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2 décembre 2024
Développement
Par Abdoulaye Sakou Faye
LE PASTEF À L’ÉPREUVE DU POUVOIR
En réalité, une bonne communication n’est pas synonyme forcement de matraquage médiatique à outrance, car d’ailleurs, la plupart du temps, dans ce cas, les effets sont souvent contre productifs
Sud Quotidien |
Abdoulaye Sakou Faye |
Publication 04/05/2024
Dans une précédente chronique, l’occasion nous a été donnée, d’aborder l’avenir de l’audiovisuel public sénégalais au lendemain de l’alternance du 24 Mars 2024. Cet exercice ancré sur les fondements qui sous-tendent les principes de notre profession et dont la Radiodiffusion Télévision Nationale a servi de laboratoire, plus que les autres médias d’État (APS, le Soleil), a suscité sur certaines plateformes digitales, des débats constructifs qui renseignent à suffisance sur l’acuité et l’actualité du sujet.
Aussi notre conviction de l’opportunité de ce débat a été confortée, lorsqu’ au détour d’une rencontre fortuite avec un confrère le jour même de la parution de nos écrits, nous avons eu connaissance de la publication d’un autre article de haute facture de deux brillants universitaires sénégalais. En effet dans un article intitulé : "Médias publics : ce qu’il ne faudrait plus jamais refaire", Ibrahima Sarr et Ndiaga Loum ont, de leur posture de chercheurs en sciences sociales, renseigné à suffisance, "par la connaissance scientifique à la fois empirique et théorique des médias », ce que par l’observation, notre modeste plume de journaliste a transcrit.
Par la suite, les échanges sur les plateaux de Télévisions ainsi que sur la blogosphère, qui ont suivi la nomination du nouveau Directeur Général de la RTS, ont été les preuves s’il en était encore besoin, que les citoyens et les professionnels des médias n’étaient pas insensibles au sujet.
Ainsi, le changement politique intervenu le 24 Mars 2024, terreau fertile d’une révolution médiatique dans les services publics de l’information, qui couperaient ainsi d’avec "ces pratiques de soumission et d’inféodation des journalistes des médias d’État", nous donne l’occasion dans cette nouvelle réflexion, de prolonger le débat sur la nature de la nouvelle communication gouvernementale, à l’aune du changement de posture des actuels tenants du régime. Notre vœu en s’attardant sur ces sujets, ne vise rien d’autre, qu’à terme le fruit de la réflexion issu de ce champ que nous investissons, à la faveur de nombreuses contributions qui nous l’espérons viendront l’enrichir, serve de référence à la recherche dans le vaste terrain de la communication. Nous sommes convaincus que l’alternance du 24 Mars 2024 au Sénégal, si elle est bien conduite, cette fois ci, après deux ratés de suite, sera le point de départ de nombreuses transformations, qu’il serait intéressant d’observer, d’analyser et pourquoi pas d’étudier, pas seulement dans le champ de la communication, mais dans tous les segments de la vie sociale et de l’activité économique du pays.
Le Président de la République, au cours du premier conseil des ministres de l’ère Faye Sonko, a ordonné "… le développement d’une Stratégie de communication gouvernementale innovante, basée sur l’anticipation, la précision des messages, mais surtout sur l’appropriation des politiques publiques par les populations…". Ainsi rapportées dans le communiqué issu de cette réunion du 09 avril 2024, ces directives présidentielles seront donc selon toute vraisemblance le bréviaire de la politique des nouvelles autorités en la matière.
Évoquons déjà le communiqué du conseil des ministres, rendu public après chaque réunion, lu à la Télévision Nationale et désormais largement partagé sur les réseaux sociaux. C’est le premier canal officiel écrit par lequel les autorités parlent aux populations en rendant compte chaque semaine de leurs activités et des grandes décisions prises par le Président de la République. Ces dernières années, nombreux sont ceux qui n’y prêtaient plus grande attention sinon qu’à y scruter les nominations dans les postes de direction de l’administration publique, tellement son contenu était devenu creux, sans parler des nombreuses coquilles intolérables à ce niveau.
Par contre le constat a été fait, le 09 Avril dernier, jamais un communiqué du conseil des ministres n’a été autant attendu et nous pensons ne pas être les seuls à y avoir prêté un tant soit peu d’intérêt. Simple effet de nouveauté ou pas, le document dont la lecture in extenso à la télévision nationale nous faisait changer automatiquement de chaine, a pris soudainement de l’importance à nos yeux. Pour le premier ainsi que pour ceux qui l’ont suivi d’ailleurs, nous n’avons pas été déçus. Les nombreuses annonces qui y ont été faites en primeur l’ont valorisé à nos yeux, reste à voir comment il sera désormais exploité par les médias publics, sachant que sa lecture in extenso à la Télévision Nationale n’est pas la meilleure façon de le rendre digeste pour le grand public. Dans d’autres pays, le document est commenté par le ministre porte-parole du Gouvernement devant les journalistes au cours d’un point de presse peu de temps après sa publication, mais nous laisserons le soin aux nouvelles autorités médiatiques et étatiques d’en décider étant entendu qu’une innovation dans ce sens serait déjà un signal fort d’une volonté de rupture d’avec les vieilles méthodes.
Par le passé, la communication a eu, assez souvent bon dos, pour justifier l’échec des politiques publiques des gouvernants. Combien de fois n’a ton pas entendu de la bouche d’une autorité, la phrase suivante : << on a bien travaillé mais on ne communique bien et assez ». La plupart du temps, ce manque et cette mauvaise communication dont se plaignent souvent les tenants du pouvoir pour justifier leur carence et se donner bonne conscience, s’assimilent plus à une communication verticale plutôt synonyme de propagande que leurs services n’auraient pas assez et bien fait, qu’à une vraie démarche en l’occurrence, qui viserait non pas à imposer une vision à la population, mais à lui laisser l’opportunité de juger par les faits de la pertinence, de la réussite ou de l’opportunité des décisions prises ou des réalisations faites. Autrement dit, les décisions prises, les actes posés ou les réalisations faites, portent en elles-mêmes, les germes de leur acception et de leur compréhension par les citoyens.
En réalité une bonne communication n’est pas synonyme forcement de matraquage médiatique à outrance, car d’ailleurs, la plupart du temps, dans ce cas, les effets sont souvent contre productifs. Ne dit-on pas, que trop de communication tue la communication. Dans un passé récent, Pastef dans l’opposition, par une presque parfaite "maitrise des contenus et du processus de diffusion des médias sociaux" a réussi sa communication. Aujourd hui au pouvoir, d’autres canaux de communication, APS, Soleil, RTS dont il peut user et abuser sont à sa disposition. Comment ces organes d’État vont-ils vivre la transition ? Comment l’État va t il s’y prendre pour faire jouer à ces instruments du service public leur rôle, sans saper leur crédibilité et subir en même temps les contrecoups d’une communication impertinente ? Comment la communication digitale de Pastef qui a fait mouche pendant qu’elle était dans l’opposition va-t-elle dorénavant être déclinée ? Tant qu’il s’agissait de convaincre les sénégalais d’adhérer à leur PROJET, la tâche était des plus facile et il pouvait compter sur les nombreux manquements des autorités sortantes, sans compter un ras le bol généralisé des populations, terreau à succès d’une communication pour ne pas dire d’une propagande sans limites. Aujourd’hui de leur station de dirigeants, la mission est autrement plus complexe. Il s’agit désormais de convaincre et de rassurer sans céder à la "tyrannie du temps", plus par les actes que par la parole ou l’image. Les actes de gouvernance qui seront posés, porteront en eux-mêmes les germes d’une communication réussie ; une communication donc par l’action, les supports médiatiques n’étant que les véhicules par lequel les populations sont mises au courant. Évoquons des cas pratiques : la semaine dernière, une occasion que les autorités n’ont pas saisie : les collecteurs mobiles de sang du Centre Nationale de Transfusion Sanguine sont allés en grève pour réclamer 4 mois d’arriérés de salaires. Le montant des arriérés étant évalué à 5 millions de francs CFA. Une gestion en mode fast tract de cette situation aurait été un signal fort en termes d’efficacité et de célérité dans le traitement des questions sensibles. 5000 frs CFA par jour de travail, c’est ce que réclamaient ces braves travailleurs, pour un cumul de 5 millions de frs CFA. Ce n’est pas la mer à boire. Qui plus est, une réponse positive dans l’immédiat à ce sujet, aurait écarté en plus le risque de mettre en danger la vie de personnes ayant besoin d’être transfusées faute de poche de sang suffisants. Certes toutes les revendications ne pourront pas être satisfaites à chaque fois ipso facto, mais en l’occurrence, un traitement diligent des autorités aurait valu mille discours compte tenu de la sensibilité de la question. Heureusement d’ailleurs que l’accident tragique qui couté la vie à une quinzaine de personnes la semaine dernière, ait eu lieu loin de Dakar.
