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26 avril 2025
Economie
SECTEUR RIZICOLE, UNE PROGRESSION FREINÉE PAR LES IMPORTATIONS
L’instabilité des impôts sur le riz importé pourrait influencer les prix et la consommation locale, soulevant des enjeux pour l’autosuffisance alimentaire.
Au Sénégal, ces dernières décennies la production du riz a plus doublé avec une tendance baissière notée des importations en 2023. Les données 2023 publiées par l’agence nationale de la statistique et de la démographie révèlent la participation active de la production du riz dans l’économie du pays. Toutefois, l’instabilité des impôts sur le riz importé pourrait affecter les prix et la consommation locale.
Le secteur rizicole a connu une évolution fulgurante entre 2014 et 2023 au Sénégal. Il s’agit de la production de riz décortiqué, les importations et les impôts sur les importations de riz. Les récentes données de 2023 de l’agence nationale de la statistique et de la démographie, la production nationale de riz a atteint 268 124 millions de FCFA par rapport à 2014 qui était de 116 499 millions de FCFA.
Cette croissance représente une augmentation de 130% en dix ans. Ainsi, une forte progression est observée entre 2019 et 2022 avec un bond de 210.766 à 238.953 millions de FCFA. Cette remonte marque la résultante des efforts du gouvernement pour accroître la production locale à travers des politiques agricole et des investissement de l’irrigation.
Cependant, les importations de riz restent très élevées contrairement à la production. En 2023, les importations au Sénégal sont de 301.996 millions de FCFA alors qu’en 2014, elle était de 205.679 millions de FCFA. Un pic est d’ailleurs observé en 2022 qui atteint 346.788 millions de FCFA.
Malgré l’augmentation de cette production locale, la dépendance aux importations reste toujours élevée. 2022 reste une année record avec une hausse due à des facteurs externes tels que les crises mondiales notamment la hausse des prix du riz, les problèmes logistiques entre autres aspects. Mais la baisse constatée en 2023 est, selon l’Ansd, les bonnes politiques du gouvernement du Sénégal sur la réduction de la dépendance des importations.
En 2022, la hausse des impôts a favorisé la production locale avec une volonté manifeste du Sénégal de taxer les importations qui étaient à 35 160 millions FCFA. Même si la chute de 24.400 millions CFCA pourrait être liée à une politique d’allègement fiscal pour faire face à la hausse des prix du riz importé.
Pour atteindre cette politique d’autosuffisance alimentaire notamment en riz, le Sénégal devrait poursuivre les investissement dans l’irrigation et la mécanisation afin d’encourager la consommation du riz local tout en améliorant sa qualité et sa compétitive. Pour stabiliser l’économie du riz au Sénégal, il faut nécessairement réduire de manière progressive la dépendance des importations.
par Moustapha Dieye
DANS LE BROUILLARD AMNISTIANT
Dans ce pays où chaque alternance efface la mémoire, Pastef tente de naviguer entre promesses de vérité et zigzags juridiques. Abrogation ? Interprétation ? Le nouveau pouvoir cherche sa voie pendant que les familles des victimes attendent justice
À Ndoumbélane, l’histoire n’a pas de mémoire, elle a des archives que les vainqueurs réécrivent à chaque alternance. Dans le pays de Laay Njomboor où les promesses de campagne n’engagent que ceux qui y croient, les besoins en lumière des esprits finissent souvent dans l’obscurité des tiroirs sélectifs de la loi. Pastef, nouveau propriétaire du volant républicain, semble vouloir conjurer cette fatalité et conduire le pays vers la vérité des « crimes de sang ». Mais entre les zigzags d’abrogation, les demi-clignotants de la loi interprétative, et les freinages en urgence de la cohérence, on se demande s’il ne faudrait pas appeler un garagiste constitutionnel pour éviter une panne générale des esprits. En attendant, les familles pleurent, les morts se taisent, et les vivants… tergiversent.
Du tarxiis sémantique pour élucider des "crimes de sang"
La législature Pastef semble tenir à une promesse de campagne majeure : faire toute la lumière sur les crimes dits de sang perpétrés sur le ndoumbélanien. Même si l'ambition est claire, les moyens de sa réalisation n'ont pas fini de faire sourire à cause d'un tarxiis (glissement) sémantique digne d'un babillage de nourrisson. On est passé d'une volonté d'abrogation totale à un proposition de loi interprétative supplément amendement, en passant par une volonté d'abrogation partielle. Rien que ça ! C'est cocasse, mais il ne serait pas vraiment sérieux de s'y attarder au regard du drame convoqué par le sujet, n'est-ce pas ? Parlons-en. Des Sénégalais sont abattus comme des cailles pendant une partie de chasse. D'autres sont persécutés, maltraités et torturés. Personne n'y aurait cru s'il n'y avait un travail de documentation amateur et professionnel des évènements qui ont secoué Ndoumbélane entre 2021 et 2024. Comme pour narguer l'opinion, le Watchacha évoque le besoin de stabiliser le climat social et sortit de sa manche une loi pour oublier. La législature Benno, pour enfoncer le glaive dans la plaie déjà béante, vota ladite loi. C'était aussi bête et grave que cela. Ils n'imaginaient peut-être pas qu'Amadou Njamala, le député trop riche pour être honnête, allait essuyer un revers d'anthologie devant le duo Koromak mooy Ngundu à la présidentielle de 2024, malgré le soutien controversé de son patron, le Watchacha.
Pas de sang, pas de responsabilité
Amadou Ba, le député connaît tout de Pastef, est en train de faire le tour des plateaux pour "éclairer" l'opinion sur le tarxiis sémantique. À demi-mot et avec une curieuse légèreté, il a taillé une sorte d'irresponsabilité aux manifestants au motif que cela se passe ainsi ailleurs et que ces derniers n'ont jamais été inquiétés après les évènements de 2011. Ce qu'il oublie ou omet peut-être, c'est que ces "manifestants" avaient une drôle de manière d'exercer leur droit constitutionnel de résister. En effet, à Ndoumbélane, on a résisté en faisant des courses clandestines à Auchan, saccagé et incendié des commerces, des infrastructures publiques et des bus, des maisons et des véhicules privés, insulté les visages institutionnels de la République, appelé à l'insurrection. On a même bouffé le très délicieux poulet de Me Elhadj Diouf après avoir effectué une ziara razzia à son domicile. La liste des actes de "résistance" n'est pas exhaustive mais il serait inopportun de pondre un mémoire sur la question. D'autant plus qu'il ne s'agit là que d'une simple piqûre rappel, pour tous les esprits qui seraient trop tentés par le démon de l'oubli sélectif.
Déclarez l'état d'urgence, le Premier ministre est ‘‘insulté’’ !
