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19 avril 2025
Diaspora
par Félix Nzale
MALAISE AU SOMMET DE L’ÉTAT
Entre un président poussant à faire pression sur la justice, un Premier ministre revendiquant le contrôle du Garde des sceaux, et un ministre affirmant son indépendance, le nouveau régime expose ses contradictions sur la séparation des pouvoirs
Il est malheureux que les confrères qui avaient en face d’eux le président de la République (dans le cadre de son «Face à la presse») n’aient pas émis la moindre objection lorsque Diomaye Faye a déclaré qu’il appartient aux Sénégalais de mettre la pression sur la Justice afin de contraindre cette dernière à faire son travail. Parce que, a ajouté le chef de l’Etat, «on ne peut pas identifier des tiers épinglés par les différents corps de contrôle et que la Justice se mette à traîner les pieds».
Avant Diomaye, son Premier ministre, Ousmane Sonko, lors de la campagne électorale pour les Législatives, avait clairement fait savoir que le ministre de la Justice n’était ni un homme libre ni un homme indépendant. Que lui, Premier ministre, avait le pouvoir d’ordonner au Garde des sceaux de poursuivre telle ou telle personne, et que ce dernier était tenu de s’exécuter. «Le ministre de la Justice n’est pas une autorité judiciaire, c’est une autorité politique», avait-il justifié. Ce à quoi le ministre de la Justice, Ousmane Diagne, avait rétorqué plus tard disant que personne ne pouvait mettre la pression sur sa personne, «surtout dans un sens déterminé», et qu’il ne fallait pas non plus compter sur lui pour mettre la pression sur les magistrats du Siège.
Au président Diomaye : comment mettre la pression sur la Justice ? En assiégeant le bâtiment qui abrite le ministère ? En organisant des marches de protestation ? En kidnappant des magistrats ? En brûlant leurs maisons ? En déversant sur eux et sur leurs familles des insanités sur les réseaux sociaux ? Bref, l’on ne demande qu’à savoir comment nous y prendre.
En attendant, nous estimons que ces propos sont d’une gravité extrême, a fortiori lorsqu’ils sortent de la bouche du chef de l’Etat en personne. Le problème est simple : vous n’êtes pas d’accord avec la posture de votre ministre ? Dégommez-le et placez une marionnette à la place, au lieu d’un appel à l’émeute ou au soulèvement ! Au Premier ministre Ousmane Sonko : combien de Sénégalais ont perdu la vie du fait, aussi, d’une Justice dont il disait qu’elle était instrumentalisée ? Aujourd’hui, Premier ministre, M. Sonko nous rappelle qu’il a les pleins pouvoirs et qu’il pouvait manipuler la Justice à sa guise. Lui est fondé à le faire, mais ses devanciers, non. En tenant ces propos, Sonko avoue qu’il ne fallait pas compter sur ce régime pour opérer la rupture pour laquelle des centaines de Sénégalais ont sacrifié leur vie. En fait, le moins que l’on puisse dire est que la communication de nos dirigeants actuels est d’un catastrophisme inquiétant.
Au ministre de la Justice, Ousmane Diagne : pour votre honneur et pour votre dignité, rendez le tablier !
Par Mohamed GUEYE
LA PROIE POUR L’OMBRE
Le 4 avril, Diomaye n’était pas là pour faire acte de contrition devant son maigre bilan après un an. Il est assez extraordinaire de voir un dirigeant passer plus d’une année à se vanter de l’état de déliquescence du pays dont il a tant voulu la gestion
Le 4 avril dernier, le président Bassirou Diomaye Faye n’était pas devant la presse pour faire acte de contrition devant le maigre bilan de son parcours d’une année ; loin de là. Au lieu de se désoler des emplois détruits quasiment dès son arrivée au pouvoir, conséquence de la politique menée par son gouvernement, de tenter de rassurer face à la quasifaillite du pays, il a quasiment cherché à enfoncer le clou, en déclarant aux journalistes, en wolof : «Vous avez voté pour le changement, et il là devant vous, et il sera encore plus amer.» Sans aucune donnée, il a voulu justifier les licenciements massifs opérés dans certains services, comme étant le fruit de recensements, qui auraient révélé de nombreux emplois fictifs, souvent faits à quelques jours du changement de régime.
Les entreprises qui ferment suite à des décisions controversées d’arrêt des chantiers ? C’est pour lui, la fin d’une gestion clientéliste de la part de dirigeants qui comptaient sur leur proximité avec les autorités de l’Apr déchues. Le même reproche a été adressé, à quelques nuances près, aux patrons des médias privés qui, par la voix de la journaliste Maïmouna Ndour Faye, ont fini par transmettre au chef de l’Etat leurs complaintes sur la condamnation à mort en sursis de leur secteur. Bassirou Diomaye, comme à son habitude, estime que les ennuis de la presse viennent de ce que les dirigeants d’entreprise, qu’il accuse de détournement de deniers publics, se sont longtemps arrangés avec les anciens dirigeants, qui leur accordaient des faveurs indues, notamment en remises d’impôts, qui ont atteint des «milliards de francs», selon ses dires. Les conventions signées par ces organes de presse avec certains services de l’Etat, n’étaient à ses yeux, pas justifiées, donc, faciles à annuler malgré les conséquences, aux yeux de l’inspecteur des Impôts de formation.
