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3 décembre 2024
Développement
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LA FIN DE LA PROCRASTINATION MONÉTAIRE AU SÉNÉGAL ?
Martial Ze Belinga déconstruit le mythe de la "pérennité" du franc CFA. Pour le chercheur camerounais, l'argument de la continuité défendu par les partisans du statu quo monétaire ne tient plus face aux aspirations de souveraineté des nations africaines
Pendant des décennies, les autorités africaines ont repoussé l'échéance d'une réforme des systèmes monétaires hérités de la colonisation. Selon Martial Ze Belinga, chercheur indépendant en économie et en sciences sociales, cette attitude relève de la « procrastination », un report permanent d'une décision pourtant nécessaire.
"On est habitué à fonctionner dans un système dont on sait qu'il n'est pas optimal, dont on sait qu'à terme on devra changer, mais on diffère en permanence le moment de décider et de faire un choix", analyse- t-il à propos du franc CFA.
Le chercheur camerounais considère que malgré les discours rassurants sur la stabilité apportée par cette monnaie, les faits sont têtus : en près de 80 ans d'existence, le franc CFA n'a pas permis l'émergence économique des pays qui l'utilisent. Un constat cuisant pour les défenseurs d'un outil vendu comme protecteur des économies africaines.
Désormais, l'élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidence du Sénégal pourrait marquer la fin de cette longue tergiversation. Portée par un vent de souveraineté, la nouvelle équipe dirigeante affiche sa ferme intention de tourner la page du franc CFA, perçue comme un vestige néocolonial.
Deux options sont sur la table selon Ze Belinga : une sortie collective au sein de la CEDEAO vers l'éco, la future monnaie commune, ou une sortie en solitaire pour doter le Sénégal de sa propre invention. Une perspective qui effraie certains observateurs, redoutant d'éventuelles représailles à l'instar de celles subies par des dirigeants récalcitrants par le passé.
Mais pour le chercheur, le Sénégal, de par son poids démographique, économique et sa légitimité démocratique, à tous les atours pour être le pays pionnier qui entraînera d'autres nations africaines sur la voie de la souveraineté monétaire.
DÉCÈS DE BOUN DIONNE
L'évacuation précipitée de l'ex-Premier ministre en France pour raisons médicales avait alimenté les spéculations. Premier ministre de 2014 à 2019, le candidat à la présidentielle avait dû interrompre sa campagne, frappé par la maladie
(SenePlus) - L'ancien Premier ministre Mahammad Boun Abdallah Dionne est décédé vendredi 5 avril 2024 en France à l'âge de 65 ans, des suites d'une maladie. Candidat à l'élection présidentielle du 24 mars dernier, sa mort plonge le Sénégal dans le deuil.
Tombé malade durant la campagne électorale, il avait été évacué en France dans la nuit du samedi 23 au dimanche 24 mars 2024 pour des soins. De quoi le contraidre notamment à interrompre sa campagne électorale. La dégradation de son état de santé avait alors alimenté diverses rumeurs.
Acteur de la vie politique sénégalaise, Mahammad Boun Abdallah Dionne aura notamment occupé le poste stratégique de Premier ministre pendant plus de 5 ans, soit de juillet 2014 à mai 2019 auprès de l'ex-président Macky Sall. L'ingénieur informaticien et auditeur libre a dernièrement pris ses distances avec Macky Sall, en décidant de briguer la magistrature suprême après le choix par ce dernier d'Amadou Ba comme candidat de la majorité présidentielle.
LES NOUVEAUX VISAGES DU FÉMINISME SE DÉVOILENT
Né dans le sillage du mouvement ‘’Yeewu Yeewi’’ pour la libération des femmes, fondé en 1984, et dont il s’inscrit dans la continuité quarante ans après, le Collectif des féministes du Sénégal (CFS) est porté par des femmes âgées entre 25 et 40 ans.
Né dans le sillage du mouvement ‘’Yeewu Yeewi’’ pour la libération des femmes, fondé en 1984, et dont il s’inscrit dans la continuité quarante ans après, le Collectif des féministes du Sénégal (CFS) est porté par des femmes âgées entre 25 et 40 ans. Celles qui incarnent aujourd’hui le féminisme ont raconté à l’APS leur parcours et leur engagement pour la cause féminine.
De la réalisatrice à la juriste consultante en passant par la bibliothécaire archiviste, l’écrivaine scénariste et la communicante, toutes s’affichent pour prendre la parole et faire entendre leur voix sur la lutte pour les droits des femmes. La toile, l’écran et les réseaux sociaux sont les outils les plus investis.
Adama Pouye : la lutte contre les agressions sexuelles dans les transports a débuté pour elle sur Facebook et d’autre réseaux sociaux. A vingt-sept ans, la diplômée de l’Ecole des bibliothécaires, archivistes et documentalistes (Ebad) s’est fait remarquer par ses post virulents sur les réseaux sociaux pour dénoncer les agressions sexuelles dans les transports en commun.
Un engagement qui sonne comme un déclic dans le parcours féministe et évolutif de Adama Pouye, débuté en 2019. C’est l’année où elle créa le mouvement ‘’Boulma rissou’’ (Ne te frottes pas à moi en wolof). Un mouvement né de cette lutte sans merci qu’elle mène avec des féministes telles que Aminata Liben Mbengue, Maïmouna Astou Yade, Amy Sakho.
Documentaliste à l’Institut français de Saint-Louis, elle s’associe lors d’une campagne de sensibilisation avec des transporteurs des bus tata Aftu (mini bus de Dakar) et de Dakar Dem Dikk (DDD), l’entreprise de transport public.
Elle met ensuite sur pied l’Association féministe ‘’Awas’’ (‘’la voix’’ en farsi iranien), avec sa sœur jumelle Marième Pouye et d’autres féministes dans le but d’élargir le champ de lutte pour les droits des femmes.
Adama a été éduquée dans un cocon familial ‘’sécurisé’’ où il y a qu’un seul homme à la maison, son père, et où on fait comprendre à toutes les possibilités qu’une fille peut avoir dans la vie.
Mais le choc eut lieu lorsqu’elle sortit du cocon familial avec des messages d’un autre son de cloche. Par exemple, il y a l’école où on demande aux filles de balayer les classes et pas les garçons. Et pour ne rien arranger, ces derniers ‘’sont mis en avant dans les gouvernements scolaires et autre instantes dirigeants’’, dénonce Adama Pouye qui assume son féminisme une fois à l’université de Dakar, à l’Ebad.