Mais comme pour se racheter de cette occasion manquée, deux actes du Chef de l’exécutif ont pour ainsi dire corrigé ce ‘’manquement’’. D’abord le déplacement inopiné du Président Faye à Mbour 4 faisant suite aux mesures conservatoires prises sur le foncier, ensuite sa décision de se passer de la présence des autorités à la coupée de l’avion à son retour des déplacements officiels. Pas besoin de gâcher une demi-journée de travail de ces autorités civiles et militaires juste pour lui rendre les honneurs. Cela ne sera fait désormais qu’à son départ de Dakar, a tranché le Président Faye.
Deux actions unanimement saluées qui valent leur pesant sur l’image que les nouvelles autorités souhaitent renvoyer aux citoyens et qui sont autrement plus efficaces que tout autre discours ou initiatives médiatiques stricto sensu visant le même objectif. Aux autorités de savoir donc que, leur communication est entre leurs mains, rien ne pourra remplacer en l’occurrence les actes qu’ils poseront et surtout pas un usage déraisonné des médias publics. Ce temps est révolu.
Abdoulaye Sakou Faye est journaliste.
Par Djibril BA
LE FINANCEMENT DE L’AGRICULTURE, MAILLON IMPORTANT POUR LA SECURITE ALIMENTAIRE
Si nous faisons un diagnostic, nous comprendrons que les crédits de court terme au profit des acteurs des chaines de valeur ont montré leurs limites et pas performants face aux nombreux aléas dont le secteur fait face.
De nos jours, le financement constitue un véritable casse -tête pour les acteurs des chaines de valeurs agricoles et agroalimentaires. La disponibilité insuffisante ou l’absence des ressources financières combinées aux échecs de nos politiques de crédit dans le secteur de l’agriculture impactent négativement sur les performances du secteur et par ricochet sur notre économie.
A cela s’ajoutent la faiblesse de la productivité agricole, l’instabilité de la pluviométrie, le manque de structuration des chaines de valeurs agricoles et agroalimentaires dans certaines zones agroécologiques, l’absence de modèles de financement intégrés, l’absence de garantie etc. Malgré l’existence de certains instruments de garantie tels que le FONSIS et le FONGIP et d’autres mécanismes mis en place par l’Etat et le secteur privé sous forme de fonds de garantie, le déficit des crédits bancaires dans le secteur demeure une préoccupation pour les acteurs. Parallèlement, la COVID 19 et ses corollaires ont impacté négativement sur la qualité du portefeuille des institutions financières qui ont comme cibles le monde rural. Les producteurs à la base enregistrent une ardoise d’impayés dans certaines institutions financières de la place et occasionnent une rupture de relation et/ou un déclenchement de processus de recouvrement aux contentieux conformément aux principes qui réglementent l’activité bancaire.
Fort de tous ces constats, pour relancer le secteur de l’agriculture l’Etat, devra impérativement trouver avec les parties prenantes des moyens pour renforcer les mécanismes de financement des banques parapubliques et trouver une solution aux impayés comptabilisés par les producteurs grâce à l’impact de la COVID 19 et de la baisse de la productivité agricole. A cela s’ajoute aussi son l’obligation de régler sans délais les montants dus aux opérateurs privés stockeurs afin de préparer la prochaine campagne de l’hivernage.
Sous ce rapport et dans une perspective d'amélioration de l'efficacité des filières agricoles et agroalimentaires, il devient nécessaire et urgent de revoir le système de la politique de financement dans notre pays. Ledit système devra être corrélé avec les objectifs de production agricole et agroalimentaire tout en intégrant la contribution du secteur privé.
Si nous nous référons aux premières sorties du ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté Alimentaire et de l’élevage, force est de constater que les autorités se sont à nouveau engagées à faire du développement de l’agriculture et de l’agro-industrie une priorité. La finalité de cet objectif est d’atteindre l’autosuffisance alimentaire et de mettre fin à la dépendance du pays aux importations, notamment en riz et à certains produits horticoles pendant une certaine période de l’année. Parallèlement certaines industries comme la SONACOS, les agroindustriels dans les chaines de valeur riz et arachide en particulier, la SODEFITEX etc. ne parviennent plus à atteindre leurs besoins en collecte et de relèvement du niveau de leur plateau technique. Toutes ces faiblesses expliquent l’absence de performances dans le secteur agricole et par ricochet des difficultés pour assurer un retour sur investissement par les entrepreneurs agricoles.
Pour atteindre la souveraineté alimentaire et contribuer à résoudre la problématique de l’emploi des jeunes à travers le secteur primaire, l’Etat du Sénégal, à défaut de procéder à des réformes qui les regrouperont en un seul instrument fort et performant, doit impérativement promouvoir la mise en valeur du potentiel agricole en appuyant les institutions financières comme la Banque Agricole (LBA), la Banque Nationale de Développement Agricole (BNDE), la DER-FJ et les autres instruments de financement. Cet accompagnement devra aboutir à la mise en place d’offres spécifiques de crédits à l’investissement pour accompagner le développement d’une agriculture plus performante sur les plans agronomique, économique écologique, commercial et plus résiliente face aux aléas, notamment climatique. En sus, pour minimiser les risques intrinsèques à l’activité agricole, la Compagnie Nationale d’Assurance Agricole doit être accompagnée afin de rendre notre agriculture résiliente et d’inciter les institutions de financement à injecter leurs ressources dans le secteur. Le développement de partenariats publics privés à travers des fonds de garantie, des lignes de crédit à des taux concessionnels, une organisation des acteurs à la base seraient aussi une excellente opportunité pour minimiser les risques.
Si nous faisons un diagnostic du financement de l’agriculture, nous comprendrons que les crédits de court terme au profit des acteurs des chaines de valeur ont montré leurs limites et pas performants face aux nombreux aléas dont le secteur fait face. En d’autres termes, toutes organisations de producteurs et d’entrepreneurs agricoles qui ratent une campagne agricole a moins de chance pour cheminer avec les institutions financières ; Certes des mécanismes existent mais pas performants, sans impacts et non pérennes.
A date quel est le niveau d’endettement des producteurs et des autres acteurs du secteur agricole ? Quel est leur niveau d’impayés dans les portefeuilles des institutions financières locales ? Quelle stratégie pour une reprise de relation entre certains agri-entrepreneurs et les institutions financières de la place ? Quel mécanisme innovant pour toucher tous les acteurs des chaines de valeur ? A amont du financement, pour assurer un retour sur investissement, quelle stratégie pour rentabiliser la production agricole ? Voilà tant d’interrogations qui méritent une réponse si nous envisageons de développer les chaines de valeur agricoles et agroalimentaires à travers l’échiquier national.
QUELQUES ALTERNATIVES POUR UN FINANCEMENT DURABLE DU MONDE RURAL
Pour palier toutes ces contraintes relatives à l’accès au financement plusieurs leviers doivent être actionnés : amélioration de la productivité et de la production agricole, structuration des chaines de valeur, démocratisation du financement avec des taux concessionnels, financement des jeunes entrepreneurs agricoles, gestion des risques de crédits.
Des jeunes entrepreneurs agricoles
Pour améliorer la qualité des ressources humaines porteuses de projet de développement dans le secteur primaire et régler partiellement la problématique de l’emploi des jeunes, les sortants des écoles de formation comme l’Ecole Nationale Supérieure d’Agriculture de Thiès (ENSA), l’UFR S2ATTA de Saint Louis, du master en Développement Rural et Coopération de l’UGB, l’UFR agro de Ziguinchor, les ISEP entre autres doivent être incubés pendant quelques mois juste avant ou après leur formation. Des passerelles et des canaux de communication doivent être établis entre ces instituts de formation agricole, le secteur privé et les institutions financières pour préparer les diplômés à l’activité entrepreneuriale. Bien entendu, ils devront au préalable être sensibilisés et motivés pour avoir le goût du métier. Plusieurs métiers, depuis la fourniture des intrants jusqu’aux activités post récoltes peuvent être crées pour permettre à la jeunesse de régler la problématique de l’employabilité et de l’emploi.
