DES ORIGINES DE L’IDENTITÉ TRANSGRESSIVE ET DE SES ÉRUPTIONS
Sorti de son dilemme, la Cour des comptes a-t-il fait sortir le citoyen lambda du sien depuis cinq mois au moins ? Seuls les vrais patriotes, loin des jeux politiques, oseront dire : « Place aux besoins du peuple, non à la vengeance politique ! »
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Depuis le 2 avril 2024, il ne se passe rien dans les allées du pouvoir et au sommet de l’État qui devrait surprendre ou estomaquer les justiciables que nous sommes tous. Deux dates, pas plus, suffisent à nous rappeler qu’ayant fait semblant de n’avoir rien vu et entendu, nous serions plus honnêtes avec nous-mêmes en trouvant « normal » aujourd’hui ce que nous considérions comme « normal » en août 2016 et mars 2021 pour n’avoir été qu’un petit nombre à nous indigner par la parole et l’écrit.
Le 29 août 2016, le « décret portant révocation sans suspension des droits à pension d'un fonctionnaire » stipule en son article premier que « Monsieur Ousmane Sonko, Inspecteur des Impôts et des Domaines principal de 2e classe 2e échelon (…) est révoqué sans suspension des droits à pension pour manquement à l'obligation de discrétion professionnelle prévue à l'article 14 de la loi n°61-33 du 15 juin 1961 ». L’alinéa 1 dudit article est on ne peut plus claire puisqu’« indépendamment des règles instituées dans le Code pénal en matière de secret professionnel, tout fonctionnaire est lié par l’obligation de discrétion professionnelle pour tout ce qui concerne les documents, les faits et informations dont il a connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ».
À son actif et à sa décharge, le législateur fait interpréter la disposition explicite par différents codes dont le Code général des Impôts et des Domaines auquel le fonctionnaire révoqué était tenu de se conformer dans l’exercice de ses fonctions. Que dit le Code ? En son alinéa 1 l’article 601 du Code général des Impôts et Domaines fait savoir expressément que « sous réserve de l’obligation qui leur est imposée par le Code de procédure pénale, les agents des Impôts et des Domaines intervenant dans l’assiette, la liquidation, le contrôle ou le recouvrement des impôts, droits, taxes et redevances, sont tenus, dans les termes de l’article 363 du Code Pénal, de garder secrets les renseignements de quelque nature qu’ils soient, recueillis dans l’exercice de leur fonction ».
Ce n’est que « lorsqu’une plainte régulière a été portée par l’Administration contre un assujetti et qu’une information a été ouverte, [que] les agents des Impôts et Domaines sont déliés du secret professionnel, vis-à-vis du juge d’instruction qui les interroge sur les faits faisant l’objet de la plainte ». À supposer que le révoqué ne s’était pas imprégné de tout ce qui est dit plus haut, Ousmane Sonko aggrave son cas à la parution de son livre intitulé « Solutions : Pour un Sénégal nouveau » (Compte d’auteur, 2018) dans lequel (Chapitre II), il dit accueillir sa « radiation » avec « soulagement car, écrit-il, j’avais moi-même entrepris le projet de sortir de l’Administration qui, après quinze ans (…) devenait une contrainte pesante pour mes activités politiques, du fait du corset de sujétions ». Celui qui aurait dû démissionner, préféra une première opération transgressive grâce à laquelle il accéléra son ascension dans un contexte où le calme plat céda la place à la surenchère politique correspondant, en quelque sorte, à une demande d’agitation démocratique par l’opinion à quelques mois de l’élection présidentielle de février 2019.
La suite, bien connue, se passa de commentaire jusqu’à la survenue, le 2 mars 2020, du premier cas de Coronavirus au Sénégal. Le pays venait de rentrer dans le tourbillon de la pandémie de Covid-19. L'état d'urgence assorti d'un couvre-feu nocturne de 21H00 à 05H00 est instauré le 5 janvier 2021 pour les régions de Dakar et Thiès où se concentre la grande majorité des contaminations. La mesure est reconduite pour un mois le 20 janvier. Le samedi, 20 février 2021, le gouvernement du Sénégal annonce une prolongation pour un mois du couvre- feu nocturne. En clair, cela veut simplement dire qu’à compter du 20 février 2021, et ce jusqu’au 20 mars 2021, interdiction est faite aux populations des régions de Dakar et de Thiès de circuler de 21H00 à 05H00. En droit facile, le but de la mesure avait été de permettre aux Forces de défense et de sécurité (FDS) de protéger les populations de la grave crise sanitaire à laquelle faisait face le monde entier. C’est le moment choisi par Ousmane Sonko pour sortir nuitamment de chez lui, violant le couvre-feu et attestant par là même du second acte transgressif d’où découlent les déferlements de violences sans précédent de mars 2021 et de juin 2023.
