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2 décembre 2024
Développement
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THIAGO, LE VILLAGE SACRIFIÉ AUX PORTES DU LAC DE GUIERS
Les habitants privés d'un accès décent à l'eau potable, sont contraints de puiser leurs maigres ressources dans les eaux insalubres du lac voisin, malgré la proximité avecla principale réserve d'eau douce du Sénégal
À quelques encablures du majestueux Lac de Guiers, principale réserve d'eau douce du Sénégal, le village de Thiago étouffe, frappé par une cruelle ironie. Ses habitants, privés d'un accès décent à l'eau potable, sont contraints de puiser leurs maigres ressources dans les eaux insalubres du lac voisin.
Un château d'eau dérisoire dessert péniblement les quelques 6 000 âmes de cette localité oubliée. Conséquence : les femmes vaquent inlassablement aux rives malsaines pour leur lessive, tandis que les enfants s'abreuvent d'une eau croupie, source de diarrhées récurrentes et d'infections respiratoires.
L'unique poste de santé, démuni et sous-équipé, lutte comme il peut contre ce fléau sanitaire. "Je consulte 300 malades par mois, seule avec une sage-femme", déplore une infirmière dépassée.
Pourtant, ce village paradoxal pourrait être prospère. Ses ressources naturelles - pêche, agriculture, élevage - en font un grenier potentiel. Mais les infrastructures de base manquent cruellement, à l'image du collège sans salles de classe dignes de ce nom.
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LES MOTS DE LA RECONQUÊTE
Autour de thématiques comme le foncier, la monnaie ou les bases militaires étrangères, la série "Où va le Sénégal" animée par l'étudiant-chercheur en Histoire à l'Ucad Florian Bobin, aura redessiné sur la trajectoire démocratique du pays
C'est le post-scriptum riche en réflexions d'une série phare qui a rythmé les débats ces derniers mois au Sénégal. "Où va le Sénégal ?", animée en 10 épisodes par l’étudiant-chercheur en Histoire à l'Ucad Florian Bobin, aura donné la parole à 25 diverses - chercheurs, artistes, militants, journalistes - pour mettre des mots sur la trajectoire d' un pays en pleine reconquête démocratique.
Dans ce dernier échange aux allures de bilan, Abdou Aziz Ndao, étudiant en littérature africaine et membre du Front Révolutionnaire Anti-impérialiste Populaire et Panafricain (FRAPP), analyse avec lucidité le sens de cette initiative suscitée par la dynamique organisation de gauche.
"C'était extrêmement important pour une organisation comme le FRAPP de tenir ces discussions, afin de remettre sur la table les problèmes cruciaux de souveraineté nationale", souligne le jeune militant. A l'heure où le Sénégal émerge d'années de dérive autoritaire, ces échanges permettront de "faire évoluer le processus démocratique" par la vertu du débat public.
Au cœur des discussions : des thématiques brûlantes comme le foncier, la monnaie, les bases militaires étrangères ou encore l'éducation populaire. Des sujets majeurs qui « continuent de troubler le sommeil » des peuples africains en quête de souveraineté réelle. Au-delà des constats, un message fort est rédigé aux nouvelles autorités : s'inspirer de l'héritage des luttes passées pour apporter les changements nécessaires.
Quelques épisodes de la série sont disponibles ci-dessous :
Alioune Tine prône la nécessité impérieuse d'un audit organisationnel global du système administratif sénégalais. Une opération de déminage indispensable pour "identifier les pathologies" d'une bureaucratie minée par les dérives et la corruption
C'est un plaidoyer à la fois lucide et ambitieux qu'a livré Alioune Tine, fondateur d'Afrikkajom Center, dans l'émission dominicale "Point de Vue" sur la RTS ce 5 mai 2024. Invité à s'exprimer sur les premiers pas du nouveau régime, l'expert des Nations Unies a dressé un constat sans concession des défis majeurs auxquels le Sénégal doit faire face, tout en traçant des pistes audacieuses pour renouer avec l'espoir.
Son message phare : la nécessité impérieuse d'un "audit organisationnel global" du système administratif sénégalais. Une opération de déminage indispensable pour "identifier les pathologies" d'une bureaucratie minée par des années de dérives et de corruption systémique. Seul ce préalable, juge M. Tine, ouvrira la voie à de véritables réformes structurelles et à l'avènement d'un "État neutre et impartial".
L'orateur a par ailleurs salué les premières mesures prises, notamment en matière de bonne gouvernance, de reddition des comptes et de protection du littoral. Mais il appelle sans détour à s'attaquer frontalement à l'urgence que constitue l'emploi des jeunes et la vie chère, en renégociant au besoin les accords internationaux défavorables.
Au chapitre des réformes politiques, Alioune Tine prône une cure de jouvence de la démocratie sénégalaise. Exit l'hyper-présidentialisme ; place à une justice transitionnelle, une participation citoyenne accrue et une "démocratie délibérative". Une remise à plat indispensable après les années de dérive qui ont mené aux tragiques événements de 2021-2024.
Mais c'est peut-être sur la scène internationale que l'analyste voit le plus grand défi à relever pour le Sénégal. Face à "l'impuissance des puissances" désormais patente dans la région, il incite le nouveau régime à embrasser un rôle d'équilibriste diplomatique. Une mission à laquelle Dakar serait idéalement positionnée pour apporter sa pierre, du Mali au Burkina Faso en passant par le Niger, contribuant à "recoller les morceaux" face à la déferlante terroriste.