Des mécanismes devraient aussi être mis en place pour assurer leur insertion dans la vie professionnelle à travers l’entreprenariat agricole et la mise à disposition de produits et services financiers à leur profit. La Technologie de l’Information et de la Communication (TIC) constitue aussi une excellente niche à explorer. Cette niche permet de maitriser l’information agricole et joue un rôle important dans la mise en place de systèmes de marché, de cartographie des parcelles de production etc. Si tous les préalables sont établis, les institutions financières mettront à leurs dispositions des produits et services taillés sur mesure.
Le Système de Financement Décentralisé (SFD) doit s’impliquer plus activement dans l’accompagnement des petits entrepreneurs agricoles. Cela peut être soutenu par la mise en place de ressources affectées par des structures comme la FONAMIF entre autres. Les Banques quant à elles devront déployer des ressources pour accompagner les PME et PMI afin de tirer les petits exploitants à travers des schémas intégrant les producteurs, les agrégateurs, les agroindustriels etc…
Enfin, la Banque Agricole, instrument incontournable dans le financement de l’agriculture, doit être fortement renforcée et appuyée pour porter dans ses livres toutes les lignes de crédit et fonds venant des partenaires financiers et le secteur privé et destinées au secteur agricole.
Si nous voulons intensifier notre agriculture incontestablement, des mécanismes de financement innovant doivent être mis en place pour permettre aux associations de coopératives d’acquérir de gros investissement comme les tracteurs, les moissonneuses batteuses, des infrastructures de stockage et de conditionnement, la réhabilitation et l’extension des périmètres irrigués dans certaines zones agroécologiques du pays.
Enfin, pour accéder aux petits matériels agricoles et faire de gros investissements, les institutions financières doivent être appuyés pour booster leurs portefeuilles de crédit-bail et de micro-leasing à travers des modèles de financements intégrés.
A suivre...
LA CPI DÉNONCE DES MENACES CONTRE SON ENQUÊTE ISRAÉLO-PALESTINIENNE
Dans un communiqué alarmant publié vendredi, la Cour pénale internationale (CPI) a dénoncé les "tentatives d'entraver, d'intimider ou d'influencer indûment ses responsables" et appelé à une "fin immédiate" de ces agissements
(SenePlus) - Dans un communiqué alarmant publié vendredi, la Cour pénale internationale (CPI) a dénoncé les "tentatives d'entraver, d'intimider ou d'influencer indûment ses responsables" et appelé à une "fin immédiate" de ces agissements, selon les dépêches de l'AFP. Sans désigner nommément les auteurs de ces menaces, la mise en garde vise manifestement Israël, dans un contexte de vives tensions autour de l'enquête ouverte par la Cour sur d'éventuels crimes de guerre commis dans les territoires palestiniens.
"Cette indépendance et cette impartialité sont toutefois mises à mal lorsque des individus menacent de prendre des mesures de représailles contre la Cour ou contre le personnel de la Cour" en lien avec des "décisions" relevant de son mandat, a ainsi déploré le bureau du procureur en chef Karim Khan, cité par l'AFP.
Les services de M. Khan ont refusé de préciser qui était visé, mais tout porte à croire qu'il s'agit bien d'Israël. Comme l'a rapporté Le Monde, "des responsables israéliens ont déclaré au New York Times s'attendre à ce que la CPI délivre des mandats d'arrêt contre des membres du gouvernement israélien en lien avec les opérations militaires menées par Israël à Gaza".
Le président israélien Isaac Herzog a d'ores et déjà dénoncé "un danger pour les démocraties" si des dirigeants israéliens étaient inculpés par la Cour. Une étape que le Premier ministre Benyamin Nétanyahou a jugé viser à "menacer les dirigeants et soldats d'Israël, essentiellement pour paralyser la capacité d'Israël à se défendre", selon les informations du quotidien français.
Signe des tensions extrêmes, la Maison Blanche elle-même, pourtant très critique de l'enquête de la CPI, a dû condamner "toute menace ou intimidation de responsables publics, dont des fonctionnaires de la CPI". Tout en rappelant que "les Etats-Unis ne soutiennent pas cette enquête" qu'ils jugent hors de leur ressort, comme l'a rapporté l'AFP.
Ce bras de fer inédit entre la Cour pénale internationale et l'Etat hébreu, sur fond d'escalade militaire à Gaza, illustre les défis croissants dans la mise en oeuvre de la justice pénale internationale. La menace de représailles brandie par Israël constitue une attaque sans précédent contre l'indépendance et l'autorité d'une institution certes imparfaite, mais gardienne des principes universels du droit humanitaire.
par Souleymane Gueye
LA DIGITALISATION DES PROCÉDURES ADMINISTRATIVE, UNE OPPORTUNITÉ CRUCIALE POUR SAUVER LA POSTE
Pour assurer son avenir dans un monde numérique, la Poste doit se réinventer en devenant un acteur clé de la modernisation des services publics
Dans un monde où la digitalisation des procédures administratives est en pleine expansion, la Poste au Sénégal se trouve à un moment charnière. Confrontée à des difficultés financières et à la menace de la faillite, elle doit se réinventer pour demeurer pertinente dans un paysage en constante évolution. La déclaration du Président Bassirou Diomaye Faye, le 3 avril 2024, selon laquelle "Nous entendons investir massivement dans la digitalisation des services et des procédures administratives", souligne l'importance cruciale de cette transformation pour l'avenir du pays.
Lorsque l'on parle de digitalisation, le concept de "zéro papier" est souvent mis en avant. Toutefois, il est essentiel de comprendre que la digitalisation va bien au-delà de la simple substitution du papier par des données numériques. Elle vise à transformer les processus et les interactions, dans le but ultime de simplifier la vie des citoyens.
Dans ce contexte, la digitalisation des services administratifs peut jouer un rôle déterminant dans la réinvention de la Poste au Sénégal. Au lieu de se focaliser uniquement sur la dématérialisation des documents, il est impératif de prendre en compte l'intégralité du parcours du citoyen. Un aspect souvent négligé de ce parcours est la connexion entre le service demandeur et le citoyen lui-même.
Dans ce nouveau paradigme, le citoyen initie sa demande, qui est ensuite traitée dans un workflow défini. Une fois le document en sortie du workflow, un agent assermenté doit être en mesure de le délivrer au citoyen, garantissant ainsi l'authenticité et la sécurité du document. Cet agent, qui est un fonctionnaire de l'État, pourrait être le postier lui-même, déjà en service.
La Poste doit saisir cette opportunité pour se réinventer et jouer un rôle central dans la distribution des documents administratifs. Si elle peut être à l'avant-garde de cette transformation, c'est la meilleure option. Cependant, même si elle ne peut pas prendre la tête de ce chantier, elle peut au moins servir d'interface pour la distribution des documents, créant ainsi de nouvelles sources de revenus.
De plus, la Poste peut explorer d'autres moyens de financement dans ce nouvel écosystème numérique. Par exemple, elle pourrait envisager de proposer un abonnement à une application de stockage sécurisé des documents administratifs individuels, offrant ainsi aux citoyens un moyen pratique et sécurisé de gérer leurs documents avec un système de livraison à la demande.
