La journée d’hier, mardi 6 août 2024, a bouclé la semaine d’une crise en zone de frontière entre le Sénégal et la Gambie. Tout est parti d’une nouvelle mesure de la Gambie d’instaurer un tarif à l’acquittement d’une balise de la CEDEAO destinée au transit des gros porteurs. Ce que ces derniers trouvent exubérant sur un chemin déjà truffé de tracasseries policières et douanières sans cesse croissantes. Ils redoutent des conditions de plus en plus pénibles d’approvisionnement en nourritures et l’accès aux sanitaires.
C’est le statu quo à la frontière entre le Sénégal et la Gambie, à hauteur de Sénoba. La longue file des camions en stationnement depuis sept (7) jours s’est davantage allongée et sans aucune idée de leur sort. Pour rappel, leur arrêt fait suite à la décision de l’administration douanière de la Gambie d’appliquer des tarifs de balise sur les camions en transit dans les deux sens de la Trans-gambienne, alors que la mesure ne concernait que le sens Dakar/Casamance. En outre, les transporteurs se plaignent également des formes multiples de zèle assorties de paiements indéfinis à chaque point de contrôle et sans document qui atteste des sommes versées.
Avant-hier lundi, les oreilles étaient tendues vers Dakar où le Premier ministre, Ousmane Sonko, recevait le vice-président de la Gambie, Mohamed Jallow ; une visite qui s’inscrit dans le cadre du renforcement de l’amitié et de la coopération entre les deux pays, indique le Bureau de la vice-présidence de la Gambie. Manifestement, rien n’a filtré de cette rencontre traitant de cette crise à la frontière, aussi bien sur la partie sud (Sénoba) que nord, vers Keur Ayib.
Les nombreux camionneurs commencent déjà à souffrir de ce long arrêt. En plus des charges de subsistance alimentaire, ils disent craindre des maladies en cette période de saison des pluies, surtout qu’ils sont sans abris ni sanitaire adéquats. Si certains agitent l’option de faire demi-tour et engager le corridor Tambacounda/Dakar, d’autres qui déclarent n’avoir pas été préparés à cela restent profondément inquiets.
LES DESSOUS DE LA CRISE
Survie de la presse sénégalaise - Les nouvelles autorités sont-elles en train d’exécuter leur «agenda» pour «assainir», à leur manière, la presse sénégalaise ?
Les nouvelles autorités sont-elles en train d’exécuter leur «agenda» pour «assainir», à leur manière, la presse sénégalaise ? Présidant, le mardi 25 juin 2024, la Journée de réflexion avec les acteurs des médias sur «L’intégrité de l’information face à la désinformation et aux discours de haine», à l’initiative conjointe de la Convention des jeunes reporters du Sénégal (CJRS), le Haut-commissariat des Nations unies et la tutelle, Alioune Sall, le ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, avait dévoilé un pan de ce projet.
Intervenant sur la crise des médias sénégalais et les principaux problèmes qui minent ce secteur, Moustapha Diop, Directeur de Walf TV, a expliqué que les nouvelles autorités au pouvoir veulent d’abord s’attaquer et élucider l’origine des financements des médias sénégalais. Pour lui, dans un pays normal, les financements des médias doivent être transparents et obéir à des règles pour éviter toute influence néfaste, source de déstabilisation. Sur ce, relève-t-il, la presse sénégalaise, du moins une certaine presse, est gangrénée par des subventions et financements occultes et peu transparents. Il s’y ajoute que des hommes politiques notamment proches du pouvoir sont souvent derrières des médias. Et la chute de ces bailleurs n’est pas sans répercussions directes sur cette presse qu’ils soutiennent. «Des journaux, radios, télévisions et sites internet sénégalais ne sont pas bâtis sur de modèles économiques viables. Ce qui fait que la dépendance financière de ces médias vis-à-vis de certaines figures politiques constitue un problème majeur». Pis, «quand ces politiciens perdent le pouvoir, les financements cessent, mettant ces médias en difficulté», a-t-il dit, en Wolof.
En guise de solution à cette gangrène, le Directeur de Walf TV en appelle à la définition de chartes claires pour le financement des médias et une meilleure organisation de la publicité entre les médias privés et publics. Gage d’une viabilité économique des entreprises de presse et de la fin de la pratique du «tabataba», du «dëb debël» ou autre rafistolage qui minent le secteur. Aussi milite-t-il pour la fin des aides allouées à la presse, et la mise en place de «règles strictes» garantissant la transparence et la durabilité des financements dans le secteur des médias au Sénégal.
S’exprimait, en juin dernier, lors de la Journée de réflexion organisée conjointement par la Convention des jeunes reporters du Sénégal (CJRS), le Haut-commissariat des Nations Unies et la tutelle, le ministre Alioune Sall a révélé que le gouvernement reste à l’écoute de la presse pour mettre, avec les acteurs, en pratique la vision du président de la République. Non sans rassurer quant à la volonté du chef de l’État, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, de «soutenir une presse libre, diversifiée et responsable». «Je tiens à rappeler que le nouveau gouvernement, en collaboration avec les associations présentes ici, ainsi que nos partenaires techniques des Nations Unies et de la société civile, s'engage à garantir une transparence accrue dans la gouvernance du secteur des médias… Cela implique la publication de la liste des médias officiellement reconnus par nos services, mais aussi la divulgation des véritables propriétaires de ces entreprises de presse. Il est essentiel que chacun soit informé afin que les médias ne soient pas perçus comme des outils d'influence ou de lobbying», a-t-il promis. Seulement, la sorte d’assainissement furtif engagé par l’Etat a des contrecoups néfastes sur certains acteurs de la presse qui ne sont en rien concernés par les financements dits occultes, nébuleux et/ou politiciens et qui parvenaient à survivre dans le contexte global de crise des médias, grâce à leurs conventions commerciales avec les structures publiques. Des conventions aujourd’hui arrêtées sur décision des autorités.
LA PRESSE AU BORD DE L’ASPHYXIE
Blocage de comptes bancaires, pressions fiscales, suspension des conventions commerciales…Tant les dégâts collatéraux de cette sorte de «mortal kombat» avec la presse, dans sa globalité, sont lourds
Entre blocage de comptes bancaires, réclamation de paiement des dettes fiscales par la Direction générale des impôts et des domaines, suspension de conventions liant des départements et structures étatiques à des médias, menace de coupure de signal de télévision pour retard de paiement de redevance, moult entreprises et organes de presse sont au bord de l’asphyxie depuis quelques mois. Face à cette situation, le risque est grand de voir pas mal d’organes de presse mettre la clé sous le paillasson. Tant les dégâts collatéraux de cette sorte de «mortal kombat» avec la presse, dans sa globalité, sont lourds !
«Il n’y a pas de société démocratique sans une presse libre et pluraliste», déclarait l’ancien Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU), Kofi Annan, lors de la célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le 2 mai 1997, au siège de l’ONU à New York. Précisant qu’à travers cette journée qui venait d’être instaurée il y a quatre (4) ans sur décision de l'Assemblée générale de l’ONU, «nous célébrons le droit des peuples du monde à la liberté d’opinion et d’expression. Nous réaffirmons qu’il ne peut y avoir de société démocratique sans une presse libre, indépendante et pluraliste».
Cette déclaration semble faire écho à une autre faite plus de deux siècles auparavant, par Thomas Jefferson, homme d'État américain et principal rédacteur de la Déclaration d'indépendance des États-Unis, en 1776. Celui qui est devenu le troisième président des États-Unis d’Amérique (USA - de 1801 à 1809) avait déclaré qu’il n’y avait pas d'alternative à la liberté de la presse. «Notre gouvernement est fondé sur l’opinion de notre peuple», avait-il écrit en 1787, ajoutant que «le tout premier objectif devrait viser à maintenir ce droit. Et si on me demandait de décider si nous devons avoir un gouvernement sans journaux ou des journaux sans gouvernement, je n'hésiterais pas un moment à choisir la deuxième option».
