SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
22 avril 2025
Société
L’ANSFES PLAIDE POUR L’APPLICATION DE LA LOI SUR L’ORDRE DES SAGES-FEMMES
La loi sur l’Ordre des sages-femmes et maïeuticiens a été votée le 20 janvier 2017, mais « jusqu’à présent », le décret portant sur son organisation et son fonctionnement n’a pas été pris, a déclaré Bigué Ba Mbodj.
L’Association nationale des sages-femmes d’État du Sénégal (ANSFES) a demandé, lundi, à Dakar, l’application effective de la loi portant création de l’Ordre des sages-femmes et maïeuticiens, votée le 20 janvier 2017, en vue de « garantir des soins de qualité » dans les domaines sanitaires concernés.
La loi sur l’Ordre des sages-femmes et maïeuticiens a été votée le 20 janvier 2017, mais « jusqu’à présent », le décret portant sur son organisation et son fonctionnement n’a pas été pris, a déclaré Bigué Ba Mbodj, présidente de l’Association nationale des sages-femmes d’État du Sénégal.
« Il y a une nécessité de mettre en place un ordre professionnel doté d’une personnalité juridique dénommé Ordre des sages-femmes et maïeuticiens du Sénégal. Une fois fonctionnel, l’ordre permettra de garantir des soins de qualité », a souligné Mme Mbodj.
Elle prenait part à un atelier d’orientation visant à sensibiliser les journalistes sur les enjeux de la création de l’Ordre national des sages-femmes et maïeuticiens du Sénégal.
« L’ordre va intervenir par rapport à la formation des sages-femmes, à la gestion des carrières et au recrutement de ce corps médical. L’ordre est indispensable par rapport à l’offre de services de qualité. Elle va intervenir dans l’ouverture des écoles de formation des sages-femmes », a-t-elle expliqué.
D’après Mme Mbodj, la profession de sage-femme nécessite d’être réglementée pour la conformer aux normes mondiales et doter ce secteur de compétences professionnelles aptes à garantir la sécurité du public.
En perspective de l’entrée en vigueur de la loi déjà votée, l’Association nationale des sages-femmes d’État du Sénégal souhaite la signature d’un décret portant sur un code de déontologie régissant le secteur et d’un arrêté ministériel pour la nomenclature des actes.
« Il faut une autorisation de la mise en place des organes, un décret pour la désignation d’un magistrat pour veiller à la fonctionnalité de l’ordre », a indiqué Bigué Ba Mbodj.
En attendant, ajoute-t-elle, il est nécessaire d’arriver à une meilleure réglementation de la profession sage-femme au Sénégal.
Dans ce sens, Anna Sarr, membre de l’Association nationale des sages-femmes d’État du Sénégal, est revenue sur les objectifs du projet »Twin to win » (Jumeler pour gagner), une initiative mise en place dans l’optique d’un renforcement des connaissances sur la réglementation de la pratique sage-femme.
La sage-femme a indiqué que ce projet « permet d’être impliqué dans le curricula harmonisé de l’Organisation ouest africaine de la santé (OOAS) dont le Sénégal est membre. Elle permet aussi d’assurer la formation des infirmiers et sages-femmes en veillant à la réglementation des écoles de formation ».
« Sur 17 pays membres de la Fédération des associations de sages-femmes en Afrique francophone (Fasfef), 11 pays ont un ordre fonctionnel, en l’occurrence le Mali qui l’a obtenu depuis 1986 », a informé Mme Sarr.
L’Organisation mondiale de la santé reconnait quatre professions médicales, à savoir les médecins, les chirurgiens-dentistes, les pharmaciens et les sages-femmes.
SUR LES TRACES D"ALINE SITOE DIATTA, L’HEROÏNE DE LA RESISTANCE
A Nialou, un petit village paisible de Cabrousse, le souvenir de Aline Sitoé Diatta reste vivace. Là, dans son fief natal, l’histoire de cette figure emblématique de la résistance contre la colonisation continue de se transmettre, de génération en générat
Par Ousmane SOW (Envoyé Spécial) |
Publication 30/12/2024
A Nialou, un petit village paisible de Cabrousse, le souvenir de Aline Sitoé Diatta reste vivace. Là, dans son fief natal, l’histoire de cette figure emblématique de la résistance contre la colonisation continue de se transmettre, de génération en génération.
Lieu historique plus que symbolique, Nialou, ce petit village de Cabrousse, loin des tumultes des grandes villes, des visiteurs ont pris d’assaut les lieux pour découvrir ace lieu chargé d’histoire. Ce voyage touristique s’inscrit dans le cadre du programme Eductour du festival annuel Koom-Koom qui se tient du 16 au 22 décembre 2024 à Ziguinchor. Parfois présentée comme une reine, la prêtresse Aline Sitoé Diatta, née en 1920 à Nialou, est une héroïne de la résistance casamançaise. Surnommée parfois la «Jeanne d’Arc d’Afrique» pour la petite histoire, Aline Sitoé Diatta, à l’instar des filles de la région de Ziguinchor, migre à Dakar à l’âge de 14 ans, où elle travaillait chez les colons. Lamine Diop Sané, président des guides touristiques de la région de Ziguinchor, se fait le narrateur de cette mémoire collective. «Nous sommes à Nialou, le quartier où Aline Sitoé Diatta a grandi avant d’être capturée et déportée à Tombouctou. Elle était la reine-prêtresse de Cabrousse, investie d’une mission divine pour défendre son peuple contre les oppressions coloniales», raconte-t-il. A seulement 14 ans, Aline Sitoé, qui travaillait à Dakar, affirme avoir été appelée par des voix des ancêtres. Elle revient alors en Casamance, déterminée à s’opposer à l’ordre colonial. «Elle a exhorté son peuple à rejeter les activités imposées par les Européens notamment, le paiement des impôts, la culture de l’arachide au détriment du riz et l’enrôlement forcé pour la guerre. Elle prônait également un retour aux traditions, notamment la réhabilitation de l’ancienne semaine diola de six jours», ajoute Lamine Diop Sané.
