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25 février 2025
RED STAR – APRÈS LA MONTÉE, HABIB BÈYE DÉVOILE SES AMBITIONS
L’entraîneur du Red Star s’est exprimé après avoir acquis la montée en Ligue 2 ce vendredi 20 avril- Mes critères de choix sont liés à mon plan carrière, mon ambition, et la perspective de travailler dans un club qui me donne les moyens de le faire.
Après l’avoir raté de peu la saison dernière, le Red Star atteint enfin son objectif. Malgré la défaite 0-2 contre Dijon ce vendredi lors de la 30e journée de National 1, le club audonien a officiellement validé la montée en Ligue 2, suite au match nul de Martigues contre Cholet (2-2). Après la fin de la rencontre, l’entraîneur Habib Bèye s’est exprimé dans Le Parisien. Occasion pour le consultant de Canal+ d’évoquer son avenir. Il n’écarte pas l’idée de rester au Red Star et mener l’équipe en Ligue 2, mais Bèye veut de réelles garanties.
« Je suis en fin de contrat. J’ai été sollicité par deux clubs du Top 10 de Ligue 1 dont Lyon, mais je suis resté pour finir ma mission, confie l’ancien latéral international sénégalais. Ce n’est pas un secret. On va prendre le temps de s’asseoir et de manger avec mon président, avec qui j’ai une relation privilégiée, pour prendre les bonnes décisions. Si on repart ensemble, ça sera à 2000 % comme l’an dernier. On prendra la décision avant le match de Versailles (3 mai). Ma décision est avancée. Mais j’ai besoin d’éléments pour nourrir ma réflexion ».
J’ai peu de temps dans mon ambition
Depuis qu’il a pris les clés du Red Star, Habib Bèye ne cesse d’attirer les convoitises. Si deux de ses adjoints sont partis – Pierre Sage à l’Olympique Lyonnais et Sébastien Bichard à Clermont, l’ancien joueur de l’Olympique de Marseille a voulu être fidèle à un projet. Pour autant, il ne cache pas ses ambitions en tant qu’entraîneur. « J’ai besoin de savoir où le club veut aller dans le futur, dit-il. Le Red Star, je ne veux plus jamais le revoir en National. Je ne le cache pas, j’ai des ambitions d’entraîner au plus haut niveau le plus vite possible. Mais je me suis donné le temps pour ça car j’aurais pu partir. Mais il fallait que je sois prêt ».
Après le communiqué de la mairie de Dakar pour démentir toute implication de ses services dans l’évacuation de l’espace public dans les communes de Patte d’oie et Grand-Yoff, le maire de Grand-Yoff a fait une sortie lui aussi pour faire un démenti.
Selon Madiop DIOP, depuis quelques temps des vidéos circulent accusant le président de la République Diomaye FAYE ainsi que son Premier ministre Ousmane SONKO d’être derrière le déguerpissement des commerçants établis sur la chaussée. Pour l’édile, ils n’ont rien à voir dans cette opération. Et en tant que maire, explique-t-il, il a pris cette décision car il est de sa responsabilité de rendre fluide la circulation et libérer les espaces.
«Le Président Diomaye FAYE n’a rien à voir dans cette affaire. Ne confondons pas son rôle et le mien. Le Premier ministre SONKO n’a rien à voir dans cette affaire. Ils n’ont demandé à personne de déguerpir les commerçants. C’est la mairie qui a ses prérogatives et ses responsabilités pour les exercer. Je ne veux pas qu’il y ait des malentendus ou qu’ils soient mêlés à cette affaire. Ils font le travail et je fais le mien. Que les gens arrêtent la récupération politique pour ternir leur image », lance-t-il.
A noter que des affrontements ont eu lieu le 17 avril entre commerçants et forces de l’ordre à Grand-Yoff pour dénoncer leur déguerpissement.
par l'éditorialiste de seneplus, pierre sané
URGENCES POUR LE GOUVERNEMENT DE MON PAYS
EXCLUSIF SENEPLUS - L’évocation de « ruptures » fait resurgir les mêmes arguments que ceux déployés à l’époque contre l'indépendance. Il s’agit du réenchantement du pays pour l'avenir. Les Sénégalais attendent depuis 60 ans
Le 2 avril 2024, les téléspectateurs du monde entier (intéressés à l’Afrique) découvraient avec curiosité et sympathie le tout nouveau jeune président de la République du Sénégal. Prisonnier politique dix jours auparavant. Élu avec une marge impressionnante et incontestable de 54% dès le premier tour sur la promesse d’une ère de ruptures et de progrès et à travers une campagne électorale éclair ! Qui plus est le parti Pastef âgé de 10 ans à peine, issu d’une classe moyenne rétive à l’ordre colonial, nous gratifie d’une paire de leaders tout aussi légitimes l’un que l’autre pour le prix d’un. Deux compagnons de longue date. « Vous avez commencé l’écriture d’une belle page de l’histoire politique du continent. Maintenant vous devez aller jusqu’au bout», me félicita un ami.
Ces attentes chez beaucoup de mes connaissances rejoignent les attentes immenses des populations sénégalaises. Si le Pastef ne peut pas faire de promesses inébranlables concernant tous les résultats envisagés, il peut et doit s’engager solennellement à travailler avec détermination, avec passion, avec honnêteté, dans la transparence, la solidarité et l’humilité pour la réalisation de cette ambition et surtout à ne pas trahir une telle promesse.
Néanmoins, il serait dangereux de faire croire aux Sénégalais que Bassirou Diomaye Faye et son gouvernement dirigé par Ousmane Sonko seront en mesure de régler tous nos problèmes. Pour commencer, une société sans problèmes est une société morte et nul ne souhaite la mort du Sénégal (ou de l’Afrique). Il y aura donc toujours des problèmes à résoudre. D’autant plus que l’héritage est lourd et révélera au fur et à mesure des surprises fort désagréables et autres forfaitures.
Au Sénégal, les chantiers sont d’une telle envergure qu’il faudra du temps, des réflexions collectives approfondies, des évaluations, une planification rigoureuse et de la détermination à toute épreuve pour mettre l’ambition de transformation (le projet Pastef) sur les rails. En transcendant obstacles, sabotages, menaces, désinformations, trahisons et résistances passives.
La question est donc de décider de quels problèmes va se saisir le nouveau régime et de s’assurer d’être en capacité de les régler. Le « projet de Pastef » ne saurait les appréhender tous en même temps si ce n’est au niveau des politiques publiques et orientations générales.
Il s’agit comme le dit si bien Frantz Fanon, pour chaque génération d’identifier les défis clés de son époque et de les relever (pas seulement de les identifier). La réponse commence par des initiatives phares qui vont marquer les esprits et installer le pays dans une dynamique de changement ou l’imagination devient source d’inspiration.
Ensuite, on ne peut pas demander à tous les Sénégalais d’être patients. Certains sont plus impatients et avec raison. Cela fait 60 ans qu’ils attendent. Cela fait 60 ans que leurs gouvernants leur font des promesses non tenues. Beaucoup se sont résignés face à l’impéritie des régimes qui se sont succédé. Ils continuent de vivre dans la pauvreté et dans la précarité, dans l’insécurité et la peur. Ils vivent (?) privés d’espoir.
Ce sont des populations qui ne sont pas en capacité de participer à l’effort national de développement du pays et d’en jouir. Comment peut-on améliorer leurs conditions rapidement ?
Dès à présent, il serait judicieux de prendre des initiatives marquantes :
- d’abord de répondre à quelques unes des attentes immédiates des plus démunis, des plus vulnérables et pour la paix en Casamance ;
- ensuite de lancer le grand débat public inclusif sur les réformes dans les secteurs incontournables de la production, de l’éducation et de la justice dans une optique de souveraineté et de mieux-être des populations ;
- sans oublier notre engagement pour l’Afrique qui doit être réaffirmé à travers des initiatives concrètes fortes dès le début du quinquennat.
Voici donc une proposition de 10 mesures phares (identifiées à travers une lecture transversale du projet Pastef) qui pourraient être confiées à des commissions pluridisciplinaires et multisecteurs bénévoles avec un timing resserré. En soutien patriotique aux ministres en charge.
