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30 novembre 2024
Politique
DPG À LA TRAÎNE
Alors que la date limite de sa Déclaration de politique générale approche avec la fin de la session parlementaire, Sonko ne semble pas pressé de s'y soumettre, piégé par le calendrier. Certains députés menacent déjà de saisir le Conseil constitutionnel
Depuis la formation du gouvernement, le 5 avril, le Premier ministre, Ousmane Sonko, qui semble ne pas être pressé de faire sa Déclaration de politique générale, est pris dans le piège du calendrier avec la clôture de la session parlementaire le 30 juin.
Quand le Premier ministre va faire sa Déclaration de politique générale ? Alors que le délai de 90 jours s’épuise, Ousmane Sonko ne se presse pas pour se soumettre à cet exercice parlementaire constitutionnalisé.
Après la formation du gouvernement, le 5 avril, le Premier ministre, Ousmane Sonko est sur le point d’épuiser les délais requis. Mais, il y a surtout une réalité qui s’impose à lui : la clôture de la session parlementaire prévue… ce 30 juin.
Aujourd’hui, le calendrier affiche le 24 juin. Mais, l’Assemblée nationale n’a reçu aucune notification de son passage à l’Hémicycle pour faire sa Dpg. Selon le Règlement intérieur, elle doit être saisie 8 jours avant le jour du passage du Pm. Evidemment, il devient quasi impossible de respecter les délais impartis pour lui permettre de faire sa Déclaration de politique générale avant la fin de la session parlementaire dans 6 jours. Et la prochaine est prévue en octobre.
Les meuniers opposés à la baisse : L’État a du pain sur la planche
Avec ce cas de figure, on s’achemine vers une hypothèse : obtenir une session extraordinaire convoquée par le Bureau de l’Assemblée ou le président de la République avec un ordre du jour bien déterminé. Même si certains experts soulignent que les trois mois impartis ont été enlevés du Règlement intérieur lors de la suppression du poste de Premier ministre en 2019 et n’ont pas été réintégrés après le rétablissement de la Primature en décembre 2021. Pour des députés, il y a surtout les usages, les règles tacites, le respect de l’institution parlementaire, qui auraient dû le pousser à s’y soumettre à temps.
Baisse des denrées : La vérité des prix
Il y a des questions auxquelles le Premier ministre devra répondre pour donner les raisons qui l’ont poussé à trainer les pieds pour se retrouver dans cette situation. Elle n’est pas embarrassante pour lui, car il a voulu se retrouver dans cette posture. Mais, le Premier ministre sera contraint de trouver des arguments valables pour l’expliquer. Sur le plan juridique, il n’y en a pas. Sur le médical ? La justification pourrait être axée sur ce point pour tenter de sauver la face, selon même des juristes qu’il a sollicités pour essayer de trouver des arguments pour sortir de cette impasse, devenue un piège pour lui. Dans un passé récent, des Pm, qui avaient aussi des soucis de santé, ont passé leur Dpg : Idy en 2003 avec une extinction de voix et Boun Abdallah Dionne. Il avait même bénéficié de «pauses santé» lors de l’exercice.
Saisine du Conseil constitutionnel
A l’Assemblée nationale, certains députés piaffent d’impatience de retrouver leur ancien collègue. Pour eux, la non-tenue de la Dpg à temps serait une violation constitutionnelle. Ils se projettent à saisir le Conseil constitutionnel qui devra tirer les conséquences de cet acte posé par le Premier ministre, qui n’est pas trop enthousiaste à se rendre à l’Assemblée nationale. C’est un secret de Polichinelle, mais il ne peut pas échapper à cet exercice.
Lire la chronique – 450 milliards, l’Ofnac servi sur un plateau… d’argent
Il faut savoir que la polémique avait enflé après la sortie du ministre de la Formation professionnelle, porte-parole du gouvernement, Moustapha Ndieck Sarré, soutenant que si la majorité parlementaire, incarnée par le Groupe parlementaire Benno bokk yaakaar (Bby), devenue la nouvelle opposition à l’issue de la Présidentielle du 24 mars dernier, n’approuvait pas, par le biais d’une motion de censure, la politique du nouveau gouvernement, elle ramerait à contre-courant de la vision de la majorité des Sénégalais. Cette sortie du ministre Moustapha Sarré avait passablement agacé le président du groupe majoritaire à l’Assemblée nationale. Il l’avait invité au respect du principe de la séparation des pouvoirs.
Malgré les appréhensions et le déficit de confiance entre les deux parties, personne n’avait pensé qu’on allait se retrouver dans cette situation. Dans une circulaire adressée aux membres du gouvernement, le Premier ministre Ousmane Sonko avait demandé aux ministres de lui faire parvenir, avant le 24 mai, leurs contributions pour la Déclaration de politique générale (Dpg). Ces différents documents devraient suivre un canevas dont les contours s’inspirent du Projet, le nouveau référentiel des politiques publiques depuis l’élection à la présidence de la République de Bassirou Diomaye Faye.
Par Amadou Lamine SALL
DIOMAYE-SONKO, ENCORE PLUS LOIN QUE LES LIENS POLITIQUES ?
Ce pays est une oasis et les dattes sont à portée de lèvres. Que tout ce peuple soit béni et avec lui ses jardiniers de mars 2024. Mais se souvenir toujours que «la différence entre un jardin et un désert, ce n’est pas l’eau. Mais l’homme»
Notre prière, hymne à l’amitié et à nos valeurs les plus nobles, est celle-ci, avec l’arrivée du Président Diomaye au pouvoir comme 5ème président de la République du Sénégal : Qu’un océan caché et en marche, prenne le relais d’une mer qui n’a jamais renoncé à son sel. Même s’il est plus facile de «contempler la lune» que de «devenir l’océan.» Puissent les nouveaux marchands de sucre rendre notre quinquéliba plus délicieux encore qu’hier. Aidons-les tous à réussir un nouvel arôme !
Certains nous en voudront, jusqu’à nos prières ! Comme si nous n’avions pas le cœur et le droit de prier pour le bien et non pour le mal ! Tant pis, c’est trop tard ! Nous avons choisi le bien ! Il n’a rien à voir avec la politique, parce que la politique, ses démons et ses divisions nous ont appris plus à s’opposer, à haïr qu’à aimer !Que ceux que Le Seigneur aime soient préservés de ce cyanure, de cet incendie !
Nous tentons d’être des poètes qui donnent une voix à l’humanité et tentent de mettre en lumière les problèmes sociaux et politiques et inspirer les gens à agir pour les résoudre. Cette race, dit-on, Dieu veille sur elle et lui prête Sa Lumière.
Il n’y a rien de plus précieux que la liberté ! Il n’y a, non plus, rien de plus beau que l’amitié ! Surtout, que personne ne suive mon regard. Le Sénégalais sait être coquin ! Il est vif d’esprit. Le poète Rûmi, fondateur de la tarîqa Mawlawîya, écrit ceci dans ses «Odes mystiques», je le cite : «…tous deux nous sommes une seule lumière - Si tu veux, vois le, situ le veux, vois-moi.-Je suis lui, il est moi. -Pourquoi dis-je moi ou lui, puisque lui-même est moi, et que moi je suis lui ? Je suis lui-même, maintenant c’est de moi-même que je parle… Heureux le moment où nous sommes assis dans le palais, toi et moi. Avec deux formes et deux visages, mais une seule âme, toi et moi.»
Salâh-od-Dîn Farîdûn Zarkûb dit ceci de son ami le poète Rûmi. - Ne suivez pas mon regard-, je le cite : «Je suis comme un miroir devant Mawlânâ -autre nom du poète Rûmi-. C’est en moi qu’il voit son propre visage. S’il m’a choisi, c’est qu’il s’est choisi lui-même.»
Si quelque misère séparait un jour les deux gardiens du Sénégal à qui le peuple a confié les clefs de sa précieuse maison, -et prions pour que cela n’arrivera jamais-, l’un comme l’autre nous dira alors : «Je me plains puisqu’on m’a séparé de la canne à sucre. Et je ne puis plus vivre sans gémir et me lamenter.»