Un héritage méconnu
Devant la tombe de la fille aînée de Aline Sitoé, Assonelo Diatta, Charles Diatta, responsable de la troupe théâtrale qui porte son nom, revient sur le parcours hors norme de l’héroïne. «L’histoire de Aline Sitoé Diatta, on en parle beaucoup. Mais ce que nous savons, ici à Cabrousse, vient directement de nos parents et grands-parents. Aline Sitoé s’est d’abord mariée ici, avant de divorcer et de partir à Dakar. Elle y a été poursuivie par les esprits des ancêtres qui l’ont appelée à revenir en Casamance pour soutenir son village, Cabrousse, alors en grande difficulté», explique-t-il. Cependant, Charles Diatta déplore une méconnaissance persistante de cette histoire : «A l’école, on apprend des choses sur Aline Sitoé, mais quand on en parle à nos parents, des éléments manquent ou sont flous. Pendant longtemps, nos grands-pères évitaient de parler d’elle, peut-être par peur ou par honte d’avoir laissé son sacrifice leur échapper. Mais aujourd’hui, la jeunesse est passionnée et veut découvrir la vraie histoire.»
Aline Sitoé Diatta fut arrêtée le 8 mai 1943. Trimballée de prison en prison, entre le Sénégal, la Gambie et finalement Tombouctou, au Mali, elle mourut dans des conditions obscures, probablement des suites de tortures et de privations, en 1944.
Aujourd’hui, pour ce jeune artiste-comédien, Charles Diatta, l’héritage de la reine-prêtresse va au-delà du passé colonial. Il représente une opportunité de développement. Malgré son potentiel historique et culturel, Cabrousse reste en marge du développement touristique qui anime la région. «Le tourisme au Cap Skirring bénéficie à une minorité. Nous aimerions que d’autres projets soient créés ici pour soutenir la jeunesse», plaide Charles Diatta
LES VOIX DE NIAYES
Le FRAPP exprime sa consternation face à la visite récente du ministre de l’Environnement et de la Transition écologique à Grande Côte Opérations (GCO), sans prendre en compte les préoccupations des populations des Niayes...
« Le FRAPP exprime sa consternation face à la visite récente du ministre de l’Environnement et de la Transition écologique à Grande Côte Opérations (GCO), sans prendre en compte les préoccupations des populations des Niayes, qui ont pourtant manifesté massivement ce samedi 28 décembre.
Il est inconcevable qu’un ministre se rende sur place pour recueillir uniquement la version de l’entreprise mise en cause, tout en ignorant celle des populations directement touchées par la destruction de leur écosystème. Cette démarche biaisée, guidée par l’entreprise elle-même, soulève de sérieuses questions sur la transparence et l’impartialité de nos autorités face aux enjeux environnementaux et sociaux.
La Constitution sénégalaise consacre le droit de tout citoyen à un environnement sain et la protection des ressources naturelles pour les générations présentes et futures. Ce droit fondamental, inscrit dans notre loi fondamentale, est bafoué lorsque les autorités donnent la priorité aux intérêts d'entreprises au détriment des populations et de l'écosystème.
Le FRAPP appelle le ministre à organiser une rencontre officielle avec les populations des Niayes pour écouter leurs doléances, à mettre en place une gestion réellement souveraine des ressources naturelles en accord avec les droits environnementaux des citoyens et à traduire en actes les engagements du Premier ministre Ousmane Sonko pour un gouvernement proche des populations. De plus, nous exhortons l’Assemblée nationale à jouer pleinement son rôle de représentant du peuple en interpellant le gouvernement sur cette situation et demandant l'arrêt du massacre de l'écosystème de Loumpoul.
Un gouvernement d’actions doit être au service du peuple, et non des intérêts privés. Le FRAPP réaffirme sa solidarité avec les habitants des Niayes et son engagement à lutter contre l’injustice environnementale et sociale. »
LA SONATEL VICTIME D'UNE PIRATERIE
Deux individus ont été arrêtés par la Division spéciale de la cybersécurité (Dsc) à la suite d’une plainte de la Sonatel pour intrusion dans son réseau.
Deux individus ont été arrêtés par la Division spéciale de la cybersécurité (Dsc) à la suite d’une plainte de la Sonatel pour intrusion dans son réseau.
L’un des suspects interpellés est un Djiboutien, renseigne Libération, qui donne la nouvelle ce lundi 30 décembre. «Lors de la perquisition effectuée chez lui, à la Médina, les enquêteurs ont saisi 59 cartes Sim Orange et 3 modem de connexion et 1 modem à puces», signale le journal.
De quoi s’agit-il ? La source rapporte que des individus auraient détourné des Sms de notification reçus par les clients lors d’opérations de réinitialisation de mot de passe ou provenant d’applications telles que Tik Tok, WhatsApp et Linkedin pour les facturer plus bas que le tarif légal. Les malfaiteurs utilisaient des Simbox et passaient par des opérateurs locaux, souligne Libération.
Les messages en question ont été facturés 10 francs Cfa au lieu de 65,565. «Entre mai 2023 et mai 2024, la Sonatel a enregistré ainsi un préjudice de 96 millions 954 mille 646 francs Cfa», renseigne le quotidien d’information.
VIDEO
CE QUE LE SECTEUR EXTRACTIF A GÉNÉRÉ EN 2023
L’Itie Sénégal vient de rendre public son rapport portant sur l’exercice fiscal 2023. Pour cette année, les revenus ont grimpé de plus de 102 milliards de francs Cfa
L’Itie Sénégal vient de rendre public son rapport portant sur l’exercice fiscal 2023. Pour cette année, les revenus ont grimpé de plus de 102 milliards de francs Cfa.
Pour l’exercice fiscal 2023, le total des revenus générés par le secteur extractif a augmenté. Il est passé à 380 milliards de francs Cfa, soit une hausse de plus de 102 milliards de francs Cfa par rapport à 2022.
De ces revenus, 346 milliards sont directement allés au budget de l’Etat, informe la Présidente de l’Itie Sénégal, Mme Oulimata Sarr.
