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2 mars 2025
Développement
par l'éditorialiste de seneplus, alymana Bathily
IL FAUT JUBANTI LA PRESSE
EXCLUSIF SENEPLUS - Dévoiement de l’entreprise de presse, précarité du travail, atteinte aux droits des journalistes et techniciens, corruption, bradage des fréquences... sont autant de maux dont il faut impérativement guérir les médias sénégalais
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 19/05/2024
Oui, il faut certainement « jubanti » la gestion du foncier dans ce pays, arrêter l’accaparement sauvage et violent des terres, les enrichissements illicites et la corruption effrénée qui caractérisent ce secteur. Mais il est tout aussi nécessaire et urgent de « jubanti » le secteur de la presse et des médias en général. Il faut adresser la gestion informelle de ses entreprises, l’exploitation éhontée des journalistes.
Il faut mettre fin à l’attribution frauduleuse des fréquences de radiodiffusion par l’intervention de lobbys divers. Mettre fin à la collusion entre la presse et les milieux interlopes des « affaires » et des politiciens véreux. Mettre en place un écosystème susceptible d’assurer la viabilité des entreprises de presse et permettre l’information, l’éducation et le divertissement des Sénégalais en fonction de leurs besoins et intérêts réels. On doit mettre en œuvre pour cela une véritable stratégie de développement des médias.
Le modèle économique de l’entreprise de presse au Sénégal
C’est le modèle économique qu’on a imposé à la presse qui est sans doute à l’origine du mal. Il n’est pas basé ici sur la publicité qui partout ailleurs constitue la source principale du financement des médias.
D’ailleurs la loi qui régit le secteur est vieille de 41 ans. Elle date de 1983 (loi N°83.20 du 28 janvier 1983) et n’a même jamais été suivie d’une loi d’application. Aussi la publicité est-elle captée par des médias et des agences de l’étranger.
Comment dans ces conditions la trentaine de quotidiens à 100 Fcfa qui ne vend en moyenne que 1500 exemplaires par jour, quand le coût du papier représente près de 50 Fcfa, peut-elle s’en sortir ?Comment les 300 radios, les dizaines de télévisions et les centaines de sites en ligne ne peuvent-ils générer suffisamment de revenus pour couvrir leurs charges ? Que représente le Fonds d’Appui à la presse de 1.900.000.000 Fcfa par an, à partager entre tant de bénéficiaires ?
Pourtant le Code de la presse au Sénégal postule que les entreprises de presse sont des entreprises comme les autres, fonctionnant dans des conditions transparentes, tenant une comptabilité régulière, présentant des états financiers certifiés et payant les salaires de leurs employés, engagés contractuellement, selon la convention collective du secteur.
En réalité, seule une poignée de journaux, quatre ou cinq, et de radios, deux ou trois, respectent ces critères et s’en sortent économiquement. Malgré le sensationnalisme des titres, malgré les faits divers croustillants, les revues de presse radiophoniques tapageurs en wolof, malgré les attraits des présentatrices, le bagout tonitruant des éditorialistes des nombreux plateaux et les faits divers people des sites en ligne. La plupart fonctionne dans l’informel, comme 80% des entreprises du Sénégal sans aucun égard pour le Code de la presse et la Convention collective du secteur.
40% des journalistes et techniciens sont des stagiaires et « prestataires », seul 10.5% gagne entre 150 000 Fcfa et 200 000 Fcfa et 86% ne bénéficie ni de couverture maladie ni de cotisation retraite.
Pour survivre, les journalistes se transforment souvent en chasseurs de per diem et en prestataires privés de services journalistiques, hantant les séminaires qui servent repas et frais de déplacement quand ils ne se mettent pas au service de tous ceux qui souhaitent diffuser à moindre frais, ragots, revendications et accusations.
Les directeurs des entreprises de presse quant à eux se transforment bien souvent en agent RP d’une personnalité politique ou religieuse ou d’un entrepreneur dont il s’agit de renforcer l’influence si ce n’est de couvrir les frasques et les combines.
C’est ainsi que bon nombre de titres, de radios, de télévisions et de sites en ligne se sont fait les porte-plume ou les porte-voix de divers barons de l’APR et de Benno Bokk Yakar. Quand ceux-là ne les ont pas créés de toute pièce.
Bradage des fréquences radio électriques et la prolifération des radios et télévisions
Le bradage des fréquences radio électriques et la prolifération subséquente des radios et télévisions constituent l’autre aspect de la situation des médias au Sénégal. Plus de 525 fréquences étaient attribuées en 2022 déjà, le plus souvent de gré à gré, à des personnalités politiques, des autorités religieuses et des « hommes d’affaire ».
Il s’agit là d’un scandale assimilable à l’accaparement du foncier puisque la fréquence radio électrique est une ressource publique limitée et non renouvelable qui relève du domaine public de l’État et dont la cession doit se faire de manière à assurer l’accès équitable de tous les citoyens, à travers des procédures transparentes.
Interpellé par les éditeurs et patrons de presse, l’ancien président Macky Sall avait d’ailleurs dû s’engager à sévir. « J’ai décidé du gel des fréquences non encore exploitées et de l’audit de toutes les fréquences en dormance distribuées par dizaines sans discernement et sans bases légales de par le passé. Les attributaires devront justifier de leur condition d’attribution et de leur éligibilité, du respect de la convention et du cahier de charge applicable à l’exploitation d’un service audiovisuel. Il ne s’agit pas de répression, il s’agit juste de se conformer à la législation et au nouveau cadre… ». C’était en 2015 !
On retira bien 75 fréquences non exploitées mais rien de plus.
Pistes pour jubanti la presse
Dévoiement de l’entreprise de presse, précarité du travail, atteinte aux droits élémentaires des journalistes et techniciens, corruption, atteinte au droit à l’information des Sénégalais, bradage des fréquences, autant de raisons pour « jubanti » la presse.
