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25 novembre 2024
Développement
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YAKHAM MBAYE FAIT SON MÉA CULPA
Le DG sortant a du Soleil reconnait avoir commis "énormément d'erreurs" et présidé à "des heures fort préjudiciables", appelant le personnel à faire bloc autour de son successeur pour un renouveau sans ombre du journal
C'était l'heure des adieux pour Yakham Mbaye au quotidien national Le Soleil, lundi 10 juin 2024. Lors de la cérémonie de passation avec son successeur Lamine Niang, le directeur général sortant a fait un mea culpa sans détour, reconnaissant avoir commis de nombreuses erreurs durant sa gestion.
"Je le reconnais, j'ai fait énormément de choses qui n'ont pas satisfait", a déclaré Mbaye devant les employés et les invités. Dans un rare élan d'humilité, l'ancien patron s'est montré introspectif : "Si j'avais une science certaine des hommes et des femmes, peut-être n'aurais-je pas commis autant d'erreurs."
Mbaye n'a pas mâché ses mots sur les trois dernières années houleuses au Soleil, parlant "d'heures fort préjudiciables" et d'une période où "on s'est donné un spectacle" sans réellement s'entendre.
Mais dans son discours d'adieu, l'accent a surtout été mis sur l'appel à l'unité pour tourner la page. "Tout cela doit être derrière nous, et tout le monde doit se réunir et se rassembler pour que les bienfaits soient supérieurs au mal", a exhorté Mbaye.
Malgré son départ, l'ancien directeur affirme rester disponible pour épauler la nouvelle équipe dirigeante. "Quand vous me solliciterez pour avis ou contribution, Le Soleil reste mon soleil pour toujours", a-t-il promis.
Un nouveau chapitre s'ouvre désormais au Soleil sous la houlette de Lamine Niang, avec l'espoir que l'unité prônée par son prédécesseur permettra au vénérable quotidien de tourner définitivement la page des années de turbulences.
MOSCOU ACCUSÉ D'ENVOYER DE JEUNES AFRICAINS COMBATTRE EN UKRAINE
Moscou menace de plus en plus de ne pas renouveler les visas des étudiants et jeunes travailleurs s'ils refusent d'intégrer l'armée, ont indiqué à Bloomberg des sources proches du dossier, sous couvert d'anonymat
(SenePlus) - Le Kremlin a forcé des milliers de migrants et d'étudiants étrangers à combattre aux côtés des troupes russes dans sa guerre contre l'Ukraine, ajoutant de la main-d'œuvre supplémentaire pour son offensive dans la région de Kharkiv, selon des évaluations de responsables européens, rapporte Bloomberg.
Utilisant des tactiques d'abord déployées par le groupe mercenaire Wagner, les responsables russes menacent de plus en plus fréquemment de ne pas prolonger les visas des étudiants africains et des jeunes travailleurs à moins qu'ils n'acceptent de rejoindre l'armée, selon des sources proches du dossier citées par Bloomberg.
Moscou recrute également des détenus dans ses prisons, tandis que certains Africains en Russie avec des visas de travail ont été détenus et forcés de choisir entre l'expulsion ou le combat, a déclaré un responsable européen à Bloomberg. Certaines de ces personnes ont pu soudoyer des fonctionnaires pour rester dans le pays et éviter le service militaire.
"La pratique de la Russie consistant à envoyer des migrants et des étudiants au combat sous la contrainte remonte à plus tôt dans la guerre", a ajouté un autre responsable européen cité par Bloomberg. Ces troupes subissent des taux de casualties particulièrement élevés car elles sont de plus en plus déployées dans des manœuvres offensives risquées pour protéger les unités mieux entraînées.
Selon des rapports citant les renseignements ukrainiens, la Russie a lancé une campagne de recrutement mondiale pour enrôler des mercenaires étrangers dans au moins 21 pays, dont plusieurs nations africaines. Des campagnes de recrutement de l'armée offrent des primes à la signature et des salaires lucratifs pour ceux qui rejoindront en tant que soldats contractuels. Les recruteurs ont également ciblé les migrants et les étudiants qui cherchaient auparavant un emploi en Russie, et dans certains cas ont attiré d'autres personnes avec des promesses de travail lucratif avant de les forcer à s'entraîner et à être déployés sur le front.
"La capacité de la Russie à mobiliser un bien plus grand nombre de troupes pourrait devenir un facteur important dans la guerre alors que le président Vladimir Poutine cherche à capitaliser sur un changement de dynamique cette année", indique Bloomberg.
Pour l'instant, cependant, ses forces n'avancent que lentement dans le nord-est de l'Ukraine et subissent de lourdes pertes, malgré une pénurie de troupes et de munitions du côté ukrainien.
Bloomberg cite le ministère britannique de la Défense selon lequel l'armée russe a perdu plus de 1 200 personnes par jour en mai, son taux de pertes le plus élevé de la guerre. Depuis le début de l'invasion, la Russie a vu quelque 500 000 personnels tués ou blessés, selon les estimations du Royaume-Uni, que Bloomberg n'a pas pu vérifier de manière indépendante.
Dans une rencontre avec les médias étrangers à Saint-Pétersbourg mercredi, Poutine a semblé sous-entendre qu'environ 10 000 soldats russes sont tués ou blessés chaque mois et que les pertes ukrainiennes sont cinq fois plus élevées.
Bien que le Kremlin n'ait pas réussi à obtenir une percée sur le champ de bataille, il a intensifié une campagne de bombardements contre Kharkiv, la deuxième plus grande ville d'Ukraine. Les responsables occidentaux affirment que ces attaques semblent viser à rendre la ville invivable.
Dans sa quête pour maintenir le soutien public en Russie, Poutine a jusqu'à présent résisté à une mobilisation à grande échelle. La Russie affirme avoir pu combler une part importante de ses pertes - en termes de nombres si ce n'est de la qualité des troupes - grâce à une campagne de recrutement volontaire qui a attiré des dizaines de milliers de personnes.
"Il y a actuellement entre 35 000 et 37 000 étudiants africains en Russie, selon Yevgeny Primakov, responsable de Rossotrudnichestvo, une organisation consacrée à la diffusion des connaissances sur la Russie à l'étranger. 'Chaque année, nous inscrivons environ 6 500 étudiants d'Afrique pour étudier gratuitement en Russie', a-t-il déclaré jeudi au Forum économique international de Saint-Pétersbourg", conclut l'article de Bloomberg.
par Mamadou Sène
LES ENTREPRISES AFRICAINES ONT AUSSI UNE HISTOIRE
L’histoire de l’entreprise est objet de recherches, d’enseignements ou d’ouvrages accessibles dans les pays développés. Il m’apparaît souhaitable qu’elle gagne encore plus en importance dans les universités et écoles de gestion africaines
Mon invite s’adresse d’abord et avant tout aux historiens, enseignants et chercheurs, qui ont pour vocation de nous aider à analyser les traces laissées par le passé et à comprendre les évolutions des sociétés humaines dans le temps. Parmi ces évolutions, celles ayant trait à l’économie, c’est-à-dire à la création, la conservation et la circulation des biens et des services, font partie des évolutions majeures depuis que l’homo sapiens est apparu sur Terre, il y a 300 000 ans. Pendant l’ère moderne que nous vivons, les entreprises font partie des acteurs majeurs de nos sociétés ; comme les armées et peut-être plus que celles-ci de nos jours, elles font la grandeur des nations, mais aussi leur décadence. Si nous étions tentés de l’ignorer, la Chine, champion des champions de l’économie, nous le rappelle tous les jours.