En conclusion, la digitalisation du service public offre à la Poste au Sénégal une opportunité sans précédent de se réinventer et de prospérer dans un environnement en mutation. En utilisant la digitalisation comme un levier de croissance, la Poste peut jouer un rôle central dans la modernisation de l'administration publique et dans l'amélioration de la vie des citoyens sénégalais.
par El hadji Gora Sène et Khalifa Ababacar Tall
DE LA GESTION DES DOCUMENTS ADMINISTRATIFS ET ARCHIVES
Malgré un arsenal juridique solide, la gestion des documents administratifs et archives dans l'administration publique sénégalaise souffre de nombreuses insuffisances qui nuisent à la transparence et au contrôle de l'action publique
El hadji Gora Sène et Khalifa Ababacar Tall |
Publication 03/05/2024
Un pilier essentiel à la mise en œuvre du « Jub, Jubal, Jubbanti » (Transparence et Bonne gouvernance)
L'élection de monsieur Bassirou Diomaye Faye à la présidence de la République du Sénégal a replacé dans le débat public les questions de la bonne gouvernance, de la transparence et de la reddition des comptes dans la gestion des affaires publiques. Rappelons aussi que lors de la campagne électorale, le candidat Bassirou Diomaye Faye avait fait de ces questions son thème de prédilection. Une fois élu, le président Faye porte un discours qui traduit une volonté affichée de faire de la reddition des comptes un impératif et de la transparence une obligation, d’où le triptyque « Jub Jubal Jubbanti ».
La bonne gouvernance, transparence et la reddition des comptes font partie des cinq orientations majeures du « Projet de transformation systémique du Sénégal » qui est le nouveau référentiel des politiques publiques. Ce changement s'inscrit en droite ligne avec les principes de la Constitution qui proclame dans son préambule que le Sénégal affirme « son l’attachement à la transparence dans la conduite et la gestion des affaires publiques, ainsi qu’au principe de bonne gouvernance ».
Par ailleurs, face à un environnement économique difficile et des urgences sociales, le Sénégal se voit contraint de prendre des mesures visant à instaurer la bonne gouvernance, et l’efficacité et l’efficience dans la gestion des ressources publiques.
Les dispositifs de bonne gouvernance, de transparence et de reddition des comptes s’appuient sur plusieurs outils dont les documents administratifs et archives. Ces derniers découlent des activités de l’administration et reflètent la façon dont les affaires publiques ont été conduites et gérées par les agents de l'Etat. D’où les précieuses sources d’information qu’ils constituent pour les organes de contrôle (audits) et les citoyens (accès à l’information administrative).
Ainsi, il est pertinent d’aborder et de montrer la contribution d’une gestion optimale des documents administratifs et archives au développement d’une culture de bonne gouvernance dans l'administration publique sénégalaise.
Clarification conceptuelle des archives et des documents administratifs
À tort, le périmètre des archives et des documents administratifs a tendance à être élargi à tous les documents produits ou reçus par les organismes publics et les institutions étatiques. D’où la nécessité de préciser ces deux concepts. Compte tenu de leur importance dans les administrations publiques et dans le but de délimiter leur champ d’application, leur définition est généralement donnée dans les dispositifs juridiques nationaux qui leur sont dédiés.
Ainsi, dans son article premier, la loi n° 2006-19 du 30 juin 2006 relative aux archives et aux documents administratifs définit les archives comme suit : « Les archives sont constituées par l’ensemble des documents, quels qu’en soient la nature, la date, la forme ou le support matériel, produits ou reçus par une personne physique ou morale dans le cadre de son activité publique ou privée. Les archives sont soit publiques, soit privées »[1].
Cette définition englobe les trois catégories d’archives à savoir les archives courantes (utilisées régulièrement pour la gestion quotidienne des affaires), les archives intermédiaires (consultées épisodiquement à titre de référence ou de preuve) et les archives historiques (conservées pour constituer la mémoire). Elle prend aussi en compte les documents et supports numériques (information numérique, sites et pages web, courriers électroniques, bases de données, les fichiers multimédias, etc.)
S’agissant des documents administratifs, la loi d’archives susmentionnée précise en son Article 21 que : « Les documents administratifs sont constitués par l’ensemble des documents produits ou reçus, dans l’exercice de leurs activités par les autorités administratives à savoir l’Etat, les collectivités locales, les établissements publics, les sociétés nationales, les sociétés à participation publique et les organismes privés chargés de la gestion d’un service public ou investis d’une mission de service public».
À l’image des archives, les documents administratifs peuvent être physiques ou numériques. Plus précisément, ils sont constitués par « les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions »[2].
Les documents administratifs et archives : des outils de management public
Selon Nicolas Charest, « le management public consiste en un ensemble de processus et d'outils visant à atteindre une performance optimale d'une organisation vouée au service public [3]».
Dans l’objectif d’atteindre la « performance optimale », le management public mobilise des outils et fonctions supports parmi lesquels figurent les ressources informationnelles dont une des composantes sont les documents administratifs et archives. Ces derniers, à la fois information et supports d’information, représentent un enjeu stratégique et constituent des moyens d’action pour les autorités administratives. Comme mentionné plus haut, les documents administratifs et archives constituent et conservent les traces de l’activité des organismes publics (et privés délégataires d’un service public) et celles de la gestion des affaires dont ils ont la charge. D’où les fonctions informative, administrative et justificative des documents administratifs et archives. Lesquelles fonctions sont essentielles à la gestion des affaires publiques.
D’abord, les documents administratifs et archives contiennent des informations fiables, validées, actualisées et stratégiques qui sont indispensables au traitement des dossiers et à la prise de décision (fonction informative). Ensuite, ils constituent les documents et dossiers nécessaires à la gestion courante des affaires et à la continuité de l’activité des autorités administratives (fonction administrative). Et enfin, ils ont une valeur probante ou juridique. Ce qui leur permet de justifier des droits et obligations ou d’éclairer des actes posés dans le cadre de l’action administrative (fonction justificative). Au vu de ces trois fonctions, les documents administratifs et archives demeurent des outils essentiels au management public et qui concourent à son objet qu’est l’atteinte de la performance optimale.
Par ailleurs, les trois fonctions susmentionnées des documents administratifs et archives, au-delà de leurs perspectives managériales, renforcent l’obligation légale qu’est la conservation des documents administratifs et archives par les organismes publics et organismes privés investis d’un service public. En outre, la conservation des documents administratifs et archives permet aux organes de contrôle de mener à bien leur travail et aux citoyens de jouir de leur droit d’accès à l’information administrative. D’où leur pleine contribution à la transparence et à la bonne gouvernance.
La gestion des documents administratifs et archives : un gage de transparence et de bonne gouvernance
La transparence renvoie à la qualité d’une organisation qui informe sur son fonctionnement, ses actions, ses décisions, ses résultats et ses projets.[4] C’est une condition sine qua non aux dispositifs de reddition des comptes et de redevabilité. Dans le sens où sa réalisation repose sur l’accès à l’information, l’archiviste devient un acteur clé dans ce processus. Celui-ci exerce, en effet, trois activités qui servent de leviers essentiels à la transparence. Il s’agit de la sécurisation des données et documents liés à la gestion administrative et financière, leur classement pour une facilité de repérage et la réponse aux demandes de communication conformément aux dispositifs juridiques.
Promotion de la redevabilité par la conservation des documents
Les dispositifs légaux obligent l’administration et ses composantes à conserver pendant une période de dix ans les pièces justificatives des opérations de recettes, de dépenses, de trésorerie et de patrimoine. Cette prescription est notamment énoncée dans l’Acte uniforme de l’OHADA du 26 janvier 2017 relatif au droit comptable et à l’information financière, dans la loi n° 2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions électroniques ainsi que dans le décret n° 2020-978 portant Règlement général sur la Comptabilité publique.
Dans cette logique, l’archiviste assure la disponibilité des archives et des documents administratifs jusqu’à l’expiration de leur délai de conservation. Pour ce faire, un outil comme le calendrier de conservation est proposé dans le champ archivistique. Il répertorie tous les types de documents de l’administration, fixe la durée de conservation pour chacun d’entre eux et définit le sort final à la fin de cette période. Les conditions de protection de l’intégrité physique et intellectuelle des documents sont aussi prises en compte en termes d’équipements, de locaux et d’environnement.
L’enjeu est d’assurer la traçabilité des actes administratifs pour contrecarrer les pertes de données et les destructions incontrôlées de documents qui compromettent la revue documentaire des organes de contrôle.
L’apport du classement des documents au contrôle administratif
L’administration produit et reçoit une grande quantité de documents dont la gestion, dans la plupart de ses démembrements, souffre de dysfonctionnements et d’insuffisances. Il s’agit particulièrement d’absence de modes de classement (thématique, numérique, chronologique), de déficit d’équipements et de locaux adaptés. C’est ce qui ressort du dernier rapport public de l’Inspection Générale d’Etat (IGE) publié en 2015. Or ces manquements constituent de réels obstacles à la redevabilité et à la reddition des comptes.