Il faut considérer en effet que l’information est un bien public. Une presse véritablement libre et indépendante est indispensable pour instaurer et renforcer la démocratie participative que les Sénégalais attendent du président qu’ils ont plébiscité.
Elle est indispensable pour vivifier la culture et renforcer la confiance des Sénégalais en eux-mêmes, pour qu’ils osent entreprendre l’immense œuvre développement national et d’édification d’un panafricanisme des peuples.
Il convient d’abord de revisiter le cadre juridique et réglementaire, notamment le Code de la presse et les procédures d’attribution de fréquences. Ii faudra aussi de toute urgence remiser la loi N° 83.20 du 28 janvier 1983 dont le texte n’a d’ailleurs jamais été accompagné d’un décret d’application, puis élaborer et adopter enfin une loi sur la publicité en phase avec la réalité actuelle des médias et du marché.
Il est également nécessaire de revoir les attributions de l’Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP) ainsi que celles du Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) pour une plus grande participation des journalistes, des techniciens et du public à la régulation. Il convient aussi d’augmenter considérablement le Fonds d’Appui à la Presse en en faisant éventuellement un guichet de la Banque Nationale de Développement Economique (BNDE).
Ce fonds ne devra plus être distribué en espèces sonnantes et trébuchantes qui finissent bien souvent dans les poches des patrons de médias mais plutôt servir à financer le développement des entreprises de presse. Autre prérequis pour « jubanti » la presse : auditer ou publier les audits des entreprises de presse publiques que sont la RTS, Le Soleil et l’APS.
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AFRIQUE 50, LE CRI ANTICOLONIALISTE DE RENÉ VAUTIER
À travers une vision courageuse et une caméra au poing, le réalisateur breton né en 1928 dénonce les crimes du colonialisme français et le pillage des ressources en Côte d'Ivoire
À travers une vision courageuse et une caméra au poing, Vautier dénonce les crimes du colonialisme français et le pillage des ressources en Côte d'Ivoire.
Témoin de son époque, René Vautier a rejoint la Résistance à quinze ans, recevant des décorations pour son engagement. Diplômé de l'Institut des Hautes Études Cinématographiques (IDHEC) en 1948, il a réalisé des documentaires en Algérie, dont "Avoir 20 ans dans les Aurès".
Militant communiste et pionnier d'un cinéma engagé, populaire et indépendant, il demeure un cinéaste de combat jusqu'à sa mort en 2015.
A DUBAÏ, LE PARADIS FISCAL DES BIENS MAL ACQUIS AFRICAINS
Une fuite de données révèle l'ampleur du patrimoine immobilier détenu par les proches de nombreux chefs d'État africains dans cette oasis du Golfe. Des villas de luxe, des gratte-ciel huppés, des biens dont la valeur atteint des dizaines de millions
(SenePlus) - L'enquête "Dubai Unlocked" menée par Le Monde a révélé une fuite de données confidentielle exposant le patrimoine immobilier substantiel détenu par les proches de nombreux chefs d'État africains dans l'émirat de Dubaï. Ces acquisitions de biens de luxe, souvent en décalage avec leurs fonctions officielles, soulèvent des interrogations sur l'origine douteuse des fonds utilisés.
Au Gabon, l'influente Marie-Madeleine Mborantsuo, ex-présidente de la Cour constitutionnelle, fait l'objet d'une enquête française pour "blanchiment de détournement de fonds publics". Selon Le Monde, "3M" et ses enfants auraient dépensé près de 6 millions d'euros en 2013 pour acquérir plusieurs propriétés à Dubaï.
En Guinée équatoriale, les fils du président Teodoro Obiang, Pastor et Teodorin, ainsi que le beau-frère Candido Nsue Okomo, disposent d'un riche patrimoine immobilier à Dubaï, évalué à plus de 14 millions d'euros pour ce dernier. Une enquête espagnole soupçonne M. Nsue Okomo de blanchiment dans une affaire de corruption.
Au Congo-Brazzaville, la belle-fille de Denis Sassou-Nguesso, Nathalie Boumba-Pembe, a acheté une villa de 3,5 millions d'euros en 2018. Son mari, le puissant ministre Denis Christel Sassou-Nguesso, surnommé "Kiki le pétrolier", est soupçonné de détournements liés à la société pétrolière nationale. Le ministre de l'Intérieur Raymond Zéphirin Mboulou a également investi plus de 5 millions d'euros dans l'immobilier dubaïote.
Au Tchad, l'ex-beau-frère du président Idriss Déby, Mahamat Hissein Bourma, a acquis des biens d'une valeur de 14 millions d'euros à Dubaï, coïncidant avec des acquisitions suspectes au Canada. Incarcéré, il dénonce d'autres hauts responsables propriétaires à Dubaï.
L'angolaise Isabel Dos Santos, fille de l'ancien président et première milliardaire africaine, confirme avoir acheté un appartement à Dubaï il y a plus de 10 ans. Accusée de corruption, elle vit désormais dans l'émirat sous le coup d'un mandat d'arrêt international.