LA PROMESSE TRAHIE DU RETOUR DES TRÉSORS D'AFRIQUE
Depuis l'engagement de Macron en 2017, l'attente se fait interminable pour les pays du continent. Dans une tribune cinglante, des responsables du Bénin, du Nigeria et du Sénégal dénoncent le "choc" d'un nouveau report de la loi sur les restitutions
(SenePlus) - Dans une tribune publiée dans Le Monde le 30 avril 2024, des responsables de musées et de la restitution du patrimoine du Bénin, du Nigeria et du Sénégal ont exprimé leur profonde déception face au report de la loi promise par Emmanuel Macron en 2017 pour faciliter les restitutions d'œuvres d'art africaines.
"Le report de la loi promise est pour nous un choc", ont écrit Babatunde E. Adebiyi, Fatima Fall Niang et Alain Godonou, déplorant que seuls 27 biens aient été rendus depuis les engagements du président français il y a sept ans.
En 2017 à Ouagadougou, M. Macron avait affirmé : "Je veux que, d'ici cinq ans, les conditions soient réunies pour des restitutions temporaires ou définitives du patrimoine africain en Afrique." Cette déclaration, suivie du rapport Sarr-Savoy en 2018, avait soulevé un immense espoir chez les pays francophones dont certains trésors majeurs se trouvent encore en France depuis la colonisation.
Cependant, les critiques du Conseil d'État français sur le projet de loi, révélées par Le Monde, soulignent de nombreux vices juridiques. Le Conseil estime notamment que le projet "contrevient à un principe fondamental" en ne justifiant pas les restitutions par "un intérêt public supérieur".
"L'intérêt culturel des peuples n'est-il pas un motif impérieux, un intérêt général supérieur ?", s'interrogent les auteurs, citant le Pacte international de 1966 sur les droits civils et politiques ratifié par la France. Ils appellent à "fonder une éthique relationnelle repensée" avec des "commissions scientifiques paritaires" étudiant l'histoire de ces appropriations.
Le Conseil d'État a également critiqué la "conditionnalité" prévue par le texte, avec une "obligation de présentation au public" des œuvres restituées, perçue comme un contrôle néocolonialiste de la politique culturelle africaine.
"Depuis 2017, la France n'a restitué que 27 biens, alors que d'autres pays européens se sont engagés dans des restitutions bien plus ambitieuses", regrettent les responsables, évoquant le cas du Nigeria qui a recouvré la propriété de milliers d'œuvres via des accords.
"La restitution est d'un intérêt supérieur : transmettre notre histoire, éduquer, inspirer nos artistes, développer notre économie, refonder nos coopérations, asseoir notre identité", plaident-ils. "Nous sommes prêts à bâtir avec nos homologues français une éthique relationnelle repensée."
UN PROJET MORT-NÉ
Le Pastef renie-t-il sa promesse électorale? En nommant de nouveaux directeurs sans transparence, le gouvernement semble tourner le dos à la réforme promise. Si certains évoquent la nécessité d'aller vite, d'autres y voient le primat accordé aux proches d
Le gouvernement semble avoir définitivement tourné le dos au processus d’appel d’offres pour la nomination aux postes de directeurs généraux et dirigeants de certains établissements publics. Du côté du Pastef, on refuse de parler de reniement, mais juste d’une volonté d’aller vite dans les réformes et la mise en place de politiques publiques en faveur des populations.
Cette nouvelle vague de nominations à la direction des structures publiques et parapubliques, à l’issue du dernier Conseil des ministres, à l’air d’avoir entériné la fin du processus d’appel à candidatures. Cette panacée qui devait réformer l’Administration sénégalaise parait être remise aux oubliettes. D’où les nominations aux postes de directeurs généraux des structures parapubliques et de quelques agences : Ndéné Mbodj (Coud), Abdoul Niang (Sones), Mamadou Abib Diop (Sar), Ndèye Rokhaya Thiam Conseil sénégalais des chargeurs (Cosec). Ibrahima Diop, Société nationale des chemins de fer du Sénégal (CFS), Dahirou Thiam (ARTP), Babacar Gning (Fonsis) entre autres.
Les dernières structures susceptibles d’avoir des nominations à travers des appels d’offres sont les rectorats d’université, la Senelec, l’Aprosi, l’ASPT, ainsi qu’un certain nombre d’agences comme le Fongip, entre autres. Des postes stratégiques comme le Port autonome de Dakar, la Caisse des dépôts et consignations, AIBD, RTS, Apix, Onas, la Direction des domaines ont été déjà été cédés à des proches d’Ousmane Sonko.
Cette promesse électorale devant permettre la création d’une commission chargée d’étudier les candidatures de tout Sénégalais disposant des compétences nécessaires semble avoir cédé la place à la volonté de récompenser les soutiens de la coalition DiomayePrésident. Un arbitrage nécessaire, d’autant plus que le format réduit du gouvernement et les nominations de technocrates semblent aussi avoir refroidi l’ardeur des soutiens de la nouvelle coalition au pouvoir.
Beaucoup de soutiens du Pastef mettent en avant la nécessité d’aller vite dans les réformes, pour expliquer ce choix de faire fi des appels à candidatures pour placer des hommes de confiance à certains postes stratégiques.
L’absence d’un cadre légal et réglementaire au sein de l’administration publique constitue aussi un argumentaire pour les tenants du statu quo au niveau des nominations. Une mesure qui va à l'encontre de l’esprit du Projet qui, dans ses principes, devait interdire à certains hauts responsables de l’administration publique de faire de la politique.