1. Eau, Électricité, Internet pour tous partout à des prix abordables ;
2 Évaluation de la stratégie nationale de lutte contre les violences faites aux femmes et mise en œuvre ;
3 Paix en Casamance et décentralisation pilote (pôle régional de développement) ;
4 Feuille de route pour une monnaie nationale ;
5 Feuille de route pour une modernisation du secteur économique populaire (dit « informel ») ;
6 Feuille de route pour la modernisation des daaras et pour la résorption de tous les abris provisoires ;
7 Commission vérité et justice et réforme de la justice et des prisons ;
8 Évaluation et poursuite de la réforme foncière ;
9 Refondation de la CEDEAO ;
10 Initiative africaine sur les migrations internationales ;
Quelques commentaires qui appuient ce choix :
Imaginez seulement le sourire d’un enfant dans un village éloigné qui pour la première fois de sa vie découvre l’éclairage public et dont les parents ont pu enfin s’offrir un frigidaire. Ça change la vie. Instantanément. Ou cette fillette qui peut grandir sereinement dans la grande banlieue dakaroise sans crainte de subir une mutilation sexuelle ou un mariage forcé. Ou encore cette famille de « réfugiés » qui peut enfin retourner dans son village en Casamance sans courir le risque de sauter sur une mine anti-personnelle ou de rencontrer des hommes en armes qu’ils soient porteurs d’uniformes ou non.
« Changer la vie. Ici et maintenant » était la promesse (non tenue) de la gauche française sous François Mitterrand. Nous ? On peut. Je dirai même qu’on doit. Il faut planifier sous forme de package à partir du territoire et faire travailler les prestataires en synergie. (1) (2) et (3)
Le mode de production, la monnaie et l’éducation nationale sont des héritages de la « colonie Sénégal » qui sont restés pratiquement intacts avec leurs pendants populaires.
L’évocation de « ruptures » fait resurgir les mêmes arguments que ceux déployés à l’époque contre (je dis bien contre !) l’indépendance :
⁃ « Attention à « l’aventure ».
⁃ Nous devons conserver notre « amitié » avec la France.
⁃ La « stabilité » doit être privilégiée sur toute autre considération » !… y compris la liberté ? et la transformation de l’héritage ?
Les porteurs de cet argumentaire sont en besoin pressant d’un décapage intellectuel. Ils nous retardent. Et bien sûr l’immobilisme colonial les arrange alors que ça pénalise la majorité laborieuse. Seule une stratégie de déconnexion résolue nous permettra de réorienter nos énergies nos ressources et notre travail vers la satisfaction des besoins existentiels de nos concitoyens, dans la garantie de leurs libertés publiques. La décolonisation inachevée constitue un obstacle paralysant à la construction d’un Sénégal souverain prospère et juste. Nous avons les solutions. Ces réformes sont nécessaires pour l’émergence, enfin, de citoyens souverains. (4) (5) et (6)
Quant à Macky Sall, il veut nous transmettre un livre d’histoire du Sénégal dont des pages clé auront été expurgées. Il n’en est pas question. Ce sont ces pages où il se révèle, avec ses complices, comme l’incarnation de la mal gouvernance, du pillage du bien public, des violences policières qui se sont traduites par des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des actes de torture, de privation arbitraire de liberté. Et maintenant au moment de quitter la scène, il décrète par le biais d’une loi scélérate, le pardon et la réconciliation en lieu et place des victimes et acteurs sociaux. Il enracine l’impunité dans notre histoire judiciaire. NON ! Seule une Commission vérité et justice nous permettra de faire la pleine lumière sur ces épisodes douloureux (et d’épisodes précédentes ?) mais aussi de comprendre pourquoi nos institutions ont failli, comment cela s’est traduit sur l’ensemble du corps social et quelles conséquences cela risque d’entraîner. Les informations, analyses, conclusions et recommandations d’une telle Commission constitueront un apport indispensable à la réforme annoncée de la justice (et j’espère des prisons..) en écrivant la vraie histoire de cette période. En plus de rendre justice à toutes les victimes et leurs familles et de sanctionner les coupables. La réforme quant à elle doit s’atteler à décoloniser la justice et permettre au peuple de se reconnaître dans ses institutions. Donc une justice souveraine patriotique et intègre. Vérité et Justice ? Ce n’est pas une option politique. C’est une obligation pour tout régime qui s’inscrit dans la logique de l’État de droit et s’unit dans l’empathie avec son peuple. (7)
Par ailleurs, Macky Sall avait commissioné un rapport sur la réforme foncière mais (comme à son habitude) son manque de courage politique, son inconsistance l’ont amené à étouffer ledit rapport. Alors que nous l’avions élu pour anticiper et régler les contradictions de notre société, il s’est plutôt complu dans la chasse aux rétrocommissions (par le biais de contrats d’infrastructures surfacturés) de complots politiques tous aussi minables les uns que les autres et de choix économiques issus d’une incompétence désolante.
Dans 25 ans, nous serons 35 millions. Cette seule donnée devrait inciter et mobiliser tout gouvernement responsable à la réflexion, au dialogue informé, à l’établissement d’un calendrier de mise en œuvre d’une réforme foncière visant la souveraineté, la prospérité et la justice. (8)
Finalement, Bassirou Diomaye Faye, Ousmane Sonko et le Pastef ont rendez-vous avec l’Afrique. Les patriotes, les progressistes, les panafricanistes d’Afrique et de ses diasporas sont en attente de l’émergence d’un nouveau leadership africain émanant d’une génération montante et engagée.
Deux initiatives que pourraient prendre notre nouveau gouvernement :
- Pour une Refondation de la CEDEAO
La décision des États de l’AES de se retirer de la CEDEAO est une des conséquences de la crise multiple qui mine l’organisation communautaire depuis plus d’une décennie. Cette décision de retrait qui consacre l’échec de la CEDEAO a déclenché une réaction de panique au sein de l’organisation qui souhaite une “négociation”. Au Sénégal de prendre l’initiative pour la levée immédiate et sans conditions des sanctions et embargos illégaux et illégitimes et pour l’élaboration d’un plan d’arrêt des ingérences étrangères dans le fonctionnement et dans les mécanismes de décisions de l’organisation. A moyen terme, une refondation de la CEDEAO s’impose après 50 ans d’existence. Celle-ci devrait se faire sur la base de consultations inclusives dans tous les pays de la région : chercheurs et instituts de recherche, sociétés civiles et organisations populaires, partis politiques et états membres visant à rendre effectif l’engagement à transformer l’organisation en CEDEAO des peuples et à la rendre capable de répondre aux défis du 21e siècle. L’heure est venue pour les Ouest-africains de s’engager pour la transformation de notre organisation commune.
L’acteur le mieux à même et le plus légitime pour porter cette initiative sera le Sénégal.
- Pour une relecture africaine des accords avec l’Europe sur la circulation des capitaux des biens et des personnes.
Les circulations sont discutées et négociées séparément alors qu’elles sont inextricablement liées dans la construction de la globalisation néolibérale. Comment peut-on donner son blanc-seing à la liberté de circulation des capitaux et marchandises sans libérer celle de la force de travail.J usqu’à quand maintiendra-t-on cette dynamique de développement inégal. L’Afrique doit se saisir de cette problématique et presser l’Europe de s’y atteler. Il s’agit de préserver les milliers de vie englouties dans les océans et déserts du monde.
Au Sénégal nouveau de porter le débat dans les instances africaines. (9) et (10)
Au bout du compte, il s’agit du « réenchantement » du pays pour aller à l’assaut du futur. Nous avons en Afrique aujourd’hui la jeunesse qu’il faut. La communauté intellectuelle doit continuer à se mobiliser en force de propositions afin d’éviter que le nouveau gouvernement ne soit prisonnier d’une bureaucratie qui monopolise l’information l’analyse et le conseil. Les ministres doivent se convertir et devenir des militants, non pas des militants de Pastef, mais des militants de la cause d’un Sénégal souverain prospère et juste dans une Afrique de progrès. L’avenir nous appartient.