Aujourd’hui, la co-coordinatrice du collectif des féministes du Sénégal, la plus jeune d’ailleurs du bureau de douze membres de cette organisation, a lancé en 2021 un forum exclusivement féminin à Saint-Louis. Le but : promouvoir les initiatives des femmes dans la littérature, l’entreprenariat, le numérique où elles doivent s’investir et la nécessité d’avoir un cadre d’échange pour les droits des femmes.
La réalisatrice sénégalaise Mamyto Nakamura, pour qui le cinéma est un outil de plaidoyer pour parler aux femmes, est engagée dans le mouvement féministe du Sénégal, depuis 2012. Elle se sert de sa caméra pour “réparer certaines injustices faites aux femmes et plaider en leur faveur”.
En témoignent les multiples podcasts réalisés sur les articles discriminatoires du Code de la famille à l’endroit des femmes et diffusés en zone rurale de façon gratuite pour ouvrir le débat et donner aux femmes le courage de se raconter et de s’exprimer sans être jugées.
Son dernier film documentaire ‘’Au nom du sang’’ (sorti en janvier), sélectionné au prochain Festival film femme Afrique, prévu du 26 avril au 4 mai, traite du viol dans l’espace familial. Autant dire qu’il en dit long pour celle qui, aujourd’hui, suit les pas de sa mère, Fatou Diop, ”bajenu gox” (marraine de quartier), très réputée à Louga, sa ville natale.
C’est d’ailleurs là que Mamyto Nakamura officie pour faire passer ses messages. Elle qui a pris le nom de ‘’Hiros Nakamura’’, personnage de fiction de télévision américaine qui a le pouvoir de fermer les yeux et de voyager dans le temps. ‘’J’aurais aimé voyager dans le temps pour réparer certaines injustices faites aux femmes et filles’’, lance Mamyto Nakamura, qui se définit comme ‘’une féministe communautaire’’.
‘’On est toute féministe, il s’agit de s’engager ou de ne pas le faire’’, souligne celle qui s’est engagée dans cette voie pour être au service de sa communauté et faire tout pour que les femmes occupent les devants.
L’épanouissement des femmes, leur sécurité, le travail, l’autonomie financièrement, l’indépendante à travers les idées et les envies restent le fil rouge de son combat.
Même chose pour Maïmouna Astou Yade dite ‘’Maya’’, à qui le surnom de féministe radicale irait bien. Elle est la fondatrice exécutive de ‘’JGen Sénégal’’ (JGEN women global entrepreneurship), une structure créée en 2016 et qui regroupe de jeunes féministes.
Elle se classe parmi les ‘’féministes hyper radicales’’, surtout face au patriarcat, dit-elle. Son engagement pour la cause des femmes est partie d’une privation de parole en public dont elle a été victime. Mais pour Maya, ‘’on est tous féministe dans l’âme’’, même s’il faut un déclic pour l’affirmer.
Depuis 2020, la consultante, juriste de formation, s’active dans la construction du mouvement féministe au Sénégal et dans l’Afrique francophone. Elle se bat, dit-elle surtout, ‘’ pour éliminer toutes sortes de violences basées sur le genre au Sénégal’’.
La mission des femmes réunies autour de JGen Sénégal est de ‘’décoder les codes sociaux’’, et dans une approche innovante avec le collectif des féministes du Sénégal, d’aller à la rencontre des communautés pour déconstruire le mythe construit autour du féminisme.
Son modèle reste aujourd’hui la sociologue Fatou Sow, ‘‘une figure emblématique du féminisme’’ dont elle admire la posture, mais surtout la préservation de sa culture et des valeurs sénégalaises. ”A chaque fin de rencontre entre féministes, elle se précipite pour rentrer et quand on l’interpelle pour savoir pourquoi, elle répond : +Je vais aller m’occuper de ma famille+. En bonne sénégalaise et malgré son engagement, elle garde sa culture et c’est ce qui est admirable”, magnifie Maya.
Elle se donne comme ambition d’accompagner les plus jeunes pour qu’elles puissent grandir avec l’opportunité d’en apprendre plus sur le féminisme africain.
Car pour Maïmouna Astou Yade, même s’il y existe un féminisme universel, il en existe aussi qui spécifique à l’Afrique parce que les Africaines ont des priorités spécifiques.
Et ce n’est pas Amina Seck qui dira le contraire, elle qui se bat pour l’égalité femme-homme à travers l’écriture. La romancière et scénariste sénégalaise ne saurait dire comment elle est devenue féministe, mais est convaincu des raisons pour lesquelles elle est féministe. ‘’J’ai toujours défendu les droits humains depuis mon enfance. En grandissant, j’observais les femmes, les filles et plus particulièrement ma mère. J’ai donc compris qu’il y avait une inégalité qu’il fallait combattre’’, confie-t-elle à l’APS.
La fondatrice de “Les Cultur’elles” (une agence pour la promotion des arts et cultures au féminin) et organisatrice du Salon du livre féminin de Dakar fait un travail de ‘’déconstruction’’ à travers son art. ‘’Je mets en lumière toutes les femmes qui évoluent dans le milieu des arts et de la culture. Mes projets personnels (livres et scénarios) racontent les femmes aux femmes et hommes. Je forme et encadre beaucoup de personnes dans le domaine de la création (l’écriture)’’, déclare-t-elle.
Celle qui est devenue une militante pour les droits des femmes grâce à son parcours, son vécu et aux circonstances, fonde son engagement sur la paix et le respect de tous, plus particulièrement des femmes.
‘’Je n’ai pas de limite. J’évolue dans le milieu des arts, nous avons donc deux statuts dans la société, celui d’être une femme et aussi d’être artiste qui n’a que son art pour s’exprimer et vivre dans la dignité. Et nous savons tous qu’il existe toutes les formes de violence dans le milieu artistique’’, dénonce-t-elle. Amina Seck estime que le féminisme a du chemin à faire, que ce soit au Sénégal ou dans d’autres pays africains.
‘’En ce qui concerne le Sénégal, tant que le code de la famille n’est pas revu, beaucoup de combats seront vains. Ce qui serait vraiment dommage pour tout le chemin parcouru jusqu’à là sur les luttes pour les droits des femmes. Le code de la famille constitue un mur que seules les autorités peuvent briser pour donner aux femmes ce qui les sont dus’’, estime-t-elle.
Une autre féministe qui partage les mêmes conviction est Eva Rassoul Ngo Bakenekhe, pour qui le combat pour la déconstruction passe par l’éducation. La militante féministe qui se défit comme quelqu’un qui refuse de rentrer dans une moule, plaide pour une déconstruction dans l’éducation. ‘’Apprendre aux enfants à être humain’’, lance-t-elle.