Le secteur des hydrocarbures a, quant à lui, enregistré une augmentation de 5,95 milliards, passant de 24 milliards en 2022 à 30 milliards en 2023.
Par ailleurs, 11,7 tonnes d’or ont été produites pour une valeur de 484,4 milliards de francs Cfa durant l'année 2023. Ci-dessous l'extrait vidéo.
VIDEO
TEMPETE CONTRE GCO
Des terres spoliées, des récoltes perdues, des indemnisations très faibles, les populations de la zone des Niayes ont manifesté leur colère ce samedi par une marche entre les villages de Lompoul sur mer et Lompoul village.
Mame Woury THIOUBOU (A Loumpoul) – |
Publication 30/12/2024
Des terres spoliées, des récoltes perdues, des indemnisations très faibles, les populations de la zone des Niayes ont manifesté leur colère ce samedi par une marche entre les villages de Lompoul sur mer et Lompoul village. «Stop Eramet», ont scandé ces populations qui demandent un moratoire sur l’exploitation du zircon à Lompoul.
Abdoulaye Sow en a gros sur le cœur. Vêtu d’une chemise en wax, il arbore, comme les centaines de personnes qui ont participé à la marche contre Grande Côte opération (Gco), une écharpe rouge. Mais pour Abdoulaye Sow, ce morceau de tissu cristallise toutes les épreuves, les frustrations et les injustices que lui et les siens ont subies. Sur cette terre de Lompoul, ses parents, ses grands-parents et arrières grands-parents ont vécu à la sueur de leur front. Ils ont bêché, semé et récolté pendant des dizaines et des dizaines d’années. Ce champs aujourd’hui est situé à l’endroit même où Gco a érigé un lac, cœur de son système d’exploitation. «Je n’ai jamais eu de problème avec les Forces de sécurité. A cause de Gco, on m’a menotté et arrêté. Tout simplement parce qu’on a refusé les indemnisations proposées, qu’on a dit clairement qu’on préférait garder nos champs, les agents des Eaux et forêts nous ont menottés dans leur voiture de 10h à 14h. C’était la première fois que des menottes touchaient mes mains», raconte, avec une voix chargée d’émotion, l’agriculteur devenu ouvrier agricole pour survivre. «L’arrivée de Gco a été une calamité. On a perdu nos champs. Et les indemnisations qu’ils nous ont données ne représentent même pas le quart de ce qu’on a obtenu à notre dernière récolte. Et j’ai dû partager cette maigre somme avec mes trois frères», continue-t-il de raconter. Ils sont nombreux à avoir vécu les mêmes misères que Abdoulaye Sow, certains ayant même été emprisonnés pendant des mois. Dans le village, la situation économique se détériore de plus en plus et les populations doivent désormais composer avec de nouvelles formes de délinquance. «Aujourd’hui, des jeunes se tournent vers la délinquance parce qu’ils ont perdu leur travail. Ca n’existait pas avant», dénonce M. Sow. Autre phénomène qui a fait son apparition, ce sont les départs de pirogues qui se sont multipliés au point que les gendarmes ont dû installer un camp de fortune à Lompoul sur mer pour y mettre fin.
Dans la foule des marcheurs qui ont pris le départ ce samedi 28 décembre à la sortie de Lompoul sur mer, les injustices «subies» sont scandées avec colère. Dans la foule, les pancartes crachent les messages de désespoir. Tous veulent un arrêt immédiat des activités de la mine. «Moratoire Lompoul pour évaluer les dégâts de Gco et prendre des mesures fermes», rappellent avec insistance les habitants des trois communes de Diokoul, Kab Gaye et Thieppe. A la tête de ce mouvement de protestation qui prend de l’ampleur de jour en jour, Gora Gaye, le maire de Diokoul Diawrigne. «Ce que nous exigeons, c’est l’arrêt des activités de Gco. Que l’on évalue la situation et qu’on sache si réellement le Sénégal tire un quelconque bénéfice de cette exploitation. Mais ce que je peux dire, c’est qu’avec tous les efforts que l’Etat a faits pour reboiser la zone des Niayes et stabiliser les dunes, je doute que les ressources issues de l’exploitation du zircon en vaillent le coup. Les Niayes produisent 80% des légumes de ce pays», souligne le maire Gora Gaye. Autour de lui, les différentes associations, les mouvements de défense se sont mis en ordre de bataille. Le mot d’ordre est le même : «Stop Eramet. Dafa doy (Ca suffit).»
L’administration locale au pilori
Sur d’autres pancartes, les populations laissent parler leurs ressentiments contre l’administration locale. En première ligne, la Commission d’indemnisation composée de membres de l’exécutif local. Dans plusieurs témoignages, les populations dénoncent des méthodes peu orthodoxes et une administration locale aux ordres de Gco. «Quand on doit indemniser un agriculteur, les Eaux et forêts viennent d’abord pour retirer toutes les installations sur ton champ sous prétexte que tu n’as pas les papiers. Mais nous cultivons et vivons dans ces zones depuis des décennies. On n’a jamais eu besoin de présenter des papiers. Ces terres, nous les avons reçues de nos parents. C’est totalement injuste», explique un agriculteur. Les poings levés, il brandit une pancarte sur laquelle on peut lire : «Non à une administration complice de Gco pour détruire nos communautés.»