Il est assez extraordinaire de voir un dirigeant au pouvoir passer plus d’une année à se vanter de l’état de déliquescence du pays dont il a tant voulu la gestion. Un observateur des politiques publiques africaines notait dernièrement que, même dans des pays dont la situation économique est à la limite catastrophique, les dirigeants n’ont jamais passé le temps à se plaindre des turpitudes de leurs prédécesseurs, et cherchaient au contraire, à transmettre un message positif de redressement à plus ou moins brève échéance. Des exemples ne manquent pas, dans notre plus proche voisinage, comme aussi bien dans des pays africains bien éprouvés.
De leur côté, Diomaye et ses amis ont préféré s’atteler à la destruction du tissu économique existant, comme s’ils pensaient remplacer le Peuple sénégalais par un nouveau prototype tiré des bureaux du cabinet de Victor Ndiaye. Le président sait pourtant que l’on ne peut développer un peuple et sa jeunesse en bridant l’initiative privée. Madiambal Diagne vient de commettre un nouvel ouvrage sur le parcours politique de Abdoulaye Wade. La cérémonie de dédicace a été une belle occasion pour des proches et anciens collaborateurs du patriarche de se retrouver et de se rappeler ses œuvres. Beaucoup de Sénégalais pourront se remémorer de ce que le «Gorgui» se vantait d’avoir créé des milliardaires dans ce pays. Est-ce à dire, comme le penseraient sans doute nos dirigeants fiscalistes, que le «Vieux» puisait dans la caisse pour servir une coterie ? Que Nenni ! Wade se contentait juste de créer l’environnement propice à des entrepreneurs de mettre leurs billes là où elles pouvaient leur rapporter gros. Et si ces entrepreneurs se trouvaient être de ses proches, cela ne voulait pas nécessairement dire que ceux qui ne l’étaient pas n’avaient pas des chances de trouver leur place au soleil. Gageons que bien de ceux qui sont stigmatisés actuellement, ont été dans les mêmes conditions auprès de Macky Sall. Et l’on peut aisément parier que dans quelques mois, on parlera de «riches du Projet», qui auront pu se faire leur beurre autour de la table des projets générés par la «Vision 2050». Contrairement à ce que pourraient penser des esprits naïfs, on n’a pas encore pu trouver le moyen de passer des marchés publics à milliards que des miettes tombent de la table pour se glisser dans des poches particulièrement bien positionnées. Ceci n’est pas une justification ni un encouragement à la corruption, c’est juste un constat. D’ailleurs, que l’on ne s’y trompe pas, c’est dans les pays les plus riches que le phénomène est le plus développé. Tout ce qu’il faudrait alors souhaiter, c’est que ces futurs «entrepreneurs du Projet» fassent mieux ruisseler les excès de leur richesse jusqu’au bas de l’échelle.
Et puisqu’au Sénégal, quand l’Agriculture va, tout va, Mabouba Diagne et son collègue Cheikh Tidiane Dièye auront bientôt enfin, l’occasion de présenter aux Sénégalais la mesure de leurs capacités de bien gérer une campagne agricole bien productive, et dont les paysans profiteront plus que les spéculateurs. Pour que les Sénégalais ne regrettent plus trop longtemps d’avoir lâché la proie Macky pour l’ombre Sonko moy Diomaye.
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CES TENTATIVES DE COUP D'ÉTAT AVORTÉES
Des généraux mécontents prêts à prendre les armes, un ex-président approché pour renverser son successeur... Le Sénégal, souvent cité comme modèle démocratique en Afrique, a frôlé par deux fois le putsch militaire selon des révélations de Madiambal Diagne
Dans son récent ouvrage "Wade, mille et une vies" sur l'ancien président Abdoulaye Wade, le journaliste Madiambal Diagne révèle l'existence de deux tentatives de coup d'État avortées au Sénégal.
Selon les témoignages recueillis par l'auteur, une première opération était en préparation en 2000. Des militaires avaient pris contact avec le Parti Socialiste (PS) pour empêcher une éventuelle « confiscation du suffrage populaire » par le régime sortant. Parmi les noms cités dans cette tentative figurent Pape Samba Mboup et Pathé Seck. Ce putsch n'a finalement pas eu lieu, la transition démocratique s'étant déroulée pacifiquement avec la victoire de Wade.
Plus surprenant encore, le livre évoque une seconde tentative sous la présidence de Macky Sall. Après son départ du pouvoir et l'emprisonnement de son fils Karim, Abdoulaye Wade aurait été approché à Versailles par des personnalités venues du Sénégal. Ces émissaires lui auraient proposé un plan détaillé pour renverser le régime de Macky Sall, impliquant notamment des groupes religieux. Certains devaient occuper des chaînes de radio tandis que d'autres formaient des "boucliers humains" à la RTS.
Toujours selon Madiambal Diagne, Wade aurait finalement renoncé à cette aventure après avoir consulté ses proches, qui lui aurait fait comprendre le caractère périlleux d'une telle opération.
Ces révélations inédites apportent un éclairage nouveau sur les coulisses de la vie politique sénégalaise et les menaces qui ont pesé sur sa stabilité démocratique de ce pays qui n'a jamais connu de renversement antidémocratique du pouvoir.
LA FIN DES PERRUQUES CHEZ MISS CÔTE D'IVOIRE
En Côte d'Ivoire, le comité du célèbre concours de beauté bouleverse les normes en interdisant perruques et extensions capillaires. Une décision sans précédent dans un pays où ces pratiques sont culturellement ancrées
(SenePlus) - Dans un virage aussi audacieux qu'inattendu, le comité national de Miss Côte d'Ivoire a pris une décision révolutionnaire pour son édition 2025 : interdire aux candidates le port de perruques et d'extensions capillaires. Cette mesure, que le journal Le Parisien qualifie de "séisme dans le monde des concours de beauté en Côte d'Ivoire", marque un tournant dans un pays où ces artifices sont considérés comme une norme sociale.