LES CHANTIERS DE LA RUPTURE
Justice, économie au service des plus démunis, politiques publiques inclusives... Felwine Sarr liste les grands défis sociétaux nécessaires pour transformer la victoire démocratique en une révolution sociale profonde, à la hauteur des attentes populaires
Felwine Sarr est convaincu qu’il y a un ethos de l’universitaire, qui est de faire profession de vérité et celle-ci est due à la société et aux puissants. Depuis les Etats-Unis où il enseigne, l’universitaire sénégalais revient, dans cet entretien, sur la « révolution démocratique » que constitue l’élection de Bassirou Diomaye Faye qui, à son avis, doit aboutir à « une révolution sociale » afin de concrétiser le désir de changement exprimé dans les urnes.
Quelle signification donnez-vous à l’élection de Bassirou Diomaye Faye comme président de la République ?
Le sentiment que j’ai, c’est que le peuple sénégalais a réussi une révolution démocratique. Je pense que les deux termes sont importants. Il y a eu un désir de changement profond dans la société sénégalaise et un refus de basculer dans un régime autocratique. Le précédent régime a tenté de violer nos droits et libertés, a exercé une violence soutenue contre le corps social sénégalais, a piétiné les institutions et nous a entrainé dans une situation inédite ces trois dernières années, jusqu’à ce moment crucial où le président de la République avait décidé d’arrêter le processus électoral. Donc, le fait que l’élection ait eu lieu d’une part, que les institutions et le peuple aient résistés et limité les dérives autocratiques, me donne le sentiment qu’une révolution démocratique s’est opérée. Deuxièmement, je trouve que le PASTEF a su résister aux assauts de l’appareil d’État avec une grande détermination et une forte résilience ; il a convaincu les Sénégalais de son projet de rupture et de sortie du pacte néocolonial ; ceci a fait échos et les gens ont voté pour cela. Tous ces changements me font penser aux prémices d’une révolution. Mais cette révolution démocratique doit aboutir à une révolution sociale, économique et politique. Je pense que la révolution frappe à la porte et celle-ci est entrouverte.
À votre avis quelle est la marge de manœuvre du nouveau gouvernement sur des sujets comme l’emploi des jeunes, le coût de la vie ou encore la réforme des institutions ?
On peut résumer ces priorités en deux points : la réforme des institutions et la vie économique et sociale. Sur le premier point, la marge de manœuvre est totale. Il revient au gouvernement en place d’examiner là où nos institutions ont été vulnérables. Si elles ont été mises en mal et secouées, c’est parce qu’il y’avait de la vulnérabilité. Le code électoral a été manipulé pour exclure des candidats, la présence du président de la République et du ministre de la Justice dans le Conseil supérieur de la magistrature pose un problème d’indépendance pour cette institution. Nous avons un sérieux chantier de refondation du système judiciaire et des institutions en règle générale. Il ne faut pas que la victoire du peuple sénégalais nous fasse oublier cette vulnérabilité. Il faut rendre la séparation des pouvoirs beaucoup plus effective avant que le temps de l’oubli n’arrive. L’autre question épineuse, c’est la vie économique qui dépend en partie de ce qui se passe en interne, de la manière dont l’économie est pilotée, mais aussi du contexte global international. Le Sénégal est une petite économie ouverte, souvent affectée et vulnérabilisée par les chocs extérieurs. Lorsque ceux-ci vont dans le bon sens, le pays en bénéficie, mais lorsque la conjoncture est moins bonne, le pays en souffre. Il faudra rapidement restaurer des marges de manœuvre budgétaire. Le pays s’est beaucoup endetté ces dernières années avec un ratio dette/Pib qui est passé d’environ 30% en 2012 à presque 80% aujourd’hui soit au-dessus de la norme communautaire qui est de 70%. Il est nécessaire de rationaliser les dépenses budgétaires et élargir la base de l’assiette fiscale afin de maintenir un niveau d’investissement public soutenu. Il faudra également tenter d’atteindre ce que les économistes appellent le niveau de production potentielle de l’économie. Et pour cela, il faut des innovations technologiques, de la formation du capital humain et de l’investissement dans les secteurs où le pays a des avantages comparatifs afin de générer des gains en compétitivité. Un diagnostic de l’économie sénégalaise est nécessaire, voir où sont ses limites, mais aussi ses forces et ses potentialités. Enfin, mettre en place des filets sociaux pour les couches les plus vulnérables. Quel que soit le niveau de notre richesse nationale, il est possible de mettre en œuvre un peu plus de solidarité envers les plus démunis en même temps que l’on travaille à rendre l’économie beaucoup plus productive. Pour cela, une économie politique de la dignité est un chantier important qui devrait engager toute la nation ; le gouvernement, le secteur privé et ainsi que ceux qui œuvre dans l’économie populaire, sociale et relationnelle.
Comment mettre fin à l’Hyperprésidentialisme ?
Sur la question du rééquilibrage du pouvoir présidentiel, il faut rappeler que l’on a connu une crise de bicéphalie au sommet de l’État entre Senghor et Mamadou Dia en 1962. Et depuis, les pouvoirs du Chef de l’État n’ont cessé de se renforcer jusqu’à ce que l’on fasse l’expérience des limites d’un tel fait. On s’est rendu compte qu’il fallait retirer des pouvoirs au président de la République et les disséminer dans d’autres pouvoirs : législatif ou judiciaire. Vue la manière dont les élections présidentielles se sont déroulées et la figure de leader incontesté du PASTEF qu’incarne Ousmane Sonko, il est un premier ministre avec un poids politique important. Je ne trouve cependant pas que cette situation de partage du pouvoir exécutif de fait, née d’une conjoncture politique singulière, soit la réponse à l’hyperprésidentialisme. Celle-ci doit être institutionnelle et s’effectuer dans l’espace de la Constitution par une distribution plus équilibrée des pouvoirs entre les différentes institutions afin d’assurer l’existence de véritables contre-pouvoirs. Nous devons faire en sorte que les institutions acquièrent force et crédibilité et qu’elles soient en capacité de modeler les comportements des individus, qu’elles s’autonomisent et échappent aux tentatives de capture par le pouvoir politique. Le fait que le Conseil constitutionnel ait retoqué par deux fois des décisions du président de la République participe au renforcement de nos institutions, à la construction d’une jurisprudence qui inscrit dans l’histoire politique du pays l’idée que l’institution judiciaire peut limiter les dérives de l’exécutif. Il faut également réfléchir à comment construire des formes de vie qui réinstituent au cœur de l’aventure sociale, la dignité et l’autonomie des individus. On a eu une victoire importante, mais elle ne doit pas nous faire oublier le chantier qui est devant nous. Nous devons renforcer les institutions pour faire en sorte de ne pas nous retrouver à l’avenir dans de pareilles situations.
Une loi d’amnistie a été votée pour « réconcilier le pays », mais certains continuent de réclamer justice. Comment concilier ces deux impératifs ?
En fait, je pense que l’œuvre de justice est fondamentale pour toute société. La loi d’amnistie qui a été votée, si nous la laissons telle quelle, consacre l’impunité. Quand il y a de l’impunité dans un corps social, celle-ci sème les graines d’une violence à venir. L’histoire nous l’a montré. Les exemples sont légion en Afrique et dans le reste du monde. L’amnistie interroge notre rapport à la justice et à l’histoire. Le problème d’une loi d’amnistie, c’est qu’elle rend difficile le travail de mémoire d’une société. Toute communauté humaine génère ses monstres, mais il faut dialoguer avec ceux-ci, leur faire face, les conjurer et les mettre à distance. La loi d’amnistie empêche d’investir le passé, de savoir ce qui s’est passé, qui a fait quoi, qui est responsable de quoi. Les forces de défense et de sécurité ont exercé une violence létale à l’encontre des Sénégalaises et Sénégalais. Comment on comprend cette violence ? D’où est ce qu’elle vient ? Je pense que son origine remonte au fait colonial et que nous avons retourné la violence coloniale contre nous-mêmes. Frantz Fanon avait prévenu, en suggérant un travail de destruction des institutions coloniales, du risque de nous ensauvager. Je pense que le rapport entre les forces de défense et de sécurité et les citoyens reproduit le rapport du colon au colonisé. Nous devons extirper de cette institution ce rapport à la citoyenneté qui est déshumanisant. Comment répare-t-on cette violence ? Comment la reconnaît-on ? Comment mettre une distance entre elle et le corps social si on n’effectue pas le travail de vérité et de justice pour les victimes ? Quelles leçons tirons-nous de la crise ? Et que faisons-nous pour que celle-ci nous aide à approfondir le fait démocratique. Il est absolument fondamental de rendre justice aux familles des victimes, de situer les responsabilités et de mettre des garde-fous. Il ne faut pas qu’on l’on négocie avec ces faits et que l’on vendent à la société l’idée d’une réconciliation sans justice. Si on indemnise seulement, on ne rend pas justice. C’est important de répondre au besoin justice des citoyennes et citoyens qui ont été victimes. Le pays leur doit ça. Et la société se le doit à elle-même.