Au moment où la marche des populations victimes de l’exploitation du zircon se préparait, le ministre de l’Environnement, le Dr Daouda Ngom, a effectué une visite sur les sites de Gco ce 26 décembre. Mais en omettant de prêter une oreille aux complaintes des populations. A la place, la visite d’une maison que Gco a louée pour y installer des familles déguerpies de chez elles en pleine nuit et en attente d’être relogées.
par l'éditorialiste de seneplus, Boubacar Boris Diop
DEVOIR DE MÉMOIRE, QUÊTE DE VÉRITÉ AUTOUR DE THIAROYE 44
EXCLUSIF SENEPLUS - Dans le contexte de l'époque, la désobéissance aurait été un acte de rébellion absurde et suicidaire. La frontière entre bourreaux et victimes est si nettement tracée qu'un tel exercice ne devrait susciter aucune controverse
Boubacar Boris Diop de SenePlus |
Publication 30/12/2024
C'est une chose de critiquer d'un point de vue général l'institution militaire connue sous le nom de "Tirailleurs sénégalais" et c'en une autre de cracher sur la dépouille de chacune des centaines de victimes du massacre du 1er décembre 1944 à Thiaroye. Dans le premier cas de figure, on peut légitimement se prévaloir d'une liberté de jugement qui ne donne toutefois à personne le droit de falsifier des faits patiemment reconstitués depuis les années quarante par des spécialistes de tous horizons. Les tirailleurs insultés par Cheikh Oumar Diagne ne sont pas des êtres abstraits, chacun d'eux a un nom et une histoire mais aussi de nombreux descendants qui chérissent de génération en génération sa mémoire. Il est tout de même troublant de voir un adulte se déchaîner contre des morts avec une haine et une rage qui ne peuvent avoir un peu de sens qu'à l'égard des vivants. Cela fait penser à des vitupérations dans le silence d'un cimetière.
À Thiaroye, des combattants africains ont été trahis par leurs supérieurs, assassinés et jetés à la hâte dans des fosses communes. C'est aussi simple que cela. Cheikh Oumar Diagne veut-il nous dire que c'était bien fait pour eux ? Il ne va pas jusqu'à qualifier les tirailleurs sénégalais de sous-hommes mais le mot n'est sans doute pas loin de sa pensée puisqu'il les décrit comme des traîtres, victimes moins du racisme colonial que de leur appât du gain. Si ses propos ne sont pas passés tout à fait inaperçus c'est uniquement parce qu'il est un proche collaborateur du président Diomaye Faye. À vrai dire, il est difficile de prendre au sérieux un langage aussi excessif. On s'en est bien rendu compte lors de la "Déclaration de politique générale" du Premier ministre Ousmane Sonko. Il y a fait en passant l'éloge des martyrs de Thiaroye mais aucun député n'a cru devoir revenir sur cette polémique lors de la séance-marathon de questions-réponses qui s'en est suivie.
Cependant Cheikh Oumar Diagne aura au moins eu le mérite de susciter ces jours-ci de nombreux articles dont les auteurs se veulent heureusement bien plus rationnels et nuancés que lui. On peut cependant se demander pourquoi un tel débat sur les tirailleurs sénégalais a lieu avec un si grand retard. Pendant près d'un siècle, l'Aube de sang - titre d'une pièce rarement prise en compte de Cheikh Faty Faye - a surtout interpellé les cinéastes, écrivains et musiciens africains et la relative indifférence des historiens et des politiques a permis à l'Etat français, coupable de ce crime de masse sous l'autorité du général de Gaulle, d'en contrôler totalement le récit, faisant par là-même obstruction à tout véritable travail de mémoire. Paris s'est vu finalement obligé de passer aux aveux il y a seulement trois semaines et on aurait pu s'attendre à ce que cette victoire quasi inespérée stimule la quête de vérité sur les circonstances exactes du carnage de décembre 1944 et un surcroît de considération pour ses victimes originaires de plusieurs pays africains. C'est au contraire le moment que l'on choisit pour surfer sur une vague révisionniste un peu chic et de moins en moins pudique. Des médias dits internationaux - il est aisé de deviner lesquels - ont voulu profiter des écarts de langage d'un haut fonctionnaire sénégalais pour en rajouter à la confusion. C'est de bonne guerre. D'autres réactions, quoique sincères, mesurées et tout à fait respectables, sont moins faciles à comprendre dans la mesure où elles servent naïvement les desseins de journalistes littéralement en mission commandée et pour qui des dizaines, voire des centaines de milliers de morts hors d'Europe compteront toujours moins que les intérêts de leur pays.
On pourrait croire à la lecture de certains analystes que les tirailleurs sénégalais étaient dans leur immense majorité des engagés volontaires. Rien n'est plus faux. L’administration coloniale, avec son formidable appareil de propagande et ses capacités de coercition, ne leur laissait la plupart du temps d'autre choix que d'aller au front. Dans le contexte de l'époque, la désobéissance aurait été un acte de rébellion personnelle absurde et suicidaire puisqu'aucune organisation politique ou sociale ne s'était élevée contre les campagnes de recrutement initiées par les tout-puissants maîtres de l'heure avec l'aide de leurs relais locaux. Le corps des tirailleurs sénégalais n'a pas été une exception africaine puisque sur tous les continents et à toutes les époques les vainqueurs en ont créé de semblables pour parachever le processus de conquête. Le fait est que partout, en attendant des jours plus favorables à une résistance concertée, les colonisés n'ont eu d'autre choix que de prendre les armes aux côtés du colonisateur.
Quid des Africains qui se sont précipités avec enthousiasme sur les lieux de recrutement, prêts à verser leur sang pour la France ? Ils ne méritent pas davantage notre mépris. Sembène Ousmane et Frantz Fanon firent partie de ces adolescents qui ont presque dû faire le forcing pour offrir leur vie à la Mère-Patrie en lutte contre l'Allemagne nazie.
Samba Gadjigo rapporte à ce propos une anecdote révélatrice dans sa biographie du célèbre écrivain-cinéaste sénégalais. Au début de la guerre, Sembène, apprenti-maçon à peine âgé de seize ans, est légèrement blessé à l'œil par un de ses copains devant une salle de cinéma du Plateau et sa première réaction a été de s'écrier qu'il ne pourra hélas plus être recruté par l'armée des Tubaab car "ils n'acceptent pas les borgnes !" Finalement mobilisé en 1944 dans le 6ème Régiment d'Infanterie Coloniale stationné au Niger, il avouera un jour n'avoir jamais autant appris sur la vie et sur les êtres humains que pendant cette courte période sous les drapeaux. On connaît la suite de l'histoire : une exceptionnelle prise de conscience anticolonialiste et un film d'une rare efficacité en hommage à ceux de ses camarades tombés à Thiaroye.