Pour les ONG, Dubaï sert de "base arrière" pour ces personnalités cherchant à contourner les réglementations européennes sur les biens mal acquis, grâce à un cadre juridique plus laxiste. La lutte contre ces pratiques reste un défi majeur malgré les progrès réalisés.
par Francis Laloupo
PURE HAINE
Comment expliquer l’interminable maintien en détention du président Mohamed Bazoumr enversé par le coup d’Etat du 26 juillet 2023 ? Ne pas le laisser sombrer dans l’oubli. Il faut réclamer sa libération. Maintenant
Le 10 mai dernier, la Cour d’Etat du Niger a rendu une décision, concernant la levée de l’immunité du président Mohamed Bazoum, en détention depuis le putsch de juillet 2023 dirigé par le commandant de la garde présidentielle, Abdourahamane Tiani. A la demande de ses avocats, l’audience a été renvoyée au 7 juin prochain, afin que «le droit à la défense puisse être pleinement assuré», selon Kadri Oumarou Sanda, le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Niger.Mohamed Bazoum, dirigeant nigérien élu en 2021, qui n’a toujours pas formulé sa démission, est invariablement accusé par la junte au pouvoir, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), de haute trahison, complot contre la sécurité de l’Etat et soutien au terrorisme (sic). Des accusations jugées fantaisistes par nombre d’observateurs et destinées à justifier un coup d’Etat dépourvu de tout motif concevable. Rappelons que le putsch est intervenu en réaction à un éventuel limogeage du commandant de la garde présidentielle, dans un climat de querelle de palais, sur fond de conflit autour de la gestion de la manne pétrolière. Parmi les acteurs de cette guéguerre, l’ex-président Mahamadou Issoufou qui, malgré son départ de la présidence en 2021, n’a cessé de multiplier des manœuvres d’immixtion inappropriée dans les décisions de son successeur…
Une prise d’otage. Comment qualifier autrement le traitement auquel est soumis Mohamed Bazoum? L’homme et sa famille sont séquestrés, à l'intérieur d'une dépendance de la résidence présidentielle, sous haute surveillance, dans des conditions inquiétantes. Après la libération de son fils en janvier dernier, Mohamed Bazoum a été maintenu en détention avec son épouse Hadiza. Coupé de tout contact, à l’exception de son médecin, il connaît, au fil des mois, une détérioration continue de son quotidien. En décembre 2023, la Cour de justice de la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) a, en pure perte, ordonné sa libération. Ses avocats, qui ne peuvent avoir accès à leur client, redoutent un possible désintérêt de la communauté internationale à l’égard cette situation. Un sentiment confirmé par l'un d'entre eux, Reed Brody, qui constate que « Mohamed Bazoum pourrait être imperceptiblement oublié dans les évolutions géopolitiques de la région ». Pour conjurer le risque de l’oubli, le New York Times, dans son édition du 4 mai 2024, décrit, sous la plume d’Elian Peltier, la situation actuelle du désormais ancien président du Niger : « Pendant ses premiers mois de captivité, M. Bazoum a été détenu avec sa femme, leur fils de 22 ans, Salem, et deux travailleurs domestiques, dans la résidence présidentielle. Ils n’avaient pas d’électricité mais pouvaient se promener à l’extérieur de la maison pendant que des gardes et d’autres personnes juchées sur des camionnettes armées les entouraient. D’après un proche de Mohamed Bazoum, la pièce est rapidement devenue un four gigantesque. Les températures qui ont dépassé les 40 degrés à l’extérieur, ont fait peler la peau des captifs. Mme Bazoum a également souffert d’un grave épisode de paludisme. (…) Désormais, les soldats sont postés à l’intérieur de la maison et ont retiré les clés des portes, afin que M. Bazoum ne puisse pas les verrouiller et garantir son intimité. Selon les personnes interrogées dans son entourage, il y a de l’électricité, mais les soldats ont confisqué tous les téléphones… »
Une entreprise de persécution
La séquestration de Bazoum s’est avérée, au fil des mois, une entreprise de persécution. Aux lendemains du coup d’Etat, l’équipe de putschistes a orchestré une campagne de diabolisation du président renversé, l’affublant des pires accusations au point de le présenter, aux yeux d’une opinion intérieure, comme l’auteur de tous les périls nationaux. Dans ce contexte critique, ceux qui, dans le pays n’ont jamais accepté l’élection de Mohamed Bazoum, ont trouvé l’occasion d’assouvir de ténébreuses revanches… Le discours officiel des nouveaux maîtres de Niamey s’est transformé en une chronique de la haine extraordinaire. Une logique de la haine, instaurée après le coup d’Etat, avec la volonté affichée de détruire un homme, et d’effacer le souvenir d’un dirigeant qui avait à peine accompli la moitié de son mandat jugé prometteur sur la scène internationale. A cet égard, rappelons quelques faits marquants de sa présidence, cités par le New York Times : « M. Bazoum a rapidement fait du pays l’un des bénéficiaires les plus privilégiés de l’aide étrangère en Afrique de l’Ouest. Il s’est attaqué à la corruption et a promis d’envoyer plus de filles à l’école, en partie pour limiter les grossesses précoces dans un pays où le taux de natalité est le plus élevé au monde. Il a travaillé en étroite collaboration avec la Chine pour construire un oléoduc qui est le plus long d’Afrique, que la junte a inauguré cette année… » On pourrait ajouter d’autres mérites, tels que la mise en œuvre de mécanismes innovants de lutte contre l’insécurité et l’extrémisme violent, ainsi que de pertinentes projections socio-économiques. Pour ceux qui, depuis longtemps, ont connu Mohamed Bazoum, l’ont vu agir et militer dans l’espace politique nigérien, difficile de comprendre et d’admettre le sort qui lui est fait actuellement.
Quelques mots suffisent pour qualifier cet ancien professeur de philosophie : Fidélité, droiture, loyauté, humilité, sens de l’engagement, haute idée de la chose politique et du service de l’Etat. Militant attaché à ses convictions, aimant les partager, avec un réel souci de la tolérance et de l’écoute de l’autre. Cet homme a toujours manifesté son amour des siens et ses contemporains. C’est donc ce serviteur de l’Etatque des putschistes projettent de supprimer, avec un rare acharnement. Mohamed Bazoum refuse de démissionner. Non pas du fait d’un attrait immodéré pour le pouvoir, mais en raison de l’idée qu’il se fait de l’Etat, de la raisond’Etat, et, partant, de la fonction qu’il a incarnée. En se gardant de démissionner, il continue de représenter la sauvegarde des intérêts collectifs d’un pays où une majorité devenue silencieuse de la population lui a confié les clés de la gestion du pouvoir. Comment alors admettre qu’un petit groupe d’officiers, mus par des motifs inavouables, et agissant au nom de honteuses conspirations, puissent se prévaloir exclusivement du droit de confisquer le patrimoine commun de l’Etat nigérien ?
