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24 avril 2025
Politique
par Jean Christophe Senghor
DÉCOLONISATION, ÉVITONS LE MANICHÉISME
EXCLUSIF SENEPLUS - Le passé colonial du Sénégal participe à sa construction tout comme l’histoire des royaumes du Walo, du Cayor, du Baol, qui ont eu leurs heures de gloire mais aussi des heures sombres où l’esclavage était communément pratiqué
La mort atroce de George Floyd aux États-Unis – dont chacun a pu voir en différé les images épouvantables – a suscité une réprobation quasi universelle. De leur côté, les bavures policières françaises ont également montré les errements injustifiables de ceux qui brutalisent sans raison au lieu de protéger. Au Sénégal, les réseaux sociaux se sont enflammés jusqu’à la caricature – et les média ont repris en choeur – autour de l’idée de mettre à bas la statue du général Faidherbe à Saint-Louis sous prétexte qu’il avait été le gouverneur de la puissance coloniale et qu’il avait à ce titre « tué plus de 20 000 sénégalais en huit mois » ainsi que le rappelle le Professeur Iba Der Thiam. C’est donc à 83 ans que cet éminent universitaire, agrégé d’histoire et titulaire d’un doctorat, ministre de l’Éducation nationale de 1983 à 1988, semble découvrir les horreurs de la colonisation et des guerres de conquête 1 !
Toute conquête militaire pour le pouvoir qu’il soit politique ou religieux entraine la mortvd’innocents. La stratégie de la terreur fut, hélas, également pratiquée par le chef tidiane El Hadj Omar Tall dans sa conquête du royaume bambara de Ségou ou contre l’empire peul du Macina. Et ce n’est pas le colon français qui mit à mort le grand chef de l’empire toucouleur mais les Peuls qui venaient d’assiéger Hamdallahi et qui poursuivirent El Hadj Omar jusqu’à sa mort par asphyxie dans les falaises de Bandiagara. Il faut relire, à ce sujet, Amadou Hampaté Ba dont le grand-père avait été enrôlé sous la bannière du chef toucouleur.
Ces précisions apportées et au risque d’aller à contre-courant, on pourrait considérer aujourd’hui que le Sénégal moderne fonde ses bases sur trois personnages majeurs : le général Faidherbe, son ennemi El Hadj Oumar Tall dont la force et le courage ont été justement célébrés, « un grand homme parmi les grands » selon la belle formule de Samba Dieng et son autre ennemi, Lat Dior Diop, 28e damel du Cayor2, vainqueur de la célèbre bataille de Ngol Ngol en 1863.
Le passé colonial du Sénégal fait partie intégrante de son histoire et participe à la construction du pays tout comme l’histoire des royaumes du Walo, du Cayor, du Baol, du Sine et du Saloum qui ont eu leurs heures de gloire mais aussi des heures sombres où l’esclavage était communément pratiqué à l’issue de guerres fratricides 3.
Le général Faidherbe4 a protégé l’islam – contre l’avis de l’Eglise catholique – en ouvrant des écoles laïques où les jeunes africains musulmans pouvaient apprendre le français tout en étant assurés du respect de leurs convictions religieuses. A ce titre, il sera d’ailleurs accusé par la presse cléricale de « livrer le Sénégal aux marabouts ». Par ailleurs, il favorisera les « mariages à la mode du pays », lui-même donnant l’exemple en contractant une union avec une jeune fille du Khasso, Doucounda Sidibé qui sera la mère de son fils Louis, mort à 24 ans de la fièvre jaune et dont on voit encore la pierre tombale dans le cimetière de Saint-Louis.
Vouloir aujourd’hui effacer le passé colonial est un non-sens ! C’est comme si les Français décidaient de raser tous les monuments gallo-romains sous prétexte qu’ils ont été construits par la puissance coloniale romaine5 ! Faudra-t-il au Sénégal faire table rase du passé et détruire tout ce que l’administration coloniale a construit jusqu’en 1960 ? Il faut savoir raison garder !
Le Pr Iba Der Thiam se souviendra qu’on a débaptisé le lycée Van Vollenhoven qui rappelait trop la puissance coloniale pour lui donner le nom – mérité – de Lamine Gueye. Mais sait-on que ce gouverneur général de l’A.O.F. oeuvra plus en faveur des tirailleurs sénégalais que le député Blaise Diagne ? Lorsque Clémenceau réclama en 1917 un second contingent de tirailleurs, il s’y opposa fortement d’abord en juillet puis dans une seconde lettre en septembre dans laquelle il écrivit : « Je vous supplie, Monsieur le ministre, de ne pas donner l'ordre de procéder à de nouveaux recrutements de troupes noires. Vous mettriez ce pays à feu et à sang. Vous le ruineriez complètement et ce, sans aucun résultat. Nous sommes allés non seulement au-delà de ce qui était sage, mais au-delà de ce qu'il était possible de demander à ce pays ». Clémenceau n’en tint pas compte et chargea le député Blaise Diagne de la sale besogne. Outré, Van Vollenhoven démissionna le 17 janvier 1918 et alla se faire tuer sur le champ de bataille le 20
juillet. Aujourd’hui, on a donné le nom de Blaise Diagne au nouvel aéroport et on a complètement oublié Van Vollenhoven aux qualités humaines avérées !
Dans son ouvrage récent, Sortir de l’impasse coloniale, Philippe San Marco nous appelle à la sagesse : « Pour s’apaiser et construire un avenir commun, mieux vaudrait ne rien oublier mais ne rien caricaturer non plus. Comprendre, non pour rejouer un passé qui doit nous laisser passer si l’on veut avancer. »
1 On peut se demander d’ailleurs aujourd’hui pourquoi il n’a pas usé de sa qualité de ministre pour mettre à bas cette « vilaine » statue !
2 Comme tout chef guerrier, Lat Dior « ne fait pas dans la dentelle » lorsqu’il attaque et détruit le village de Mbacké en 1862. Il se convertira à l’Islam quelque temps plus tard à la demande de l’almamy Maba Diakhou, marabout toucouleur, chef des musulmans de la région du Rip.
3 Le 1er février 1861, Macodou Fall, damel du Cayor, s’engage à ne plus vendre comme esclaves aucun étranger ni aucun de ses sujets.
4 S’il tue – nul ne peut le nier – le général Faidherbe signe et respecte des accords avec les rois vaincus ; tel Dioukha Samballa, roi de Kayes, qui reçoit 5 000 francs pour l’achat du terrain qui servira à construire le fort de Médine et 1 200 francs de cadeaux par an.
5 Imagine-t-on détruire le magnifique arc de Germanicus à Saintes (Charente-Maritime) sous le prétexte qu’il a été construit à la gloire de l’empereur Tibère sous l’occupation romaine ?
par l'éditorialiste de seneplus, serigne saliou guèye
UNE REPRISE DES CLASSES SUR LES CHAPEAUX DE ROUES
Qu’en sera-t-il des écoles qui, après quelques averses, n’auront rien à envier aux étangs que l’on trouve dans la forêt ? Qu’en sera-t-il des 6500 abris provisoires disséminés sur l’ensemble du territoire national ?