Il y a un débat sur la faible présence des femmes dans le nouveau gouvernement. La rupture c’est aussi sur cette question de l’égalité et de l’inclusivité des femmes ?
La politique ce sont aussi des actes symboliques. Je crois qu’il y a une vraie sous-représentation des femmes dans le gouvernement (4 sur 30). Elles représentent 49,6% de la population totale et donc il était important que le gouvernement reflète cela. Sur le plan économique, elles représentent 80% de la force de travail dans le monde rural et agricole, mais ne possèdent que 2% des terres. Quand on regarde les statistiques sur la pauvreté au Sénégal, 33% des femmes vivent en dessous du seuil de pauvreté (2,15 dollars par jour) et 94% des femmes travaillent dans le secteur informel et elles ont trois fois plus de chances de ne pas être employées, alors qu’elles représentent 40% de la force de travail dans le pays. Dans les ménages, les travaux démontrent que lorsque l’on accroit le bien-être et la prospérité des femmes, il y a un effet bénéfique pour toute la famille, y compris en éducation et en santé. Le ministère de la femme me semble nécessaire car elles ont des problématiques qui leur sont spécifiques ; mais également une économie féministe, c’est-à-dire qui prend en compte et améliore la condition des femmes, parce qu’on ne peut pas avoir de la prospérité dans le pays si la moitié du corps social est victime d’un certain nombre d’handicaps et d’asymétries. Dans tous les domaines on trouve des femmes qui sont très compétentes et capables de diriger des ministères, c’est une revendication tout à fait normale et légitime.
Le nouveau pouvoir place la question de la souveraineté au cœur de ses promesses. Quelle signification donneriez-vous à ce concept et comment s’articule-t-il avec les luttes précédentes ?
On peut dire que la souveraineté, c’est juste la capacité à ne pas se voir imposer la volonté des autres, c’est-à-dire d’être un État qui, sur son territoire, son espace et devant sa population, garde l’exclusivité de ses compétences juridique, exécutive et législative et œuvre pour le bénéfice de ses populations. La souveraineté est une revendication qui date des indépendances. On sortait d’une aliénation de plus d’un siècle avec l’idée de reprendre notre souveraineté politique, économique et sociale et de décider pour nous-mêmes de notre destin, de nos directions et de nos choix sociétaux. Cependant, nous avons certes accédé à la souveraineté dite internationale en 1960, mais nous sommes resté pris dans les rets de relations asymétriques dans plusieurs espaces (économique, politique, épistémologique, symbolique et ainsi que dans celui des futurités, c’est-à-dire des visions du monde). 60 ans après, les jeunesses africaines ont conscience que nous ne sommes pas pleinement maitre chez nous. Les théoriciens des relations internationales soutiennent l’idée d’une fiction de la souveraineté, c’est-à-dire d’un monde sans souveraineté absolue, qui est plutôt interdépendant et ceci du fait de la globalisation. Cependant dans la grande relation d’interdépendance (qui peut être positive ou négative) entre les états-nations, certains sont plus dépendants que d’autres, et nous subissons la dimension négative de l’interdépendance. Dans la demande de souveraineté, il y a le désir d’une relation beaucoup équilibrée avec le reste du monde. Nous savons que nous ne vivons pas dans une autarcie, et que nous sommes reliés au reste du monde, mais nous ne tirons pas de manière équitable les gains d’une relation économique, sociale et culturelle. Nos jeunes ne peuvent pas circuler comme les autres jeunes du reste du monde. Dans le rapport économique, nous ne bénéficions pas prioritairement de nos ressources. Dans les rapports symboliques et politiques, nous avons le sentiment que nous ne décidons pas vraiment de certaines questions qui nous concernent. Cette demande est donc légitime. Pour un peu complexifier la question de la souveraineté, je dirais que c’est un idéal, mais dans la réalité, les États négocient la réalité des interdépendances et essaient de tirer leur épingle du jeu.
Quand on parle de souveraineté il y a une fixation sur la monnaie. En tant qu’économiste monétariste quelle est votre position sur le débat sur le franc Cfa ?
Je suis pour la sortie du franc Cfa. Nos arguments consistent à dire que les accords de coopération monétaire avec la France nous entravent et nous empêchent d’avoir une politique monétaire proactive qui est tournée vers la satisfaction de nos besoins en termes de croissance économique et que celle-ci est trop contrainte par l’arrimage à l’euro. Une monnaie doit refléter les fondamentaux de son économie. Le fait que le franc Cfa soit arrimé à l’euro fait que quand celle-ci s’apprécie (l’euro), le Cfa s’apprécie également ; et cela entrave notre compétitivité externe. Et cette appréciation du franc Cfa vis-à-vis du dollar ou du yen ne dépend pas des dynamiques de nos économies ouest-africaines. Nous perdons donc un degré de liberté. Les études nous ont montré qu’un régime de change plus flexible, dont les marges de fluctuations sont encadrées ; un « currency board » avec un arrimage de la monnaie à un panier de devises au prorata des monnaies des pays avec lesquelles on commerce le plus, était beaucoup plus optimal en termes de bien-être et de croissance économique. Nous avons comparé les différents régimes de change et nous sommes parvenu à la conclusion que pouvoir utiliser le taux de change pour ajuster les chocs, était beaucoup plus bénéfique pour nous. Dans le débat, on a beaucoup mis en avant l’argument de la stabilité, ce qui est vrai, mais cette stabilité-là nous a énormément coûté en termes de croissance économique et de bien-être. En gros, lorsqu’on a fait le travail on a vu que retrouver la souveraineté sur notre politique monétaire pour avoir un « policy-mix » mieux articulé était indéniablement plus préférable en termes de bien-être. Deuxième argument à mettre dans la balance, c’est la dimension symbolique de la monnaie. Le franc Cfa apparaît comme un vestige du fait colonial. Même s’il y a eu des réformes dans le temps et que le nom a changé de signification, dans l’opinion il y a l’idée que c’est une monnaie coloniale, que ce n’est pas notre monnaie. Je pense que la monnaie a une dimension symbolique et imaginaire et qu’il faut répondre à ce besoin. Il ne faut donc pas sous-estimer cette dimension symbolique parce que la monnaie c’est la fiducia, la confiance que les gens ont dans ses fonctions et la complexité c’est d’articuler ces différentes dimensions : économique, symbolique et politique. Dès fois, en tant qu’économiste, j’ai regretté le fait que cette dimension symbolique ait pris le pas sur la réflexion purement économique, mais je comprends que c’est une nécessité d’articuler ces trois dimensions. Et pour toutes ces raisons, nous doit aller vers une réforme et reprendre la souveraineté entière sur la monnaie et l’utiliser au profit de notre prospérité et de notre bien-être économique.
Faut-il faire cette réforme dans le cadre communautaire ou aller vers une monnaie nationale ?