Mon invite s’adresse ensuite aux enseignants et chercheurs en économie et en gestion qui ont vocation à rendre intelligibles les politiques et stratégies industrielles, commerciales et financières des États et de leurs entreprises. Enfin, elle s’adresse aux dirigeants des universités et des grandes écoles qui ont la charge de déterminer et organiser les enseignements et les recherches. Puissent les propriétaires, les dirigeants et les personnels des entreprises apporter leurs concours, sous toutes les formes possibles, à nos enseignants et chercheurs.
L’histoire économique mérite d’être connue. Elle est différente de l’histoire de la science économique, celle-ci étudiant l’évolution dans le temps des savoirs en économie, celle-là analysant l’évolution dans le temps des faits et phénomènes économiques ; dans les deux cas à l’aide des méthodes des sciences historiques. Les historiens africains mènent sans doute des recherches sur l’histoire des faits économiques dans leurs universités et pays respectifs ; peut-être même sur l’histoire des entreprises. Mais, le produit de ces études et recherches ne ruisselle pas suffisamment jusqu’aux praticiens de l’économie qui sont dans les entreprises et les administrations, encore moins jusqu’au grand public. Nos chercheurs devraient tourner un peu plus leurs regards vers ceux qui, en dehors des amphithéâtres et des laboratoires, ont soif de savoir. Ils devraient mettre un peu plus à leur disposition des ouvrages tirés de leurs travaux scientifiques. Cela se fait dans les pays développés.
Pourquoi les connaissances de l’histoire économique doivent-elles ruisseler dans la société ?
Nous devons tous en savoir de l’économie parce que tout simplement elle étudie, explique et détermine nos moyens matériels d’existence, qui sont le préalable à tout. Les anciens ne disait pas autre chose lorsqu’ils disaient "Primum vivere, deinde philosophare[1] ". Mieux, l’économie nous permet de fructifier ces moyens d’existence, d’en distribuer avec équité aux ayants-droit, d’en vivre et d’en transmettre aux générations suivantes, si nous les gérons efficacement et prudemment. C’est pourquoi l’économiste Jacques Mistral dit dans une formule aussi concise que juste que l’économie est la science de la richesse[2].
Nous devons savoir comment et quand cette richesse a été créée, qui l’a créée et comment elle a évolué au fil des années et des siècles. C’est l’histoire économique et celle des entreprises qui nous l’enseignent. De surcroit, la connaissance de l’histoire des faits et phénomènes économiques et de celle des organisations est essentielle pour la réflexion et la prise de décision des autorités et hauts-fonctionnaires en charge de questions économiques ou celles des cadres d’entreprises publiques ou privées. La connaissance des bonnes et mauvaises politiques d’hier éclaire la réflexion, l’action, les décisions et les choix d’aujourd’hui et de demain. Les expériences et évènements d’hier peuvent se révéler d’une grande pertinence pour les analyses d’aujourd’hui, tant pour le chercheur que pour l’homme d’action ; la connaissance du passé, ses difficultés et ses échecs, mais aussi ses succès immunisent le chercheur comme le décideur contre l’arrogance, la superbe et la facilité ; elle fait prendre conscience de l’importance du contexte et des circonstances. Cette connaissance du passé en économie est magnifiée par Stanley Fischer, ancien professeur au Massachusetts Institute of Technology (MIT), ancien économiste en chef de la Banque mondiale et ancien vice-président du conseil de la Réserve Fédérale des États-Unis, lorsqu’il déclare : "je pense que j'ai autant appris en étudiant l’histoire des banques centrales qu’en étudiant les théories de politique monétaire et je conseille à tous ceux qui veulent être banquiers centraux de se plonger dans les livres d'histoire[3]". Avant lui, l’immense Schumpeter (1883-1950), économiste au savoir encyclopédique, un des plus brillants du XXe siècle, nous a enseigné que la science économique se caractérise par la maîtrise, dans le domaine économique, de l'histoire, de la statistique et de la théorie. Il a écrit : "Il serait illusoire d'espérer que l'on comprendra quoi que ce soit aux phénomènes économiques [...] sans maîtriser suffisamment les données historiques. Il est de fait que les erreurs fondamentales qu'on commet aujourd'hui en analyse économique sont plus souvent dues à un manque d'expérience historique qu'à toute autre lacune dans la formation des économistes[4]. " Toutefois, la connaissance du passé ne veut pas dire sa reconduction aveugle, mais elle induit plutôt la capacité à prendre conscience de l’importance du contexte, tout en ayant à l’esprit que les situations, même ressemblantes, ne sont jamais identiques. L’histoire regorge d'exemples d'institutions mises en place pour résoudre les problèmes d'une époque, mais qui se sont révélées inefficaces plus tard pour d’autres problèmes apparemment semblables.
Pourquoi faut-il étudier l’histoire des entreprises, l’enseigner et la faire connaître ?
Il faut étudier l’histoire des entreprises, parce que, si l’économie est la science de la richesse, l’entreprise réunit des hommes et des femmes, qui mêlant leurs ambitions, leurs intelligences, leurs talents et leur ardeur au travail, créent cette richesse, en procurant à leurs clients les biens et services qui répondent à leurs besoins. De la même manière que l’histoire militaire met en lumière les stratégies des armées, victorieuses ou défaites, le caractère et l’intelligence des chefs militaires et des soldats ou leurs erreurs de jugement, l’histoire des secteurs industriels et des entreprises étudie les stratégies des entreprises, leurs innovations technologiques, managériales, comptables, financières et commerciales, les talents de leurs dirigeants et personnel, les synergies avec les autres systèmes, tel le système politique. Dans les pays développés, particulièrement aux États-Unis, cette discipline, l’histoire de l’entreprise, la business history, joue depuis plusieurs décennies un rôle central dans l’enseignement et la recherche en management dans les universités et business schools.
L’histoire de l’entreprise, en tant discipline universitaire, est véritablement née à la Harvard Business School en 1927 avec la mise en place de la première chaire de business history aux États-Unis, deux ans après de la fondation de la Business Historical Society. Son enseignement à Harvard s’adressait au début à de futurs cadres et dirigeants d’entreprises et portait sur l’étude des pratiques managériales et de leurs succès et échecs à travers l’histoire. Il mettait un accent particulier sur la figure de l’entrepreneur, sans doute un effet de l’influence de Schumpeter qui a commencé à donner des cours à Harvard University à partir de 1927 et s’y est installé définitivement en 1932 et y est resté jusqu'à sa mort en 1950.
Après 1960, Alfred D. Chandler Jr. (1918-2007), professeur au MIT (1950-1963), puis à Johns Hopkins University de (1963-1971) et enfin à la Harvard Business School (1971-2007), s’est imposé comme l’universitaire le plus influent parmi les spécialistes de la business history.
Qu’est-ce que pourraient être les sujets de recherche ou thèmes d’ouvrage pour le Sénégal ?
L’histoire de l’entreprise est objet de recherches, d’enseignements ou d’ouvrages accessibles dans les pays développés. Il m’apparaît souhaitable qu’elle gagne encore plus en importance dans les universités et écoles de gestion africaines. Les sujets ne manquent pas. Un sujet majeur et générique me vient à l’esprit : que dans chaque pays les enseignants et chercheurs habilités écrivent l’histoire économique de leur pays de l’indépendance à 2025 ; qu’eux ou d’autres historiens, professionnels ou amateurs, écrivent les histoires des secteurs industriels et des entreprises sur la même période, celles des faits et celles des hommes et des femmes qui en sont les auteurs ! Au Sénégal, comme dans les autres pays, les sujets ne manquent pas. Je m’autorise à en suggérer quelques-uns :
L’histoire des télécommunications au Sénégal de 1960 à nos jours mérite d’être contée, de la création de France Câbles et Radio (FCR) en 1959, à celle de Télésénégal en 1968 et à celle de Sonatel en 1985, avec la fusion de Télésénégal en charge des communications internationales et de la branche télécommunications de l'Office des Postes et Télécommunications.