Après trois reprises ratées des enseignements et apprentissages, l’Etat semble enfin décidé à rouvrir, contre vents et marées, les écoles primaires, collèges et lycées le 25 juin prochain. Du moins pour les élèves de cm2, de 3e secondaire et de terminale. Mamadou Talla, le ministre de l’Education nationale, et son collègue de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle, Dame Diop, rouvriront les écoles fermées depuis la première décade du mois de mars. Ainsi, le ministre Talla a dévoilé le nouveau calendrier retenu pour les examens de baccalauréat, Bfem et Cfee. Le Cfee et l’Entrée en sixième se dérouleront fixés à partir du 20 août prochain, le Bfem à partir du 14 septembre. Les sessions de remplacement sont prévues à partir du 15 octobre. Les épreuves anticipées de philosophie se tiendront le 12 août, le bac technique à partir du 31 août et le bac général à partir du 7 septembre. Les autres examens professionnels seront organisés du 3 au 30 août. La nouvelle année académique démarrera dans la première semaine du mois de novembre 2020.
Les syndicalistes et les partenaires sociaux, qui étaient en phase de réflexion, se disent surpris de la décision du ministre de l’Education nationale qui n’a pas tenu compte de leurs propositions. Alea jacta est. Les soldats de la craie seront de retour dans les classes même si le terrain n’est pas encore déminé, même si le climat demeure anxiogène. Dans ces conditions, il est à craindre, dès les premiers jours, de voir des établissements fermés mis en quatorzaine pour cause d’un enseignant ou d’un élève atteint du covid-19. Mais quelle est la solution prévue pour ces élèves qui perdront durant ces deux mois de cours au moins 14 jours ? Qu’en sera-t-il des établissements où le protocole sanitaire ne sera pas respecté totalement surtout que la logistique mise en place devra durer deux mois ? Qu’en sera-t-il des écoles qui, après quelques averses, n’auront rien à envier aux étangs que l’on trouve dans la forêt ? Qu’en sera-t-il des 6500 abris provisoires disséminés sur l’ensemble du territoire national surtout que l’hivernage s’est installé dans les zones sud et centre ?
Autant de questions dont les réponses n’ont pas été trouvées auprès des ministres concernés par la reprise. Certaines autorités de l’Education nationale soutiennent toujours avec naïveté qu’il y a des pays où il pleut 8 mois sur 12 et que, par conséquent, enseignants et élèves travaillent sous la pluie. Il faut préciser que dans ces pays, les autorités ont pris toutes les dispositions pour que la pluie ne soit pas un facteur rédhibitoire pouvant compromettre le travail à l’école.
Certes le Sénégal, à l’instar de tous les autres pays, traverse une situation exceptionnelle, mais cela ne doit pas être un prétexte pour imposer la reprise des cours dans des conditions pas encore claires. La conférence des gouvernements scolaires se désole d’être écartée des séances de réflexion auxquelles la tutelle avait convié acteurs et partenaires de l’école. Cette instance représentative des élèves n’exclut pas de s’opposer à la reprise d’autant plus que certains de ses membres des zones sud et centre, concernés par la reprise, ont déclaré ne plus être en mesure de retourner à l’école parce qu’ils doivent cultiver leurs champs qui les nourrissent et qui assurent leurs frais de scolarité. Quant aux élèves des classes intermédiaires, ils peuvent déjà entamer leurs vacances puisque le ministre cherche avec les acteurs comment faire pour décider de leur passage ou redoublement. Par ailleurs, il est prévu dans l’agenda scolaire de la rentrée du mois de novembre quelques semaines de consolidation pour combler le gap du 2e semestre que ces élèves n’effectueront pas. Il est clair que l’objectif du gouvernement, c’est de tout faire pour organiser les examens mais non de finir le programme scolaire.
Ainsi les autorités académiques, pour plus de cohérence, devraient procéder à un redimensionnement du programme, fixer les limites dans lesquelles se tiendront les évaluations pour éviter de perdre du temps sur des chapitres bâclés qui risquent de saturer les élèves. Cela permettra aux enseignants de bachoter pour préparer intensément les élèves dont l’unique objectif est de réussir à l’examen. Bien sûr au détriment du savoir.
par Siré Sy
QUAND LA COVID-19 MET À NU LE PSE (3/5)
EXCLUSIF SENEPLUS - Cette crise vient rappeler que le PSE est davantage obnubilé par la croissance que par le développement économique et le progrès social - PRÉSIDENT ET GESTION DE CRISE, ‘’QUAND L’HEURE EST GRAVE !’’
L'adage dit que c’est au pied du mur que l'on reconnaît le maître-maçon. Dans la même temporalité, c'est par et dans la gestion de crise(s) de magnitude ‘’secousse du régime’’ sur l'échelle d'une Nation-État, que l'on apprécie les choix, les décisions et le leadership d'un chef d'Etat dans sa fonction de président de la République.
Le Think Tank Africa WorldWide Group vous propose une toute nouvelle série du Feuilleton managérial : Président et Gestion de crise, ‘’quand l'heure est grave !’’, de cinq (5) épisodes, entièrement et exclusivement consacré au président Macky Sall.
Pour cette troisième épisode de ''Président et Gestion de crise ‘’quand l'heure est grave’’, quand la Covid-19 met à nu le PSE.
La Covid-19 a montré au président Macky Sall et au gouvernement du Sénégal, ce que vaut réellement le PSE (Plan Sénégal Émergent) sur le terrain, au-delà des slogans, des théories, et des déclarations d’intention. Au-delà de la gouvernance par le verbe et les effets d’annonce. En effet, après avoir bouclé la première phase (de 4 ans) du PSE, la Covid-19 est venue nous rappeler que le PSE était et faisait plus dans l'économisme (obnubilé par la croissance synthétique du PIB) que dans l'Économie (développement économique diffus et progrès social). Parce que le PSE marche sur une jambe (un Plan uni-jambe) parce que ne prenant presque pas, ni assez ni au mieux, l’autre versant de l'émergence, le versant social (emploi et santé).
Pourtant, depuis 2015, le Think Tank Africa WorldWide, n'a cessé d'alerter sur ce fait, en écrivant et en déclarant qu'à la moindre secousse, tout s'effondrerait comme un château de cartes. Comme nous ne sommes pas de l’APR, nous avons été taxés d’opposant encagoulé et de populiste. L’on est allé même jusqu'à nous dire de ‘’rentrer’’ au Maroc….
La Covid-19 vient confirmer, hélas, notre prédiction et le président Macky Sall vient de se rendre compte et cette pandémie vient de révéler, malgré tous ses efforts et ses slogans, du niveau de pauvreté, d'indigence des sénégalais et de la vulnérabilité de notre économie et de son système dont 80% repose sur l’informel. Sans compter, le rachitisme de nos structures médicales et de notre système de Santé en termes d'équipements et de plateaux médicaux. Bref, de notre système de Santé qui est malade et de l'urgence à se soigner au Sénégal.