Frantz Fanon, à qui l'humanité entière doit tant, n'aurait peut-être pas non plus été le même penseur fécond sans sa participation à la Deuxième Guerre mondiale au cours de laquelle il fut du reste blessé à la poitrine. N'écoutant à dix-sept ans que son précoce instinct antifasciste, il n'attend pas d'y être invité pour s'engager dans les forces gaullistes. Sa famille essaie en vain de le dissuader et puisqu'il n'a pas de quoi se payer le passage jusqu'en République dominicaine - d'où il devait rallier l'Angleterre - il vole et vend un costume de son père ! Toujours égal à lui-même, il se distancera plus tard de cette expérience qui lui avait pourtant permis, de son propre aveu, de mieux comprendre la Révolution algérienne. Dans Les damnés de la terre, son maître-livre, il reprendra intégralement Aube africaine, le célèbre poème dramatique de Keita Fodéba, consacré au drame de Thiaroye et ce n'est certainement pas par hasard.
Un traître à l'Afrique, Sembène Ousmane ? Un vulgaire chasseur de primes, Frantz Fanon, futur porte-parole du FLN algérien et selon le mot de son biographe Adam Shatz "une figure emblématique des mouvements de libération nationale en Afrique, au Moyen-Orient et en Amérique latine" ?
Est-il raisonnable d'attendre de jeunes paysans africains des années quarante - qui étaient en fait des gamins - qu'ils aient une meilleure compréhension des enjeux politiques de leur temps que des esprits aussi puissants que Frantz Fanon et Sembène Ousmane ? Poser la question c'est y répondre.
On ne peut donc que se féliciter du choix fait par le gouvernement du Sénégal de commémorer l'événement sans attendre la permission d'une quelconque puissance étrangère. Cette décision a très vite obligé Paris à reconnaître officiellement que ce qui est arrivé au camp de transit de Thiaroye était bel et bien un massacre soigneusement planifié et non la répression d'une mutinerie. Il est essentiel de noter que ce geste public de repentance est sans précédent dans l'histoire post-coloniale française.
La tragédie de Thiaroye n'a jamais été vraiment oubliée en Afrique de l'Ouest mais il a fallu attendre soixante-quatre ans d'indépendance pour qu'un de nos gouvernements ose en marquer l'anniversaire par une cérémonie du souvenir digne de ce nom. C'est en présence de plusieurs de ses pairs - y compris le président en exercice de l'Union africaine - que le chef de l'Etat sénégalais a rendu un hommage chargé d'émotion aux tirailleurs et cette communion avec nos disparus a aussi été un grand moment de fierté. Même s'il reste bien du chemin à faire pour que la commémoration de ce drame africain ne soit pas l'affaire exclusive du pays où il a eu lieu, le sursaut mémoriel du 1er décembre 2024 est un message clair des autorités quant à leur volonté de redire avec force l'humanité de nos compatriotes naguère déshumanisés par l'occupant. Cette reconnexion lucide avec un passé douloureux relève, en dépit de sa complexité, d'une simple nécessité de survie.
Dans le cas précis de Thiaroye, la frontière entre bourreaux et victimes est si nettement tracée qu'un tel exercice ne devrait susciter aucune controverse. Il se trouve qu'assez étrangement il semble embarrasser ou agacer certains petits-enfants des tirailleurs. C'est leur droit puisqu'il faut de tout pour faire un monde mais il est tout de même curieux que l'on se lâche avec tant de véhémence contre des personnes décédées depuis bientôt un siècle dans les circonstances que l'on sait. Cheikh Oumar Diagne est heureusement le seul à s'être laissé aller à une telle extravagance.
LA CAN, LES JO DE PARIS, LE COME-BACK DE DONALD TRUMP, PARMI LES FAITS MARQUANTS DE 2024
La victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine du 5 novembre dernier, celle de la Côte d’Ivoire à la Coupe d’Afrique des nations, la guerre au Proche-Orient et la décision de retrait des pays de l'AES de la CEDEAO ont marqués 2024
La victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle américaine du 5 novembre dernier, celle de la Côte d’Ivoire à la Coupe d’Afrique des nations, la guerre au Proche-Orient et la décision de retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) ont sur le plan international marqué sans doute les esprits en 2024.
Présidentielle américaine : le come-back de Trump
Juste quatre petites années, la durée du seul et unique mandat de Joe Biden, lors duquel il a eu plus de temps pour jouer au golf dans son club privé de Bedminster, et revoilà Donald Trump qui s’apprête à retrouver le Bureau ovale.
Quarante-cinquième président américain (2017-2021), il sera donc également le 47e à partir du 20 janvier 2025, jour de son investiture.
Donald Trump a été donné pour mort… politiquement, après avoir été déclaré coupable de 34 chefs d’accusation et qu’il risquait une peine d’emprisonnement de quatre ans pour falsifications de documents coupables. Il a également été victime d’une tentative d’assassinat et blessé à l’oreille par les tirs d’un jeune Américain lors d’un rassemblement politique.
Mais voilà que le milliardaire de 78 ans, tel le phénix, renaît de ses cendres. Contre toute attente, déjouant les sondages, il remporte haut la main le scrutin présidentiel américain. Son challenger, la vice-présidente Kamala Harris, n’a pu que constater ses espoirs de devenir première femme présidente des Etats-Unis s’évaporer, emportés par le raz-de-marée MAGA (Make America Great Again), cri de ralliement de Donald Trump et ses partisans qui entendent, disent-ils, redonner à leur pays son leadership d’antan.
Un exemple de sa large victoire : au collège électoral, Donald Trump a obtenu 312 grands électeurs, laissant loin derrière sa rivale démocrate, à 224 grands électeurs. La victoire la plus nette depuis Barack Obama en 2012, et… depuis 36 ans pour un républicain. Le vote populaire n’a pas été différent, non plus.
Ce come-back de Trump, nommé ‘’Personnalité de l’année’’ par le magazine Time a, à coup sûr, consacré l’élection présidentielle parmi les événements majeurs de l’année 2024.