Selon la BBC citée par Le Parisien ce lundi 7 avril, cette nouvelle règle rompt avec une tradition bien établie. Sur les 28 reines de beauté couronnées lors des précédentes éditions, seules deux avaient osé se présenter avec leurs cheveux naturels, dont Marlène Kany Kouassi, élue en 2022. Sa victoire avait d'ailleurs suscité de vives réactions à l'époque.
Victor Yapobi, président du comité Miss Côte d'Ivoire, défend fermement cette position : "Elles peuvent venir nattées, elles peuvent venir avec les cheveux courts, si elles n'ont pas de cheveux, elles peuvent venir rasées", avait-il déclaré en février à RFI, selon Le Parisien. Il a réitéré sa vision auprès de la BBC en marge d'une sélection locale : "La beauté doit être naturelle."
Cette démarche s'inscrit dans une politique plus large du comité qui lutte également contre la chirurgie esthétique et l'utilisation de crèmes éclaircissantes pour la peau. Elle représente une volonté affirmée de promouvoir l'authenticité et la diversité des standards de beauté.
Le ban sur les artifices capillaires s'applique désormais à l'ensemble des élections régionales qui se déroulent ce printemps dans 13 villes ivoiriennes, avant la grande finale prévue le 28 juin à Abidjan. Mais ce n'est pas la seule nouveauté du concours 2025, rapporte Le Parisien.
Le comité a également élargi la tranche d'âge des participantes, désormais fixée de 18 à 28 ans (contre 25 ans auparavant), tout en maintenant une taille minimale de 1,67 m. Autre changement notable : les frais d'inscription ont été réduits, passant de 75 à 45 euros. "Nous avons constaté que ces jeunes femmes dépensaient beaucoup d'argent pour participer et que cela commençait à peser sur leur budget", explique Victor Yapobi.
Cette initiative, première du genre dans la région selon Le Parisien, n'a pas encore été suivie par les pays voisins. Elle a néanmoins suscité de nombreuses réactions depuis son annonce en février.
Parmi les candidates, certaines accueillent ce changement avec enthousiasme. C'est le cas de Laetitia Mouroufie, qui tente sa chance pour la deuxième fois : "L'an dernier, je portais des extensions, parce que je pensais que c'est ce qu'il fallait avoir pour être belle. Cette année, j'ai davantage confiance en moi", confie cette jeune femme de 25 ans.
Le journal conclut que cette décision représente "un premier pas vers une acceptation de plus en plus grande du cheveu naturel dans la société ivoirienne", suggérant que l'impact de cette mesure pourrait dépasser le cadre du concours pour influencer les normes de beauté dans l'ensemble du pays.
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ÊTRE FRANÇAIS ET NOIR
Dans "Dans le noir je crie", Sikou Nakaté dévoile le "labyrinthe intime" vécu par les hommes noirs en France, coincés entre injonctions à la masculinité exacerbée et quête d'identité. Un témoignage rare sur une réalité souvent invisible
Dans son premier livre "Dans le noir je crie", publié aux éditions Stock, Sikou Nakaté livre un témoignage poignant sur la condition des hommes noirs en France, décrivant cette expérience comme "être au cœur d'un labyrinthe intime".
L'auteur, qui s'était déjà illustré en 2020 avec son documentaire "Dans le noir les hommes pleurent", poursuit sa réflexion sur la masculinité, particulièrement celle vécue dans les quartiers défavorisés où elle est "exacerbée" et centrée sur le physique.
Nakaté évoque les nombreux préjugés auxquels les hommes noirs sont confrontés quotidiennement. "Celui qui m'écrase le plus, c'est celui de la dangerosité", confie-t-il, dénonçant également la bestialisation du corps noir et l'interdiction tacite d'exprimer des émotions.
Son parcours personnel, du quartier populaire aux milieux bourgeois, a été marqué par un double choc : celui d'être "le seul pauvre dans un monde qui ne l'était pas" puis de découvrir un "racisme quotidien subtil" qu'il n'avait pas connu dans son quartier d'origine. Un racisme qui, selon lui, "gagne en intensité de manière très forte", notamment via les réseaux sociaux.
Se décrivant comme "en exil intime" et "apatride", Nakaté exprime le trouble identitaire de celui qui doit "constamment prouver sa citoyenneté" tout en étant renvoyé à un pays d'origine avec lequel il entretient un rapport distant. Une situation douloureuse qu'il tente néanmoins de transformer en force : "Avec le temps, j'ai l'impression que ça peut être une richesse de ne jamais s'asseoir, d'être toujours en mouvement."
par Thierno Alassane Sall
LA GRANDE SUBSTITUTION POLITIQUE
Licencier des Sénégalais par la main droite, en recruter d’autres par la main gauche, avec comme critère discriminant l’appartenance politique. Et si le Projet n'était rien d'autre que de se partager le Sénégal conçu comme un butin de guerre ?
J'ai reçu ce jour le Rassemblement des Travailleurs Sénégalais (RTS) licenciés par les nouvelles autorités (CDC, DDD, FONGIP, PAD).
Plusieurs centaines de personnes concernées et un objectif commun à toutes ces sociétés : faire de la place aux militants du Parti qui a conquis le Sénégal. Licencier des Sénégalais par la main droite, en recruter d’autres par la main gauche, avec comme critère discriminant l’appartenance politique. Pire détournement - ou plutôt instrumentalisation - de la demande sociale d’une rationalisation. Et si le Projet n'était rien d'autre que de se partager le Sénégal conçu comme un butin de guerre ?