Je pense pour ma part que l’on avait entamé un projet (l’eco) dans le cadre de la Cedeao et que, si on a les moyens d’accélérer ce processus-là et de préserver les gains d’une intégration monétaire et économique, je préférerais qu’on le fasse. Si nous devons aller vers une monnaie nationale, il faudra s’assurer des conditions économiques pour bien le faire, parce que l’on voit bien que c’est à double tranchant : actuellement il y a 23 monnaies africaines qui sont dans la tourmente. Il faut donc réfléchir au bon « trade-off » pour assurer l’effectivité des fonctions de la monnaie ainsi que les avantages de l’indépendance de la politique monétaire. C’est une réflexion à mener avec soin.
Vous venez d’évoquer les difficultés de certaines monnaies africaines, un argument qu’évoquent souvent les tenants du statut quo. Comprenez-vous ceux qui ont peur du changement ?
C’est une inquiétude fondée, du fait que le Cfa nous a apporté une certaine maitrise de l’inflation et une stabilité pendant de longues années et que nous n’avons pas la culture de la fluctuation du taux de change. Donc, c’est une inquiétude que l’on peut comprendre, mais il ne faut pas que cela nous installe dans le confort du statut quo. La vraie question, c’est de savoir la situation vers laquelle nous voulons aller, quels en sont les gains et les limites potentiels. Si l’on gagne plus en termes de prospérité économique à avoir plus de flexibilité et un peu plus d’inflation avec de la fluctuation, il faudrait qu’on l’accepte. Autrement dit, échanger de la stabilité contre de la prospérité. Mais faudrait-il que nous mettions en œuvre les conditions de cette prospérité. Il y a aussi de l’apprentissage. Le jour où l’on sortira du franc Cfa on devra apprendre à raisonner et à travailler autrement. Je pense que la souveraineté c’est aussi accepter d’apprendre à emprunter des chemins inconnus dont on est convaincu qu’au bout, le résultat est préférable. Nous devons mettre en avant le scénario qui, pour nous, va répondre au mieux aux besoins économiques de nos sociétés. Les difficultés qu’éprouvent certains pays comme le Ghana ou le Zimbabwe doivent certes nous faire réfléchir, mais on peut aussi regarder d’autres pays qui ont des monnaies nationales et qui les gèrent plutôt bien et qui ont un niveau de prospérité beaucoup plus élevé que le nôtre et nous inspirer d’eux. Donc, il ne faut pas avoir une peur viscérale du changement, mais regarder où nous mènera ce changement.
CE QUE LE PRÉSIDENT DIOMAYE FAYE A PROMIS À BARROW
Le président Faye a effectué une visite en Gambie ce samedi. Accueilli par son homologue Adama Barrow, il a magnifié les relations entre les deux pays et a surtout assuré à son homologue qu’il ne fera pas moins que son prédécesseur.
Le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a effectué une visite en Gambie ce samedi. Accueilli par son homologue Adama Barrow, il a magnifié les relations entre les deux pays et a surtout assuré à son homologue qu’il ne fera pas moins que son prédécesseur à la présidence.
«Ce que le président Macky Sall a fait dans les relations entre nos deux pays, je ne pourrais faire que plus. De plus, nous sommes venus au pouvoir avec un projet panafricain auquel nous croyons, articulé autour d’une fraternité renouvelée et une solidarité renforcé», a assuré le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye au président Gambien.
Le président Adama Barrow avait des relations extrêmement solides avec Macky Sall qui était comme un frère pour lui. Mais, le président Faye a tenu à le rassurer sur ce point : «Le frère que vous aviez au Sénégal, c’est celui-là qui est toujours au Sénégal. Il n’a changé que de morphologie.»
Le Sénégal ne déviera jamais de sa trajectoire dans la solidification de ses relations avec la Gambie insiste le nouveau locataire du palais présidentiel, qui a tendu la main au Président Barrow pour son soutien en faveur de la paix dans le sud du Sénégal.
«Je te tends la main pour te renforcer dans ta posture qui enracine la paix, la fraternité pour nos deux pays. Je sais que tu ne quitteras jamais cette posture. Et nous, de notre côté, nous ferons tout pour davantage t’encourager à œuvrer dans ce sens», a promis le président Diomaye.
Le président Adama Barrow a lui aussi souligné que son pays et le Sénégal sont un et indivisible pays. «Ce n’est qu’ici que le Président vient pour une visite officielle et parle Wolof. Cela montre qu’il n’y a aucun d’autres pays qui sont pareils dans le monde», a-t-il magnifié.
AFFAIRE KEUR YEURMANDÉ, NDELLA MADIOR DEMANDE UNE LIBERTÉ PROVISOIRE
Plus de 3 mois se sont écoulés depuis l'éclatement du scandale de la pouponnière "Keur Yeurmandé" en décembre 2023. Cette affaire refait surface avec une demande formulée par la fondatrice de cet établissement.
iGFM - (Dakar) Ndella Madior Diouf veut sortir de prison. En effet, elle a fait déposer une demande de liberté provisoire pour ce faire.
Plus de 3 mois se sont écoulés depuis l'éclatement du scandale de la pouponnière "Keur Yeurmandé" en décembre 2023. Cette affaire refait surface avec une demande formulée par la fondatrice de cet établissement Ndella Madior Diouf qui, selon une source, a saisi le juge d'instruction pour obtenir une liberté provisoire.
La balle est désormais dans le camp du magistrat ins-tructeur. Il reste à voir s'il accordera la liberté provisoire à la directrice de la radio Saphir Fm. Étant donné qu'il y a des délais à respecter dans une procédure de demande de liberté provisoire, le juge d'instruction a moins d'une semaine pour statuer sur la demande de Ndella Madior Diouf.
LA FUSION DES MINISTÈRES DU SPORT, DE LA JEUNESSE ET DE LA CULTURE EST UNE AUBAINE POUR LA LUTTE
La lutte, en tant que sport, possède des dimensions culturelles et touristiques, et attire également la jeunesse.
Bés bi - Le Jour |
Ndèye A. NDIAYE et Adama A. KANTE |
Publication 20/04/2024
Son nom est familier aux Sénégalais qui l’ont découvert à travers le petit écran. Seulement, beaucoup ignorent que l’animateur de l’émission «Arènes sénégalaises» sur iTv, El Hadji Ngagne Diagne, est une mine de savoirs. Une culture et un vécu. Dans cet entretien-portrait, ce féru de la lutte partage ses combats, ses chutes, ses succès. L’homme, très respecté dans cette arène où les coups ne manquent pas, raconte ses premiers pas dans l’audiovisuel, le secret de ses positions tranchées lors de ses émissions, mais surtout les valeurs que doivent incarner la jeunesse. Père Ngagne qui connait aussi la politique et les politiques, s’est également prononcé sur divers sujets de l’actualité.
Qui est réellement El Hadji Ngagne Diagne ?
A l’état civil, je réponds au nom de Ngagne Demba Diagne. Je suis un fils de Dakar, né au quartier «Diecko» qui fait partie des 12 «Penc» de Dakar, sis à la Medina. Mes parents sont nés à l’avenue Gambetta ex-Diecko. Je fais partie de la famille Baye Mor Diagne qui est mon grand-père. Je suis 100% lébou, et je peux même dire que je suis un «bété bété» lébou, car mon père c’est mon oncle, ma mère est ma badiène.
Justement parlez-nous un peu de cette ethnie, les lébous qu’on dit être les premiers à s’installer à Dakar ?
Les lébous sont une ethnie qu’on compare même parfois aux Khouraich, parce qu’ils sont affables, courtois, avenants, très serviables. Mais ils ont du caractère et sont très vertueux. Ils ne sont pas les premiers à s’être installés à Dakar. Les premiers habitants de Dakar, étaient les Capverdiens, après les Socés. Mais quand les lebous sont arrivés ici, Dieu a béni Dakar. Nos maisons étaient des «pey» (concession). Par exemple, chez moi, il y avait 5 portes. C’était une maison de sauvetage pour des personnes qui n’avaient pas où loger à Dakar. Nos parents avaient toujours en réserve de la nourriture pour les imprévus. C’est d’ailleurs de là que vient le fameux «ndioganal» (repas que les enfants mangent vers les coups de 17h). Donc le lébou est quelqu’un de social et très bien éduqué. Et cette éducation civique se faisait autour du bol où se regroupait toute la famille. Et il y a des limites que l’enfant ne devait pas franchir, car quand on mange on ne parle pas, on regarde devant soi, on attrape le bord du bol, on attend qu’on te sert. C’était pour apprendre à l’enfant le sens du partage, la patience…. c’était une école de la vie. Mais hélas tout cela s’est effrité.