Mieux, dans une vidéo circulant sur les réseaux sociaux, Ousmane Sonko, président du Pastef, indiquait sa volonté de faire appliquer l’appel à candidatures. ‘’On a vu nombre de hauts fonctionnaires ramper devant le pouvoir, parce que si tu veux être directeur ou directeur général, il faut rejoindre le camp du pouvoir (…). Aujourd’hui, tous les directeurs généraux sont obligés de faire de la politique. Vous les voyez en pleine journée aller faire de la politique au lieu d’être à leurs bureaux. Nous allons y mettre un terme’’, disait-il.
Sera-t-il en mesure d’empêcher les nouveaux directeurs généraux de faire de la politique ?
Les militants du Pastef, dans le déni concernant l’appel à candidatures
Pour l’heure, les responsables du Pastef n’ont apporté aucune explication à ce qui parait être un reniement d’une promesse de campagne. Certains de nos interlocuteurs au sein du parti reconnaissent à demi-mot ce recul, mais arguent d’une volonté de récompenser les personnalités qui ont mouillé le maillot pour le Projet. ‘’Nous avons beaucoup de responsables qui se sont dépouillés pour le Projet et qui attendent les nominations. Beaucoup au sein du parti craignent par-dessus tout de nommer des (‘étrangers’) certes compétents, mais qui n’épousent pas la philosophie du parti et du Projet’’, souffle un responsable du Pastef.
Sur ce, cette volonté de préserver le cœur du Projet semble guider les choix, même si au sein du Pastef on s’accroche à la rhétorique, en indiquant que seuls ‘’certains emplois de la haute Fonction publique et du secteur’’ vont faire l’objet d'un appel à candidatures.
Ainsi, des postes comme celui de recteur de l’université de Ziguinchor pourraient faire l’objet d’un appel à candidatures, nous souffle-t-on du côté du Pastef.
Sur le plan politique, il apparaît que cette volonté de changer les directeurs généraux vise aussi à priver l’ancien parti au pouvoir (APR) de possibles ressources capables de pouvoir gêner la nouvelle coalition au pouvoir.
En effet, nombre de directeurs généraux se sont taillé des fiefs dans plusieurs régions du pays à coups de gros financements à la base. Leur maintien à la tête de ces structures pouvait leur permettre de garder leur clientèle et de participer à l’effort de guerre de l’APR. Ces derniers, qui étaient les principaux bailleurs des différentes campagnes de l’ancien régime, se voient ainsi dessaisis de leur poste, avec en ligne de mire les élections législatives anticipées.
D’ailleurs, dans cette perspective électorale, le duo au pouvoir a eu une séance d’explications avec les membres de Diomaye2024, après la formation du gouvernement. Dans la mesure où les partis alliés du Pastef attendent aussi beaucoup des nouvelles nominations pour s’ancrer davantage dans la nouvelle coalition qui jusque-là fait la part belle aux militants du Pastef. Beaucoup des dernières nominations concernent des patriotes. À terme, il y a un risque de faire grincer des dents au sein de la coalition Diomaye2024. Déjà, des voix se font entendre pour réclamer des postes.
Jusqu’ici, seuls quelques postes ministériels et la direction de l’AIBD, avec Cheikh Bamba Dièye, (FSD/BJ) ont échappé à l’appétit des ‘’pastéfiens’’ qui justifient leur forte présence par ce désir de préserver la matrice idéologique du Projet.
par Ndiaga Gueye
À L’INSTAR DE WADE ET SALL, DIOMAYE REMET EN CAUSE L’INDÉPENDANCE DE L’ARTP
Le décret nommant le DG de l'Autorité de Régulation des Télécoms sans appel à candidature est illégal. Cette situation révèle l’ignorance et une impréparation des autorités à intégrer le droit communautaire dans les actes réglementaires
Le communiqué du conseil des ministres du 02 mai 2024 annonce que le président de la République du Sénégal a pris la décision de nommer un Directeur Général de l’Autorité de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP). Une nomination effectuée, sans avoir procédé au préalable, à un appel à candidature transparent.
L’ARTP, créée par la Loi n°2001-15 du 27 décembre 2001 portant code des télécommunications, est une institution publique chargée d’établir et de préserver dans le secteur des télécommunications, un environnement économique sain et concurrentiel au bénéfice de tous les acteurs impliqués, des utilisateurs et de l’État. Elle est devenue une autorité administrative indépendante depuis la Loi n° 2011-01 du 24 février 2011 portant Code des Télécommunications, qui a abrogé et remplacé la Loi de 2001, pour mettre le cadre juridique régissant le secteur des télécommunications et des technologies de l’information et de la communication en conformité avec le droit communautaire UEMOA/CEDEAO.
Les textes communautaires relatif au secteur des télécommunications comportent des dispositions non équivoques, qui visent à garantir l’indépendance de l’ARTP aussi bien du pouvoir politique, du secteur privé que de tout groupe de lobbying. À cet effet,l’article 11 de l’acte additionnel A/SA 1/01/07 de la CEDEAO et l’article 4 de la Directive N° 01/2006/CM/UEMOA disposent que les États membres garantissent l’indépendance des autorités de régulation vis-à-vis du pouvoir politique et de toutes les organisations assurant la fourniture de réseaux, d’équipements ou de services de télécommunications et de toutes les organisation intervenant dans le secteur, en faisant en sorte que ces autorités soient juridiquement distinctes et fonctionnellement indépendantes.