Erreurs tactiques d'une stratégie de guerre
Dans sa gestion de la Covid-19, Macky Sall, n'a-t-il trop prêté son oreille à l’international ? Le président a-t-il pris peur des prédictions catastrophiques de l’OMS et de l’Occident ? Macky a-t-il paniqué, dans l’exercice ô combien délicat de la prise de décision au plus haut sommet, au point de décréter la guerre avant l'heure, alors qu'il fallait en appeler à une forte mobilisation sociale ? Ainsi, après trois mois de gestion de la Covid-19 et de mise en œuvre de la stratégie de guerre, force est de noter que sur le plan de la gouvernance, Macky a cherché un consensus politique alors qu’il fallait trouver un consensus communautaire.
Sur le plan de la communication du gouvernement sur la Covid-19, celle-ci a été plus une information vers les citoyens (donner le message) qu'une communication avec les populations et les communautés (tisser le lien et nourrir la relation). Sur le plan médical et sanitaire, le gouvernement a plus fait dans la stigmatisation des populations, en les voyant comme des prochaines victimes au lieu de les traiter comme des acteurs, les acteurs de leurs propres santé-sécurité. Sur le plan social, la manière et la distribution des vivres au Sénégal, se sont déroulées comme dans une situation d'aide alimentaire alors que nous sommes dans une crise humanitaire. En faisant exactement le contraire de comment il est largement admis de procéder sur le plan social en contexte de crise humanitaire. Il y a eu un enchaînement d’impairs que cause souvent, la panique et une mauvaise gestion de la peur, quand on prend des décisions dans l’affolement.
Les enseignants – ceux du cours maternel autant que ceux des universités – forment une armée noble aux exploits quotidiens, jamais chantés, jamais décorés. Armée toujours en marche, toujours vigilante
« Les enseignants – ceux du cours maternel autant que ceux des universités – forment une armée noble aux exploits quotidiens, jamais chantés, jamais décorés. Armée toujours en marche, toujours vigilante. Armée sans tambour, sans uniforme rutilant. Cette armée-là, déjouant pièges et embûches, plante partout le drapeau du savoir et de la vertu »
Mariama Ba, Une si longue lettre Je me veux très succinct pour ce qui va suivre. En fermant les yeux, en cette veille de la reprise des enseignements-apprentissages, je vois la figure de mon professeur de portugais de la classe de 2nde s2 du lycée Ibou Diallo de l’année scolaire 2006-2007 lisant à notre intention la lettre ouverte du Cusems. J’ai perdu l’exemplaire de cette poignante missive qui me fit verser des larmes. Plus de dix ans après, c’est en enseignant que je me rends compte que rien n’a changé, ou du moins pas grand-chose, dans la condition de traitement de ces soldats du savoir.
Etre enseignant, c’est une vocation, un sacerdoce. Senior Barry avait lu le texte en un mardi soir en faisant les cent pas entre les rangées. La démarche assurée, la voix de stentor et la gestuelle dont le balancement de la tête m’ont fait saisir la gravité de la situation. C’était pour la satisfaction de la plateforme revendicative que le collège de syndicats Cusems avait observé des jours de grève.
Le ministre Sourang, ne pouvant répondre aux attentes pourtant si raisonnables et légitimes de nos maitres, avait demandé, pour sauver l’année, que nous autres élèves soyons évalués pour passer en classe supérieure sur la base de la seule moyenne du premier semestre. Le monstre froid dont parlait Nietzsche venait de montrer que les enfants de la république seraient les agneaux du sacrifice au lieu d’ajuster les dépenses faramineuses de la classe politico-affairiste sur la santé et l’éducation. Ce fut pénible tant l‘incertitude avait gagné les esprits. Finalement, nos dignes et braves maîtres avaient reculé pour avoir compris que la bêtise avait élu domicile dans le cœur de nos gouvernants d’alors. En cette vieille de la reprise des cours suspendus pour protéger les élèves et enseignants de la covid-19, j’ai mesuré la portée de mon choix de suivre les pas de mes maîtres en devenant un des leurs. Travaillant pour semer la vertu et l’amour du beau, du Juste et du Vrai dans le cœur des jeunes de notre pays, les enseignants sont de ceux qui ont un haut degré du patriotisme.
En ployant le genou devant les bailleurs qui financent le secteur éducatif, l’Etat a décidé d’envoyer les enseignants et les élèves, futurs élites de ce pays, au front d’une guerre sanitaire aux conséquences probablement désastreuses pour la nation. Qu’en sera-t-il de la relève après l’effondrement ?
Avec les mesures barrières édictées par les autorités sanitaires, je subirai une amputation dans la gestion de ma salle de classe. Je ne saurai faire les cents pas entre les rangées pour vérifier la prise de note des élèves, je ne saurai donner une barre de craie à l’un d’eux pour la correction d’un exercice au tableau, je ne saurai et je ne saurai… Ils se méfieront de moi comme je me méfierai d’eux. Ce sera très pénible !
Ainsi, la relation pédagogique subit un sacré coup. Tout cela à cause d’un diabolique projet de vouloir mettre en mal les enseignants et les populations. La détermination et le don de soi de cette armée sans armure en fer ou acier ont eu raison de la monstruosité des politiques. Et demain, nous irons à l’école !
ALOYSE DIOUF QUITTE LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ
Le Directeur de Cabinet d'Abdoulaye Diouf Sarr va rejoindre l'OMS Sénégal
C’était la der, pour Dr Aloyse Waly Diouf. Le Directeur de Cabinet du ministère de la Santé et de l’Action sociale a présenté, pour la dernière fois, la situation du jour de l’évolution du coronavirus au Sénégal. Pour cause, il a annoncé sa démission du département ministériel. Une nouvelle mission l’attend au bureau de Dakar de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Sur sa page Facebook, il a adressé un message à l’endroit de son désormais ex patron, le ministre Abdoulaye Diouf Sarr : « Aucune séparation n’est facile ! Monsieur le Ministre, cher ADS (Abdoulaye Diouf Sarr), si au moment d’écrire ces lignes ,ma plume trahit les effluves de mon esprit. C’est parce que ma reconnaissance envers vous à jamais ne tarira. En vous j’ai découvert un leader, un meneur d’hommes et de femmes, un homme qui inspire confiance et qui sait faire confiance. Ces trois années vécues à vos côtés m’ont beaucoup forgé. Aujourd’hui, je vous remercie d’avoir accepté que je puisse partir vers un autre challenge. Vos conseils avisés et vos encouragements me permettront sans doute de faire face à ce nouveau défi. Merci Mr le Ministre, cher ADS ! Diokondial (merci, en sérère) ! »
Selon nos informations, il devrait être remplacé à la direction du Cabinet ministériel par Alphonse Ousmane Thiaw, actuel Conseiller technique du Directeur de la Pharmacie nationale d’approvisionnement, chargé des affaires juridique et du contentieux.
L’INQUIÉTUDE DES ENSEIGNANTS POUR LA RÉOUVERTURE DES CLASSES À LA UNE
Les quotidiens reçus vendredi à l’APS semblent douter de la capacité du gouvernement à rouvrir convenablement les classes d’examen dès la semaine prochaine et à organiser des examens scolaires sans couacs.
