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22 avril 2025
Société
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JEUX ET JOUETS DE CHEZ NOUS : QUAND LES ENTREPRENEURES JOUENT DANS LA COUR DES GRANDS
L’industrie du jouet et des jeux a longtemps été dominée par Mattel- Les Sénégalais changent les règles du jeu en proposant des articles qui nous ressemblent.
L’industrie du jouet et des jeux a longtemps été dominée par Mattel, une entreprise américaine connue pour son célèbre jeu Scrabble Mattel ou encore ses poupées Barbie et Ken. Mais, depuis quelques années, ça ne joue plus ! Les Sénégalais changent les règles du jeu en proposant des articles qui nous ressemblent.
Marième Pouye a grandi en jouant avec des poupées barbies, cadeaux de sa mère. Ces figurines habillées en roses, aux yeux bleus et aux cheveux lisses ont longtemps tenu compagnie la jeune femme. Elle s’amusait à les coiffer et à les habiller à sa guise en compagnie de ses amies. Ces «Domu toubab» (poupées de blancs) ont pris une place de choix dans la vie de la jouvencelle. «Je voulais les ressembler. Mais avec le temps, je me suis rendue compte que cela n’était pas possible », témoigne l’enseignante remontant dans ses souvenirs. Aujourd’hui, elle a dépassé l’âge de jouer à la poupée. Mais la maman d’une petite fille veut changer les règles du jeu. Pour Marieme Pouye, il est important que son enfant joue avec des jouets qui reflètent notre réalité. «Je lui ai acheté des dinettes avec de petites marmites, des fourneaux afin qu’elle se familiarise le plus avec sa culture », affirme-t-elle.
«Les jeux de chez nous sont absolument nécessaires pour leur développement», soutient Awa Seck, designer. La maman de deux enfants initie ses enfants au wure, jeu de stratégie composé d’un long plateau de bois de 2 rangées de 6 trous avec de petites billes en guise de pions. Une façon pour elle de mieux faire connaitre ce jeu bien de chez nous.
Fatoumata Kane et Awa Diop sont également mères de famille. A travers la toile et le bouche à oreille, elles ont connu Alyfa, une boutique sénégalaise de jouets. Entrepreneure dans le domaine de l’enfance et maman d’une fille, Awa Diop reconnait qu’il est important que sa fille connaisse sa culture et d’où elle vient. «Ces jouets stimulent sa créativité, sa confiance en soi en plus de lui apprendre sa culture», affirme-t-elle. Fatoumata Kane est également du même avis. La maman de trois enfants affirme qu’il est important pour ses bambins de mieux connaitre leur pays à travers les puzzles, poupées et cartes géographiques.
Les mamans «superwoman» des jeux et des jouets
Alyfa toys est le cadre idéal pour retomber en enfance. La boutique de jouets située à la Cité Biagui sur la route de l’aéroport est propice pour réveiller l’âme d’enfant des plus sceptiques. D’entrée de jeu. La panoplie de jeux disposés sur des étagères attire l’attention. Le visiteur est plongé dans un autre univers où se mêle innocence et insouciance. Sur des étagères sont soigneusement rangés des livres pour enfant revenant sur l’histoire du Sénégal, des jeux de société, des cars rapides en miniature, des figurines de lutteurs, des puzzles ‘ndoumbelane’… Trois étagères plus loin, c’est le coin « girly» avec des poupées aux coiffures afro et aux tenues inspirées des tissus africains et des dinettes africaines. Les autres étagères sont remplies de têtes à coiffer avec des peignes, chouchous….
Alyfa Toys offre ainsi une panoplie de jouets de chez nous depuis 2015 avec des prix variant entre 5.000FCfa et 25.000FCfa. «J’ai mûri l’idée en 2013 en pleine grossesse. Je voulais absolument des jouets représentatifs de son environnement», a fait savoir Racky Daffé. C’est de là qu’est née Alyfa Toys. L’entrepreneure commence avec la confection de figurines de lutteurs sénégalais. «Je voudrais vraiment que l’enfant puisse avoir un outil où il peut se voir et le jeu est le meilleur moyen de faire passer des messages », soutient la mère de deux enfants. Cette dernière travaille entre le Sénégal et l’étranger pour tout ce qui est fabrication.
L’histoire de Ndèye Awa Gaye est semblable à quelques différences près à celle de Racky Daffé. « La marque l’abeille rose est née deux ans après la naissance de ma fille. J’ai été inspirée par le besoin de créer des jouets représentant la diversité pour les enfants », informe Ndèye Awa Gaye.
L’entrepreneure explique que ce projet est aussi né de sa propre expérience en tant que maman confrontée au manque de jouets reflétant la diversité ethnique et culturelle. « Le jouet est bien plus qu’un simple divertissement. C’est un outil d’apprentissage qui peut permettre à façonner la perception de soi et les standards de beauté de nos enfants », soutient-elle. Malgré cette « lutte sans merci pour la diversité », l’entrepreneure se heurte à de nombreux défis. A l’en croire, la plus grande difficulté est de trouver des fabricants locaux capables de produire les jouets selon nos spécifications. La marque propose des imagiers Wolof/Français et des poupées noires pour plus de diversité.
Les poupées, ces reflets identitaires
La célèbre poupée «Barbie», apparue dans les années 60, a connu un succès fulgurant et continue de faire parler d’elle d’années en années. La preuve, le film éponyme, réalisé par Greta Gerwing, sorti en juillet 2023, a battu tous les records. Après seulement 17 jours en salle, il a atteint la barre du milliard de dollars de recettes au box-office mondial. Le Sénégal n’en est pas encore là. Mais les entrepreneurs ont décidé d’entrer dans le jeu.