Ces normes communautaires n’ont pas, cependant, fait l’objet d’une transposition fidèle, dans la législation nationale du Sénégal. En effet, aussi bien à l’article 164 du Code portant Code des Télécommunications de 2011 que dans celui 237 de 2018, il est indiqué que le Directeur général de l’ARTP, est nommé par décret. En outre, l’article 2 du Décret 2019-591 du 14 février 2019 portant organisation et fonctionnement de l'ARTP indique que l’ARTP est rattachée à la Présidence de la république. Il n'existe pas ainsi, en droit national, une disposition expresse garantissant que, dans l’exercice de ses fonctions, le Directeur General de l'ARTP est à l’abri de toute pression politique susceptible de compromettre son impartialité dans l’appréciation des questions de régulation qui lui sont soumises.
Sur le fondement de ces dispositions légales et règlementaires, non conformes aux textes communautaires, le Directeur Général de l’ARTP est non seulement nommé par décret, sans aucune procédure de recrutement par d’appel à candidature, mais pire encore, il est placé sous l’autorité du Président de la République, donc sous l’influence directe du pouvoir politique. Un manquement de l’État du Sénégal à ses obligations en vertu du droit communautaire UEMOA/CEDEAO.
L’article 4.I du Traité révisé de la CEDEAO proclame que les États membres affirment et déclarent leur adhésion au principe de « reconnaissance et de respect des règles et principes juridiques de la Communauté ». En sus, l’article 5.3 dispose « Chaque État membre s’engage à honorer ses obligations aux termes du présent Traité et à respecter les décisions et les règlements de la Communauté ». Les actes additionnels de la CEDEAO s’imposent aux États membres par conséquent respecter ses obligations signifie, d’une part, qu’ils sont d’application immédiate, et d’autre part, que chaque État doit prendre des dispositions pour rendre inapplicables ses lois nationales contraires au droit communautaire.
Enfin, l’article 6 du Traite modifié de l’UEMOA énonce expressément que «Les actes arrêtés par les organes de l'Union pour la réalisation des objectifs du présent Traité et conformément aux règles et procédures instituées par celui-ci, sont appliqués dans chaque État membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure»
Les textes de la communauté consacrent ainsi le principe de la primauté du droit communautaire sur le droit national. Ainsi donc, les normes communautaires sont d’application immédiate dans chaque État membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure. Par conséquent, si une norme sénégalaise est en conflit avec une norme UEMOA/CEDEAO, la norme sénégalaise doit être écartée au profit de la norme communautaire.
En vertu donc des normes communautaires, le décret nommant le Directeur Général de l’ARTP, sans appel à candidature transparent, est illégal.
Cette illégalité révèle, la méconnaissance, l’ignorance et une certaine impréparation des autorités à intégrer le droit communautaire dans les actes réglementaires qu’elles prennent au moment où il y a des pans entiers du droit qui lient le Sénégal. Aussi, il est ainsi fort opportun de rappeler que la primauté du droit communautaire s'impose à l'ensemble des autorités de ce pays, y compris le président de la République.
Cette décision illégale rappelle les pratiques récurrentes du droit des régimes précédents. La violation des textes, la mise en œuvre biaisée, tout cela, cumulé selon les objectifs du moment, pour pouvoir prendre des décisions qui ne sont pas au service de l’intérêt national, tout en clamant le contraire, en invoquant le respect de la loi.
La volonté des nouvelles autorités de mettre en place rapidement leur propre administration pour une collaboration dans la confiance, ne doit pas se faire dans la précipitation en invoquant un cadre légal et réglementaire problématique, encore moins en violant les textes communautaires UEMOA/CEDEAO.
Il est certes risqué politiquement de s’engager actuellement dans une réforme du cadre juridique au vue de la configuration actuelle de l’Assemblée Nationale. Cependant, certaines dispositions réglementaires non conformes aux textes communautaires peuvent bien être annulées et modifiées par l’exécutif pour faire comprendre à l’opinion nationale qu’il est toujours, comme promis, dans une dynamique de rupture systémique. À cette fin, les articles 2 et 14 alinéa 2 du Décret 2019-591 du 14 février 2019 portant organisation et fonctionnement de l'ARTP peuvent être modifiés.
À défaut, le régime en place est en train de perpétuer les pratiques qui ont sapé l’indépendance de l’ARTP depuis sa création en 2002. Sa subordination vis-à-vis du pouvoir politique, combinée à une politique publique du numérique chaotique à dessein, a engendré une régulation caractérisée par une impartialité et une absence de transparence notoires dont le résultat a été la transformation du marché des télécommunications d’un monopole à un oligopole avec un opérateur dominant. Autrement dit, d’un monopole public à un monopole privé.
Aussi, la régulation de l’ARTP a plus profité à quelques minorités (Orange, actionnaires, équipementiers, etc.) qu’à la grande majorité des Sénégalais pour qui les opportunités de développement offertes par le numérique restent encore inaccessibles. En conséquence, les défis à résoudre en 1996, il y a de cela 28 ans, au moment de la libéralisation du secteur des télécommunications, restent toujours actuels en 2024:
Difficultés d’accès à des services, de qualité, sécurisés à des tarifs abordables;
Absence d’une classe capitaliste nationale qui puisse porter la croissance du secteur;
Manque de résilience;
Menaces sur la sécurité nationale.