Puissent les deux, le saint et le héros, comme Senghor les avait prédits, «accueillir les pauvres et ceux qui sont dans le besoin, et qu’ils supportent avec patience la peine de les servir», comme le peuple dans les urnes les a si abondamment servis. Qu’ils se lèvent avant l’aube pour servir et qu’ils se couchent tard pour toujours servir.
«Un affamé ne s’enfuit pas loin du pain» si le pain montre sa pâte et diffuse son parfum.
«Garde bouche close» dit le poète Rûmi ! Dans ce pays si bavard, les meilleurs se taisent. Ils ont vu, fait, donné, construit, aimé leur pays et parcouru le monde. Sans bruit. Ceux qui bavardent, l’esprit court, l’ignorance en bandoulière et la vanité enflée, n’en sont même pas encore «au tournant d’une ruelle.» Tout finit par passer ! Seule demeure ce qui ne peut s’effacer et que garde jalousement les livres d’histoire, la vigueur et l’invincibilité de la tradition orale. Quand on sait et voit qu’il ne reste qu’à peine un mur des grands palais somptueux des sultans arabo-perse, comme « le palais d’Aladin des Mille et Une Nuits, entre autres, on devient silencieux.
Travaillons et pas seulement les tenants du pouvoir, mais tous ensemble. Soyons une présence savante, humble et fraternelle, constructive et non destructrice, divisionniste, séparatiste, jalouse et haineuse.
Ce pays est une oasis et les dattes sont à portée de lèvres ! Que tout ce peuple soit béni et avec lui ses jardiniers de mars 2024 venus avec pelles et truelles. Mais se souvenir toujours que «la différence entre un jardin et un désert, ce n’est pas l’eau. Mais l’homme.»
OUSMANE SONKO A RECULONS
Depuis la formation du gouvernement, le 5 avril, le Premier ministre, Ousmane Sonko, qui semble ne pas être pressé de faire sa Déclaration de politique générale, est pris dans le piège du calendrier avec la clôture de la session parlementaire le 30 juin.
Depuis la formation du gouvernement, le 5 avril, le Premier ministre, Ousmane Sonko, qui semble ne pas être pressé de faire sa Déclaration de politique générale, est pris dans le piège du calendrier avec la clôture de la session parlementaire le 30 juin.
Quand le Premier ministre va faire sa Déclaration de politique générale ?Alors que le délai de 90 jours s’épuise, Ousmane Sonko ne se presse pas pour se soumettre à cet exercice parlementaire constitutionnalisé.
Après la formation du gouvernement, le 5 avril, le Premier ministre, Ousmane Sonko est sur le point d’épuiser les délais requis. Mais, il y a surtout une réalité qui s’impose à lui : la clôture de la session parlementaire prévue… ce 30 juin.
Aujourd’hui, le calendrier affiche le 24 juin. Mais, l’Assemblée nationale n’a reçu aucune notification de son passage à l’Hémicycle pour faire sa Dpg. Selon le Règlement intérieur, elle doit être saisie 8 jours avant le jour du passage du Pm. Evidemment, il devient quasi impossible de respecter les délais impartis pour lui permettre de faire sa Déclaration de politique générale avant la fin de la session parlementaire dans 6 jours. Et la prochaine est prévue en octobre.
Avec ce cas de figure, on s’achemine vers une hypothèse : obtenir une session extraordinaire convoquée par le Bureau de l’Assemblée ou le président de la République avec un ordre du jour bien déterminé. Même si certains experts soulignent que les trois mois impartis ont été enlevés du Règlement intérieur lors de la suppression du poste de Premier ministre en 2019 et n’ont pas été réintégrés après le rétablissement de la Primature en décembre 2021. Pour des députés, il y a surtout les usages, les règles tacites, le respect de l’institution parlementaire, qui auraient dû le pousser à s’y soumettre à temps.
Il y a des questions auxquelles le Premier ministre devra répondre pour donner les raisons qui l’ont poussé à trainer les pieds pour se retrouver dans cette situation. Elle n’est pas embarrassante pour lui, car il a voulu se retrouver dans cette posture. Mais, le Premier ministre sera contraint de trouver des arguments valables pour l’expliquer. Sur le plan juridique, il n’y en a pas. Sur le médical ? La justification pourrait être axée sur ce point pour tenter de sauver la face, selon même des juristes qu’il a sollicités pour essayer de trouver des arguments pour sortir de cette impasse, devenue un piège pour lui. Dans un passé récent, des Pm, qui avaient aussi des soucis de santé, ont passé leur Dpg : Idy en 2003 avec une extinction de voix et Boun Abdallah Dionne. Il avait même bénéficié de «pauses santé» lors de l’exercice.
Saisine du Conseil constitutionnel
A l’Assemblée nationale, certains députés piaffent d’impatience de retrouver leur ancien collègue. Pour eux, la non-tenue de la Dpg à temps serait une violation constitutionnelle. Ils se projettent à saisir le Conseil constitutionnel qui devra tirer les conséquences de cet acte posé par le Premier ministre, qui n’est pas trop enthousiaste à se rendre à l’Assemblée nationale. C’est un secret de Polichinelle, mais il ne peut pas échapper à cet exercice. Il faut savoir que la polémique avait enflé après la sortie du ministre de la Formation professionnelle, porte-parole du gouvernement, Moustapha Ndieck Sarré, soutenant que si la majorité parlementaire, incarnée par le Groupe parlementaire Benno bokk yaakaar (Bby), devenue la nouvelle opposition à l’issue de la Présidentielle du 24 mars dernier, n’approuvait pas, par le biais d’une motion de censure, la politique du nouveau gouvernement, elle ramerait à contre-courant de la vision de la majorité des Sénégalais. Cette sortie du ministre Moustapha Sarré avait passablement agacé le président du groupe majoritaire à l’Assemblée nationale. Il l’avait invité au respect du principe de la séparation des pouvoirs. Malgré les appréhensions et le déficit de confiance entre les deux parties, personne n’avait pensé qu’on allait se retrouver dans cette situation. Dans une circulaire adressée aux membres du gouvernement, le Premier ministre Ousmane Sonko avait demandé aux ministres de lui faire parvenir, avant le 24 mai, leurs contributions pour la Déclaration de politique générale (Dpg). Ces différents documents devraient suivre un canevas dont les contours s’inspirent du Projet, le nouveau référentiel des politiques publiques depuis l’élection à la présidence de la République de Bassirou Diomaye Faye.
Par Madiambal DIAGNE
L’OFNAC SERVI SUR UN PLATEAU… D’ARGENT
La récente opération de levée de 450 milliards interroge sur une possible prise illégale d'intérêts, alors que le Sénégal, à en croire le FMI, n'avait nul besoin d'emprunter autant de manière aussi opaque
L’agence Bloomberg avait révélé, dans une dépêche du 4 juin 2024, que le Sénégal a levé, sur les marchés internationaux de capitaux, la bagatelle de 750 millions de dollars américains, soit 450 milliards de francs Cfa. L’information a été très largement relayée par les médias. Le gouvernement daigne alors, dans un communiqué en date du 6 juin 2024, confirmer l’information, soulignant avoir réalisé l’opération «avec succès». L’organisation Forum civil, qui s’investit pour la transparence dans la gestion des affaires publiques, s’était interrogée, par la voix de son coordonnateur, Birahim Seck, sur les conditions de réalisation de cette opération. «Le ministre des Finances et du budget doit nous édifier sur le choix de JP Morgan Londres. Le problème de la transparence de l’intermédiation demeure», demande-t-il. Le gouvernement n’a encore fourni la moindre réponse à cette interpellation publique. A priori, on pouvait être indulgent à l’endroit de cette opération car, dès l’installation du gouvernement dirigé par le Premier ministre Ousmane Sonko, des voix, les plus autorisées, laissaient entendre que la situation financière héritée du régime de Macky Sall était catastrophique et qu’il fallait parer au plus pressé pour trouver des ressources financières.