Dakar, 19 juin (APS) – Les quotidiens reçus vendredi à l’APS semblent douter de la capacité du gouvernement à rouvrir convenablement les classes d’examen dès la semaine prochaine et à organiser des examens scolaires sans couacs.
‘’Alors que le ministre de l’Education est déterminé à faire reprendre les cours pour les classes d’examen, jeudi prochain, les syndicats d’enseignants traînent les pieds et multiplient les préalables’’, écrit Le Témoin Quotidien. Il ajoute que ‘’les syndicats d’enseignants dénoncent une reprise ‘précipitée’‘’ des enseignements suspendus depuis le 16 mars en raison de la pandémie de coronavirus qui a fait 76 morts au Sénégal, selon le ministère de la Santé.
Certains syndicats d’enseignants reprochent au gouvernement d’avoir choisi unilatéralement la date du 25 juin pour la reprise des cours dans les classes d’examen.
Le Témoin Quotidien estime que le gouvernement ne cherche qu’à ‘’tout faire pour organiser les examens, mais pas de finir le programme scolaire’’. Et ce qui pourrait découler de cette attitude, poursuit le même journal, c’est que les enseignants en arrivent à ‘’bachoter pour préparer intensément les élèves dont l’unique objectif est de réussir à l’examen, bien sûr, au détriment du savoir’’.
Source A relaye les complaintes du G7, une fédération de syndicats d’enseignants, qui déclare que ‘’le gouvernement sera tenu comme seul et unique responsable de tout ce qui peut arriver’’ à la suite de la décision jugée unilatérale de rouvrir les classes d’examen dès la semaine prochaine.
‘’Au sortir de sa réunion d’hier, le G7 retient que cette date n’engage que le gouvernement du Sénégal’’, lit-on dans le journal.
WalfQuotidien estime que la reprise des cours, le 25 juin, ‘’est partie pour être hypothétique’’. ‘’Nous avons déjà rencontré Monsieur le ministre [de l’Education] à la date du vendredi 12 juin 2020. Et lors de cette rencontre, il était question qu’on mette en place un comité stratégique pour (…) trouver ensemble la meilleure période qui pourrait nous permettre de reprendre les enseignements et apprentissages dans un cadre scolaire sein et sécurisé’’, écrit le même journal, citant Malick Youm, responsable d’un syndicat d’enseignants.
Le hic, selon M. Youm, c’est que, ‘’aujourd’hui (…) on nous dit que le ministre a déjà proposé une date’’. ‘’C’est vraiment une surprise’’ pour les enseignants, dit-il.
Selon Tribune, la question que ‘’tout le monde se pose est de savoir si toutes les conditions sanitaires sont remplies pour éviter une vague de contaminations en milieu scolaire’’, puisque la pandémie de coronavirus continue de se propager au Sénégal.
‘’Cette interrogation vient (...) à son heure, quand on sait que des enseignants avaient choppé le virus, poussant les autorités à reporter la rentrée qui était prévue le 2 juin dernier’’, poursuit le même journal.
Les ministres chargés de l’Education et de la Formation professionnelle semblent répondre à la question en affirmant dans un communiqué conjoint relayé par EnQuête que ‘’la volonté de tous les acteurs de sauver l’année scolaire sera toujours sous-tendue par le respect strict du protocole sanitaire validé par le Comité national de gestion des épidémies, afin de garantir la sécurité sanitaire des apprenants et des enseignants’’.
Mieux, Mamadou Talla et Dame Diop assurent que ‘’les ministères concernés ont pris les dispositions nécessaires pour reprendre les enseignements et apprentissages dans les meilleures conditions possibles, à travers une démarche inclusive’’.
Le G7, selon L’As, se désole pourtant de la démarche ‘’unilatérale’’ du gouvernement. Il n’y a donc pas eu de ‘’démarche inclusive’’, selon ses dirigeants. Le résultat, selon L’As : ‘’Les enseignants rejoignent les classes en colère.’’
‘’Le secrétaire général du Sels/A (un syndicat d’enseignants), Abdou Faty, a tenu à clarifier que la date du 25 juin a été prise unilatéralement par le gouvernement sans concertation avec les partenaires sociaux’’, rapporte L’As.
par l'éditorialiste de seneplus, Emmanuel Desfourneaux
IL FAUT UN GOUVERNEMENT D’UNION NATIONALE
EXCLUSIF SENEPLUS - D'aucuns au sein de l’opposition rêvent du chaos et pensent en tirer un avantage. Ont-ils conscience de l’importance de la crise qui attend le Sénégal ?
44 % oui, 56 % non ! C’est le résultat d’un sondage que j’ai réalisé sur un gouvernement d’union nationale au Sénégal. Sans valeur scientifique, il nous informe cependant sur une tendance : l’unité nationale, fer de lance de la lutte contre la Covid-19 au tout début de la pandémie, se désagrège depuis déjà quelques semaines. Tandis qu’à Bamako le président malien a annoncé la constitution prochaine d’un gouvernement d’union nationale ; qu’en France, des voix s’élèvent en faveur d’un gouvernement de salut public ; que la rumeur à Dakar d’un remaniement ministériel, avec un possible retour de la primature, se fait grandissante.
Au Sénégal, les querelles politiciennes, les joutes verbales sont de retour malgré un SARS-CoV-2 circulant toujours fortement. Que s’est-il passé depuis la mi-mars où la popularité de Macky Sall n’avait jamais été aussi élevée en 8 ans ? La solidarité nationale, symbolisée à travers l’appel à toutes les formations politiques, était plutôt sur la bonne voie : Ousmane Sonko avait même fait le déplacement dans l’ancienne résidence du gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française !
A Dakar, la paix des braves est derrière nous, le peuple s’impatiente ; la vie politique (politicienne) a repris ses quartiers ; chacun retrouve sa place sur l’échiquier politique : le FRN plutôt docile avec le pouvoir a quitté le comité de suivi de Force Covid-19. Un climat insolite règne sur fond de pandémie : des anciennes affaires sont déterrées du Journal officiel ou alors des nouvelles surgissent du littoral ! De son côté, le pouvoir gouverne comme si de rien n’était, en état d’urgence sanitaire.
C’est la faute de Macky Sall ! L’unité nationale implique au minimum une collaboration transpartisane. La crise de la Covid-19 était une occasion rêvée de transformer le Dialogue national (trainant en longueur) en cogestion inédite. A contrario, cette crise sans égale est gérée de façon solitaire. Aucune mesure politique de rupture n’a été arrêtée ou envisagée : les transhumants se taillent la part du lion ou du port autonome de Dakar ! Macky Sall n’a pas réussi à restaurer une confiance auprès de ses détracteurs.
