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26 novembre 2024
Economie
par Ousmane Biram Sane
LES PRIX DES OBLIGATIONS DU SÉNÉGAL VONT REMONTER BIENTÔT
Si les boursicoteurs jouent la spéculation sur le papier sénégalais il n’y a pas à s’alarmer mais plutôt à le considérer comme une reconnaissance internationale et un défi pour nos ministères en charge de l’économie et des finances
Parler de chute des obligations du Sénégal à la suite de la sortie du Premier ministre Ousmane Sonkoest un bon signal par rapport à la signature du Sénégal sur les marchés financiers contrairement à l’opinion apparue dans plusieurs organes de presse ! Nous allons le démontrer.
Premièrement, quand un résumé de la situation financière du Sénégal fait par son chef de gouvernement entouré de quelques ministres-clés fait réagir les marchés financiers internationaux cela est un point positif pour notre pays. Pourquoi ? Parce que depuis de longues années nos économies étaient faiblement connectées au marché financier international et jusqu’à récemment ce sont les agences de notation qui jouent l’interface entre les investisseurs et nous. Alors si les investisseurs réagissent à la sortie du gouvernement sur les finances publiques cela crédite la thèse que la parole du Premier Ministre Ousmane Sonko est très suivie dans le monde entier et qu’il bénéficie de la confiance des investisseurs ! Car quand il dit « ça ne va pas chez moi », les investisseurs le croient et s’ajustent aussitôt en baissant le prix du titre de créance qu’ils détiennent ! A contrario, le jour où il affirmera que tout va bien, une réaction positive s’en suivrait. L’enseignement à tirer à ce niveau est que la prochaine sortie du PM le 7 octobre fera forcément réagir les marchés financiers en mode : position vendeur – conservateur- ou acheteur de titres d’obligations du Sénégal.
Deuxièmement, le Premier Ministre a le soutien implicite du FMI. En effet, pour les initiés qui comprennent la relation risque-rendement dans les produits obligataires qui sont fondamentalement des produits de taux et non des produits de plus-value comme les actions, la confirmation par le Fonds monétaire que le Sénégal est classé dans la catégorie « pays à risque de surendettement modéré » anéantit l’hyberbole « chute des obligations du Sénégal ! ». Pourquoi ? Parce qu’une obligation c’est une dette remboursable donc on ne perd pas en valeur nominale, si vous prêtez un million à l’Etat du Sénégal d’ici 2029, à l’échéance en 2029 l’Etat vous rendra votre million pile pour parler en langage simple ! Donc si le Sénégal est encore un Etat pas surendetté donc solvable à terme, les détenteurs du papier sénégalais n’ont aucune crainte quant à la bonne fin de leurs créances ! En plus s’ils ont l’opinion pacifiante du FMI c’est totalement rassurant car le FMI peut être considéré comme la première agence de notation au monde puis viennent les autres S&P, MOODY’S, …sans oublier l’africaine BLOOMFIELD.
Troisièmement, last but not least, les obligations du Sénégal vont reprendre l’ascenseur parce que, et ne l’oublions pas, les obligations sont des produits d’épargne à long terme. Cela est d’autant plus vrai pour les obligations d’Etat dont la crédibilité se joue sur deux critères essentiels : une politique macroéconomique vertueuse de l’émetteur-Etat et la qualité des dirigeants. Arrêtons-nous sur ce dernier aspect à savoir la qualité des dirigeants. Le Sénégal est dirigé depuis le 24 mars 2024 par des cadres qui ont comme atouts principaux : leur jeunesse, courage, franc-parler, probité et leur amour illimité pour le pays. Ce sont des dirigeants qui ont promis un don de soi et qui plus est, parlent un langage de vérité aux populations et aux partenaires internationaux y compris les investisseurs. Cette option de transparence va rassurer les marchés financiers et contribuera à la remontée du prix des obligations du Sénégal pour les faire coter au pair si elles s’en étaient trop écartées ! Pourquoi cette équipe dirigeante rassurerait les investisseurs ? Parce qu’autour du PM se trouvent de brillants sénégalais experts respectés dans leurs domaines respectifs. Prenons juste deux ou trois d’entre eux : Abdourahmane SARR ministre en charge de l’économie, est un ancien fonctionnaire du FMI donc il connaît cette maison. A titre d’anecdote, c’est en 2011 si mes souvenirs sont bons, que j’ai fait la connaissance de A. SARR, alors fonctionnaire du FMI à Lomé au Togo. Lors d’un bref échange, il me fît la confidence qu’il comptait démissionner du FMI ! Tourner le dos au FMI, quelle audace, quelle ambition me disais-je ! Nous voilà vivre la suite de sa belle histoire ! Quant à Monsieur Al Amine LO, il est le Directeur National sortant de l’Agence nationale de la BCEAO. Je l’ai connu comme étant un pragmatique. En 2022 nous avions travaillé ensemble sur la question lancinante du financement des PME avec le Comité National de Pilotage du Dispositif PME (CNP-PME, ex-CISAE (Comité d’Identification des Structures d’Appui et d’Encadrement) et le projet « Accès des PME au financement » de la Coopération allemande à travers la GIZ. J’ai su apprécier tout l’engagement de notre banque centrale pour la cause de la promotion du financement des Micro Petites et Moyennes Entreprises en Afrique de l’Ouest en général et au Sénégal en particulier. J’aurai pu en dire autant pour Abdourahmane DIOUF le ministre en charge de l’enseignement supérieur dont le passage à la direction générale de la SONES a redonné de la crédibilité à la réforme du secteur de l’eau notamment s’agissant des relations SONES-SDE. Quant au ministre de la justice, M. Ousmane DIAGNE les sénégalais sont unanimes sur ses compétences et sa crédibilité ce qui renforce la confiance des milieux d’affaires.