Pourtant, le 11 avril 2024, le nouveau régime avait encaissé 324 milliards de francs Cfa, fruits d’un prêt garanti par la Banque africaine de développement (Bad) et autorisé par le Fmi, en décembre 2023, pour permettre de passer le premier trimestre de 2024 marqué par une période électorale.
L’opération cachée, même au Fmi : Un scandale !
Les objections formulées quant à l’opération de levée de 450 milliards de francs Cfa étaient tout bonnement ignorées. Ainsi, le fait que le Sénégal ait cette fois-ci emprunté au taux le plus cher de son historique d’endettement, à savoir 7,75%, adjugé aux investisseurs, sur une maturité aussi courte de sept ans, ne devait pas étonner. Quel est le taux définitif si on intègre les commissions et autres frais d’intermédiation gardés confidentiels ? Le gouvernement avait souligné avoir levé les fonds pour consacrer les deux tiers à «optimiser davantage le service de la dette». Allez savoir la logique d’emprunter à des taux les plus chers, pour racheter des dettes moins coûteuses ! Les brillants économistes sénégalais, qui parlaient souvent de ces questions, se sont subitement tus. Nul ne cherche à insister pour savoir dans quelles conditions la banque intermédiaire JP Morgan a été choisie, sans aucun appel à la concurrence, et que l’opération présentée comme un eurobond ne l’est point et se révèle plutôt être une banale opération de placement d’obligations directes du Sénégal auprès d’investisseurs ciblés. Dans une opération classique d’eurobonds, du style de celles réalisées les dernières semaines par la Côte d’Ivoire, le Bénin et le Kenya, et par le Sénégal sous les régimes de Abdoulaye Wade et Macky Sall, la transparence est de rigueur sur les modalités du choix de la banque conseil, les frais et commissions d’intermédiation payés. Mieux, «un road show» est organisé à l’intention des potentiels souscripteurs, avec l’assistance des institutions financières internationales publiques. Le modus operandi d’un eurobond voudrait une publicité préalable de l’opération et que les souscripteurs proposent, au cours d’une séance publique, des taux de financements affichés à l’écran, que le pays demandeur apprécie et négocie avant de distribuer le portefeuille selon ses propres critères d’appréciation. Le public est informé, jusqu’à la nomenclature des dettes rachetées à l’occasion ! Il n’en est véritablement rien de la première opération de levée de financements privés que vient de mener le ministre des Finances et du budget, Cheikh Diba, en dehors des marchés financiers régionaux. JP Morgan n’a eu à démarcher que ses clients privilégiés, et des investisseurs traditionnels non consultés ou approchés font une moue frustrée. D’autres curiosités pouvant renforcer la suspicion sont également notées. L’ancien Premier ministre britannique, Tony Blair, présenté comme un Vrp de JP Morgan, a été reçu par le Président Faye, le lendemain de l’opération «fast track» de levée de fonds, alors qu’il était jadis férocement pourfendu par Ousmane Sonko. Simple coïncidence ? En outre, des médias ont pu révéler que des cadres encartés au parti Pastef avaient été, jusqu’à une période récente, des collaborateurs de JP Morgan.
Le Fmi, un «lanceur d’alerte» pour l’Ofnac
La mission qu’une équipe du Fmi, a effectuée du 6 au 19 juin 2024, pour une revue du programme en cours avec le Sénégal (2023-2026), s’est conclue par un coup de tonnerre. Edward Gemayel, chef de mission, a révélé, au cours d’une conférence de presse à Dakar, que «le Sénégal traverse une période de surfinancement. Le pays a emprunté plus que nécessaire, conduisant à une liquidité excédentaire». Il souligne que le gouvernement dispose actuellement de plus de liquidités que nécessaire. «Ce surplus de financement résulte principalement de l’émission d’euro-obligations (eurobonds) des 3 et 4 juin 2024.» Ce qui est fait est fait, et le Fmi semble donc se résigner à «discuter avec le gouvernement de l’utilisation de ce surfinancement pour effectuer des opérations de gestion du passif». M. Gemayel ajoute, non sans saveur : «C’est-à-dire racheter des dettes à court terme plus coûteuses avec cette liquidité à plus long terme et moins coûteuse.» Seulement, on remarquera que le taux de 7,75%, déjà souscrit par le Sénégal, ne saurait être moins coûteux que les dettes à racheter ! De toute façon, le principe préconisé par le Fmi pourrait apparaître simple et Mesmin KouletVickot, représentant-résident du Fmi à Dakar, nous l’explique de manière didactique : «Le Sénégal a emprunté plus que nécessaire pour ses besoins actuels, créant ainsi des fonds excédentaires disponibles. La gestion du passif implique de réduire les coûts de la dette et d’améliorer la stabilité financière à long terme. Les fonds excédentaires, ayant des taux d’intérêt plus bas et des échéances plus longues, permettraient de rembourser des dettes plus coûteuses à court terme et de bénéficier de coûts d’emprunt plus bas sur une période plus longue. Cette stratégie permettrait d’optimiser la structure de la dette, de réduire le surfinancement et de renforcer la soutenabilité de la dette.» Question à Mesmin KouletVickot : en langage plus clair, le Sénégal avait-il un besoin vital de faire ce nouvel emprunt ? Réponse plus ou moins embarrassée : «Véritablement pas.» Pourquoi le Fmi, conseiller du gouvernement, a-t-il pu alors laisser faire ? Le représentant résident à Dakar consent à lâcher : «Non, le Fmi n’était pas informé en amont de cette opération.»
Le fait que cette opération ait été réalisée dans le dos du Fmi est de nature cavalière et rajoute à la suspicion. Pourquoi diantre se cacher du Fmi et mettre l’institution financière devant le fait accompli, alors que la transparence dans ces opérations à gros sous doit être totale, pour éviter, à tout le moins, tout soupçon de prise illégale d’intérêts ou de versement de rétro-commissions ? Est-ce de la simple malice que, dans son communiqué numéro 24/226 du 19 juin 2024, le Fmi se félicite du renforcement des pouvoirs et des moyens d’action de l’Office national de lutte contre la corruption (Ofnac) et de la protection des «lanceurs d’alerte» ? Doit-on redouter que cette affaire ne finisse par gêner les relations du Sénégal avec ses partenaires ? Le gouvernement ne semble pas être très à l’aise avec ce dossier. La communication, à l’issue des conseils de ministres du 5 juin 2024 et du 12 juin 2024, donc postérieurement à l’opération de levée de fonds, continue étonnamment de faire l’impasse sur ces fonds. Y’aurait-il anguille sous roche pour que le ministre Diba, dans sa communication du 12 juin 2024 devant le Conseil des ministres, n’ait évoqué, à en croire le communiqué publié par le porte-parole du gouvernement, que le prochain débat d’orientation budgétaire à l’Assemblée nationale ? Cette omerta est de nature à accabler un gouvernement dont la transparence reste le crédo principal clamé. D’ailleurs, le public serait-il jamais informé de cette opération, menée en catimini, si Bloomberg n’avait pas vendu la mèche ? Par exemple, le gouvernement Sonko a levé près de 150 milliards de francs Cfa sur le marché financier de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa), en bons et obligations assimilables du Trésor ; à savoir respectivement 28 milliards le 3 mai 2024, 68 milliards le 31 mai 2024 et 50 milliards le 6 juin 2024. Seul le petit monde de la finance a été informé de ces opérations ; nonobstant d’éventuels prêts directs souscrits avec des banques de la place. Dans une autre époque, les services du Trésor public sortaient systématiquement des communiqués pour en rendre compte.