Un enfant noir assis à une table est face à quatre poupées. Deux de ces figurines ont la peau brune et les cheveux noirs, tandis que les deux autres sont blanches aux cheveux blonds. Le psychologue pose alors une série de questions à l’enfant, chacune visant à comprendre ses préférences et perceptions. Une majorité d’entre eux choisissent les poupées blanches. 67 % préfèrent jouer avec la poupée blanche, 59 % la trouvent «sympa », tandis que seulement 17 % pensent que la poupée blanche avait mauvaise mine. À l’inverse, 59 % des enfants qualifient la poupée brune de «moche». Ce sont là les résultats du «test des poupées» du couple de psychologues noirs, Mamie et Kenneth Clark réalisé en 1954 pour combattre les préjugés raciaux chez les enfants. Cela suffit pour faire tilt chez Rokhaya Diop, fondatrice de la marque Urbidolls.
« Le nom est la contraction de ‘Urbi (princesse en égyptien) et dolls (poupées en anglais). Les Urbidolls sont des poupées noires et métisses avec des cheveux aux textures variées », a expliqué Rokhaya Diop. Ses poupées ont la particularité d’avoir des couleurs de peau différentes, des textures de cheveux variées comprenant des boucles, des frisettes et des cheveux crépus. Elles sont vêtues de manière très tendance, avec des tenues en wax, en bogolan, en bazin, etc. Une manière pour l’entrepreneur basée en France «d’apporter plus de diversité dans le monde des jouets ».
Une poupée habillée en grand boubou jaune avec un ‘moussor ‘ bien attaché, une poupée habillée en wax tenant une calebasse ou encore portant son enfant sur le dos sont, entre autres, les articles signatures de Fabinta Lo. La fondatrice de ‘Keurdomusagar ‘ou la maison des poupées africaines veut également jouer sa partition. Professeur d’espagnol à la retraite, elle s’est reconvertie en fabricante de poupées africaines noires en chiffons. Ces poupées de chiffons aux grands yeux sont le résultat d’un savoir-faire appris en Italie en 2006. De retour au bercail, Fabinta Lo crée cet univers axé sur les poupées avec des thèmes qui renvoient à la culture sénégalaise. Elles sont destinées aux petites filles et surtout leur rapport avec leur identité. Du ‘domu tubab’ (poupées de blancs) ou du ‘domu sagar’ (poupée en chiffons), faites vos jeux !
«Ndatte Yalla» ou encore «Aline Sitoe » sont les noms attribués à ces poupées. Elles sont livrées avec des fiches explicatives. Les prix varient selon les tailles. Les grandes qui mesurent un mètre peuvent coûter 75.000FCfa .Les poupées déco de presque 50 cm coutent 15.000FCfa et les jouets sans le fil de fer entre 12.500 et 15000FCfa. «Notre objectif est d’inculquer à nos enfants la bravoure, l’abnégation que l’on retrouvait chez ces vaillantes femmes et aussi l’estime de soi», a fait savoir Fabinta Lo tout en soulignant le rôle des parents dans ce sens. «Ils ont leur rôle à jouer dans la construction identitaire des enfants car tout commence à ce stade. Il est important que les enfants se retrouvent dans ces poupées», estime-t-elle.
«Je pense que tout commence quand on est jeune et l’univers des jouets a aussitôt fait tilt. Car le manque de diversité est flagrant», regrette à son tour Rokhaya Diop. Cette maman de deux enfants soutient qu’il est important que les enfants noirs s’identifient lorsqu’ils lisent des livres, qu’ils jouent ou regardent la télévision. « La représentation est d’une grande importance car elle façonne notre identité et notre futur», relève la fondatrice de Urbidolls. La marque crée en 2018 est destinée aux enfants de 3 ans et plus. « La beauté de mes poupées joue un rôle important dans le développement de l’estime de soi des enfants», dit-elle d’un tantinet fière. L’entrepreneure ajoute qu’il est primordial que les enfants se persuadent qu’ils ont la capacité de devenir ce qu’ils souhaitent! Astronaute, médecin, ingénieur et pour cela ils sont besoin de rêver.
Urbidolls est «un moule exclusif » et réalisé par la fondatrice. Le dessin du visage, sa sculpture et sa fabrication ont été effectuées en Espagne. Cependant la marque de jouets collabore avec un atelier à Dakar pour la création des vêtements.
« Nous avons pour objectif de poursuivre le développement en Afrique, tandis qu’en Europe, nous nous efforçons de faire en sorte que nos poupées soient implantées dans tous les pays », ambitionne Rokhaya Diop. Une manière de montrer que les Sénégalais ont également leur rôle à jouer dans ce rendez-vous du donner et du recevoir.
Waalo, le premier jeu de société inspiré de notre histoire
Waalo est le tout premier jeu de société édité sous la marque «Les jeux du Sénégal ».Conçu par Yambaye Marieme Seck, c’est un jeu asymétrique dans lequel chaque joueur a une mission qui lui est propre. Le premier à accomplir sa mission remporte la partie! Tous les coups (ou presque) sont permis : attaquer, acheter, vendre, troquer, négocier, trahir, bluffer etc. Il est composé de cartes, de dés et de jetons. « Waalo est un jeu de société qui revisite l’esclavage et les péripéties des débuts de la traite négrière », a fait savoir Yambaye Marieme Seck.
Diplômée de l’Institut Supérieur d’Interprétation et de Traduction (ISIT), Yambaye Marieme Seck choisit de rentrer au Sénégal en 2013 et de filialiser son entreprise de traduction, Linguaspirit, dont elle est la fondatrice et directrice. Passionnée des enfants et de lecture, elle fonde BD passion Dakar, une bibliothèque jeunesse. Elle conçoit également « Waalo » qui permet de « revisiter notre histoire et notre culture et est un excellent moyen de promouvoir notre patrimoine culturel sénégalais et de le faire découvrir » à travers les jeux du Sénégal. « Les Jeux du Sénégal, comme son nom l’indique édite des jeux 100 % sénégalais. Nous proposons une gamme de jeux éducatifs, ludiques et graphiques, une véritable alternative face aux jeux venus d’ailleurs », a fait savoir la fondatrice.