En somme et pour conclure, retenons que, si les boursicoteurs jouent la spéculation sur le papier sénégalais il n’y a pas à s’alarmer mais plutôt à le considérer comme une reconnaissance internationale et un défi pour nos ministères en charge de l’économie et des finances.
D’ailleurs, il est de l’avantage du Sénégal que les marchés financiers nous suivent de près au point qu’une sortie de presse de nos autorités soit aussitôt interprétée par les places financières internationales prêteuses ! Un tel arrimage du discours et des actes de nos dirigeants aux marchés financiers prouvent que nous ne sommes pas seuls et que le monde s’intéresse à nous dans une perspective de coopération franche, sincère et équilibrée.
A cet égard, le 08 octobre au lendemain de la présentation de la Stratégie Nationale de développement 2025-2029, la réaction des places financières prêteuses du Sénégal sera intéressante à suivre. En effet, en cas de confiance au Président de la République et à son programme conduit par son Premier Ministre, elles afficheront la remontée ou tout au moins la stabilité ! Alors les paris sont lancés !
En attendant, en tout état de cause et pour revenir aux fondamentaux retenons que, le crédit repose sur la confiance et la confiance provient de l’homme ! De ce point de vue, l’équipe d’argentier en place avec le nouveau régime, démarre avec un capital-confiance confortable enraciné dans le Jub Jubal Jubanti et apte à attirer des capitaux à la fois nationaux et étrangers pour développer le Sénégal.
Ousmane Biram Sane est économiste-financier, consultant.
par Cheikh Cissé
LE GRAND BLUFF DU GOUVERNEMENT FAYE
La subtilité du mensonge gouvernemental sur la question de la dette et du déficit se trouve dans la période visée et la déclaration de conformité de la Cour des comptes concernant la gestion de 2022
La subtilité du mensonge gouvernemental sur la question de la dette et du déficit se trouve dans la période visée et la déclaration de conformité de la Cour des comptes concernant la gestion de 2022.
Le ministre de l’Économie a évoqué une moyenne de 10,4 % de déficit public et 76,3 % de dette pour la période 2019 à 2023. Toutefois, il n’a pas fourni de chiffres corrigés pour les années 2019, 2020, 2021 et 2022, se contentant de ceux de 2023, qui s’élèvent à 83,7 % pour la dette (au lieu de 73,6 %) et à 10 % pour le déficit (au lieu de 4,9 %).
En ce qui concerne l’année 2023, les chiffres n’ont pas encore été certifiés par la Cour des comptes, contrairement aux années précédentes. Le ministre s’appuie sur le rapport sur la situation des finances publiques, qui a été transmis à la Cour des comptes pour une publication après ses propres réconciliations.
En résumé, il faut comprendre que les chiffres de 2023 peuvent, et seront probablement, remis en cause par la Cour des comptes, mais ceux des autres années sont déjà certifiés. La Cour adresse habituellement des demandes de corrections et/ou de données complémentaires pour l’année n-1 au ministère des Finances et du Budget, qui peut soit les accepter, soit les contester. Pour appuyer ses déclarations, le gouvernement s’appuie sur les alertes de la Cour des comptes, qui concernent principalement les dysfonctionnements du système d’information ASTER, la non-concordance des chiffres entre la DODP et la DDP, et surtout l’augmentation inquiétante du déficit public au cours des dernières années. Les deux premiers points n’ont cependant pas empêché la certification des comptes de 2022, car la Cour des comptes sait retrouver l’information correcte.