Après les propos de Badara langue de feu à l'endroit d'Amadou Ba connaît tout et Koromak, Le parti aux milliers de cadres, entendez Pastef, et des ministres de la République ont réagi à l'unisson : il est hors de question de continuer d'accepter que Koromak se fasse "injurier." Ce qui est cocasse dans ce mélodrame, c'est que Koromak a n fois adressé les propos qu'il a reçus à des institutions de la République. À l'époque, cela ne dérangeait curieusement pas ces fervents gardiens de l'intégrité de la République et de ses symboles. Mais enfin, ce n'est pas cela le plus important. Ce qu'il faut surtout rappeler, c'est que Koromak est le visage d'une forte institution de la République de Ndoumbélane, le gouvernement. Tous les citoyens, de ce fait, sont tenus de lui accorder la dignité qui est attachée à son statut. La liberté d'expression ne saurait tout permettre et les hommes des médias et les leaders d'opinion devraient témoigner davantage de respect aux oreilles qui les entendent et aux yeux qui les lisent. Ave Ndoumbélane !
LE SENEGAL CONTRAINT DE S’AJUSTER A L’AJUSTEMENT STRUCTUREL
Le Fmi n’entend prendre aucune initiative pour signer un nouvel accord de coopération avec le Sénégal, tant que le pays n’a pas corrigé les chiffres «fallacieux» de l’ancien régime et redressé la barre.
Le Fmi n’entend prendre aucune initiative pour signer un nouvel accord de coopération avec le Sénégal, tant que le pays n’a pas corrigé les chiffres «fallacieux» de l’ancien régime et redressé la barre. Mais pour ce faire, le gouvernement va devoir appliquer les recettes honnies du Fonds et datant des années 1970.
Après les sorties des autorités de l’Etat sur les chiffres falsifiés par l’ancien pouvoir de Macky Sall, le gouvernement est en train de vivre une célébration morose de son premier anniversaire au pouvoir. Ce qui devait être une célébration de joie tourne à l’atonie. Alors que le Sénégalais lambda cherche le diable pour lui arracher la queue, le gouvernement se rend compte qu’il lui faudra encore beaucoup d’efforts pour éviter une crise économique et sociale.
M. Edward Gemayel, chef de la mission du Sénégal, qui a terminé son séjour à Dakar, a annoncé que le Fonds n’entamera pas de discussions avec le Sénégal sur un nouveau programme, tant que le pays n’aura pas pris de mesures correctives sur les «chiffres falsifiés» que l’Igf et la Cour des comptes ont imputés au régime de Macky Sall.
Autrement dit, le gouvernement est mis devant ses responsabilités. En des termes clairs, le gouvernement du Premier ministre Sonko est appelé à prendre des mesures pour combler son déficit et ramener la dette à des taux supportables. Pour ce faire, les recettes des institutions de Bretton Woods sont connues de tous, et ont été pendant longtemps décriées. Même le gouvernement actuel n’a jamais caché sa réticence à se voir imposer des mesures concoctées dans des laboratoires de Washington, de Bruxelles ou d’autres pays occidentaux.
Mais, dans le système économique dans lequel «Diomaye moy Sonko» s’est enfermé, il lui sera difficile d’éviter à son Peuple d’avaler cette pilule.
Déjà, ce qui se faisait peutêtre par stratégie politique va devoir s’appliquer par contrainte économique. Les compressions de personnel risquent de s’accentuer, en attendant que le pouvoir trouve le moyen d’imposer des baisses de salaires à certains de ses partisans. Les subventions sur l’énergie et l’eau devraient suivre, comme ont été gelées les bourses de sécurité sociale. Le prétexte de la réforme du Registre national unique (Rnu) ne tient que pour ceux qui veulent y croire. En réalité, il est difficile à l’Etat de trouver 7 milliards de francs Cfa pour apporter un soulagement à la frange la plus démunie de la population locale, au moment où il avait besoin de quasiment la même somme pour calmer la base politique qui l’a amené au pouvoir, et qui frappait à la porte avec insistance.
Pour le secteur énergétique, le Fmi a toujours préconisé la fin des subventions, en arguant qu’elles bénéficiaient plus aux couches les plus aisées de la population qu’aux personnes démunies. Ces subventions qui, à certaines périodes, sont allées jusqu’à 300 milliards de francs Cfa par an, constituent une grosse charge pour les caisses de l’Etat. Puisque le gouvernement se dit lui-même «contraint» et sans «marge de manœuvre» économique et budgétaire, il n’aura pas besoin qu’on lui indique le chemin de Canossa. Il va s’y rendre de lui-même, et sans doute à pas cadencé. En assumant de lui-même les conséquences de ses actes.
Et c’est à la fin de ce processus de mise en œuvre d’une politique d’ajustement structurel dont le nom sera certainement changé pour ne choquer personne, ou encore moins donner à des détracteurs du genre Abdoul Mbaye ou Thierno Alassane Sall l’occasion de crier victoire disant qu’ils l’avaient annoncé, que le gouvernement pourra reprendre langue avec le Fmi, et négocier un nouveau programme de coopération. Ce qui ne pourra se faire qu’à partir du mois de juin, au plus tôt.
Mais vu que le Fonds n’a pas pour tradition de faire de l’aumône, Edward Gemayel a bien dit hier à la presse sénégalaise, que l’Etat aura le choix de trouver le moyen de négocier un moratoire pour les décaissements déjà opérés dans le cadre du programme annulé à la suite des «révélations» du Premier ministre Sonko. Il ne lui sera pas fait aumône des milliards déjà décaissés, mais les parties trouveront les modalités de remboursement.
Le seul point positif dans cette situation, et pour les semaines à venir, est que le Sénégal va commencer à encaisser petit à petit les dividendes tirés de l’exploitation de ses hydrocarbures.
Par Mohamed GUEYE
LE TEMPS D’UN TOURISME RÉELLEMENT ENDOGÈNE
Au moment où le régime du président Diomaye Faye célèbre sa première année de pouvoir, il prend sans doute également le temps de se rendre compte de l’état de ruine dans lequel l’économie du Sénégal est plongée
Au moment où le régime du président Diomaye Faye célèbre sa première année de pouvoir, il prend sans doute également le temps de se rendre compte de l’état de ruine dans lequel l’économie du Sénégal est plongée. Les autorités semblent se comporter comme certains de leurs pairs de certains pays pétroliers, et croire qu’il suffirait au Peuple de patienter un tout petit peu, avant que la manne tirée du pétrole et du gaz vienne nous sortir de la pauvreté.
Du fait de cette conviction, on est en train de perdre des atouts qui ont fait la grandeur du Sénégal et dont certains pourraient encore servir à son rayonnement.
Dans ces colonnes, on avait traité une fois de la question du tourisme. Il n’est pas inutile d’y revenir car c’est l’un des domaines qui pourraient, plus que le pétrole et le gaz, servir encore plus au rayonnement et au développement économique du Sénégal.
Pendant longtemps, le tourisme et la pêche ont été les mamelles qui ont servi à nourrir l’économie du Sénégal. Plus que la pêche et l’agriculture, notamment l’arachide, le tourisme aurait pu servir à bâtir dans ce pays, une industrie de loisirs forte et attrayante. Mais il aurait fallu, pour lui donner de bonnes bases, une volonté politique bien affirmée.