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Tatiana Mbengue, sociologue chercheure
« Il s’est ressenti un besoin d’adaptation aux contextes culturels variés de la part de nos concepteurs locaux »
«Le milieu détermine l’individu», dit-on. Les jouets et jeux déterminent également l’individu …de demain. Ils participent à la construction de l’enfant car ils jouent sur la perception identitaire. C’est ce qu’explique Dr Tatiana Mbengue, sociologue-chercheure à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis.
-Quel impact peut avoir les jouets dans la construction sociale de l’enfant ?
Au cours de la socialisation primaire, l’enfant acquiert un rôle social en vue d’intégrer la société face aux attentes de cette dernière et de devenir pleinement un acteur social. Ce processus d’intériorisation des normes et valeurs devant permettre à l’enfant de vivre en société et de créer des liens sociaux au risque de passer pour un marginal, se fait par le biais de trois canaux : l’injonction, l’imitation (des adultes y compris les parents, des amis), et l’interaction. Et pour multiplier et diversifier les interactions sociales, l’enfant peut se servir des jouets/ jeux pour construire son identité. Ainsi, le jouet participe pleinement de cette socialisation. Quel que soit le milieu social, les jouets jouent un rôle important dans le développement social de l’enfant et ce, dès les premiers âges.
Pour vous donner un exemple, à l’aide des jeux de société, l’enfant apprend à gérer les conflits, à respecter les règles, à faire preuve de patience dans l’attente de son tour, à se familiariser avec l’empathie, la collaboration, la créativité, et à gérer sa frustration en cas de défaite etc. ; des valeurs indispensables devant permettre à l’enfant de se maintenir dans son groupe social d’appartenance. En somme, les jouets comme outils de socialisation, aident l’enfant à développer ses compétences sociales.
Aussi, les jeux de l’enfance peuvent avoir une influence sur la vie d’adulte. Dans le jeu, il se donne à voir, le métier que l’enfant pourrait embrasser plus tard. A titre d’illustration, certains enfants qui aimaient jouer à la maitresse ou au soignant le sont devenus à l’âge adulte faisant ainsi intervenir la loi de l’imitation de TARDE rappelant ainsi que les expériences dans le jeu sont des apprentissages de la vie d’adulte. Ceci démontre la pertinence de la confection de jouets liés au métier. Les jouets respectent également la logique de la socialisation différenciée entre le garçon et la fille.
Pouvons-nous donc dire que le choix du jouet/ jeu est important ?
L’impact n’est pas toujours positif sur le développement de l’enfant si la vigilance des adultes n’est pas de mise. Voir l’enfant jouer continuellement seul n’est pas sans danger, car il lui faut nécessairement une interaction avec les autres quand bien même certains jeux peuvent se jouer seul. Un autre danger à ne pas occulter reste le type de jouets qui est mis à sa disposition contribuant à la banalisation de la violence chez l’enfant. Sous un autre registre, d’aucuns estiment que les jouets reconduisent ainsi les stéréotypes de genre, qui pourraient conduire à la reproduction de certaines inégalités sociales. Il s’agira donc d’opérer un choix éclairé lors de son acquisition. L’utilité sociale du jouet est qu’il participe de l’assimilation des règles de vie en société car le jeu est pleinement une activité sociale du fait des interactions notées au cours de son déroulement.
Cette utilité sociale a justement fait naitre chez des entrepreneures un désir de transmission. Quelle appréciation sociologique faites-vous de cela ?
Il s’agit d’un processus de déconstruction-reconstruction qui est enclenché. Parce que le jouet est loin d’être un objet neutre, il s’est ressenti un besoin d’adaptation aux contextes culturels variés de la part de nos concepteurs locaux. Au-delà du divertissement, il y a toute une charge symbolique. Prenons le cas des poupées, nous pouvons mettre en lumière le phénomène des « black dolls » ou poupées noires habillées en pagne wax, aux cheveux crépus, qui diffèrent des « babies noires » qui n’ont de noire que la couleur de peau. Pour une fillette noire, jouer avec une « poupée blanche » ou « domu tubab » ne collerait pas avec la construction qu’elle pourrait opérer à travers un processus d’identification à cet objet qui ne lui ressemble pas. L’objectif affiché par ces concepteurs est de valoriser l’estime de soi chez la fille africaine, l’acquisition d’un esprit d’ouverture des autres enfants non noirs, conduisant au respect de la différence et à l’intégration de la diversité. Poussés par ce vent de promotion de l’acceptation de l’autre et l’intégration de tous dans la société, certains sont même allés jusqu’à concevoir des poupées albinos.
Par conséquent, la démarche de reconstruction, passerait par la mise en valeur auprès des petites filles de la multiplicité de la beauté pour espérer s’affranchir des codes esthétiques venus d’ailleurs et tendre vers un changement progressif dans les standards de beauté. C’est un pari qui n’est pas encore gagné du fait du pouvoir grandissant des réseaux sociaux.