Pour les années 2019, 2020, 2021 et 2022, le gouvernement ne pourra pas fournir la preuve d’une quelconque falsification des comptes, ceux-ci ayant été certifiés. Je vous invite à lire l’excellent article de l’économiste Prof. Amath Ndiaye (cf. ci-dessous), qui démontre les incohérences d’une telle hypothèse. Si les comptes avaient été falsifiés durant la période en question, l’encours de la dette actuelle serait bien plus élevé que celui annoncé par Ousmane Sonko. De plus, le service de la dette aurait considérablement augmenté (car même pour une dette secrète, il faut payer des intérêts), et les partenaires internationaux l’auraient remarqué, puisque les tirages sur ressources se font avec leur accord.
Les accords de facilité de crédit ont été approuvés par le FMI au nom de l’État du Sénégal le 26 juin 2023 (second semestre 2023), et sont donc probablement basés sur les chiffres des années précédentes, et non sur ceux de 2023, que le ministre de l’Économie a mis en avant.
Contrairement à ce que véhiculent les manipulateurs, les institutions internationales disposent de mécanismes très efficaces pour détecter les mensonges potentiels des États contractants. Parmi ces mécanismes figurent les audits externes obligatoires, des critères de tirage rigoureux conditionnés par la réalisation des travaux et l’obtention du visa juridique de la Cour suprême, la collaboration avec les banques centrales, le travail acharné des meilleurs financiers et économistes mondiaux (dont beaucoup sont basés au Sénégal même) et, enfin, la surveillance étroite des marchés, qui réagissent avec agilité aux fluctuations économiques.
On pourrait continuer à démontrer les incohérences des déclarations du gouvernement, mais cela ne servirait à rien, car les conséquences sont déjà devant nous. Il suffit de lire les interventions des acteurs externes pour comprendre que notre propre gouvernement est en train de se saborder. On observe déjà les effets de cette culture de victimisation et de mensonge exacerbée :
- Le Sénégal s’est endetté de plus de 800 milliards supplémentaires depuis l’arrivée du nouveau régime. Une dette contractée dans des conditions désastreuses, souvent pour financer une autre dette ;
- Le pays aura de plus en plus de mal à emprunter, avec des taux d’intérêt en hausse en raison de la dégradation des notes causée par les déclarations du gouvernement ;
- Pire encore, le Sénégal n’a plus de marge de manœuvre pour renégocier avec le FMI et remettre en question la suppression des subventions énergétiques signée par Macky Sall. Nous faisons face au spectre des ajustements structurels, car le FMI est désormais en position de force pour imposer les accords signés, alors que nous avons des moyens limités pour emprunter ou réduire l’augmentation du déficit ;
- Pour réduire ce déficit, le gouvernement a opté pour une augmentation agressive des recettes fiscales, une stratégie qui paralyse l’économie et fait fuir les investisseurs ;
- Enfin, le Sénégal ne pourra pas introduire de lois de finances pour l’année en cours, ni voter le budget pour l’année prochaine avant au moins décembre (dans le meilleur des cas), en raison de la dissolution de l’Assemblée. Les partenaires internes et externes sont dans l’incertitude totale.
Voilà les maux dont souffre le Sénégal actuel. 2025 sera certainement une année difficile.
Cheikh Cissé est ingénieur en informatique, expert en intelligence économique et management stratégique
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MAMADOU NDOYE, VOIX DE LA SAGESSE CRITIQUE
L'ancien ministre et figure de la société civile pointe, dans un entretien avec Abdoulaye Cissé, le manque d'endogénéité des politiques éducatives nationales et l'inertie inquiétante dans la refondation des institutions promise par Diomaye (WOLOF)
Dans une interview accordée à Abdoulaye Cissé de la TFM, Mamadou Ndoye, figure respectée de la société civile et ancien ministre de l'Éducation, dresse un tableau nuancé de la situation politique et éducative du pays.
Selon lui, les politiques éducatives souffrent d'un manque criant d'endogénéité, suggérant qu'elles sont trop souvent calquées sur des modèles extérieurs. L'ancien ministre exprime également son inquiétude quant au processus de refondation des institutions, promesse phare du président Bassirou Diomaye Faye qui n'a toujours pas été engagée par la nouvelle administration. Ce statu quo pourrait, selon lui, compromettre les espoirs de changement profond nourris par de nombreux Sénégalais à l'aune de la dernière alternance.
Cependant, Mamadou Ndoye entrevoit la possibilité d'un sursaut présidentiel après les élections législatives du 17 novembre 2024, laissant entendre que ce scrutin pourrait servir de catalyseur pour relancer les réformes tant attendues.
Alors que le Sénégal se prépare pour ces élections législatives cruciales, les observations de Mamadou Ndoye rappellent l'importance d'une vigilance constante de la part de la société civile pour garantir que les promesses de changement se traduisent en actions concrètes.
