VIDEOLA COUR DES COMPTES MONTE AU CRÉNEAU
Face aux critiques concernant le récent rapport sur les finances publiques, Aliou Niane, patron de la Chambre de discipline financière, défend la méthodologie et l'indépendance de la Cour. Délais, contradictoire, authenticité : il répond point par point

(SenePlus) - Dans une intervention à la maison d’édition L’Harmattan à Dakar, Aliou Niane, ancien secrétaire général et actuel président de la Chambre de discipline financière (CDF) de la Cour des comptes, a tenu à apporter des éclaircissements concernant le récent rapport sur la situation des finances publiques, objet de vives réactions dans l'opinion.
Face aux critiques et aux interrogations sur la méthodologie et la légitimité du document, M. Niane a souhaité rétablir certaines vérités et défendre l'indépendance de l'institution qu'il représente.
Le magistrat a d'abord abordé la question du délai de production du rapport. "On nous a dit que la Cour avait trois mois pour faire le rapport. C'est vrai, si on regarde le code de transparence", a-t-il reconnu. Cependant, il a souligné que les procédures de la Cour des comptes sont régies par la loi organique 2012-23, qui prévaut sur le code de transparence.
"La loi organique étant supérieure à la loi ordinaire qu'est le code de transparence, nous avons appliqué de façon pertinente les dispositions résistantes, les procédures de la Cour", a-t-il expliqué. Selon lui, il faut "un minimum de trois mois pour faire l'audit, un minimum d'un mois pour avoir les conclusions du parquet et un minimum d'un mois pour faire le contradictoire", rendant impossible la réalisation d'un tel rapport en seulement trois mois.
Concernant le respect du principe du contradictoire, autre point de critique, Aliou Niane a rappelé que "la loi organique sur la Cour des comptes dit que toutes les procédures de la Cour sont écrites et contradictoires". Il a précisé que l'audit sur la situation des finances publiques ne visait pas des personnalités en particulier mais cherchait à évaluer "la situation des finances publiques en temps T".
"On ne s'intéressait pas aux ministres qui se sont succédés au niveau du ministère des finances ou bien au niveau du ministère de l'économie. Ce qui nous intéressait, ce sont les administrations qui ont produit les données et le contradictoire a été respecté avec ces administrations", a-t-il affirmé.
Le magistrat a également réfuté les allégations selon lesquelles le rapport n'était pas signé. "Nous ne pouvons pas faire un rapport qui n'est pas signé", a-t-il assuré, expliquant que les versions publiées sur le site de la Cour ne comportent généralement pas de signatures, comme c'est le cas pour d'autres institutions similaires.
Il a par ailleurs dénoncé la circulation d'un rapport provisoire dont certains se seraient emparés. "Ce qu'ils avaient, c'est un rapport provisoire. Ils n'auraient même pas dû obtenir une copie du rapport provisoire", a-t-il regretté, expliquant que les différences entre ce document et la version finale sont normales et résultent du processus d'élaboration.
Aliou Niane a en profiter pour réaffirmer avec force l'indépendance de la Cour des comptes : "La Cour est indépendante. Elle ne dépend d'aucun pouvoir. Nous ne dépendons pas du pouvoir exécutif et au niveau de la Cour, nous tenons à notre indépendance comme à la prunelle de nos yeux."
Il a rappelé que par le passé, cette indépendance avait déjà été mise à l'épreuve, notamment lors de la publication du rapport sur la gestion des fonds Covid, qui avait également suscité "une levée de boucliers".
"Nous sommes un pouvoir au même titre que le pouvoir exécutif, au même titre que le pouvoir législatif. Nous assumerons notre indépendance jusqu'au bout, quel que soit le pouvoir qui serait en place", a conclu le magistrat, réaffirmant la mission de l'institution comme "sentinelle des finances publiques" au Sénégal.