Alors que l’intention du CNSP de s’installer durablement au sommet de l’Etat ne fait plus de doute, la procédure judiciaire engagée à l’encontre de Mohamed Bazoum a pour seul but de le soustraire durablement de l’espace public. Au regard des accusations alléguées, l’ancien président encourt la peine perpétuelle. La hantise de ses preneurs d’otages : que Bazoum retrouve sa liberté de parole, et livre sa vérité sur les véritables ressorts du coup d’Etat. Quels sont donc ces secrets si bien gardés qui ont amené ses geôliers à ordonnancer cette forme de violence à son encontre ? A en croire Amadou Ange Chekaraou Barou, l’un de ses proches conseillers, « le pouvoir de Tiani repose, en partie, sur lance de la libération immédiate de Mohamed Bazoum, auquel aucun crime ne peut être imputé. Il ne s’agit plus simplement de libérer un homme, mais de le sauver. Par-delà l’indignation que suscite cette affaire, il faut continuer de dire simplement, en tous lieux : libérez Mohamed Bazoum. Maintenant.
Francis Laloupo est journaliste, enseignant en Géopolitique.
L'OMBRE DES ÉTATS-UNIS D'AFRIQUE PLANE SUR LA CRISE BÉNINOISE-NIGERIÉNNE
Jean-Baptiste Placca rappelle l'immense gâchis de l'unité africaine perdue en 1963. Plutôt que de s'unir, les dirigeants choisissent trop souvent "d'écraser leur peuple à huis clos" par cynisme ou cupidité
(SenePlus) - La récente crise diplomatique et économique entre le Bénin et le Niger est un sombre rappel du rendez-vous manqué de mai 1963, lorsque les dirigeants africains auraient dû s'engager sur la voie des "États-Unis d'Afrique". Comme le souligne Jean-Baptiste Placca de RFI, "Voilà pourquoi certains dirigeants, au gré de leurs humeurs, écrasent leur peuple à huis clos et se jouent de la Constitution."
Les deux voisins ont frôlé une guerre économique paralysante pour les exportations pétrolières du Niger, qui transitent par le territoire béninois. Seule l'intervention de la Chine en tant que médiateur a permis de désamorcer un conflit aux répercussions potentiellement continentales. "N'est-ce pas à toute l'Afrique de remercier la Chine?", s'interroge Placca, tout en précisant que Pékin défendait surtout ses propres intérêts financiers colossaux dans les infrastructures pétrolières nigériennes.
Au cœur de cette crise se trouve un schisme ancien et profond entre les deux pays. Comme le décrit Placca, "Comme toujours, sur ce continent, chaque partie s'entête à imputer à l'autre les causes de ses malheurs." Le Bénin accuse la junte militaire au Niger de faire fi de sa souveraineté, tandis que les putschistes nigériens campent sur leur conception de "l'honneur" national.
Cette situation désespérante rappelle la fragmentation post-coloniale de l'Afrique. "Le véritable drame de ce continent est que les États-Unis d'Afrique n'existent même plus en projet", déplore l'éditorialiste. À l'inverse des 50 États sans frontières des États-Unis d'Amérique, l'Afrique reste morcelée en 54 "susceptibilités" nationales prêtes à s'embraser au nom de "la fierté nationale".
Dans une métaphore saisissante, Placca compare les relations entre États africains à celles entre voisins de village, obligés de traverser les cours d'autrui: "La bienséance impose de saluer ceux dont, par nécessité, l'on viole ainsi l'intimité." Cette "bienséance de l'interdépendance" fait cruellement défaut actuellement.
Pourtant, le Bénin a de légitimes griefs face au "mépris" nigérien envers le passage du pipeline pétrolier vital sur son sol. Et inversement, le Niger peut invoquer la sécurité nationale pour restreindre les mouvements à ses frontières. Dans ce climat de "suspicion" mutuelle, l'avenir s'annonce orageux.
En somme, cet éditorial percutant rappelle l'immense gâchis de l'unité africaine perdue en 1963. Plutôt que de s'unir, les dirigeants choisissent trop souvent "d'écraser leur peuple à huis clos" par cynisme ou cupidité. La Chine a pu temporairement éteindre ce feu de brousse béninois-nigérien. Mais jusqu'à quand ?
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LES FINANCES PUBLIQUES EN PÉRIL
Abdou Karim Sock dénonce les déficits abyssaux, une dette exponentielle et des infrastructures inadaptées sous Macky Sall. Selon lui, les caisses de l'Etat sont vidées par une politique d'endettement massif au profit de projets pharaoniques sans viabilité
Dans un réquisitoire sans concession, l'expert en gestion des finances publiques Abdou Karim Sock a dressé un état des lieux alarmant de la situation économique et budgétaire héritée du régime de Macky Sall, lors de son passage dans l'émission "Objection" de Sud FM ce dimanche.
S'exprimant dans le cadre d'un débat sur le nouveau "Projet Souverain" porté par le président Bassirou Diallo, M. Sow a fustigé la gouvernance financière de l'ancien régime, n'épargnant aucun détail chiffré pour étayer son constat accablant.
"Les finances publiques sont très mal en point", à tonné d'emblée l'ancien cadre du ministère des Finances, citant des déficits budgétaires et commerciaux abyssaux, une dette publique à 73% du PIB dépassant largement les normes communautaires, et des tensions de trésorerie équivalente à un besoin de financement quotidien de 5 milliards F CFA.