LE DEFI DE L’INDUSTRIALISATION
A l’unité d’élevage et de production d’insectes (campus Isra/Ird), des pupes remplissaient un bac rouge dans l’insectarium. Une semaine après, des mouches soldats noires occupent désormais l’espace. Certaines déposent leurs ailes sur la moustiquaire
Bés Bi le Jour |
Pape Ibrahima NDIAYE & Serigne Saliou DEME |
Publication 09/10/2024
A l’unité d’élevage et de production d’insectes (campus Isra/Ird), des pupes remplissaient un bac rouge dans l’insectarium. Une semaine après, des mouches soldats noires occupent désormais l’espace. Certaines déposent leurs ailes sur la moustiquaire. D’autres volent à l’intérieur. Autre élément crucial du processus : les planchettes en bois. Elles sont posées sur un autre bac de stockage d’aliments. Celui-ci contient du maïs, du blé, de l’arachide… C’est l’odeur des aliments qui attirent les femelles après l’accouplement avec les mâles. Elles pondent entre les planchettes en bois, explique Arkeita Mendy de l’Isra. Et ce n’est que la partie visible de l’iceberg. Dans la pièce «Incubateur», le chercheur Waly Ndiaye ouvre l’appareil avec des étagères à l’intérieur. Sur la dernière, des planchettes en bois (des pondoirs) sont posées au-dessus d’un bac. Les œufs vont se transformer en larves. Celles-ci vont, par la suite, se démultiplier en se nourrissant de fruits et légumes broyés. Des déchets qui pourraient se retrouver dans une décharge dakaroise à ciel ouvert et qui sont recyclés. Et au-delà des chercheurs, en dehors des laboratoires, ces déchets font le bonheur de producteurs de farine d’insectes dans le monde. En revanche, au pays de la Teranga, il faut creuser, fouiller et bêcher pour avoir une piste ou une entreprise dans le domaine. Elles sont encore rares au Sénégal. Nos investigations mènent au rondpoint Zac Mbao. Un axe routier, entre pollutions sonore et automobile. Mais, loin de la poussière et la fumée des véhicules, se cache une «transformation écologique» : Neofarm.
«Une unité pilote en phase d’être industrialisée»
Une biotechnologie sénégalaise dont l’objectif est d’atteindre l’industrialisation de produits issus de l’insecte. L’initiative est logée au sein des locaux de Rufsac (Société rufisquoise de fabrication de sacs). Et son crédo en dit long : «se servir du pouvoir des insectes pour produire des ingrédients de haute qualité». Mansour Niang et Julie Crémieux, co-fondateurs, sont au cœur. Sur place : des cases de moustiquaires remplies de mouches soldats noires. «Pour le moment, nous avons une unité pilote en phase d’être industrialisée. Aujourd’hui, nous cherchons des fonds parce que nos clients sont dans l’agro-industrie», précise la chimiste et environnementaliste. Julie Crémieux ajoute : «Les demandeurs ont besoin des milliers de tonnes de leurs produits.» Neofarm est sur la bonne voie. Cependant, elle n’a pas encore atteint cet objectif. Mansour Niang est très optimiste. Selon lui, «l’industrialisation de la farine d’insectes est bel et bien possible au Sénégal». Mais le financier de formation liste quelques obstacles : la technologie, les financements et la viabilité économique. Il enchaine en soulignant que le nerf de la guerre reste les fonds puisque les «compétences techniques sont déjà là». Mansour Niang explique : «Des structures se sont développées, notamment en Europe, avec l’aide de l’Etat».
FARINE A BASE D’INSECTES, LE SENEGAL S’Y MET…
L’insecte, aussi petit que populaire, incarne «l’alimentation du futur» pour des scientifiques. Nous parlons de la mouche soldat noire. Ses larves, sources de protéines, sont devenues une véritable industrie et une alternative à la farine de poisson
Bés Bi le Jour |
Pape Ibrahima NDIAYE & Serigne Saliou DEME (Photo) |
Publication 09/10/2024
L’insecte, aussi petit que populaire, incarne «l’alimentation du futur» pour des scientifiques. Nous parlons de la mouche soldat noire. Ses larves, sources de protéines, sont devenues une véritable industrie mondiale et une alternative à la farine de poisson. Au Sénégal, des chercheurs, loin des projecteurs, mènent la réflexion pour en faire un aliment de premier plan pour le secteur aquacole. De l’aliment pour nourrir les poissons ou les plantes «sans pollution» moins «coûteux», disent-ils. Et ce, dans un contexte de surexploitation des ressources halieutiques et des changements climatiques. La dynamique est réelle. Au-delà des laboratoires universitaires, des acteurs, très peu connus, s’y mettent. Mais le chemin est encore long. Le financement et les appréhensions sociales sur les insectes constituent des freins.