Concernant les jeux de société, au soubassement de ces pratiques commerciales à travers l’émergence de ces jeux de société africains ; où on apprend, on se divertit, on réfléchit par exemple en wolof et en français, subsiste aussi la transmission de valeurs. Celle-ci devrait permettre à l’enfant de retrouver son identité culturelle et linguistique principalement pour les enfants issus de la diaspora afin de ne pas leur faire oublier leurs racines, ou alors, pour les autres enfants, maintenir leur identité intacte. Ces pratiques commerciales à travers l’émergence de ces jeux de société africains devraient permettre à l’enfant de retrouver son identité culturelle et linguistique principalement pour les enfants issus de la diaspora afin de ne pas leur faire oublier leurs racines, ou alors, pour les autres enfants, maintenir leur identité intacte. Leurs concepteurs sont pleinement conscients de l’existence d’interactions fortes entre l’enfant et l’objet que constitue le jouet. On en revient toujours à la lancinante question de la transmission des valeurs telles que le respect des différences, la tolérance grâce à l’outil de socialisation qu’est le jouet. Le principe de l’identification et de l’appropriation, de l’acceptation de soi et de l’autre seraient au cœur de ces initiatives que leurs auteurs considèreraient au final comme une contribution ludique au vivre-ensemble.
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LE SÉNÉGAL COURT APRÈS SES RÊVES
Au moment où l'Assemblée nationale examine le budget 2025, Ndongo Samba Sylla pointe du doigt l'absence criante de souveraineté monétaire. Une situation qui pourrait condamner le pays à rester spectateur de son propre développement
Le Sénégal nourrit des ambitions économiques généreuses à travers sa Vision 2050, mais se heurte à des contraintes financières majeures qui pourraient freiner ses projets. C'est ce qu'a expliqué lundi l'économiste Ndongo Samba Sylla sur la TFM, alors que s'ouvre le marathon budgétaire à l'Assemblée nationale pour l'adoption du budget 2025.
L'expert souligne que cette vision, bien qu'allant dans la bonne direction, est confrontée à une réalité implacable : le pays ne dispose pas des instruments nécessaires à son développement. "Il n'y a aucun exemple de développement économique à la périphérie sans que l'État n'assume un rôle de plus en plus grand", explique-t-il, citant les expériences historiques de la Grande-Bretagne, des États- Unis, du Japon et plus récemment de la Chine.
Le problème fondamental, selon l’économiste, réside dans l’absence de souveraineté monétaire. "Quand vous avez votre propre monnaie, vous n'avez pas de contrainte financière dans celle-ci", précise-t-il, ajoutant que "un État qui dit qu'il n'a pas d'argent est un État qui ne comprend pas comment faire fonctionner le système monétaire et financier".
Cette situation se reflète dans les chiffres alarmants de la dette publique. En 2025, le service de la dette atteint 2900 milliards de FCFA, soit les deux niveaux des recettes fiscales. Sur les cinq prochaines années, le pays devra débourser au minimum 11 000 milliards de FCFA pour honorer ses engagements financiers.
Pour Ndongo Samba Sylla, la domestication de l'économie voulue par l'État, bien qu'ambitieuse, risque de se heurter à ces contraintes structurelles. Sans les instruments fondamentaux du développement, notamment le contrôle du secteur monétaire et financier, la Vision 2050 pourrait rester un vœu pieux, malgré ses intentions louables.
LES AVOCATS SÉNÉGALAIS, SENTINELLES HISTORIQUES DE LA DÉMOCRATIE
Des pionniers comme Valdiodio Ndiaye aux ténors actuels El Hadji Diouf et Ciré Clédor Ly, le barreau transcende le simple cadre judiciaire. Face à une justice souvent instrumentalisée, ces "bulldozers" du droit demeurent un contre-pouvoir essentiel
(SenePlus) - La figure de l'avocat au Sénégal incarne une tradition démocratique unique en Afrique de l'Ouest. Dans les couloirs des tribunaux de Dakar, ils ne sont qu'environ quatre cents à porter la robe noire, majoritairement des hommes, mais leur influence sur la vie politique et institutionnelle du pays s'avère considérable depuis l'indépendance.
"Au Sénégal, le pouvoir utilise souvent la justice pour frapper ses opposants", explique Maître Moussa Sarr dans les colonnes du Monde, soulignant ainsi le rôle crucial des avocats comme "défenseurs de la démocratie". Cette position s'illustre particulièrement à travers des figures emblématiques comme Maîtres El Hadji Diouf et Ciré Clédor Ly, dont les plaidoiries retentissantes dépassent souvent les frontières nationales.
L'histoire de cette profession au Sénégal se confond avec celle de la République elle-même. Comme le rappelle Céline Sow, journaliste et documentariste, "plusieurs des premiers hauts fonctionnaires et dirigeants du pays portaient la robe". Le cas de Valdiodio Ndiaye, premier ministre de l'Intérieur du Sénégal indépendant, symbolise cette époque pionnière où les avocats sénégalais ont commencé à s'imposer dans un milieu alors dominé par les Français.
Cette tradition s'est perpétuée jusqu'à la présidence, avec Abdoulaye Wade (2000-2012), longtemps connu comme "Maître Wade" avant d'accéder à la magistrature suprême. Sa défense historique de Mamadou Dia en 1963, bien qu'infructueuse, avait déjà forgé sa réputation. Le quotidien français rapporte également la présence régulière d'avocats dans les gouvernements successifs, notamment sous la présidence de Macky Sall (2012-2024), avec des figures comme Aïssata Tall Sall, Sidiki Kaba, ou Omar Youm.
Le rayonnement des avocats sénégalais s'étend bien au-delà des frontières nationales. Maître El Hadji Diouf, qui se décrit lui-même comme un "bulldozer", et son "meilleur ami au barreau" Maître Clédor Ly, plaident régulièrement devant les tribunaux de la sous-région et la Cour de justice de la Cedeao. Leur influence s'explique, selon Amadou Sall, ancien ministre cité par Le Monde, par "la démocratie sénégalaise [qui] permet aux avocats d'adopter un ton libre et de revenir dans leur pays sans crainte".