Cela a commencé lorsque les jeunes ont commencé à choisir leur propre mari, leur propre femme. Or au temps, les parents savaient où se trouve la bonne graine ou la perle rare. La faute incombe à tout le monde. Auparavant l’éducation de l’enfant était gérée par toute la famille et même par ton voisin de quartier. Mais aujourd’hui personne n’ose poser la main sur l’enfant d’autrui.
Comment avez-vous passé votre enfance, dans ce populeux quartier de la Médina ?
C’est vrai que Médina est un quartier bouillonnant. Mais avant d’aller à l’école française, on passait d’abord par l’école coranique. Moi, j’ai fait le primaire à l’école Clemenceau. J’y suis resté jusqu’en classe de 4e puis, j’ai été transféré à l’école Malick Sy sise à la Rts. Et mon cycle secondaire, je l’ai fait au centre de formation professionnel Assalar, option dessin industriel. J’avais un don dans le domaine du dessin, mais je n’ai pas pu continuer, car après je suis allé chercher du travail. J’ai très tôt titillé le football grâce à père Ass Diack qui a formé beaucoup de jeunes de la Medina. Chaque dimanche matin on était à l’école Médine. Donc, mon enfance, je l’ai faite entre école Médine, le Champ de courses, Soumbédioune et Iba Mar Diop. C’est pourquoi, je suis aussi calligraphe parce que nous avions appris à écrire avec la plume, l’encre et le buvard. Et avec cette méthode d’apprentissage, non seulement tu es ponctuel, propre mais appliqué et c’est cela qui explique notre niveau intellectuel, alors que nous n’avons pas fait des études poussées. Nous avions des enseignants qui avaient l’amour du métier, et les élèves respectaient beaucoup plus leurs maîtres que leurs propres parents. Maintenant, il n’y a plus ces valeurs morales. On confond même les enseignants et les élèves. Les directeurs étaient confondus à des ministres de la République, tellement ils étaient très corrects et respectables.
Qu’est-ce qui, selon vous, a changé entre-temps ?
C’est la politique politicienne qui a gangrené tous les secteurs, notamment l’enseignement. Elle a détruit énormément de choses. A cause de la politique les familles se sont disloquées, les foyers religieux rabaissés. Elle a bafoué nos valeurs.
Etiez-vous un de ces turbulents jeunes qui fréquentaient les boites de nuit à l’époque ?
(Il éclate de rire jusqu’à se redresser de son fauteuil). A notre époque, c’est les clubs qui existaient. On se cotisait pour organiser un bal ou colledara. On fabriquait des cartons d’invitation qu’on donnait à nos petites amies. A cette époque la femme était une perle rare, si tu aimais une fille, c’est à travers une lettre que tu lui exprimais tes sentiments. C’est le jour du bal qu’on saura qui a une copine et qui en n’a pas. La soirée commençait à 21 heures et se terminait à 00 heures. Et le plus marrant à 00 h pile, toutes les mamans venaient devant la porte pour récupérer leur fille. C’est à 20 ans qu’on a commencé à aller dans les boites de nuit. La Star bande d’Ibra Kassé sise à l’avenue Malick Sy était en vogue. Mais la boite de nuit qui nous a le plus marqués c’était «Diender» ex-«Killy night» quand Youssou Ndour venait de quitter «Star band» pour créer «Etoile de Dakar». A part «Diender» c’était le «Balafon». Nous étions ceinturés par des boites de nuit, mais cela n’a rien gâché de notre adolescence.
C’était quoi votre premier boulot ?
A l’âge de 24 ans, je m’étais déjà marié. Pour mon premier boulot, j’avais opté pour le transit. J’étais à Bourgi transit où j’étais embauché. J’officiais dans l’archivage. J’étais aussi passeur de pièces au niveau de la molle 2. Après des années de service, j’ai démissionné en 1989 pour faire mes propres affaires, suivre ma passion, c’est-à-dire la lutte.
Comment êtes-vous entré dans les médias ?
J’ai toujours aimé la lutte. A bas âge, je fréquentais l’arène sénégalaise. J’ai assisté au combat de lutte Mbaye Guèye- Aliou Seye qui était rude, on a fini même par casser l’arène. Bien avant 2022, j’étais un consultant de lutte à la radio Témoin Fm. C’est en 2022 que j’ai intégré Sport Fm grâce à Ndèye Ndom Thiouf. C’était pour donner un souffle nouveau à la lutte, car il y avait beaucoup de griotisme dans les reportages. Je faisais le duo avec Mamadou Mbaye Garmi. Et la lutte m’a presque tout donné. La connaissance, les relations humaines etc. Je ne regrette pas d’avoir intégré la communication de la lutte, car je fais partie des personnes qui ont révolutionné et propulsé la lutte.
Comment s’est effectué votre passage de la télé à la radio ?
C’est quand sport Fm s’est arrêté en 2003 et que nous sommes entrés dans le format radio généraliste, dénommée Rfm. Et de fil en aiguille, on a créé la Tfm. Mamadou Garmi et moi, sommes les premiers à animer une émission de lutte intitulée «Roffo».
Quelle lecture faites-vous de l’avènement de Bassirou Diomaye Faye au pouvoir?
Personnellement, c’est avec l’arrivée de Bassirou Diomaye Faye à la tête du Sénégal que j’ai réalisé véritablement que c’est Dieu qui donne le pouvoir à qui il veut. Trois mois auparavant, en passant devant la Mac de Rebeuss, personne ne pouvait imaginer que le prochain Président de la République y est incarcéré. Combien de fois, Diomaye a entendu de l’intérieur de la prison les sirènes du cortège de Macky Sall passant par la corniche ? Mais en aucun moment, il ne se doutait que dans trois mois, ce serait son tour. Qui a travaillé le plus dans le projet Pastef et qui est le plus connu dans ce parti ? C’est incontestablement Ousmane Sonko. Mais c’est Dieu qui en a décidé autrement. Je suis persuadé que le Président Bassirou Diomaye Faye lui-même a tiré une leçon de la façon dont il a été élu. Ce qui fait qu’il ne doit pas accepter qu’on le détourne de sa trajectoire en l’invitant sur le chemin de la vengeance. Moi, je pense qu’il a été mis sur le chemin des Sénégalais par Dieu, car c’est Birame Souléye Diop, le numéro 2 de Pastef, il y a aussi d’autres cadres qui sont dans Pastef, hormis les alliés comme Cheikh Tidiane Dièye et Habib Sy. En fait, c’est parce que justement, Ousmane Sonko sait qu’il est un homme de valeur. Je pense que tous les Sénégalais doivent s’unir derrière le nouveau gouvernement. Qu’on arrête un peu la politique pour retourner au travail. Et sur ce coup là, j’accuse la presse.
Quel est son degré de responsabilité dans tout cela ?
Parce que c’est la presse qui encourage ce débat dans l’espace public. On a l’impression que la presse n’a pas de programme. En tout cas, elle doit revoir les lignes éditoriales. On ne parle que de politique dans ce pays, on a que des débats politiques, matin et soir. Alors que le pays regorge de personnes de valeur, qui peuvent aider le pays à avancer ou donner de bons exemples à la jeunesse. Le nouveau gouvernement a lancé le slogan de «Jub, Jubal, Jubanti».
Quel sens donnez-vous à ces termes ?
«Jub, Jubal, Jubanti» c’est bien mais ils ont oublié d’y ajouter «Joyanti». Et cela les concerne directement. Ils doivent avoir une bonne capacité d’écoute et un esprit d’ouverture. Ils sont devant, mais ils doivent prêter une oreille attentive à la population. Qu’on ne les mette pas en mal avec un tel ou tel groupe de presse au motif qu’ils sont contre eux. Je pense même, qu’ils doivent plus tendre l’oreille à ceux qui les attaquent pour en tirer profit.