De l’extérieur, la serre tout en verre, sauf la devanture, donne déjà un aperçu. Docteur Waly Ndiaye et ses collègues sont en pleine activité. Ce jour-là, ils accueillent deux stagiaires en quête de savoir à Dakar. Une femme et un homme de l’Institut supérieur d’enseignement professionnel (Isep) de Matam. À l’intérieur, les étudiants observent les bassins aquacoles remplis de poissons. Les espèces (tilapia et clarias) flottent subitement à la surface de l’eau. «Elles s’agitent lorsqu’on s’approchent du bassin», explique l’ingénieur halieute. Waly Ndiaye tient dans sa main gauche un pot d’aliments granulés pour la pisciculture. En blouse blanche, le chercheur avance avec et guide nos pas dans la serre. Une plateforme dénommée «Aar sunu gueej» (protégeons la mer). Elle est basée au campus Isra (Institut sénégalais de recherche agricole) et Ird (Institut de recherche pour le développement) de Bel-Air. «Nous menons ici des expériences sur la nutrition, l’alimentation et la reproduction. Nous cherchons à produire des alevins de qualité pour aider les producteurs», informe Fulgence Diédhiou, le responsable technique.
Mais au sein du campus, une autre unité de recherche aquacole, a volé la vedette à la serre ! Créé vers 2020, l’endroit est moins spacieux mais grandiose par la vision. Il sert à la production de protéines d’insectes pour l’élevage et pour l’aquaculture. Également de l’équipe de l’Isra, Arkeita Mendy nous ouvre les portes de l’unité en question. Une lumière verte jaillit une fois le seuil de celle-ci franchi. C’est le reflet d’un mini-projecteur placé dans un coin de l’insectarium, un espace en moustiquaire pour la reproduction de mouche soldat noire. «Cette première pièce est le lieu d’élevage des mouches adultes», renseigne la spécialiste en biologie animale. L’entomologiste ajoute que c’est dans un bac rouge à l’intérieur que vont se développer les pupes. A ce stade, l’insecte se métamorphose à l’intérieur de son cocon. Tout un cycle de vie entre l’œuf, la larve, la prépupe, la pupe avant Hermetia illucens (le nom scientifique de la mouche). «Pour le moment, vous avez vu les pupes. Mais au bout d’une semaine, vous verrez la Mouche soldat noire (Msn) !», prévoit Arkeita Mendy avec enthousiasme. Rendez-vous est pris ! Nous reviendrons pour le suivi du processus d’éclosion. ‘’Des soldats noirs’’, dont les larves sont une source de protéines pour l’alimentation animale et en particulier pour l’aquaculture. Elles peuvent remplacer la farine de poisson, qui participent à l’épuisement des stocks, soutiennent des scientifiques.
LES POINTS D’ACHOPPEMENT A L’INTEGRATION ECONOMIQUE SENEGALO-MAURITANIENNE
Réformes institutionnelles, financements structurants, investissements intelligents…, la première édition du Forum économique sénégalo-mauritanien s'est tenue tenu les 30 septembre et 1er octobre derniers à Dakar
Il ressort du rapport de recommandations de la première édition du Forum économique sénégalo-mauritanien, tenu les 30 septembre et 1er octobre derniers à Dakar, que des mesures urgentes, portant notamment sur les réformes institutionnelles, les financements structurants, les investissements intelligents et une volonté inébranlable de collaboration, doivent être prises pour tirer le meilleur parti des opportunités d’affaires entre les deux pays.
La première édition du Forum, organisée du 30 septembre au 1er octobre à Dakar, s’inscrit dans la dynamique de l’intégration africaine prônée parles présidents sénégalais et mauritanien. Elle avait pour principal objectif de relever les défis et de saisir les opportunités liées à l’intégration économique entre le Sénégal et la Mauritanie. Ce Forum a mis en lumière les principaux axes de collaboration, le rôle du secteur privé, le potentiel du secteur financier ainsi que l’importance des secteurs extractifs et agricoles, tout en abordant la gestion des ressources en eau et la coopération dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF).
Au nombre des recommandations figurent les défis à surmonter pour parvenir à une intégration économique entre le Sénégal et la Mauritanie d’ici à 2030. Cependant, cette intégration, bien qu’elle constitue une priorité stratégique, se heurte à plusieurs obstacles, dont le plus important demeure l’accès au financement, défi majeur particulièrement pour les Petites et Moyennes Entreprises (PME). D’où la nécessité de créer des mécanismes de financement innovants, tels que les FinTechs, les plateformes de financement participatif ou encore le crowdfunding, afin de rendre le crédit plus accessible à nos entrepreneurs et de stimuler les initiatives transfrontalières.
Deuxièmement, il est impératif de combler le retard en matière d’infrastructures transfrontalières. Le projet gazier Grand Tortue Ahmeyim illustre parfaitement l’ampleur des besoins en infrastructures partagées, que ce soit dans les secteurs de l’énergie, du transport ou de la logistique. Il est également nécessaire de renforcer la coordination institutionnelle pour harmoniser nos cadres réglementaires.