Cette liberté de ton se transmet aux nouvelles générations, à l'image de Bamba Cissé, figure montante du barreau de Dakar, formé dans le cabinet de Clédor Ly. Elle s'accompagne d'une vigilance constante sur l'état des institutions, comme en témoigne la récente prise de position de Maître Clédor Ly contre "une justice expéditive", rapportée par Le Monde, alors même que son ancien client Ousmane Sonko occupe désormais le poste de Premier ministre.
Ainsi, le barreau sénégalais continue d'incarner un contre-pouvoir essentiel, perpétuant une tradition d'engagement pour l'État de droit qui remonte aux premières heures de l'indépendance.
PROJET GTA, AIR CONSULTING DANS LE VISEUR DU FISC
Après un contrôle effectué auprès d’un sous-traitant, les autorités fiscales ont estimé que la société Air Consulting Sarl doit régler une somme de 2,76 milliards de Fcfa en droits simples.
Le fisc a révélé un scandale financier concernant le projet GTA de BP Mauritania. Après un contrôle effectué auprès d’un sous-traitant, les autorités fiscales ont estimé que la société Air Consulting Sarl doit régler une somme colossale de 2,76 milliards de Fcfa en droits simples, assortie de 1,38 milliard de Fcfa en pénalités légales, rapporte le quotidien Libération.
Le journal explique que cette demande a été formulée après un examen minutieux des contrats liés à la fourniture de personnel expatrié pour ce projet.
Face à cette réclamation, Air Consulting Sarl a introduit une opposition, et l’affaire a été portée devant le tribunal ce lundi.
Ce n’est pas la première fois que des sous-traitants du projet GTA sont mis sous pression par les autorités fiscales. En effet, selon la même source, avant Air Consulting, la société Eiffage Marine, également impliquée dans ce projet, avait été redressée pour un montant impressionnant de 17,637 milliards de Fcfa.
PEKESSE, 23 TONNES D’ARACHIDES SAISIES
Cette saisie a eu lieu après que la gendarmerie locale a informé les autorités du commerce de la vente de ces arachides à des prix compris entre 275 et 300 francs le kilogramme. Trois opérateurs économiques de la région ont été interpellés.
Le service départemental du commerce de Tivaouane a procédé à la saisie de plus de 23 tonnes d’arachides vendues en dessous du prix plancher fixé à 305 francs CFA par kilogramme, lors du marché hebdomadaire de Pékesse.
Cette saisie a eu lieu après que la gendarmerie locale a informé les autorités du commerce de la vente de ces arachides à des prix compris entre 275 et 300 francs le kilogramme. L’information a été confirmée par une enquête menée par les services compétents, a indiqué Khadim Ndiaye, chef du service régional du commerce de Thiès.
Lors du conseil interministériel du 26 novembre consacré à la campagne agricole 2024-2025, le gouvernement du Sénégal a établi un prix minimum de 305 francs CFA pour le kilogramme d’arachides. Toute vente en dessous de ce prix est considérée comme illégale, a précisé M. Ndiaye.
Trois opérateurs économiques de la région ont été interpellés, et les 23,250 tonnes d’arachides saisies ont été mises sous scellés. Selon le responsable, ces pratiques visent à compromettre les efforts de l’État pour une campagne de commercialisation agricole réussie.
M. Ndiaye a précisé que des sanctions seront appliquées conformément à la loi, et que la procédure est en cours. Les sanctions peuvent être de nature administrative, avec un règlement amiable par paiement, ou judiciaire si aucun accord n’est trouvé. Dans ce dernier cas, l’affaire sera portée devant les tribunaux compétents.
Bien que son service manque de moyens, Khadim Ndiaye a souligné l’efficacité du système de contrôle mis en place, reposant en partie sur un réseau d’informateurs qui permet d’assurer une bonne couverture du territoire.
L'ENAP A RECRUTE 865 AGENTS PAR AN SUR 10 ANS
Mbaye Sarr, directeur de l’École Nationale d’Administration Pénitentiaire était l’invité de l’émission «Salaam Sénégal» sur Radio Sénégal. Selon lui, cette année, l’École Nationale d’Administration Pénitentiaire célèbre ses 10 ans ayant été créée en 20
Mbaye Sarr, directeur de l’École Nationale d’Administration Pénitentiaire était l’invité de l’émission « Salaam Sénégal » sur Radio Sénégal. Selon lui, cette année, l’École Nationale d’Administration Pénitentiaire célèbre ses 10 ans, ayant été créée en 2014. À cette occasion, des célébrations sont prévues au cours du premier trimestre de l’année 2025. Auparavant, la formation des agents se faisait à l’École de Police, mais depuis 2017, ils bénéficient d’une structure de formation propre à eux.
Dans le cadre du développement de l’école, Mbaye Sarr a souligné qu’un laboratoire de recherche et une revue semestrielle ont été mis en place. Parmi les priorités du gouvernement, figure la construction d’une nouvelle école, visant à améliorer les conditions d’apprentissage des apprenants. En 2025, un programme annuel de renforcement des capacités est déjà établi, avec l’ambition d’y faire participer 1000 agents.
Le directeur a également mentionné que l’État a engagé un projet ambitieux de modernisation de l’administration pénitentiaire, comprenant la construction de neuf nouvelles prisons et la réhabilitation d’établissements existants. Ces initiatives visent à améliorer la prise en charge des détenus. Le budget alloué par l’État pour les détenus a été rehaussé, passant de 1152 FCFA à 1300 FCFA, un effort financier significatif destiné à améliorer continuellement les conditions de détention.
Mbaye Sarr a fait état d’un projet de recrutement de 865 agents par an sur une période de 10 ans, afin de combler le gap en personnel, tout en respectant le ratio établi par les normes internationales. Il a également souligné la nécessité de revoir le statut de l’administration pénitentiaire, une mission qui lui incombe. Ce nouveau statut permettra d’instaurer un suivi post-carcéral, de spécialiser le personnel, et d’élever le niveau de recrutement.