L’histoire des chemins de fer du Sénégal doit aussi faire l’objet de plus d’études ; on devrait rappeler à tous cette histoire, de la construction par le pouvoir colonial de la ligne de chemin de fer Dakar/Saint – Louis appelée (DSL) en 1885, à l’achèvement de la ligne Dakar-Bamako (le Dakar-Niger) en 1923, à la fermeture de la ligne Dakar-Saint Louis en 1995 et celle de Dakar-Bamako en 2018 par les autorités sénégalaises et maliennes, privant les deux pays d’une infrastructure essentielle à leur développement. La fermeture de la ligne ferroviaire Dakar-Bamako est un des symboles les plus douloureux de nos échecs postcoloniaux et de notre incapacité à entretenir durablement un acquis.
L’histoire du secteur phosphatier sénégalais aussi, des années 40 à aujourd’hui, vaut la peine d’être sue, particulièrement celle des trois sociétés qui ont marqué le secteur dès les années 60 ou 70 : la Société Sénégalaise des Phosphates de Thiès (SSPT) fondée en 1948 ; La Compagnie Sénégalaise des Phosphates de Taïba (CSPT) créée en 1957 ; la société des Industries Chimiques du Sénégal (ICS) créée en 1976 et entrée en production en 1984, en vue de la transformation des phosphates de Taïba ; l’absorption de la CSPT par les ICS en 1996 est considérée par beaucoup de connaisseurs comme un grand moment de politique industrielle au Sénégal ; elle vaut la peine d’être étudiée et expliquée.
L’histoire de la politique agricole sénégalaise et des organismes d’appui à l’agriculture depuis 1960 est à écrire, à enseigner et à faire connaître, notamment celle des organismes comme l'Office de Commercialisation Agricole (OCA) créé en 1960 et dont les attributions ont été réparties par la suite entre l’Office National de Coopération et d’Assistance pour le Développement (ONCAD) créée en 1966 et l'Office de Commercialisation Agricole du Sénégal (OCAS) institué en 1967 ; l’écriture de cette histoire du secteur agricole ne saurait se faire sans celle de la Société Nationale de Commercialisation des Oléagineux du Sénégal (SONACOS) créée en 1975, celle de sa filiale la SONAGRAINES créée en 1982 et dissoute en 2001 et celle l'Institut Sénégalais de Recherche Agricole (ISRA) créé en 1974 et héritier des anciens instituts français qui intervenaient au Sénégal. La connaissance de l’histoire de la politique agricole sénégalaise des années 60 à nos jours – notamment ses échecs – serait riche d’enseignements pour ceux qui veulent écrire une nouvelle page – cette fois-ci réussie – de l’agriculture du pays.
L’histoire de la monnaie, de la finance et de la banque au Sénégal et en Afrique a déjà fait l’objet de plusieurs ouvrages. Me viennent à l’esprit les suivants : De la vie coloniale au défi international: Banque du Sénégal, BAO, BIAO ; 130 ans de banque en Afrique[5] de Jacques Alibert, ancien Directeur de la BIAO ; La Saga Bank of Africa[6] de Paul Derreumaux, fondateur et président du groupe bancaire Bank of Africa de 1982 à 2010 ; Des francs CFA et des banques : de la Banque du Sénégal à la BIAO-Sénégal[7] de Mohamadou Diop, ancien de la Banque Mondiale et ancien Directeur Général de la BIAO-Sénégal (actuelle CBAO) ; Histoire de l'Union Monétaire Ouest-Africaine - Tomes 1 à 3[8] ouvrage écrit par un collectif d’auteurs à la demande de la BCEAO.
Mérite aussi d’être racontée l’histoire des banques qui étaient contrôlées par l’État, telles la Banque Nationale de Développement du Sénégal (BNDS) et l’ Union Sénégalaise de Banque (USB), qui ont toutes disparu dans les années 80 du fait d’une distribution irresponsable et laxiste des crédits ; celles des banques avec des capitaux privés sénégalais telles la Banque Commerciale du Sénégal (BCS) et Assurbank qui sont mortes à peine nées dans les années 80 ; celles des banques avec des capitaux privés ouest-africains, telles Bank of Africa, Ecobank, Coris Bank, qui ont su en revanche grandir et s’imposer dans un marché concurrentiel ; celle de la BICIS, de l’ouverture à Dakar de l’agence de son ancêtre, la BNCI, en 1939 à sa vente au groupe SUNU en 2023, mettant fin à 84 ans de présence du groupe bancaire français Bnpparibas au Sénégal ; celle des activités boursières au Sénégal et notamment celle de CGF Bourse, première Société de Gestion et d’Intermédiation (SGI) agréée au Sénégal en 1998, d’autant qu’elle a amorcé en 2023 une nouvelle étape de son développement.
L’histoire des entreprises de presse écrite et audiovisuelle vaut la peine d’être étudiée, enseignée et diffusée ; celle la presse écrite, de la création de Paris-Dakar en 1933, à celle de Dakar-Matin en 1961, du Soleil en 1970, de Sud-Hebdo en 1982, de Wal Fadjri en 1984 etc. ; celle de la radio et de la télévision avec la création de Radio Dakar en 1950, de l'Office de Radiodiffusion Télévision du Sénégal (ORTS) en 1973, de la Radiodiffusion Télévision du Sénégal (RTS )en 1992, de Sud FM la première radio privée en 1994, et de 2STV, la première chaine de télévision privée en 2003.
Il convient de rappeler que l’histoire de la presse écrite a fait l’objet d’une thèse de doctorat[9] et d’un ouvrage[10], tous les deux du journaliste Mamadou Koumé. Il a ouvert la voie.
Bien sûr, on pourrait à l’envi parler de mille autres thèmes. Ceci n’est qu’un petit aperçu du vaste champ en friche qu’est en Afrique et particulièrement au Sénégal l’histoire de l’entreprise, même s’il y a trente-cinq ans le Professeur Ibrahima Thioub[11] nous a gratifié d’une thèse sur les entreprises sénégalaises de 1930 à 1973, avant d’être le grand historien connu dans le monde entier pour ses travaux sur l’esclavage et la traite négrière.
Alors, historiens – professionnels ou amateurs –, économistes, essayistes, "que cent projets de recherche s’épanouissent ! que cent ouvrages rivalisent, un peu partout en Afrique ![12] "
Mamadou Sène est un ancien dirigeant de banques, auteur de "La banque expliquée à tous – Focus sur l’Afrique ", RB Edition.
[4] Schumpeter, Joseph A, Histoire de l'analyse économique t1, Gallimard, coll. TEL Gallimard, Publié le 27/07/2007
[5] Jacques Alibert, De la vie coloniale au défi international: Banque du Sénégal, BAO, BIAO ; 130 ans de banque en Afrique, chotard & associés éditeurs, 1984
[6] Paul Derreumaux, La Saga Bank of Africa, Gingko Éditeur, 2022
[7] Mohamadou Diop, Des francs CFA et des banques : de la Banque du Sénégal à la BIAO-Sénégal, L’Harmattan, 2018
[8] Collectif d’auteurs, Histoire de l'union monétaire ouest africaine - Tomes 1 à 3, Éditions Georges Israël, 2000
[9] Mamadou Koumé, L' Evolution de la presse quotidienne au Sénégal : "Paris-Dakar" (1937-1961) : "Dakar-Matin" (1961-1970) Mamadou Koume, Thèse soutenue à Paris II en 1991
[10] Mamadou Koumé, Naissance de la presse quotidienne au sénégal : L’épopée de Paris-Dakar et de Dakar-Matin (1937-1970), L’Harmattan Sénégal, 2023
[11] Ibrahima Thioub, Entreprises, entrepreneurs et État dans une économie dépendante : domination étrangère et marginalisation des autochtones (Dakar-Sénégal), 1930-1973, Thèse soutenu à l’Université Paris VII en 1989
[12] Je paraphrase la fameuse formule de Mao Tsé Toung de mai 1956 pour lancer la campagne de libre critique appelée La campagne des cent fleurs : « Que cent fleurs s'épanouissent, que cent écoles rivalisent ! »
par Hamidou Thiaw
DÉCEPTION OU TRAHISON ?