S’est-on jamais demandé est-ce que notre pavillon national, «Air Sénégal», connaitrait une chute aussi rapide, en moins de dix ans, avec des aéronefs tout neufs dont certains ont été payés rubis sur l’ongle, si le pays avait une réelle politique d’attractivité touristique ? Depuis l’indépendance, le Président Senghor avait initié des activités culturelles qui ont permis de braquer le regard de l’étranger sur le pays et sa richesse culturelle. Abdoulaye Wade avait tenté de relancer le Festival mondial des arts nègres qui, malheureusement, n’a pas eu de suite. Pourtant, qui ne se rappelle pas l’engouement provoqué par le Fesman en 2010 et le nombre d’étrangers qui sont venus prendre part à cette activité ?
L’actuel gouvernement, dès son arrivée aux affaires, s’est empressé de reporter la Biennale de l’art africain, le Dak’Art, et de le repousser à plusieurs mois après. Cela avait contraint plusieurs artistes à annuler leur participation, du fait du changement de calendrier. Cela a été autant de nuitées d’hôtels perdues, ainsi que des activités sociales et culturelles annulées. Un gros manque à gagner pour les organisateurs. Et cela est certainement le cas de tour-operators qui auraient pu inclure l’évènement dans leur package pour touristes.
Au moment où les activités touristiques et culturelles se réduisent comme peau de chagrin, le chef de l’Etat est fier de s’afficher en train d’inaugurer un nouvel réceptif hôtelier sur le Pôle urbain de Diamniadio. Et il en promet d’autres encore, de marques parmi les plus prestigieuses. Les capitalistes qui viennent ouvrir ces nouveaux réceptifs ont sans doute des idées en tête. Mais est-ce les mêmes idées que celles de nos autorités ? Le Sénégalais lambda serait attiré à poser la question au chef de l’Etat de savoir quelle est la valeur touristique du Pôle de Diamniadio, dont il faudrait avoir le regard de Mohamadou Lamine Massaly pour le comparer à Dubaï. Est-ce une extension de la ville de Dakar ou l’ébauche de la future conurbation qui devra relier Dakar à Mbour et Thiès ? Ou alors, c’est juste un espace de villégiature pour ceux qui, venant de Diass, ne souhaiteraient pas se rendre à Dakar, à Mbour ou à Thiès ?
Si des ressources doivent être placées sur ce site, il faudrait que le plan directeur d’aménagement des lieux soit partagé avec tous les acteurs, pour éviter des conflits fonciers avec les populations locales, susceptibles de faire fuir les visiteurs et les investisseurs.
Et puisque, du fait d’une politique erratique, la destination Sénégal est plus onéreuse que toutes ses concurrentes, malgré notre propre compagnie aérienne -qui risque de ne plus exister bientôt-, le pays devrait tenter de développer au moins d’autres secteurs afin d’attirer les visiteurs et de les fidéliser. On a parlé de l’art et de l’artisanat. Que faudrait-il pour relancer les Manufactures sénégalaises des arts décoratifs (Msad) situées à Thiès ? Comme dans bien de domaines, les artistes sénégalais sont réputés dans le monde. Pourquoi les laisser patauger dans l’informel alors que des cadres bien structurés existent, qui pourraient leur permettre de s’épanouir encore plus ? S’il est vrai qu’un artiste se doit de se «vendre» et s’imposer par son art et par lui-même, une politique promotionnelle ne serait pas superflue. Cela pourrait être un volet à inclure dans le travail de l’Agence sénégalaise de promotion touristique (Aspt) dont on se demande pourquoi l’Etat veut la fondre avec la Sapco, qui n’a pas le même objet
Si l’on relançait vraiment le tourisme, il ne serait certainement plus nécessaire pour certains secteurs économiques comme la pêche, ou même certaines Pme, de se battre pour trouver des débouchés à l’étranger. Et ne parlons pas de ces artisans qui souvent squattent les entrées de certains hôtels, et que parfois l’on chasse comme des importuns, sans tenir compte de la valeur ajoutée qu’ils représentent.
Nous n’avons pas vraiment parlé de la formation des jeunes aux métiers de l’hôtellerie. Beaucoup d’hôteliers traitent leurs employés comme des manœuvres exploitables à leur merci, mal payés, surexploités. Cela joue sur leur motivation et leur professionnalisme. Ils sont pourtant les premiers contacts des touristes avec les pays qu’ils visitent. Et ce sont eux qui donnent au visiteur l’envie de revenir ou non dans le pays.
En résumant un article qui pourrait être plus long, on dirait que le développement du tourisme au Sénégal doit se faire de manière endogène. En dehors d’offrir des cadres que les étrangers pourraient trouver dans n’importe quel pays, comme la mer, le sable ou le soleil, il serait temps de mettre en avant les traits spécifiques du Sénégal, exploités par des ressources endogènes.
VERS UN NOUVEAU PROGRAMME FMI-SÉNÉGAL
Le Sénégal et le Fonds monétaire international pourraient aller vers un nouveau programme de coopération, a assuré Edward Gemayel, le chef de mission de l’institution internationale pour le Sénégal qui séjourne dans le pays (18-26 mars)
Le Sénégal et le Fonds monétaire international pourraient aller vers un nouveau programme de coopération, a assuré Edward Gemayel, le chef de mission de l’institution internationale pour le Sénégal qui séjourne dans le pays (18-26 mars). En entretien avec l’Agence sénégalaise de presse (Aps), il a réitéré également sa recommandation relative à une suppression progressive des subventions de l’énergie consommée par les ménages.
«À la suite des défaillances et des lacunes identifiées par la Cour des comptes, nous sommes en train d’identifier des réformes et mesures correctrices pour renforcer et améliorer la gestion des finances publiques, l’économie de manière générale », l’assurance est du chef de mission du Fmi Edward Gemayel dans un entretien avec l’APS. Il signale que les discussions de l’institution financière avec le Sénégal “se focalisent sur une chose : comment faire en sorte que ce qui s’est passé (la publication de données erronées) ne se reproduise plus”. “C’est la chose la plus importante”, a-t-il insisté.
Le Sénégal a exprimé la volonté d’avoir un nouveau programme de coopération avec le FMI, selon M. Gemayel. “Une fois que ce misreporting sera derrière nous, nous allons travailler à un nouveau programme que les autorités sénégalaises ont souhaité avoir avec le FMI”, a-t-il dit. Selon lui, le Sénégal n’est pas le premier pays où cela est arrivé. Il y en a d’autres en Afrique comme dans les autres continents. Il ajoute : “Nous saluons les efforts faits par les autorités sénégalaises dans un esprit de transparence.”
Dans la foulée, Edward Gemayel a déclaré que le Fonds monétaire international (FMI) va accorder au Sénégal une dérogation relative aux décaissements effectués par le pays sur la base de données erronée, ou bien lui demander de les rembourser. “À la suite de ces misreportings (déclarations erronées), nous allons remettre un rapport au conseil d’administration du FMI. Il y aura ensuite deux possibilités”, a dit M. Gemayel. “Soit le FMI va accorder une dérogation au Sénégal, sur les décaissements effectués par le pays sur la base de données erronées, en contrepartie de mesures correctrices que les autorités sénégalaises vont prendre en faisant en sorte que ce qui s’est passé ne se reproduise plus”, a-t-il précisé
Par ailleurs, le Fonds monétaire international (FMI) a réitéré sa recommandation relative à une suppression progressive des subventions de l’énergie consommée par les ménages. Le gouvernement envisage d’appliquer cette recommandation récurrente du FMI en faveur d’une suppression progressive des subventions de l’énergie.