Le risque de se fâcher avec les marchés financiers formels
Le programme signé entre le Fmi et le Sénégal prévoit un décaissement, en juillet 2024, de 230 milliards de francs Cfa sous forme de prêt concessionnel. Mais on peut s’inquiéter pour un tel décaissement. En effet, il peut apparaître quelque peu incohérent pour l’institution financière de continuer à prêter à un pays dont il a fini de relever, à la face du monde, qu’il se trouve dans la merveilleuse et enviable situation de «surfinancement». Peut-être aussi que le Fmi pourrait faire appliquer son vœu ou préconisation, qui jusqu’ici paraîtrait comme une simple clause de style diplomatique, d’utiliser les ressources empruntées pour racheter des dettes plus chères et à maturité immédiate. Les prêts concessionnels sont en effet à des taux d’intérêts quasiment nuls. Il demeure que le Sénégal aura grand intérêt à éviter de froisser le Fmi car, sans son accompagnement, le pays ne pourra plus recourir aux marchés internationaux formels ou réguliers, et s’exposerait, pour le financement de son budget, à des fonds spéculatifs ou «fonds vautours». En dépit de tous ces fonds déjà empruntés, le gouvernement garde encore un gros reliquat dans l’autorisation parlementaire d’endettement contenue dans la Loi de finances initiale 2024.
Une manne à la Bceao ou une vulgaire fiction comptable
Le commun des Sénégalais constate des difficultés ou des tensions de trésorerie au niveau des administrations publiques. Des projets et programmes sont à l’arrêt faute de financements et de nombreuses entreprises attendent des paiements échus. La fête de la Tabaski a été l’occasion de constater des problèmes de trésorerie, alors qu’on nous dit que le Sénégal disposerait d’une position à la Banque centrale qui devait excéder un solde créditeur de 1000 milliards de francs Cfa dont près de 800 milliards encaissés le 11 avril 2024 (324 milliards) et après le 5 juin 2024 (450 milliards). On veut bien croire que cet argent est réellement disponible, car le Fmi assure qu’il «ne spécule pas». Sa mission n’a certes pas visité la Bceao et s’est suffi des assurances du gouvernement. En tout cas, tout mensonge à ce niveau pourrait avoir des conséquences fatales. Une pareille ambiguïté, pour ne pas dire nébuleuse, doit interpeller au premier chef les députés qui attendent, dans les prochains jours, le Premier ministre Ousmane Sonko pour une Déclaration de politique générale. Le ministre des Finances et du budget est aussi attendu pour l’examen d’une Loi de finances rectificative et un débat d’orientation budgétaire. La majorité parlementaire Benno bokk yaakaar (Bby) doit se sentir bien concernée, elle qui observe des attaques en règle de la part des tenants du nouveau régime qui se défaussent systématiquement sur leur gestion. A l’opposé, le Fmi constate que le pays reste liquide. Qu’est-ce qui cloche ? Comment avoir des difficultés pour fonctionner alors qu’on aurait autant d’argent dans les livres de la Bceao ? Il reste qu’on relèvera quand même que la signature du Sénégal n’est pas si chahutée ou abimée qu’on a voulu le faire croire, si le régime de Bassirou Diomaye Faye a pu lever, en un claquement de doigts, sur une courte période d’un mois, plus de 600 milliards de francs Cfa sur les marchés ! Rares sont les pays africains qui peuvent se targuer d’une telle confiance des investisseurs. Les ratios d’endettement du secteur public, suite aux dernières actualisations, sont hissés à plus de 85% du Pib. Un niveau de pic que le Sénégal n’a jamais atteint auparavant. En décembre 2023, l’évaluation du Fmi portait la dette de l’administration centrale à 73,8% du Pib et la dette totale du secteur public à 81,2% du Pib. Tous les tabous sont tombés et cela place le Sénégal dans une «situation de pays à risque élevé de surendettement», avec ses conséquences sur sa viabilité économique et sociale !
FDS-LES GUELWAARS ANNONCE LA DISSOLUTION DE TOUTES SES INSTANCES
Le parti a donné mandat à son président, Babacar Diop, pour mettre en place, dans un court délai, de nouvelles structures
Le parti de Dr Babacar Diop était en conclave ce week-end à Thiès. Au sortir de cette rencontre, Fds-Les Guelwaars a annoncé la dissolution de ses instances.
Fds-Les Guelwaars a organisé un séminaire les 22 et 23 juin 2024 au Centre forêt de Thiès. Un conclave qui a réuni ses représentants départementaux sur le thème «Évaluation de la Présidentielle de 2024 et perspectives pour Fds Les Guelwaars». S’agissant des nouvelles stratégies du parti dirigé par Dr Babacar Diop, conformément aux statuts et aux recommandations du dernier Congrès du parti, les instances actuelles sont dissoutes. Pour le directoire national de Fds-Les Guelwaars, cette décision marque un «tournant décisif» dans l’histoire du parti. Elle symbolise, selon les «Guelwaars», «une volonté de renouvellement et d’adaptation face aux défis et enjeux contemporains». Ainsi, le parti a donné mandat à son président, Babacar Diop, pour mettre en place, dans un court délai, de nouvelles structures «plus dynamiques, inclusives et réactives, capables de répondre efficacement aux aspirations des membres et sympathisants de Fds-Les Guelwaars».
Dr Babacar Diop et ses camarades ont, par ailleurs, salué les principes de «Jubb, Jubbal, Jubbanti» érigés par le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, comme «fondements de sa gouvernance», tout en réaffirmant «son ancrage au sein de cette coalition au pouvoir».
MOBILISATION CONTRE L'ASCENSION DU RN EN FRANCE
Inquiets de la montée de l'extrême droite en France, Aminata Touré et Alioune Tine appellent la diaspora africaine à faire barrage au RN dans les urnes lors des législatives. Une prise de position critiquée par certains observateurs
Aminata Touré et Alioune Tine mobilisent, à leur façon, appellent les binationaux à barrer la route à l’Extrême droite française qui pourrait contrôler l’Assemblée nationale.
La montée en puissance du Rassemblement national (Rn) en France inquiète la classe politique et certains membres de la société civile sénégalaise. C’est parce que l’extrême droite est sur le point de contrôler l’Assemblée nationale française selon plusieurs sondages en direction des élections législatives du 30 juin 2024. Des résultats qui devraient confirmer ceux des dernières Européennes qui ont poussé Macron à dissoudre l’Assemblée nationale. Alors, Aminata Touré s’en mêle. «Le Rassemblement national a changé de garde-robe et de style mais pas d’idéologie. J’appelle les Français d’ascendance africaine et les binationaux africains-français à lui faire barrage dans les urnes», a écrit l’ancienne Première ministre sur sa page X. Le fondateur de Afrikajom Center est allé plus loin. «Les leaders politiques africains doivent exprimer clairement leur position par rapport à la menace que constitue l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir pour les Africains, les Arabes et les musulmans en France. Il faut demander à la diaspora africaine de voter massivement contre l’Extrême droite», partage Alioune Tine sur X.
Certains commentaires fustigent les positions de Aminata Touré et de Alioune Tine, estimant que cette démarche est «diplomatiquement incorrecte», d’autant plus que l’ancienne présidente du Cese, membre de la coalition Diomaye Président, avait fustigé l’ingérence de la France lors de la présidentielle de 2024.
DIOMAYE-MACRON, AU-DELÀ DES GESTES
La première rencontre entre le président et son homologue français a été scrutée de près. Selon Jean Charles Biagui et Domingo Mané, elle marque une rupture symbolique avec le passé tout en soulevant des interrogations sur la teneur réelle des échanges
Au lendemain de la première rencontre entre le président Emmanuel Macron et son homologue sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, l’Enseignant-chercheur en sciences politiques à la Faculté de Droit de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, Jean Charles Biagui, et Bacary Domingo Mané, journaliste formateur et analyste politique nous décortiquent les enjeux qui se cachent derrière les gestes immortalisés par les images des deux chefs d’États. Ainsi, pour le professeur Jean Charles Biagui, le président Diomaye s’est inscrit dans une démarche de rupture par rapport à ses prédécesseurs dont les images dominaient par des embrassades et accolades témoignant un paternalisme accepté et même revendiqué. Comme pour abonder dans le même sens, le journaliste formateur et analyste politique, Domingo Mané, a indiqué au sujet de la posture du président Diomaye lors de cette rencontre que « le jeune Chef d’Etat n’a pas perdu de vue qu’il représente plus qu’un pays mais l’Afrique toute entière »
Jean Charles Biagui, enseignant chercheur en sciences politiques (Ucad) : «Le président Diomaye s’est inscrit dans la perspective de rupture en ne faisant pas comme ses prédécesseurs...»