Une opinion qui est toujours d’actualité. Mais, au Sénégal, la presse, qui a toujours été au cœur de la vie démocratique du pays, vit des moments difficiles depuis quelques mois. Une situation intenable qui risque de mener certaines entreprises de presse vers la faillite, si les nouvelles autorités continuent sur leur dynamique. En atteste, déjà le weekend dernier, le groupe de presse «Africaine Communication Edition» (AFRICOME) a annoncé la suspension de la parution des quotidiens «Sunu Lamb» et «Stades».
COUP DUR POUR LA PRESSE SENEGALAISE
Un coup dur pour la presse sénégalaise. «Depuis deux ans, AFRICOME connaît des exercices déficitaires, des dettes colossales vis-à-vis de ses fournisseurs (particulièrement étrangers pour son approvisionnement en intrants), des retards de paiement des salaires, l’arrêt du paiement des cotisations sociales et des frais pour la couverture maladie», a fait savoir le Directeur de publication des quotidiens sportifs Stades et Sunu Lamb, Mamadou Ibra Kane, dans un communiqué. Non sans manquer d’alerter que «cette crise économique et sociale n’est pas propre à AFRICOME et les entreprises sénégalaises du secteur des médias risquent de tomber comme des mouches».
En effet, depuis quelques mois, avec l’arrivée du nouveau régime, moult entreprises de presse sont confrontées à une accentuation de la crise qu’elles vivaient déjà, d’abord à cause de la pression fiscale. Les nouvelles autorités sont en effet décidées à recouvrer 13 milliards de dette fiscale et 25 milliards pour les redevances dues à l’Agence de régulation des télécommunications et de la poste (ARTP), auprès des entreprises de presse. Il s’en est suivi des mises en demeure et des blocages des comptes bancaires de certains groupes de presse. Une situation qui avait poussé les patrons de presse, notamment le Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse (CDEPS), à monter au créneau afin de trouver des solutions. A la pression fiscale que subissent actuellement les entreprises de presse, s’ajoutent la suspension de toutes les conventions avec les médias, signées par les structures publiques, jusqu’à nouvel ordre. Ce qui a contribué à aggraver la situation déjà jugée précaire de certains médias, si l’on sait que l’essentiel des revenus des médias vient des publicités et en partie de ces accords de partenariat.
AFRICOME, L’ARBRE QUI CACHE LA FORET !
Il faut également dire que la Société de télédiffusion du Sénégal (TDS.SA) est également à couteaux tirés avec Excaf Télécom qui a tellement investi dans le projet de la Télévision numérique terrestre (TNT) au point de se retrouver dans sa situation de vulnérabilité actuelle. Dans un communiqué, TDS.SA a annoncé le retrait de l’exploitation commerciale et technique multiplex dont Excaf Télécom avait la charge de la gestion privée depuis 2014. Sauf que ledit groupe persiste et signe «qu’il n’existe aucune relation juridique entre les deux parties dans le cadre des deux (2) multiplex» et «se réserve d’user de tous les moyens légaux pour défendre son droit». Et comme si cela ne suffisait pas, la TDS.SA menace de couper le signal de Walf TV sur la TNT et d’autres chaînes de télé.
Dans une lettre adressée au Président Directeur général (PDG) du Groupe Walfadjri, la nouvelle Directrice générale de TDS.SA demande à l’entreprise de presse de régler une ardoise de 10.820.000 de francs CFA, représentant la contrepartie financière de la diffusion de sa chaîne télé, Walf TV, sur la TNT, révèle Walf Quotidien. «Si le paiement n’intervient pas dans un délai d’une semaine, TDS-SA sera obligée de saisir l’organe de régulation, en l’occurrence le CNRA, afin de procéder à la suspension ou la cessation de la diffusion, comme stipulé à l’article 9 alinéa 4 du contrat», ajoute la source. C’est pour ainsi dire que la presse est en train d’être asphyxiée. Aucune entreprise et même organe de presse notamment du privé ou presque n’est mieux loti. Et, à ce rythme, certaines entreprises risquent de mettre la clé sous le paillasson. Ce qui a d’ailleurs commencé. Avec comme conséquence direct des licenciements de travailleurs et pères de famille, dans un pays où le chômage surtout des jeunes, qui sont 200 à 300 mille à débarquer sur le marché de l’emploi chaque année, inquiète plus d’un.
Par Henriette Niang KANDE
LA KERMESSE DES VANITÉS
Depuis peu, ce pays succombe à un singulier manichéisme qui sape les fondements de notre vivre-ensemble. On ne peut dégager un avenir en s’imaginant que gouverner c’est passer son temps à dénoncer les autres et fixer sa propre histoire en dogme
La première génération de notre élite nationale, très largement promue grâce à une logique socioprofessionnelle initiée par la France, était essentiellement constituée à partir du mouvement syndical largement dominé par les enseignants et «les médecins africains». La deuxième génération est arrivée avec sa vague d’administrateurs civils, mettant en œuvre les politiques de développement exigées par l’aide bi-ou-multilatérale ou les organismes internationaux
Puis, elle s’est mise à faire de la politique. Avec la troisième génération constituée de techno-économistes, c’est la transnationalité qui devient signe et repère de l’excellence, tout en n’ayant pas les moyens d’investissements économiques et financiers des politiques qu’ils prônaient. Ce fut une période de « leurres et lueurs » durant laquelle l’élite dirigeante ne disposait que d’un pouvoir virtuel, avec des sens et des postures plus exogènes qu’endogènes. Une troisième alternance arrivée en mars 2024, propulse des inspecteurs des Impôts et des Domaines entrés en politique, opposants farouches puis vainqueurs de l’ancien régime, monopolise tous les débats, des plus graves aux plus futiles sur une scène politique qui ressemble de plus en plus à un vaudeville, une grande kermesse des vanités.
De ces vagues générationnelles il ressort que notre élite politique, depuis l’indépendance, a toujours été confrontée à des crises profondes qui ne sont pas seulement économiques puisqu’elles affectent y compris les ressources imaginaires de son identité, du fait qu’elles n’ont jamais disposé à proprement parler, des moyens de leurs promesses. Les crises sont souvent des moments de basculement. C’est le cas de notre vivre ensemble. Il est est en train d’être très dangereusement menacé. Des fragilités éclatent au grand jour, des innovations s’accélèrent, des mouvements de fond émergent soudain en surface. Sans doute sommes-nous à l’un de ces tournants. Dans de nombreux domaines, les évolutions s’exacerbent, et observateurs ou analystes s’accordent à reconnaître que l’hérésie est au fondement et à l’origine de ce nouvel ordre sociopolitique, économique, culturel, idéologique. C’est dans ce cadre, que notre commun vouloir de vivre ensemble est de plus en plus mis à l’épreuve. Il apparaît comme une remise en question radicale de sens et/ou postures jusque-là plus ou moins efficaces, dans l’espace social sénégalais. De ses effervescences surgissent individuellement ou en masse, des troupes, composées d’incendiaires bas de gamme. Ils jettent leur huile sur le feu, dont on finit par se demander s’il cela ne les réjouit pas. D’autre part, il y les incendiaires de luxe, qui, certains de leur importance, emblèmes médiatiques contestables, mais perçus irremplaçables projettent une réalité qu’ils divisent sciemment : les lumières pour leur camp, les ombres contre les autres, considérés comme un soufre dévastateur. C’est le côté fascinant et quelques fois horrible de la politique.