Les États de l’AES annoncent leur retrait de la CEDEAO
En janvier 2024, le Burkina Faso, le Mali et le Niger annoncent leur retrait ‘’sans délai’’ de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), après que ces trois États ont mis sur pied la confédération de l’Alliance des États du Sahel (AES).
De gauche à droite : général Assimi Goïta (Mali), le général de brigade Abdourahmane Tiani (Niger) et Ie capitaine brahim Traoré (Burkina Faso) ont annoncé le retrait de leur pays de la CEDEAO et mis sur pied la confédération de l’AES.
Ils reprochent à l’organisation sous régionale ouest-africaine de ne leur avoir apporté aucune assistance dans leur lutte contre le terrorisme. Pire, la CEDEAO leur a même imposé des « mesures [d’embargo] illégales, illégitimes, inhumaines et irresponsables, en violation de ses propres textes », les menaçant d’une intervention militaire pour rétablir l’ordre constitutionnel dans ces pays.
Bien qu’ayant acté ce retrait des États de l’AES, la CEDEAO a annoncé, lors de son dernier sommet, le 15 décembre dernier, à Abuja, au Nigéria, la mise en place d’une « période de transition » de six mois, à partir du mois de janvier 2025, pour négocier les modalités de départ du Mali, du Niger et du Burkina Faso de l’organisation.
La Côte d’Ivoire remporte sa CAN
En Afrique, la 34e édition de la Coupe d’Afrique des nations (CAN), en Côte d’Ivoire, a fait partie des faits marquants de l’année 2024. Alors qu’on la voyait éliminée dès le premier tour, la Côte d’Ivoire finit par créer la surprise en remportant la compétition, évitant ainsi une grande désillusion pour le pays hôte de cette compétition internationale de football parmi les plus prestigieuses au monde. La CAN s’est jouée du 13 janvier au 11 février 2024.
Ce couronnement a connu des péripéties. Deux défaites en phase de groupe, suivies de la démission de l’entraîneur Jean-Louis Grasset sous la pression de tout un peuple qui ne pouvait concevoir une élimination dans ‘’sa’’ compétition, dès le premier tour.
En remportant la 34e édition de la CAN chez elle, la Côte d’Ivoire a accroché une troisième étoile à son maillot.
Il sera remplacé par l’ancien international Emerse Faé, qui réussira, avec ses joueurs, à accrocher une troisième étoile sur le maillot frappé de la tête d’éléphant, après 1992 et 2015, en s’imposant face au Nigéria deux buts à un.
JO de Paris 2024 : ce fut grandiose !
Dans un contexte politique clivé, marqué par la victoire de l’opposition aux législatives anticipées initialement prévues en 2027, suivie de la dissolution du parlement, les Jeux olympiques (JO) de Paris ont constitué un moment de répit pour les Français et le président Macron, mal en point sur le plan politique.
Durant 19 jours de compétition, ces 33e olympiades de l’ère moderne, qui se sont déroulées du 26 juillet au 11 août 2024, ont marqué les esprits par une cérémonie d’ouverture fabuleuse, jamais vue dans l’histoire de ces jeux, malgré les polémiques qu’elle a suscitées.
Pour autant, les compétitions ont tenu leurs promesses, avec des exploits et des records de champions attendus, à l’instar du judoka français Teddy Riner, qui a décroché sa quatrième et cinquième médaille olympique lors de ces Jeux devant son public.
Avec sa cérémonie d’ouverture époustouflante et des exploits sportifs retentissants, les 33e JO, à Paris ont également été un moment de répit politique pour le président Macron.
Son compatriote, Léon Marchand, nageur de 22 ans, détenteur du record du monde du 400 m 4 nages, a marqué l’histoire des JO avec cinq médailles dont quatre en or.
L’Américaine Simone Biles, légende de la gymnastique a, elle, remporté quatre médailles, dont trois en or, reprenant ainsi la couronne qu’elle avait perdue par abandon, en 2020, à Tokyo, huit ans après les Jeux de Rio.
Que dire du Cubain Mijain Lopez, qui a remporté, à Paris, sa … cinquième médaille d’or consécutive en lutte ! Devenant le premier athlète de l’Histoire à réussir ce tour de force, toutes disciplines confondues !
Une semaine après la fin des JO, les Jeux Paralympiques ont pris le relais, du 28 août au 8 septembre.
La guerre d’Israël dans les territoires palestiniens occupés
Comment revenir sur les faits marquants de l’année 2024 sans évoquer la situation au Proche-Orient avec la guerre que mène Israël en terre palestinienne occupée. Débuté en octobre 2023, après l’attaque du Hamas, ce conflit s’est transformé en génocide contre les Palestiniens, selon l’organisation de défense des droits humains, Amnesty international.
Plus d’un an après le déclenchement de l’intervention de l’armée israélienne dans le territoire palestinien de Gaza, des dizaines de milliers de personnes, dont près de 70% de femmes et d’enfants, ont été tuées dans l’enclave palestinien, selon les Nations unies.
Avec la poursuite des bombardements à Gaza et leur extension au Liban, ce conflit se poursuit dans l’espoir d’un cessez-le-feu.
Toutes les infrastructures vitales de la Palestine détruites par l’armée israélienne dans une guerre contre le Hamas qui a causé des dizaines de milliers de morts, dont près de 70% de femmes et d’enfants.
par Tamsir Anne
LA TRANSGAMBIENNE, VOYAGE AU BOUT DE L'ABSURDE
EXCLUSIF SENEPLUS - Ce qui se passe sur l'axe Sénégal-Gambie est un démenti cinglant à toute rhétorique intégrationniste. À la fois horrible et humiliant. Notre seule faute ? Avoir voulu traverser paisiblement un pays que l’on dit frère
Keur Ayib, à une vingtaine de kilomètres de Nioro du Rip, surgit presque par enchantement de nulle part, un peu comme ces concessions sur lesquelles on trébuche au détour d’une ruelle dans les bidonvilles. Le décor, cependant, ne trompe pas : c’est bien celui d’une frontière, celle de deux pays dits frères, entrelacés, l’un dans l’autre, s’étreignant jusqu’à se faire mal. Les postes de police, l’un adossé à l’autre, de part et d’autre d’une barrière des files de passagers et de voitures attendant dans un chaos plus ou moins organisé.