Le président de la République Bassirou Diomaye Diakhar Faye a bien réussi, sur la forme, le pari de sa première rencontre avec son homologue français, Emmanuel Macron. L’avis est de l’Enseignant chercheur en Sciences politiques à la Faculté de Droit Ucad, Jean Charles Biagui. Interpellé par Sud Quotidien sur les enseignements à tirer des images de la première poignée de mains entre les deux chefs qui ne partagent pas la même vision de la coopération bilatérale, Jean Charles Biagui a indiqué que « sur la forme, cette rencontre montre qu’il y’a incontestablement une rupture notamment dans la communication ». Et pour cause renseigne-t-il, lors de cette visite du président Diomaye à Paris, « nous n’avons pas vu les images de présidents africains notamment sénégalais qui acceptent un paternalisme devant les télévisions du monde ». « Le président Diomaye s’est inscrit dans la perspective de rupture en ne faisant pas comme ses prédécesseurs, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et Macky Sall avec des embrassades, accolades dans un langage avec des formules qui témoignent d’un lien colonial et un paternalisme accepté. Diomaye à Paris, nous n’avons pas vu ces images et il faut s’en féliciter. Au Sénégal, on peut espérer qu’on ne reverra plus ces images », a-t-il fait remarquer avant de poursuivre. « Donc, la remarque principale de cette première rencontre entre les deux chefs d’Etat est l’absence de ces images d’un paternalisme accepté souvent même revendiqué. Cela témoigne qu’il n’y a incontestablement une rupture puisqu’on voit du point de vue de la communication quelque chose de différent. Ensuite, le fait que cette première rencontre entre les deux chefs d’Etat soit tenue en marge d’un forum mondial organisé à Paris par la France et l’Union africaine, cela tranche avec un passé pas très lointain puisque ce n’était une visite officielle».
« Pas forcément de rupture dans le fonds en dehors du communiqué conjoint qui tient compte de la situation actuelle du Sénégal...»
Cette rupture ne concerne toutefois que la forme de cette rencontre, selon l’Enseignant chercheur en Sciences politiques à la Faculté de Droit Ucad, Jean Charles Biagui. Abordant l’aspect du contenu des échanges entre les deux chefs d’Etat sont les grandes lignes sont traduits dans le communiqué conjoint rendu public, l’enseignant politologue n’a pas manqué d’exprimer sa réserve sur les actes posés par le successeur du président Macky Sall. En effet, selon lui, « en dehors du communiqué conjoint qui tient compte de la situation actuelle du Sénégal notamment de la perspective souverainiste qu’on n’a pas l’habitude de voir, il faut reconnaitre qu’il n’y a pas forcément une rupture ».
Pour justifier sa position, Jean Charles Biagui évoque le contenu de ce communiqué conjoint qui, selon lui, est écrit avec « des formules très diplomatiques ». « Je ne vois pas comment la France va aider le Sénégal qui fait tout pour se défaire des liens militaires et économique qui existent entre eux. Je me demande comment dans cette perspective ce pays (la France) dont les actions sont décriées peut aider notre pays qui veut s’émanciper de lui, à se libérer de sa tutelle et consolider une certaine souveraineté puisque ce sont ses liens politiques, militaires et économiques qui sont remis en cause », s’est interrogé Jean Charles Biagui qui demande également à ne pas surestimer cette rencontre entre le président Diomaye « très légitime » et son « homologue français qui est en perte de vitesse ».
« Entre Macron et Faye, nous avons des postures très différents en fonction de la situation de chaque pays. Au Sénégal, nous sommes dans une perspective nouvelle ou Diomaye est arrivé au pouvoir avec une grande légitimité. En face de lui, nous avons un Emmanuel Macron en perte de vitesse qui vient de perdre des élections très importantes l’obligeant ainsi à dissoudre l’Assemblée nationale avec tout ce que cela implique comme risque pour lui de perdre non seulement sa majorité relative mais aussi de ne pas pouvoir gouverner si le Rassemblement national (Rn)ou une autre coalition gagne les prochaines législatives », a-t-il fait remarquer tout en s’interrogeant sur l’opportunité de la programmation de cette visite dans le contexte pré-Législatives en France.
Domingo Mané, journaliste formateur et analyste politique : «Le président Diomaye n’a pas perdu de vue qu’il représente plus qu’un pays mais l’Afrique toute entière»
En se rendant à Paris, le président Diomaye Faye avait des idées clairs dans la tête, assure Domingo Mané, journaliste-formateur et spécialiste en communication politique pour qui cette « rencontre entre les deux chefs d’Etat était très attendue et surtout souhaitée par le second qui en a manifesté le désir dès l’arrivée au pouvoir du très jeune Chef d’Etat sénégalais ». « Le contexte géopolitique où une génération d’Africains décomplexés veut traiter d’égal à égal avec les anciens colons donne un cachet particulier à cette entrevue avec un jeune président porteur d’un projet panafricaniste-souverainiste. C’est pourquoi, au-delà du discours ou des mots, les gestes et les postures du Présidents Diomaye Faye sont scrutés pour se faire ou non une religion sur le projet dont il est porteur. » a souligné l’ancien Directeur de publication de Sud Quotidien avant de poursuivre toujours au sujet de la posture du président Diomaye. « Il en était conscient ! Le jeune Chef d’Etat n’a pas perdu de vue qu’il représente plus qu’un pays mais l’Afrique toute entière. Il sait que les images de cette rencontre avec Macron sont très attendues par les Africains qui rêvent d’un continent émancipé où ils seront traités avec respect et dignité.
Les deux images que nous nous proposons d’analyser, celle de l’entrevue (les deux Présidents autour de la table pour un déjeuner) et celle de la poignée de mains, montrent un côté ambivalent, attestant des enjeux de cette rencontre ». « la photo du déjeuner fait penser à un round d’observation...» Poursuivant son analyse des gestes affichés par les deux chefs d’États dans les images largement diffusés de cette première rencontre, Bacary Domingo Mané renseigne au sujet de la photo du déjeuner que celle-ci « fait penser à un round d’observation entre le jeune président Diomaye Diakhar Faye et Macron qui ne connaissait pas auparavant son invité ». « Le territoire sur lequel se trouvaient les deux personnalités est un territoire dit «de confrontation». Elles sont de chaque côté de la table, face-àface. Deux territoires délimités par des fleurs où chacun préserve son assiette et ses fourchettes. Aucun d’entre eux ne prendra le risque d’avancer, de peur d’empiéter sur le territoire de l’autre. » a fait souligné le journaliste spécialiste en communication politique avant de faire remarquer au sujet des mains du président Macron à plat sur la table et le regard posé sur le visage de son invité, que c’est comme s’il voulait l’intimider.