Les diverses réactions suscitées la semaine dernière par la sortie du Premier ministre devant ses hôtes-cracks qu’il invitait pour magnifier leurs performances scolaires en sont une preuve. « On n’acceptera plus que le voile soit interdit dans certaines écoles ». Ce week-end, tout s’est accumulé : l’arrivée légitime du nouveau régime aux affaires, l’implication présidentielle minimaliste, les phrases provocatrices, des attitudes frôlant l’arrogance du Premier ministre et une étrange atmosphère de cour où il semble qu’une solitude impérieuse dissimule quelque dessein, dont il n’arrive pas à se défaire parce qu’il tient plus à ce qu’il est qu’à ce qu’il accomplit ou non. Peut-être faut-il chercher à appréhender l’influence de ses obscurités et le poids de son histoire personnelle pour comprendre la foudre et la violence de cette personnalité qu’on dit brillante mais vindicative, où se glisse un récit d’offenses intimes et de frustrations personnelles ? Dans un article publié dans les colonnes de Sud Quotidien le 19 septembre 2019, suite à ce qu’il est convenu d’appeler «l’affaire Jeanne D’arc», Vieux Savané fait observer que « sur un effectif de plus de 1700 élèves, 23 d’entre elles sont d’origine libano-syrienne, d’obédience chiite, soutenue par le Hezbollah et l’Iran». Ces élèves, passant outre le règlement intérieur de l’institution, avaient décidé qu’elles ne partageraient plus le même table-banc avec des camarades garçons et n’iraient plus au cours de gymnastique pour cause de présence masculine. C’était la raison essentielle de leur renvoi.
Le Premier ministre ignorait-il qu’un accord avait été trouvé, qui réintégrait en classe les élèves voilées à condition de porter l’uniforme obligatoire assorti d’un voile qui ne le cacherait pas et suivre tout autant obligatoirement tous les cours. Cet accord, obtenu après un dialogue pour dégager toute confusion et toute manipulation, est la preuve du respect à la fois de la liberté religieuse, et d’un vivre-ensemble, malgré les différences. Comme pour dire que c’est à l’école qu’on apprend le vivre-ensemble, que la cohésion et le lien social vivent en son sein. Cet environnement, telle une éponge naturelle, absorbe le savoir-vivre et s’en nourrit inlassablement. Car la vie a toujours été assise sur les bancs scolaires, même si l’école est marquée par le temps, les époques, les crises, les générations, les controverses, les polémiques. C’est cette approche qui a rendu féconde notre école.
Que s’est-il donc passé entre 2019 et le week-end dernier pour que le pays tremble ou fait mine de trembler face au voile ? La « question du voile », qui fait tant s’agiter la société, témoigne à n’en plus douter de ce nouveau phénomène qu’est le délitement de notre vivre-ensemble, particularisme si sénégalais ! Les polémiques donnent à voir une inquiétude nouvelle sur le devenir collectif au sein d’un Sénégal lui-même incertain de son identité.
C’est quand une élite est au pouvoir que le peuple se rend compte que derrière l'apparence des conduites et des décisions se cache l’humus des caractères, la subjectivité souvent débridée et perturbée de certaines personnalités. Comment peut-on croire qu’en interdisant l’expression d’idées différentes, ou en « interdisant d’interdire », dans une brutalité atavique un certain port vestimentaire qu’on se mettra à l’abri du pire ? Depuis un certain temps, ce pays succombe à un singulier manichéisme qui sape les fondements de notre vivre-ensemble qui est son identité. On ne peut dégager un avenir en s’imaginant que gouverner c’est passer son temps à dénoncer les fautes des autres et fixer sa propre histoire en dogme. Malgré de nombreuses promesses, une grande frange de la population est au bord du gouffre à pauvreté, dans un Etat dans l’angoisse de ce qui l’attend, face à des identités imaginaires bâties à la hâte pour exiger une reconnaissance comme un dû, dans un climat de crispations et de méfiance qui rejoint, chez certains le sentiment d’une accélération de leur marginalisation.
Pour gouverner un pays, il faut connaitre au minimum sa conscience historique et sa moralité communes. Parce qu’on ne peut réaménager une conscience collective, ceux qui nous gouvernent ne sauraient être ignorants du travail de la mémoire, du dialogue continué avec le passé qui est indissociable de notre vivre ensemble, de l’exercice de nos libertés (je ne parle pas de licence). Dans le cas contraire, ce sont la liberté, le civisme, la vérité qui sont perdants, pasteurisant ainsi, la démocratie gagnée suite à des luttes épiques face à des élites politiques de toutes sortes qui se sont accordé le droit de penser, de parler, d’écrire, de choisir et d’exclure, quelque fois dans un délire si ce n’est des hérésies et des partialités assumées avec bonne conscience, qui sont loin d’expliquer les coups de dés erratiques, prenant des préjugés favorables ou pas pour des vérités révélées donc absolues.
La polémique née depuis le week-end dernier doit nous faire savoir raison garder pour revenir à cette intelligence qui nous unit au lieu de nous confronter à cet ébranlement conjoint dans lequel nous pensons aujourd’hui, les rapports du privé au public, de l’individuel au collectif, du corps et des croyances de chacun, au corps social. Là est notre salut.
MULTIPLE PHOTOS
LES UNES DE LA PRESSE DE CE MERCRE 7 AOUT 2024
Sud Quotidien, Walf Quotidien, Révélation Quotidien, Le Témoin Quotdien, Le Quotidien, Yoor-Yoor Bi, Bes Bi le jour, Libération, EnQuête, L'Observateur, L'AS, Le Soleil
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KEEMTAAN GI - PAR ICI, LA FLIBUSTE !
Tiens, ça ne vous trotte pas souvent dans la tête cette envie subite de vouloir prendre le large et quitter le climat infect de ce charmant pays ? Pas bien sûr par pirogue, mais s’offrir un billet aller (avec un retour open !) vers d’autres cieux moins polluants pour mieux respirer et se changer les idées. Fuir ce pays des paradoxes où l’on a tendance à entretenir la méchanceté gratuite. Rien que pour faire mal à son prochain. Dénigrements, mensonges, insultes, dignités bafouées et vies brisées. Ce sont là des pratiques auxquelles s’adonnent des individus vils. Et ceux qui s’illustrent le plus dans ce registre ont choisi la profession désincarnée de journaliste pour sévir. D’autres, sortis de nulle part, se font appeler chroniqueurs. Il parait que certains d’entre eux, entretenus par des gens de l’ancien régime, étaient en conclave ce weekend end dans un réceptif de la place. Leur mission destructrice consisterait à mettre les nouveaux dirigeants en mal avec la population. Bien entendu, des médias bien ciblés leur ouvriront leurs studios ou leurs plateaux. Nos télés sont ainsi devenues le réceptacle de tout ce qui est pourriture. De ce médium, des parents préoccupés par la bonne éducation et la santé mentale de leurs progénitures, ont tendance à zapper ou éloigner les tout-petits. Tellement on y entend tout ce qui est vilenie. L’interdiction d’un feuilleton passant dans une chaîne de télé par le Conseil National de Régulation de l'Audiovisuel à cause des injures proférées par de grandes personnes, constitue la dernière preuve en date, s’il en était besoin, de cette déchéance. C’est pire de se réveiller le matin et de suivre ceux qui font la revue de presse sans aucune censure. On en arrive même à se demander si ce ne sont pas des chiffonniers qui publient certains journaux. Un métier investi par des condottieres. Ce qui fait que l’on a souvent envie de tout jeter aux orties et s’éloigner du métier de journaliste, tellement la profession est envahie de personnes peu recommandables. Un exemple achevé, et particulièrement dégoutant, nous a été servi en ce début de semaine. Après avoir accusé le général Cheikh Sène des crimes les plus abominables, bafouant sa dignité de père de famille et de soldat aux excellents états de service, un éditeur est revenu avec son torchon pour, a-t-il dit, rétablir une vérité tout en sachant qu’il a raconté sciemment des balivernes dans le but d’atteindre l’honorabilité d’un citoyen qui a servi dignement son pays. Des entorses auxquelles nous habituent une presse invisible dans les kiosques et des journaux à une seule page : la une pour être lue dans les revues de presse. Des torchons animés par des flibustiers sans foi ni loi qui s’amusent à « tuer » des modèles. KACCOOR BI - LE TEMOIN
MAGAL 2024 : LES RECOMMANDATIONS DE SERIGNE MOUNTAKHA
En prélude au Magal de Touba, commémorant le départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur de la confrérie mouride, qui se tiendra le 23 août prochain, le khalife général des mourides, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, a délivré un message aux fidèles. Serigne Mountakha Bassirou Mbacké a recommandé aux mourides de lire le Saint Coran trois fois ou, à défaut, au moins une fois avant le Magal. Pour ceux qui ne maîtrisent pas la lecture du Coran, il a conseillé de réciter certaines prières spécifiques trois fois ou, au minimum, une fois. Le Khalife a également invité tous les talibés mourides à venir célébrer le Magal de Touba, soulignant l’importance de cette commémoration dans la vie spirituelle de la confrérie.