La Camerounaise qui vit au Sénégal depuis une quinzaine d’années, précise que son combat se résume à voir comment faire pour que l’éducation féministe qui renvoie à l’éducation des enfants, puisse atteindre tous les enfants, aussi bien les garçons comme filles. La journaliste s’active davantage aujourd’hui dans la communication et rêve d’un monde plus ‘’humaniste’’ où l’on apprendra ‘’au garçon à être un homme accompli et à la fille de même pour arriver à un monde juste’’.
Eva Rassoul estime que le féminisme n’est différent en rien des autres combats menés dans nos sociétés. Celle qui se réclame féministe est entrée dans le mouvement pendant l’Affaire ”Adji Sarr”, l’ex-employée d’un salon de beauté qui avait accusé de viol le leader de l’ex-PASTEF, Ousmane Sonko.
‘’Féministe, je le suis depuis longtemps, parce que lorsqu’on est journaliste, il faut s’imposer dans les rédactions, et pour aller sur le terrain, toujours défendre ses positions, briser les codes’’, souligne-t-elle.
Elle regrette toutefois que parfois dans les combats des féministes, ‘’les plus grands pourfendeurs soient des femmes’’.
par Yoro Dia
MONSIEUR LE PRÉSIDENT, GARDONS-NOUS DE PERDRE DU TEMPS
Les urgences ne sont ni électorales ni institutionnelles. Elles sont dans la croissance, l’emploi des jeunes, la création de richesses, la quête de la prospérité. Si le fameux « Projet » de Pastef existe, il doit être orienté vers ce nouvel horizon
Dans une précédente contribution, je soulignais que le seul risque politique que le Sénégal court est une perte de temps parce que l’Etat est debout, la République forte et la démocratie en marche. L’immense chantier de réformes institutionnelles qu’annonce le président Faye confirme qu’on va perdre du temps. Le Sénégal qui a organisé une présidentielle en moins de trois semaines, une transition entre les Présidents Sall et Faye en moins de dix jours et dont l’alternance est devenue la respiration démocratique n’a pas de problèmes institutionnels sauf si nous sommes à la quête d’institutions parfaites qui n’ont jamais existé nulle part sur terre. Les institutions deviennent « parfaites » avec le temps que nous ne leur donnons jamais au Sénégal car après chaque élection on ouvre un chantier de réformes.
Notre pays n’a pas aussi un problème électoral et l’élection du président Faye en est la parfaite illustration sans parler de celle de Barthelemy Dias à la tête de la capitale et de Serigne Mboup (société civile) à Kaolack. Lors de la dernière présidentielle aux Etats Unis, le pays de Google, de Facebook et de Twitter, c’est le vote postal qui était au cœur des débats parce que les institutions américaines remontent à la Constitution de 1789 et on en est toujours à la première République. L’histoire montre qu’il n’y a pas de lien entre reforme, « modernité » des institutions et efficacité économique sinon la révolution industrielle n’aurait pas eu lieu en Angleterre et le Japon ne serait pas à la pointe de la révolution industrielle et technologique. La création d’une CENI (Commission électorale nationale indépendante) serait un grand bond en arrière car elle est souvent l’apanage des pays en transition démocratique ou pour les nouvelles démocraties.
Face aux urgences économiques et sociales, ce grand chantier de la reforme institutionnelle s’apparente à une arme de distraction massive qui ne fera que l’affaire des rentiers de la tension électorale permanente qui doivent leur survie qu’à cette démocratie du Sisyphe ( éternel retour sur les règles du jeu). Dans un pays où le pouvoir par le biais d’un ministre de l’Intérieur (partisan ou pas) peut organiser des élections présidentielles et les perdre comme en 2000, 2012 et 2024, c’est un anachronisme politique que de vouloir faire un bond en arrière que de vouloir créer une CENI. J’ai toujours pensé que c’était une tragédie que le cerveau de notre classe politique avec des hommes si brillants soit tout le temps piraté par la question électorale.
L’émergence est dans l’inversion de la courbe du débat comme l’a fait le Premier ministre Abdou Mbaye sur la question de la monnaie. Les urgences ne sont ni électorales ni institutionnelles. Elles sont ailleurs, notamment dans la croissance, dans l’emploi des jeunes, dans la création de richesses, dans la quête de la prospérité. Et quand un pays se mobilise pour la prospérité ou l’émergence, il n’a pas le temps et l’énergie à perdre sur le débat sans fin sur les institutions car la Grande Bretagne, le Japon et les Etats Unis montrent tous les jours qu’on peut avoir des institutions archaïques qui remontent au Roi Jean sans terre pour la Grande Bretagne ( 1166-1216), à l’ère du Meji pour le Japon ( 1868) et à la révolution américaine de 1776 et avoir une grande efficacité économique et industrielle. Le Sénégal va avoir son premier baril de pétrole cette année, le nouvel horizon est économique et l’exception démocratique doit avoir l’ambition de devenir l’exception économique. Si le fameux « Projet » de Pastef existe, il doit être orienté vers ce nouvel horizon. Quand le Président Macky Sall lançait le PSE, le Sénégal n’avait que de l’arachide et des phosphates mais les résultats du PSE sont concrets. Le « Projet » a la chance d’avoir le carburant mais un contexte favorable pour accélérer la marche vers l’émergence si et seulement le Président Faye ne se trompe pas de priorité en tombant dans le piège des rentiers de la tension et avec une claire conscience de sa mission historique qui est tout sauf dans la réforme institutionnelle.
En tout cas, les vents sont favorables mais « il n’y pas de vents favorables pour celui qui ne sait pas naviguer », disait Sénèque. Espérons pour le Sénégal que le « Projet » est une bonne feuille de route pour nous mener à bon port mais il faudrait au préalable ne pas se tromper de port, d’objectifs et des priorités. La priorité étant à mon avis l’économie et la croissance. La démocratie est la compétition des réponses que les citoyens se posent. Les jeunes qui sont l’essentiel de la population ne posent pas des questions sur les réformes institutionnelles mais sur l’emploi qui ne peut être réglé par l’Etat dont la mission doit se limiter à créer les conditions favorables à la création de richesses. « Les Sénégalais sont fatigués et la vie est chère » dit le président. La solution n’est pas les réformes institutionnelles mais de mettre la question économique au centre en chassant les juristes du temple pour les remplacer par les « marchands » avec les assises de l’économie. Les marchands créateurs de richesses qui ont permis à tous les pays émergents de passer de l’indigence à l’émergence, « du tiers monde à Premier monde » comme Singapour ou la Chine.