Enfin, il a évoqué les initiatives innovantes mises en place au sein de l’administration pénitentiaire, comme la création de deux boulangeries et la construction d’une troisième près de Thiès, ainsi qu’une ferme laitière qui non seulement produit du lait mais qui offre aussi une formation aux détenus. En collaboration avec l’État, un fonds de réinsertion est également prévu pour financer les projets des détenus, témoignant d’une volonté d’intégration et de réhabilitation au sein de la société.
par Ismaila Madior Fall
CESEA, HCCT, LES MAL AIMÉS DE LA DÉMOCRATIE SÉNÉGALAISE
Le Sénat, le CESE et le HCCT ont alterné créations et suppressions au gré des alternances politiques. Cette instabilité chronique soulève une question essentielle : comment construire une institution consultative capable de transcender les clivages ?
C’est acté : deux institutions majeures (CESE et HCCT) viennent d’être dissoutes. Pourtant, il ne viendrait à l’esprit de personne de supprimer les institutions que sont le président de la République ou l’Assemblée nationale. La doyenne des institutions, l’Assemblée nationale, depuis qu’elle est passée d’Assemblée territoriale à Assemblée nationale, relève le défi de l’immortalité institutionnelle malgré les critiques relatives à son organisation et son fonctionnement. Quant au président de la République, avec un statut modeste à l’Indépendance, il est devenu, depuis 1963, la clef de voûte des institutions. Aucune autre institution de la République (gouvernement, Premier ministre ou Cour suprême) ne peut se prévaloir de cette permanence existentielle.
Le président et l’Assemblée, outre leur légitimité tirée de leur statut d’institution fondatrice, doivent, aussi, leur permanence institutionnelle à une donnée matricielle de toute construction républicaine qui se veut durable : le consensus élevé autour d’une institution.
Lorsque des institutions sont créées et adoptées aux travers d’un processus clivant, d’une incompréhension de leur utilité par l’opinion, il y a des risques qu’elles ne résistent pas au temps et aux alternances parce qu’elles résultent d’un consensus bas. C’est le cas du Sénat, du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et du Haut Conseil des collectivités territoriales (HCCT).
La plupart des grandes démocraties disposent d’un Sénat (chambre de la raison et de la sagesse aux côtés de l’Assemblée, chambre de la passion) qui joue un rôle fondamental dans la procédure législative et le contrôle de l’action gouvernementale et d’un Conseil économique et social ; institution existant même aux Nations unies. Instauré au Sénégal en 1998, supprimé en 2005, restauré en 2007 avant d’être supprimé en 2012, le Sénat n’est jamais entré dans les cœurs.
Idem pour le CESE. Adopté dès le début de l’indépendance et d’une continuité remarquable, il ne sera supprimé qu’en 2001, avant d’être restauré sous forme de Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales (CRAES) en 2003 et reviendra sous forme de CES en 2008, puis de CESE en 2012. Cadre institutionnel de dialogue des territoires, le HCCT, instauré en 2016, n’aura duré que 8 ans.
Au XXIème siècle, une démocratie ne pouvant pas se passer d’une institution consultative de rang constitutionnel, il convient d’envisager, dans la perspective de réforme ultérieure, de mettre en place une institution du genre qui serait la synthèse du Sénat, du Conseil économique, social et environnemental et du Haut Conseil des collectivités territoriales. Dans l’Etat de droit, le dialogue consultatif permet de maintenir une forme de démocratie délibérative transpartisane.
Au demeurant, la création éventuelle de cette indispensable institution consultative de la République devrait se faire sous les auspices du consensus élevé, à défaut de quoi elle risque de connaître le sort de ses devancières.
Ismaila Madior Fall est Professeur des Universités.
UNE LENTE STRANGULATION DE LA FRANÇAFRIQUE AU SÉNÉGAL
Boubacar Boris Diop décrit un processus d'émancipation qui se distingue par sa subtilité. Cette transition en douceur, explique-t-il, masque une réalité implacable : le "joyau de la couronne" française en Afrique s'est définitivement détaché
L'intellectuel Boubacar Boris Diop n'y est pas allé de main morte concernant les rapports entre le Sénégal et la France. Rehaussant de sa présence la cérémonie de dédicace du livre "De la démocratie en Françafrique, une histoire de l'impérialisme électoral" de la journaliste française Fanny Pigeaud et de l'économiste Ndongo Samba Sylla, l'écrivain sénégalais pense que la France a perdu définitivement le Sénégal. À l'en croire, en effet, l'ambassadeur français est devenu un diplomate parmi d'autres dans le pays.
Pour Boubacar Boris Diop, la Françafrique est en train de perdre un de ses «joyaux» en Afrique. Avec le changement de régime au Sénégal, l'écrivain qui est certainement l'un des penseurs les plus connus souligne l'importance de constater la fin de la Françafrique dans plusieurs pays du continent, à commencer par le Sénégal. Devant une avalanche d'intellectuels et de membres de la société civile du pays, et disséquant l'actualité du livre "De la démocratie en Françafrique, une histoire de l'impérialisme électoral", Boubacar Boris Diop soutient sans ambages : «Le Sénégal était un peu le joyau de la couronne. Et il n'a jamais été question d'accepter de perdre le Sénégal pour la Françafrique. Mais c'est perdu».
Ce qui se passe ici, c'est que ça ne se fait pas de manière spectaculaire, ça se fait avec beaucoup de délicatesse. «Au fond, c'est une lente strangulation de la Françafrique au Sénégal. L'ambassadeur de France est devenu un diplomate parmi tant d'autres», renseigne l'auteur de "Murambi, le livre des ossements". Il a fait savoir en outre qu'en quatre ans, l'Afrique est pratiquement passée dans une autre dimension du temps. «Aujourd'hui le Mali, le Burkina, le Niger ont chassé les français. Il y a quelques jours le Tchad a fait de même», ajoute-t-il.