Les concernés déplorent, faits et preuves à l'appui, une brutalité sauvage dans la sélection des personnes à licencier, la violence dans l'annonce des décisions, la gestion inique de tous le processus : violations caractérisées de leurs droits avec un ultimatum (accepter le licenciement aux conditions fixées sans négociations ni préavis par l'entreprise ou le licenciement immédiat sans droits ni compensation financière d'aucune sorte).
Dans les deux cas, la misère retardée de quelques maigres mois ou la misère immédiate. À la clé, des enfants renvoyés de l'école, des mois de loyer impayés, les affres des jours sans pain. Ils disent : "ils nous parlent de Jub, jubal, jubbanti, nous on est victimes du Dëŋ, dëŋal,dëŋŋalaat."
par Abdoul Aziz Diop
LE COTISATIONNISME OU LA FIN DU NUMÉRAIRE DANS LES RELATIONS INTERNATIONALES
EXCLUSIF SENEPLUS - Que vaut Diomaye-Moy-Sonko face à Trump-Moy-Musk ? Ce n’est pas en attisant les tensions internes par la désignation de boucs émissaires que notre pays donne le sentiment d’être assez préparé aux mutations en cours
Le député non inscrit Thierno Alassane Sall, auteur de la première proposition de loi d’intérêt général portant abrogation de la loi d’amnistie n° 2024-09 du 13 mars 2024, a pris l’initiative du débat national sur la « guerre commerciale » annoncée par le président américain Donald Trump. Voici, in extenso, la réflexion que le parlementaire a publiée sur sa page du réseau professionnel LinkedIn et à laquelle nous avons réagi.
Nous citons Thierno :
« La nouvelle guerre commerciale déclenchée par les États-Unis, qui n’épargne même pas ses alliés traditionnels, nous concerne également. Le monde peut basculer dans une crise dont les premières victimes seront ceux qui ne s’y sont pas préparés. Aucun pays, aussi périphérique soit-il, ne peut échapper aux secousses des grandes plaques tectoniques de l’économie mondiale.
Le Sénégal, en apparence éloigné de ce tumulte, risque de subir des contrecoups économiques majeurs : chaos économique mondial, ralentissement des échanges, perturbation des chaînes logistiques, hausse des prix des biens importés. Et malheureusement, comme toujours, les répercussions sociales toucheront en premier les populations les plus vulnérables.
Mais le plus grave est ailleurs. Alors que le monde entre dans une phase de reconfiguration brutale des rapports de force, nous restons spectateurs : désorganisés, souvent mal informés, et sans vision cohérente. La situation mondiale actuelle exige de notre gouvernement une stratégie claire, fondée sur l’anticipation géopolitique, la préparation du pays à d’éventuelles crises, et un engagement fort en faveur de la justice sociale.
Le Sénégal n’est pas hors du monde, et nous ne sommes certainement pas les mieux protégés. Cela doit nous inciter à plus de vigilance, de lucidité et de sérieux. » Fin de citation.
Bataille des idées
Trump et Musk sont les deux principaux locuteurs étasuniens dont les atouts financier, militaire et technologique justifient le chantage commercial auquel il expose le reste du monde à travers une remise en cause brutale des accords commerciaux patronnés par l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
L’effondrement du multilatéralisme sous les coups de boutoir des Etats-Unis coïncide avec l’arrivée au pouvoir de régimes dits souverainistes dont celui du Sénégal depuis un an déjà.
Une union souverainiste mondiale est-elle en préparation ? Si oui, de quoi est faite la contribution sénégalaise à la donne qui vient ?
Pour l’instant, tout indique que ce n’est pas en attisant les tensions internes par la désignation de boucs émissaires au niveau le plus élevé de l’État que notre pays donne le sentiment d’être assez préparé face aux mutations violentes qui s’opèrent sous nos yeux.
Qu’on le veuille ou pas, une bataille des idées est inévitable. Dans l’actuelle phase préparatoire que vaut vraiment Diomaye-Moy-Sonko face à Trump-Moy-Musk ?
Le post de Thierno Alassane Sall pose en filigrane la même question dont je nous invite à trouver la réponse décomplexée qui suppose, elle, une union sacrée par-dessus les clivages artificiels.
L’antidote du souverainisme
Interrogé (BFMTV, 3 avril 2025) sur la guerre commerciale déclarée au monde entier par Donald Trump, le journaliste français et éditorialiste politique Alain Duhamel dit de Trump qu’il est « une calamité, mais pas un idiot » avant d’ajouter que le locataire de la Maison-Blanche est « un sanguin, mais pas un crétin ». Nous en déduisons qu’il y a une chance pour les idées d’adoucir les mœurs calamiteuses et sanguinaires du milliardaire qui n’a que du mépris pour les pauvres du monde entier en commençant par ceux de l’Afrique encore spectatrice de son propre destin.
Écoutons d’abord les souverainistes d’ici :
« Il n’est pas normal que notre or, notre zircon, notre fer et que sais-je encore ne nous rapportent pas autant qu’on voudrait faute de les avoir transformés par nous-mêmes et pour nous-mêmes. Il est temps que nous soyons autosuffisant en riz… »
Mais qu’attendent-ils pour répondre concrètement à nos besoins internes. Et pendant qu’on y est, qu’ils fassent tout pour nous permettre de fabriquer nos ordinateurs, smartphones, voitures, avions, bateaux et j’en oublie.