Nous avons à la tête du pays des aventuriers. Un Premier ministre qui fait meeting sous forme conférence. Nous sommes distraits par des paroles vides et des accusations infondées sur la partialité de la justice et le manque de professionnalisme des médias
Loin sont les temps où je soutenais ce régime. Le profond désir de changement dans la gestion de notre pays, en proie à une pauvreté chronique, m'a poussé à soutenir toutes les personnes ou entités partageant cette même aspiration. Hélas, il est impossible de faire du neuf avec du vieux, et je m'en suis rendu compte à temps. Ce gouvernement est dirigé par des individus issus du secteur public, avec très peu d'expérience de la réalité du secteur privé ou de l'informel, où évoluent plus de 95 % de la population.
Ma première déception a été l'absence d'un programme ou d'une politique générale. Nous avons à la tête de notre pays des aventuriers, alors qu'il a plus que jamais besoin d'une vision claire pour l'avenir de notre jeunesse. Ces jeunes, dont certains ont perdu leur vie pour une alternance, sont malheureusement manipulés par des personnes issus pour la plupart du système se déclarant anti-système. Oui, des loups déguisés en agneaux surveillent le troupeau. Pauvre jeunesse, loin sont les époques des Thomas Sankara ou Nelson Mandela.
Pour couronner le tout, nous avons un Premier ministre qui fait meeting sous forme conférence. En l'absence de solutions, nous sommes distraits par des paroles vides et des accusations infondées sur la partialité de la justice et le manque de professionnalisme de la presse. Quelle contradiction de demander l'impartialité de la justice tout en cherchant à intimider les journalistes ! Quelle contradiction de promettre le changement dès les premiers jours pour ensuite nous dire que cela ne sera peut-être possible qu'après des années ! Quelle contradiction d'interdire des accusations infondées tout en en formulant contre la justice !
Nous aurions souhaité voir des preuves de la corruption de ces juges avant que de telles accusations ne soient portées. Les paroles ne suffisent plus : vous avez à votre disposition les moyens et les ressources de l'État. Nous exigeons des actions, de l'humilité et de la sobriété.
Nous sommes prêts à vous accompagner et à vous financer à travers nos impôts, mais nous n'accepterons pas que ces fonds soient utilisés pour des campagnes déguisées, des tournées sans apport concret pour le pays, des séjours dans des hôtels de luxe, ou encore des voitures de prestige. Ne vous méprenez pas : nous vous avons élus et nous pouvons vous démettre de vos fonctions lors des prochaines élections, afin de choisir de véritables patriotes comme moi, qui ont déjà beaucoup fait pour ce pays, notamment en matière de création d'emplois, de financement et de formation, avant même de se lancer en politique.
LE SENEGAL TRAVAILLERA SANS RELACHE A LA REUNIFICATION DE LA CEDEAO
Le Sénégal va travailler “sans relâche” pour la réunification des pays membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de ouest (CEDEAO), en accordant “la priorité à l’instauration d’une paix durable” dans cet espace communautaire
Le Sénégal va travailler “sans relâche” pour la réunification des pays membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de ouest (CEDEAO), en accordant “la priorité à l’instauration d’une paix durable” dans cet espace communautaire, a déclaré, mardi, à Dakar, le ministre des Forces armées, général Birame Diop.
“Le Sénégal travaillera sans relâche pour la réunification de la CEDEAO tout en accordant la priorité à l’instauration d’une paix durable dans la sous-région qui est la condition essentielle pour parachever l’intégration régionale”, a-t-il dit.
Le général Birame Diop présidait, au nom de son collègue de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères, la cérémonie d’ouverture de la célébration du 49 ème anniversaire de la CEDEAO, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest.
“La CEDEAO à l’aube de son cinquantenaire” est le thème de cette commémoration, qui constitue une occasion de réfléchir sur les défis sécuritaires et les perspectives de la CEDEAO.
Selon le ministre des Forces armées, “l’option fondamentale du Sénégal pour l’intégration continentale est fortement réaffirmée et renforcée dans la nouvelle politique extérieure définie par Bassirou Diomaye Diakhar Faye, président de la République”.
Il a rappelé que le changement de dénomination du ministère des Affaires étrangères, ainsi que les tournées effectuées dans la sous-région par le nouveau président sénégalais, illustrent la volonté du Sénégal d’arriver à une réunification des pays membres de la CEDEAO.
Le général Diop considère que “la CEDEAO constitue pour notre pays le premier cercle naturel de la construction de [l’unité africaine]”.
Depuis sa création, dit-il, la CEDEAO a réalisé “d’énormes avancées” en opérant “des réformes importantes” dans plusieurs domaines, notamment dans la prévention des conflits.
Toutefois, face à la recrudescence des tensions dans l’espace oust africain, “il faut que la CEDEAO se donne les moyens de pouvoir s’adapter à cette évolution en permanence pour pouvoir faire face aux défis de sécurité auxquels la communauté est confrontée”, a fait valoir le ministre des Forces Armées.
Alhadji Brima Koroma, ambassadeur de Sierra Leone au Sénégal, a évoqué la nécessité de renforcer l’intégration économique au sein de la CEDEAO, invitant les Etats membres à travailler en synergie pour atteindre les objectifs fixés.
M. Koroma, doyen des ambassadeurs de la CEDEAO à Dakar, a exhorté les pays membres à “donner du crédit à l’organisation qui a fait d’énormes efforts”, notamment en termes de libre-circulation des personnes et des biens, le marché commun.
Le diplomate sierra-léonais a relevé, à son tour, les “nombreux défis” notamment sécuritaires auxquels les citoyens de la CEDEAO se trouvent confrontés.
Le directeur général du Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (GIABA), Edwin W. Harris Jr, a également évoqué les “défis” relatifs à l’insécurité alimentaire, l’insécurité et le chômage des jeunes.
Il a assuré que l’organisation communautaire travaille sur toutes ces questions afin d’apporter des solutions idoines pour le bien-être des populations.
Edwin W. Harris Jr a invité le Mali, le Niger et le Burkina Faso à réintégrer la CEDEAO “pour combattre ensemble l’insécurité, l’extrémisme qui secouent la sous-région”.
Le secrétaire général du ministère de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères du Sénégal, Khare Diouf, prenait part à cette rencontre, en même temps que la directrice du Centre de la CEDEAO pour le développement du Genre (CCDG-CEDEAO), Sandra Oulate Fattoh et plusieurs diplomates accrédités à Dakar.
PAR Pape Samba Kane
BOUBACAR BORIS DIOP : QUAND IL GRIFFE, QUAND IL CARESSE
À l'occasion de son 70e anniversaire, portrait intimiste et élogieux du grand homme de lettres, loin des clichés. Il dévoile les traits attachants d'un être rare, marqué par la générosité et le goût de la découverte des talents
Samedi dernier, 9 juin, à la Maison Binaf, à Sacré cœur, s'est déroulée une cérémonie, à l'initiative de quelques amis de l'auteur de "Murambi - Le livre des ossements", dont Toni Morison à dit : "Ce roman est un miracle". Elle oscillait entre une journée d'étude sur le fameux roman, (Neustadt International for litterature), un hommage à Boubacar Boris Diop, et la présentation-dédicace d'un ouvrage collectif, "Cercle autour de Murambi" (édition Harmattan-Sénégal), signé par de prestigieux noms d'intellectuels, universitaires et/ou écrivains africains. Cérémonie à l'initiative du Comité pour le Renouveau africain (Cora), avec à la baguette pour son organisation Koulsy Lamko et Ndongo Samba Sylla.