À cet égard, la mise en place de systèmes de records management peut trouver un écho favorable au sein des services étatiques. Dans cette démarche, l'archiviste intervient dès la création ou la réception du document pour appliquer les premières actions d’enregistrement, de classement et d’indexation. En plus, le plan de classement, conçu en fonction des activités générant les documents, attribue à chaque dossier un emplacement précis suivant une structure logique et hiérarchique. Il en résulte une maîtrise de la production documentaire et un repérage instantané lors des recherches subséquentes.
L’accès à l’information dans une gouvernance transparente
Les services d’archives sont des médiateurs entre l’administration et les citoyens en garantissant l’accès et la diffusion des archives et documents administratifs au public soucieux de s'informer sur la conduite des politiques publiques. Conformément à la loi n°2012-22 portant Code de transparence dans Gestion des Finances publiques, l’administration est incitée à publier « dans des délais appropriés, les informations sur les finances publiques. » et d’informer régulièrement le public « sur les grandes étapes de la procédure budgétaire, leurs enjeux économiques et sociaux ».
Dans cette perspective, la mise en ligne de produits et services sur Internet (sites web, portails documentaires, réseaux sociaux, etc.), les publications en ligne et sur papier (ouvrages, guides des archives, articles de presse, etc.), la formation et la sensibilisation (expositions, journées portes ouvertes, séminaires) sont des nouveaux canaux pour élargir le champ de la diffusion de l’information.
Au sein des services d’archives, l’accès aux documents est libre et gratuit. Il s’organise autour de l’instrument de recherche permettant d’identifier et de repérer les documents recherchés, et de l’autorisation légale qui prend en compte les délais de communicabilité et la protection de la vie privée. Cependant, les professionnels des archives sont tenus de trouver le juste équilibre afin de protéger les intérêts publics et privés sans compromettre le droit à l’information.
Cette démarche proactive crée une relation de confiance entre l’administration et les usagers et participe à la formation de citoyens informés et conscients, capables de formuler des opinions constructrices sur les questions politiques, économiques et sociales
La nécessité de valoriser la gestion des documents et des archives dans l’administration publique sénégalaise
Comme démontré dans les précédentes parties de ce texte, la gestion des archives et des documents administratifs est un pilier essentiel à la gestion des affaires publiques, à la bonne gouvernance et à la transparence. D’où l’enjeu stratégique qu’elle représente pour les pouvoirs publics et les citoyens.
Cependant, il faut souligner que l’Administration publique sénégalaise connaît de nombreux manquements en matière de gestion des documents et des archives (non-respect de la législation et des textes en vigueur, absence de contrôle, insuffisance des moyens humains matériels et financiers, manques de compétences professionnelles, absence de référentiels, non harmonisation des pratiques de gestion documentaire, locaux inadaptés à la conservation des archives, absence de structure de gestion des archives, etc.), d’où les nombreuses pertes préjudiciables (temps, documents, informations, ressources publiques, droits) qu’ils occasionnent pour l'État et les citoyens.
D’ailleurs, plusieurs rapports publiés notamment par la Cour des comptes, l’IGE, l’ARMP soulignent et recommandent annuellement de remédier aux manquements liés à la gestion des documents et archives constatés dans de nombreux organismes publics et parapublics. Ces manquements constituent un obstacle majeur au travail des contrôleurs nécessitant l’urgence d’agir en ce sens.
Rappelons que le Sénégal dispose d’une législation et des textes qui encadrent toute action en matière de gestion de documents et d’archives, de professionnels des archives compétents et qualifiés et d’un institut universitaire (EBAD) qui forme des archivistes et vivifie la recherche en information-documentation. Le maillon manquant de la chaîne reste la volonté politique. Cette dernière, au-delà des discours, promesses et engagements, doit se traduire en actes, notamment par l’application dans toute sa rigueur de la loi d’archives, le renforcement des moyens matériels et financiers des services d’archives, le recrutement d’archivistes au sein des administrations publiques et la construction de la maison des archives tant attendue et ardemment souhaitée par les archivistes sénégalais.
La volonté affichée par les nouvelles autorités de mettre en place une administration efficace et performante, et d’instaurer la transparence et la bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques ne peut se concrétiser sans la prise en compte et la valorisation de la gestion des documents et archives. Celle-ci demeure un pilier essentiel et incontournable à un management public de qualité, efficient et transparent.
El hadji Gora Sène est Ingénieur en Gestion documentaire, Master 2 en Stratégies informationnelles et Documents numériques
Gouvernement du Sénégal. Loi n° 2006-19 du 30 juin 2006 relative aux archives et aux documents administratifs. Journal officiel n° 6291 du samedi 5 août.
[1] In : JORS n° 6291 du samedi 5 août 2006, pp. 800-802
[4] Définition proposée par le Grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française.
par Bassirou Diomaye Faye
À TOUS LES ACTEURS DE LA PRESSE
Il est de notre devoir commun de veiller à ce que l'information demeure un bien public accessible et non entravé. Nous œuvrerons à protéger les journalistes, tout en promouvant une régulation équitable des nouveaux médias
À l'occasion de ce 3 mai 2024 marquant la célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le chef de l'État Bassirou Diomaye Faye exprime dans une lettre ouverte, sa profonde gratitude pour l'engagement des médias en faveur d'un journalisme de qualité au service du débat public. Il réitère son attachement indéfectible à une presse libre et indépendante, gage d'une démocratie solide.
Mesdames et Messieurs,
En ce jour où le monde célèbre la liberté de la presse, je souhaite exprimer, avec la plus grande emphase, le rôle crucial que vous, journalistes et médias, assumez dans la consolidation et la préservation des fondements démocratiques de notre nation. La liberté de presse, véritable pierre angulaire des sociétés démocratiques, garantit que chaque citoyen reste informé, engagé, et participe activement aux débats essentiels qui façonnent notre avenir commun.
L'absence de débats d'idées vigoureux, d'une vérification scrupuleuse des faits et d'une diversité de perspectives affaiblit la démocratie. Votre mission se révèle d'autant plus essentielle à une époque marquée par une rapide transformation numérique qui, malheureusement, engendre également une prolifération de la mésinformation, de la désinformation, et des discours de haine. Ces fléaux menacent notre cohésion sociale et ébranlent les fondements de notre coexistence pacifique, affectant parfois même les symboles les plus chers de notre nation.
Il est de notre devoir commun de veiller à ce que l'information demeure un bien public accessible et non entravé. Cela requiert un engagement renouvelé pour une presse indépendante et robuste, ainsi qu'une action résolue pour assurer une plus grande transparence des plateformes en ligne et développer l'éducation aux médias et à l'information pour tous les citoyens.
Dans cet esprit, je réaffirme mon engagement à soutenir une presse libre et diversifiée, pilier indispensable de notre démocratie. Nous œuvrerons à renforcer les mécanismes de soutien à la liberté de la presse, à protéger les journalistes dans l'exercice de leur fonction et leur quête de la vérité, tout en promouvant une régulation équitable des nouveaux médias.
Chacun d'entre nous a son rôle à jouer dans l'édification du Sénégal que nous souhaitons bâtir ; celui de la presse n'est pas des moindres. Je n'ai aucun doute que vous serez à la hauteur des défis qui se dressent devant nous et qu'ensemble nous porterons plus haut le flambeau d'un Sénégal démocratique, résilient et prospère.
J'avais grandement souhaité partager un moment de convivialité avec vous tous pour célébrer ensemble cette journée significative. Cependant, je dois participer au Daaka à Médina Gounass, événement important pour notre communauté spirituelle. Aussi, le déjeuner auquel, je souhaitais vous convier est-il reporté à une date ultérieure.
Toutefois, soyez assurés que nous fixerons une nouvelle date très prochainement, et j'attends avec impatience l'occasion de vous exprimer ma gratitude en de vive voix.
Je vous remercie pour votre engagement et votre collaboration inestimable. Ensemble, poursuivons nos efforts à défendre la vérité et à enrichir le débat public par le dialogue et l'information juste.
Veuillez recevoir, chers acteurs de la presse et des médias, l'expression de ma plus haute considération.