C’est la faute de l’opposition ! Cette dernière, en dépit de la hauteur des défis qui se dressent devant le Sénégal, ne parvient pas à prendre du recul par rapport au schéma traditionnel des débats entre majorité et opposition. Celle-ci n’a que pour horizon la prochaine alternance éloignée de 2024 et le renversement du pouvoir en place. Ce qui se passera entre-temps incombera exclusivement à Macky Sall, seul comptable ! Les commentaires des sondés sont sans appel sur ce sujet. Le bon positionnement de l’opposition, c’est contre Macky Sall. Pour les militants des différents partis de l’opposition, il ne faut pas tomber dans le piège d’un gouvernement de concorde nationale. Non seulement Macky Sall limiterait leur champ d’actions mais se servirait du gouvernement d’union nationale en rampe de lancement vers la présidentielle.
C’est la faute du système politique en général ! Il faut pardonner au président et à son opposition. La Covid-19 n’a pas eu l’effet escompté sur la classe politique sénégalaise. Le miracle ne s’est pas produit pour l’instant ! Les politiques ont toujours utilisé le gouvernement d’union nationale sous forme de deal. Ce type de coopération s’inscrit dans les jeux politiques du Palais pour une grande majorité de Sénégalais. Ce fût le cas de Me Abdoulaye Wade avec la promesse d’un tel exécutif s’il était réélu en 2012. Ce fût le cas d’Abdou Diouf en 1995 lorsqu’il constitua un gouvernement de cohabitation alors qu’il n’y avait pas de crise politique majeure au Sénégal en dehors d’une crise interne au PS et une rébellion urbaine.
Mon sondage est à prendre avec des pincettes. Ce sont les militants et activistes qui ont majoritairement voté. Un responsable de l’APR m’expliquait qu’il n’y avait aucune raison d’élargir le gouvernement. C’est plutôt l’inquiétude d’une limitation des parts ministrables qui est en cause pour son camp. En réalité, à l’échelle nationale, le rapport de force serait plutôt favorable à un gouvernement d’union nationale. Dans d’autres pays, le oui monte jusqu’à 70 % avec 65 % de méfiance à l’égard du gouvernement.
Comme le souligne les précédents chiffres qui sont loin d’être contradictoires, le gouvernement d’union nationale est une « demande sociale ». Le concept de l’union nationale porte avant tout sur le rejet de la classe politique et le désenchantement du monde politique et tout ce qui y gravite autour, à l’exemple de certains journalistes devenus apparemment des usufruitiers du littoral !
Les militants de l’opposition font donc une mauvaise lecture du gouvernement d’union nationale. C’est une mobilisation du peuple contre la défaillance du pouvoir face à un péril et/ou face à la reconstruction d’un pays. Jamais un tel gouvernement dans l’histoire du Sénégal n’a été aussi indispensable et salutaire tant le défi d’un Etat stratège est important face aux futures conséquences de la Covid-19.
D’ailleurs, le dernier mot appartient-il aux militants ? Lorsque Me Abdoualye Wade décida de faire retourner sa formation politique au gouvernement en 1995, il a été assimilé à un traitre. Ce n’est ni le PDS ni le PS qui étaient à l’initiative de ce gouvernement d’union nationale. C’était grâce à la détermination de Diouf et de Wade.
Si les opposants dits patriotes rejetteraient à coup sûr toute entrée dans ce genre de gouvernement, les autres partis politiques de l’opposition tireraient leur épingle de jeu. C’est le cas du PDS qui, depuis le début de la pandémie, s’est démarquée par sa dynamique nationale. Pourquoi alors s’arrêter à mi-chemin et se recroqueviller dans une opposition radicale ? Quel gâchis ! Cette remarque vaut aussi pour la coalition Taxawu Senegaal et Rewmi.
Evidemment, plusieurs obstacles devront être levés et pas des moindres ! En tout premier lieu, l’assurance formelle que le président Macky Sall ne se présentera pas pour un troisième mandat. Cette question est cruciale pour empêcher les jeux politiciens. Le règlement des affaires judiciaires de Karim Wade, de Khalifa Sall (sur la base des condamnations internationales, les dossiers des 2 K ne sont pas clos) et d’Abdoulaye Baldé devra être garanti. Aucun membre de la famille du président ne ferait partie de ce gouvernement. Idrissa Seck pourrait être choisi officiellement comme chef de l’opposition (ou Premier ministre selon la rumeur ! Dans ce cas-là, cette fonction échoirait au PDS) avec une approche constructive en vue de conserver l’esprit d’élan national. Des personnalités issues de la société civile seraient appelées comme le Pr Moussa Seydi, ministre de la santé pour tous ; Ibrahima Dème, ministre de la chose publique et de la transparence, ou encore Alioune Tine, ministre des libertés publiques inviolables. En effet, tous les ministères porteraient de nouvelles appellations autour de trois grands axes : Liberté, chose publique (plus de gouvernance de la République en fonction des biens privés de clans ; plus de caisses noires !) et patriotisme (industrialisation, agriculture et culture).
Surtout, afin d’éviter l’échec du gouvernement d’union nationale où d’assez rares précédents ont été fructueux, celui-ci serait programmé pour une durée limitée de deux ans, à savoir jusqu’en septembre 2022. Cela devrait suffire pour associer l’opposition la plus représentative aux futures grandes orientations politiques du Sénégal autour des trois grands axes Liberté-Chose publique-Patriotisme. Ainsi le landerneau politique serait neutralisé, en hibernation pour ne se consacrer qu’aux intérêts du peuple. Ce dernier pardonnerait aux membres de l’opposition car leur démarche aura été dictée par le bon sens politique et par la volonté de redonner de l’espoir (avant 2024 !). Deux ans après, chacun retrouvera sa place naturelle et vaquera à ses activités d’opposants dans la perspective des élections intermédiaires et présidentielles. D’ici là, espérons que le travail des uns et des autres aura porté ses fruits !
Je suis conscient que certains perçoivent cette proposition comme faisant partie de la matière de « l’utopisterie », que certains membres de l’opposition ne voient pas ce qu’ils pourraient gagner à s’embarquer dans une telle aventure politique aux côtés de leur bourreau et d’un président fragilisé. Mais faudrait-il attendre jusqu’en 2024 et « abandonner » le peuple sénégalais à son sort (pour reprendre l’expression d’Ousmane Sonko) ? Ont-ils pris conscience de l’importance de la crise qui attend le Sénégal ? Vont-ils faire dans le pantouflard politique : « Y’a qu’à… » ?
Je sais aussi que d’aucuns au sein de l’opposition rêvent d’une situation de chaos. Ils pensent en tirer un avantage. Ils laisseraient sous-entendre à leur candidat que leur situation personnelle s’éclaircirait dès lors. C’est un risque qu’ils font courir inutilement ! Parier sur l’instabilité s’avère très souvent lourde de conséquences. Et les sénégalais n’aiment pas le désordre politique.
Pour rassurer les partisans de Macky Sall, prenons exemple sur Abdou Diouf ; il déclarait en 1995 : « j’ai été élu démocratiquement président de la République…mais ce n’est pas une raison pour gouverner seul…soyons cependant clair…j’entends rester le maître du jeu ». Le choix démocratique de février 2019 serait donc respecté.