Justement, que pensez-vous des lanceurs d’alerte dont on parle ? Je les ai entendus parler de lanceurs d’alerte, mais pour moi c’est une catastrophe. Et je demande solennellement au Président Bassirou Diomaye Faye de bien réfléchir sur cela. Un lanceur d’alerte, c’est ce qu’on appelle en Wolof «thiokoto». C’est quelqu’un qui te fréquente rien que pour tirer des informations sur toi pour finalement te trahir. Le problème qui se pose, c’est si ce dernier doit être protégé ou pas. Et s’ils ne disent pas la vérité ou inventent des choses ? Doit-on toujours les protéger ? C’est une porte ouverte pour le chantage.
Quelle est votre position par rapport à la dernière sortie de Birame Soulèye Diop à propos des ministres qu’on parraine des activités comme la lutte ?
En fait, Birame Souleye a d’abord commencé à mettre en garde sa propre famille et ses proches, en disant qu’on ne compte pas sur eux pour parrainer les baptêmes, les combats de lutte ou matchs de football. S’il s’agit de baptême, il faut avoir une certaine affinité ou liens de parenté avec quelqu’un pour qu’il te parraine. Et puisqu’il n’a pas épargné sa propre famille, moi je lui pardonne son dérapage. Il n’a qu’à cesser d’aller à des cérémonies familiales ou des funérailles. Moi, personnellement, je ne vais plus m’attarder sur cette question. En fait être nommé à un quelconque poste et être un «Kilifeu», c’est diamétralement opposé. Pourtant le Président du Cng de lutte, Bira Sène, a fait une sortie demandant qu’on fasse preuve de compréhension à l’égard de Birame Soulèye. Le président Bira Sène est un «Kilifeu» qui dirige plusieurs personnes. Donc, il ne peut pas avoir une autre position. Pour le moment, il ne sait pas ce qui adviendra de sa relation avec le nouveau gouvernement, donc c’est normal qu’il soit prudent, car c’est un comité national provisoire de lutte. Et je suis tout à fait en phase avec lui.
Que pensez-vous de la fusion des ministères du Sport, de la Jeunesse et de la Culture ?
Cette fusion est une aubaine pour la lutte, car j’ai toujours pensé que ces secteurs ne devraient jamais être dissociés. La lutte par exemple, c’est un sport, mais elle a un aspect culturel et même touristique, et il y a aussi la jeunesse. En réalité, dans la lutte, il n’y a qu’une infime partie de sport, car après le coup de sifflet de l’arbitre, le combat ne dure pas longtemps. Donc presque tout est culturelle (les chants, les chorégraphies, les déguisements, les marabouts...). C’est pourquoi je demande solennellement au ministre de mettre en place un musée pour la lutte afin qu’elle marque son empreinte dans ce ministère. Elle ne peut plus rien faire de spécial pour la lutte, car Matar Ba a posé la première pierre et a inauguré l’arène nationale. La seule chose qui reste à faire, c’est de créer un musée à l’intérieur de l’arène nationale. Ainsi on pourra revisiter l’histoire de la lutte de 1942 à 1968, le drapeau de l’Aof.
Que pouvez-vous nous dire sur l’état actuel de la lutte traditionnelle ?
Est-ce que vous savez que la lutte traditionnelle, c’est du social ? Elle œuvre même plus que l’Etat dans le domaine du social. En réalité, les promoteurs de lutte traditionnelle, ce sont des associations villageoises. Ce sont eux qui achètent les licences et les mettent au nom d’un tel ou tel lutteur. Ensuite, ils organisent des «mbapatt» et utilisent les recettes pour la construction des cases de santé, des mosquées, des églises. Ils utilisent également cet argent pour acheter des médicaments ou soigner les populations. En fait, c’est pourquoi les séances de lutte traditionnelle ont un enjeu important. Puisque c’est tout un village qui mise sur un lutteur. Par exemple, si tu mises 2 millions, tu peux te retrouver facilement avec 7 millions de francs Cfa. Il faut remonter jusqu’à Yékini ou Manga 2, Amadou Diouf… ils ont des troupeaux et ils se sont faits de l’argent, bien avant de venir dans la lutte avec frappe.
On a remarqué que lors de votre émission de lutte sur iTv «Arènes sénégalaises», vous laissez de plus en plus de place à Mamady Diouf et à Salla Bigué. Êtes-vous en train de préparer votre retraite ?
Mais c’est très normal. Il faut qu’on commence à chercher des relèves pour les émissions. Maintenant, c’est Mamady Diouf ou Salla Bigué qui ouvre l’émission et je ne fais que les accompagner. C’est cela assurer la relève. C’est cela la transmission du savoir.
UNE NOUVELLE CONSTITUTION VOTÉE AU TOGO
Le texte, voté le 25 mars dernier, a été passé en deuxième lecture vendredi 19 avril sur demande du président de la République, Faure Gnassingbé.
Le texte, voté le 25 mars dernier, a été passé en deuxième lecture vendredi 19 avril sur demande du président de la République, Faure Gnassingbé. Après la modification de quelques articles, le texte qui change le régime togolais, le faisant passer à un régime parlementaire, a été adopté à 87 voix.
Un vote avec 87 voix pour, zéro contre. En principe, dès la promulgation du texte - le président Gnassingbé a quinze jours à partir du vote de ce vendredi soir pour le faire -, le Togo passe à une cinquième République.
Cette nouvelle Constitution supprime l'élection présidentielle au suffrage direct. Autrement dit, les citoyens ne choisiront plus directement le chef de l'État. Ce sont désormais les parlementaires qui éliront le président de la République pour un mandat de quatre ans.
Le président du conseil des ministres - sorte de Premier ministre qui aura la réalité du pouvoir - sera choisi dans le parti majoritaire. Et son mandat sera lié à celui des députés et des sénateurs, qui est de six ans.
Le commissaire du gouvernement Pacôme Adjourouvi s'est félicité « de l’esprit citoyen qui a prévalu lors de ce processus de révision ».
Des pneus brûlés sur la chaussée, un promoteur immobilier qui l’a échappé belle à bord de son véhicule suite à une course-poursuite digne d’un film hollywoodien
Des pneus brûlés sur la chaussée, un promoteur immobilier qui l’a échappé belle à bord de son véhicule suite à une course-poursuite digne d’un film hollywoodien, des affrontements qui ont éclaté entre les employés du projet agricole Qualité Végétale Sénégal (Qvs) et les vigiles de la même exploitation agricole au service de la partie antagoniste, la Société Nouvelle Ville (Snv).
Il s’en est vraiment fallu de très peu hier pour que l’irréparable ne se produise dans la commune de Keur Mousseu, située dans le département de Thiès, où le feu couve depuis un certain temps du fait d’un litige foncier opposant un promoteur immobilier à la tête de la Société Nouvelle Ville (Snv) et un agro-businessman, gérant du projet agricole Qualité Végétale Sénégal (Qvs). Les deux hommes d’affaires se disputent des hectares de terres dans cette zone devenue un foyer de tension avec des risques d’affrontements chaque jour.
Hier, les populations des communes de Keur Mousseu et Diass, ainsi que des villages environnants, qui se trouvent être les travailleurs de Qvs, sont sorties en masse, en colère, pour aller barrer, un instant, l’autoroute à péage, à hauteur de Kirène. Le nœud du problème résiderait dans le fait que le promoteur immobilier, qui détient dans la zone quelque 65 ha, cherche à étendre ses biens à 110 ha. Une extension qui, malheureusement, risque d’empiéter sur les 185 ha de Qualité Végétale Sénégal (Qvs) qui avait, par un protocole du ministère de l’Environnement, acquis ce périmètre.