CICODEV AFRIQUE MET LES AUTORITÉS SÉNÉGALAISES EN GARDE CONTRE LES ENGRAIS CHIMIQUES
Loin de s'attaquer aux défis cruciaux de la santé et de la fertilité des sols, ces stratégies persistent à promouvoir des pratiques qui ne feront qu'exacerber la dégradation des sols en Afrique.
L’Institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement (CICODEV Afrique) conseille aux autorités sénégalaises d’éviter de mettre en danger la santé des populations et la qualité des sols avec des ‘’décisions inappropriées’’ concernant les engrais.
L’organisation de défense des droits des consommateurs tire la sonnette d’alarme à quelques jours du sommet de l’Union africaine consacré aux engrais, de mardi à jeudi prochains à Nairobi, la capitale du Kenya.
Cette rencontre de l’organisation panafricaine est présentée comme un cadre devant ‘’définir un plan d’action décennal pour les engrais en Afrique, en les augmentant considérablement’’.
CICODEV Afrique, une organisation basée à Dakar, dit dans un communiqué avoir constaté ‘’beaucoup de lacunes dans cette stratégie du plan d’action africain, avec des impacts négatifs sur les sols […] et les humains’’.
‘’Non seulement ces stratégies négligent les défis essentiels de la santé et de la fertilité des sols, mais elles continuent à promouvoir des méthodes qui vont aggraver la dégradation des sols en Afrique’’, prévient-elle.
Les ‘’stratégies’’ prévues par l’Union africaine pour le sommet de Nairobi comportent ‘’de réels dangers […] sur la sécurité alimentaire, la santé publique et la diversité des semences indigènes’’, lesquelles ‘’sont fondamentales pour la souveraineté alimentaire’’, soutient l’organisation de défense des consommateurs.
‘’Il serait dangereux pour nous que le Sénégal accepte une politique agricole basée sur l’utilisation des engrais chimiques et des OGM (organismes génétiquement modifiés). Cela va tuer les sols et aura un impact négatif sur la santé des populations’’, avertit le directeur exécutif de CICODEV Afrique, Amadou Kanouté.
Il ajoute que ‘’la souveraineté alimentaire tant chantée par le Sénégal ne saurait nullement s’accommoder des engrais chimiques et des organismes génétiquement modifiés’’.
‘’Nous soutenons un modèle juste et inclusif pour restaurer la biodiversité et favoriser des systèmes alimentaires résilients. Et ce modèle est l’agroécologie’’, a argué M. Kanouté.
Le directeur exécutif de CICODEV Afrique et membre du conseil d’administration de l’Alliance pour une souveraineté alimentaire en Afrique dit encourager le nouveau gouvernement sénégalais à mener ‘’une transition agroécologique’’, laquelle sera sa ‘’voie de salut [vers] la souveraineté alimentaire’’.
CAMPAGNE AGRICOLE- VERS LA DIGITALISATION ET LA DISTRIBUTION DES SEMENCES PAR LES FDS
Afin d'optimiser l'allocation des semences et d'accroître l'efficacité du système, le gouvernement envisage une restructuration complète des mécanismes de financement.
Le Premier ministre, Ousmane Sonko, a annoncé, vendredi, lors du conseil interministériel dédié à la campagne agricole 2024-2025, au Centre international de conférences Abdou Diouf de Diamniadio, que la distribution des semences sera désormais confiée aux forces de défense et de sécurité, en plus d’être digitalisée.
Le Premier ministre a souligné que malgré les investissements massifs alloués au secteur agricole ces dernières années, les résultats escomptés n’ont pas été atteints. Plus de 310 milliards de F CFA ont été investis entre 2020 et 2023, mais ces ressources n’ont pas pleinement bénéficié aux acteurs agricoles concernés.
Dans un souci de restructuration et d’efficacité, le gouvernement prévoit une refonte des mécanismes de subvention et de financement pour garantir une distribution adéquate des semences. Cette refonte inclut un virage vers la digitalisation du système de distribution des intrants agricoles, ainsi que la sécurisation de ce processus par les forces de défense et de sécurité.Le Premier ministre a souligné l’importance de cette initiative, la qualifiant de première du genre depuis l’arrivée au pouvoir du président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye. Pour accompagner cette transition, des sessions de renforcement des capacités seront organisées pour informer et former les acteurs agricoles sur les nouveaux schémas de financement et de distribution.
FAYE-SONKO FACE AUX PIÈGES DE LA COHABITATION
EXCLUSIF SENEPLUS - La transition en cours sera apaisée ou chaotique selon les considérations des nouvelles autorités en étroite collaboration avec tous les acteurs politiques concernés, sans exclusion - ENTRETIEN AVEC ABDOU FALL
Propos recueillis par Saxewar Diagne |
Publication 03/05/2024
Abdou Fall scrute les priorités du nouvel exécutif dans ce contexte singulier marqué notamment par l'absence de majorité à l'Assemblée nationale. S'il salue certaines initiatives, l'ancien ministre juge qu'il faut d'abord se concentrer sur les réformes institutionnelles et la mise en place des instruments de gouvernance avant d'engager certains dossiers. Le leader du mouvement Alternative citoyenne Andu Nawle appelle à privilégier les logiques de compromis sur la confrontation pour une transition apaisée.
SenePlus : À votre avis, quel impact a eu la récente élection présidentielle sur la scène politique sénégalaise ?
Abdou Fall : Cette élection marque la fin d'un cycle politique et l'avènement d'un autre dans notre pays.Elle a consacré un face-à-face quasi exclusif entre deux blocs politiques. Yewwi et Bennoo ne laissant de la place à aucune force intermédiaire. L'impact réel du ralliement tardif de Wàlu de Karim Wade dans le score du candidat Diomaye Faye est difficile à déterminer. Il en est de même de l‘issue d’une participation du candidat du PDS. Ce qui est en l'état actuel des choses factuel et incontestable, c'est le face-à-face entre les deux blocs : Yewwi d'une part, sous le leadership politique de la paire Diomaye/Sonko et Bennoo d'autre part, que Macky sall a admirablement piloté pendant deux mandats avec tous ses alliés. Une deuxième remarque de fond concerne le décalage entre la présidentielle et les législatives, ce qui était fortement reclamé par l'opposition de l'époque et dont la conséquence aujourd'hui est de nous conduire à une situation de transition inachevée avec un président élu devant démarrer son magistère sur une période relativement longue au pouvoir, dans un cadre institutionnel de cohabitation de fait entre un nouvel exécutif confronté à un parlement qui échappe totalement à son contrôle. Un parlement où la force politique dominante est sous le contrôle de la majorité exécutive sortante. Cette majorite sortante a été certes victime d'un coup de colère retentissant des citoyens-électeurs, phénomène qui mérite une analyse fine de notre camp, mais qui n'en reste pas moinssur plus de la moitié de l'année fortement ancrée au parlement. C’est la même chose concernant les autres institutions politico-administratives du pays. Qu'il s'agisse du Conseil économique, social et environnemental ; et du Haut conseil des collectivités territoriales, ainsi que dans l'écrasante majorité des communes et départements du pays.C'est encore là "un pied de nez" de la démocratie sénégalaise qui appelle à mon avis, une gestion politique avisée, lucide, sereine et très responsable.
À quoi pourrait ressembler en pratique, une telle gestion ?
La politique pour moi, c'est avant tout l'art de gérer le réel, de faire avec le réel, surtout lorsque l’on gouverne. En l'état actuel de la situation politique du pays, il faut à tout prix éviter de faire prévaloir les logiques de rapports de forces sur les logiques de compromis. C'est parce qu’il l'a si bien compris que le président Macky Sall avait pris, à l'approche de l'élection du 24 mars, les mesures courageuses et salutaires porteuses de cette transition ordonnée qui nous vaut le respect et l'admiration du monde. C'est aujourd'hui le président Diomaye Faye et ses amis qui sont en situation de faire la preuve de leur leadership managérial d'un État et d'une nation aussi sophistiqués que les nôtres. Et cette logique de compromis pourrait se résumer en une entente entre les parties concernées par cette situation de cohabitation de fait. Afin de définir ensemble les conditions de gestion sereine de cette délicate période de transition. Une situation tout à fait inédite.
C’est-à-dire ?
