fruits ne seront certainement pas les nôtres, pères fondateurs, mais les vôtres. Réservez vos places à bord du bateau Abadj-To pour le conduire vers un horizon enchanteur moulé dans une Casamance qui s’est définitivement retrouvée.»
Un link entre la culture et le tourisme
Parrain de cet événement culturel, Philipe Ndiaga Ba, natif de Kafountine et Directeur national de la Promotion touristique au ministère du Tourisme et des transports aériens, parrain de ces journées culturelles, n’a pas manqué de saisir le link solide qui existe entre culture et tourisme. Ce dernier étant conscient que la promotion du tourisme doit être portée par toute la population dans tous les aspects de la vie, culture, sport, restauration, etc. «Aujourd’hui au Sénégal, nous avons l’offre balnéaire qu’on a toujours vendue et qu’on continuera à vendre, mais le pays doit se positionner sur la diversification de l’offre touristique», soutient-il. Toute chose qui doit, de l’avis du Directeur national de la Promotion touristique, passer par la culture qui constitue un élément essentiel qui doit permettre de matérialiser un tel dessein. Et pour Philipe Ndiaga Ba, tout un chacun peut visiter des pays de la sous-région et du Maghreb, etc. qui disposent de plages et qui, à ses yeux, sont des concurrents réels. Mais dit-il, la culture casamançaise n’existe, selon lui, qu’en Casamance. Il a, à cet effet, exhorté les acteurs à travailler ensemble pour créer un cadre de dialogue et d’échanges. Occasion pour Philipe Ndiaga Ba de magnifier l’organisation de cet événement culturel à l’actif d’Abadji-To. «Nous remarquons qu’il y a beaucoup de problèmes qui arrivent au niveau des tribunaux et qui pouvaient s’arrêter dans le quartier, dans le voisinage. Avec le cousinage à plaisanterie, cela permet, dès qu’il y a l’intervention d’un cousin, même si on est sur le point de porter plainte, on accepte la médiation parce qu’il y a le cousinage à plaisanterie», souligne Philipe Ndiaga Ba. Qui en veut pour preuve la présence de nombreux sérères à la tête de beaucoup de services administratifs au niveau de Ziguinchor. A la faveur du cousinage entre Aguène et Diambogne, «cela a permis aux sérères de participer activement à la recherche de la paix en Casamance», argue-t-il. Et c’est pourquoi ce dernier a, de nouveau, exhorté l’Association Abadji-To à œuvrer pour que la paix revienne en Casamance.
IL Y A UN BOUILLONNEMENT DE LA PENSÉE DEPUIS CES DIX DERNIÈRES ANNÉES
Depuis la disparition des grandes figures de la négritude comme Léopold Sedar Senghor, Aimé Césaire, Léon G. Damas, entre autres, la pensée semble tourner à vide en Afrique, estime l'universitaire Felwine Sarr
Depuis la disparition des grandes figures de la négritude comme Léopold Sedar Senghor, Aimé Césaire, Léon G. Damas, entre autres, la pensée semble tourner à vide en Afrique. Mais l’écrivain Felwine Sarr, par ailleurs professeur de philosophie africaine et contemporaine et diasporique à Duke University, aux Etats-Unis, n’est pas d’avis.
Selon lui, il y a un renouveau de la pensée depuis les années 90, 2000, et les artistes, les écrivains ont produit énormément de textes théoriques. «Les artistes produisent beaucoup d’œuvres. Il y a énormément d’écrivains du continent qui publient parce que la pensée, elle est aussi dans la littérature et elle n’est pas que dans les textes théoriques», a soutenu Felwine Sarr. Il s’exprimait hier lors du Colloque scientifique de la 14ème édition de l’art africain contemporain qui se déroule à Dakar du 19 mai au 21 juin.
Depuis 2016, le Pr Sarr organise à Dakar les Ateliers de la Pensée pour questionner les modèles politiques et économiques existants et réfléchir aux transformations du monde contemporain depuis l’Afrique. «Il y a des Ateliers de la Pensée qu’on organise depuis 2016. Donc je trouve qu’il y a un bouillonnement et que peut-être l’un de nos défis, ce n’est pas justement de rester sous l’ombre tutélaire des grandes figures de la négritude et de ne pas voir ce qui existe depuis. Bien qu’on les revendique toujours comme des ancêtres mais quand bien même, il y a un bouillonnement depuis ces dix dernières années», répond M. Sarr en marge de la cérémonie de lancement du Colloque du Dak’art 2022.