« Par cette posture du Président Français, on pourrait être tenté de dire qu’il dégage une certaine assurance et affiche une volonté de mener, en toute responsabilité, les choses, voire même de «résister» si la situation le demande, comme semblent l’indiquer ses paumes cachées. Mais il y a un détail : Macron est assis presque près de la porte et le Président Diomaye est au fond. Le territoire occupé par Macron fait-il penser à une crainte d’une menace invisible ? Car, en cas d’une menace réelle, il pourra facilement prendre la poudre d’escampette, laissant loin derrière son invité. Un instinct de survie que le non-verbal est en train de trahir », a expliqué Domingo Mané tout en faisant remarquer que le Président Diomaye affiche une verticalité pour dire qu’il est droit dans ses bottes... »
« Le Président Dimaye Diakhar Faye lui aussi, affiche une verticalité comme son hôte. Histoire de dire qu’il est droit dans ses bottes, affichant du coup une certaine assurance. Il a posé sa main gauche sur sa main droite, tout en fixant du regard son homologue français. Cette posture du Président Diomaye fait penser à une spontanéité où l’affect joue un rôle déterminant dans les échanges. Mais c’est sa main droite couverte qui représente, en réalité, sa botte secrète. Il avance masqué, en voulant garder le contrôle des échanges sans en donner l’air. La rationalité en embuscade, l’affect n’est qu’une fausse piste où il veut entrainer son homologue », souligne le journaliste formateur et spécialiste en communication politique qui insiste. « Il sait mieux que quiconque que les États n’ont pas d’amis mais des intérêts à préserver. L’échange entre les deux Présidents se déroule dans la zone dite «personnelle». Nous savons qu’en dehors des territoires, la distance qui sépare deux individus est un vecteur de communication. Elle est un bon élément pour évaluer une relation. Cette zone est celle de l’amitié et de la convivialité (déjeuner). Mais les deux Chefs d’Etat n’ignorent pas que le pays est au-dessus de tout ». La poignée de mains à deux mains du Président Macron renvoie un «geste de remerciement ou un témoignage de respect »
Par ailleurs, revenant sur le sens des différentes poignées de main, Domingo Mané renseigne sur la seconde image de la poignée de mains entre Macron et le Président Diomaye qui combine deux gestes dont la poignée de mains à deux mains du Président Macron et la poignée de main plus l’autre main de Diomaye au coude de son homologue. « Concernant la poignée de mains à deux mains du premier des Français, on peut l’interpréter comme un «geste de remerciement ou un témoignage de respect et d’affection». Il renvoie aussi à un confort amical. Ce n’est pas étonnant qu’un hôte agisse de la sorte envers son invité. Certes, on peut épiloguer sur la sincérité ou non d’un tel geste, puisque les enjeux déterminent, en de pareilles circonstances, les comportements ». Poignée de main plus l’autre main au coude de Macron S’agissant du geste du président Diomaye à travers sa poignée de mains plus l’autre main au coude de Macron, Domingo Mané souligne que «certains pensent qu’il s’agit d’une poignée de mains tout simplement amicale, montrant une aisance avec son interlocuteur », et d’autres que c’est une poignée de mains manipulatrice, qui montre un faux côté amical pour ensuite influencer négativement l’autre personne. » « Dans les deux cas, les Présidents Diomaye et Macron sont avant tout guidés par les intérêts de leur pays. C’est pourquoi, ils ont choisi l’ambivalence, l’ambiguïté. La distance cultivée par chacun d’eux, montre à suffisance que l’importance des enjeux ne permet pas le moindre faux pas. Chacun a tiré son épingle du jeu. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre dans les relations franco-sénégalaises ou franco-africaines », a fait remarquer Domingo Mané.
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ALIOUNE NDOYE SANS FILTRE
L'ancien ministre défend le bilan de l'ancien régime dont la coalition (BBY) a été plombée, selon lui, par des "egos surdimensionnés". Il qualifie la baisse des prix de "mesurettes" et appelle à une analyse objective du secteur de la pêche
Ce dimanche 23 juin, l'émission "Point de vue" de la RTS a accueilli Alioune Ndoye, ancien ministre et maire de Dakar-Plateau. Dans une interview franche et directe, le responsable socialiste n'a pas mâché ses mots, offrant un regard critique sur la situation politique actuelle du Sénégal.
Revenant sur la défaite de la coalition Benno Bokk Yakaar à la dernière présidentielle, Ndoye a appelé à l'introspection plutôt qu'à la recherche de boucs émissaires. "Il faut avoir l'humilité de voir ce que chacun n'a pas fait", a-t-il déclaré, pointant du doigt les ego surdimensionnés au sein de la coalition.
L'ancien ministre n'a pas épargné le nouveau gouvernement, qualifiant ses récentes mesures de baisse des prix de "mesurettes". Selon lui, ces actions révèlent que les nouvelles autorités sont "rattrapées par la réalité du pouvoir", loin des promesses mirobolantes de campagne.
Sur le plan financier, Ndoye a défendu avec vigueur le bilan de l'ancien régime, notamment concernant la gestion des fonds Covid-19. Il a invité le nouveau gouvernement à se concentrer sur la résolution des problèmes plutôt que sur la "politique politicenne".
Concernant le secteur de la pêche, qu'il connaît bien pour avoir été ministre de l'Économie maritime, Ndoye a contesté l'idée d'une mauvaise gestion généralisée. Tout en reconnaissant l'existence de problèmes comme la surexploitation, il a appelé à une analyse objective de la situation.
Enfin, Alioune Ndoye a souligné l'importance pour le Parti Socialiste de se réorganiser et de redevenir un chef de parti, tout en restant ouvert à d'éventuelles "retrouvailles" avec d'anciens membres.
PAR Abdoul Aziz Diop
IRRESPONSABILITÉ AVÉRÉE
L’antirépublicanisme de la faute civique d’Amadou Ba montre l’insincérité de l’humilité de l’intermittent du politique jamais sorti vainqueur de la moindre consultation électorale, se contentant des postes clés d’État dont Macky avait le secret
L’ancien premier ministre et candidat malheureux à l’élection présidentielle du 24 mars 2024, l’inspecteur des Impôts et des Domaines - la précision vaut le détour - Amadou Ba, s’adjuge une « nouvelle responsabilité » dans un texte - exercice rarissime du plus privilégié des privilégiés - dans lequel (suivre le lien) il assume, dès le début, l'irresponsabilité antirépublicaine de l’intermittent du politique par deux courtes lignes :
« Sénégalaises, Sénégalais »,
« Mes chers compatriotes »
L’usurpation de fonction - sport favori chez nous au Sénégal - par celui qui considère qu’il a reçu mandat de s’adresser à la Nation comme le président élu, Son Excellence Monsieur Bassirou Diomaye Diakhar Faye, est manifeste. Dans quatre dispositions constitutionnelles, deux suffisent à recarder définitivement les présidents autoproclamés qui nous parlent sans qu’on sache d’où sort leur légitimité populaire et démocratique. Voici lesdites dispositions :
Article 48 :
Le président de la République peut adresser des messages à la Nation.
Article 79 :
Le président de la République communique avec l'Assemblée nationale par des messages qu'il prononce ou qu'il fait lire et qui ne donnent lieu à aucun débat.
Et précisons-le pendant que nous y sommes :
Article 52, Alinéa 2
[Le président de la République] peut, après en avoir informé la Nation par un message, prendre toute mesure tendant à rétablir le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des institutions et à assurer la sauvegarde de la Nation.
Article 73
Dans le délai fixé pour la promulgation [des] « lois définitivement adoptée s», le Président de la République peut, par un message motivé, demander à l'Assemblée nationale une nouvelle délibération qui ne peut être refusée. La loi ne peut être votée en seconde lecture que si les trois cinquièmes des membres composant l'Assemblée nationale se sont prononcés en sa faveur.
Du haut de ses laborieux 35,79 %, Amadou Ba est mal inspiré par sa « responsabilité nouvelle » pour s’adresser à ses compatriotes majoritairement regroupés autour du président Faye en lui assurant, dès le premier tour de scrutin, 54,28 % de leurs suffrages valablement exprimés.
L’antirépublicanisme de la faute civique d’Amadou Ba montre l’insincérité de l’humilité de l’intermittent du politique qui n’est jamais sorti vainqueur de la moindre consultation électorale, se contentant des postes clés d’État dont l’ancien président Macky Sall avait le secret de la distribution au terme de stupéfiants castings. À ce grand maître du casting mauvais, l’histoire retiendra l’élitisme antirépublicain naturellement aux antipodes de « l’élitisme républicain » avec lequel l’inventeur, le républicain français Jean Pierre Chevènement, rehaussait la parole publique du grand intellectuel en politique.