Une consultation officielle et tout à fait transparente des leaders et partis concernés au premier chef par cette transition, à savoir les parlementaires et les responsables des principales institutions du pays. Je pense que c'est le moment pour le président nouvellement élu de recourir à la pratique de la concertation avec les leaders politiques et personnalités de bons conseils pour échanger et statuer sur les conditions et modalités de la gestion de cette transition, au niveau du parlement en particulier. Cette transition sera apaisée ou chaotique selon sa prise en charge par les nouvelles autorités en étroite collaboration avec tous les acteurs politiques concernés, sans exclusion. Et J'insiste sur la transparence de cette démarche si elle devait avoir lieu. Pour éviter toute forme de suspicion sur le sens d'une telle initiative. Il est temps dans ce pays, de rompre avec cette conception puérile et infantile de la relation pouvoir/opposition qui n'est conçue qu'à travers des logiques de confrontations. Alors que toute notre histoire politique nous apprend que nos avancées qualitatives ont été toujours réalisées à travers des démarches de compromis. Les stratégies de conflit et de tension ne sont jamais payantes dans le long terme. Pas au Sénégal en tout cas.
Pensez-vous donc qu'il faille revoir la priorité accordée à la réédition des comptes, comme en témoigne le déplacement du président Diomaye Faye à Thiès le 1er mai ?
Ce déplacement n'était pas opportun à mon avis. Il dispose de bien des moyens d'accès aux informations utiles sur le foncier sans personnellement se déplacer. Ce sujet et d'autres de même nature relèvent selon moi d'actes de gestion à des niveaux qui ne doivent impliquer un chef d'État à ce stade des procédures de traitement. Rien ne doit être laissé en rade. Mais pour l'instant, je situe les priorités ailleurs. Pour une équipe au pouvoir qui n'a pas encore fini de s'installer, avec de surcroît un environnement institutionnel aussi délicat et précaire, la sagesse pour ma part aurait consisté à privilégier les conditions d'une sérénité permettant de parachever le processus en cours de mise en place des instruments de gouvernance du pays et de prise en charge des priorités citoyennes les plus pressantes. Je respecte toutefois les choix des autres d'autant qu'ils sont les vainqueurs du moment, ce qui les rend maîtres de la décision.
Le nouveau gouvernement a-t-il réellement les moyens d'implémenter sa politique ?
En tout cas, ils n'ont pas encore tous les moyens de leur politique, au regard de la configuration des forces actuelles en présence au sein des institutions du pays. Le pouvoir exécutif actuel est certes sur une courbe ascendante, mais il porte objectivement des limites que leurs dirigeants devraient bien se garder de perdre de vue. Quoique certains puissent en penser ou dire, les Sénégalais n'ont nulle envie aujourd'hui de retomber, après le soulagement de l’élection du 24 mars dernier, dans l'ambiance des tensions et conflits traversés entre 2021 et 2024. Les gens ont bien conscience des défis à relever dans un contexte de grande complexité des questions fondamentales à traiter et des urgences auxquelles il faut faire face pour encore être embarqués dans de nouvelles aventures sans issue. La priorité c’est, à mon avis, calmer le jeu et créer les conditions du parachèvement des procédures d'accès aux différents leviers de pouvoir. Or encore une fois, les rapports actuels des forces au sein des différentes institutions ne permettent ni à la nouvelle majorité gouvernementale, ni à l'actuelle opposition parlementaire de faire ce qu'elles veulent. Et c'est tant mieux pour la démocratie ! (rires… )
Quelles devraient être ces priorités en termes plus clairs ?
Leur plan d'actions politiques à cette étape ainsi que les urgences sur lesquelles ils sont attendues en termes de prise en charge des soucis premiers des citoyens, il leur appartient d'en décider. C'est par contre sur les aspects en rapport à la République et la nation que nous avons parfaitement notre mot à dire. Ce sont là des sujets qui transcendent les majorités. C'est le cas par exemple des réformes institutionnelles dont certaines sont mises à l'ordre du jour par les évolutions propres à notre histoire politique avec les mutations qui en découlent naturellement au plan institutionnel. Les réaménagements institutionnels dans le sens d'un rééquilibrage des pouvoirs entre le président de la République, l'Assemblée nationale, le gouvernement, sont une exigence incontournable à soumettre à la décision de tous. Car cela dépasse le cadre d'une majorité, par définition transitoire en démocratie. J'avoue que j'attendais le président Diomaye et son gouvernement davantage sur cette question essentielle que sur les Assises de la justice et les lanceurs d'alerte. J'en profite pour attirer fortement l'attention sur certaines propositions portées par certains groupes d'activistes. Tel que j'entends certains parler, ils sont dans la logique de gestion de nos États avec des principes et règles d'organisation non gouvernementales. L'État n'est pas une ONG. L'état est une OG ! Il ne faudrait pas qu'on se laisse entrainer dans le jeu des gadgets politiques de sociétés qui sont bien loin des réalités politiques, économiques et culturelles de nos pays. Je vois la période qui nous sépare des prochaines législatives qui ne peuvent avoir lieu avant l'année prochaine comme une période à mettre à profit pour l'évaluation critique de nos quatre décennies de multipartisme intégral (1981/2024) et de l'écosystème de notre démocratie sources d’avancées certaines avec trois alternances en 25 ans mais qui a aussi révélé bien des travers au niveau des partis, des médias, des syndicats et de la société civile. Des recadrages importants sont à opérer à tous ces nouveaux afin qu'on aille aux prochaines législatives dans des conditions d'une démocratie mise à jour dans ses finalités et son mode de fonctionnement. Ces sujets de fond sont pour moi, le préalable pour le Sénégal du renouveau que nous devrions construire ensemble dans le strict respect des identités politiques de tous. Ce sont là les bons défis à mon avis.
Vous donnez l'impression de n'avoir pas perdu le pouvoir…
Nous avons perdu une bataille,non la guerre.Dans ce face-à-face Yewwi/ Bennoo, nous gardons intactes nos chances d'une gouvernance partagée du pays, le schéma idéal pour conduire le Sénégal dans la voie d'un renouveau politique souhaité manifestement par nos compatriotes dans leur écrasante majorité. Un Bennoo, un wallu et certaines identités poliques remarquables affaiblis serait un gâchis pour les équilibres politiques du Sénégal. L'expérience capitalisée dans les formations politiques de ces deux principaux blocs devraient être mise à profit dans le cadre d'un modèle de démocratie d'équilibre que le Sénégal a aujourd'hui les moyens de promouvoir au bénéfice de la stabilité, de la paix et du développement et au service d'une sous-région stabilisée et d'une Afrique unifiée. Ce sont là pour moi les grands et les bons chantiers que notre large coalition Bennoo doit à présent explorer à la suite d'une évaluation sans complaisance de nos 12 années d'exercice partagé du pouvoir.
Comment votre coalition s’organise-t-elle face à ses dissensions internes apparues au grand jour après le scrutin ?
Je ne nie pas du tout l'existence de ces dissensions dont vous faites état. C'est précisément pour cette raison que je souhaite vivement qu'on procède dans nos rangs à un diagnostic sans complaisance. En insistant sur "sans complaisance". Le président Macky Sall a la responsabilité de rassembler, de réunifier et de moderniser son parti. Lui et ses alliés aux premiers desquels le président Moustapha Niasse, Mme Aminata Mbengue Ndiaye, nos amis des partis de gauche, les principaux courants politiques issus du PDS, tous les leaders de partis et mouvements compagnons historiques doivent à mon avis se retrouver au plus vite pour faire le point sur le chemin parcouru et tracer les lignes de forces de nouveaux schémas d'avenir. Cette perspective qui est en tout cas celle de notre mouvement Alternative citoyenne Andu Nawle qui confirme plus que jamais son ancrage au sein de Bennoo et sa confiance au président Macky Sall.
Le premier gouvernement Faye-Sonko et les récentes nominations à des directions générales présentent un faible nombre de femmes. Cela relève-t-il d’une faute politique ou d’un simple faux-pas que la nouvelle administration pourrait corriger dans le futur ?