Pour rappel, l’État du Sénégal alloue ”plus de 4 % du PIB aux subventions des produits énergétiques : électricité, essence, supercarburant, gasoil et gaz butane”, indique un document publié en mai 2024 par la direction générale de la planification et des politiques économiques du ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération.
LA PAGAILLE DES HORS-LA-LOI
Faire en sorte que l’exploitation des hydrocarbures n’ait pas d’impacts négatifs sur l’environnement est un défi que les autorités devront réaliser. La récente fuite de gaz des champs gaziers de GTA, à Saint-Louis, montre que le risque est latent
Faire en sorte que l’exploitation des hydrocarbures n’ait pas d’impacts négatifs sur l’environnement est un défi que les autorités devront réaliser. La récente fuite de gaz des champs gaziers de Grande Tortue Ahmeyim (GTA), à Saint-Louis, montre que le risque est latent. Déjà, l’extraction des mines a causé d’importants dégâts à l’environnement, dans les différentes zones minières au Sénégal. D’ailleurs, entre décembre 2023 et septembre 2024, aucune des 484 nouvelles demandes d’exploitation minière soumises ne respecte la réglementation en vigueur.
La fuite de gaz dans les champs gaziers de Grande Tortue Ahmeyim (GTA), à Saint-Louis, quelques mois seulement après le démarrage officiel de l’exploitation, le 31 décembre 2024, remet sur la table la problématique de l’impact de l’exploitation des hydrocarbures sur l’environnement. L’Etat et l’entreprise British Petroleum (BP) ont annoncé, tout de même, la réparation de la fuite. «Ce mercredi 12 mars 2025, l’Opérateur du projet gazier GTA, BP, a notifié la réussite de l’installation de l’équipement réparant le puits A02 sur lequel une fuite avait été notifiée depuis le 19 février 2025», annonçait un communiqué du ministère de l’Energie, du Pétrole et des Mines. Le même document signale, par ailleurs, «que les tests et les observations réalisées indiquent l’absence de fuite. Les images satellitaires, prises après l’intervention, n’ont pas révélé de présence de bulles ou de condensats à la surface de l’eau», confirmant ainsi la réparation de la pièce défectueuse. L’impact de l’exploitation du gaz à Saint-Louis nourrit les craintes des pêcheurs artisanaux. Au temps, la Direction de l’Environnement et des Etablissements classés (DEEC), actuelle Direction de la Réglementation environnementale et du Contrôle (DREC), avait sollicité la Commission néerlandaise pour l’Evaluation environnementale (CNEE) aux fins de donner un avis indépendant sur l’Etude d’impact environnemental et social (EIES) du Projet de production de gaz naturel liquéfié (GNL) Grand Tortue / Ahmeyim. L’objectif principal était d’obtenir un avis externe sur les mesures proposées par les opérateurs pour l'atténuation ou la suppression des impacts afin de protéger l'environnement et, en particulier, les ressources halieutiques, la biodiversité et le littoral. Cet avis indépendant visait à favoriser une prise de décision informée sur l’octroi du permis environnemental. Par ailleurs, l’avis devrait contribuer à l’Évaluation environnementale stratégique (EES) du secteur pétro-gazier offshore.
Selon cette commission néerlandaise, l’Etude d’impact environnemental et social (EIES) du projet GTA a tenu compte d’une grande quantité́d’informations pertinentes qui devraient permettre des propositions de gestion argumentées et basées sur de bonnes connaissances. Néanmoins, la commission néerlandaise estime que ces informations ne sont pas toujours complètes et qu’elles n’ont pas été suffisamment exploitées. Ce constat a entrainé, selon toujours la commission, une analyse insuffisante du milieu marin et côtier, de la socio- ́economie de la sous-région de la zone du projet ainsi que de sa vulnérabilité́ face aux impacts liés au projet. Elle a constaté que l’EIES est incomplète sur les raisons des choix qui ont été́ faits dans la conception du projet. Ces lacunes dans l’information, l’analyse et la justification des choix, rendent difficiles une appréciation de la magnitude d’impacts et la pertinence des mesures de mitigations proposées. La prise en charge des inquiétudes de cette commission et des appréhensions communautaires reste un mystère. De même, note la source, l’exploitation du gaz de Saint-Louis a été lancée sans qu’une grande communication ne soit faite sur les mesures prises pour réduire les impacts environnementaux. Au même moment, un peu plus loin, l’exploitation du pétrole de Sangomar a, elle aussi, démarré et devra être conciliée avec les activités des insulaires du Delta du fleuve Saloum notamment celles de pêcheurs artisanaux, des femmes transformatrices de produits halieutiques, et la cueillette de fruits de mer, etc.
L’exploitation minière à l’origine d’un désastre écologique
Bien avant le début de l’exploitation des hydrocarbures, les ressources minières sont extraites dans plusieurs régions du Sénégal, dans des conditions qui ne respectent pas toujours la préservation de l’environnement. Dans la zone de Mboro, les populations se plaignent de pertes d’espaces agricoles, dues à des multinationales qui exploitent les terres pour extraire des minéraux, sans procéder à la réhabilitation nécessaire, contrairement aux exigences du Code de l’Environnement. Il en est de même dans plusieurs autres parties du pays. En novembre 2023, il est ressorti d’une étude de la Direction des Mines, notamment un audit des Plans de gestion environnementale (PGES) pour l’opérationnalisation du Fonds de réhabilitation des sites miniers et des carrières, que moins de la moitié des carrières a fait l’objet d’une Etude d’impact environnemental et social (EIES), soit 47% des projets de carrières, tandis que 44% de ces derniers ne disposent pas d’études et 9% ont des EIES en cours (rapport non encore validé par l’administration environnementale).
Pour les carrières n’ayant pas fait l’objet d’une étude d’impact environnemental, il s’agit notamment de celles antérieures à la loi N°2001-01 du 15 janvier 2001, portant Code de l’Environnement qui exige la réalisation d’une étude d’impact environnemental avant la mise en œuvre de tout projet miner. L’inexistence d’une EIES étant liée, selon le rapport, au manque d’informations des promoteurs sur l’obligation de réaliser, préalablement à toute activité, une étude d’impact environnemental. Comme explications, l’étude fait ressortir que certains promoteurs ont plusieurs autres carrières appartenant au même titre et ils pensent qu’il suffit d’en faire l’étude d’une seule carrière pour couvrir l’ensemble du titre. Pour les petites mines n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation environnementale, sept (7) se trouvent dans la région de Kédougou, deux (2) à Thiès, deux (2) autres à Matam dont l’une est à Ndendory. Une autre mine se trouve à Bakel, dans la région de Tambacounda.