Si le prochain remaniement ministériel à la rentrée, vers septembre, s’opère dans une logique de Dialogue national (calculs politiciens pour diviser l’opposition), il sera voué à l’échec. Si le prochain remaniement fait encore la part belle à BBY (même si cette majorité présidentielle embrasse des partis libéraux et de gauche), il ne faudra pas parler d’union nationale, il ne s’agit que d’une coalition électorale ayant obtenu la majorité ! Ces deux types de gouvernement pourraient être minoritaires au regard de l’évolution de l’électorat sénégalais. Rien ne changera ! Il ne s’agit pas de coopter ses copains de la République mais d’aller plus haut, plus loin, vers un gouvernement de salut public, indifférent aux ambitions politiques des uns et des autres. Et ce pendant deux ans !
J’anticipe une critique : mais pourquoi le Sénégal serait-il l’un des rares pays à consacrer un tel gouvernement ? Pardi ! Car le Sénégal ne ressemble à aucun autre pays et servirait de modèle au monde entier contre les conséquences d’une crise jusqu’alors jamais vécue. L’heure est à l’unité nationale. Alors, jouez le jeu ! Le monde vous regarde !
EXCLUSIF SENEPLUS - Engageons la bataille, ici et maintenant, en déboulonnant non pas que les statues en bronze ou en pierre qui encombrent nos avenues mais aussi les statues mentales où sommeille notre bestialité
Hamadoun Touré de SenePlus |
Publication 18/06/2020
«Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons tous mourir ensemble comme des idiots». (Martin Luther King)
Georges Floyd, cet autre nous-mêmes, immobilisé, perclus, menotté dans le dos, cou écrasé par ce genou triomphant de lâcheté. Oui, la nausée, plus que la frustration, la colère et l’indignation.
Dans sa prude définition, la nausée est une sensation physiologique due à une forte indigestion ou ce sentiment de mal-être existentiel décrit par Jean- Paul Sartre, dans un roman éponyme publié en 1938. Dans cette terre lointaine d’Amérique, la nausée, cette fois-ci, nous étripe car sont franchies les bornes qui régulent nos valeurs.
Cette nausée empêche de dormir, de travailler, de gouverner, de vivre, de respirer, rend inconfortable l’insouciance de ceux qui croient que rien ne les concerne. Pression qu’aucune condamnation même comminatoire ne peut faire baisser. Reste cette envie irrépressible de vomir.
Avec l’assassinat de Georges Floyd, froidement exécuté par une asphyxie lente et délibérée, au-delà de Minneapolis, la cité du crime, des Etats-Unis, du Canada, de l’Australie, de l’Amérique Latine, de l’Europe, c’est l’Afrique, continent de ses origines, qui est de nouveau mortellement agressée. Deux cents pays, plus que les membres de l’Organisation des Nations Unies ont, dans diverses clameurs, crié révolte et indignation.
La bile déversée et les vociférations dans la rue, les condamnations dans les réseaux sociaux et les journaux ou sur les plateaux de télévision ainsi que le deuil planétaire rendent compte de l’insupportable enduré par notre corps et notre âme, en dépit de la fréquence des meurtres dans un pays incapable encore de tenir pour criminogène la liberté constitutionnelle de posséder une arme.
L’agent de police Derek Chauvin, ce nom qui se définit de lui-même, dans son effroyable odyssée, a illustré la haine de son prochain. Il avait l’impression d’étouffer un sous-homme. Un Noir.
Les Noirs américains et des autres pays du monde
ont exprimé leur colère. Des Blancs américains et d’autres continents leur honte. Et ensemble, tous, en tout cas nombreux, races et religions confondues, ont eu la même nausée devant le meurtre inutile, insensé de Georges Floyd. Bestialité abjecte, indiscutable, saisie en direct.
Hommage de rang planétaire
A Minneapolis, le policier Chauvin a ouvert le sinistre chapitre dans les annales policières de l’arrestation suivie de meurtre en moins de neuf minutes. Même le pouvoir égalisateur de la Covid-19 n’a pu lui dire que nous étions tous une seule et même humanité.
Avec cette barbarie, il y a désormais un avant et un après George Floyd, devenu, en une semaine, l’icône des victimes du racisme ordinaire et gratuit.
Personne n’attendait que ce crime fût commis par un de ceux qui ont fait serment de protéger les citoyens quelle que soient la couleur de leur peau, la texture de leurs cheveux, leur confession, leur sexe et leur nationalité.
En hommage posthume à Georges Floyd, des hommes d’État, stars de cinéma, écrivains célèbres, vedettes du monde sportif et de la scène musicale se sont mobilisés pour battre le macadam en une symphonie unique, bien au-delà de leurs origines raciales et nationales, leurs langues et leurs idéologies. Tous ont crié leur honte d’être de la même espèce humaine que le bourreau de Minneapolis et ses trois acolytes, complices impavides du supplice d’un être humain mis à terre.
Partout et, hélas, de tout temps, il y a eu des George Floyd mais leur terrible agonie n’avait pas été éclairée, avec une telle exactitude, par les technologies de l’information et de la Communication.
Oui, la même nausée ressentie devant chaque acte où « l’homme est un loup pour l’homme », comme dans le Léviathan de Thomas Hobbes. Les coupables ne sont pas que des policiers au racisme avéré et au professionnalisme douteux.
Au registre de ces moments de honte de l’histoire de l’humanité, il nous faut citer, sans être exhaustif, la traite des Noirs, l’esclavage, l’Apartheid, les guerres de religion, les génocides, les pogroms, les dictatures qui remontent soudain dans notre mauvaise conscience. Deux exemples africains : le bouffon de sinistre mémoire Idi Amin Dada en Ouganda et Jean Bedel Bokassa, le mégalomane comique Empereur de Centrafrique. Ces personnages ubuesques ont tous été déchus en l’an de grâce 1979.
Délinquance politique et économique
Pour autant ces chutes salutaires n’ont pas, loin s’en faut, empêché la corruption de nos valeurs. Sous le vernis de la démocratie, des dirigeants accaparent toujours l’État et ses richesses au profit d’une oligarchie sans foi ni loi. Encore la nausée.
Certains, imposteurs parvenus dans les hautes sphères du pouvoir, rompus à la ruse politique, appuyés par des initiés des arcanes juridiques, entreprennent le tripatouillage des constitutions. D’autres, se présentant comme les défenseurs vertueux des « intérêts supérieurs » de la nation, ont pour sport favori le trucage des élections avec la complicité d’institutions à leur solde.
Ces exemples de délinquance politique, économique et financière commise et favorisée par l’exercice du pouvoir, sont pour le petit peuple l’occasion de vomir sa bile pour pouvoir respirer.
La nausée prend alors la forme de pneus brûlés, de barricades, de biens publics détruits. Excès nés d’une longue résignation qui veut respirer. Les dirigeants doivent y prendre garde : nos pays ne vivent-ils pas menottes aux poignets et genoux sur le cou ? N’assouplissent-ils pas la pression juste le temps de laisser passer le minimum d’air pour éviter un étouffement auquel eux-mêmes n’échapperont pas ?