Enfin, la coordination institutionnelle et réglementaire constitue un frein majeur. Harmoniser nos systèmes financiers, commerciaux et réglementaires est essentiel pour assurer la fluidité des échanges et encourager la libre circulation des biens et des services.
DÉVELOPPEMENT DES SECTEURS PRIVÉS SÉNÉGALAIS ET MAURITANIEN
L’un des défis majeurs réside dans le développement des secteurs privés sénégalais et mauritanien. Majoritairement tributaires de la vitalité de leurs secteurs privés respectifs, les économies de ces deux pays peinent à trouver des ressources adaptées à leurs besoins. Il est donc impératif de mettre en place des produits financiers spécifiques, adaptés aux besoins des Petites et Moyennes Entreprises (PME).
RÔLE DU SECTEUR FINANCIER DANS LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
Le secteur financier, qui est censé jouer un rôle capital dans l’intégration économique des deux pays, doit servir de levier pour faciliter l’accès au crédit et financer les grands projets structurants.
Quant à la monétique interbancaire régionale, axe essentiel pour l’harmonisation des transactions financières entre le Sénégal et la Mauritanie, il est nécessaire de développer des solutions de paiement numérique sécurisées et de promouvoir l’inclusion financière pour les populations non bancarisées, en particulier dans les zones transfrontalières.
Ainsi, les banques de développement régionales, telles que la BOAD et la BAD, doivent être impliquées dans le cofinancement des projets de grande envergure.
OPPORTUNITÉS D’INVESTISSEMENT
Pour asseoir une intégration économique viable, il est crucial d’exploiter pleinement les opportunités d’investissement considérables qu’offrent ces pays. Dans les secteurs extractifs, tels que le gaz naturel et les ressources minières, il est essentiel de créer des partenariats public-privé. Le projet gazier Grand Tortue Ahmeyim constitue un exemple concret du potentiel à exploiter. Cela nécessite des financements à long terme, mais surtout une gestion durable de ces ressources stratégiques.
En ce qui concerne l’agriculture, il est indispensable d’investir dans des infrastructures hydrauliques modernes et des systèmes d’irrigation efficaces afin d’augmenter la productivité. Nos secteurs agricoles recèlent un potentiel immense qui ne demande qu’à être développé.
DÉVELOPPEMENT DES SECTEURS EXTRACTIFS
Les secteurs extractifs jouent un rôle clé dans la croissance économique de nos deux pays. Une exploitation responsable et efficace de ces ressources permettrait de créer des emplois et de générer des revenus pour financer le développement de nos infrastructures.
Dans cette perspective, une coopération transfrontalière renforcée est indispensable. Le Sénégal et la Mauritanie doivent travailler de concert pour assurer une gestion optimale des ressources partagées, tout en investissant dans les infrastructures nécessaires, telles que les ports, pipelines et autres équipements critiques.
L’EAU COMME SOURCE DE DÉVELOPPEMENT
L’eau, ressource vitale pour nos populations et pour nos économies, doit être gérée de manière concertée. La gestion intégrée des ressources en eau, notamment dans la vallée du fleuve Sénégal, est essentielle pour assurer la sécurité alimentaire et favoriser la transformation de nos productions agricoles. À cet égard, les deux pays riverains doivent continuer à collaborer pour gérer de façon équitable et durable les barrages et les canaux d’irrigation.
TRANSFORMATION AGRICOLE ET IMPLICATION DU SECTEUR PRIVÉ
La transformation agricole doit être placée au cœur de notre stratégie de croissance. Pour y parvenir, il est crucial d’impliquer le secteur privé dans l’industrialisation de notre agriculture et la création de chaînes de valeur compétitives. Les partenariats public-privé offrent une solution pour moderniser nos infrastructures agricoles, augmenter la production et développer des filières d’exportation solides. Ce faisant, nous stimulerons non seulement la création d’emplois, mais aussi l’amélioration des revenus des populations rurales.
COOPÉRATION DANS LE CADRE DE LA ZLECAF
Enfin, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) constitue une opportunité unique pour renforcer nos relations commerciales. La suppression des barrières tarifaires entre le Sénégal et la Mauritanie facilitera les échanges et accroîtra notre compétitivité sur le marché africain
Pour tirer pleinement parti de cette zone de libre-échange, il est impératif d’harmoniser les politiques commerciales et douanières tout en développant les infrastructures de transport nécessaires à la fluidité des échanges.