Nous avons un Etat de droit et des institutions solides comme l’a prouvé la dernière présidentielle. C’est pourquoi, je pense aussi qu’il n’est ni nécessaire et encore moins convenable pour le pouvoir exécutif de prendre l’initiative d’organiser des « assises de la justice » pour « redorer le blason » de la justice. On ne saurait se baser sur des décisions de justice qui n’ont pas été favorables à Pastef dans l’opposition pour dire que le blason de la justice a été terni car beaucoup d’autres lui ont été favorables. Les dernières décisions du Conseil Constitutionnel où le président Badio Camara a été aussi loin que le juge Marshall qui a imposé le contrôle de la constitutionalité des lois aux Etats Unis en 1803 dans l’affaire Marbury vs Madison et la longue guérilla judicaire des affaires Sonko ont fini de prouver l’indépendance des juges qui selon que vous soyez Etat ou opposant vous donnent raison ou vous déboutent confirmant ainsi que la justice, le seul service de l’Etat qui porte le nom d’une vertu n’a pas point qu’on redore son blason qui n’a jamais été aussi étincelant.
par Elgas
GAMBIE : SPECTRE ET SCEPTRE DE L’EXCISION
Face au tollé soulevé par une proposition de loi autorisant l’excision, le Parlement gambien a décidé de suspendre les discussions. Une victoire en trompe-l’œil, qui illustre l’impuissance des dispositifs législatifs et politiques à contrer certains cons
En octobre 2023, plusieurs chercheurs planchaient, à Genève, sur les « révolutions conservatrices ». J’en fus, à l’initiative du politiste français Jean-François Bayart, avec des chercheurs et des universitaires venus de tous les coins du globe – tous témoins de cette énergie amère qui traverse le monde sans épargner aucun acquis civilisationnel.
De Bolsonaro à Poutine
La formule de « révolutions conservatrices » s’est ainsi imposée. Elle est devenue quasi générique tant elle dépeint, non sans quelques faiblesses, la propension de nombre de séquences politiques actuelles à mettre à mal des pactes ou des progrès sociaux durement acquis. Ce qui achève ainsi de montrer que le progressisme n’est pas un horizon naturel béni par le temps, et qui démontre que toute turbulence politique, géopolitique, sociale ou sociétale peut détricoter des avancées majeures des droits humains, partout dans le monde, et grever tout particulièrement ceux des minorités.
Le mésusage le plus commun en la matière est de considérer que l’Europe est épargnée par ce fléau, que le reste du monde reste le fief de barbaries toujours à l’affût pour damer le pion aux fragiles acquis de la démocratie. C’est oublier, qu’il s’agisse de la question LGBT, de l’arrivée (ou du retour) des pouvoirs conservateurs (Trump, Bolsonaro, Orban, Meloni), ou encore de la place grandissante qu’occupe la Russie de Poutine – lequel fournit une matrice à l’idée d’un nécessaire retour à certaines « valeurs » – que l’Europe reste l’épicentre de la théorisation d’un conservatisme de bon aloi.
Féministes et connectés
Loin de ces fractures inter-occidentales et dans une Gambie en butte à une précarité sociale et institutionnelle, la funeste énergie du monde a fait escale à Banjul. Une proposition de loi autorisant l’excision a été présentée au Parlement. Si l’indignation a été immédiate et si le projet a été finalement mis en sourdine, la discussion acharnée à laquelle il a donné lieu laisse un goût d’inachevé.
Face à un rejet massif et bruyant dans les sphères féministes et connectées s’est aussi manifesté, en contrepoint, un soutien sans complexe, de moins en moins souterrain et de plus en plus assumé sur la place publique nationale. Une loi pénalisant l’excision avait été votée en 2015 ; c’est elle l’ennemie attaquée par ce projet de révocation. Face au tollé, le projet n’a pas été enterré, juste mis en suspens. Victoire partielle, minimale, et presque en trompe-l’œil, tant elle fait l’impasse sur une réalité qui montre l’impuissance de nos dispositifs législatifs et politiques à contrer certains ancrages traditionnels.
Trompe-l’œil, parce que ce projet de loi est une outrance tant il veut institutionnaliser une pratique déjà répandue en obtenant une bénédiction parlementaire. L’excision – c’est un fait établi – est largement pratiquée en Gambie, au mépris de la loi. Par des circuits clandestins, avec l’assentiment des populations au nom de traditions pluriséculaires, nombreuses sont les filles mutilées et qui continuent de l’être. Elles rejoignent de nombreuses Africaines, des millions, victimes de cette violence.
Ingérences occidentales
Ce constat est doublement inquiétant tant il semblait acquis, pour beaucoup, que les luttes féministes, l’arsenal législatif, les caravanes de sensibilisation n’avaient pas mis fin à cette réalité. Qu’elle s’est même rebiffée, portée par la dynamique des révolutions conservatrices et par la popularité d’un discours qui s’élève contre les ingérences et les injonctions occidentales en redonnant une vitalité à la contre-offensive. Portée, aussi, par l’exploitation habile des canaux institutionnels pour réaliser des coups de force au service d’idées rétrogrades. Cette défaite condamne de nombreuses femmes à être confrontées à des dispositifs informels (et potentiellement formels) de négation de leurs droits les plus élémentaires.
L’excision, son spectre et son sceptre en Gambie vont au-delà de la séquence qui se joue. Nous prenons l’ombre pour la proie. Signe d’une démission collective presque consentie, à enfourcher le cheval d’un combat qu’on ne pourra pas toujours différer : gagner les cœurs et les consciences des Gambiens et pas seulement les leurs, pour que s’impose l’évidence du combat contre l’excision.
par Amadou Ba
L'APPEL AU RASSEMBLEMENT
Nous avons communié et échangé autour du projet de paix pour une prospérité partagée que j'ai eu l'honneur de porter. Nous devons l'élargir à toutes les forces politiques et sociales qui partagent nos ideaux
Après la proclamation des résultats définitifs de l'élection présidentielle du 24 mars 2024 et l'installation officielle du président élu, M. Bassirou
Diomaye Faye, je tiens à renouveler mes sincères remerciements à tous les Sénégalais et à toutes les Sénégalaises.
Chaque acteur de la consultation électorale - electeur, candidat, organisateur, régulateur, superviseur ou observateur, autorités religieuses et coutumières - a parfaitement joué sa partition pour permettre à notre cher Sénégal de briller une nouvelle fois au firmament des nations démocratiques.
Le peuple sénégalais a administré au monde entier une leçon de maturité et de sérénité dans sa volonté de paix et son idéal démocratique, fidèle à sa longue tradition d'hospitalité.
Je réitère aussi mes remerciements au président sortant, le président Macky Sall, pour son œuvre exemplaire à la tête du Sénégal, mais également pour le choix porté sur ma personne en qualité de candidat de la coalition Benno Bokk Yaakaar. J'exprime ma gratitude à tous les leaders et militants de cette grande coalition et celle, plus large, de la majorité présidentielle sortante.