Qu’ils fassent ce qu’ils disent qu’ils doivent faire pour être enfin souverains.
Et quand tout sera là, que faire du surplus ? Autrement dit, quel marché de consommateurs est suffisamment grand pour consommer les surplus souverainistes ?
Et même si le marché existe, mais n’est pas suffisamment grand, où stocker et comment stocker l’excès de zèle souverainiste ? Aucun territoire n’est assez vaste pour.
L’impasse indique une autre direction : le cotisationnisme.
L’antidote du souverainisme, signifie une division juste du travail qui transforme le monde en une association dont les nations qui en sont membres cotisent en se singularisant par autre chose que le numéraire à bout de souffle partout pour cause de surendettement. C’est le cotisationnisme.
Dans son exégèse publique (Tivaouane, avril 2006) du Saint-Coran, le savant soufi sénégalais Cheikh Ahmed Tidiane Sy conforte les bases théologiques du cotisationnisme à travers deux versets dont l’interprétation indépassable par le conférencier fustige l’échange inégal (verset 20:131) et l’accumulation (verset 10:58) auquel conduit le souverainisme outrancier. Les voici :
Et ne tends point les yeux vers ce dont Nous avons donné jouissance temporaire à certains groupes d’entre eux, comme décor de la vie présente, afin de les éprouver par cela. Ce qu’Allah fournit est meilleur et plus durable (20:131)
Dis: « [Ceci provient] de la grâce d’Allah et de Sa miséricorde; Voilà de quoi ils devraient se réjouir. C’est bien mieux que tout ce qu’ils amassent » (10:58)
Samir Amin (1931-2018) a longuement décrit un système d'échange inégal dans lequel « la différence de salaires entre les forces de travail de différentes nations est supérieure à la différence entre leurs productivités ».
S’agissant du nouveau mouvement d’idées que nous proposons ici, il tire ses ressorts économiques internes de l’économie institutionnelle ou institutionnalisme qui articule la théorie économique et les politiques économiques en faisant de l’institution son objet là où les autres théories économiques définissent la valeur.
Présentée à ses débuts par Thorstein Bunde Veblen (1857-1929), John Rogers Commons (1862-1945) et Wesley Clair Mitchell (1874-1948), l’institutionnalisme est illustré, au début du XXe et jusqu’au commencement du XXIe siècle, par les économistes John Kenneth Galbraith (1908-2006), Gunnar Myrdal (1898-1987) et François Perroux (1903-1987) à travers le néo-institutionnalisme juste après la Seconde Guerre mondiale.
De nos jours, la performance, illustrée par, entre autres, l’efficience, l’efficacité, la rationalisation et la gestion de la rareté, est au cœur de l’économie politique. De la même manière, les institutions efficientes et les réformes institutionnelles, pour toujours plus d’efficience desdites institutions, sont au cœur de l’économie politique institutionnelle.
Dans les relations internationales, la fin de la valeur coïncide avec la fin du numéraire, correspondant au postulat de base de l’institutionnalisme universel ou cotisationnisme.
Concrètement ?
À défaut d'une juste rémunération des efforts déployés au Sud, l'Impôt des droits fondamentaux (IDF), payé par le Nord et auquel sont assujetties les grosses fortunes au Sud, devrait permettre de rendre l'équilibre de la balance des paiements socialement plus juste. La satisfaction des demandes sociales incompressibles en dépend. L'équilibre obtenu grâce à l'Impôt des droits fondamentaux permet de combler les déficits, voire de créer un surplus et d'asseoir durablement la parité des fondamentaux. Celle-ci corrige les distorsions entre l'effort au Sud et sa rétribution sur le marché mondial des biens et services. Il suffit de s'en tenir ensuite, explique l’économiste sénégalais Makhtar Diouf, « à la nomenclature classique des biens de consommation (alimentation et boissons ; habillement et linge ; habitation ; hygiène et santé ; transport, télécommunication, information ; culture et loisirs) qu'on trouve dans tous les manuels d'économie politique » pour évaluer l'impact de la parité sur la population. Le but de la parité est d'asseoir partout un développement durable qui, comme chacun le sait, permet de conjuguer la croissance économique avec le souci d'équité sociale et la protection de l'environnement. La Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement (ou Sommet de la Terre) de 1992 a débouché sur un consensus international quant à la nécessité d'un développement durable.
En cas de baisse ou de suppression pure et simple de l'IDF, une parité des fondamentaux, auto entretenue est nécessaire. Celle-ci peut être gagée sur une croissance paritaire, résultat d'une diversification des produits, de la diversité des producteurs et de la suppression des subventions de toute sorte versées aux producteurs du Nord.
L'abandon par les individus de leurs identités rigides s'ils sont appelés à faire partie de sociétés diverses et à épouser les valeurs cosmopolites de tolérance et de respect pour les droits de l'homme universels est un puissant facteur d'équité sociale. Il permet, entre autres, d'éradiquer les discriminations à l'embauche. Au Sénégal notamment depuis le changement de régime. Une protection réussie de l'environnement passe, elle, par la sauvegarde de la diversité des espèces animales et végétales.
La diversité des produits et des producteurs, la promotion des modèles de démocratie multiculturelle ou consociative (Michalon, Le Monde diplomatique, janvier 2004) -, prévoyant des mécanismes efficaces de partage du pouvoir politique entre groupes culturellement divers -, et la biodiversité constituent les trois volets de la diversité durable, stade suprême du cotisationnisme.