CONDOLEANCES SONKO CHEZ FEUS ALIOUNE MAR ET MACTAR DABO A RUFISQUE
Hier après-midi, le Premier ministre Ousmane Sonko s’est rendu à Rufisque au niveau des quartiers de Diokoul et Almadies 2 pour présenter ses condoléances aux familles de Alioune Mar, maire de Rufisque Ouest, et de Mactar Dabo, commissaire scientifique de PASTEF. À Rufisque Ouest, Alioune Mar décédé le vendredi à Dakar et enterré le lendemain samedi au cimetière de Dangou a laissé une empreinte indélébile par son engagement envers le développement local. Toute la ville de Rufisque se remet difficilement de cette perte. Alioune Mar était reconnu pour son dévouement et son travail acharné à améliorer les conditions de vie de ses concitoyens. Pendant près de 22 ans, il a trôné sans partage à la tête de la mairie de Rufisque Ouest. Alioune Mar avait été élu sous la bannière du PDS en 2002 et depuis, sous différentes étiquettes politiques, il a été réélu à plusieurs reprises à la tête de la mairie Ouest. Ce samedi à son enterrement, c’est un monde fou qui l’a accompagné au cimetière de Dangou aux côtés de sa défunte mère. Aux Almadies 2 à Rufisque, la disparition de Mactar Dabo, commissaire scientifique de PASTEF, laisse un grand vide dans les cercles académiques et politiques, où il était respecté pour ses contributions et son expertise. Très engagé pour défendre le Projet Pastef, Mactar Dabo avait même réagi dans l’affaire du voile en répondant à la sortie de l’Abbé Latyr Ndiaye qui avait attaqué la position du Premier ministre sur la question. Quelques instants après, il avait piqué un malaise qui lui a été fatal. Lors de sa visite, Ousmane Sonko a exprimé sa profonde tristesse face à la perte de ces deux personnalités éminentes.
CAYAR DE DEBARRASSE DE 100 TONNES DE DECHETS MARITIMES
Les déchets qui viennent des outils de pêche utilisés par les pêcheurs, à Cayar, menacent gravement l’écosystème marin. La population, fortement mobilisée, a ainsi procédé au nettoyage de la plage et du fond marin. Une grande mobilisation, avec la participation du maire de la commune et de l’ensemble des autorités de la localité, outre la considérable contribution, à l’opération, du ministère de la Pêche. « L’objectif de cette rencontre est d’abord de faire le nettoyage des fonds marins, tout le monde sachant que l’écosystème marin est très menacé par des déchets qui s’échappent des matériels de pêche utilisés par les gens de mer, comme les filets mono-filaments, qui sont perdus par les acteurs, sans compter certains engins de pêche qui ne sont pas favorables à l’écosystème et qui sont, dès fois, perdus par les pêcheurs et doivent être récupérer pour nettoyer le fond marin et la plage », a expliqué le coordonnateur des Conseils locaux de la pêche artisanale (CLPA) de Cayar, Mor Mbengue. Avant de poursuivre : « Tout le monde est sorti, la population de Cayar s’est mobilisée comme un seul homme pour procéder à ce nettoyage. Nous avons eu l’initiative de faire le suivi, qui consistera à organiser d’abord les quartiers pour faire le nettoyage en permanence mais aussi poursuivre le nettoiement, 3 fois dans l’année, de la plage et du fond marin, à savoir au début de la campagne de pêche, pendant et après ladite saison ». Mor Mbengue et ses camarades lancent un appel à la population de Cayar, pour « ne plus salir la plage, car cet endroit n’est pas une poubelle ou un dépotoir de déchets, d’ordures ».
THIENEBA SERIGNE SOULEYMANE SECK BOROM XAASS N’EST PLUS
Thiénéba, la sainte cité d’El Hadj Amary Ndack Seck (1831-1899), est en deuil. Serigne Souleymane Seck Borom Xaass, petit-fils du fondateur ce sanctuaire de l’islam, un fervent adepte de l’unité inter-confrérique a été rappelé à Dieu, ce jour, 6 août 2024, à Thiénaba, à l’âge de 69 ans. Il était un éminent défenseur des traditions de la confrérie Tidiane. Les témoignages sont unanimes sur le fait que « la cité religieuse de Thiénaba a perdu un militant de la première heure du dialogue interreligieux ». Le défunt guide religieux sera inhumé ce mercredi 7 août aux cotés des siens, dans sa ville natale de Thiénaba.
SENEGAL-MEDIAS-CONJONCTURE / CRISE DU SECTEUR DE LA PRESSE LA CAP DEMANDE L’OUVERTURE DE DISCUSSIONS ET CONCERTATIONS
La Coordination des Associations de Presse (CAP), ”très préoccupée par la situation très difficile que vit le secteur des médias”, demande l’’ouverture de discussions pour ”des solutions concertées à cette crise”. Cette crise s’est traduite par ”la fermeture d’entreprises de presse et conséquemment par la perte subite de dizaines d’emplois, chaque fois qu’un support se déclare en faillite économique’’, explique la CAP dans un communiqué transmis ce mardi à l’APS. C’est déjà le cas, dit-elle avec ‘’la suspension de parution des quotidiens “Stades” et “Sunu Lamb”. Le quotidien Vox Pop ”n’est pas paru ce jour”, selon la même source. ”Des informations qui nous parviennent et pour les mêmes motifs, d’autres quotidiens de la place suivront cette vague désastreuse”, écrivent les responsables de la CAP. Face à cette ”situation intenable et de faillite de tout un secteur”, la CAP note que ”l’Etat opte pour le mépris et ses démembrements continuent d’enchaîner des décisions et injonctions qui frisent une volonté manifeste et assumée de mise à mort des médias privés du pays”. Elle estime que ”les nouvelles autorités n’offrent aucune possibilité de dialogue et de concertation pour des solutions concertées à cette crise”. ‘’Elles ont certes trouvé un secteur à l’agonie dont le processus de réforme a été volontairement tronqué par les anciens tenants du pouvoir, mais force est également de constater que le nouveau régime n’a entamé ni consultations ni concertations afin de relancer la normalisation de ce secteur névralgique pour la démocratie’’, avance ainsi la Coordination. Pour la CAP, ‘’ce n’est pas en déroulant un agenda de pressions multiformes’’, à travers ‘’le contrôle fiscal, la confiscation du Fonds d’appui au développement de la presse (FADP), la mise en demeure de paiement de redevances par TDS, la résiliation et la suspension des paiements des conventions commerciales par les structures publiques que l’Etat mettra de l’ordre dans le secteur des médias”. Selon elle, ‘’si l’objectif de l’Etat n’est pas, comme certains le subodorent, la mise à mort programmée de la presse privée, seules des mesures hardies de correction et d’adaptation de l’écosystème des médias, prises à la suite de concertations franches, peuvent servir de solutions”. Fort de ce constat, la CAP ‘’tient à témoin l’opinion publique nationale et internationale mais aussi les organisations internationales de défense de la liberté de la presse sur les périls qui guettent le journalisme au Sénégal si rien n’est fait”
Baadoolo - Notre devise et non ce qui nous divise
Mettons de côté la polémique sur le voile en attendant. Na xel yi dal d’abord. Mais il faudra définitivement la régler. Parce que si des prêtres disent qu’ils ont raison. Des imams aussi disent qu’ils ont raison. Ça devient dangereux. Il faut bien que l’on retourne à «Un peuple-Un butUne foi» qui est en en train de dériver sur des peuples, des buts, des foires d’insultes. Restons sur notre devise. Et non sur ce qui nous divise.