L'ARCOP DÉBRANCHE UN PROJET D'ÉLECTRIFICATION RURALE CONTROVERSÉ
Le projet de 37 milliards FCFA est suspendu, révélant au grand jour un enchevêtrement d'irrégularités. Au cœur du scandale : des garanties émises sans paiement de primes, une utilisation opaque des fonds d'avance, et des mouvements bancaires suspects
(SenePlus) - L'Autorité de Régulation de la Commande Publique (ARCOP) a ordonné la suspension immédiate d'un projet majeur d'électrification rurale, impliquant plusieurs régions du pays et un financement espagnol de plus de 37 milliards de francs CFA.
Cette décision intervient suite à une série de dénonciations et d'irrégularités présumées dans la gestion du projet. Au cœur de cette affaire complexe se trouvent l'Agence Sénégalaise d'Electrification Rurale (ASER), l'entreprise espagnole AEE POWER EPC, et sa filiale sénégalaise AEE POWER Sénégal.
Le litige a éclaté lorsque AEE POWER Sénégal a contesté "la signature d'un protocole d'accord entre ASER et la société AEE POWER EPC", craignant que cela ne "viole les clauses du contrat signé avec lui". L'entreprise sénégalaise a saisi l'ARCOP dès le 29 août 2024, dénonçant une renégociation du marché qui "ne respecterait pas les procédures de passation des marchés publics".
La situation s'est encore complexifiée avec l'intervention de la Banque SANTANDER, principale financière du projet. Dans un courrier daté du 30 septembre 2024, la banque espagnole a exprimé "ses vives inquiétudes" concernant la gestion financière du contrat. Elle a notamment soulevé des questions sur "l'éligibilité à la garantie souveraine et sur la caution émise par la SONAC", la compagnie d'assurance impliquée dans le projet.
Plus alarmant encore, la banque a révélé avoir "saisi l'entreprise AEE POWER EPC pour lui demander des éclairages sur différents points, notamment, la destination et l'utilisation des sommes mises à sa disposition à titre d'avance de démarrage des travaux". L'absence de réponse de l'entreprise espagnole a conduit la Banque SANTANDER, en collaboration avec l'Agence Espagnole de Crédit à l'Exportation (CESCE), à "suspendre tout financement relatif au marché".
L'ARCOP, dans sa décision, met en lumière plusieurs irrégularités potentielles, notamment :
"L'émission, par la Compagnie d'assurances SONAC, de garanties sans contrepartie financière pour le paiement des primes, contrevenant ainsi aux dispositions du code CIMA."
"L'utilisation de l'avance de démarrage à d'autres fins, notamment la régularisation du paiement des primes."
"Des transferts constatés sur le compte de dépôt de l'avance de démarrage ouvert au niveau de la Banque Santander, alors que les travaux n'ont pas encore démarré."
Face à ces allégations graves, l'ARCOP a pris la décision de suspendre l'exécution du marché "jusqu'au prononcé de la décision du Comité de Règlement des Différends". Cette mesure conservatoire vise à préserver l'intégrité du processus et à permettre une enquête approfondie sur les irrégularités présumées.
L'autorité de régulation a également pointé du doigt le manque de coopération de l'ASER, notant que l'agence "n'a toujours pas envoyé les dossiers du marché réclamés par le CRD pour statuer au fond et rendre une décision conforme à la réglementation".
BP SEUL ACHETEUR DU GNL SÉNÉGALAIS
Un arbitrage international vient d'interdire à Kosmos Energy de vendre à des tiers le gaz naturel liquéfié issu du projet Greater Tortue Ahmeyim (GTA), situé entre le Dakar et la Nouackchott
(SenePlus) - Le projet de gaz naturel liquéfié (GNL) Greater Tortue Ahmeyim (GTA), situé au large du Sénégal et de la Mauritanie, connaît une nouvelle évolution majeure. Selon une information rapportée mardi 8 octobre par Reuters, un arbitrage international basé à Paris a rendu une décision en faveur de BP, empêchant Kosmos Energy de vendre du GNL issu de ce projet à des tiers pendant toute la durée du contrat de vente. Cette décision conforte BP dans sa position de principal acheteur exclusif de la production du GTA.
Kosmos Energy, société américaine d’exploration pétrolière et gazière cotée en bourse, détient 26,8 % de participation dans le projet. Cependant, BP, avec 56 % des parts, joue le rôle d’opérateur. L’arbitrage, issu de la Chambre internationale de commerce, bloque ainsi toute possibilité pour Kosmos de vendre sa production de GNL à d’autres acheteurs jusqu’en 2033, date à laquelle le contrat pourrait prendre fin.
Le Sénégal s’apprête ainsi à se positionner comme un acteur clé dans l'exportation de GNL, aux côtés de pays africains comme le Nigeria, l'Angola ou encore le Cameroun. Reuters précise que la zone du projet GTA est d’une importance stratégique pour BP et pour la transition énergétique mondiale. Le GNL, en tant qu’énergie plus propre, s'inscrit pleinement dans la stratégie de BP visant à diversifier ses sources d'approvisionnement.