J'adresse mes vives félicitations au président élu, M. Bassirou Diomaye Faye, tout en lui souhaitant une pleine réussite dans sa mission à la tête de l'Etat, au grand bonheur du peuple sénégalais.
Mes chers compatriotes
Pendant plusieurs semaines, nous avons communié et échangé autour du projet de paix pour une prospérité partagée que j'ai eu l'honneur de porter.
Plus d'un électeur sur trois a plébiscité ce projet.
C'est un acquis que nous devons préserver et consolider, car il représente le socle à partir duquel nous devons poursuivre notre action.
Nous devons aussi l'élargir à toutes les forces politiques et sociales qui partagent nos ideaux.
Ensemble, nous le ferons dans notre nouvelle posture d'opposition démocratique et républicaine, respectueuse des institutions, pour préparer les conquêtes prochaines, sur la voie du Sénégal réconcilié, prospère et juste qui demeure l'horizon de mon engagement.
j'exhorte tous les républicains et démocrates de notre pays à une cohésion renforcée et à une solidarité sans faille.
Vive la République !
Vive le Sénégal !
Par Mouhamadou BA
COÛT DE MACKY SALL AUX CONTRIBUABLES SÉNÉGALAIS
Les problèmes financiers ne font plus partie des tracasseries des ex-présidents grâce au décret 2013-125 du 17 janvier 2013 que Macky Sall avait lui-même signé. Le désormais ancien chef de l'État coûtera 120 millions FCFA/an
A la fin de leur mandat, les ex-présidents de la République ne redeviennent pas des citoyens comme les autres. Les problèmes financiers ne font plus partie des tracasseries des ex-présidents grâce au décret 2013-125 du 17 janvier 2013 que Macky Sall avait lui-même signé. Un décret qui leur garantit une généreuse pension, maison de fonction, salaire mensuel, personnel affecté à leur service, assurance maladie pour eux et leur femme et une série d’avantages jusqu’à leur décès. Le décret numéro 2013-125 attribue à tout ancien président un traitement mensuel de 10 millions de FCFA. En guise de dispositif de soutien, mentionne le même communiqué, l’Etat du Sénégal octroie une assurancemaladie étendue au conjoint, deux véhicules, un téléphone fixe, un logement et du mobilier d’ameublement. Selon la présidence, «en cas de renoncement au logement affecté, tout ancien président de la République perçoit une indemnité compensatrice d’un montant mensuel net de 4, 5 millions francs CFA». En plus de cela, «l’Etat du Sénégal prend en charge, à hauteur de 40 millions francs CFA par an, le coût des billets d’avions de chaque ancien président de la République et de son (ses) conjoint(s)». «Tout ancien chef de l’Etat qui décide de s’établir hors du Sénégal peut s’attacher les services de quatre collaborateurs de son choix. Ces derniers sont rémunérés dans les mêmes conditions que les personnels affectés dans les postes diplomatiques et consulaires du Sénégal».
• Macky coûtera 120 millions FCFA/an : Un ex-chef d’Etat du Sénégal a également droit à un aide de camp, des gendarmes pour la sécurité de son logement, deux gardes du corps, un agent du protocole, deux assistantes, un standardiste, un cuisinier, une lingère et un jardinier. Tout ce personnel est directement sous contrat et payé par l’Etat du Sénégal. En tout cas, si on se fie au décret, douze mois d’indemnités mensuelles d’un ex-chef d’Etat sénégalais font 120 millions francs CFA. Rappelons que le président Wade a renoncé au logement de l’Etat. Ce qui lui donne droit à l’indemnité de logement mensuel de 4,5 millions F CFA, soit 54 millions par an.
•Les avantages des anciens présidents français : En France, un document intitulé «rapport et propositions» sur «la situation des anciens présidents de la République» commandité par le président Hollande, en mars 2016, considère comme «revenu inconditionnel» la pension mensuelle payée en espèces à Chirac, d’Estaing et Sarkozy. Les autres avantages attachés à leur statut alimentent la rubrique «dispositif de soutien» qui varie selon que les bénéficiaires l’acceptent ou pas. Tout ancien président est membre du Conseil constitutionnel à condition qu’il accepte d’exercer la fonction. Valéry Giscard d’Estaing a accepté de l’être. Cela lui donne droit à un revenu annuel supplémentaire 113 millions de FCFA. Sarkozy et Chirac jouissent d’une pension brute annuelle de 42 millions de francs (soit 3,5 millions de francs par mois).
• Les pensions d’ex-chefs d’Etat américains et d’ailleurs : Aux Etats-Unis, le Former Présidents Act de 1958 accorde à tout ancien chef d’Etat un revenu annuel brut de 150 000 dollars (81 millions FCFA, soit 6,7 millions de FCFA par mois), en plus du salaire d’un secrétaire équivalant à 96 000 dollars (51,8 millions de FCFA). Dans le rapport sur la situation des anciens présidents français, Didier Migaud et Jean-Marc Sauvé, respectivement premier président de la Cour des comptes et vice-président du Conseil d’Etat, ont fait une «comparaison internationale» relative aux «revenus inconditionnels». Ce traitement équivaut au salaire mensuel et aux «dispositifs de soutien» aux anciens chefs d’Etat dans treize pays européens et nord-américains. Toutefois, selon les auteurs de ce rapport, «les différences de situation selon les pays et la disparité des informations obtenues ont conduit à ne retenir, pour les évaluations ci-après, que des montants nets»
par l'éditorialiste de seneplus, alymana Bathily
POUR LES 100 JOURS DE DIOMAYE FAYE
EXCLUSIF SENEPLUS - Vider définitivement le contentieux entre l’Etat et Karim. Documenter toutes les violences des dernières années. Ériger un monument à la mémoire de victimes de cette période. Quid d'un « ministère de l’Afrique » ?
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 04/04/2024
Dans son premier discours à la nation, le 26 mars, le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye déclarait notamment ceci :
« En m’élisant président de la République, le peuple sénégalais a fait le choix de la rupture pour donner corps à l’immense espoir suscité par notre projet et pour donner corps à ses aspirations ».
Et d’indiquer ses priorités : combattre la corruption, refonder les institutions, œuvrer à l’intégration africaine, répondre aux attentes des jeunes et des femmes et alléger le cout de la vie, tout en prioritisant la réconciliation nationale.
Priorité des priorités : la mise en place du gouvernement qui aura en charge la mise en œuvre du premier programme prioritaire du président de la République.
Le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye ne pourra évidemment pas répondre en 100 jours à toutes les attentes. Les cinq années de son mandat n’y suffiront d’ailleurs pas.
