QUAND L’OBSCURANTISME ACHÈVE LE SÉNÉGAL
Un dirigeant n'acquiert pas sa légitimité par un « ni non, ni oui », mais par sa capacité à faire bénéficier des retombées de son pouvoir la communauté - ethnique le plus souvent - qui l'a élu
La quête de nouveaux espaces de liberté et l’atrophie intellectuelle ont permis la montée des mouvements de révolte aussi bien des politiques que de la société civile. Cela se traduit par des configurations différentes et variées.
Loin d'y mettre un terme ou de conduire à l'Etat de droit et à la bonne gouvernance escomptés par les institutions financières internationales, le double impératif d'ouverture politique et de libéralisation économique accentuera, presque partout, l'émasculation de l'Etat. Celui-ci ayant perdu ses capacités à gérer le risque et l'imprévu autrement que par la force, c'est donc dans un contexte de violence sociale et politique que se dérouleront les tentatives de sortie de crise.
Le doute persiste concernant la voie électorale qui était jusque-là un mécanisme rassurant de changement de régime. Et il en résulte une instabilité structurelle. L’opposition agit au gré de la manifestation contre la répression des FDS causant ainsi des pertes humaines et de biens matériels. Ainsi la diffraction de la société s’accélère jusqu’à l'assimilation réciproque des élites et l'ouverture d’un dialogue, en particulier sur les règles constitutionnelles et les réformes électorales.
L’obscurantisme se signale par rapport au peuple frappé de cécité et la volonté de promouvoir l’impréparation de l’élite qui se chargera du destin du pays après les élections du 24 février 2024. On n’en est pas encore là, mais le chemin semble long et lent, ponctué d’obstacles, de complots et de pièges. Les décisions de justice ont permis la contrainte physique et morale exercée sur une personne en vue de l’inciter à réaliser un acte déterminé (cf. les types de violence). Finalement, le sentiment d’injustice devient le seul motif de la violence. Cette dernière de la part de l’Etat en est de trop sur les sénégalais : la redistribution des richesses n’est pas égalitaire, elle est juste dédiée à un électorat. La création d’emplois dignes pour les jeunes n'est pas effective. Le favoritisme dans les recrutements se fait sentir partout depuis une décennie. La mesure concernant les bracelets électroniques n’honore point l’élite même si le Sénégal devrait l’expérimenter. Ce serait injuste dans un pays démocratique de libérer un député arrêté en flagrant délit de faux billets que de poursuivre un citoyen pour avoir joui de sa liberté d’expression.
Pour en finir avec l’obscurantisme, il faut comprendre que la violence s’installe partout où prévaut la raison du plus fort (impérialisme, expansionnisme, volonté d’imposer sa loi au plus grand nombre) … et pour que le changement ait lieu, il faut que l'armée choisisse d'être neutre. Un dirigeant n'acquiert pas sa légitimité par un « ni non, ni oui », mais par sa capacité à faire bénéficier des retombées de son pouvoir la communauté - ethnique le plus souvent - qui l'a élu.
Ousmane Sarr est intervenant social auprès des groupes vulnérables.