Relever ces challenges, demande l’élaboration et la mise en œuvre d’une stratégie de développement du numérique souverainiste dont l’objectif fondamental est l’autosuffisance numérique.
Néanmoins, il est toujours possible de rectifier en adoptant une démarche de co-construction d’une politique publique du numérique basée sur un état des lieux rigoureux.
A la lumière de tout ce qui précède, ASUTIC recommande aux autorités, en attendant la réforme du cadre juridique:
L’annulation du décret de nomination du Directeur Général de l’ARTP;
Le recrutement d’un Directeur Général de l’ARTP par appel à candidature transparent;
La modification des articles 2 et 14 alinéa 2 du décret 2019-591 du 14 février 2019 portant organisation et fonctionnement de l'ARTP;
D’élaborer une politique publique du numérique fondée sur l’existant dans une démarche de co-construction.
RETOUR SUR UN TONG-TONG D’ÉTAT
L'ancien chef de cabinet de Wade saisit l'Ofnac : Papa Samba Mboup accuse la corruption dans l'affaire de sa maison classée de Dakar-Plateau et entend faire la lumière sur ce qu'il considère comme un bradage de patrimoine
Ancien chef de cabinet d’Abdoulaye Wade, Papa Samba Mboup a déposé une plainte à l’Ofnac pour des faits supposés de corruption dans l’affaire de la vente de sa maison sise à Dakar-Plateau. Ce qui remet au gout du jour l’affaire de la gestion du patrimoine bâti et du patrimoine classé de l’État à Dakar-Plateau.
Les chutes de régimes sont souvent tumultueuses. Alors qu’on n’a pas fini d’évoquer le sujet du littoral où tous les travaux sont suspendus, de certains projets de lotissement stoppés, voilà que l’ancien chef de cabinet d’Abdoulaye Wade, Papa Samba Mboup, en rajoute une autre couche.
L’ancien bras droit de Wade vient, en effet, de déposer une plainte à l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) à propos du bradage du patrimoine immobilier classé de Dakar-Plateau.
En 2014, explique M. Mboup dans sa lettre-plainte dont nous disposons copie, il avait écrit au président de la République pour lui demander de déclasser sa maison sise sur l’avenue Brière de Lysle, derrière l’Assemblée nationale. Laquelle était vétuste et méritait des travaux. Malheureusement pour lui, malgré de nombre de tentatives, il n’a pas eu satisfaction.
Il peste dans sa lettre plainte dont EnQuête dispose une copie. ‘’En 2014, j’avais adressé une lettre au président d’alors pour le déclassement de ma maison (classée monument historique), mais ma requête n’a pas été satisfaite. J’ai été obligé de vendre la maison à deux Libanais. Après cette vente, on leur a accordé ce qu’on m’avait refusé à moi’’, dénonce M. Mboup.
Actuellement, rapporte-t-il constats d’huissier à l’appui, lesdits acheteurs ‘’sont en phase finale de construction d’un immeuble de 15 étages surplombant l’État-major général qui se trouve au camp Dial Diop’’.
Cela fait, en effet, des années que l’ancien ministre-chef de cabinet rumine sa colère contre le défunt régime du président Sall qui, selon lui, l’avait poussé à ‘’brader’’ sa villa. À l’en croire, cette maison de 800 m2 a été vendue en deçà de sa valeur réelle, soit à un million F CFA le m2, alors que le prix réel était de 1 500 000 F CFA. ‘’Comme c’est une maison qu’ils n’étaient pas censés pouvoir transformer, cela a influé sur le prix. Je pensais qu’ils ne pouvaient l’utiliser qu’en l’état, puisque c’est une maison protégée. Par la suite, vu la rapidité avec laquelle ils sont parvenus à avoir l’autorisation, en y réfléchissant, je me suis dit que s’ils ont payé un million le m2, c’est peut-être parce qu’ils avaient des promesses de déclassement…’’.
En tout cas, les hommes d’affaires ont réussi là où lui avait échoué. C’est d’ailleurs là le fondement de la plainte, car M. Mboup est convaincu qu’il y a eu corruption dans ce dossier.
Papa Samba Mboup saisit l’Ofnac
Cette affaire remet au gout du jour la lancinante question de la préservation du patrimoine bâti de l’État, en particulier du patrimoine classé de Dakar-Plateau. L’exemple de la maison d’Aminata Tall, qui se situe à quelques pas du camp Dial Diop, en est une parfaite illustration. Expulsée il y a quelques mois, la villa a récemment été rasée, alors que l’ancienne présidente du Conseil économique et social avait en vain cherché à l’acheter. Soit c’est l’État qui a décidé de la démolir soit il l’a vendue à des tiers qui l’ont démolie.
Pendant ce temps, l’État passe son temps à louer des maisons pour pouvoir loger certains fonctionnaires, ce qui coute plusieurs milliards aux contribuables. En 2020, il a été obligé de libérer une trentaine de milliards pour éponger la dette due par l’Agence de gestion du patrimoine bâti de l’État envers ses bailleurs.
L’inventaire fait par Abdoulaye Daouda Diallo en novembre 2021, alors qu’il était ministre chargé des Finances, faisait état d’un parc constitué de 1 695 bâtiments, compte non tenu des écoles et autres infrastructures publiques. ‘’Malheureusement, confiait Abdoulaye Daouda Diallo, 67 % de ce patrimoine sont vétustes et sur ce pourcentage, 11 % sont dans un état très vétuste’’.