Les uniformes, bleus d’un côté, beige-marron de l’autre, les enseignes en anglais d’un côté, en français de l’autre, donnent à l’ensemble une allure surréaliste. On pourrait presque croire que le temps s’est arrêté. On s’imagine que cela n’a pas dû changer depuis l’époque de la colonisation franco-anglaise.
Tant de slogans comme la libre circulation des personnes et des biens, l’intégration sous-régionale se bousculaient maintenant et résonnaient dans mes oreilles, semblables au ricanement d’un fantôme. Je revins à la réalité lorsque l’agent sénégalais nous interpella, mon épouse et moi, nous enjoignant de descendre de voiture, de chercher un laisser-passer pour le véhicule et de nous soumettre au contrôle d’identité.
Nous nous exécutâmes, valsant de bureau en bureau, jusqu’à obtenir le sésame tant espéré, tamponné et cacheté. Le coût de cette première opération : 2500 francs. Ma demande de reçu resta sans réponse.
Je ravalais les mots de protestation qui me brûlaient les lèvres. Après tout, nous avions bien reçu un papier. Restait à se faire identifier. Cette fois, l’opération coûtait 2000 francs. Je déclarai, sans trop réfléchir, que j’avais déjà payé 2500 francs sans reçu et que je ne pouvais pas, une nouvelle fois, payer 2000 francs sans savoir pourquoi.
L’agent me fit savoir qu’il n’agissait que sur ordre, mais finit par renoncer à la somme demandée. Une petite victoire, certes, mais avec un arrière-goût amer.
Passés du côté gambien, à peine cinq mètres plus loin, le décor changea, mais la scène demeura la même. Munis de notre laisser-passer, nous devions passer dans un bureau adjacent pour un autre cachet. Coût de l’opération : 1000 francs CFA. Je redemandai un reçu, mais l’agent gambien me répondit que, puisque j’avais déjà payé 2000 francs dans mon propre pays, où j’étais supposé avoir tous mes droits sans reçu, il n’y avait rien à discuter : c’était 1000 francs, ni plus ni moins.
Je m’exécutai, craignant que, face au ton martial de l’agent, tout geste maladroit ou parole irréfléchie n’aggrave ma situation. Direction le contrôle d’identité suivant. Cette fois, la policière gambienne annonça la couleur : 5000 francs pour mon épouse. Je protestai encore. Sans doute interloquée par la véhémence de mes propos, elle demanda si elle était diplomate. J’acquiesçai sans hésiter et elle tamponna sans même lever la tête. Ouf, me dis-je, il s‘en était fallu de peu.
Malheureusement, ce n’était qu’un début. À peine un kilomètre parcouru, un autre poste de police nous attendait. Les agents, cependant, semblaient indifférents à notre présence, discutant tranquillement. Je ralentis, leur fis un salut militaire, et passai au pas de course. Leur réaction fut immédiate et violente. Un agent me cria que j’avais eu l’audace de passer devant un barrage sans m’arrêter. Je lui expliquai, de manière quelque peu hésitante, qu’ils ne m’avaient pas donné l’ordre de m’arrêter. C’était pour cela que j’avais cru pouvoir passer.
Il demanda la carte grise et le permis de conduire, et m’invita à le suivre dans une cabane située de l’autre côté de la route. Là, il remit les papiers à un autre agent, qui déjeûnait tranquillement. Il me répéta, narquois : « Vous avez passé un barrage de police sans vous arrêter. »
Je lui répondis que c’était ma première traversée de la Gambie et que je ne savais pas s’il fallait s’arrêter à chaque fois que l’on voyait un policier ! Cela le mit dans une colère blanche. Mon crime était trop grave, il allait me renvoyer à Farafenni. Un autre homme, sur place, me souffla qu’il était préférable de donner le prix de la “cola”, sinon cela me coûterait beaucoup plus cher à Farafenni.
Armé de quelques billets de 2000 et 1000 francs, comme certains amis me
l’avaient conseillé, j’essayai de lui glisser un petit bleu, mais sans succès. Le policier scrutait minutieusement mon permis européen, comme si cela aiguisait son appétit. Il refusa l’argent, prenant un air profondément offensé. Il ne pouvait comprendre que je refusais de reconnaître ma faute, que j’avais commis un crime grave en ne m’arrêtant pas à la vue de la police. Et là, je me sentais comme un personnage du procès de Kafka : accusé sans raison, mais coupable tout de même, l’innocence n’existant pas.
Après un long échange, j’admis ma faute, confessai mon ignorance et lui demandai d’accepter le billet. Je ne pouvais pas retourner à Farafenni, cela aurait signifié abandonner le voyage. Finalement, par l’intermédiaire d’un troisième acteur, le billet fut accepté, et mes papiers me furent rendus. Je pus enfin reprendre la route… jusqu’au prochain poste.
Le calvaire ne tarda pas à reprendre. Cette fois, la leçon semblait apprise : je m’arrêtai net à la vue de l’uniforme, saluai militairement et baissai la vitre. La policière me tança vertement : « Quand on parle à la police, on doit baisser la vitre entièrement ! » Je m’exécutai, tendis mes papiers, et elle fit un signe de dédain, m’autorisant à continuer. Je pensais enfin avoir compris la règle du jeu. Mais j’avais trop vite crié victoire.
À chaque 20 ou 40 kilomètres, de nouveaux contrôles, de nouvelles demandes de “cola” ou d’« attaya » (thé). Il fallait s’exécuter, ou risquer de rester bloqué dans cette contrée aussi inhospitalière qu’absurde. C’était la première fois que je ressentais une telle exaspération face à des "frères", parlant de surcroît la même langue, mais sur un ton d’une hostilité que je ne lui soupçonnais pas.