Abdoul Aziz Diop est le fondateur de Pacte institutionnel (Pi, π) pour la défense de la démocratie et des institutions de la République…
PAR Djibril Ndiogou Mbaye
DEUX GUERRES PEUVENT EN CACHER UNE AUTRE
EXCLUSIF SENEPLUS - Il faut que l’humanité imprime d’une marque inaltérable son histoire, sa conscience et son inconscient collectif, de ce qui se passe actuellement en Palestine
Gaza : S’insurger encore, afin que cesse le massacre …enfin !
Il faut que l’humanité imprime d’une marque inaltérable son histoire, sa conscience et son inconscient collectif, de ce qui se passe actuellement en Palestine. Il faut que les historiens retiennent, pour fidèlement restituer, comme ils l’ont fait pour l’esclavage et plus tard pour la Shoah, le drame du peuple de Palestine.
Mais dans l’urgence, il faut surtout mettre fin sans délai, à ces massacres quotidiens qui, sous prétexte de mettre la pression militaire sur les combattants du Hamas, pour obtenir la libération des otages israéliens, entraînent un désastre humanitaire et des pertes en vies humaines inestimables et hypothèquent l’idéal de paix et de stabilité en Israël.
Rétablir un cessez-le-feu pour la libération de tous les otages israéliens, et forcer les volontés politiques des autorités palestinienne et israéliennes afin de redonner une chance à la résolution politique de ce conflit meurtrier.
Ce qui fait la double singularité et l’extrême gravité de cette histoire, c’est d’abord parce qu’elle s’écrit sous nos yeux, avec le sang frais de femmes et d’enfants palestiniens et israéliens, illustres innocents. C’est ensuite l’existence de précédents. L’humanité savait. Elle avait déjà dit, au moins deux fois, « plus jamais ça ». Mais c’est méconnaître la nature humaine que de penser que les États naissants, comme les grandes puissances, allaient déroger enfin à leur fatal destin hégémoniste.
Ce que Tsahal n’a pas obtenu en une année de destructions massives et son lot de plus de 50 000 morts, elle ne l’obtiendra pas aujourd’hui qu’il n’y a presque plus rien à détruire ni personne à tuer. Elle ne peut pas faire pire !
Les récentes libérations négociées d’otages montrent que rien ne sera obtenu par le bruit des bottes et le massacre d’innocents sans défense.
Deux guerres peuvent en cacher une autre
Alors que le monde est distrait par la guerre entre la Russie et l’Ukraine, une autre guerre est venue réduire à néant la couverture médiatique des attaques contre les populations gazaouies. C’est la guerre que D. Trump vient de déclarer à toutes les économies de tous les pays, et qui fait basculer l’économie mondiale dans une période d’incertitude totale.
Profitant de cette funeste « opportunité », Israël a entamé une autre « guerre », sournoise très meurtrière qui est entrain d’élever l’injustice ,la barbarie et l’inacceptable à un niveau d’indécence jamais égalé. C’est à croire que l’establishment israélien a repris du service et repris le projet de noyer gaza et sa population dans la mer qui la borde.
Dans cette guerre ou 70% au moins des victimes sont des femmes et des enfants selon l’ONU, on peut aisément poser un visages sur l’ignominie, l’injustice poussée à son paroxysme et la déraison de l’être humain. Mais on y peut également poser un visage sur la détresse innommable d’une population civile, qui a du mal à comprendre ce qui lui arrive en ce 21e siècle qui était prédit humaniste et fraternel ou ne serait pas.
La Palestine se meurt et personne ne fait rien. Ni les pays occidentaux, finalement impuissants face au rouleau compresseur américain et à l’arrogance du gouvernement Netanyahu. Ni le monde arabe, ces faux-frères parfois inféodés aux USA comme l’Arabie Saoudite.
Les autoroutes de l’information, encombrées d’informations sur les négociations de paix entre la Russie et l’Ukraine et sur l’agression commerciale de Trump contre les économie mondiale, ne laissent plus aucune place au drame du peuple de Palestine, aujourd’hui plus damné que les damnés de Frantz Fanon.
Depuis l’empire Ottoman, jusqu’à nos jour, en passant par le mandat britannique (1922-1924), le peuple palestinien porte la croix de tous les peuples opprimés sur leur propre territoire. Malgré les résolutions des Nations Unies, la colonisation se poursuit dans l’illégalité la plus insidieuse.
Rappelons que cela n’aurait jamais été possible sans le concours des USA qui adoubent protège et arme abondamment l’état hébreux, depuis le début. Au delà de la force de persuasion de l’hyper-puissant « lobby juif », l’industrie américaine de l’armement y remplit ses carnets de commandes. C’est dire que ce conflit n’est pas prêt de connaître son épilogue.
Les condamnations répétées des Nations Unies et les demandes incessantes de la France, de l’Angleterre et de beaucoup d’autres pays comme l’Afrique du Sud et le mandat d’arrêt délivré contre Netanyahu par la Cour Pénale Internationale n’y font rien. Au contraire ils n’ont récolté que les menaces et sanction contre des juges de la CPI , de la part de l’homme le plus puissant du monde : Donald Trump.
Ce qui est en train de se passer actuellement en Palestine « …défie la décence, défie l'humanité, défie la loi. C'est vraiment une guerre sans limite." Jonathan Whittall
Nous n’avons que nos claviers contre leurs bombes, mais rien ne nous fera taire .
Aujourd’hui c’est le peuple de Palestine et demain ce sera un autre peuple, si l’humanité ne règle pas ce problème et rapidement.