Qvs exploite depuis près de 5 ans, 110 ha de terres agricoles, dans la commune de Keur Mousseu, précisément dans le village de Thiambokh. Qvs s’est donc installée dans ce qui est aujourd’hui une ferme agricole, qui emploie plus de 1000 personnes et qui contribue à l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire, après avoir obéi à toutes les normes administratives. C’est sur la base d’un protocole d’accord en date du 7 juin 2019, avec la Direction des eaux, forêts, chasses et de la conservation des sols (Defccs), pour la mise en valeur agroforestière d’une partie de la forêt classée de Thiès et valable pour une durée de 5 ans renouvelable. «Ce délai nous a permis d’aller chercher des partenaires pour pouvoir mener à bien l’exploitation de ces terres en termes d’agriculture. C’est ainsi qu’un investissement de plus de 4, 8 milliards de F Cfa a été consenti pour la construction de forages, de bassins de rétention pour permettre l’irrigation», a indiqué Mbaye Seck, Directeur technique du projet.
Mais un conflit foncier entre Qvs et la Société Nouvelle Ville (Snv) risque de tout remettre en question. Et pour cause, la Snv réclame, sur la base d’un décret d’attribution qui date de 2022, la paternité de 90 ha sur les 110 exploités par Qvs, pour y ériger des logements sociaux, alors que la zone est classée non aedificandi par une étude technique. Mbaye Seck signale que ledit décret ne contient aucune coordonnée quant à l’appartenance administrative du site en question, et c’est sur cette base qu’elle a paradoxalement obtenu une autorisation de lotir.
Il s’y ajoute que selon le décret, le site est logé dans le département de Mbour, alors qu’il se situe en réalité dans la commune de Keur Mousseu, département de Thiès, et précisément dans la zone du village de Thiambokh. Il renseigne que c’est d’ailleurs l’Agence nationale de l’aménagement du territoire (Anat) qui a établi la carte de localisation du site et a ainsi confirmé qu’il se trouve effectivement dans la commune de Keur Mousseu, ce qui a été attesté par le schéma cadastral, avec le numéro d’identification cadastrale 0722030312300001
Il renseigne que la Snv a déjà usé d’un forcing, avec l’assistance des Forces de l’ordre, pour accaparer 45 des 90 ha en question, alors que les semis avaient commencé, et une pépinière a même été détruite lors de cette opération. Et la superficie déjà prise s’est traduite par une répercussion négative sur le rendement de cette année et une diminution drastique du personnel ; ce qui veut dire en clair qu’il y a eu d’énormes pertes d’emplois. Et si la Snv met à exécution sa menace de prendre 45 autres ha, se désole-t-il, cela se traduira par la perte d’environ un millier d’emplois. «Il appartient maintenant à l’Etat d’arbitrer pour qu’une solution pérenne soit trouvée, d’autant plus que c’est l’Etat lui-même qui a, en toute transparence, mis ces terres à la disposition de Qvs, pour une durée de 25 ans. Et s’il donne les mêmes terres à un autre, cela veut dire que c’est lui qui doit arbitrer. Nous avions lancé un appel à l’endroit du président de la République sortant, pour qu’il contribue à la clarification de cette situation. En ce qui nous concerne, nous sommes disposés à la négociation, à nous retrouver autour d’une table pour trouver une solution définitive», a ajouté M. Seck. Selon lui, ce dossier semble dégager un parfum de corruption, mais fort heureusement, le tout nouveau président de la République fait de la lutte contre la corruption une de ses priorités. Il reste en tout cas convaincu qu’avec la nouvelle équipe gouvernementale, la loi du plus fort n’aura plus cours dans ce pays.
Forte mobilisation des populations riveraines pour dire «non» à la disparition de la ferme
«Nous lançons un appel solennel à l’endroit du président de la République Bassirou Diomaye Faye, sur qui nous comptons beaucoup. Nous avons de l’espoir en tant que jeunes, conscients du fait que seul le retour vers l’agriculture permettra d’atteindre au moins l’autosuffisance alimentaire», ont souligné les populations riveraines, lesquelles, en tout cas, se sont mobilisées pour dire non à la disparition de la ferme, qui constitue leur gagne-pain au quotidien. Pour Malick Ciss, chef de village de Thiambokh, Conseiller municipal à Keur Moussa et président de la Commission agriculture et élevage, cette situation est en parfaite contradiction avec l’ambition affichée par l’Etat de donner des emplois aux jeunes, à travers le programme «Xëyu ndaw ñi». «Si vraiment cette ambition est sincère, il ne faut pas laisser toutes ces terres entre les mains d’un promoteur qui travaille pour ses propres intérêts. Personne ne peut comprendre la mise en œuvre, au vu et au su de l’Etat, d’une initiative qui va mettre en péril des milliers d’emplois», a-t-il ajouté. Ce qui est aussi à ses yeux, de nature à encourager les jeunes, pourtant disposés et déterminés à gagner leur vie dans leur terroir, à emprunter les chemins chaotiques de l’émigration clandestine. «Nous n’avons que l’agriculture pour vivre, et c’est d’ailleurs pourquoi nous voulons que ce périmètre soit pérennisé. Nous n’accepterons jamais qu’un individu vienne s’approprier tout ce patrimoine commun. Nous refuserons jusqu’à la dernière énergie», ont déclaré en chœur les populations.
LE PARI DE LA RENCONTRE DIOMAYE-BARRO
Au-delà des symboles, les deux chefs d'État sont attendus sur des actes concrets pour relancer le dialogue et restaurer une paix durable dans cette région meurtrie par des décennies de conflit, selon de nombreux observateurs
La visite officielle qu’effectue le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, ce samedi à Banjul, doit servir d’occasion pour lancer un signal devant permettre de consolider la paix en Casamance, estiment des observateurs du conflit dans cette région naturelle située dans la partie méridionale du Sénégal.
Cette visite de travail fait suite à celle qu’il a effectuée en Mauritanie jeudi dernier et sera sa deuxième sortie à l’international et dans la sous-région depuis son élection à la tête du pays, le 24 mars 2024.
Aux yeux de certains observateurs du conflit en Casamance, le séjour du président sénégalais en Gambie s’inscrit dans le cadre d’une tradition républicaine et démocratique. Dès lors, elle est loin d’être dénué d’intérêt eu égard aux enjeux de paix, de sécurité et de stabilité dans le sud du pays.
Cette visite constitue “une opportunité pour les deux chefs d’Etat d’échanger autour de questions qui intéressent essentiellement l’éradication du trafic illicite [de bois] dans le sud du pays, en vue du retour d’une paix durable en Casamance”, estime Lamine Coly, le chef du village de Couram. Cette localité est située dans le département de Bignona, à la lisière de la frontière avec la Gambie.
Pour le coordonnateur de l’Initiative pour la réunification des ailes politiques et armées (IRPA) du Mouvement des Forces démocratiques de Casamance (MFDC), ” il ne s’agit pas pour les présidents Faye et Barro de réinventer la roue”.
“Il est plutôt attendu d’eux des actes qui consolident la paix en accompagnant et encourageant le processus enclenché par Diakaye [NDRL : état-major du front nord du MFDC] il y a plusieurs mois”, a-t-il dit.
Le professeur Nouha Cissé, un des observateurs les plus avertis du conflit en Casamance fait une analyse contextuelle au détour d’un rappel historique du rôle joué par la Gambie dans l’évolution de la crise en Casamance. Il extrait cette visite du registre du hasard et l’inscrit de fait dans le cadre des réalités géopolitiques et géostratégiques liant les deux pays, l’une d’elles étant liée à l’incrustation de la Gambie dans le Sénégal.
“Les deux pays, fatalement liés par l’histoire, la géographie, la sociologie, sont condamnés à développer une franche collaboration dans l’intérêt de leurs peuples respectifs, en réalité restés culturellement et sociologiquement un et un seul peuple”, a soutenu M. Cissé.
La Casamance, séparée du nord du Sénégal par la Gambie, est le théâtre d’un des plus vieux conflits d’Afrique depuis que des indépendantistes ont pris le maquis après la répression d’une marche en décembre 1982.
Après avoir fait des milliers de victimes et ravagé l’économie de cette région, le conflit a continuellement baissé en intensité.
Au moins 250 combattants du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC) ont déposé les armes, le 13 mai 2023, lors d’une cérémonie organisée à Mongone, une localité du département de Bignona, qui abritait par le passé une importante base du mouvement irrédentiste.