Il pourrait cependant prendre des initiatives fortes en rapport avec ses convictions concernant chacun des domaines prioritaires de son programme de gouvernement.
Ce serait là l’indication d’une volonté de gouverner avec les forces vives du pays et de gérer de manière sobre. On fera attention à l’intitulé des ministères pour en refléter les contenus programmatiques ou les orientations stratégiques.
Que n’érige-t-il pas par exemple un « ministère de l’Afrique et des Affaires étrangères » à la place du traditionnel « ministère des Affaires étrangères » ? Manière de manière de marquer la rupture politique que le régime du Pastef introduit et son engagement déterminé en faveur du panafricanisme
Refonder les institutions.
Le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye a annoncé la refondation des institutions au nombre de ses priorités.
Il s’agit là effectivement d’un chantier prioritaire et important puisqu’il a pour objet à la fois de normaliser le fonctionnement des institutions de la République, de les refonder effectivement et en même temps de promouvoir les principes républicains et démocratiques renforçant les libertés individuelles tout en fondant le vivre-ensemble et la réconciliation nationale.
Le candidat Bassirou Diomaye Diakhar Faye a signé avec l’organisation citoyenne Sursaut National le Pacte National de Bonne Gouvernance basé sur les conclusions des Assises Nationales et les recommandations de la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI).
Il lui ne reste plus qu’à les mettre en œuvre pour assurer à la fois la séparation et l’équilibre des pouvoirs judiciaire, législatif et exécutif, la déconcentration des pouvoirs du Président de la République et la fin de l’hyper présidentialisme, l’indépendance de l’administration publique de la politique, la promotion du service public et de l’intérêt général, l’égalité entre tous les citoyens et l’équité entre les hommes et les femmes.
Lutter efficacement contre la corruption
Le développement effréné de la corruption à tous les niveaux de l’administration publique du fait notamment des premiers responsables de l’Etat et des entreprises publiques, est l’une des principales raisons de la révolte des Sénégalais contre l’ancien régime et de leur adhésion au Pastef.
Rien ne devrait plus entraver la lutte contre corruption maintenant que « le coude » de l’ancien président ne pèse plus sur les nombreux dossiers d’enquête établis par les corps de contrôle au cours de ces dernières années.
Le nouveau régime sera jugé par le peuple sur la manière dont la lutte sera menée : on devra sonner la fin de l’impunité et combattre la corruption active et passive, les détournements de deniers publics et l’enrichissement illicite.
On n’épargnera personne. On devra à ce propos vider définitivement le contentieux entre l’Etat et M. Karim Wade dont l’amende de 138 milliards de francs CFA par la Cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI) est encore en suspens.
Quid de la réconciliation nationale ?
La vérité est le préalable à toute réconciliation comme on le sait.
Il faudra nommer les responsables de ces actes. Il faudra recueillir les témoignages de victimes et les aveux des bourreaux. C’est alors seulement que le processus de réconciliation pourra s’enclencher, que les bourreaux et les victimes pourront se parler pour demander réparation ou accorder le pardon.
C’est à travers tout ce processus que la Nation toute entière pourra se sentir reconciliée avec elle-même. On pourra alors ériger un monument à la mémoire de victimes de cette période sombre de notre histoire pour en perpétuer le souvenir.
Quid de l’allégement du coût de la vie ?
L’augmentation vertigineuse du coût du loyer à Dakar et la hausse régulière des prix des denrées alimentaires partout à travers le pays ont une cause : le laisser faire libéral de ces vingt dernières années qui a réduit drastiquement l’intervention de l’Etat dans le secteur immobilier et pour l’importation et la distribution des produits alimentaires de première nécessité laissé libre cours aux opérateurs privés.
En attendant que ses politiques visant la souveraineté alimentaire et l’industrialisation aboutissent, le Président de la République doit dès à présent introduire la main de l’Etat dans les secteurs de l’immobilier et de la distribution des produits alimentaires de première nécessité.
Pourquoi ne pas ordonner dès à présent la fusion de l’OHLM et la SICAP en une seule entreprise dédiée à la fourniture de logements à prix réduits à Dakar et dans toutes les capitales régionales ? On dotera la nouvelle entreprise d’un capital financier et foncier conséquent et on lui assignera des objectifs de performance précis.
Pour ce qui est de la distribution des produits alimentaires et de première nécessité, pourquoi ne pas revenir au dispositif des années 1970 à 1990, avec une société de distribution alimentaire (SONADIS) qui importe et distribue une certaine quantité de produits pour réguler les prix sur le marché ?
On renforcera dans le même temps l’action du Contrôle économique sur le terrain.
Et de l’emploi des jeunes ?
Il est vrai que la création d’emplois est tributaire du développement économique.
Il est tout aussi vrai cependant que l’Etat peut prendre l’initiative de la création d’emplois quand l’économie n’est pas en capacité de le faire.
C’est ainsi qu’en pleine dépression économique, en 1933, alors que l’Amérique était en proie à un chômage de masse et que la faim sévissait même, le président Franklin D. Roosevelt a initié le New Deal qui a créé à travers une série d’agences de travaux d’intérêt public, en quelques années plus de 20 millions d’emplois.
De la même manière le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye pourrait lancer une initiative nationale (DEFAR SA REEV ?) qui pourrait créer des centaines de milliers d’emplois à travers différentes agences (Service National de Proximité, Agence pour l’Environnement, AGETIP restructurée), par exemple dans les secteurs de l’entretien des infrastructures et des routes, de l’environnement, de la protection de la nature (dont la Grande Muraille Verte) et pour éradiquer l’insalubrité, l’encombrement et l’occupation anarchique des rues et espaces publiques à travers tout le territoire national.
Cette initiative pourrait être financée par les économies réalisées par la réduction du train de vie de l’Etat que la refondation des institutions permettra.
In fine, le président Bassirou Diomaye Diakhaye Faye devra rompre avec la doxa politique et économique et prendre dès les premiers jours de son régime des initiatives audacieuses pour lancer le programme d’activités prioritaires qui déterminera l’orientation et le succès de son quinquennat.
PAR Papa M. Tandian
SÉNÉGAL, ANNÉE ZÉRO
L'exception démocratique n'est pas une fin mais seulement la condition de possibilité de la seule exception qui vaille et qui n'est pas donnée mais est à construire : celle d'un mieux-être pour le plus grand nombre
Les temps politiques sont chamboulés au Sénégal. Les vents tournent. Et les girouettes avec ! Plus sérieusement, le peuple sénégalais vient de manifester à la face du continent et du monde la preuve de sa maturité politique et de la résilience de sa démocratie politique démontrant ainsi que son destin ne se confond ni avec la personnalité d'un homme encore moins avec les machinations machiavéliques d' un président... Ce faisant, il a confirmé la pérennité d'un écosystème politique qui fait l'exception sénégalaise, capable de sanctionner l'exercice du pouvoir et de l'alterner de manière ordonnée envers et contre tout... dans une sous-région aux mœurs démocratiques encore vacillantes et hélas trop souvent sujettes à régression. Il reste donc à présent à la nouvelle équipe entrante du Pastef & compagnie à jouer sa partition et prolonger ce momentum pour un approfondissement de notre vivre-ensemble démocratique encore perfectible à bien des égards. Car à bien des égards, il y a encore matière à faire et à parfaire.