Caché parmi la petite foule de passionnés, j'avais un peu renoncé à prendre la parole, parce que le texte que j'avais exhumé d'un vieux projet, un portrait le plus humain possible de Boris, pour le proposer à l'assistance, sortait du format des interventions. SenePlus m'offre l'occasion de me rattraper.
Bon, bon, bon ! Pour commencer, on va dire : « Joyeux anniversaire Grand Boris », sans souci pour la banalité d’une introduction trop parfaitement usinée pour être honnête. Parce qu’il y aurait plus à craindre ici ; et ce serait d’avouer que j’ignorais la date de naissance de Boris, jusqu’à ce que Mame Less Camara [notre très regretté ami ] m’appelle – deux jours avant la date de livraison de ce papier - pour me parler de cette initiative destinée à célébrer, en le tenant à l’écart pour lui en faire la surprise, le soixante-dixième anniversaire de notre ami commun. Autre aveu, qui expliquerait en premier la banalité de cette introduction convenue, c’est que je n’avais aucune envie d’écrire ce papier. Peut-être doutais-je tout simplement de le pouvoir, d’en avoir les moyens… je vais dire moraux. Parce que j’ai une grande admiration pour Boris - je laisse de côté ce qui est entendu ici, notre amitié, qui justifie qu’on m’ait offert le privilège de mêler ma voix à ce concert de voix prestigieuses, pour témoigner affection et amitié à ce singulier personnage … je vais y venir.
L’admiration a au moins ceci de commun avec l’amour qu’elle a du mal à s’exprimer convenablement ; facilement elle bafouille, facilement elle s’égare, grandiloquente, emphatique, ou confuse. Ma grande crainte est donc née de cela. Cette conscience claire que j’ai de mon admiration pour Boris, a fait que j’ai douté de pouvoir porter quelque témoignage sur lui, le célébrer, avec suffisamment de grandeur, et sans aucune vanité. Ajoutons à cela que l’on parle d’un homme dont je connais l’aversion pour les complimenteurs, et la méfiance devant les éloges circonstanciés, conventionnels. En plus, pour qui connaît la sanction appliquée par Boris à ce type d’écart – le vieil ours qui se réveille en lui en ces circonstances sait alors donner un coup de griffe agacé – l’exercice devient encore plus délicat. L’ironie ravageuse dont il fait alors montre, pour ramener l’encenseur à la raison, fait des dégâts tout à fait équivalents à ceux de la griffure invoquée.
Je le vois d’ici rire, de ce petit rire mi-amusé, mi-dubitatif, curieux aussi - très différent de son grand éclat de rire, rare mais dont il n’est pas avare du tout pour qui partage son intimité et découvre, peu à peu, son humaine condition dépouillée du poids de sa célébrité, de son autorité intellectuelle, de son talent d’écrivain… C’est quand, hôte d’une délicatesse sans pareille, il veille sur votre séjour chez lui, vous fait à manger, vous sert un café, ou le thé, et vous éconduit gentiment de la cuisine, quand vous croyez devoir donner - « quand-même », vous dites-vous – un coup de main, ne serait-ce que pour débarrasser la table. Auparavant, réveillé aux aubes, il a marché en chaussettes dans les couloirs pour ménager votre sommeil. La veille, il était venu voir si votre moustiquaire était bien en place, avant de s’assurer que dans la salle de bain, il y avait un savon et tout ce dont un hôte pouvait avoir besoin pour son confort.
Je sais, je fais rêver quelques admirateurs et surtout les nombreuses groupies d’ici et d’ailleurs qui n’ont de plaisir, néanmoins si grand et précieux, que de lire ses écrits, ou, parfois, lors de cours, colloques et conférences, d’admirer de plus près celui qui, pour eux, restera un astre inaccessible … ou peut-être sont-ils sceptiques, et doutent-ils de ce que je raconte. Ceux, et surtout celles-là doivent, à me lire, se poser des questions aussi terribles que celle du poète : « Qui pourrait concevoir une biographie du soleil ? ». Je ne suis en train que d’esquisser un portrait, le plus humain possible, de quelqu’un avec qui j’ai le privilège d’avoir travaillé autour de journaux comme « Démocraties », « Le Matin », et dont j’ai le bonheur de compter parmi les amis, depuis plus de 2O ans. Cependant, face à cette épreuve de devoir écrire sur lui, qui m’oblige à l’observer d’une distance impossible à évaluer, je crains d’être tantôt Icare, tantôt gnome souterrain - trop près, mais pour brûler ; ou exilé sous terre, pour être aveuglé au moindre rayon.
Heureusement, le poète, Baudelaire, pour ne pas le nommer, répond lui-même à sa terrible question : « C’est une histoire qui, depuis que l’astre a donné signe de vie, est pleine de monotonie, de lumière et de grandeur ». La biographie du soleil ressemblerait donc à celle de n’importe quel homme, de n’importe quel grand homme, précisément ?
Revenons, alors, à l’heureux hôte reçu par Boris. Avant dîner, il lui avait servi un jus de gingembre ou d’hibiscus, lui avait tenu un discours enflammé sur les vertus de l’huile d’olive, lors de la mi-temps d’un match du Barça retransmis à la télé que Boris ne raterait pour rien au monde ; même sa sacro-sainte sieste y passerait. C’est que l’enseignant qu’il est, le journaliste et écrivain, auteur des inoubliables Tambours de la mémoire, Le Temps de Tamango, Le Cavalier et son ombre, et d’autres romans et essais, ainsi que des nouvelles et pièces de théâtre, reste ce gamin de la Médina, bon footballeur lui-même et, surtout, est un supporter, inconditionnel et passionné, de l’équipe catalane. Un véritable aficionado du foot, transporté de ferveur pour Lionel Messi, et qui, quand la rivalité Réal de Madrid/ Barcelone, comme souvent, atteint ses sommets, n’hésite pas à clamer : « Je déteste Ronaldo ».
Comme mon fils, Ousmane qui, a 14 ans, quand il me sortait ça, se voyait enjoint, en pleine retransmission du derby, de quitter le salon ; parce que, moi, je suis de l’autre camp, celui du Réal de Madrid de CR7. Et pendant que j’y pense, Boris et moi, qui parfois avons passé des nuits entières à ne pas être d’accord sur tel ou tel chose, politique ou autre, forcément dans la plus grande courtoisie, n’avons jamais regardé ensemble un match Barça contre Réal. Bien sûr, pour ma part, sans y penser, et je suis sûr que lui sera surpris « d’apprendre » ça, ici - parce que nous en avons regardé bien d’autres, des matches de foot -, c’est dire… Et je me demande si, l’un ou l’autre, tous les deux peut-être, inconsciemment, ne nous doutions pas qu’assumer quelque contradiction politique ou philosophique, nous serait plus endurable qu’un tête-à-tête, 90 minutes durant, entre supporters excités, même respectueux l’un de l’autre, des deux équipes espagnoles monstrueusement rivales.
Voici donc Boubacar Boris Diop loin de l’intellectuel à la discrétion distinguée, qui, lors des rencontres autours de livres ou d’idées à débattre où il arrive sobrement habillé d’un bogolan, d’une chemise en wax aux couleurs discrètes, ou plus rarement d’un veston sombre, se perd, tant que cela lui est possible, dans la foule assise face aux conférenciers et débatteurs. Compte-t-il parmi ces derniers, il a l’art de se faire oublier – ses interventions sont courtes, sobres …- ; jusqu’à ce qu’une de ces dissipations qui ont la particularité de le tirer de sa courtoise réserve ne soit commise d’un côté ou de l’autre de l’estrade. Il a l’art de se faire entendre alors, quitte à être désagréable, sans jamais taper sur la table ! La discrétion, chez Boris, est une seconde nature, presque une idée fixe.