La Sénégambie, quel cauchemar ! Je vous épargne les détails des 20 autres haltes, chacune avec ses tracasseries, ses demandes de “cola” et d’“attaya”. Enfin, j’aperçus le panneau annonçant le Sénégal. Je n’étais pas moins soulagé qu’un naufragé apercevant la terre ferme. Un dernier contrôle à la sortie : il fallait encore donner deux fois 1000 francs au « kilifa », comme il se faisait appeler, qui ne pouvait pas demander publiquement. Pour le punir, j’achetai un sachet d’oranges pelées pour 1000 francs et demandai à la dame de lui remettre la monnaie. Il était quitte avec son honneur… et son hypocrisie.
À quelques mètres de la terre promise, un homme trapu, agressif et féroce surgit. Il brandit une carte : « police des stupéfiants ». Il fallait faire demi-tour et se soumettre à une fouille minutieuse. Chaque coin et recoin de nos bagages, jusqu’au linge de corps, fut inspecté. C’était à la fois horrible et humiliant. Notre seule faute fut d’avoir voulu traverser paisiblement un pays que l’on dit frère.
Le Sénégal et la Gambie sont-ils vraiment une seule tête, inséparable ? J’en doute désormais sérieusement. La prochaine fois qu’une commission mixte sénégalo-gambienne se réunira, au plus haut niveau, comme ce fut le cas il y a juste quelques semaines, abandonnons de grâce la langue de bois et les formules consacrées, si éloignées de la réalité. Ce qui se passe sur la Transgambienne est un démenti cinglant à toute rhétorique intégrationniste. Commençons par le commencement, du bas vers le haut !
À l’avenir, je contournerai ce pays “frère”, quitte à faire un détour par Koulikoro.
LE FORUM CIVIL DEMANDE DES COMPTES AU GOUVERNEMENT
Le vendredi 27 décembre 2024, le Bureau Exécutif du Forum Civil s’est réuni à Saly pour aborder, entre autres questions inscrites à son ordre du jour, la participation du Forum Civil à la gouvernance de la vie publique relativement à la promotion de la...
Le vendredi 27 décembre 2024, le Bureau Exécutif du Forum Civil s’est réuni à Saly pour aborder, entre autres questions inscrites à son ordre du jour, la participation du Forum Civil à la gouvernance de la vie publique relativement à la promotion de la bonne gouvernance et à la lutte contre la corruption, à la consolidation de la démocratie et de l’Etat de droit.
Le Bureau Exécutif du Forum Civil s’est aussi penché sur l’état de mise en œuvre de ses projets et programmes en 2024 relativement à l’augmentation de la taxation du tabac et des produits nouveaux émergents, à la mobilisation des ressources, au renforcement des réformes fiscales justes, à la lutte contre les flux financiers illicites, à la transparence et à la redevabilité dans le secteur extractif, à la gouvernance des finances publiques, à l’intégrité électorale et à la lutte contre les violences politiques au Sénégal.
Enfin le Bureau Exécutif s’est prononcé sur la Préparation de la prochaine Assemblée Générale du Forum Civil.
Au titre du point sur sa participation à la gouvernance publique, le Bureau Exécutif se félicite vivement de sa contribution au débat public tant du fait des instances, de son Coordonnateur général ou de ses sections territoriales. A cet effet, le Bureau Exécutif invite tous ses membres à redoubler de vigilance pour la défense des intérêts des populations pour un accroissement rigoureux et responsable du contrôle citoyen de l’action publique.
"Ainsi, le Forum Civil demande au Gouvernement d’apporter des éclairages sur les activités du « Comité chargé de proposer une assistance aux ex-détenus et autres victimes de la période pré-électorale » créé par arrêté du Ministre de la Famille et des Solidarités ministériel n°017540 du 30 juillet 2024 publié au Journal Officiel n°7758 du 31 août 2024."
Le Bureau Exécutif du Forum Civil encourage aussi le Gouvernement dans sa volonté de réformer ou de refonder le Code général des Impôts. Ainsi il l’invite à mettre en place des Commissions inclusives pour que le Principe de consentement à l’impôt connaisse une réelle appropriation par l’ensemble des acteurs et des citoyens. Le Bureau Exécutif du Forum Civil considère que cette initiative ne doit pas reproduire les formes d’un système bureaucratique inopérant.
Au titre du point relatif à l’exécution des projets et programmes le Bureau Exécutif a apprécié positivement leur rythme et leur niveau d’exécution qui dénote une excellente performance de l’Organisation. A cet égard, le Bureau Exécutif renouvelle ses félicitations appuyées au Coordonnateur Général du Forum Civil, Monsieur Birahime SECK, pour son engagement, son courage et sa ténacité pour la défense de l’intérêt général et du Forum Civil.
Pour la même occasion, le Bureau Exécutif du Forum Civil félicite l’ensemble des membres de l’administration du Forum Civil et des membres sections territoriales pour leur dévouement et leur engagement au service de la nation et de la patrie.
Au titre du point relatif à la vie de l’Organisation et de la préparation de l’Assemblée générale, le Bureau Exécutif a passé en revue les grands moments qui ont rythmé l’activité du Forum Civil et a particulièrement souligné la qualité de sa participation à la vie publique du pays et à l’animation de l’espace public.
Le Bureau Exécutif s’est félicité de ce qui a été réalisé et les défis qui se posent au Forum Civil pour parfaire son développement organisationnel en mettant ses textes, son cadre de gouvernance à la hauteur des meilleurs standards en la matière et asseoir la dimension territoriale de son action.
Le Bureau Exécutif a acté le processus de renouvellement de ses instances par la mise en place d’un Comité de préparation, d’organisation et de supervision de la prochaine Assemblée générale de l’Association.
Le Comité est notamment chargé de proposer les réformes des textes et du cadre de gouvernance et de produire les notes de cadrage encadrant chaque étape devant conduire à la tenue parfaite de l’Assemblée générale.
Le Comité a reçu mandat du Bureau Exécutif de prendre toutes mesures pour la bonne tenue de la prochaine Assemblée générale du Forum civil prévue au plus tard en septembre 2025.
Le Bureau Exécutif du Forum Civil souhaite à ses membres et à toute la Nation une bonne et heureuse année 2025.