CINQ MILLIARDS DE COLÈRE ET DE RÉPROBATION
L'indemnisation annoncée de 5 milliards de FCFA aux 1 875 victimes, identifiées jusque-là, des manifestations violentes entre mars 2021 et février 2024 suscite un tollé

L'indemnisation annoncée de 5 milliards de FCFA aux 1 875 victimes, identifiées jusque-là, des manifestations violentes entre mars 2021 et février 2024 suscite un tollé. Déjà, la transparence dans le traitement des dossiers a été remise en cause. Face à l'écho, la société civile demande un processus d'indemnisation inclusif, transparent et équitable.
Ça crie haro sur le baudet ! Déjà que le traitement des dossiers en vue de l'indemnisation des victimes des manifestations violentes entre mars 2021 et février 2024 vient de démarrer, une folle polémique enfle. Sur les réseaux sociaux, des proches du régime actuel se crêpent les chignons. Sur sa page Facebook, Mamadou Diop Seck, qui se définit comme ex détenu politique, a dit avoir appris le début des traitements des dossiers comme tous les Sénégalais avec le ministre des Finances, lors de son passage à l’Assemblée nationale pour défendre le projet de loi de finances rectificative.
“Je n'étais pas au courant que les opérations pour les indemnisations avaient débuté. Je l'ai appris par le biais du ministre des Finances. Je demande aux responsables de clarifier les choses. On doit pouvoir savoir qui en a bénéficié et sur quel critère ? L'indemnisation des victimes doit se faire dans la transparence. Nous avons fait 9 mois de prison à cause de notre opposition contre le régime de Macky Sall. Et en prison, nous avons été victimes de maladie. Donc, on n'acceptera pas qu'une commission mise en place pour indemniser les victimes se fasse dans des conditions sombres”, a-t-il déclaré dans une vidéo disponible sur sa page Facebook, jusqu'à hier dans la nuit.
Dans un live, Assane Fall, plus connu sous le nom d’Azura Fall, a fait savoir qu'il a été contacté par Diop, sans plus donner d'informations sur l'identité, au sujet de l'indemnisation des victimes des manifestations préélectorales. “ Diop m'a appelé pour me demander si j'ai été indemnisé. Je lui ai dit que je suis allé rencontrer d'autres victimes qui ne peuvent pas se lever de leurs lits. C'est pourquoi je vous demande d'arrêter ce débat malsain. Ousmane Sonko sait ce qu'il faut faire et il le fera. Cela ne vaut pas la peine de s'acharner sur Maïmouna Dièye”, a-t-il déclaré pour décharger celui dont il se dit être proche.
Sous le même registre, Azoura Fall tonne : “ Maimouna Dièye n'est mêlée ni de près ni de loin à cette affaire dont on veut lui faire porter le chapeau. Si la polémique a connu toute cette ampleur, c'est à cause de Mollah Morgun qui met du feu sur l'huile. Je vous demande d'arrêter de filer des informations à Mollah Morgun pour qu'il attaque les ministres”
Comme cela ne suffisait pas, il s'est livré à une série de déballages accusant même Mollah Morgun d'avoir simulé une attaque de la maison de son père lors des manifestations. “ Qui a brûlé la maison de ton père ? C'est toi qui a payé des jeunes pour qu’ils mettent du feu sur la maison de ton père pour faire porter le chapeau à l'Apr”, a-t-il déclaré dans sa vidéo.
Dans un live de plus d'une heure, le rappeur membre du groupe Keur Gui qui se fait appeler lanceur d'alerte, Mollah Morgun, s'est étonné d'un système de partage de deniers publics en catimini aux antipodes de la bonne gouvernance. “J'ai été contacté par Diop Taïf qui m'a fait savoir que de l'argent a été dégagé et quelques patriotes se sont partagés les fonds en catimini. Après mes investigations, il m'a été confirmé que 108 millions ont été alloués à certaines victimes sur la base de la base de la présentation d'un dossier médical complet, d’une pièce d'identité, d’un numéro de téléphone et des éléments de traçabilité. Dégager 108 millions de Fcfa de nos deniers publics pour des gens sans aucune transparence ne rentre pas dans la ligne de conduite du triptyque Jub, Jubal, Jubanti”, clame l'activiste.
PROCESSUS D'INDEMNISATION INCLUSIF, TRANSPARENT ET EQUITABLE
Il a aussi souligné une différence de montants perçus. “ Des gens ont reçu 2 millions pendant que d'autres ont reçu 500 000 FCFA. Quels sont les critères qui ont été utilisés pour la répartition des fonds ? Qu'est-ce qui explique la différence sur les montants ?” s’interroge Mollah Morgan qui n'a pas manqué de mouiller la Direction générale à la Solidarité et à la Protection sociale logée au ministère de la Famille, de la Femme et des Solidarités.
Plus loin, dans un autre post, s'adressant au gouvernement, il a écrit : “ Sortez-nous la liste des bénéficiaires et les sommes reçues ou nous retiendrons que la ministre Maïmouna Dièye et sa bande ont détourné l’argent du contribuable sénégalais et nous doivent des explications plausibles de bonne gouvernance et une bonne gestion des finances publiques. Que justice soit faite au nom de la démocratie et de la transparence ! Le Sénégal avant tout. La patrie avant le parti. JUB JUBAL JUBANTI”.
Réagissant à la polémique, le Directeur exécutif d’Amnesty Sénégal a demandé à l’État de travailler avec les associations des victimes des violences politiques de 2021-2024, les avocats et les organisations de la société civile qui les soutenaient pour mettre en place un processus d'indemnisation inclusif, transparent et équitable. “L'État doit tout mettre en œuvre pour que sa volonté d'indemniser au plus vite les victimes ne soit entachée de controverses et de contestations”, a appelé Seydi Gassama.