En effet, sous le magistère de Macky nos systèmes de gouvernance politique, économique, sociale ou administrative n'ont hélas opéré que des gains marginaux dans certains domaines si ce n'est régressé lamentablement dans d'autres. Jamais l'État de droit n'a été aussi malmené et nos libertés publiques mises à mal. Le'Projet' (comme disent les Pastefiens) ou sa version plus réaliste de programme de gouvernement devra donc élargir / rectifier ou solidifier les fondements dans certains domaines, voire refonder totalement dans d'autres à un moment charnière de notre histoire. En voici un inventaire non exhaustif.
- En politique, le principe consacré de la séparation des pouvoirs sérieusement chahuté par le pouvoir sortant devra être réhabilité pour davantage renforcer un rééquilibrage nécessaire et une autonomisation accrue entre les pouvoirs de l'exécutif, du législatif et du judiciaire. Y compris la nécessité de sanctuariser les principes d'indépendance des corps de contrôle et du judicaire en consacrant leur autonomie fonctionnelle dans la loi fondamentale qu'est notre constitution.
- L'implication plus vigoureuse d'une presse indépendante et impertinente mais plus professionnelle devra être sauvegardée et consolidée comme
acquis. Sa liberté de blâmer sans entrave ni intimidation rendra plus crédible ses éloges.
- Sur le plan judiciaire, il sera urgent de mettre un terme à une pratique pernicieuse d'instrumentalisation de la justice et des juges comme il en fut le cas hélas trop souvent dans un passé récent ou même lointain. Les décisions de justice devront être exemplaires pour être acceptées du citoyen et le règne de l'impunité ou l'absence de sanctions doivent être proscrits.
- Sur le plan social, la société civile - sous toutes ses formes et dénominations
- devra poursuivre et étendre son rôle de sentinelle et de rempart de nos pratiques démocratiques en renforçant sa mission dans la réédification de l'infrastructure éthique et morale de cette nation qui a beaucoup perdu sous ce chapitre du fait d'un régime qui a cyniquement voulu ' réduire l'opposition a sa plus simple expression' ... Il sera opportun de continuer pour les intellectuels à exercer leur rôle critique, d'agir, d'alerter pour un retour de conscience civique au travers de nouveaux codes d'intégrité applicable à tous ceux qui ont (ou qui aspirent) à la charge de l'autorité publique.
- Sur le plan de la gouvernance économique, il s'imposera l'impérieuse nécessité de refonder les bases d'un cycle vertueux déjà promis mais hélas jamais réalisé. L'économie du Sénégal sous le règne du président sortant (malgré des efforts louables en matière d'infrastructures surtout urbaines) n'a pas seulement souffert d'un taux de croissance (5.3% en moyenne) qui a été insuffisant à faire reculer le niveau de pauvreté ou à créer des emplois nouveaux, elle a aussi subi des pertes énormes liées à la corruption comme en attestent les rapports (pour ceux publies et non 'sous le coude' du PR) des auditeurs publics de la CC ou de l'IGE. Cette gangrène s'était aussi muée en sociodrame avec pour effets néfastes de se substituer au mérite et à l'effort personnels consacrant le culte de l'ostentation et du clinquant ouvrant l'accès de n'importe qui a n'importe quelle sinécure pourvu qu'il soit un affidé loyal et apporteur de voix. Pis la corruption érigée en méthode de prédation a donné cours a bien des dysfonctionnements sous forme de détournements, d'enrichissements illicites, de scandales financiers et d'accaparements fonciers, toutes pratiques qui ont abime et distendu les liens entre l'État et l'intérêt général. Il sera donc primordial de réévaluer notre système d'intégrité national et restructurer sa capacité à prévenir, détecter et sanctionner la corruption et la fraude. La reddition des comptes est une chaîne qui commence par le contrôle, mais qui pour aboutir à des actions concrètes, doit passer par une justice forte, indépendante. De surcroit une approche plus unificatrice des divers organes (CC, IGE, OFNAC etc.) de vérification et de lutte contre la corruption et leur mise sous une tutelle indépendante (constitutionnellement verrouillée) de l'exécutif serait un alignement salutaire aux normes internationales et un gage crédible d'une nouvelle détermination à agir contre la prévarication des comptes publics.
- Au plan des affaires, une transparence restaurée avec des règles claires améliorera l'attractivité du Sénégal pour les flux de capitaux étrangers. Des règles plus aptes à accroitre la prévisibilité de l'interaction dans les pratiques marchandes et à mieux protéger contre les abus de l'autorité administrative ou judiciaire dans les pratiques contractuelles. Ceci n'est pas incompatible avec le désir de mieux protéger nos intérêts nationaux souverains et de revoir certains montages contractuels défavorables à condition que le volontarisme clamé soit informé et assisté par des compétences et une expertise solides afin d'éviter des conséquences fâcheuses et couteuses au trésor public comme par le passé avec A Wade.
Au plan macro-économique. Les enjeux du prochain quinquennat et au-delà pour ce pays tournent autour des risques insuffisamment mitiges sous le président Macky de la gestion d'un modèle de croissance sans emploi mais aussi insuffisamment redistributive, de la formation et de l'insertion des jeunes.
- Le modèle économique retenu vers l'émergence qui a été très orienté vers les infrastructures de mobilité dans sa version PSE devra renouer avec les fondamentaux testés non pas par la théorie mais par l'histoire économique des rares pays (en Asie) de notre ère contemporaine qui ont su définitivement rompre les amarres de la pauvreté et accéder durablement au statut de pays émergents à revenus intermédiaires voire supérieurs.