S’agissant des concessions minières qui n’ont pas fait l’objet d’une évaluation environnementale, on les retrouve à Thiès : deux (2) dont l’une se trouve à Darou Khoudoss, l’autre à Thicky. Il y a aussi une installation dans la Falémé à Kédougou. Pour les carrières qui n’ont pas fait l’objet d’une évaluation environnementale, plus d’une trentaine se trouve dans la région de Thiès. Trois (3) sont dans la région de Tambacounda, à Koussanar. Bafoundou et Marougoukoto sont aussi concernés. A Kédougou, on en dénombre quatre (4) : Mako, Ibel Ndebou et Dimboli. Dans la région de Dakar, Ndoukhoura Wolof accueille aussi une installation qui n’a pas fait l’objet d’une étude environnementale. A côté, il y a des carrières dont les études d’impact environnemental sont en cours. On en retrouve trois (3) dans la région de Thiès. Elles sont à Thiès, Ngoundiane et Ndébou. Neuf (9) sont dans la région de Kédougou, à Tomboronkoto, Saraya, Wassadou et Mako.
Bref, ce qui est constant dans l’étude, c’est que l’existence d’un plan d’impact environnemental ne garantit pas la disponibilité d’un plan de réhabilitation. 47% des carrières qui ont fait l’objet d’une EIES n’ont pas de plan de réhabilitation budgétisé. D’après le document, l’absence de plans de réhabilitation de certaines évaluations environnementales peut s’expliquer par le fait que l’élaboration d’un plan de réhabilitation au sein des rapports d’EIES est absente de la loi portant Code de l’Environnement en vigueur. Toutefois, des efforts de réhabilitation sont entrepris par des compagnies. A côté des compagnies, l’exploitation traditionnelle de l’or est à l’origine d’une pollution de la Falémé, obligeant l’Etat à prendre la mesure d’interdiction de la pratique de l’orpaillage sur un rayon de 500 m du cours d’eau.
Diomaye actionne son gouvernement
A signaler que la réhabilitation des sites miniers, après exploitation, est une directive de la législation sénégalaise. Un Fonds de réhabilitation des sites miniers est instauré depuis 2003, mais il n’est pas fonctionnel car n’étant pas alimenté. L’alimentation de ce fonds n’a commencé que ces dernières années. La somme mobilisée n’est pas trop importante et s’estimait, en 2023, à 1,5 milliard. Certains exploitants refusent de se soumettre à la loi, sous prétexte que leurs contrats n’intègrent pas cet aspect, car antérieurs à son adoption. L’éclaircie dans la grisaille est que les nouvelles autorités semblent avoir pris conscience du problème En Conseil des ministres du 29 janvier 2025, le gouvernement a souligné que «l’exploitation des ressources minières dans plusieurs localités du pays ne participe pas activement au développement territorial et ne profite pas aux populations locales». Voilà pourquoi, a informé le communiqué de ce Conseil des ministres, «le Président de la République a demandé aux ministres en charge des Mines, des Collectivités territoriales, des Finances, de l’Économie et de l’Environnement de procéder, sous la supervision du Premier ministre, à l’évaluation nationale de l’impact économique, social et environnemental de l’exploitation minière sur le développement des localités polarisées».
Mieux, le président de la République avait indiqué, «l’urgence de faire le point sur le Fonds d’Appui au Développement des Collectivités territoriales et les investissements en infrastructures sociales de base issus des prescriptions du Code minier ». Par ailleurs, le président Bassirou Diomaye Faye a demandé au gouvernement, «de définir avec les acteurs territoriaux un mécanisme consensuel d’amélioration des relations entre les sociétés minières et les populations à travers la préservation de l’environnement et du cadre de vie, la promotion des emplois locaux et un meilleur encadrement de la Responsabilité sociétale d’Entreprise (RSE)».
L’impact de l’exploitation des ressources extractives sur l’environnement est aussi revenu dans les discussions du Conseil des ministres du 12 mars 2025. Tout en soulignant que la transparence dans la gouvernance des ressources naturelles demeure une exigence prioritaire de l’Etat, le président de la République a rappelé «son attachement au bon fonctionnement du Comité national de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries extractives (ITIE Sénégal) et au renforcement permanent de ses moyens d’intervention dans le cadre de l’exécution de ses missions». Le président Diomaye Faye a demandé à son gouvernement «de prendre toutes les mesures requises, en relation avec ITIE Sénégal, en vue de satisfaire aux nouvelles exigences de la norme ITIE 2023 en perspective de la prochaine validation du Sénégal dont le démarrage est prévu en juillet 2025 ».
Mieux, le Chef de l’Etat est revenu sur «l’importance de veiller à la gestion optimale des impacts environnementaux et sociaux de l’exploitation minière et pétrolière sur le bien-être des populations». Il a, à ce sujet, requis un bilan des Fonds miniers d’appui et de péréquation des Collectivités territoriales, ainsi que du Fonds de réhabilitation des sites miniers. Il a chargé les ministres impliqués de tenir, sous leur présidence effective, des revues sectorielles avec le Comité national ITIE afin de mieux préparer le processus de validation du Sénégal et d’informer les citoyens et l’ensemble des parties prenantes sur la gouvernance du secteur extractif.
484 demandes d’autorisation d’exploitation enregistrées non conformes et 71 demandes de renouvellement sur 77 déposees hors-la-loi
En attendant, le ministre de l’Énergie, du Pétrole et des Mines, Biram Soulèye Diop, a révélé jeudi dernier, 20 mars 2025, qu’aucune des 484 nouvelles demandes d’exploitation minière soumises entre décembre 2023 et septembre 2024 ne respecte la réglementation en vigueur. S’exprimant lors d’un atelier consacré à la relance du hub minier régional, dans le cadre de son alignement avec l’Agenda de transformation 2050, le ministre a, par ailleurs, précisé que sur les 77 demandes de renouvellement déposées, seules 06 répondent aux exigences légales. «Tout le reste est hors la loi», a-t-il affirmé, enjoignant les entreprises concernées à se conformer aux règles en vigueur. Évoquant la répartition des titres miniers, Biram Soulèye Diop a informé que «41% des titres et autorisations sont délivrés entre la région Est et Dakar». Le même taux est octroyé dans la région de Thiès
Dès lors, il a annoncé une démarche de transparence et de réorganisation du secteur, pour une meilleure connaissance et maîtrise des activités minières par ses équipes, tout en identifiant l’ensemble des détenteurs de titres, la «mise en place des commissions chargées de collecter et d’analyser les informations nécessaires afin de permettre à l’État de disposer de données fiables sur le secteur». Cela suppose une revue exhaustive de l’intégralité des titres miniers depuis 1959. «Le rapport a été transmis au président de la République et au Premier ministre», a-t-il conclu.
LE FMI RASSURE SUR LA VIABILITÉ FINANCIÈRE DU SÉNÉGAL
Malgré un niveau de dette avoisinant 100 % du PIB, le pays reste en mesure d’honorer ses engagements financiers, a affirmé Edward Gemayel, chef de mission du FMI. Il a souligné que le pays n’a pas sollicité de restructuration.