Crise des médias et fermeture de journaux La Cap demande l’ouverture de discussions avec l’Etat
Face à la crise financière qui sévit dans les médias en plus de la suspension de la parution de quotidiens d’information, la Coordination des associations de Presse (Cap) a interpellé le gouvernement. D’abord, en prônant «l’ouverture de discussions et concertations» avec l’Etat, elle «constate et dénonce le fait que les nouvelles autorités n’offrent aucune possibilité de dialogue pour des solutions concertées» à cette situation. «Elles ont certes trouvé un secteur à l’agonie dont le processus de réforme a été volontairement tronqué par les anciens tenants du pouvoir, mais force est également de constater que le nouveau régime n’à entamé ni consultations ni concertations afin de relancer la normalisation de ce secteur névralgique pour la démocratie», a fustigé la Cap tout en déplorant, entre autres, «l’agenda de pressions multiformes (contrôle fiscal, confiscation de la Fadp, mise en demeure de paiement de redevances par Tds, résiliation et suspension des paiements des conventions commerciales)».
Santé L’Oms recrute Dr Abdoulaye Bousso
L’ancien directeur du Centre des opérations d’urgence sanitaire du Sénégal vient d’être recruté par l’Organisation mondiale de la santé (Oms/Afro) renseigne le site infomed.sn sur sa page Linkedin. Docteur Abdoulaye Bousso est chargé de coordonner et de superviser les urgences sanitaires en Afrique. Il rejoindra le siège son poste cette semaine à Brazzaville.
Arrondissement de Tendouck - L’association Awsofmayi a célébré la journée de l’arbre
A l’image de tout le Sénégal, dans le village de Bassir d’où est originaire le chef du gouvernement, Ousmane Sonko, les populations de l’arrondissement de Tendouck, à travers l’association Awsofmayi, ont organisé la journée nationale de l’arbre. Une activité qui s’est déroulée en présence du sous-préfet Mbaye Diouf, du maire de Karthiack et d’une délégation de parlementaires de la 14ème législature conduite par la Dr Gnima Goudiaby, vice-présidente à l’Assemblée nationale, un des initiateurs de ce projet. Ainsi, à travers ce lancement officiel du projet Awsofmayi, trois palmiers à huile pour une femme en Casamance dans le but de rendre hommage à la femme d’Afrique au Sénégal à travers Maïmouna Bodian Goudiaby, 500 palmiers ont été distribués en attendant de renforcer le nombre dans les prochains jours. Le sous-préfet, le maire de Karthiack ou encore Lansana Goudiaby, président directeur général de Asdis-Universelle Ziguinchor, tous ont salué cette initiative et mis l’accent sur l’importance de l’arbre dans la vie de l’homme mais aussi pour un environnement paisible.
Drame à Kafountine Un enfant de 2 ans meurt noyé dans les eaux de pluie
Après le drame survenu il y a trois semaines à Kantenne, où deux enfants avaient été retrouvés morts dans les rizières de Boutoute, un autre enfant de deux ans a tragiquement perdu la vie par noyade à Kafountine. Les récentes pluies ont inondé la maison familiale, emportant le môme sans que ses parents ne s’en aperçoivent pendant plusieurs minutes. C’est en sortant pour prier que la grand-mère a découvert le corps. La famille Diémé de Kafountine est en état de choc, pleurant la perte de leur jeune Malick Diémé, emporté par les eaux. La brigade de gendarmerie de Kafountine s’est rendue sur les lieux. Le maire de Kafountine, David Diatta, a appelé à l’activation d’un plan Orsec local afin de débarrasser les quartiers de la commune des eaux stagnantes.
Magal Le khalife général des mourides invite à lire le coran
Le Magal de Touba qui marque le départ en exil du fondateur de la confrérie mouride aura lieu le 23 août prochain. En prélude à cet événement religieux, le khalife général des mourides s’est adressé aux fidèles mourides. Serigne Mountakha Bassirou Mbacké recommande la lecture du Saint Cora trois fois ou au moins une fois. Pour ceux qui ne savent pas le faire, il exhorte à réciter trois fois ou bien une fois. Serigne Mountakha Bassirou Mbacké a demandé aux talibés mourides de venir célébrer le Magal de Touba. A sa suite, son porte-parole et non moins président du comité d’organisation du Magal, Cheikh Bassirou Abdou Khadre est revenu sur l’historique de l’événement et les différents interdits en cours à Touba.
Élections aux États-Unis Kamala Harris a choisi son colistier
La vice-présidente des Etats-Unis, Kamala Harris, candidate démocrate à la Présidentielle du 5 novembre, a choisi Tim Walz, gouverneur de l’Etat du Minnesota, comme colistier et potentiel vice-président en cas de victoire, selon des médias américains. Tim Walz, 60 ans, est réputé pour avoir pris des mesures considérées comme progressistes depuis son accession en 2019 au poste de gouverneur de cet Etat du «Midwest», région clé pour novembre.
CSM, LA PRÉSENCE DU PRÉSIDENT EST COMME UNE FORME DE VIOLATION DE LA SÉPARATION DES POUVOIRS
Pour Me Pape Djibril Kanté, "on a besoin d'un magistrat, juge ou d'un décideur qui doit être dans des conditions à ne pas être influencé, ni techniquement ni statutairement, une fois qu'il est sur le banc".
Maitre Pape Djibril Kanté est un avocat sénégalais établi au Canada, spécialiste en gestion des collectivités locales. Il est actif dans les débats politiques et s’intéresse aux questions liées aux droits humains et contractuels. Sympathisant du Pastef, il a travaillé pour la réussite du Projet porté par Ousmane Sonko, estimant que ce dernier est le mieux placé pour relever les défis du pays. Dans cet entretien avec ‘’EnQuête’’, il donne son avis sur les affaires judiciaires du pays, les contrats pétroliers, les nominations et les cent jours de Diomaye à la tête du pays.
Le Projet vendu aux Sénégalais par le Pastef n'est toujours pas prêt. Comment appréciez-vous cela ?
Techniquement ou dans une quelconque instance, je n'ai pas participé à la rédaction du Projet, même si je peux avoir, par des moyens détournés, fait des inputs, des avis que je peux partager, mais il faut comprendre que c'est un parti qui existe depuis 2014. Depuis, ils sont présents sur la scène politique. Ils déclinent leur vision, leurs discours dans tous les domaines quasiment. Le président Sonko était à l'Assemblée nationale et combien de fois n'a-t-il pas exposé sa vision ?
Donc, les Sénégalais ont largement eu le temps d'absorber et de digérer son discours, son programme, sa vision. Peut-être que c’est pour cela que les gens n'ont pas eu de difficultés à le choisir et ont eu le temps qui leur a permis de connaître réellement la personne et savoir vers où elle veut nous mener. Cela explique aussi quelque part malgré la diabolisation, une certaine fébrilité autour de lui, les attaques, etc.