Quand aurons-nous la nausée en même temps, pour les mêmes raisons et au même endroit, pour desserrer cette étreinte que nous endurons depuis plusieurs siècles ? Quand allons-nous entendre l’alerte pleine de lucidité et d’actualité de Martin Luther King « Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons tous mourir ensemble comme des idiots ».
Une lueur d’espoir que nous observons avec prudence pointe toutefois à l’horizon. A peine son inhumation terminée dans la ville de son enfance à Houston, l’après George Floyd se dessine avec la sensation que le monde entier prend conscience que tous les hommes appartiennent au genre humain. Et aussi cette volonté affichée de s’attaquer au mal à sa racine avec la chasse aux esclavagistes et aux racistes.
Préjuges suprématistes
La mobilisation non raciale, unique par sa taille dans notre histoire contemporaine, cherche à comprendre et à éliminer les préjugés qui ont nourri tant de Chauvin, pullulant dans les cercles politiques et sécuritaires, les milieux religieux, le monde de la finance ainsi que celui de la pensée. Il leur a été seriné, sur des générations, la supériorité de leur race. Ils sont les héritiers malheureux d’une prétendue suprématie au nom de laquelle ils ont arrêté et soumis, exploité et maltraité, condamné et exécuté les autres pour les obliger à accepter et à perpétuer un complexe d’infériorité.
Cette nouvelle guerre pour humaniser l’homme est à saluer. Elle sera gagnée lorsqu’on lira sur les pancartes, non pas « la vie des Noirs compte », (Black Lives matter) mais « toute vie compte » (All lives matter).
Une bataille de longue haleine a commencé. Elle est à la portée de notre intelligence. Engageons la, ici et maintenant, en déboulonnant non pas que les statues en bronze ou en pierre qui encombrent nos avenues mais aussi les statues mentales où sommeille notre bestialité.
Quel risque prend t-on vraiment à accompagner ces jeunes entreprises à gagner leurs premières DRP qui leur permettraient d’engranger leurs premiers revenus et de décoller ?
La crise du Covid-19 a bouleversé le fonctionnement des économies du monde, de l’Afrique et du Sénégal en particulier. L’une des principales leçons que nous pouvons retenir de cette crise est que les économies africaines, déjà fragiles, vont subir directement les conséquences économiques de la pandémie de coronavirus, même si le continent résiste sur le plan sanitaire.
Les prévisions d'avant la crise promettaient de bons taux de croissance. Mais certains secteurs clés connaissent déjà un fort ralentissement en raison de la pandémie. Le tourisme, le transport aérien et le secteur pétrolier sont fortement impactés.
Pourtant, nos pays et nos dirigeants font face à une situation inédite et à leurs responsabilités, pour nourrir, soigner, loger, éduquer, créer de la richesse et générer des revenus décents à leurs populations sans l’aide extérieure.
Aujourd’hui à l’unanimité, les experts préconisent le retour à une dynamique de développement endogène tant souhaitée mais qui tarde à se concrétiser. Malgré toutes ses difficultés, le continent s’est montré cependant résilient et a déjoué tous les pires pronostics, ancrés dans des schémas et stéréotypes tellement profonds concernant l’Afrique, qu’il n’était même pas envisageable que l’on puisse s’en sortir.
Bravo donc à nos dirigeants, bravo à nos corps médicaux, bravo à nos populations, habitués à faire front dans l’adversité.
Au Sénégal, le président de la République a lancé une initiative forte à l’échelle mondiale pour l’annulation de la dette Africaine. La question suscite débat et diverses positions en ressortent. Certains pensent qu’une annulation de la dette pose un problème de crédibilité du pays et le replongera à nouveau dans le cercle vicieux du réendettement. Pour d’autres, l’annulation s’impose.
Mais quel est donc la problématique et pourquoi cet appel du président Macky Sall ? Face à la crise, les pays occidentaux pour soutenir et relancer leurs économies se sont massivement endettés à des taux nuls voir même négatifs. Beaucoup de voix en Occident s’élèvent pour purement et simplement réclamer l’annulation du remboursement de ces apports massifs en capitaux afin de désengorger leurs économies.
L’Afrique quant à elle, même si l’on doit admettre que sa dette n’est finalement pas aussi élevée qu’elle ne le parait, consacre presque 40% de son budget au paiement du service de la dette. Contrairement aux occidentaux, pour une relance massive de leurs économies les pays africains peuvent bénéficier de prêts allant jusqu’à 6% de taux d’intérêts, auxquels on doit ajouter le remboursement des prêts en cours. Il est donc clair que nous ne nous en sortirons pas aussi vite, vu que nous ne sommes pas égaux face aux mécanismes financiers de relance.
Voilà pourquoi il est important de mener la bataille de l’annulation de la dette, nerf de la guerre pour la croissance africaine. Il faudrait la mener pour éviter que tous nos efforts de développement depuis des décennies soient anéantis, mais il faudrait surtout la mener pour mettre nos matières premières à l’abri face à notre vulnérabilité du moment.
L’appel du président Macky Sall tombe à pic et est donc stratégique. Nous, jeunesses sénégalaises, mobilisons-nous et soutenons cet appel dans les réseaux sociaux, afin que nos voix soient entendues et qu’elles comptent pour notre avenir.
Monsieur le président de la République, il est cependant important que nos dirigeants africains et Vous-même, teniez compte de cette jeunesse africaine et sénégalaise, décomplexée, prête à affronter ces lendemains de défis économiques, que ce soit par rapport à la monnaie ou l’affirmation d’un continent fort économiquement, socialement, culturellement pour un rayonnement et un développement durable.
Des réorientations et réorganisations fortes, avec comme fer de lance cette jeunesse de toutes obédiences et milieux sociaux confondus, fédérée par une politique de bonne gouvernance plus accentuée, viendront sceller la réconciliation entre les gouvernants et leurs jeunesses.
Mais quel modèle économique adopté pour un développement endogène durable et solidaire ?
Prenons le cas de la Suisse pour risquer la comparaison, quels sont ses produits phares avec lesquels elle a bâti sa notoriété outre les produits financiers ? Le chocolat, les montres et le fromage. Voilà un pays qui ne dispose d’aucune matière première comme la plupart des pays européens.
N’avons-nous pas aussi nos montres qui n’ont rien à envier aux montres suisses telles que Mathidy, Malado, et Wild feeling Sénégal ? Quid du délicieux fromage des moines de Keur Moussa ? Toutes ces entreprises ou initiatives championnes sont condamnées à faire leurs publicités sur Facebook (même si Facebook demeure aujourd’hui l’un des outils Marketing les plus puissants au monde). Pourquoi ne bénéficient-elles pas du Marketing pays ? Quel est finalement le produit phare du Sénégal ?
Uniques au monde, les tapisseries de Thiès sont les créations sénégalaises les plus connues au monde. Un célèbre président des Etats-Unis d’Amérique voulant parler du Sénégal lors d’une réunion et ne se souvenant plus du nom de notre pays, disait à ses collaborateurs « le pays de la tapisserie ». Le président Senghor avait été bien inspiré de créer les tapisseries de Thiès. Le moment n’est-il pas venu de diversifier cet art en déclinant de nouvelles lignes de produits (tapis, maroquineries, meubles, accessoires) avec le concours de designers sénégalais ?