Selon lui, cette situation découle directement des "options politiques" prises par l'ex-président Sall, à savoir le financement de tous les azimuts d'infrastructures pharaoniques par l'endettement massif, au détriment du secteur privé national relégué au deuxième plan.
"Le PSE a privilégié des projets clés-en-main réalisés par des entreprises étrangères, excluant complètement le privé sénégalais", a déploré M. Sock, donnant l'exemple du BRT à 300 milliards ou des stades de Diamniadio adjugés à des turcs.
Pis, ces réalisations n'auraient selon lui aucune viabilité économique compte tenu de l'absence d'études de faisabilité et de planification préalable dignes de ce nom. L'expert n'a pas plus manqué d'épingler le défaut de sincérité budgétaire, avec un budget 2024 entaché d'irrégularités remettant en cause sa constitutionnalité selon lui.
Face à ce sombre constat, Abdou Karim Sock a plaidé pour des réformes d'envergure portées par le nouveau "Projet Souverain" : rationalisation rigoureuse des dépenses publiques, recouvrement effectif des impôts dus, remise à plat des subventions et renégociations de contrats publics et d 'emprunts.
Mais désavouant toute attente de changement à court terme, il a appelé les Sénégalais à la patience, jugeant qu'il faudra "2 à 3 ans" au moins pour commencer à ressentir les effets concrets de cette nouvelle politique économique.
"Le projet c'est un mandat de 5 ans, il faut du temps pour corriger les déséquilibres hérités avant de voir les fruits semés", a prévenu M. Sock, tout en exhortant les autorités à travailler dans la transparence et le respect des normes de bonne gouvernance.
LE MIRAGE DES PARCHEMINS
Si les diplômes envahissent de plus en plus les CV des politiques et hauts fonctionnaires sénégalais, leur valeur réelle est loin d'être assurée. Car derrière les belles signatures, les compétences concrètes et l'expertise de terrain sont parfois absentes
Le culte des diplômes semble devenir l'élément central pour nos autorités, dans la nomination aux postes de ministres et de directions des entreprises publiques. Les titulaires de ces diplômes sont souvent perçus comme les mieux préparés aux postes de responsabilités et à affronter les défis complexes de la gouvernance moderne. ‘’EnQuête’’ jette un regard critique sur ce phénomène.
Doctorats, PHD, MBA, DESS, Master II… La possession de ces différents sésames semble être une condition sine qua non pour être nommé dans ce nouveau gouvernement. Le diplôme n’est plus une présomption de connaissance, mais une finalité en soi dans un pays où le statut social et la légitimité se mesurent à l'aune d’un curriculum vitae bien rempli. Les partisans de l’ancien président Abdoulaye Wade aimaient le présenter comme le chef d’État le plus diplômé du Caire au Cap.
En effet, de nos jours, le Sénégal traverse une période où les titres académiques sont devenus des symboles de réussite sociale et de compétence professionnelle. Le nouveau gouvernement illustre cette tendance, en promouvant des qualifications académiques élevées pour toute nomination à des postes clés. Les titulaires de ces diplômes sont souvent perçus comme les mieux préparés pour affronter les défis complexes de la gouvernance moderne.
Cependant, cette course aux diplômes soulève des questions sur la véritable nature de la compétence et de l'efficacité dans la gestion des affaires publiques. Pour le journaliste, Moustapha Mbaye, ‘’le pouvoir discrétionnaire du président de la République est souvent téléguidé par d'autres considérations socioculturelles. Le diplôme ne suffit pas, il n'est qu'un justificatif au plan hiérarchique. De ce fait, la confiance, la proximité avec le chef et l'apport politique comptent beaucoup. À cet effet, le mérite inclut des paramètres qui exposent le choix final à des critiques’’, a-t-il déclaré.
Pour beaucoup de citoyens, d'un côté, cette exigence de qualifications élevées pourrait conduire à une Administration publique plus compétente et mieux formée. Les titulaires de diplômes avancés apportent souvent une expertise spécialisée et une capacité analytique précieuse, pense Fatou M. Guèye, assistante de direction.
Cependant, cette approche présente également des limites. La surévaluation des diplômes peut éclipser des compétences tout aussi importantes, comme le leadership, l'innovation et l'expérience pratique. Elle peut également engendrer une élite technocratique déconnectée des réalités et des besoins de la population, analyse un assistant de ressources humaines dans un cabinet situé sur la VDN, B. Fall.
Pour un gouvernement réellement efficace, il est important de trouver un équilibre entre les qualifications académiques et les compétences pratiques. La reconnaissance des expériences de terrain, des capacités de gestion et des compétences interpersonnelles est essentielle pour compléter la formation académique des responsables publics, conseille-t-il.
Oumou Niang : ‘’Le recrutement dans l’Administration est trop politisé.’’
Contrairement au secteur public, le secteur privé sénégalais se distingue par des procédures de recrutement beaucoup plus rigoureuses et basées sur le mérite. Les entreprises privées suivent généralement des processus de sélection stricts, comprenant des évaluations techniques, des entretiens approfondis et des vérifications de références.
Directrice des ressources humaines dans une société de la place, Oumou Niang considère que le recrutement dans l’Administration est trop politisé. ‘’Le secteur privé est plus rigoureux que la Fonction publique où les recrutements se font sur la base du clientélisme politique, du lobbying ou de la familiarité… Les compétences ne sont pas les seuls critères. Alors que dans les structures privées, le mode de recrutement obéit à une procédure de sélection, de test écrit et d’entretien’’, soutient-elle.
Elle poursuit qu’il faut aussi une période d’essai de deux à trois mois pour un contrat.
Une thèse que confirme Doudou Diamé qui a postulé à plusieurs reprises dans une multinationale anglophone spécialisée dans la sécurité. ''J'ai été éliminé trois fois après avoir réussi les tests préliminaires et des cas pratiques... Ce n’est pas facile d'entrer dans ces boîtes ; elles sont exigeantes’’, nous confie-t-il.