Aux yeux d’une partie de la communauté internationale, il semble exister une territorialité de l’indignation avec un barème de la gravité et une hiérarchie de la souffrance. Il semblerait que selon la nationalité, la mort oú l’injustice soit plus ou moins grave, plus oú moins acceptable.
La vie humaine semble ne pas avoir le même prix sur la terre de Palestine qu’ailleurs. Apparemment, vie israélienne ne vaut pas une vie palestinienne. Alors que des dizaines de milliers d’innocents sont massacrés en Palestine depuis octobre 2023, la semaine passée l’Europe a pleuré de toutes ses larmes, sur le cercueil d’une jeune otage Israélienne. Bien entendu, il faut condamner avec la dernière énergie la mort de cet autre illustre innocente venu rallonger la listes des centaines de milliers d’autres, dont déjà 50 000 palestiniens.
Mais toutes les vies ont la même valeur. Les palestiniens ne sont pas des infra-humains.
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AWA SECK, UNE LINGEER DU MOUSSOR
De juriste victime de discrimination en France à créatrice de mode reconnue. Cette Sénégalaise de 46 ans originaire de Diourbel a bâti une marque qui célèbre l'héritage culturel tout en modernisant ce couvre-chef traditionnel
Awa Seck se proclame « l’ambassadrice du moussor ». Originaire de Diourbel, elle s’est fixée comme objectif de faire de ce bout de tissu une tendance, aussi bien au Sénégal qu’à l’international.
Le style vestimentaire d’Awa Seck est simple. Vêtue d’une chemise blanche, d’un jean bleu clair et de sandales, elle ajoute une touche d’authenticité à cette modernité en arborant son fameux « moussor ». C’est son identité. Alliant vacances et travail pour quelques jours, cette Sénégalaise résidant à Bruxelles a pris dans ses bagages ses accessoires indispensables. Les moussors font partie de son quotidien et sont aussi imposants que les boucles d’oreilles qu’elle porte. À 46 ans, elle réalise des tutoriels et des démonstrations chez elle, à Keur Massar. En lin, en coton, en wax ou en chantoum, Awa Seck propose plusieurs matières : « Je fais différents motifs pour chaque occasion, avec des moussors qui ressemblent à mes clientes. » Les tarifs varient entre 10 000 FCFA et 15 000 FCFA. Un business « lucratif » dans lequel elle s’épanouit pleinement.
Rien ne prédestinait Awa Seck à devenir « l’ambassadrice du moussor ». Après des études de droit à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, elle poursuit son cursus à Bordeaux auprès de sa sœur. « J’y suis allée avec beaucoup d’enthousiasme, mais j’ai vite déchanté car j’ai dû faire face au racisme », se souvient-elle avec émotion. Encouragée par son aînée, Awa obtient un master en droit du travail en 2004. Toutefois, son insertion professionnelle est difficile : « J’avais du mal à trouver du travail dans mon domaine. Il fallait un carnet d’adresses bien fourni, sans compter la discrimination », dit-elle avec amertume. Elle décide alors d’entreprendre un second master en ressources humaines à Paris tout en enchaînant de petits boulots dans la restauration. « Il m’a fallu du temps avant de travailler dans mon domaine », confie-t-elle. Coiffure, onglerie… Awa Seck touche à tout. »J’ai appris à me battre, à travailler dur et à m’intégrer afin que ma présence ait un impact positif sur la vie des gens. », estime-t-elle. Un véritable sacerdoce.
En 2005, elle s’installe à Bruxelles auprès de son mari. Là-bas, elle apprend le néerlandais et le flamand, qu’elle parle couramment aujourd’hui. Elle travaille d’abord dans le service à la clientèle, puis dans une chaîne de fitness. Après quelques années et deux enfants, elle décide de tout quitter pour rentrer au Sénégal. « J’ai été victime d’une agression raciste dans un bus en 2011. Cela a précipité mon retour », avoue-t-elle peinée. Afin de préparer sa reconversion, elle entame un troisième master en marketing et communication.
De retour au Sénégal en septembre 2012 avec ses enfants, elle trouve rapidement un emploi dans le département des ressources humaines d’un opérateur mobile. Son expérience professionnelle y est bien différente de celle vécue à Bordeaux.
Les débuts de « Moussorma »
Le destin de cette « Baol-Baol » est étroitement lié au moussor. Ce petit bout de tissu qu’elle portait au travail devient, à sa grande surprise, un élément phare de son identité. « C’était ma petite touche traditionnelle dans une tenue moderne. Mes collègues étaient admiratifs, et c’est ainsi que j’ai commencé à leur montrer comment bien attacher le moussor », explique-t-elle. En 2016, elle lance ses premiers tutoriels. « À l’époque, cela suscitait beaucoup d’intérêt », dit-elle avec un sourire.
En juillet 2017, elle organise son premier atelier payant, proposant des cours à 5 000 FCFA par personne. Le succès est immédiat. Elle commence alors à consacrer une partie de son temps à cette activité, tout en travaillant dans une maison de production comme directrice commerciale et marketing. « C’était une activité indépendante qui me permettait de développer mon projet », confie-t-elle. Ainsi naissent les « Moussors d’Awa ». « Je voulais cette connexion avec mon pays, d’où le nom ‘Les Moussors d’Awa’ », affirme-t-elle. Son objectif : inciter les jeunes Sénégalaises à porter le moussor avec fierté, notamment dans le cadre professionnel. « Elles étaient complexées à l’idée de le porter en rendez-vous d’affaires », explique-t-elle.
