LE LEGS DE MANDELA SOUILLÉ
Des violences xénophobes ont éclaté en Afrique du Sud depuis le 1er septembre

Des violences xénophobes ont éclaté en Afrique du Sud depuis le 1er septembre. Elles visent notamment les Nigérians qui sont accusés par les Sud Africains d’être la cause du chômage galopant dans le pays qui est, somme toute, la première économie du continent. Qui plus est, la nation arc-en-ciel est envié pour l’histoire peu commune de son héros Nelson Mandela. Mais l’héritage de celui que l’on surnommait «L’Africain du 20e siècle» qui a combattu au prix de sa vie l’apartheid n’est-il pas en train d’être souillé avec ces actes xénophobes.
«Toute ma vie, je me suis consacré à la lutte pour le peuple africain. J'ai combattu contre la domination blanche et j'ai combattu contre la domination noire. J'ai chéri l'idéal d'une société libre et démocratique dans laquelle toutes les personnes vivraient ensemble en harmonie et avec les mêmes opportunités. C'est un idéal pour lequel j'espère vivre et agir. Mais, si besoin est, c'est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir», disait le prévenu Nelson Mandela le 20 avril 1964. Cette conviction a guidé ses pas durant ses 27 années de prison. Devenu le premier Président de la Nation arc-en-ciel post apartheid, il s’est évertué à gouverner en gardant intact son idéal pour une Afrique du Sud prospère et tolérante. Ce qui a fait davantage briller son aura planétaire.
C’est pourquoi, la flambée de violences xénophobes constatée depuis quelques jours à Pretoria et Johannesburg constitue une tache noire dans l’héritage des Mandela, Winnie et autres Steve Biko. En effet, d’après le journal français «L’Observateur», la vague de violences et de pillages a débuté dimanche 1er septembre après la mort de trois personnes dans l’incendie encore inexpliqué d’un bâtiment du centre-ville de Johannesburg, la principale ville du pays. «Lundi, le centre de Johannesburg a été envahi par des centaines de personnes armées de gourdins et de pierres qui ont incendié et pillé de nombreux magasins, souvent tenus par des commerçants étrangers. Les immigrés africains, notamment nigérians, sont la cible principale de ces violences», renseigne le journal. En plus de ces violences, on a noté les déclarations incendiaires de certains leaders syndicaux qui accablent les étrangers et brisent davantage le rêve panafricain de Mandela et de Thabo Mbeki. «Le peuple sud africain a faim, mais il reste à la maison, alors que des entreprises du pays préfèrent employer des étrangers payés moins cher», accuse Sipho Zungu, représentant d’un syndicat de routiers. Dans la journée d’hier encore, deux corps carbonisés ont été retrouvés dans le Township d’Alexandra.
LA ROUTINE DE LA XENOPHOBIE
Par ailleurs, même si le Président sud africain Cyril Ramaphosa a réagi pour condamner ces violences en affirmant surtout que rien ne peut justifier qu'un Sud Africain s'en prenne à des gens d'autres pays, force est de signaler que le pays Arc-en-ciel n’est pas sa première montée de violences pour xénophobie. En 2015, sept personnes ont été tuées au cours de pillages visant des commerces tenus par des étrangers à Johannesburg et à Durban. Sous les attaques de Sud Africains, plusieurs milliers de migrants originaires de tout le continent étaient contraints d’abandonner leurs commerces et leurs habitations précaires pour trouver refuge dans des camps montés à la hâte, ou en attendant que les services de rapatriement vers leurs pays d’origine soient mis en place. Ces violences avaient surtout éclaté, selon certains observateurs, après la déclaration du roi des zoulous, la tribu de Mandela. Ce dernier avait appelé les étrangers à prendre leurs affaires et rentrer chez eux, même s’il précisera plus tard que ses propos ont été sortis de leur contexte. Pendant ce temps, les violences s’étaient propagées dans le pays. L’Afrique du Sud avait connu aussi des violences xénophobes en 2008 avec des émeutes qui ont fait plus 62 morts.
Ces émeutes sont, pour beaucoup d’observateurs, la résultante de ce que la jeune génération reproche à Mandela. Celle-ci pense surtout que «Mandela n'a pas tenu les promesses qu'il avait faites. L'ANC avait une Charte de la Liberté disant que la terre devait appartenir au peuple, ce n'est pas le cas aujourd'hui, et il y a encore beaucoup d'inégalités, de nombreux Noirs sont toujours pauvres». Les jeunes Sud africains reprochent à l’Etat son laxisme. Pour eux, le gouvernement accorde trop de faveurs aux entreprises étrangères qui n’emploient que des étrangers. Est-ce cela qui justifie cette xénophobie ?