L’Énarchie à la sénégalaise
Les présidents Senghor, Diouf, Wade et Sall ne firent rien contre l’« Enarchie », version sénégalaise. Forgée, sur le modèle de « monarchie », par l’ancien ministre français Jean-Pierre Chevènement, à partir de la racine grecque «arkhos » («pouvoir»), l'Enarchie désigne, depuis la parution, en 1967, du livre de son inventeur, « les mandarins de la société bourgeoise » française où tous les postes clés sont détenus par des anciens élèves de l'Ecole nationale d’administration (ENA). Au Sénégal, c’est sans doute l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (ENAM) à ses débuts, devenue ENA, qui alimente depuis, plusieurs décennies maintenant, les cohortes du mandarinat. Plusieurs jeunes (garçons et filles) en sortent pour investir les centres de décisions. Si ce mandarinat-là a fait du tort au pays c’est parce qu’il a souvent fait oublier aux décideurs que d’autres jeunes étaient partis se former là où ils le pouvaient au Sénégal, en Afrique et dans le reste du monde. La plupart de celles et de ceux qui partirent parfois très loin, rentrèrent au pays avec un savoir-faire qui n’a jamais profité au Sénégal. Un Bacc+10 n’aura même rien obtenu pendant longtemps pour n’avoir jamais pu souscrire à un appel à candidatures pour une haute fonction publique.
Quand, encore qu’ils étaient dans l’opposition politique, deux inspecteurs des Impôts et des Domaines, Ousmane Sonko et Bassirou D. D. Faye promirent, au nom de l’égalité des chances, d’ouvrir, dès qu’ils en ont le pouvoir, les postes clés à tout.e légitime prétendant.e, la standing ovation qui salua la grande promesse avait sans doute été perçue au sommet de la hiérarchie comme l’onction administrative antérieure au changement de régime qui vient. L’inspecteur des Impôts et des Domaines, riche comme Crésus, Amadou Ba, est pour beaucoup dans ce qui arriva plus tard : la consécration de deux de ses anciens jeunes collègues dix ans après l’intérêt accru en 2014 de Ba pour la politique et la création du parti des « Patriotes du Sénégal pour la transparence, l’éthique et la fraternité » (Pastef). C’est bien contre Ba et son recruteur Sall que Sonko et Faye, moins riches mais pas pauvres, décidèrent de ne plus se fondre dans la haute fonction publique pour en assurer le contrôle en se donnant les moyens politiques et l’onction populaire leur permettant de transformer l’essai. Peut-on encore attendre d’eux la réforme du mandarinat à la sénégalaise ? Rien n’est moins sûr ! Le Sénégal serait même devenu le pays sous la férule, et pour longtemps encore, des inspecteurs des Impôts et des Domaines.
Il va de soi qu’après coup, Sonko et Diomaye ne prennent pas au sérieux Amadou Ba plus qu’ils ne le firent auparavant en lisant le texte vaseux au nom d’une « responsabilité nouvelle » qui n’est qu’une orgueilleuse demande de pardon aux « Sénégalaises et Sénégalais » qui ne le prennent naturellement pas au sérieux. « À la lumière des événements douloureux de mars 2021 et de juin 2023, notre nouvelle responsabilité est de déclarer la péremption de la violence dans le règlement des différends politiques », écrit l’ancien premier ministre de Macky Sall. Mais qui auparavant se risquerait de solder à sa place les mécomptes de l’irresponsabilité avérée dont il fit montre, se contentant de privilèges indus pour voler le pouvoir à celles et ceux qui ont trimé pour la République au cours du dernier quart de siècle (2000-2024) ? Qui ?
La « Nouvelle Responsabilité de faire de l’espace politique un cadre de confrontations d’idées » serait bien ancienne aujourd’hui si pendant dix ans (2014-2024) Amadou Ba n’aurait pas été l’attentiste de la République des paresseux qui attendaient d’être mieux servi par la politique à la petite semaine. Son texte faux n’abuse que celles et ceux pour qui la rénovation politique n’est que la lubie bien ancienne des « notoriétés intellectuelles » - parmi lesquelles celles de notre ancien parti (Alliance pour la République) - qu’Amadou Ba n’associa à aucune réflexion d’intérêt général.
Pourquoi le ferait-il maintenant ?
par Edgard Gnansounou
IL EST TEMPS D’AGIR CONCERNANT LA QUESTION MONÉTAIRE EN AFRIQUE DE L’OUEST
EXCLUSIF SENEPLUS - Le Nigeria fait semblant d’être intéressé à l’unification monétaire et la tiédeur de l’engagement des autres Etats contribue à une farce qui n’a que trop duré. Pour une stratégie graduelle en quatre phases pour contourner les obstacles
Depuis plus de quatre décennies, la volonté de parvenir à une monnaie unique en Afrique de l’Ouest nourrit des débats souvent passionnés dans la région. Elle est portée principalement par deux motivations : stimuler les échanges commerciaux communautaires d’une part, parvenir à une souveraineté monétaire régionale d’autre part. Ces discussions sont amplifiées par le rejet de plus en plus vif du franc CFA utilisé par huit pays ouest-africains et hérité de la période coloniale.
La Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait lancé son projet de monnaie unique selon un processus qui comprenait deux étapes : (1) créer une deuxième zone monétaire, la zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest (ZMAO) avec les sept pays non membres de l’Union Economique et Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA) ; la ZMAO devant parvenir à une unification monétaire de ces Etats en 2015, (2) unir ensuite les deux zones monétaires avec comme monnaie unique l’ECO en 2020. L’objectif de la ZMAO se révélant être inatteignable, la CEDEAO décida d’un processus direct d’unification monétaire des quinze Etats-membres.
Le 21 décembre 2019, les présidents Emmanuel Macron et Alassane Ouattara annonçaient, au nom de l’UEMOA, une réforme dont un des trois points majeurs était l’adoption de l’ECO en remplacement du franc CFA. Cette décision était censée entrer en vigueur en 2020. L’ECO de l’UEMOA resterait arrimé à l’Euro et la France s’engageait à maintenir la garantie de sa convertibilité.
L’annonce du 21 décembre 2019 est mal reçue par l’opinion en Afrique de l’Ouest. Elle est toujours légitimement ressentie comme une récupération par la France et ses partisans du projet de monnaie unique de la CEDEAO et son instrumentalisation pour perpétuer le franc CFA en se contentant de le débaptiser. En juin 2021, le lancement de l’ECO est reporté par la CEDEAO à 2027 pour tenir compte de la crise économique provoquée par la Covid-19 et de ses conséquences sur l’atteinte des critères de convergence, préalable à l’adoption de l’ECO. Ce nouveau report interroge cependant sur la volonté réelle des chefs d’Etat de parvenir à une monnaie unique régionale.
Enfin, au cours de la campagne présidentielle au Sénégal de mars 2024, le parti Pastef prône, dans son projet, la création d’une monnaie nationale. Cette position est ensuite corrigée par les leaders de ce parti qui la conditionnent à l’éventualité d’un échec du processus de création de l’Eco.
Le Pastef ayant gagné l’élection présidentielle, le Sénégal pourrait servir d’aiguillon au projet d’unification monétaire de la CEDEAO. Mais quelles sont les chances de succès de ce projet ? Quelle alternative pour sortir de l’impasse actuelle qui se manifeste par des reports à répétition ? Le Sénégal ne doit pas se faire d’illusions sur les chances d’aboutissement à moyen terme du projet de la CEDEAO dans sa mouture actuelle. Il devrait œuvrer, de manière volontariste, à une alternative graduelle plus réaliste qui s’appuie sur les acquis actuels malgré leurs insuffisances. La Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement prévue le 7 juillet 2024 pourrait fournir une opportunité pour commencer un travail diplomatique dans cette nouvelle voie.
L’impasse du projet Eco
L’échec de la ZMAO vient du fait que le Nigéria n’a pas montré un grand enthousiasme à mutualiser ses réserves de change avec celles plus faibles des six autres Etats de la zone monétaire, contrairement à la pratique dans l’UEMOA. En réalité, ceci montre une difficulté importante du processus du projet Eco. Le comportement du Nigeria résulte moins de l’égoïsme du pays le plus riche de la région que des différences de gestion des monnaies en présence.