En effet, les entreprises privées mettent l'accent sur les compétences techniques et les expériences professionnelles pertinentes. Les candidats doivent souvent passer par plusieurs étapes de sélection, y compris des tests de compétences, des entretiens comportementaux et des évaluations de performance. Ce processus rigoureux assure que les employés recrutés sont bien qualifiés pour les postes proposés, favorisant ainsi la productivité et la compétitivité des entreprises.
Un canevas très rare dans l’Administration. Pour expliquer cette dichotomie, le journaliste Moustapha Mbaye relève la différence qui existe entre ces deux mondes. ‘’L’Administration a une démarche différente de celle du privé qui n'est pas pris au piège par la politique, même si d'autres considérations sociologiques sont prises en compte. Le diplôme est la porte d'entrée, mais la compétence et le résultat demeurent les racines qui vous permettent de mieux vous implanter dans l'entreprise’’.
L'ENA et les corps militaires et paramilitaires…
Le plus grave dans cette pratique se trouve dans la Fonction publique locale (municipalité et mairie de ville, conseil régional ou départemental) où ‘’le clientélisme politique excessif a étouffé dans l’œuf toute compétence’’, nous confie un secrétaire municipal dans l’anonymat.
Malgré ce contexte de clientélisme, certaines institutions sénégalaises continuent de promouvoir des concours basés sur le mérite, garantissant ainsi une certaine transparence et équité dans le recrutement. L'École nationale d’Administration du Sénégal (ENA) est un exemple phare de cette méritocratie. Les concours d'entrée dans cette école administrative sont rigoureux et sélectifs, attirant les meilleurs talents du pays. Ces concours garantissent que seuls les candidats les plus qualifiés, ayant démontré leurs compétences académiques et professionnelles, accèdent à des postes dans la haute Administration publique.
Les recrutements dans les corps militaires et paramilitaires sont également basés sur des concours stricts et des critères de sélection rigoureux. Ces processus de recrutement sont conçus pour identifier les candidats les plus aptes physiquement et intellectuellement, assurant ainsi un haut niveau de professionnalisme et d'efficacité au sein des forces de défense et de sécurité.
Toutefois, la promotion à certains grades supérieurs entraine des guéguerres et des frustrations dans l’élite martiale.
Avec la promesse des appels à candidatures qui n’est pas encore tenue, le mode de recrutement dans la Fonction publique sénégalaise est toujours décrié par certains citoyens pour ses pratiques clientélistes. Pour eux, cette forme de favoritisme où les emplois publics sont distribués en fonction des affiliations politiques plutôt que des compétences et du mérite est une réalité persistante qui compromet l'efficacité et l'intégrité des institutions publiques. C’est pourquoi d’aucuns pensent que ces pratiques peuvent saper la méritocratie et alimenter un sentiment d'injustice parmi les citoyens.
Elles peuvent également engendrer une inefficacité bureaucratique, car les compétences professionnelles sont souvent négligées au profit de la loyauté politique. Le recrutement dans la Fonction publique sénégalaise est marqué par un dualisme frappant. D'une part, le clientélisme politique continue de prévaloir, entravant le développement d'une administration publique efficace et compétente. D'autre part, des concours méritocratiques comme ceux de l'ENA et des corps militaires et paramilitaires offrent des lueurs d'espoir pour un système de recrutement plus équitable.
En parallèle, une partie du secteur privé, avec ses procédures de sélection strictes et basées sur le mérite, pourrait servir de modèle pour réformer les pratiques de recrutement dans la Fonction publique. Une telle réforme serait essentielle pour renforcer l'efficacité des institutions publiques et restaurer la confiance des citoyens dans l'Administration. Singapour est un exemple patent.
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SONKO ANNONCE UN CHANGEMENT DE PARADIGME ÉDUCATIF
Langues locales dès la maternelle, plus de souplesse dans les filières, renforcement de l'anglais, réformes des programmes scolaires trop éloignés des besoins réels... Le Premier ministre dévoile ses ambitions de transformation de l'école au Sénégal
Le Premier ministre Ousmane Sonko a clairement affiché samedi ses ambitions pour refonder en profondeur le système éducatif sénégalais. Lors du Conseil interministériel consacré à cette question cruciale, il a martelé que "les Sénégalais doivent surtout s'éduquer, c'est essentiel pour le capital humain".
Dans un discours volontariste, Sonko a dressé un constat sans concession : "Nous connaissons les défis, ils sont colossaux que ce soit pour les infrastructures, les ressources humaines ou l'accompagnement social. Nous ne pouvons réaliser nos objectifs de développement sans résorber ces manques ".
La réforme phare annoncée est l'introduction généralisée des langues nationales dès la petite enfance avant d'apprendre le français et l'anglais. "Une partie de notre retard s'explique par le fait que nous voulons à bas âge imposer à nos enfants de s'alphabétiser dans des langues qu'ils ne peuvent pas", a martelé le Premier ministre, citant son "mentor" le président Macky Sall pour qui c'est "une souffrance très chère".
"Il ya que l'Afrique qui emprunte des langues étrangères pour essayer de les imposer. On perd entre 8 et 13 ans pour que l'enfant essaie de posséder cette autre langue, alors qu'au moment où il va à la maternelle il parlait déjà sa langue maternelle", a-t-il insisté.
L'apprentissage de l'anglais, "langue de communication internationale", sera également renforcé selon Sonko, mais sans faire fi des langues locales qui sont "une richesse et non un appauvrissement".
Autre chantier d'envergure, une révision en profondeur des programmes scolaires jugés trop chargés et éloignés du pragmatisme. "On met tout et rien finalement. Je me demande parfois à quoi a servi tout ce que j'ai appris du primaire à l'université", a lâché le chef du gouvernement.