La dette du Sénégal reste ‘’viable’’, en dépit du fait que selon le rapport de la Cour des comptes, son niveau a atteint presque 100 % du produit intérieur brut (PIB), a assuré le chef de mission du Fonds monétaire international (FMI) pour le Sénégal, Edward Gemayel.
Malgré un ratio de presque 100% du PIB, la dette du Sénégal demeure ‘’toujours viable’’, a indiqué M. Gemayel dans des propos rapportés par le site du Soleil.
Selon le site d’information qui s’appuie sur une interview qu’il a accordée au quotidien national, le gouvernement sénégalais est toujours ‘’capable d’honorer le service de la dette et n’a pas sollicité à ce jour une restructuration’’.
La mission du Fmi séjourne à Dakar du 18 au 26 mars en vue de finaliser un nouveau programme d’aides avec le Sénégal, qui facilitera le déblocage des financements.
Dans son rapport définitif sur la situation des finances publiques entre 2019 et mars 2024, publié en février dernier, la Cour des comptes avait estimé le montant de la dette publique du Sénégal à la fin de l’année 2023 à 99,67 % du PIB, contre 73,6%, selon l’ancien régime.
La Cour des comptes avait ainsi confirmé les allégations faites par le gouvernement en septembre dernier, selon lesquelles des ‘’données erronées’’ ont été publiées entre 2019 et 2023, concernant la dette et le déficit publics du Sénégal.
Le Sénégal travaille à obtenir une dérogation du FMI
Le Chef de mission du FMI attend de prendre davantage connaissance du rapport de la Cour des comptes, d’échanger avec les autorités et d’identifier des ‘’mesures correctrices’’.
Le soleil.sn rapporte que Edward Gemayel a déjà indiqué que les investisseurs sont ‘’très rassurés’’ par l’exercice de transparence auquel s’est livré le gouvernement.
Gemayel a indiqué que les autorités sénégalaises travaillent dans le sens d’obtenir une dérogation et ont déjà proposé une série de mesures correctrices, en plus de celles identifiées par le rapport de la Cour des comptes, annonçant que le prochain programme devrait refléter les priorités de l’agenda Sénégal 2050.
L’ancien Président, Macky Sall, avait contesté les accusations de falsification de chiffres par son gouvernement.
‘’J’ai laissé un pays où les indicateurs étaient au vert. Le Fonds monétaire international a confirmé cela, un mois après que j’ai quitté le pays’’, avait-il soutenu.
LES POLITIQUES DE FINANCEMENT DU DEVELOPPEMENT EN AFRIQUE DE L’OUEST DOIVENT EVOLUER
Ex-Directeur Exécutive Adjoint pour Open Society Africa et Directeur Exécutif de Open Society Initiative for West Africa (OSIWA), Dr Ibrahima Aidara apporte sa réflexion sur la problématique globale des politiques de financement du développement en Afriqu
Ex-Directeur Exécutive Adjoint pour Open Society Africa et Directeur Exécutif de Open Society Initiative for West Africa (OSIWA), Dr Ibrahima Aidara est un économiste sénégalais qui travaille depuis longtemps sur les questions de financement pour le développement, les politiques publiques, les innovations ainsi que la mise en relation des communautés locales avec les politiques et programmes nationaux et internationaux. Dans cet entretien, il apporte sa réflexion sur la problématique globale des politiques de financement du développement en Afrique de l’Ouest : aide internationale contre financement interne.
Quelle lecture faites-vous de la situation économiste actuelle de l’Afrique ?
L’Afrique de l’Ouest, une région riche en ressources naturelles et en potentiel humain, fait face à des défis de développement complexe : inégalités économiques croissantes, infrastructures insuffisantes, gouvernance fragile et insécurité persistante, notamment dans les pays du Sahel. Afin de surmonter ces obstacles et d’assurer un développement durable, la région s’appuie à la fois sur l’aide internationale et sur des financements internes. Cependant, ces deux formes de financement soulèvent des questions de pérennité, d’efficacité et de souveraineté, ce qui exige une réflexion approfondie sur les meilleures stratégies à adopter.
L’Aide Internationale est un pilier du développement mais n’est-elle pas une dépendance risquée ?
L’aide internationale a historiquement joué un rôle central dans le financement du développement en Afrique de l’Ouest. Cette aide provient de plusieurs sources : les États-Unis, l’Union européenne, les institutions multilatérales comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), ainsi que de pays émergents comme la Chine et le Brésil. Cette aide, qu’elle soit humanitaire, technique ou financière, a permis de financer des projets cruciaux dans les domaines de la santé, de l’éducation, des infrastructures et de la sécurité alimentaire. Par exemple, au Nigéria, le programme PEPFAR (President’s Emergency Plan for AIDS Relief) des États-Unis a injecté des milliards de dollars dans le secteur de la santé, particulièrement dans la lutte contre le VIH/SIDA, ce qui a contribué à la réduction du taux de mortalité liée à cette maladie.
La Chine, à travers le Forum sur la Coopération Sino-Africaine (FOCAC), a financé plusieurs projets d’infrastructures en Afrique de l’Ouest, notamment la construction de routes, de ponts, de chemins de fer, et de ports. Un exemple marquant est le projet ferroviaire Abidjan-Ouagadougou, financé en grande partie par des prêts chinois, qui a amélioré la connectivité et stimulé le commerce intra-régional. Plusieurs autres projets ont été mis en œuvre dans le domaine de l’aide alimentaire, dans des pays comme le Mali et le Burkina Faso, où des sécheresses prolongées ont mis en danger la sécurité alimentaire. L’aide internationale a permis de fournir de l’aide d’urgence à des millions de personnes en situation de crise alimentaire.
Les conditions de cession de cette aide ne s’opposent-elles pas souvent à la mise en œuvre des politiques publiques nationales ?
L’aide internationale pose plusieurs défis majeurs. L’une des principales préoccupations est une dépendance économique et politique accrue, limitant l’autonomie des pays bénéficiaires. De plus, les conditions contraignantes imposées par les donateurs, souvent inadaptées aux réalités locales, peuvent entraver la mise en œuvre de politiques publiques nationales. Dans de nombreux cas, elle affaiblit les politiques publiques nationales, qui sont parfois vidées de leur substance souveraine au profit des intérêts des bailleurs de fonds. Malgré les milliards de dollars investis, l’Afrique de l’Ouest demeure l’une des régions les plus pauvres au monde, ce qui interroge l’efficacité de cette aide et la nécessité d’explorer des alternatives plus viables.
Quelle est selon vous la voie vers une plus grande souveraineté économique ?
Dans un des rapports que j’ai coordonnés à OSIWA en 2016, portant sur « la mobilisation des ressources domestiques, à travers la lutte contre les flux financiers illicites », nous démontrions que l’Afrique de l’Ouest a atteint un stade critique de son développement. Des décisions importantes devraient être prises afin de réduire la dépendance vis-à-vis de l’aide étrangère, accroître les investissements publics dans les initiatives de développement et réduire l’extrême pauvreté. Contrairement au narratif sur l’importance de l’aide internationale à l’Afrique, ce rapport a montré que la fuite des capitaux hors de la région est autrement beaucoup plus importante que l’aide reçue.