«Le livre est en realiteune autopsie de Lafrançafrique»
S'exprimant sur le livre, l'écrivain sénégalais trouve que c'est un ouvrage important en ce sens qu'il parle de la Françafrique. «Ce que malheureusement l'on n'a pas fait assez souvent sur le continent africain. Fanny et Ndongo prennent la parole sur des sujets essentiels pour nous. J'ai même envie de dire des sujets existentiels», note-t-il avec satisfaction avant d'ajouter : «Nous nous sommes habitués à cette dimension sanglante de la Françafrique, dimension spectaculaire. Ce que font Ndongo et Fanny, c'est de nous montrer que la Françafrique est aussi un tricotage au quotidien dans les cabinets ministériels. On n'a pas besoin d'avoir du sang à flot, mais on contrôle la situation à travers des élections qui sont truquées, à travers des articles dans telle ou telle constitution».
Indiquant dans la foulée que dans l'ouvrage, il n'y a pas de vociférations, il n'y a pas de véhémence. «C'est écrit de manière clinique. C'est écrit avec beaucoup de précision», déclare le Fondateur de Defuwaxu.com, unique quotidien en ligne en langue wolof du Sénégal. Selon lui, il est possible de voir ce livre comme un diagnostic de la Françafrique. Mais en fait, révèle-t-il, c'est une autopsie de la Françafrique. Néanmoins il se désole du fait que sur le continent, les gens ne semblent pas prendre la mesure de l'événement. Le tournant, d'après lui, constitue le fait que la CEDEAO est en train d'exploser en plein vol le fait que tous ces pays se libèrent. «Cette ébullition-là, nous ne l'analysons pas», s'inquiète-t-il.
Ndongo Samba Sylla :«Bassirou Diomaye est leseul anti françafriquequi soit parvenu au pouvoir via les elections,c'est la seule exception»
Pour sa part, Ndongo Samba Sylla rappelle que de 1960 jusqu'à maintenant, il n'y a jamais eu de dirigeant anti Françafrique, ouvertement anti-Françafrique qui soit parvenu au pouvoir via des élections normales. «La seule exception, c'est l'élection de Bassirou Diomaye Faye en mars 2024, c'est la première exception», renseigne le chercheur sénégalais dans son analyse non sans indiquer que les seuls anti Françafrique qui sont parvenus au pouvoir dans l'histoire sont des militaires comme Thomas Sankara. De l'avis de Sylla, il n'y a que les militaires qui ont le niveau d'organisation pour lutter contre l'impérialisme. « Et je ne suis pas d'accord avec ceux qui disent que c'est un recul démocratique. Pour ce qui se passe au Sahel, c'est qu'on est dans une dynamique de libération. Je ne dirais jamais si un coup d'Etat est bon ou mauvais. Tout dépend si on est dans une perspective de libération», explique Ndongo Samba Sy en observant ce qui se passe dans la sous-région actuellement. Rappelons que la journaliste française et l'économiste sénégalais avaient déjà coécrit le livre l'Arme invisible de la Françafrique, une histoire du CFA.
LE PROCUREUR ORDONNE UNE AUTOPSIE, LA FAMILLE S'Y OPPOSE, DES DIGNITAIRES MOURIDES S'IMPLIQUENT
Décès mystérieux d'un détenu de 59 ans à Mbacke, Voilà une sombre affaire qui, en plus de défrayer la chronique dans le Baol, risque de faire parler un bon bout de temps entre Mbacké et Touba, voire plus loin à travers le Sénégal.
Jeudi passé, Aliou Lo, 59 ans, détenu à la prison de Mbacké dans des conditions encore floues, a trouvé la mort. Le problème, c'est le bras de fer qui oppose le procureur de Mbacké qui a ordonné une autopsie, à la famille du défunt qui désapprouve cette décision.
Voilà une sombre affaire qui, en plus de défrayer la chronique dans le Baol, risque de faire parler un bon bout de temps entre Mbacké et Touba, voire plus loin à travers le Sénégal. Âgé de cinquante-neuf piges, le vieux Aliou Lo qui purgeait une peine de prison ferme de deux mois à la maison d'arrêt et de correction de Mbacké pour vol de paille d'arachide, a rendu l'âme après quatre-vingt-seize heures d'intenses douleurs qui l'ont cloué au lit. Natif de Koungueul, fils de feu Serigne Lo et de feu Oumy Lam, il décède au cours de son évacuation vers le centre de santé de Mbacké, aux alentours de dix heures du matin, par un membre de l'administration pénitentiaire en l'occurrence l'infirmier de la prison, Pape Lèye Mbaye. Souffrant de terribles maux épigastriques, Aliou Lo est mort avant même d'arriver à destination.
décès, c'est l'infirmier Pape Lèye Mbaye lui-même qui s'est présenté vers onze heures au commissariat urbain de police de Mbacké pour déclarer le décès conformément à la loi. Après quoi, le corps sans vie a été transporté, sous bonne escorte des forces de défense et de sécurité à la morgue de l'hôpital Matlaboul Fawzeyni de Touba pour l’élucidation des causes du décès. Après avoir à son tour constaté le décès, le corps médical de l'hôpital Matlaboul Fawzeyni de Touba est arrivé à la conclusion que la mort du vieux Aliou Lo est de nature indéterminée. Par la suite, la dépouille a été gardée à la morgue de ladite structure sanitaire.