Il a également plaidé pour plus de souplesse dans les filières, prenant l'exemple d'"élèves sortis avec un bac littéraire mais qui se sont retrouvés à faire des études de comptabilité ou d'économie appliquée".
Au passage, Sonko a lancé une pique aux "traditions héritées", se disant prête à s'inspirer de "modèles inspirants" à l'étranger comme au Japon ou au Rwanda. "Il faut sortir de notre zone de confort", at-il exhorté.
Dernier dossier brûlant, la nécessité de lutter contre "les négligences, voire les fraudes" dans la délivrance d'état civil, un "phénomène" auquel il veut "mettre fin définitivement avec fermeté".
par Moussa Sylla
POURQUOI DEVONS-NOUS LIRE ?
Je lance un plaidoyer fort en faveur des livres, car je sais qu’ils nous permettront de changer notre vie. Faisons le choix de lire, tout lire, même les livres qualifiés d’hérétiques. C’est ainsi que nous développerons la faculté de concentration
Les mémoires d’Abdoulaye Bathily, Passion de liberté, sont un pur délice de sagesse, d’érudition, d’élégance littéraire. J’ai pris plaisir à lire ce livre d’un trait, et très souvent, à le reparcourir à mes heures perdues, tant il contient des passages édifiants et inspirants.
Une histoire m’a particulièrement marqué, dans ces mémoires. Sa réussite au baccalauréat, dans des conditions qui montrent l’importance de la résilience.
Abdoulaye Bathily a été exclu de l’école pour mouvement séditieux (grève, insubordination). Aucune école ne voulut ensuite l’accepter, parce que des instructions avaient été données dans ce sens par le gouvernement. N’étant pas né dans une famille aisée, il n’avait pas les moyens de s’inscrire dans une école privée. Aussi décida-t-il de tenter sa chance au baccalauréat en tant que candidat libre.
Il travailla avec acharnement pour obtenir son baccalauréat, parallèlement à son emploi à l’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN). Le décès de son papa, quelques jours avant l’examen, ne le détourna pas de ses objectifs, car pour lui, lui rendre hommage revenait à réussir au baccalauréat, tant son père avait insisté pour qu’il étudiât. Il atteignit son objectif en obtenant le diplôme avec la mention Bien.
À la lecture de ce passage, je m’arrêtai pour me poser des questions : comment certaines personnes, devant certaines situations, se métamorphosent-elles pour développer leur potentiel ? Elles ne se plaignent pas, elles n’attribuent pas leurs difficultés du moment à d’autres et prennent la responsabilité de leur destin. D’autres, cependant, se plaignent, accusent le monde entier, ne se demandent pas : « Comment puis-je améliorer ma situation, que dois-je faire dans ce sens ? »
Telle est la magie des livres ; ils sont un moyen de s’élever, ils représentent la voie par excellence pour retrouver espoir et apprendre des devanciers. La lecture de biographies et de mémoires me conforte toujours sur ce point de vue. Tandis que la plupart des gens pensent que la trajectoire des personnes célèbres est linéaire, une lecture attentive de leurs mémoires ou biographies révèle que tel n’est pas le cas.
Très souvent, elles ont connu ces doutes et découragements qui sont des choses normales dans toute existence humaine. Cependant, la différence entre les personnes qui atteignent leurs objectifs et s’élèvent au sommet et celles qui connaissent un destin moyen est souvent la persistance ou le renoncementface aux difficultés.
Quand je discute avec des personnes plus jeunes que moi, je mets toujours l’accent sur l’importance de la lecture. Je leur conseille, si elles veulent changer positivement leur vie, de lire, beaucoup, et tout lire.
Avec l’avènement puis la prépondérance des réseaux sociaux, nos cerveaux sont en train d’être remodelés. Ils sont en proie à une attention et à une concentration faibles, à l’ennui persistant. Or, la pensée en profondeur facilite grandement la réussite, comme le défend Nicolas Carr dans son livre TheShallows, ou encore Cal Newport dans son livre Deep Work, sous-titré, Retrouver la concentration dans un monde de distractions.
Dans son livre précité, Cal Newport écrit : « Il est important de mettre l’accent sur l’omniprésence en profondeur chez les personnes influentes, car cela contraste violemment avec le comportement de la plupart des travailleurs du savoir — un groupe d’individus qui est en train d’oublier ce que peut apporter le fait d’approfondir les choses. »
Cette pensée de Cal Newport montre ce qu’il faut faire pour progresser dans sa carrière. C’est adopter délibérément la pensée profonde, la réflexion, refuser la superficialité. L’acquisition de ces qualités est facilitée par les livres. Dans ce sens, ils permettent d’accélérer sa carrière et d’atteindre plus facilement ses objectifs.
Les périodes les plus fécondes de ma vie ont été celles où j’ai adopté délibérément la réflexion profonde. Pendant des années, j’étais absent de tous les réseaux sociaux. Ce furent des années très productives, pendant lesquelles j’ai beaucoup publié et acquis les bases me facilitant l’écriture. Je suis revenu aux réseaux sociaux, mais m’évertue à ne pas me laisser dominer par eux. La lecture est l’une des armes favorites pour y parvenir.
Aujourd’hui, je déplore que le Sénégal ne dispose toujours pas d’une bibliothèque nationale. Dans un pays d’écrivains talentueux, cela est un scandale. Je n’ai rien contre le sport, que j’adore, mais qu’il y ait autant de stades et une arène nationale pour la lutte mais qu’il n’y ait toujours pas de bibliothèque nationale montre que notre pays ne se donne pas les chances de se développer. Se doter d’une bibliothèque nationale serait un énorme symbole, montrant que le Sénégal a compris que dans le monde d’aujourd’hui, le savoir prime, et un pays qui y investit avance(ra) plus rapidement.