Le ministre défendait ainsi devant les députés un projet de réforme dont l’objectif était notamment d’alléger certaines lourdeurs. ‘’Le défaut d’entretien de ces maisons est dû à la rigidité des procédures domaniales prévues par la loi 78-66 du 2 juillet 1976 sur le domaine de l’État. En guise d’illustration, la cession d’un immeuble bâti de l’État requiert l’autorisation parlementaire’’.
Cette disposition est-elle toujours respectée ? Certains s’interrogent. En tous cas, dans le cas de la maison d’Aminata Tall, on n’a vu nulle part une autorisation donnée par les parlementaires.
Pour sa part, Papa Samba Mboup lui, soutient avoir acquis sa villa régulièrement auprès de la Sicap. Pour le justifier, il présente une attestation signée par le directeur général de la Sicap d’alors. Il est indiqué dans ledit document que l’ancien chef de cabinet ‘’s’est intégralement acquitté du prix de vente hors frais d’acte du pavillon n LA70 16-18, avenue Brière de L’Isle sis au lotissement Plateau à distraire du titre foncier de la Sicap, pour compter du 10 octobre 2007’’.
Il résulte des documents que c’est la Sicap elle-même qui détient un titre foncier sur ses terres qui était à l’origine de cette vente. Selon PSM, c’était loin d’être un bradage. Document à l’appui, il souligne avoir payé plus de 232 millions pour acquérir cette maison.
Ce qui est le plus préoccupant pour le cas du foncier bâti du Plateau, c’est qu’on assiste à une grande offensive d’hommes d’affaires venus de l’extérieur et qui accaparent une bonne partie des terres au détriment de l’État et des Sénégalais.
Pour rappel, sur le marché, le mètre carré dans cette zone objet de toutes les convoitises coute au bas mot 1,5 million F CFA.
Dans nos précédentes éditions, nous revenions sur comment des Israéliens, dont le fameux marchand d’armes Peretz et Ron Yafet ont pu s’immiscer dans ce secteur très juteux au cœur de la capitale sénégalaise. Concernant Ron Yafet, il a acquis dans des conditions encore non élucidées le Sporting club de Dakar. Quant au sieur Peretz, il avait tout simplement fait main basse sur l’ancien siège du Haut commandement de la gendarmerie, en face de la primature et du palais de la République.
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APPEL AU GRAND SURSAUT
Penda Mbow aspire à une renaissance du Sénégal sur tous les plans. De la jeunesse en quête de sens à la place des femmes trop reléguées, rien n'échappe à son analyse visant à libérer tous les potentiels du pays
Dans une intervention incisive lors de l'émission "Grand Oral" sur Rewmi TV samedi 4 mai 2024, l'intellectuelle et activiste de renom Penda Mbow a lancé un vibrant appel au changement.
Avec sa verve habituelle, Mbow a dénoncé la sclérose du mouvement syndical, exhortant à un profond renouvellement des têtes et une refondation des structures. "Il faut reconstruire ce mouvement", a-t-elle martelé, déplorant le manque d'alternance réelle au sommet depuis des décennies. Dans la même veine, l'intellectuelle a appelé à la renaissance d'un leadership politique et intellectuel fort.
Penda Mbow a également insisté sur l'impératif de repenser le rôle de l'État et de redistribuer les pouvoirs trop concentrés. Selon elle, la "forte concentration entre les mains d'un seul individu" a trop duré, appelant à des réformes institutionnelles d'envergure. La justice, qu'elle juge « à terre », doit aussi être revigorée en toute urgence.
Femme de conviction, Mbow a réitéré son plaidoyer pour une réelle émancipation féminine, dénonçant les pesanteurs socioculturelles qui maintiennent les Sénégalaises à l'écart des sphères décisionnelles. "On écarte toujours les femmes quand elles ont une autonomie de pensée", a-t-elle regretté, exhortant le nouveau pouvoir à placer l'égalité des sexes au cœur de son agenda.
L'ancienne ministre n'a pas plus manqué de souligner le potentiel gigantesque de la diaspora sénégalaise, trop longtemps négligée selon elle. "Le moment est venu pour la diaspora d'être une force de mobilisation, de transferts de technologies et de ressources financières", a plaidé Mbow, citant l'exemple inspirant de l'Inde.
Enfin, s'appuyant sur l'héritage démocratique, intellectuel et diplomatique du Sénégal, Penda Mbow a exhorté le pays à assumer un leadership affirmé en Afrique et sur la scène internationale. "Nous devons tirer le meilleur de cette alternance et prendre le leadership pour l'Afrique et le reste du monde", a-t-elle lancé avec une conviction inébranlable.
par Patrick Chamoiseau
LES LITTÉRATURES FACE AUX URGENCES DU MONDE
Les forces progressistes de l'Hexagone trouvent normal que la France possède encore des "outremers" ; elles admettent ainsi que des peuples-nations différents soient niés dans leurs singularités
Le texte suivant est un extrait de : « Que peut Littérature quand elle ne peut ? », Discours de Strasbourg, avril 2024.
Aujourd'hui, s'il fallait questionner les littératures dans leur rapport au monde, donc à chaque être vivant, il serait indécent de parler d'autre chose que de Gaza. Il serait tout aussi bien honteux de ne pas évoquer l'irréductible intégrité de L'Ukraine quant à la santé de l'Europe et de cet autre monde que nous devons imaginer...