À deux reprises, la violation de la loi égale pour tous dévoile l’identité transgressive d’un opposant politique encore loin du contrôle du pouvoir. Celui-ci lui tomba entre ses mains en avril 2024 puis, en guise de renfort politique, en novembre 2024 quand furent connues les tendances lourdes du scrutin législatif anticipé du 17 novembre 2024.
Pour obtenir la majorité écrasante dont il ne se sert depuis le début de la quinzième législature que pour lever l’immunité parlementaire des députés de l’opposition, Ousmane Sonko démarre prématurément sa campagne électorale par un point de presse pour informer l’opinion nationale et internationale des dérives et errements financiers dont les gouvernements de l’ancien président Macky Sall sont déclarés coupables par le Premier ministre, le même homme. Énième transgression de la loi qui fait que « la responsabilité de la Cour des Comptes est de réaliser l’audit du rapport sur la situation des finances publiques produit par le gouvernement, conformément au Code de Transparence dans la Gestion des Finances publiques et à la loi organique n°2012-23 du 27 décembre 2012 sur la Cour des Comptes ».
Mais jamais auparavant, la Cour des comptes n’a fait face au dilemme cornélien, l’obligeant à choisir entre le gouvernement en validant son rapport et le Premier ministre Ousmane Sonko dont les chiffres sur le déficit public, l’encours de la dette (principal augmenté des intérêts) et la disposition des ressources publiques en général par l’État faussaire du Sénégal ont déjà fait le tour du Sénégal, des zones UEMOA et CEDEAO, du reste de l’Afrique et du monde, rendant notre pays intérieurement, bilatéralement et multilatéralement infréquentable à la suite d’une cascade de dégradations sans précédent. Résultat des courses : le 12 février 2024, la Cour des comptes fait buzz, et pour longtemps encore, en démultipliant dont son rapport d’audit les griefs faits à notre administration faussaire par le nouveau chef même de ladite administration. Sorti de son dilemme, la Cour des comptes a-t-il fait sortir le citoyen lambda du sien depuis cinq mois au moins ? Pas du tout à l’analyse !
Le grand dilemme citoyen
Lorsque le rapport d’audit de la Cour des comptes nous est tombé entre les mains, nous avons parcouru les pages qui feront encore faux et mauvais débat jusqu’à la fin du mois de février 2025 au moins, en consultant la table des matières. Stupéfié par ce que nous avons lu, nous en faisons l’économie en cinq images dont celle de la page de garde dans un post publié sur notre page LinkedIn et intitulé : « La Cour des comptes a parlé : la messe et la prêche sont dites. » Déception au bout de 19 heures : pas plus de 1344 impressions, attestant du faible intérêt pour le post.
Constatant l’absence des signatures du président de la Chambre des Affaires budgétaires et financières de la Cour et du Greffier à la fin du rapport de la haute juridiction, nous en faisons état dans un deuxième post publié sur le même réseau professionnel LinkedIn. Explosion : plus de 18319 impressions au bout de 19 heures comme pour dire à qui veut l’entendre que dans cette affaire Ousmane Sonko, suspecté de mensonge d’État et considéré comme structurellement incompétent, ne peut en aucun cas avoir gain de cause. N’en déplaise à la très consciencieuse, la très compétente et la très respectable Cour des comptes.
Frappé de stupeur, l’enseignant, homme politique exceptionnel et ancien député Samba Diouldé Thiam écrit, dans un court article publié dans les colonnes de Le Public Quotidien, daté du 13 février 2025, que « la Cour a rendu une copie conforme. J'avais déjà exprimé les hypothèses qui attendaient cette Très Honorable Dame (TDH) prieuse et veilleuse sur l'usage des ressources publiques : contredire Sonko qui n'avait aucune qualité politique légale pour rendre public l'état de nos finances ou le [conforter] ». La sentence de notre magnifique aîné dans la vie et en politique, Samba Diouldé Thiam - cet homme bien - se passe de commentaire : « On ne vous en veut pas, simplement notre pays continue d'avoir très mal, la haine du vaincu vaut bien la peine que l'on punisse le Sénégal, en dégradant sa belle gueule d'exception sénégalaise. » Titre explicite de l’article : « La Cour des Comptes a produit un document commandité publiquement par le Premier ministre et maître du destin des sénégalais(es). »
« Maître du destin des sénégalais(es) » ! Pas autant que cela à notre grand soulagement. C’est que la croissance exponentielle (voir courbe en illustration d’article) des impressions, dans un post demandant à la Cour des comptes de faire signer son rapport d’audit en ligne sur son site par son président de chambre mandaté et son greffier, en dit long sur le ras-le-bol prématuré d’une opinion désabusée.
Des origines d’une identité transgressive aux instants du grand désaveu populaire de la transgression permanente, bien malins sont celles et ceux, mus par le seul amour du Sénégal, loin des tracas et combines politiciennes, qui sauront se faire entendre en disant simplement : « Stop, c’est le temps du Sénégal qui a faim et soif et non de la justice des vainqueurs ! »