En particulier, l’économie du Nigeria reste dépendante des exportations de pétrole brut qui, en 2022, représentaient 78,74% des exportations du pays. La conséquence monétaire de cette situation est que le naira est souvent dévalué quand les cours internationaux du pétrole baissent.
Par ailleurs, l’économie du Nigeria s’industrialise et se diversifie pour moins dépendre du pétrole. Elle a donc un grand besoin de ses réserves de change pour importer des biens d’équipement. Cette situation n’encourage pas leur mutualisation avec d’autres pays, même si ceci pourrait changer à long terme. On pourrait en effet, s’attendre à ce qu’un meilleur équilibre des réserves de change s’établisse à l’avenir entre le Nigeria et les autres pays de la région.
Il est cependant dommage que, pour des raisons qui tiennent au fonctionnement diplomatique de nos Etats, cette impasse ne soit pas officiellement reconnue par la CEDEAO. En réalité, le Nigeria fait semblant d’être intéressé à l’unification monétaire et la tiédeur de l’engagement des autres Etats dans le projet de monnaie unique contribue à installer une farce qui n’a que trop duré.
Ainsi, dans le contexte actuel, le projet Eco de la CEDEAO n’est pas viable du fait de l’asymétrie entre l’économie du Nigéria, exportatrice nette de pétrole brut et celle des autres économies de la région qui sont importatrices nettes. La baisse des cours de pétrole est favorable aux autres économies alors qu’elle est défavorable au Nigeria qui a tendance à dévaluer sa monnaie. La mise en place de l’Eco de la CEDEAO ferait subir le même sort à la nouvelle monnaie, étant donné le poids de l’économie nigériane dans la région.
Ce diagnostic n’implique cependant pas qu’il faille maintenir le statu quo avec les huit monnaies en place ou encore créer de nouvelles monnaies nationales. Ceci ne serait pas favorable à l’intégration économique de la région.
Une solution alternative
L’unification monétaire doit être pensée dans la perspective d’une industrialisation résiliente de l’Afrique de l’Ouest qui nécessite la création d’un espace économique plus fluide. L’expérience de monnaies régionales telles que l’Euro montre que la gouvernance de la monnaie est problématique en l’absence d’une mutualisation de la gouvernance politique.
Par exemple, la montée de l’extrême droite en France et en Allemagne, à l’occasion des élections européennes de 2024, et en particulier, la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par le président français en réaction à cette droitisation politique, ouvre l’opportunité d’un gouvernement du Rassemblement National, à l’extrême droite de l’échiquier politique en France.
On assisterait alors à un clivage entre un gouvernement de gauche en Allemagne et d’extrême droite en France, deux des piliers de la zone Euro. Si elle s’avérait, cette situation affaiblirait l’Euro dans sa parité avec le dollar américain. Les conséquences seraient par exemple, le renchérissement en FCFA des dettes des Etats de l’UEMOA libellées en dollar et des dépenses liées aux produits importés en dollar.
On voit là, d’une part pour la zone Euro, la nécessité d’adosser la problématique monétaire sur une gouvernance politique fédérale et, d’autre part pour les pays de l’UEMOA, les implications possibles de l’absence de souveraineté monétaire.
Dans le contexte de l’Afrique de l’Ouest, nous avons proposé une intégration économique et politique selon un processus devant conduire à la création en trois étapes d’une confédération à l’horizon 2045. En conformité avec cette vision, l’unification monétaire pourrait aboutir selon une feuille de route en quatre étapes.
Etape 1 - Remplacer immédiatement (en 2025 par exemple) le FCFA par l’Eco ; renoncer, par dignité, à la garantie par le trésor français de la convertibilité de l’ECO ; traiter directement avec la banque centrale européenne la coordination des politiques monétaires entre les zones Euro et Eco ; considérer la nouvelle devise comme monnaie commune (et non unique) de l’Afrique de l’Ouest ; à cette première étape, l’Eco pourrait rester arrimé à l’Euro avec la même parité que celle du franc CFA ; les conditions de cette étape ont été partiellement réunies par la décision certes contestable de l’UEMOA du 21 décembre 2009 qui a déjà été ratifiée par certains Etats de l’UEMOA ; mais il faudra en plus, par dignité, se passer de la garantie de convertibilité apportée par la France et rendre l’Eco totalement indépendant de ce pays ; assurer le maintien des Etats de l’AES dans l’UEMOA et soutenir leurs efforts militaires en vue de recouvrer l’entièreté de leur souveraineté nationale et obtenir, dans ces conditions, une gouvernance économique de ces pays compatible avec les critères de convergence ; consolider les politiques économiques des autres Etats de l’UEMOA.
Etape 2 - Mettre en œuvre ou consolider les réformes économiques au Ghana, en Gambie, au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée pour parvenir à une convergence macroéconomique avec les pays actuellement membres de l’UEMOA, à l’horizon 2030. Au fur et à mesure, les pays qui auront atteint les objectifs de convergence de manière stable seront accueillis dans l’UEMOA rénovée c’est-à-dire débarrassée de l’influence française. L’Éco serait alors la monnaie unique de l’UEMOA rénovée. Etant donné les effets cycliques de l’environnement international sur les économies africaines, la convergence doit être entendue en termes d’harmonisation de la gouvernance économique et politique et non de la convergence quantitative à court terme d’indicateurs macroéconomiques aux comportements erratiques.
Etape 3 – L’Eco serait reformé pour l’arrimer désormais à un panier de devises incluant l’Euro, le YUAN et le Dollar américain (échéance 2035) selon un régime flottant. Ceci se ferait concomitamment à une amélioration continue de la gouvernance de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) de manière à assurer la crédibilité de l’Eco après le changement de son régime. A cette échéance, il est attendu que les quatorze Etats de la CEDEAO autres que le Nigéria soient membres de l’UEMOA rénovée. Il y aurait désormais deux devises en Afrique de l’Ouest : le NAIRA et l’Eco à la place des huit monnaies actuelles.
Etape 4 - L’UEMOA rénovée serait transformée politiquement en Fédération Sahélo-Guinéenne à l’horizon 2040. La BCEAO deviendrait la banque centrale de la Fédération Sahélo-Guinéenne.
Il est temps d’agir
Le report incessant de la monnaie unique de l’Afrique de l’Ouest est un symptôme de l’impossibilité de ce projet dans sa mouture actuelle. La stratégie que nous proposons est graduelle et réaliste. Elle permet d’éviter les perturbations économiques que produirait inévitablement une unification totale et rapide et réduirait, dans la période transitoire, des souffrances inutiles qui seraient infligées aux populations démunies.
La volonté de réduire le nombre de monnaies nationales en cours dans la région répond à la nécessité d’un accroissement des échanges économiques régionaux et à celle du développement industriel en Afrique de l’Ouest.
Les perspectives économiques des Etats de la région avec la mise en exploitation de ressources minières telles que les hydrocarbures au Sénégal et au Niger par exemple, favoriseront un accroissement des entrées de devises étrangères du fait d’un accroissement des exportations. Cette perspective doit être mise en balance par les sorties plus importantes de devises en vue d’importer des biens technologiques requis pour l’industrialisation.
La tentation de cultiver les nationalismes hérités des temps coloniaux risque d’être forte particulièrement dans les Etats ouest-africains riches en matières premières. Certains milieux inciteront à la création de monnaies nationales. Il s’agit, en particulier, de milieux favorables à l’émiettement de l’Afrique (diviser pour mieux régner) et d’autres qui empoignent, sans lucidité, le souverainisme et le prétendu patriotisme prônés par la droite radicale dans les pays occidentaux.
Les Etats ouest-africains ainsi visés pour leur dotation en ressources minières, devront résister aux tentations narcissiques de marche solitaire car il est de leurs intérêts et de ceux de tous les peuples de l’Afrique de l’Ouest de créer un espace monétaire robuste. Seuls un tel espace et une gouvernance monétaire rigoureuse et vertueuse seront en mesure d’assurer un environnement stable pour un développement économique soutenu et continu de l’ensemble de la région.
Edgard Gnansounou est président du Mouvement des Fédéralistes Sahélo-Guinéens (MFSG).