Je parlerai donc, ici, des littératures, mais en présence des palestiniens de Gaza, de Cisjordanie, de toutes les rives de leur exil. Auprès d'eux, restitués à leur terre, institués en État, je suis partisan d'une nation Israël qui, avec ses morts et ses souffrances, et au nom de sa mémoire elle-même, et donc plus que toute autre nation, s'inscrirait dans la légitimité juridique mondiale et le couperet de ses sanctions ; et qui se montrerait soucieuse des autres peuples, soucieuse du respect de la vie et de sa dignité ; et qui fonderait sa nécessaire sécurité sur les vivre-ensemble inédits, complexes, à mettre en œuvre dans ce monde autre qu'il nous faut désirer.
Mais, il serait inadmissible de pas inviter ici, sous cette arche offerte aux littératures, en présence des Tibétains et des Ouïghours en Chine ; des Rohingyas en Birmanie ; des Tutsis au Burundi et au Rwanda, des Kurdes en Syrie, en Irak, en Turquie ; des Peuples originels dans les Amériques et dans leurs archipels... tous ceux-là, en souffrance, en danger, et tant d'autres !
Haïtiens abandonnés, Syriens oubliés, Libanais délaissés, musulmans stigmatisés, Africains exploités, Kanaks encore spoliés, Mahorais emportés dans une fiction morbide, Antillais et Guyanais noyés dans l'étouffoir d'un "outremer" français où les vestiges coloniaux déshonorent la vieille République... Les forces progressistes de l'Hexagone trouvent normal que la France possède encore des "outremers" ; elles admettent ainsi que des peuples-nations différents soient niés dans leurs singularités et réduits par là-même à ne pas exercer dans la matière du monde leurs précieuses différences. Je les nomme un à un, les appelle tous, en ce qu'ils sont, ici, là-même, avec moi, parmi nous !
Et, puisque ce qui nous occupe sont les littératures, il serait indécent, devant vous, dans cette ville devenue à son tour capitale du sensible , de ne pas être habité des devenirs qui revendiquent ce monde que nous avons à deviner : je parle des devenirs empêchés de la situation-nègre, ceux de la situation-femme, de la situation-LGBT avec ses fluidités, ceux de ces minorités, de ces minorations, dont nous avons, chacun précisément, charge d'émancipation vers l'aurore des devenirs du monde, vers l'en-commun de nos devenirs-monde. L'accomplissement le plus élevé possible de ces devenirs est une urgence commune, un Nous très large pour lequel, nous, — artistes de la parole, serviteurs du langage — avons la charge d'apporter le renfort des plus hautes propulsions esthétiques.
Enfin, puisque nous sommes en Europe, si près du cimetière qu'est devenue la Méditerranée, — et qui rejoint pour moi cet autre cimetière, celui de l'Atlantique, cimetière oublié qui se souvient encore des longs sillages de la Traite négrière, — il serait indécent de ne pas convoquer un vaste désir-imaginant du monde, sans doute du monde que nous avons à faire, ouvert, mobile, un monde relationnel vers lequel nous avons tous à cheminer, à l'instar de ces hommes, de ces femmes, ces enfants qui, jour après jour, se noient dans la honte de vos indifférences, se fracassent au vif de vos frontières, s'écrasant sur vos murs, défiant vos barbelés, épelant les alphabets de l'opprobre, de l'offense, de la mort, dans des eaux soudainement barbares, sur des rives qu'on ne dirait pas civilisées mais que régentent pourtant des lois de la conscience commune. La Méditerranée est un immense sépulcre. On meurt, on laisse mourir, on regarde mourir, on tolère un océan de déchéances imposé à des hommes, des femmes, des enfants, et dans lequel où que l'on soit, où que l'on aille, on se retrouve à barboter. Rien de notre actuel niveau de conscience, de nos connexions démultipliées ou de nos transcendances concernant les questions de l’Humain ne parvient à s’opposer à cela. Ces migrants nous fixent, et nous ordonnent déjà un autre monde que nul ne saurait refuser.
Désormais, l'imaginaire capitaliste rassemble sous une même intention les anciennes puissances antagonistes. Son intention souveraine régente en solitaire nos existences, notre monde, la planète. Nous l'avons tous intériorisé au point de consentir à ses horreurs et à leurs ondes de choc. Sous sa régie, la planète réifiée, le vivant abîmé, s'effondrent dans des délitements écosystémiques qui vont faire dérailler nos bases existentielles. Un inconnu s'impose dans une lente catastrophe et dessine une possible disparition de notre espèce. Partout, du profond à l'entour, nous acceptons l'inacceptable jusqu'à l'inscrire dans nos banalités. Pourtant, ce ne sont pas les experts et expertises qui manquent. Discours savants, envolées rationnelles, exposés chiffrés, prédictions scientifiques, démonstrations historiques et horlogeries sociologiques sont légion. Mais, de fait, tous, au fil du temps, n’affectent pas l’inhumain qui sans mollir s’en accommode, mouline de plus belle, et s’installe pour durer, en nous, autour de nous. La Méditerranée, l'Atlantique, sont des gouffres symboliques qui ouvrent la voie aux proliférations inépuisables des crimes. Gaza est déjà un gouffre ouvert dans la conscience occidentale. L'Ukraine en est potentiellement un autre. L'arme nucléaire voit son option réactivée au-dessus un abîme offert à nos folies. Les équilibres du vivant s'effondrent en un trou noir comme sous l'impact de convergences morbides. Trump, Erdogan, Méloni, Le Pen, Bardella, Netanyahu, Orban, Poutine, Modi, Bolsonaro... fleurissent dans les premiers décombres... créatures consternantes... surgies d'un obscurantisme planétaire... incapables de penser un autre possible du monde, d'amorcer un quelconque avenir... N'exhibant que des défroques ramenées du passé, leurs triomphes insultent nos devenirs.