Le bouquet de textes que des amis à lui ont décidé de collecter auprès d’autres amis à lui, pour le lui offrir à l’occasion de ses 70 ans, cette attention particulière, va certainement le toucher et produire l’effet de surprise escompté. Seulement, et je ne me moque qu’à peine, Boris sera encore plus surpris de se rendre compte qu’il a 70 ans. Eternellement en révolte, contre ceci ou cela, pourvu que soit entretenue sa rage contre la médiocrité dans toutes ses déclinaisons, Boris a depuis longtemps oublié son âge. Intellectuel exigeant, d’abord envers lui-même, travailleur acharné, sur sa machine dès cinq heures du matin, il est resté un jeune homme au sourire d’enfant. Et de l’enfant, il n’a pas que le sourire !
Ambivalent, comme nous tous autres, êtres humains, son sens de l’amitié domine tout, sauf, et cela peut surprendre beaucoup de monde, ses dispositions à l’admiration. Boris tombe en admiration devant le moindre embryon de talent, la moindre esquisse de courage, n’importe quel début d’engagement de la part de ces nombreux jeunes et moins jeunes gens pressés, manuscrits hâtifs sous le bras, qui le sollicitent, éprouvent ses yeux, plus très jeunes, le distraient de son propre travail. Il faut le connaître autant qu’on puisse connaître un être humain pour déceler dans ses yeux, chaque fois, cette lumière étonnante, révélatrice de cette disposition tout aussi étonnante chez quelqu’un qui se donne tant de mal lui-même, prend tout le temps qu’il faut, pour écrire la préface du texte le plus anodin, ne parlons pas de ses créations auxquelles il consacre plus que du temps, de la durée...
Cette disposition, cette main tendue, cette quête enchantée du nouveau talent, chez lui, à la fin des fins, révèle tout franchement une générosité presque débridée, une générosité de gamin, ayant certainement quelque chose à voir avec ce culte de l’écriture qui l’habite, et qui l’emplit d’une confiance presque naïve, charmante à la fin, dans les capacités de chaque être qui prendrait une plume, à offrir au monde un bouquet d’espérance…
par Madieye Mbodj
QUAND LES PILLEURS DE LA RÉPUBLIQUE VOIENT À PRÉSENT LE MONDE À L’ENVERS
Chasse aux sorcières, clament-ils : pourquoi pas d’ailleurs ? L’ensemble des pilleurs de la République doivent rendre gorge, jusqu’au dernier centime siphonné sur les ressources publiques, dont le pays a d’ailleurs le plus grand besoin
Des journalistes convoqués à la Section de recherches de la gendarmerie, des ‘’activistes’’ insulteurs publics jugés et condamnés pour diffusion de fausses nouvelles, des comptes d’entreprises de presse bloqués pour dettes fiscales non honorées : « Pas de doute, nous sommes en face d’une dictature en marche et d’une justice de règlements de comptes politiques contre des militants de l’APR !»
Ces pourfendeurs du nouveau régime, après la claque magistrale reçue du peuple sénégalais le 24 mars 2024, qui a vu le ciel leur tomber sur la tête, se positionnent maintenant en revanchards aigris, prêts à user de toutes sortes de ficelles pour espérer jeter du sable dans le moteur de la transformation systémique en marche. Ces gens-là qui ont usé et abusé sans pudeur de tous les moyens et de toute la force de l’Etat pour casser de l’opposant, lancent aujourd’hui des cris d’orfraie dès la moindre égratignure affectant leurs compères ou comparses.
Mais où étaient-ils donc ces Zorro durant ces douze longues dernières années, figurant parmi les plus sombres en matière de perversion des institutions judiciaires et de piétinement des règles de fonctionnement d’un Etat de droit véritable, particulièrement durant les années 2021 à 2024 ? Et pourquoi ne pipent-ils mot sur les innombrables rapports des corps de contrôle de l’Etat, soigneusement mis sous le boisseau ou le coude pesant du président sortant, des années durant ?
Fort opportunément, le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye a ordonné la publication desdits rapports, qui révèlent l’ampleur du carnage et du brigandage financiers opérés sur le dos des pauvres contribuables sénégalais. Ne surtout pas se laisser divertir ni s’arrêter en cours de route, le monstre est toujours là, avec ses diables et ses diablotins, incrustés dans les divers rouages du pouvoir d’État au niveau central et local, comme à travers les leviers subtils des différents appareils idéologiques. Il revient alors aux citoyens avisés, non pas de s’arrêter à la surface des similitudes apparentes, mais plutôt de faire l’effort de ‘’casser l’os pour sucer la substantifique moëlle’’, en allant à la profondeur des choses car, pour tous les pilleurs de la République, c’est le temps du monde à l’envers. Changer de cap, c’est mettre fin à l’absence de justice, mieux, à l’impunité sélective de Kumba am ndey ak Kumba amul ndey, c’est surtout veiller, sur les chemins escarpés de la rupture, à l’application du principe de la justice égale pour tous, dans le plein respect des droits du justiciable. Chasse aux sorcières, clament-ils : pourquoi pas d’ailleurs ? Tous les sorciers, toutes les sorcières, l’ensemble des pilleurs de la République doivent rendre gorge, jusqu’au dernier centime siphonné sur les ressources publiques, dont le pays a d’ailleurs le plus grand besoin pour jeter les bases de la souveraineté au service des filles et fils de la nation. Tout comme l’ensemble des reesponsables et auteurs de crimies de sang doivent répondre de leurs actes devant la justice et devant le peuple. Ils ne perdent rien pour attendre assurément, et ce ne sera que justice, toute la justice, rien que la justice de la vérité des faits, en lieu et place de la provocation, de la calomnie, du mensonge, de la duperie et de l’injure publique rétribués à coups de millions de CFA.
Monsieur Macky Sall, avant de quitter le pouvoir, a cru bon de laisser à son successeur le dossier empoisonné d’une fausse décision d’effacement de la dette fiscale des entreprises de presse, à hauteur de 45 milliards FCFA. Pourquoi des entreprises de presse, quelle que soit par ailleurs la spécificité dudit secteur ou sa place dans l’exercice de la mission du service public de l’information, devraient-elles sélectivement bénéficier d’exonérations ou d’exemptions fiscales suivant les calculs politiciens et électoralistes ou le simple vouloir du prince, alors que des ATD (Avis à Tiers Détenteur) sont tous les jours que Dieu fait, transmis à des banques de la place pour mettre la main sur des avoirs déposés dans des comptes d’entreprises non en règle vis-à-vis du fisc, des institutions sociales ou d’autres requérants ? Ni menaces, ni musèlement, ni intimidation, ni stigmatisation de tout un corps, il y a seulement que, comme le dit l’adage, qui se sent morveux se mouche : aucun journaliste armé de professionnalisme authentique, aucune entreprise de presse digne de ce nom et tant soit peu sérieuse, ne sauraient cautionner de bonne foi le piétinement des règles d’éthique et de déontologie si chères à la profession et au secteur.