Les gens ont su faire la part des choses entre ce qui l'est, ce qu'il veut pour le pays et comment il veut y aller. Maintenant, quand on arrive au pouvoir, c'est sûr qu'il y a des ajustements à faire.
Si on prend l'ancien régime qui est venu en 2012, c'était le "Yonou Yokuté". Mais une fois au pouvoir, il y a eu des ajustements à faire parce qu'on est dans le cadre d'une coalition et il y a une nouvelle réalité. On va redéfinir et recadrer un peu la vision globale, la mettre sur orbite avec des experts ou des éléments nouveaux qu’on va y intégrer ou d'autres éléments à élaguer.
Mais clairement, on est dans les temps d'une rédaction beaucoup plus affinée, pointue par rapport surtout aux nouvelles réalités qu'on va trouver dans le pays.
Globalement, les gens savent où ils vont. On n'est pas avec des gens qui découvrent avec une feuille blanche. Des gens qui ont attendu le jour de leur élection pour réfléchir sur quoi faire. Non ! Ces gens savent où ils vont.
D'abord, l’on sait qu’ils ont blanchi sous le harnais. Ils sont des experts dans leurs domaines. Ce sont des fonctionnaires qui ont eu une longue carrière, une grande connaissance de l'État. Ce qu'on ne sait pas souvent, c'est que bien qu'ils étaient dans l'opposition, notre pays est rempli de patriotes. On n’aurait jamais pu arriver à de tels résultats si l’on n’avait pas des patriotes à l'intérieur de l'État.
Vous pensez que c’est le temps approprié pour écrire ?
Le président et son équipe peuvent très bien prendre leur temps. Entre le "Yonou Yokouté" et le PSE, il y a du temps de formation. On n'aura pas besoin d'aller payer des milliards pour rédiger quoi que ce soit. Les gens ont le temps. Le seul souci, c'est qu'on n’a pas le temps de vulgariser ça parce que le pouvoir et les événements ont fait que les gens n'avaient pas le temps d'échanger des idées. On était dans une posture de légitime défense par rapport à des agressions multiples. À l'Assemblée nationale, il n’y avait pas de débat d’idées, ces dernières années, mais des échanges d'invectives. Dans le débat national, c'était des problèmes extrajudiciaires ou judiciaires. Mais rien qui nous renvoyait vers des débats sérieux, fondés sur les idées.
En somme, Sonko n'est pas quelqu'un qui n'est pas en mesure de livrer la marchandise, puisqu'il a écrit depuis des années des ouvrages où l’on peut aller puiser des informations. Le programme Pastef est tellement éloquent, étoffé qu'il suffit aux gens d'ouvrir leurs livres, les parcourir, voir ce qui est proposé aux Sénégalais pour être édifié.
Maintenant, comme je dis, dans tout programme, il y a des ajustements et dans ce pays tout est priorité.
On parle aussi de la renégociation des contrats pétroliers. En tant qu'expert est-ce une bonne idée ?
On parle de renégociation parce qu'il y a un préalable où les conditions de signatures ou les obligations de chacune des parties, selon beaucoup de Sénégalais, n'était pas très en faveur du pays. On estime qu'une certaine personnalité de l'ancien régime a donné la part trop belle, pour x raisons, à nos partenaires. Mais la renégociation, que cela soit dans le domaine pétrolier ou dans un autre, elle est possible. On nous avait dit que les partenaires risquaient de se retirer. Mais dans le cas des contrats pétroliers, la renégociation est quelque chose de très récurrent, parce que ça fluxifie. Les situations peuvent changer. Les partenaires peuvent réajuster leur prétention. Surtout que dans ce domaine, il se trouve manifestement que les anciens dirigeants du Sénégal n'avaient pas sauvegardé nos intérêts de la meilleure des façons.
Donc, on vient avec une nouvelle posture, de nouveaux arguments. Les partenaires techniques et financiers pétroliers savent où sont leurs intérêts. Est-ce qu'ils sont prêts à engager un bras de fer face à un pays où ils ont investi ? Comme on dit, il vaut mieux une bonne entente, une bonne négociation qu'un procès. Ils savent très bien ce qui est raisonnable sur le marché, quels sont les prix et les prétentions. On n'est pas là pour dire qu'on va tout casser, mais juste pour dire que vous venez exploiter nos ressources, voici ce qui est raisonnable comme prétention de notre part et qui est légitime et vous en avez pris trop.
Donc, il faut un rééquilibrage et c'est dans leurs intérêts, vu que de toute façon, on arrivera au terme de ces contrats. À un moment, si cela ne nous arrange pas, on va dire que le contrat est arrivé à son terme et on va chercher d'autres gens. Est-ce que ça les arrange ? Je ne le pense pas, parce qu'une fois qu'ils sont là et ont fait leurs investissements, on est censé aller vers des partenariats assez longs qu'on espère mutuellement satisfaisants. Chacun est parfois obligé de prendre sur soi, ajuster ses prétentions sans léser les autres. On ne dit pas qu'on va les chasser, léser, mais réajuster dans une logique de gagnant-gagnant. Les autres le savent et je pense même qu'ils sont dans l'optique d'ouvrir les négociations et d'acquiescer.
Tout dépend du domaine, mais je ne vois pas un partenaire avec tous les investissements consentis se braquer parce qu’on veut revoir certaines choses. Ce n'est pas toujours une question d'argent, mais d'image. Quelle est l'entreprise qui a envie d'aller dans un procès et une ronde de négociations où les médias internationaux vont savoir dans quelles conditions nébuleuses ont été signées telle et telle chose ? Ce n'est pas bon pour le business. Des fois, pour garder une bonne réputation, il vaut mieux lâcher du lest.
La réforme de la justice a été au cœur du Projet. Il y a eu les Assises de la justice et il a été question, au cours des discussions, de la présence du chef de l’État au Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Quel est votre avis sur la question ?
J'ai l'impression qu'on réduit la réforme de la justice à la présence du chef de l'État au Conseil supérieur de la magistrature. Alors que tant s'en faut. Aujourd'hui, je pense même que la première des réformes et l’une des plus fondamentales est la réforme du système judiciaire. Il faut une refonte totale du système judiciaire. Il faut réconcilier les populations à leur justice, les justiciables avec leur justice. Qu'il la connaisse et la définisse. C'est quoi, quelle justice, voulons-nous ? Comment voulons-nous qu'elle nous traite ? Par rapport à cela et tout ce que nous avons eu comme problèmes ces dernières années, la justice a eu une très grande responsabilité là-dedans. Malheureusement, la vérité est que le chef de l'État de l'époque, dans son agenda politique, a utilisé la justice pour arriver à ses fins. C'est vraiment vers la fin, quand il n'en pouvait plus, qu'il s'est retourné vers les conseillers (Conseil constitutionnel).
Il y a une refonte totale à faire pour une indépendance. Cette dernière ne se réduit pas au président qui peut donner des injonctions ou qui peut influer sur le cours de la justice. C'est une approche multisectorielle autant en prenant des mesures statutaires légales qui font que le président ne peut pas influer une fois qu'un juge est nommé sur le cours, processus de la justice. Je donne le cas où un juge est saisi d'un dossier et qu'il commence à le traiter, comme c'était le cas de la Crei, que le président ne puisse plus émettre un juge qui est déjà saisi tant que l'instance de son dossier n'est pas terminée. C'est une forme d'indépendance.
Le fait aussi que le juge ne puisse pas avoir la latitude d'interpréter de façon élastique les termes de la loi est une forme d'indépendance. Il faut comprendre que l'indépendance de la justice n'est pas pour le magistrat, c'est pour les justiciables, parce qu'à partir du moment où le justiciable est un peu à la merci, soit d'une interpellation instable large libérale de la loi dans tous les domaines, on est dans une insécurité juridique.