En juillet 2017, pour des raisons familiales, elle retourne à Bruxelles tout en poursuivant son activité. Afin de perfectionner son art, elle suit des formations en couture et en chapellerie en 2018. « J’ai appris à créer moi-même les moussors », précise-t-elle. Elle enchaîne également les ateliers de coaching sur l’estime de soi, notamment pour les femmes sous chimiothérapie et les enfants. D’ailleurs, elle devient ambassadrice de la Ligue Sénégalaise Contre le Cancer (Lisca), pour laquelle elle organise la première collecte #200millionschallenge #Pourlesmaladesducancer.
Avec quelques économies, elle ouvre sa boutique quelques mois plus tard. » Je vends aussi bien au Sénégal qu’en Belgique des « moussors » prêts-à-porter, appelés « Moussormas’ », renseigne-t-elle fièrement. En collaboration avec des boutiques sénégalaises, Awa Seck assure la distribution et développe aussi la vente en ligne. L’entrepreneure confectionne une vingtaine de foulards toutes les deux semaines et assure la livraison.
En décembre 2018, Awa élargit sa marque en lançant une ligne de vêtements pour hommes, femmes, enfants et articles pour la maison sous le nom AWA B.AOL. Elle valorise la broderie traditionnelle de sa région, le SOR, qui devient sa signature. Une manière de rendre hommage à sa mère, une brodeuse renommée décédée lorsqu’elle avait huit ans. Elle collabore avec des artisanes locales pour préserver ce savoir-faire et les aider à acquérir une indépendance financière.
Altruiste et engagée
Awa Seck ne se contente pas de lutter pour la valorisation du « moussor ». Elle mène également un autre combat : la défense des droits des femmes. « Beaucoup s’opposent au mot féminisme, mais moi, je l’assume pleinement. Je me considère même comme radicale lorsqu’il s’agit des droits et de la protection des femmes. Il n’y a pas de demi-mesure », affirme-t-elle d’un ton catégorique.
Son amie de longue date, Ndieme Amy Varore, la décrit comme « une voix pour les sans-voix, une femme prête à se battre comme une lionne pour un changement positif ». Elle témoigne de sa générosité et de son engagement sans faille.
Moustapha Ndiaye, un autre proche, la qualifie de « femme africaine, et plus précisément sénégalaise, décomplexée, qui, après avoir réussi à l’étranger, met ses compétences au service de sa communauté ».
Aujourd’hui, Awa Seck est devenue une véritable ambassadrice du Sénégal. Elle emmène son « moussor » aux quatre coins du monde, participant à des missions économiques dirigées par la princesse Astrid de Belgique, qui porte fièrement ses créations.
RSF ALERTE SUR LA CRISE DES MÉDIAS
Reporters sans frontières appelle les autorités à intensifier les réformes pour assurer la viabilité économique d'un secteur médiatique fragilisé par des suspensions de contrats publicitaires et des redressements fiscaux
(SenePlus) - Un an après l'élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidence, Reporters sans frontières (RSF) salue les premières réformes engagées mais appelle à "accélérer" les mesures pour garantir la survie économique d'un secteur médiatique en difficulté.
Dans un communiqué, l'organisation internationale de défense de la liberté de la presse reconnaît les avancées comme "l'enregistrement des organes de presse sur une plateforme dédiée" et "l'actualisation de la loi sur la publicité", tout en soulignant que ces initiatives restent insuffisantes.
"L'enregistrement des médias et l'actualisation de la loi sur la publicité sont des mesures salutaires", affirme Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF, qui ajoute cependant que "la question de la soutenabilité économique des médias doit être davantage prise en charge".
Le secteur traverse une crise majeure, marquée par "des suspensions de contrats publicitaires, l'accumulation d'impayés et la fragilisation générale", selon RSF. Certains titres emblématiques comme Stades et Sunu Lamb, "deux des quotidiens sportifs les plus lus du pays", ont suspendu leur parution fin juillet 2024 "après plus de vingt ans d'existence", invoquant "des difficultés économiques insurmontables".
Si le président s'était engagé à "soutenir une presse libre et diversifiée" dès son arrivée au pouvoir, les réformes entreprises ont provoqué des tensions. Le Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse du Sénégal (CDEPS) a dénoncé "une tentative de museler la presse" et organisé "une journée sans presse" massivement suivie le 13 août 2024.
La cartographie des médias lancée en août 2024 a particulièrement déstabilisé le secteur. Sur 639 médias ayant soumis un dossier, "seuls 258 ont été officiellement déclarés conformes par l'État en février 2025", rapporte RSF.
Mahamadou Baldé, fondateur du site Kolda News, témoigne auprès de RSF de la "décision collégiale d'arrêter les publications à partir de fin février" car son média n'est "pas en mesure de recruter trois journalistes avec les exigences en années d'expériences requises" par le Code de la presse.
Face à ces difficultés, RSF formule plusieurs recommandations, notamment de "renforcer la réforme des aides à la presse via l'accompagnement des médias vers plus de professionnalisation" en soutenant les travaux de la commission d'examen et en revalorisant le budget des aides publiques.
L'organisation suggère également de promouvoir "la certification Journalism Trust Initiative (JTI), avec des incitations fiscales pour les médias et leurs partenaires", tout en appelant à "adopter un nouveau Code de la publicité adapté aux réalités actuelles".
RSF s'inquiète par ailleurs des "enjeux sécuritaires" qui persistent, citant plusieurs cas de journalistes convoqués par les autorités et des attaques informatiques inédites contre des médias en ligne comme Seneweb, Dakaractu et PressAfrik Group en février et mars 2025.