Le léeboon ak lippoon du prétendu wax-waxet sur la mise en œuvre du Projet
Que dire de cette mauvaise querelle encore ou de ce prétendu wax-waxet sur la mise en œuvre des engagements déclinés dans le Projet ? Lors de la visite à Dakar de monsieur Mélenchon de La France Insoumise /LFI, nos ci-devant détracteurs se sont employés à esquiver le débat d’idées sur des problématiques prioritaires abordées par Ousmane Sonko et son hôte, par exemple la redéfinition des relations France / Afrique, la sortie du Franc CFA, la suppression des bases militaires, le français comme langue officielle du Sénégal au-dessus et au détriment de nos langues nationales, et j’en passe. Ils ont préféré jongler et bavarder sur le sexe des anges en Europe et en Afrique. Tout comme ils continuent de persister, s’échinant de diverses manières, à créer une fausse rivalité, animosité, zizanie ou bisbille entre le président et le Premier ministre - en pure perte d’ailleurs pour qui connait réellement ces deux leaders, imbus de valeurs et de principes éthiques, pleinement convaincus ensemble de la pertinence du « Projet pour un Sénégal souverain, juste et prospère, dans une Afrique de progrès ». D‘autant plus que, de la victoire du 24 mars, le duo Diomaye-Sonko n’est redevable d’aucun lobby, ni financier, ni économique, ni religieux, ni médiatique, ni d’un quelconque autre groupe de pression. Ils n’ont de comptes à rendre qu’au seul peuple africain du Sénégal, qui s’est mobilisé, a consenti tous les sacrifices nécessaires, pour finir par gagner, de haute lutte et de la plus éclatante des manières. Aujourd’hui et demain, ce peuple attend que l’on s’occupe avec succès de ses vrais problèmes et préoccupations, tel est le défi. Il s’agit donc pour le nouveau régime, tout en veillant à ne pas laisser l’initiative aux revanchards épaulés par leurs alliés de l’intérieur et de l’extérieur, de faire plus que jamais focus sur la stratégie d’implémentation des orientations et mesures déclinées par le Projet.
Une telle œuvre, comme partout ailleurs du reste, et à l’exemple d’autres expériences de transformation sociale à travers le monde, requiert de respecter les trois temps suivants, étant entendu qu’il ne saurait être question de dresser des cloisons étanches entre ces trois moments : état des lieux-transition-transformation, surtout s’il s’agit de transformation systémique, comme présentement au Sénégal. C’est pourquoi, à propos de la mise en orbite du document de référence en matière de politiques économique et sociale, le Projet, les nouvelles autorités ont, en toute conscience, fixé le cap dès leur entrée en fonction, en précisant que le Projet « portera exclusivement le sceau de l’expertise sénégalaise et sera achevé au troisième trimestre de l’année 2024… La première phase du plan d’action pluriannuel du Projet sera inscrite dans le projet de loi de finances initiale 2025, qui sera soumis à l’approbation de l’Assemblée nationale, au début du mois d’octobre prochain » (Communiqué du Conseil des Ministres du 24 Avril 2024). La rupture n’est point du taf-yëngël, mais une œuvre grandiose et trop sérieuse pour être escamotée ou conduite dans la brusquerie de l’instantané: « se hâter avec lenteur », en faisant preuve de toute la lucidité et patience requises, tout en déployant la communication appropriée ainsi que la méthode de la pédagogie par l’exemple et par le haut, autant de leviers indispensables pour asseoir les bases de la proximité et de la confiance entre les autorités et les citoyens, en vue d’enraciner, de faire vivre et de réaliser le Projet, aujourd’hui, demain et après-demain.
A coup sûr, une révolution démocratique, sociale et citoyenne est en marche contre le présidentialisme néocolonial qui entrave le processus de libération et de développement de notre pays depuis plus de 60 ans, charriant servitude volontaire, tyrannie autocratique et gouvernance prédatrice. Il est donc impératif de soutenir cette révolution, de contribuer activement et résolument à son plein succès, dans la claire conscience des jours difficiles à vivre, compte tenu de l’ampleur des dégâts et des retards accumulés ainsi que des obstacles à surmonter : nous venons de loin et nous voulons aller plus loin encore, contre tous les ennemis de classe de l’intérieur et de l’extérieur. La mobilisation populaire et citoyenne, avec les jeunesses comme fer de lance, a été « la main de Dieu » qui a assuré la victoire du 24 mars, elle reste et restera le meilleur gris-gris pour garantir la protection, la défense et l‘accélération de la révolution en marche.
par Amadou Diaw
DE L’IMPORTANCE DE LA FORMATION DE LA JEUNESSE À L’INCERTITUDE
Dans un monde en perpétuelle évolution et marqué par l’incertitude, la capacité des jeunes à naviguer dans la complexité et l’ambiguïté devient une compétence essentielle
J’ai souvent entendu tant sur les plateaux de télé que lors des grandes messes dédiées à la question de l’emploi, le vieux concept d’Adequation Formation/ Emploi.
Ma petite expérience me permet d’affirmer que les métiers de demain ne sont pas connus pour la majorité d’entre eux .
Dans un monde en perpétuelle évolution et marqué par l’incertitude, la capacité des jeunes à naviguer dans la complexité et l’ambiguïté devient une compétence essentielle.
Réfléchissons à la manière dont nous pouvons former la jeunesse africaine à embrasser l’incertitude comme une opportunité de croissance et de créativité.
Invitons la jeunesse à penser de manière transdisciplinaire, à embrasser la complexité des situations, à accepter l’incertitude inhérente à notre monde en perpétuel mouvement.
Encourageons les jeunes à développer leur pensée critique, à embrasser la diversité des points de vue, et à apprendre à gérer l’incertitude peut se révéler vital pour leur développement personnel et professionnel.
La formation à l’adaptabilité
Former les jeunes à l’adaptabilité est essentiel pour les préparer à un monde en constante évolution. Autour des axes suivants :
(a) Encourager l’ouverture d’esprit et la curiosité face à de nouvelles idées.
( b) Promouvoir la prise de risque calculée et la gestion du changement.
(c) Valoriser la flexibilité et l’agilité dans la prise de décisions et l’adaptation aux situations changeantes.
(d) Sensibiliser à l’importance de la remise en question et de l’acceptation des feedbacks pour progresser.
(e) Intégrer des formations sur la gestion du stress et des émotions pour favoriser un état d’esprit positif face à l’incertitude.
(f) Encourager l’adaptation aux nouvelles technologies et tendances du marché.
(g) Faire de l’adaptabilité un pilier de l’éducation en mettant en avant des exemples inspirants de personnes ayant su s’adapter avec succès aux défis rencontrés.
La Pensée Complexe:
La jeunesse africaine peut être formée à la pensée complexe, qui consiste à considérer les phénomènes dans leur globalité, à tisser des liens entre les connaissances, et à appréhender les situations avec un regard holistique.
La Gestion de l’Incertitude:
L’incertitude peut devenir un terreau fertile pour l’innovation et la créativité. En formant les jeunes à la gestion de l’incertitude, on les prépare à relever les défis futurs, à s’adapter aux changements, et à saisir les opportunités qui se présentent malgré les obstacles.
En formant la jeunesse africaine à l’incertitude on les outille pour devenir des acteurs éclairés et résilients dans un monde en perpétuelle mutation.
En cultivant la pensée complexe, la créativité, et la capacité à gérer l’incertitude, on contribue à forger des citoyens engagés et aptes à construire un avenir positif.
Par Thierno Bocoum
SONKO A DÉCIDÉ DE GOUVERNER ET DE S'OPPOSER EN MÊME TEMPS
Comment peut-on traiter certains magistrats de corrompus quand on décide de s’immiscer dans l’enclenchement de l’autosaisine du procureur à travers son ministre de la justice ?
Le Premier ministre Ousmane Sonko est en retard. Le plan d’action gouvernemental qu’il annonce pour bientôt lui a été demandé depuis très longtemps.
Dans le premier communiqué du conseil des ministres en date du 09 avril 2024, il a été dit ceci : « le Président de la République a demandé au Premier Ministre, sur la base du PROJET et des orientations présidentielles sus indiquées, de finaliser, avant la fin du mois d’avril 2024, le Plan d’actions du Gouvernement, avec un agenda précis de réalisation des objectifs fixés. »
Il est en retard de plusieurs mois mais trouve le temps de faire de la politique politicienne en mettant en exergue une compétence qui a déjà montré ses limites.