Le rapport révélait que les pertes dues aux prix de transfert abusifs sont passées de 11 milliards USD en 2011 à 78 milliards USD en 2018. Cette situation a entraîné une baisse des recettes publiques de trois milliards de dollars en 2011 à 14 milliards USD en 2013. Même si ces chiffres sont parfois contestés, ils sont néanmoins révélateurs. Il est impératif que nos États opèrent un changement de paradigme, afin de mettre fin à une perte de capitaux se chiffrant à plusieurs milliards, voire milliers de milliards, de dollars en flux de capitaux illicites, pour se concentrer sur le financement des priorités de développement de la région.
Finalement, notre rapport suggère que si les mesures requises avaient été prises pour lutter effectivement contre la falsification des prix de transfert, des recettes fiscales supplémentaires qui auraient été collectées entre 2012 et 2014 (s’élevant à un total de 15 milliards de dollars conformément à nos estimations ), auraient suffi pour combler le déficit financier (11,3 milliards de dollars US en 2011) pour mettre en œuvre le Document stratégique de réduction de la pauvreté (DSRP), de la CEDEAO et contribuer ainsi à l’intégration régionale comme moyen de garantir l’éradication de la pauvreté ainsi que le bien-être, la paix et la sécurité de l’ensemble de la population, conformément aux objectifs annoncés du DSRP.
Quel mode de financement interne et durable pour les pays africains ?
Certains pays de la région commencent progressivement à explorer des moyens de financer leur développement de manière interne. Cela inclut l’augmentation des recettes fiscales, la mobilisation des ressources internes, et la promotion de l’investissement privé national. Le financement interne présente l’avantage de renforcer la souveraineté économique et de réduire la dépendance à l’aide extérieure. Par exemple, le Ghana avait entrepris des réformes fiscales ambitieuses pour accroître ses recettes internes, avec, l’introduction de la TVA qui a permis d’élargir la base fiscale et d’améliorer la collecte des impôts. La Côte d’Ivoire a mis en place des politiques pour encourager les investissements privés, tant nationaux qu’internationaux.
Des initiatives comme la Zone de Transformation Agricole ont permis aux entreprises locales et internationales d’investir dans la transformation de produits agricoles, créant des emplois et stimulant l’économie locale. Le financement privé a été essentiel pour soutenir la croissance des infrastructures, comme les ports et les aéroports, réduisant ainsi la dépendance aux financements étrangers. Le Sénégal développe des pôles territoriaux et des agropoles, misant sur les potentialités locales et le financement du secteur privé national. Le financement interne reste toutefois un défi majeur en Afrique de l’Ouest, notamment en raison des faibles taux de collecte fiscale, de la corruption et de l’inefficacité administrative dans de nombreux pays. De plus, l’accès aux marchés financiers mondiaux reste limité pour plusieurs pays de la région, et les emprunts peuvent entraîner un endettement important, comme cela a été observé dans beaucoup de pays : Ghana, Sénégal, Mali, Burkina Faso, où la dette publique a considérablement augmenté au cours des dernières années.
Est-il possible d’établir l’équilibre entre l’aide internationale et le financement Interne ?
La clé du succès réside dans l’équilibre entre l’aide internationale et les financements internes. L’aide internationale reste indispensable pour répondre à des besoins urgents, comme les crises sanitaires et alimentaires, mais elle ne peut être la seule solution pour un développement durable. Parallèlement, les pays doivent continuer à renforcer leurs capacités internes, notamment en améliorant la gouvernance, en augmentant les recettes fiscales et minimiser les fuites de capitaux, et en attirant des investissements privés. Les politiques de financement du développement en Afrique de l’Ouest doivent évoluer vers un modèle plus équilibré et durable. Si l’aide internationale joue encore un rôle clé, elle ne doit pas être une fin en soi. L’accent doit être mis sur le renforcement des capacités internes, l’optimisation des recettes fiscales et la réduction des flux financiers illicites. L’Afrique de l’Ouest possède les ressources et le potentiel humain nécessaires pour assurer son développement. Il est temps d’adopter des stratégies ambitieuses pour renforcer sa souveraineté économique et bâtir une prospérité durable pour ses populations
LE CHANGEMENT DE PARADIGME DE L’AFRIQUE S’IMPOSE
Bien que le continent dispose d’un potentiel considérable en ressources humaines, minières, énergétiques, halieutiques, pétrolières et gazières, les économies africaines demeurent vulnérables.
Le développement de l’Afrique est entravé par une crise structurelle, caractérisée par une dette publique excessive, des politiques monétaires inadaptées et une pauvreté persistante. Face à ces défis majeurs, il devient impératif d’adopter un nouveau paradigme économique, basé sur une gouvernance financière rigoureuse, une mobilisation accrue des ressources internes et une autonomie dans la prise de décisions stratégiques, afin de promouvoir une croissance durable et inclusive, préconisent des économistes.
Bien que le continent dispose d’un potentiel considérable en ressources humaines, minières, énergétiques, halieutiques, pétrolières et gazières, les économies africaines demeurent vulnérables. Paradoxalement, en dépit de cette abondance de richesses naturelles, l’Afrique figure parmi les régions les plus pauvres du monde. Cette situation s’explique par une faible valorisation des ressources, une dépendance excessive aux financements extérieurs et des prêts contractés à des taux d’intérêt prohibitifs, limitant ainsi la marge de manœuvre des États. Cette problématique a été au cœur d’un débat organisé samedi dernier, à Dakar, dans le cadre des activités mensuelles de l’Africaine de Recherche et de Coopération pour l’Appui au Développement Endogène (ARCADE). Lors de cette rencontre, les économistes Chérif Salif Sy, Demba Moussa Dembélé et Cheikh Oumar Diagne ont plaidé en faveur d’un changement de paradigme, fondé sur un modèle de développement endogène et souverain.
L’ENDETTEMENT EXCESSIF : UN FARDEAU STRUCTUREL
Selon Chérif Salif Sy, fervent défenseur de l’approche endogène du développement, l’un des principaux obstacles au développement du continent réside dans son incapacité à impulser une transformation structurelle, capable de générer une croissance inclusive et durable. Il estime que, sans réformes stratégiques et profondes, les économies africaines resteront fragiles et dépendantes des créanciers internationaux. L’endettement excessif de l’Afrique constitue, selon lui, un véritable fardeau structurel, qui s’explique par plusieurs facteurs au nombre desquels une dépendance accrue aux financements extérieurs, avec des emprunts massifs auprès des institutions financières internationales et de créanciers privés ; des déficits budgétaires chroniques, exacerbés par une faible mobilisation des ressources internes ; une gouvernance économique déficiente, marquée par des dépenses inefficientes et, dans certains cas, une mauvaise gestion des fonds publics. Poursuivant son analyse, il affirme que bien que certains gouvernements africains aient fixé des seuils critiques d’endettement, leur respect demeure incertain. Pour éviter des crises financières récurrentes, il préconise une politique budgétaire rigoureuse et une discipline économique accrue, essentielles pour garantir une croissance stable et soutenue.