Le Sénégal devrait également faciliter l’accès aux livres en construisant, comme je l’ai écrit plus haut, une bibliothèque nationale et en dotant ses terroirs de bibliothèques. Cela démocratisera le livre et contribuera à améliorer l’égalité des chances dans notre pays. Parfois, si les jeunes ne lisent pas, c’est parce qu’ils n’ont pas les moyens d’acheter des livres. Ces derniers coûtent cher et ne sont pas à la portée de tout le monde. Je me rappelle qu’il y a quelques années, je cherchais les livres qui me plaisaient sur des sites internet douteux, car je n’avais pas toujours les moyens de les acheter.
Si l’accès aux livres n’est pas facilité au Sénégal, l’inégalité des chances y persistera, avec ceux et celles qui ont les moyens de s’en procurer et ceux et celles qui ne les ont pas. Le devoir de l’État est d’y remédier, afin que chaque personne qui veuille lire puisse le faire.
À un niveau individuel, nous devons comprendre les bénéfices que nous apportera la lecture. Elle nous permettra d’avancer plus rapidement dans notre carrière ou dans notre projet d’entrepreneuriat, de devenir de meilleures personnes, tolérantes et ouvertes d’esprit. Je soupçonne que les lecteurs sont en moyenne plus tolérants que les non-lecteurs.
La sirène des réseaux sociaux est tentante. Ils donnent accès aux gratifications instantanées, au neuf. Mais de là vient leur danger. Ils nuisent à ces qualités primordiales à la réussite que sont la pensée profonde, la réflexion délibérée, la capacité de s’ennuyer. Leurs fondateurs, connaissant leurs risques, refusent leurs conséquences négatives pour eux et leurs enfants en se déconnectant. Que font-ils à la place ? Ils lisent.
Suivons leur exemple et lisons. Les civilisations prospères sont des civilisations de savoir, de connaissance. Les personnes les mieux rémunérées aujourd’hui sont celles qui maîtrisent le mieux leur domaine. Cela a un coût, comme la gratification différée. Dans le cas du livre, ses effets positifs ne se remarqueront pas d’emblée. Ils prendront du temps, mais quand ils commenceront à se manifester, nous penserons que nous aurions dû lire davantage.
Si tout le monde passe son temps libre à surfer sur les réseaux ou à regarder la télévision, il n’y a aucun avantage comparatif si nous aussi le faisons. Cependant, si nous choisissons la concentration et refusons la distraction que facilite le fait de surfer sur internet, nous nous donnons des avantages qui seront décisifs, nous distingueront et faciliteront l’atteinte de nos objectifs.
Je lance un plaidoyer fort en faveur des livres, car je sais qu’ils nous permettront de changer notre vie. Faisons le choix de lire, tout lire, même les livres qualifiés d’hérétiques. C’est ainsi que nous développerons la faculté de concentration et acquerrons la capacité de tolérance. Cela vaut un essai, dès maintenant.
À nos livres !
Moussa Sylla est auteur du livreLa conformité bancaire au Sénégal et dans la zone UMOA.
LA HAVANE RÉCLAME À WASHINGTON SON RETRAIT DE LA LISTE DES COMMANDITAIRES DU TERRORISME
Le ministère cubain des Relations extérieures indique que Cuba, non seulement ne commandite pas le terrorisme international, mais qu’elle en est victime, y compris du terrorisme d’État, comme le sait pertinemment l’administration américaine - DÉCLARATION
Alors qu'il n'a pas été inclus dans le dernier rapport américain, Cuba reste classé comme Etat "commanditaire du terrorisme" par les Etats-Unis. Dans sa déclaration, le ministère cubain souligne le caractère arbitraire et infondé de cette désignation.
"Déclaration du ministère cubain des Relations extérieures
D’après des informations officielles en provenance des Etats-Unis, le secrétaire d’État a, le 15 mai 2024, remis au Congrès une nouvelle mouture d’un des rapports ciblant normalement des pays, d’une manière arbitraire, sans le moindre mandat ni la moindre reconnaissance de la communauté internationale. En l’occurrence, ce rapport liste quatre pays qui, censément, « ne coopèrent pas à fond avec les efforts antiterroristes des Etats-Unis durant l’année civile 2013 ». À la différence des années précédentes, Cuba ne fait pas partie de cette liste calomnieuse.
N’empêche que le département d’État continue de la maintenir, comme État censément « commanditaire » du terrorisme international, sur cette liste absolument unilatérale, dénuée de tout fondement, qui ne vise qu’à calomnier et qui sert de prétexte à l’administration étasunienne pour adopter des mesures économiques coercitives contre des États souverains, comme celles qu’elle applique impitoyablement à notre pays.
Or, non seulement le peuple cubain et de nombreux gouvernements latino-américains et caribéens, mais des organisations politiques, sociales et religieuses et différents hommes politiques des Etats-Unis ne cessent de réclamer haut et fort, de manière réitérée, que l’administration étasunienne rectifie cette injustice.
En effet, il est absolument clair et évident que Cuba, non seulement ne commandite pas le terrorisme international, mais qu’elle en est victime elle-même, y compris du terrorisme d’État, comme quiconque s’intéresse à la question peut le constater, et comme le savent pertinemment l’administration étasunienne, son département d’État, sa police et ses agences de renseignements, qui savent tout autant – puisque c’est la raison d’être de cette liste – les extraordinaires préjudices que causent à l’économie cubaine les mesures, les actions et les rétorsions qui se déclenchent automatiquement contre tout État inscrit sur cette liste, que ce soit vrai ou faux.
Cuba – et ce n’est pas tout de le reconnaître – coopère à fond non seulement avec les Etats-Unis, mais avec l’ensemble de la communauté internationale. C’est là une vérité bien connue, même si l’on tente de confondre l’opinion publique. Le président des Etats-Unis dispose de toutes les prérogatives requises pour agir honnêtement et faire ce qui est correct."