Donc, on a besoin d'un magistrat, juge ou d'un décideur qui doit être dans des conditions à ne pas être influencé, ni techniquement ni statutairement, une fois qu'il est sur le banc et qu'il agit, par qui que ce soit. Aussi, que son indépendance soit garantie de façon matérielle et financière. Je pense que c'est réglé. Mais aussi qu'on ne puisse pas influer sur sa carrière par crainte d'une décision qui peut être favorable ou pas aux politiques.
Donc, la présence du président en tant que tel au conseil n'est pas obligatoire, mais je peux comprendre que certains puissent concevoir qu'il le faut parce qu'on n'est pas à un niveau de maturité dans nos institutions qui font qu'on ne peut plus se passer de lui. Mais dans un système normal, il faut une séparation des pouvoirs Judiciaire, Exécutif et Législatif. Quelque part, pour moi, la présence physique du président la République est comme une forme de violation de cette séparation. Pour moi, une fois qu'il est nommé, il doit se retirer. Mais cela suppose aussi que l'institution judiciaire ait les reins assez solides, soit assez mature pour pouvoir se réguler de l'intérieur. Sinon, on va renvoyer une image qu'on dit tout le temps : la République des juges. Ça aussi, ça se règle par la loi.
En effet, il faut de la même façon que le président ou l'Exécutif ne s'immisce pas dans la fonction de la justice, il ne faut pas non plus donner un chèque en blanc aux juges pour qu'ils puissent faire tout et n'importe quoi. La loi, en ce moment, vient les encadrer. Eux, ils n'inventent pas la loi, ils l'appliquent. C'est à la loi d'être très claire, de mettre les balises, de dire ce qu'un juge peut faire et ne peut pas faire. Donc, il faut que les juges soient responsables. Les immunités des juridictions, une certaine confraternité donnent parfois l'impression d'être une caste, un groupe qui est au-dessus de la loi. Alors que ce n'est pas le cas. À partir du moment, n'importe où sur le spectre politique, les gens se disent "'nous ne sommes pas au-dessus de la loi et que c'est la loi qui est au-dessus de nous", je pense qu'on est protégé. C'est en ce moment qu'on pourra parler véritablement d'indépendance de la justice.
La régulation de certains propos sur les réseaux sociaux a été annoncée par le PM. Comment cela pourrait-il se faire ? Est-ce possible ?
Tout dépend de ce qu’on met dans le contenu. C'est clair qu'on ne peut pas laisser un domaine aussi important sans régulation. On est à l'ère des technologies et les réseaux sociaux font partie de la vie de tous les jours. Donc, c'est un pan de la vie de la société qu'on ne peut plus laisser en jachère avec un développement incontrôlé. C'est sûr qu'il faut réguler, mais qu'est-ce qu'on va réguler ? On peut réguler des activités économiques à travers les réseaux sociaux et Internet. Qu'est-ce qu'on veut faire ? Est-ce qu'on veut mieux encadrer la liberté d'expression qui est un droit fondamental, car il faut que les gens puissent s'exprimer ? Je pense qu'il n'y a pas de nouveautés. Les réseaux sociaux ne sont rien d'autre qu'un canal qui est accessible à tout le monde. Ce qui n'était pas le cas avant. À l'époque, pour qu'on puisse s'adresser à un public large, il fallait les médias classiques, la presse. Aujourd'hui, c'est éclaté. On quitte la société des médias pour une société de l'immédiateté. Donc, comme on dit, les gens ont leur "télé cii poche". Ils sont tous accessibles. Ça vient avec une certaine responsabilité. Je pense qu'on a des outils qui nous permettent de réglementer le tout. Il ne faut pas aller dans une extrême rigidité dans la régulation, mais c'est quelque chose qu'il faut qu'on ne puisse pas laisser faire.
Maintenant, si ça renvoie un peu aux intervenants qui ont des propos extrêmes ou jugés offensants, c’est déjà pris en compte par la loi. Que cela soit par les réseaux sociaux ou la presse classique, ça va être sous le coup de la loi. Les gens doivent respecter la liberté d'expression, quelque chose à laquelle je crois fortement.
On sent aussi de plus en plus des voix discordantes du Pastef qui fustigent certaines nominations et/ou absence de nominations ? Risque-t-on de voir des membres fondateurs se révolter contre le tandem Diomaye-Sonko ?
Pourquoi les gens devraient être frustrés parce qu'ils ne sont pas nommés ? Le président de la République, de par ses fonctions, habilitations et pouvoirs, nomme qui il veut. D'abord, on nomme une personne en qui on a confiance. Ensuite, le président vient juste de démarrer ses activités. Comment est-ce que tout le monde peut être nommé tout de suite à une place déterminée ? Non ! On le laisse dérouler. Il ne doit rien à personne. Ce sont les Sénégalais qui l'ont élu. Qu'on lui laisse le temps de choisir son équipe. Il a un État, une machine lourde. Ce n'est pas un balayage qui se fait automatiquement. Même aux USA où on connaît le système d'administration, il y a un phénomène de balayage. Ça se fait selon un tempo qui est bien déterminé.
Par ailleurs, je peux comprendre que certaines personnes aient des ambitions. Je n'ai rien contre. Mais on ne peut pas s’en prendre à un président qui a beaucoup de choses à faire par ailleurs, qui doit prendre son temps pour savoir où il met les pieds, où il va. Ce sont des emplois fonctionnels et non de la fonction publique qui sont régis par un statut. Donc, il va les recruter parce qu'il a confiance en eux, parce qu'ils croient au projet et veulent travailler à sa réussite. Donc, laissons-lui le temps de faire le bon choix. Certainement, il y a des gens qui pensent qu'ils peuvent le faire, qui remplissent les critères. Encore faut-il qu'on lui laisse ce temps de courtoisie pour qu'il puisse savoir quoi faire. Il n'y a aucune pression, aucun dû. Il nomme qui il veut, quand il veut. De la même manière, il va les révoquer, habilité quand il veut, comme il veut sans aucune justification. Le président n'a de comptes à rendre à qui que ce soit à ce niveau.
Comment appréciez-vous les 100 jours de Diomaye à la tête du régime ?
Moi, je ne suis pas dans le fétichisme des chiffres. Cela ne veut rien dire. On est à l'échelle d'un mandat de cinq ans. Cent jours, c'est le quart d'une année. Même un exercice, c'est sur 12 mois. Donc, à la limite, on va dire que pour un an, on va essayer de faire un bilan de la première étape. Trois mois sur un mandat de cinq ans, c'est extrêmement prématuré. Là on commence à voir certaines têtes qui émergent parce qu'il vient de finir de mettre en place son équipe. On n'a pas le temps d'évaluer objectivement ce qu'il fait, ce qu'il n'a pas fait. C'est sûr qu'il y a des décisions qui sont attendues. Il y en a certaines qui n'ont pas une incidence financière forte, mais qui sont attendues parce que justement on sort d'un traumatisme.
Les gens ont une attente forte de changement dans la magistrature parce que les gens pensent, et à raison, parce que la justice a fait du mal, que certaines têtes devraient disparaître et que des comptes doivent être rendus par les gens de l'ancien régime, parce qu'ils ont géré un pays et ils doivent rendre compte. Les populations ont exprimé ce besoin de façon très forte à travers les résultats de l'élection.
Oui, on prend le temps, mais il faut prendre le temps de bien faire les choses sur des questions judiciaires parce qu'on ne peut pas tomber dans les travers du passé où on a orienté des poursuites à la va-vite. On ne respectait pas les procédures sur des gens et finalement on se retrouvait devant des impasses. Je pense que trois mois, honnêtement, c'est peu, très tôt pour évaluer quoi que ce soit.