LES LIMITES DE L’INDEPENDANCE MONETAIRE
La politique monétaire joue un rôle central dans la stabilité économique d’un pays. À ce titre, l’indépendance monétaire est souvent perçue comme un symbole de souveraineté, permettant aux États de réguler leurs instruments financiers. Cependant, Chérif Salif Sy, membre du Forum du Tiers-Monde, met en garde contre l’illusion que disposer de sa propre monnaie garantit automatiquement la prospérité économique. Argumentant, il rappelle que de nombreux pays dotés de leur propre monnaie sont confrontés à une inflation incontrôlée et à une dévaluation persistante, résultant d’une émission monétaire excessive et d’un manque de discipline macroéconomique. Ainsi, une gestion inefficace de la masse monétaire entraîne une érosion du pouvoir d’achat et un appauvrissement généralisé des populations.
LA NECESSITE DE REFORMES STRUCTURELLES
L’expérience des économies prospères démontre que la stabilité monétaire repose sur un équilibre entre discipline monétaire, investissements productifs et ouverture commerciale maîtrisée. Dès lors, le développement ne peut être fondé uniquement sur l’émission monétaire : il exige des réformes structurelles adaptées, garantes d’une croissance résiliente et soutenable. L’économiste Demba Moussa Dembélé souligne que l’évolution de la dette publique africaine met en évidence entre autres facteurs la dépendance croissante aux financements extérieurs ; une mauvaise gouvernance budgétaire ; un système économique mondial qui perpétue la domination des pays africains. Malgré les annulations partielles de dettes obtenues par certains pays africains au début des années 2000 grâce à l’Initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) et à l’Initiative d’Allégement de la Dette Multilatérale (IADM), la dette africaine n’a cessé de croître. Selon le président de l’ARCADE, plusieurs éléments expliquent cette situation au nombre desquels le recours systématique aux emprunts extérieurs, en raison d’une mobilisation insuffisante des ressources internes ; des conditions d’emprunt défavorables, avec des taux d’intérêt élevés et des clauses restrictives imposées par les créanciers ; une dépendance aux exportations de matières premières, soumises à une forte volatilité des marchés mondiaux, rendant difficile une planification budgétaire efficace. Les effets des ajustements structurels, qui ont limité les capacités d’investissement des États dans des secteurs productifs.
UN TOURNANT DECISIF POUR L’AFRIQUE
Selon Cheikh Oumar Diagne, ancien directeur des moyens généraux de la République du Sénégal, l’Afrique se trouve à un moment charnière de son développement économique. Il estime que le maintien du statu quo, marqué par un endettement chronique, une dépendance aux financements extérieurs et des politiques monétaires inadaptées, fragilise davantage les économies nationales. Convaincu qu’aucun pays ne peut se développer sans recourir à l’endettement, Cheikh Oumar Diagne affirme néanmoins qu’au regard du potentiel économique du continent, l’Afrique doit s’affranchir des théories économiques classiques appliquées depuis plus de 60 ans. Selon lui, « il est temps de bâtir une économie fondée sur les réalités africaines, en valorisant les ressources locales et en renforçant les capacités productives internes ».
par Souleymane Gueye
RENIEMENT PERPÉTUEL ET INVARIABLES CHIENS DE GARDE
De Wade à Diomaye, la politique sénégalaise reste marquée par des promesses non tenues que des "experts" s'empressent de justifier par des arguments techniques. Une trahison systémique des valeurs fondamentales du pays
Au Sénégal, la parole donnée est sacrée. C’est une valeur fondamentale, ancrée dans notre culture, qui définit l’honneur d’un homme. Mais en politique, cette règle ne semble pas exister. Pire encore, chaque reniement est couvert, justifié, légitimé par une caste bien organisée : les chiens de garde du système qui veille à ce que rien ne change vraiment.
Des promesses envolées, des excuses bien rodées
Abdoulaye Wade jurait qu’il ne ferait pas de troisième mandat ? Il a tenté le coup, et ses sbires ont trouvé une astuce juridique pour nous le vendre.
Macky Sall s’était engagé à réduire son mandat à 5 ans ? Il a renié sa parole, et une armée d’experts est sortie de l’ombre pour nous expliquer que « c’était techniquement impossible ».
Diomaye avait promis de sortir le président du Conseil supérieur de la magistrature et Sonko lors des législatives d’annuler la loi d’amnistie ? Aujourd’hui, ils reculent… et comme par magie, les mêmes voix s’élèvent pour nous dire que « le contexte a changé ».
À chaque reniement, le même scénario : on nous endort avec du jargon technique, on nous fait croire que nous ne comprenons pas les « réalités du pouvoir »
Les chiens de garde du système
Ces experts, hauts fonctionnaires, consultants et juristes ne servent pas la démocratie. Ils servent le pouvoir. Leur mission ? Tuer dans l’œuf toute réforme qui pourrait réellement changer le système. Ils ne sont ni neutres ni objectifs : ce sont les gardiens du statu quo, ceux qui trouvent toujours une raison pour nous dire « ce n’est pas possible ».
Quand un président trahit sa parole, ce ne sont pas les électeurs qui protestent le plus. Non. Ce sont ces technocrates qui viennent nous faire la leçon : « Vous ne comprenez pas les réalités de l'Etat ».
Une caste d’experts au service du prince nous explique, avec un jargon compliqué, pourquoi « c’est plus compliqué que prévu ».
Mensonge ! Quand on donne sa parole, on la tient. C’est une question d’honneur, pas de technicité !
Ce qui a besoin de trop d’explications techniques n’est ni démocratique ni populaire
La démocratie repose sur une idée simple : le peuple décide et doit comprendre les choix faits en son nom. Or, chaque fois que l’on nous inonde de jargon et d’arguments techniques pour justifier une trahison, c’est une tentative d’éloigner le peuple du débat. Une loi, une réforme, une décision politique doivent être accessibles à tous. Si un gouvernement a besoin de longues explications complexes pour légitimer ses décisions, c’est qu’il sert des intérêts cachés et non la souveraineté populaire.
Une vraie réforme n’a pas besoin de justifications interminables : elle doit pouvoir être expliquée en une phrase. Si ce n’est pas le cas, c’est qu’elle ne vise pas l’intérêt du peuple, mais celui de quelques privilégiés.
Le peuple doit reprendre le pouvoir
Les Sénégalais doivent cesser d’accepter ces reniements sous prétexte qu’un expert leur a dit que c’était normal. La démocratie ne fonctionne que si le peuple exige des comptes !
Un président fait une promesse ? Il doit la tenir !
La technostructure s’oppose aux réformes ? On la balaie !
On nous dit que le système est trop complexe ? On le simplifie !
Assez des chiens de garde du pouvoir ! Assez de ces traîtres à la parole donnée ! Le Sénégal mérite mieux qu’une élite qui protège ses privilèges pendant que le peuple attend, toujours déçu, toujours trahi.