Comment peut-on traiter certains magistrats de corrompus quand on décide de s’immiscer dans l’enclenchement de l’autosaisine du procureur à travers son ministre de la justice ?
Pourquoi ne pas demander au procureur de faire son travail sur son propre dossier pendant devant la justice ?
Encadrer la justice et la presse selon ses propres orientations est la pire des dérives d’un apprenti dictateur.
S’attaquer à une opposition qui a décidé de laisser le temps de l’observation est une belle preuve d’incapacité face aux nouvelles charges étatiques.
L’ingénieuse prouesse a été de trouver le temps de faire de la politique politicienne après avoir demandé du temps pour faire des résultats.
À défaut de projet et de visions, les objectifs sont maintenant clairs :
1 - Anticiper sur l’après Diomaye en muselant la presse non inféodée à sa doctrine, en intimidant certains peureux d’une opposition hésitante pour les dissuader dans l’exercice de leur droit et en accaparant un appareil politique à travers un discours populiste renouvelé.
2 - Faire croire que le nouveau pouvoir est menacé dans sa volonté de prétendues éformes systémiques pour divertir les sénégalais sur un combat contre le néant et ainsi échapper à la récurrence des demandes de respect des engagements et de satisfaction des besoins majeurs des populations.
Ousmane Sonko a décidé de gouverner et de s’opposer en même temps. Gouverner contre ses adversaires, s’opposer à ses adversaires.
Celui qui était prêt à déloger du palais de la république un président légalement élu pour prendre sa place fera tout pour remplacer son poulain.
Son temps sera dédié à la politique politicienne. La correcte prise en charge des intérêts majeurs des populations attendra malheureusement.
Qu’il sache que ceux qui ne sont pas dans le soutien aveugle, le fanatisme et la recherche de sinécures connaissent bien ce proverbe qui dit que « bien dire fait rire, bien faire fait taire. »
Malheureusement, il ne cherchera pas à faire taire en bien faisant mais plutôt en usant de formes d’intimidation ridicules, obsolètes et inopérantes.
Nous espérons que certaines ruptures annoncées et attendues survivront dans cette mare de populisme.
Les sénégalais sont fatigués. Ils ne rempliront pas leur ventre par des paroles futiles et de l’arrogance.
Par Momar Dieng
DIVERSION ET RÉALITÉS
Les propos d’Ousmane Sonko à l’endroit de la presse, tenus le 9 janvier sur l’esplanade du Grand Théâtre lors d’un meeting de son parti, ont soulevé l’ire de beaucoup de journalistes…
Les propos d’Ousmane Sonko à l’endroit de la presse, tenus le 9 janvier sur l’esplanade du Grand Théâtre lors d’un meeting de son parti, ont soulevé l’ire de beaucoup de journalistes… Pour certains d’entre eux, le chef du Pastef (et Premier ministre) est coupable d’avoir proféré des menaces et mises en garde contre les professionnels des médias dans l’exercice de leurs fonctions. D’autres l’accusent - sans avoir tort - de tirer sur cette corde « populiste » qui semble lui avoir bien réussi dans sa déjà fulgurante carrière politique. Pourquoi changerait-il de méthode, se disent-ils ? Des ‘’Unes’’ de la presse quotidienne de ce lundi 10 juin renseignent sur l’impact d’un discours sur le personnel du « 4e Pouvoir », sans langue de bois, direct mais pourtant précisément…ciblé sur une catégorie identifiée de patrons de presse. Un point crucial qui n’a pas semblé digne d’intérêt pour tout le monde. Cela, c’est sur la forme.
Dans le fond, que retenir d’essentiel du discours véhément d’Ousmane Sonko ?
Primo : que les journalistes ont l’obligation professionnelle, éthique et morale de respecter les principes sacro-saints qui fondent et légitiment l’exercice de leur profession, qui plus est dans un environnement démocratique où ils ne sont clairement pas les seuls acteurs. Nous publions et diffusons chaque jour des centaines d’articles qui touchent à tous les secteurs de notre vivre-ensemble quotidien et sur tous les supports disponibles. Prenons-nous toujours le temps de le faire comme nous devons le faire? La perfection n’existant nulle part, la réponse est non. Le faisons-nous en toute bonne foi ? La déontologie est une matière variable, à chacun sa conscience. Prenons-nous le temps de rectifier ce qu’il y a à rectifier ? Sans doute mais il reste du travail.
Il nous faut le reconnaître : nous avons - bien malgré nous - fourni des munitions à des gens extérieurs à notre profession pour qu’ils viennent nous rappeler le ba.ba de notre métier en brandissant des pièces à conviction qui nous envoient au tapis. La présumée « affaire Kandé » qui vient de défrayer la chronique est un désastre monumental en termes de crédibilité qui nous frappe tous. Elle montre ce que peut être un journalisme ombrageux dont la mécanique éditoriale carbure aux racolages, rapiéçages et ajustages aux fins de fournir des produits livrables à d’obscures officines en embuscade dans une arrière-scène en Antarctique. On ne le dira jamais assez : « l’indépendance du journalisme est la première garantie d’une information loyale. Pas de quêtes de vérités sans autonomie de leurs chercheurs » (Edwy Plenel).
Deuxio : que les entreprises de presse ont le devoir d’être en règle avec la loi, notamment au plan fiscal. Personne ne le conteste. Les difficultés que vivent les patrons de presse, le stress des fin de mois et des autres périodes ‘’sociales’’ qui appellent des dépenses, les sacrifices immenses que certains d’entre eux consentent jusque sur leurs propres biens pour faire vivre leurs médias et leurs personnels sont des réalités incontestables. Il faut leur en rendre hommage. Mais c’est leur choix d’avoir investi dans un secteur impitoyable, concurrentiel, budgétivore et sans garantie de retour sur investissement. La réalité est têtue mais incompressible. Des patrons de presse acceptent les règles du jeu, déroulent leurs stratégies, font preuve d’inventivité et d’innovations en tenant compte de leurs moyens et limites. D’autres, par contre, font semblant de jouer le jeu, rusent, transforment une présumé capacité de nuisance en une institution permanente de lobbying qui finit par discréditer la véritable institution que doit être le média. C’est ce vagabondage égoïste avec des « bailleurs de fonds » non philanthropes qui ramène au ‘’Primo’’ ci-dessus. Dans un post en date du 27 mai 2024, Hamadou Tidiane Sy, fondateur du site « Ouestafnews » et directeur de l’école de journalisme E-jicom, écrit: « l’indépendance du journaliste n’a pas de prix mais a un coût. Celui de n’être souvent « l’ami » de personne : ni pouvoir, ni opposition, ni opérateurs économiques, ni chefs coutumiers ou religieux…»
Au delà de la tonalité du discours d’Ousmane Sonko, ce sont les réalités que voila que les organisations et entreprises de presse devraient s’attacher à combattre pour protéger l’honneur d’une profession indispensable au contrôle démocratique du pouvoir politique, de sa gouvernance, des ‘’tromperies d’Etat’’ (Edwy Plenel) et des pratiques oligarchiques autour de l’économie et des secteurs stratégiques lucratifs de la vie nationale. C’est la voie royale pour assurer à la presse cette qualité de contre-pouvoir qui a été détruite par la cupidité manifeste dont font preuve certaines de ses figures.
S’accrocher aux propos d’Ousmane Sonko pour ne pas en voir le fond ne nous avancera en rien. Exigeons par exemple du pouvoir la suppression des peines privatives de liberté pour les journalistes ! C’est le Président Bassirou Diomaye Faye qui en a pris l’engagement. Mais apparemment, une loi de protection pour les lanceurs d’alerte semble plus prête d’être déposée à l’assemblée nationale. Ça, c’est un beau défi et une vraie réalité ! Sus à la diversion.