Malgré la décision, Kosmos Energy a tenu à préciser dans un communiqué que cette situation « n’affecte pas ses attentes financières à long terme », ni les termes initiaux du contrat de vente de GNL. BP, quant à elle, continuera de bénéficier des 2,5 millions de tonnes de GNL produites annuellement pendant une période de 20 ans, comme l’indique Reuters.
Le projet GTA, qui était achevé à 90 % en novembre 2023, devrait entrer en phase opérationnelle au premier trimestre 2024, avec un léger retard par rapport au calendrier initial. Andrew Inglis, PDG de Kosmos, a annoncé lors d’une conférence organisée par BloombergNEF que le démarrage complet du projet était prévu avant la fin de l'année.
Cette décision, bien que technique, marque une avancée cruciale pour le Sénégal, qui aspire à devenir un fournisseur majeur de GNL dans un marché global en pleine transformation. Elle intervient dans un contexte de forte demande mondiale pour le GNL, un domaine où les grands acteurs comme BP et Shell sont également en conflit juridique avec d'autres producteurs, comme Venture Global LNG, précisé l'agence Reuters.
LES EUROBONDS DU SÉNÉGAL PROLONGENT LEURS PERTES APRÈS LA DÉGRADATION DE MOODY'S
Les obligations en dollars du pays arrivant à échéance en 2033 ont chuté un quatrième jour consécutif de 0,3 cent à 84,97 cents sur le dollar à 13h01 à Londres. Les titres dus en 2048 ont subi une série de pertes similaires
(SenePlus) - Les obligations d'Etat libellées en dollars du Sénégal ont prolongé leurs lourdes pertes lundi, après que Moody's a abaissé la note souveraine du pays dans la catégorie spéculative et l'a placé sous surveillance pour un éventuel nouveau déclassement.
Selon Bloomberg, "Les obligations en dollars du pays arrivant à échéance en 2033 ont chuté un quatrième jour consécutif de 0,3 cent à 84,97 cents sur le dollar à 13h01 à Londres. Les titres dus en 2048 ont subi une série de pertes similaires, reculant de 0,4 cent à 72,77 cents sur le dollar."
Vendredi, l'agence de notation a réduit la note de long terme en devises du pays à B1, soit quatre crans sous la catégorie investissement, contre Ba3 auparavant. Moody's a justifié cette décision par "les récentes révélations du nouveau gouvernement selon lesquelles la situation budgétaire et de la dette durant le dernier mandat quinquennal de l'administration précédente était nettement plus faible que précédemment évalué."
Depuis l'annonce le mois dernier des résultats de l'audit mené par le nouveau président Bassirou Diomaye Faye, les obligations sénégalaises figurent parmi les plus mauvaises performances des marchés émergents. Cet audit révèle "un déficit budgétaire de 10% du produit intérieur brut en 2023, près du double des 5,5% annoncés par l'administration précédente."
"La lourde charge de la dette du Sénégal, estimée par les conclusions préliminaires à 83,7% du PIB en 2023 au niveau de l'administration centrale - environ 10 points de pourcentage de plus que le ratio précédemment publié - réduit la capacité d'absorption des chocs et accroît la vulnérabilité à une hausse des coûts de financement", a déclaré Moody's, cité par Bloomberg.
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FRANCOPHONIE : LE DERNIER TANGO DE PARIS
Le gratin de l'Afrique francophone s'est réuni pour un sommet aux allures de dernière danse. Macron a tenté de maintenir l'illusion de l'influence française. Mais derrière les sourires de façade, c'est le crépuscule d'un empire qui se dessinait
Paris, théâtre d'un spectacle aussi fascinant que déconcertant ce week-end. Le Sommet de la Francophonie, jadis vitrine du rayonnement français, s'est mué en bal des adieux pour une influence en déliquescence.
Emmanuel Macron, maestro d'un orchestre désaccordé, a tenté de diriger une symphonie impossible. Face à lui, un parterre clairsemé de 19 chefs d'État africains, loin de l'affluence d'antan. Les absents ? Nombreux et pesants, du Sénégal au Maroc, signant de leur silence la fin d'une époque.
Dans les coulisses, une valse étrange se jouait. Ici, on réintègre un putschiste guinéen. Là, on courtise un autocrate rwandais. Un pas de deux diplomatiques où les principes semblent avoir perdu le rythme.
Pendant ce temps, certains journalistes, pourtant accrédités auprès du Quai d'Orsay, se sont vus refuser l'entrée. Motif ? "Plus de place". Une explication qui sonne creux face aux rangées de sièges vides lors de la conférence de presse finale.
Ce sommet, miroir d'une francophonie en quête d'identité, pose une question cruciale : dans ce nouveau concert des nations, quelle partition la France compte-t-elle jouer ?