Si la jeune et talentueuse sénégalaise Selly Rabi Kane (Seraka) a été sélectionnée par Ikea, géant du meuble européen pour participer à un programme de création d’univers africains du meuble, pourquoi des produits dérivés de nos tapisseries ne pourraient-elles être valorisées par nos jeunes talents ? Je pourrais vous citer tant d’autres champions tous secteurs confondus.
Excellence, les jeunesses africaines éclairées se battent pour la réappropriation culturelle du patrimoine matériel et immatériel du continent et la nécessité de leurs codifications et normalisations, car l’Afrique ne profite pas assez de son patrimoine. Prenons l’exemple du Wax qui est devenu aujourd’hui un élément essentiel de la mode planétaire et dont les retombées économiques ne profitent guère au continent, que ce soit en production de tissu ou en produits manufacturés. La seule vraie demande reste locale.
Monsieur le président de la République, sortons des sentiers battus, osons notre développement endogène. Les matières premières ne sont pas finalement les ressources les plus importantes dont nous disposons. Changeons de paradigme, et relevons ensemble le défi de l’industrialisation. Bougeons, bougeons, bougeons, suivons le move de cette jeunesse créatrice et mobilisée. Réarmons-nous moralement, culturellement et civiquement. Vous seul avez aujourd’hui le pouvoir, les prérogatives et l’initiative d’impulser une vraie dynamique d’un nouveau Sénégal en mouvement, en phase avec sa jeunesse. Elle est brillante, dynamique et pleine d’initiatives. Accompagnons ces vaillants jeunes en leur facilitant le parcours du combattant de l’entrepreneur semé d’embûches et décourageant.
Certes tout le monde n’est pas fait pour entreprendre mais chacun a des qualités et des talents parfois même méconnus. Combien de jeunes veulent entreprendre au Sénégal et ne disposent pas des moyens financiers ou accompagnements nécessaires, ne serait-ce que pour rédiger leurs projets ? Passé cette étape, tout dossier bancable sérieux exige nécessairement un siège physique de l’entreprise dont beaucoup ne disposent guère. Le troisième obstacle est l’absence de revenu fixe pour se concentrer sur son projet. Voilà pourquoi beaucoup de jeunes abandonnent même avant d’avoir commencé à entreprendre. Ne serait-il pas judicieux d’aider ces jeunes et leur garantir un revenu minimum le temps de l’incubation et leur permettre de gagner leurs premiers marchés en relativisant le nombre d’années d’expériences requis pour leurs faciliter l’obtention de ces premiers marchés ? Quel risque prend t-on vraiment à accompagner ces jeunes entreprises à gagner leurs premières DRP qui leur permettraient d’engranger leurs premiers revenus et de décoller ? Est-il possible d’introduire une clause dans le code des marchés publics pour les entreprises débutantes, ne serait-ce que leur accorder un pourcentage minimum de la commande publique ?
Excellence, vous avez posé les premiers jalons, je dirais même les bons jalons dans l’accompagnement et la création de PME et PMI, j’en veux pour preuve, le FONSIS, le Fongip, la BNDE, L’ADEPME, la DER, le fonds d’impulsion de la micro finance et j’en passe… Mais au-delà de ces mécanismes et instruments mis en place, les problèmes décrits plus haut demeurent.
Que nous manque-t-il donc ? A mon humble avis deux éléments essentiels :
1-Le renforcement du Bureau de Mise à niveau des Entreprises du Sénégal, un des éléments fondamentaux du secteur, mais très peu connu des sénégalais. Pour rappel l’expérience de mise à niveau des entreprises a été réalisée vers la fin des années 1990 en Europe pour permettre la mise à niveau des entreprises des pays du Sud de l’Europe pour préparer leur adhésion à l’UE. Ce qui a offert à ces pays des résultats probants. Boostons donc notre Bureau de mise à niveau en lui donnant aussi pour mission de formaliser le maximum d’initiatives économiques individuelles.
2- La concrétisation et l’accessibilité du label made in Sénégal. Nos jeunes entrepreneurs ne maitrisent dans un premier temps que leurs idées. Les difficultés liées à l’entreprenariat et les exigences économiques et sociales à court, moyen et long terme nous commandent de les incuber massivement secteur par secteur avec au sortir des entreprises ou des industries labélisées clés en mains.
Monsieur le président, osons l’accélération avec pour objectif 1 million de PME-PMI labélisées pour la décennie à venir. Naturellement un objectif aussi ambitieux nécessite la maitrise de nos chaines de valeurs et des débouchés pour les produits manufacturés. Ces débouchés existent aujourd’hui avec la matérialisation prochaine de la ZLEC qui est l’une des priorités de L’Union Africaine.
En tout état de cause, le numérique devrait être le facteur accélérateur et le coefficient de compétitivité de cette nouvelle dynamique post Covid-19. Le Sénégal est l’un des meilleurs dans le domaine du numérique en Afrique, mais les résultats restent encore moyens. L’après Covid-19 nous impose une nouvelle réorganisation. Réadaptons donc notre stratégie numérique au profit de tous les secteurs et particulièrement à celui de l’entreprenariat.
Respectueusement Vôtre
Couro Wane est militante de l’Alliance pour la République.
POURQUOI LA CHINE INVESTIT L'AFRIQUE
Partenaires privilégiés, la Chine et l’Afrique affichent une relation qui se veut « gagnant-gagnant ». Mais est-ce vraiment le cas ?
Le Monde |
Antoine Schirer et Asia Balluffier |
Publication 18/06/2020
Depuis plus d’une décennie, l’activité de la Chine en Afrique intrigue les pays occidentaux. Dans la plupart des pays africains, le partenaire chinois est en revanche loué. En 2009, la Chine est devenue le premier partenaire commercial du continent, devant les Etats-Unis et la France. Ces dernières années, elle a surtout prêté des milliards aux pays africains pour la construction de gigantesques projets d’infrastructures. Un schéma qui rappelle sa méthode dans le cadre des « nouvelles routes de la soie », lancée par le président Xi Jinping en 2014.
Mais les relations entre la Chine et l’Afrique peuvent-elles vraiment être « gagnant-gagnant » ? Et que cherchent vraiment la Chine et son ambitieux président en Afrique ?
Les sources :
1) Chiffres
Données sur l’importance du commerce sino-africain (calculs Thierry Pairault, données CNUCED) : http://bit.do/tableur
Sur l’augmentation de l’endettement en Gambie, au Mozambique et dans plusieurs pays africains à bas revenu : rapport de la Banque mondiale 2019 (chapitre 4) : https://bit.ly/2UOX4H9
Sur tout ce qui concerne la présence de la Chine en Afrique (celle des hommes, des entreprises ou des marchandises), le site du Thierry Pairault, chercheur émérite au CNRS : https://www.pairault.fr/sinaf/index.php