Je ne pense pas à priori qu'il s'agisse d'une volonté délibérée de marginaliser les femmes. Certainement un faux-pas comme vous dites, qui sera certainement corrigé prochainement au regard de la clameur provoquée par ce déséquilibre manifeste. Je pense toutefois qu'en cette matière il y a lieu de recommander la prudence. Il peut parfaitement être possible au regard des évolutions profondes de nos sociétés, en particulier au niveau des élites, de se retrouver dans des situations où naturellement la proportion des femmes soit supérieure à celle des hommes dans les postes stratégiques de management. Cette tendance est déjà observable dans certaines sphères de management des grandes entreprises privées ou parapubliques. Et là, je réagis plutôt en enseignant attentif à certaines mutations qui s'opèrent dans les milieux professionnels d'élite dans plusieurs disciplines et métiers. Un sujet intéressant à mon avis sur lequel on pourrait revenir profondément mais dans une perspective d'analyse des mutations sociétales dans le monde et dans nos pays.
Les leaders de Pastef avaient promis des appels à candidatures pour certains postes clés. Les nominations récentes représentent-elles une rupture de promesse ou une mesure exceptionnelle nécessaire pour des résultats rapides ?
Sur ce sujet et sur d’autres, les engagements pris n'ont pas toujours obéi à un examen sérieux et approfondi de leurs conséquences réelles en termes de gouvernance. Les démocraties ont toutefois prévu une marge de tolérance sur la part de démagogie et de populisme auxquels on se laisse souvent aller lorsqu'on n'est pas en situation effective de décision. Sans donner dans la prétention, certaines annonces font sourire pour des personnes qui ont un tant soit peu l'expérience du pouvoir. Le Professeur Cheikh Anta Diop dans certains de ses articles d'avant nos indépendances appelait les intellectuels et hommes politiques africains à la sagesse de comprendre que la bonne volonté et les bonnes intentions sont loin de suffir pour opérer les transformations qualitatives que nos sociétés étaient en droit d'attendre d'eux une fois l'indépendance acquise. Plus profondément, il invitait à exiger des futurs dirigeants de nos pays qu’ils cultivent le culte absolu de la rigueur et de l'excellence dans tous les domaines. Ces paroles sages et mobilisatrices restent pour nous d'une très grande actualité.
Pour terminer, vous qui êtes un enseignant de formation et de métier, qu'avez-vous pensé de la création à la présidence de la République d'une Direction des affaires religieuses et de l'insertion des diplômés de l'enseignement arabe ?
J'ai du mal à saisir la logique de cette décision, qui me semble contre-productive dans le contexte sénégalais si l'on considère certains aspects historiques et les mécanismes de fonctionnement de notre société. Et puis aucune urgence ne justifie à mes yeux ces décisions. Je pense encore une fois que les concertations nationales sur les questions fondamentales de gouvernance sont le lieu idéal pour aborder sereinement et de façon approfondie les grands sujets du rapport entre nos institutions et les forces motrices de notre société, parmi lesquelles les communautés religieuses de toutes confessions et les intellectuels de culture
LE FLÉAU DE LA PRÉCARITÉ SECOUE LA PRESSE
Une étude de la CJRS dresse un constat peu reluisant des conditions de travail des journalistes au Sénégal : contrats précaires, salaires insuffisants, absence quasi-totale de protection sociale
Contrat, rémunération, cotisations sociales, couverture maladie : la Convention des jeunes reporters du Sénégal (CJRS) a dressé un tableau peu reluisant des conditions de travail des journalistes dans une étude rendue publique à l’occasion de la Journée de la liberté de la presse célébrée ce vendredi.
Plus de 200 jeunes professionnels ont répondu au questionnaire sur la nature de leurs contrats, le niveau de leurs rémunérations, le respect des cotisations à l’IPRES et à la Caisse de sécurité sociale, selon l’étude dont l’APS a eu connaissance.
‘’La plupart se contentent du minimum : des salaires à la fin du mois. Et même là, c’est la croix et la bannière pour ceux qui en ont. Beaucoup sont dans le bénévolat le plus triste, souvent obligés de dépendre des subsides immorales que leur donne indument certains organisateurs d’activités et qu’on appelle pompeusement perdiem’’, lit-on dans le rapport.
Sur 216 travailleurs des médias interrogés, 23,1% disent avoir des contrats à durée indéterminée (CDI) contre 22,2% de CDD), soit au total 45,3%. 17,1% ont soutenu avoir des contrats de prestation contre 11,1% de stagiaires. Les 26,4% n’ont aucun lien contractuel avec leurs employeurs, détaille l’étude.
‘’L’étude montre également que parmi ceux qui disent avoir des contrats, il y en a qui n’ont pas d’exemplaires de leurs contrats. Sur les 183 personnes ayant répondu à la question, seuls 33% disent détenir un exemplaire de leurs contrats de travail, contre 61,7% qui n’en ont pas. Les autres n’ont pas de réponse’’, mentionne le rapport.
L’enquête a révélé que 31,5% des travailleurs ayant répondu au questionnaire n’ont pas de salaire. 68,5% bénéficient d’une rémunération.
Selon l’étude, ‘’très peu d’entreprises respectent les barèmes prévus par la Convention collective’’, alors que ‘’c’est la croix et la bannière dans beaucoup d’organes de presse’’ pour percevoir son salaire.
Les résultats de l’enquête indiquent que 18,5% des personnes interrogées ont des rémunérations en deçà de 75000 francs ; 14,8% entre 75000 et 100000 francs ; 14,8 entre 100000 et 150000 francs ; 10,2% entre 150000 et 200000 FCFA.
Les travailleurs ayant un salaire dépassant la barre des 300000 francs sont estimés à 7,9%, tandis que ceux qui ne relèvent d’aucune de ces catégories sont autour de 20,4%.
Selon l’étude, ‘’la plupart des personnes ayant participé à l’enquête sont des reporters, soit plus de 77% ; 9,3% ont dit être des rédacteurs en chef’’.
Sur la régularité du paiement des salaires, 54,2% de l’échantillon ont répondu qu’ils sont payés au-delà du 8 du mois. Environ 45% perçoivent avant cette échéance conformément à la législation.
L’étude relève que 77,7% des personnes enquêtées disent n’avoir pas de bulletins de salaires contre 22,3%.
Elle note que dans les entreprises de presse, ‘’les obligations sociales ressemblent plutôt à un luxe hors de portée de la plupart des reporters’’.
Sur les 215 personnes interrogées, ‘’86% disent ne pas être pris en charge par leur entreprise quand ils sont malades’’ et n’ont pas de numéro IPRES.
La CJRS souligne que les professionnels des médias, ‘’mal payés, dépourvus de toutes couvertures sociales, font partie de ceux qui travaillent le plus et les moins protégés’’.
L’enquête montre qu’environ 34% seulement travaillent 8 heures par jour ; 30,7% entre 8 et 10 heures ; 34,4% plus de 10 heures de temps de travail par jour.
Sur le plan syndical, l’étude a également montré que ‘’le droit de syndiquer est un véritable luxe dans le milieu de la presse’’.
En effet, seuls 14,9% disent être affiliés au SYNPICS, qui est la principale organisation de défense des reporters. En revanche, 23,3% ont répondu qu’il existe une section SYNPICS dans leurs rédactions.
Pour corriger ce tableau, la CJRS recommande, entre autres, de ‘’veiller à l’effectivité des règles prévues par le Code de la presse pour toute entreprise dans le secteur’’ et d’exiger la transparence dans la gouvernance des entreprises de presse.
Elle demande la création d’un environnement propice pour le développement des médias ; la mise en en place d’une fiscalité adaptée et allégée pour le secteur de la presse ; la multiplication des visites de contrôle de l’Inspection du travail et du contrôle social dans les entreprises de presse.
La CJRS demande de ‘’fermer tout simplement les entreprises qui ne parviennent pas à respecter un minimum de conditions exigées par la législation en vigueur, malgré le soutien de l’Etat’’ et de ‘’mettre fin à la concurrence déloyale entre de pseudo entreprises qui n’ont aucune obligation et d’autres qui s’efforcent d’être en conformité avec les lois, ainsi que les règles d’éthique et de déontologie’’.
La CJRS, créée il y a 20 ans, se présente comme une association à but non lucratif dirigée par un Bureau exécutif national sous la supervision du Comité directeur et est représenté à l’intérieur du pays par des cellules zonales (Nord, Sud, Est, Ouest et Centre).
Elle a objectif principal de ‘’renforcer les capacités des reporters sur toute l’étendue du territoire, à travers des sessions de formations continue et des bourses’’ qu’elle offre à ses membres.