En effet, la trajectoire économique sans exception de ces pays (Japon, Chine, Corée, Malaisie, Taiwan etc.) qui ont réellement émergé du sous-développement témoigne d'une approche volontariste de politiques publiques gérées par une agence centrale (MITI Japon, EPB Corée du Sud, DB Taiwan etc.) qui toutes invariablement ont consisté en des interventions ciblées autour de priorités structurantes qui ont pour noms : réforme agraire, transformation agricole, promotion industrielle, réforme financière / monétaire. En Asie du Sud et du Nord Est c'est en effet un secteur primaire au foncier réformé et bien ressourcé qui a permis l'autosuffisance alimentaire et la création de richesse et d'épargne menant à une industrialisation, le tout soutenu par un secteur financier semi contrôlé et aligné sur les objectifs de développement sectoriels notamment en matière de politique de crédit et de taux d'intérêts. Au Sénégal une économie agricole reformée et financée par des ressources adéquates, encadrée par une recherche et une formation appropriée sera la clé de voûté de notre souveraineté alimentaire et la base de toute stratégie de création massive d'emplois dans un secteur à forte intensité de travail et a faibles barrières d'entrée. Ce secteur a en effet potentiellement les multiplicateurs d'emploi les plus élevés dans les domaines de l'élevage de l'horticulture, des chaînes de valeur de production de riz, du mil etc. de la pèche sans compter celles en amont de l'agro-transformation. Les autres chantiers connexes de l'industrie manufacturière / pétrolière / services et de la réforme financière (y compris celle nécessaire du franc CFA) devront venir compléter cette approche multisectorielle qui s'appuiera sur des secteurs prioritaires limitativement identifiés et dont la création d'opportunités d'emplois productives et durables devra rester au cœur des interventions. L'économie des hydrocarbures et ses revenus additionnels devront obéir à cette même logique d'orientation vers des projets à forte intensité de main d'œuvre et non pas subventionner inconsidérément la consommation.
- Il restera que pour être viable ces politiques devront aussi s'adosser sur une stratégie d'intégration régionale voire continentale pour opérer au-delà de nos marchés domestiques trop exigus. D'où l'impérieuse nécessité de reconsolider la CEDEAO et de promouvoir la ZLEC à l'échelle du continent.
Enfin une gouvernance économique effective est aussi une gouvernance qui se mesure et s'évalue. Une fonction robuste de suivi et d'évaluation de la performance gouvernementale - rattachée à l'autorité directe du président - lui rendra sa crédibilité et son efficacité. La cacophonie d'une action gouvernementale atomisée autour d'un découpage ministériel pléthorique et incohérent devra être bannie. L'exécution de cette action par des ministères techniques ou agences publiques devra être considérée sans à priori guidée par le seul souci de l'efficacité économique et de l'impact recherché.
Cependant à vouloir égrener ces réformes il ne doit échapper à personne l'autre défi qui réside dans la manière de mener et de combiner ces transformations dont certaines sont complexes. Les promoteurs du 'Projet' opteront ils pour une approche gradualiste de séquençage des mesures de changement, conscients de la nécessaire progressivité des reformes dans un environnement sénégalais à maints égards sous contraintes. Ou au contraire souscriront ils à une vision maximaliste que justifieraient la complémentarité des reformes et l'urgence de la demande sociale qui impose d'aller vite et loin.
Voilà une difficile équation d'économie politique et de politique tout court.
Car en définitive une fois dissipée la griserie de ce séisme politique souhaité par une accablante majorité, la réalité têtue d'un pays pauvre (rang IDH / Nations Unies du Sénégal 169 sur 193 pays) - où les causes structurelles des prémices d'incendie social restent entières - ne disparaîtra pas de sitôt comme par enchantement! Le principe de réalité sera bien le premier écueil à l'entame de l'exercice du pouvoir. Oui hélas l'exception démocratique n'est pas une nourriture terrestre, elle ne se mange pas, elle n'est pas une fin mais seulement la condition de possibilité de la seule exception qui vaille et qui n'est pas donnée mais est à construire : celle d'un mieux-être pour le plus grand nombre.
Ainsi le vote du 25 mars aux allures de plébiscite apparait comme un double cri de désenchantement contre les sortants mais aussi d'espérance et de soif de mieux-vivre pour l'avenir qui est ici et maintenant ! Puisse ce cri resonner pour longtemps dans les têtes et les cœurs des vainqueurs du jour à jamais
épargnés du syndrome d'hubris. Pour que triomphe enfin l'avènement d'un État parcimonieux, un État équitable, un État transparent, pour tout dire un État citoyen. Une singulière opportunité pour ce pays d'être enfin sujet souverain de sa propre histoire. Ne la gâchons pas !
MACRON POINTE LA RESPONSABILITÉ DE LA FRANCE DANS LE GÉNOCIDE DES TUTSIS AU RWANDA
Selon le chef de l'État français, "la France aurait pu arrêter les massacres, mais n'en a pas eu la volonté". Cette déclaration marque un nouveau tournant dans le traitement de cette page controversée de l'histoire
(SenePlus) - Dans un message qui sera publié ce dimanche 7 avril à l'occasion du 30e anniversaire du génocide des Tutsi au Rwanda, Emmanuel Macron ira plus loin que par le passé dans la reconnaissance du rôle de la France, selon des informations rapportées par la présidence française à l'Agence France-Presse (AFP).
Le chef de l'Etat français, qui ne pourra se rendre aux commémorations à Kigali en raison d'un agenda chargé, estimera ainsi que "la France, qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n'en a pas eu la volonté", a rapporté l'Elysée à l'AFP.
Cette déclaration marque un tournant par rapport aux précédents discours du président français sur cette question extrêmement sensible. En mai 2021 à Kigali déjà, Emmanuel Macron avait reconnu les "responsabilités" de la France dans le génocide, qui a fait au moins 800.000 morts entre avril et juillet 1994. Mais il n'avait alors pas évoqué explicitement l'hypothèse selon laquelle la France aurait pu stopper le génocide.
Son nouveau message ira donc plus loin dans la reconnaissance du rôle de la France. "Le chef de l'État rappellera notamment que, quand la phase d'extermination totale contre les Tutsi a commencé, la communauté internationale avait les moyens de savoir et d'agir", a précisé la présidence française.
Cette prise de position d'Emmanuel Macron a été saluée par les associations de défense de la mémoire du génocide rwandais. "Le message rapporté jeudi 'va encore plus loin que le rapport Duclert et que la déclaration qu'il a faite à Kigali'", s'est félicité Marcel Kabanda, président de Ibuka France.
Le rapport d'historiens dirigé par Vincent Duclert avait déjà conclu en 2021 à des "responsabilités lourdes et accablantes" de la France dans le génocide. Emmanuel Macron semble donc aller encore plus loin dans la reconnaissance du rôle de Paris, cherchant selon les observateurs à tourner définitivement la page de cette période tragique.
D'après l'Elysée, le chef de l'Etat réaffirmera dimanche le soutien de la France au peuple rwandais, tout en réitérant l'importance du devoir de mémoire, particulièrement auprès des jeunes générations françaises. Ses propos devraient être suivis de près et marquer encore davantage un rapprochement avec Kigali.