Si je vous dis que tout est bon alors qu'on est dans une conjoncture qui fait que finalement, ça va orienter les choses autrement. Je pense qu'un pays c'est un gros navire et ce n'est pas lors des premiers milles marins qu'on va dire il prend la bonne direction, alors qu'on est en phase de pousser et puis il faut accompagner, leur donner un temps. Ce n'est pas raisonnable ni crédible de commencer à encenser le président ou le critiquer fortement parce que cela ne repose sur rien.
LES DÉFIS DE PAPE ALÉ NIANG
EXCLUSIF SENEPLUS - Représentation inéquitable des langues et des communautés, agenda orienté par le pouvoir, la RTS, un héritage de l'ère coloniale, peine à se défaire de ses vieux démons
La RTS, initialement ORTS, est à l’origine un avatar françafricain de l’Office Radiodiffusion Télévision Française (ORTF) comme toutes les radiotélévisions des anciennes colonies françaises d’Afrique. Elle a été conçue comme un instrument de contrôle et de domination des populations, au service des pouvoirs néocoloniaux.
Sa raison d’être, est non pas le peuple comme son slogan le proclame, mais la défense et l’illustration du pouvoir en place, et particulièrement de la personne et de l’institution du président de la République. Elle fait peu de place aux Sénégalais ordinaires et aux « nouvelles » qui les affectent et excluent carrément les citoyens ordinaires en particulier les ruraux, les femmes, les enfants et les minorités ethniques.
M. Pape Alé Niang qui vient d’en être nommé Directeur Général, par décret discrétionnaire du président de la République, pourra-t-il faire de la RTS un véritable média de service public ?
Un média dont la mission première sera d’informer véritablement les Sénégalais, dans leurs langues, d’assurer leur représentation médiatique dans leur diversité et de permettre l’expression de leurs cultures ? Un média ouvert sur l’Afrique et le monde. Informer véritablement.
Rien Tous Les Soirs, le sobriquet colle encore à la RTS
C’est que la radiotélévision nationale actuelle n’informe pas véritablement les Sénégalais. Elle fait plutôt de la propagande politique, si ce n’est de la promotion institutionnelle et de l’annonce évènementielle.
Regardez les contenus qu’elle diffuse deux fois par jour à travers ses bulletins d’information à la radio et son « journal parlé » en wolof et en français à la télévision. Il s’agit essentiellement d’une mise en son et images des activités du président de la République, du gouvernement et des autres institutions de l’Etat.
On couvre ainsi toujours longuement la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres depuis la traversée des jardins du palais présidentiel par les ministres jusqu’à leur installation autour de la table, en s’attardant sur chacun d’entre eux, sur leurs tenues vestimentaires jusque sur leurs expressions de visage.
Selon Jacques Habib Sy, c’est « le président Senghor (qui) avait inauguré ce type de couverture journalistique en voulant imprimer dans la perception collective, le mouvement d’une nation en voie de construction et d’un président de la République au service de la nation à tout moment »[1].
Quoi qu’il en soit, la valeur informationnelle d’une telle couverture est nulle, on en conviendra. Tout comme l’est celle de ces audiences du président de la République et ces cérémonies de présentation de lettres de créances.
Que dire de ces comptes rendus de séminaires et de colloques dans les décors feutrés d’hôtels de luxe ? Il y a aussi ces cérémonies de signature de conventions et de remise de dons, tribunes de promotion de première classe d’organisations internationales et d’ONG.
Quid de ces manifestations religieuses des différentes « tarikhas » musulmanes et de l’Eglise catholique couvertes longuement alors qu’on pourrait laisser leur couverture aux nombreuses radios et télévisions privées ?
Déterminer l’agenda public
Une autre information est pourtant possible : elle part de l’actualité, concerne les événements courants ou accidentels qui surviennent tous les jours et affectent les citoyens ordinaires.
Que n’a-t-on pas ouvert le JT par exemple sur cette spectaculaire érosion côtière observée récemment à Djifer, ou sur cette hécatombe d’oiseaux observée sur les rives de la Falémé, indicateur probable d’un empoisonnement des eaux par des produits chimiques rejetés par les exploitations aurifères en amont ?
Ou encore sur un de ces naufrages récurrents de pirogues de candidats à « l’émigration clandestine » ?
Une hiérarchisation adéquate de la programmation permettrait de traiter ces informations de manière à en faire, non pas des « faits divers » mais de véritables « nouvelles », dignes de l’attention des citoyens téléspectateurs et auditeurs et des pouvoirs publics.
On inscrirait ainsi dans l’agenda national de manière plus marquée des sujets tels que l’avancée de la mer, le réchauffement climatique, l’exploitation minière, la dégradation de l’environnement, l’émigration de masse des jeunes etc.
N’est-il pas de la mission des médias, notamment des médias de service public, de déterminer régulièrement l’agenda public, en mettant en avant les sujets dont la conversation des citoyens s’empare et qui sont portés ainsi à l’attention des pouvoirs publics ?
Malgré le slogan « Encore, plus proche de vous » et la création de stations régionales (RTS3 pour Tambacounda et Kedougou, RTS4 pour Ziguinchor, Sédhiou et Kolda et RTS5 pour Matam), la RTS est encore loin de « refléter le pluralisme et la diversité de notre pays […] sur les plans politique, culturel et social’’ souhaité par son nouveau directeur général.
C’est ainsi que des associations communautaires dénoncent depuis longtemps « le temps d’antenne ‘insuffisant’ réservé aux autres langues par rapport à celui accordé au wolof » et le fait qu’une « langue, en l’occurrence le wolof, est mise au-dessus des cinq autres langues nationales » et revendiquent « l’égal accès aux médias de toutes les langues de notre pays », mettant en garde même contre « un chemin qui mènera tôt ou tard à des tensions communautaires ».
En fait la « télévision nationale » devrait être le support privilégié de la promotion harmonieuse et du dialogue de toutes les langues nationales.
On pourrait s’inspirer ici de la Société Suisse de Radio et de Télévision (SSR) qui diffuse ses émissions de radio et de télévision dans les quatre régions linguistiques du pays (le français, l’italien, l’allemand et le romanche) tout en en assurant leurs transmissions dans l’ensemble du pays.
La RTS pourrait émuler cette bonne pratique suisse, en accordant l’autonomie à ses stations régionales qui disposent déjà de studios et en les dotant de capacités de production et de diffusion pour couvrir l’ensemble du pays.
Couvrir l’Afrique à partir du Sénégal
L’Afrique et les pays voisins du Sénégal, ne sont pas des sujets d’information privilégiés et ne sont couverts le plus souvent qu’à travers les télévisions françaises et occidentales.
Il est pourtant possible d’en assurer une couverture professionnelle avec des productions innovantes et à moindre coût, grâce à une organisation adéquate et en tirant profit des nombreux outils numériques disponibles, de WhatsApp aux logiciels de traduction basés sur l’IA.
Obtenir une interview d’une personnalité au Niger par un journaliste local par WhatsApp, commander une vidéo de deux minutes d’un événement à Nairobi, produire même des documentaires télé et des podcasts audio aux quatre coins du contient … La RTS pourrait ainsi devenir une radiotélévision continentale à peu de frais.
L’engagement de M. Pape Alé Niang
M. Pape s’est engagé dès l’entame de son mandat à « rétablir les liens entre la RTS et le peuple sénégalais ». Il a déjà procédé à l’ouverture de la télévision aux oppositions politiques et à la société civile dans sa diversité. Pourra-t-il adopter la ligne éditoriale que nous préconisons ici ?
Pourra-t-il obtenir le budget autrement plus important que les quelques milliards qui sont affectés présentement à la RTS pour mettre en œuvre un programme ambitieux et novateur ?
[1] Jacques Habib Sy Crise de l’audiovisuel au Sénégal, Dakar, 2003.