Notre conscience, maintenant individuée, nous rend tous responsables. Nous savons. Nous voyons. Nous entendons. Nous lisons. Nous constatons. Nous sommes comptables autant de ce que nous faisons que de ce que nous ne faisons pas. Chaque geste compte, chaque absence pèse, chaque défaillance menace l’équilibre salvateur : c’est la grandeur, la misère et le défi du principe de la démocratie désormais en péril. Nous ne pouvons plus rien déléguer d’essentiel : la responsabilité est diffuse, dans chaque instant, dans chaque seconde. Chacun se retrouve garant du niveau d’exigence de la seconde qui passe. Pourtant, ce niveau d’exigence n’est pas inatteignable : partout, dans les villes, les déserts et montagnes, dans les aubes et les neiges, sur les rives en Méditerranée, à Gaza, en Ukraine, en Russie, en Haïti, en Afrique, en Chine, en Inde, aux Amériques ou dans la Caraïbe, dans toutes les terres, toutes les guerres, tous les effondrements, il y a des gens, pas des héros de foire, créatures à médias ou philosophes utiles à nos consommations, mais des gens de l’ordinaire, des organismes, des associations dont le seul blason et dont les seuls moyens relèvent de la ferveur, qui agissent, qui contredisent les lois, qui bravent les tribunaux serviles et les barreaux de prison.
Qui refusent.
Qui, le faisant, nous instruisent de notre propre devoir et de la grâce de ce que peut l’éthique. Des gens qui ne renoncent pas à une idée exigeante d'eux-mêmes, et qui se portent au-devant des souffrants comme ils s’agenouilleraient au pied d’une sacralisation. Dessous les renoncements officiels, le possible citoyen, la ferveur anonyme, persistent comme une matière ultime. L’équation imprévisible, l’immesurable d’un au-delà de l’intelligible et du sensible, émerge, scintille. Demeure. Un improbable de ce qui fait l’humain se maintient sur la scène en pollens de lucioles encore indéchiffrables.
Alors que l'horreur peut s'asseoir à la table, — que l'indécence fleurit dans la vertu économique, que le besoin du symbolique, la vigueur spirituelle, le jeu de l'esprit créateur, sont évincés par les fastes matériels, que des monstruosités populistes devenues éligibles s'emparent des États, que les États eux-mêmes réduits au dogme marchand n'ont plus que le biais du racisme, de la xénophobie, des vieilles furies territoriales, nostalgies impériales, pour se donner l'illusion d'une action politique — rien de notre actuel capacité de conscience, de nos connexions démultipliées ou de nos transcendances, ne parvient à sérieusement s'y opposer. Quand une civilisation dominante renonce à ses propres valeurs, ou qu’elle ruse avec ses avancées, quand elle justifie l’injustifiable, quand elle déserte ses propres élaborations de ce qui est humain, ou qu’elle accepte que des pays s'effondrent, que des valeurs périssent, que des lots personnes puissent mourir à ses portes, c’est qu’il y a une part de l’intelligible et du sensible, et un au-delà de l’intelligible et du sensible, qui s’est fermé à toute élévation
C‘est cette fermeture qu’il nous faut questionner.
L’Art y peut quelque chose.
Les littératures donc....
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LES FEMMES RÉCLAMENT LEUR PLACE
Un nouveau collectif de femmes s'est formé pour réclamer davantage de place dans la prise de décision politique. Réunies à Dakar, elles ont lancé leur manifeste dénonçant leur sous-représentation au sein du gouvernement
(SenePlus) - Un collectif de femmes s'est réuni samedi 4 mai 2024 à Dakar pour lancer officiellement le "Cadre de concertation citoyen pour le respect et la préservation des droits des femmes et des filles", un nouveau mouvement féministe qui demande une meilleure prise en compte des femmes dans la gouvernance au Sénégal, selon un reportage de la radio RFI.
Réunies dans l'auditorium de la place du Souvenir africain, plusieurs dizaines de femmes vêtues d'orange et de blanc ont écouté avec attention la lecture du manifeste du mouvement par Arame Gueye. Dans ce manifeste, le collectif déplore notamment la faible représentation des femmes dans le nouveau gouvernement annoncé le 5 mars dernier, qui ne compte que 4 ministres sur 30.
"Cette sous-représentation est inquiétante et ne garantit pas la préservation des acquis en matière de droits des femmes", a affirmé Arame Gueye, pointant du doigt la suppression récente du ministère chargé de la condition féminine. Le mouvement demande au président Bassirou Diomaye Faye de garantir une "représentation équitable des femmes dans toutes les instances de gouvernance et de prise de décision".
Parmi les militantes présentes, Aminata Diallo, adjointe au maire d'une commune de Dakar et présidente du Réseau des femmes élues locales, s'est dit "déçue" de constater que seules deux femmes figurent parmi les 10 dernières nominations à la tête d'agences et sociétés publiques. "Nous avons les mêmes diplômes que les hommes, pourquoi cette discrimination ?", s'est-elle insurgée.
Les militantes espèrent pouvoir rencontrer prochainement le Premier ministre Ousmane Sonko ou le Diomaye Faye pour leur présenter leurs revendications de représentation égale.