L’AUTOPSIE ORDONNEE PAR LE PROCUREUR DE MBACKE DESAPPROUVEE PAR LA FAMILLE DU DEFUNT
Mis au parfum de la situation, le délégué du procureur de la République près le tribunal d’instance de Mbacké, après avoir recueilli les orientations et conclusions des autorités médicales et pénitentiaires, a décidé d'ordonner une autopsie aux fins de déterminer les causes du décès d’Aliou Lo. Seulement, les membres de la famille du défunt, informés de la situation, ont dans un premier temps exigé que la dépouille leur soit restituée pour être inhumé dans les meilleurs délais au cimetière musulman de Touba - Bakhya, conformément à la tradition familiale. Mais quand ils ont appris la décision du procureur près le tribunal d'instance de Mbacké de procéder à une autopsie à Dakar, Modou Bousso Lo, fils aîné du défunt, et les autres proches et parents du disparu ont faits des pieds et des mains pour empêcher qu'une autopsie soit pratiquée sur la dépouille.
LE BRAS DE FER ENGAGE, DES PROCHES DU KHALIFE DES MOURIDES IMPLIQUES MAIS EN VAIN
Dans tous leurs états lorsqu'ils ont su la démarche entreprise par le parquetier du palais de justice de Mbacké, les parents et proches de Aliou Lo, pour taire l'affaire par souci de gêne du fait que leur père, époux et même grand-père, est mort en purgeant une peine de prison ferme de deux mois pour vol de paille d'arachide, pour simplement par pur respect de la tradition familiale aux préceptes de la religion musulmane, ont réussi à rallier à leur cause plusieurs influents dignitaires mourides proches de Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, le Khalife général des mourides. Mais en dépit de l'énorme pression mise par tout ce beau monde pour éviter une autopsie sur le corps d’Aliou Lo, le procureur près le tribunal d'instance de Mbacké est resté intransigeant en maintenant sa décision. D'ailleurs, des sources proches du dossier renseignent que la dépouille de Aliou Lo sera présente dès ce lundi 15 décembre 2024 dans une structure sanitaire de renommée pour les besoins de l'autopsie. Il faut rappeler que cette affaire intervient trois jours après le décès tragique du chef de village de Keur Mbaye Maty. Ce vieil homme âgé de quatrevingt-quatre piges a trouvé la mort dans des circonstances encore floues alors qu'il était détenu à la maison d'arrêt et de correction (Mac) de Thiès.
LA THEORIE WARDINI MIS EN BRANLE
Rose Wardini, visiblement touchée par la situation des abris provisoires au Sénégal, s’engage à éradiquer ces structures précaires à travers son programme "Zéro Abris Provisoires". Dans ce cadre, elle a récemment inauguré la réfection de la maternité..
Rose Wardini, visiblement touchée par la situation des abris provisoires au Sénégal, s’engage à éradiquer ces structures précaires à travers son programme "Zéro Abris Provisoires". Dans ce cadre, elle a récemment inauguré la réfection de la maternité, du CEM et de la mosquée à Mangouléne, offrant ainsi aux populations de meilleures conditions de vie et d’accès à la santé et à l’éducation.
Le village de Mangouléne, à 9 km de Bignona, a marqué une avancée significative dans l’amélioration de ses infrastructures samedi 14 décembre 2024. La maternité, le Collège d’Enseignement Moyen (CEM) et la mosquée ont été inaugurés après leur réhabilitation complète. Ces travaux, inscrits dans le programme "Zéro abris provisoires" initié par Dr Rose Wardini, répondent à des besoins vitaux en matière de santé, d’éducation et de vie communautaire.
Une initiative pour répondre à des besoins pressants
Lors de la cérémonie, Dr Rose Wardini, initiatrice du projet et Présidente de l’organisation Sénégal Nouveau, a souligné l’urgence d’améliorer les conditions de vie des populations rurales :
"Lors de ma visite à Mangouléne il y a deux mois, j’ai constaté des défis importants, notamment l’état vétuste des infrastructures. Ce constat m’a poussée à prendre l’engagement de rénover la maternité, le bloc administratif du CEM et la mosquée. Cette démarche s’inscrit dans notre vision d’éliminer les abris provisoires et de garantir des cadres dignes pour les populations, surtout pour les jeunes et les femmes."
Elle a également rappelé l’inspiration tirée des orientations du Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, visant à mettre fin à l’utilisation d’abris précaires :
"En 2024, il est inadmissible de voir encore des abris provisoires dans nos écoles. Les enfants méritent des environnements propices à leur apprentissage, et c’est à nous, citoyens engagés, de travailler pour ce changement."
Des impacts concrets sur le quotidien des habitants
La rénovation de la maternité a apporté un soulagement à la communauté. Issa Baldé, infirmier chef de poste de santé à Mangouléne, se félicite :
"Aujourd’hui, nous disposons d’une maternité entièrement rénovée et équipée pour offrir des soins de qualité. Les femmes enceintes peuvent accoucher dans des conditions décentes, avec des lits et des matelas neufs, des rideaux et une salle d’accouchement moderne. C’est un véritable bond en avant, même si des défis subsistent."
Sur le plan éducatif, le CEM rénové offre un cadre plus adéquat pour les élèves, la mosquée réhabilitée aide la communauté dans la pratique religieuse.
Vers une responsabilisation des populations
Au-delà des infrastructures, Dr Rose Wardini a insisté sur l’importance de l’engagement communautaire :
"Ces réalisations appartiennent aux populations locales. Nous voulons inculquer aux jeunes et à tous les habitants une culture du don de soi. Nous ne faisons que poser les bases ; c’est à eux de prendre en charge et de pérenniser ces acquis.
Un engagement national en faveur des zones reculées
Ce projet s’inscrit dans une dynamique nationale visant à réduire les disparités entre les zones urbaines et rurales. Avant Mangouléne, Dr Wardini avait piloté la réfection de salles de classe au CEM Unité 19 des Parcelles Assainies à Dakar.