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26 avril 2025
International
YASSINE FALL EXPOSE LA VISION DE DIOMAYE
Dans un entretien avec Russia Today RT, elle détaille une stratégie axée sur la souveraineté, la coopération régionale et la diversification des partenariats, tout en assumant un repositionnement affirmé sur la scène internationale.
Un an après sa nomination, Yassine Fall, ministre de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères du Sénégal, dévoile les grandes lignes de la nouvelle diplomatie sénégalaise sous la présidence de Bassirou Diomaye Faye. Dans un entretien avec Russia Today RT, elle détaille une stratégie axée sur la souveraineté, la coopération régionale et la diversification des partenariats, tout en assumant un repositionnement affirmé sur la scène internationale.
La ministre sénégalaise de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères, Yassine Fall, a dressé un bilan de sa première année à la tête de la diplomatie sénégalaise en détaillant les nouvelles orientations fixées par le président Bassirou Diomaye Faye, fondées sur « le souverainisme, la justice sociale et la prospérité ». « Ce sont des réformes importantes inspirées des engagements que nous avons pris auprès du peuple sénégalais », a-telle déclaré. Sa nomination à la tête d’un ministère rebaptisé pour intégrer l’intégration africaine est, selon elle, « un symbole, un message et un engagement » fort.
REDEPLOIEMENT AFRICAIN ET DIVERSIFICATION DES PARTENAIRES
La nouvelle diplomatie sénégalaise privilégie les pays africains limitrophes. « Le premier pays visité par le président, ça a été la Mauritanie. Ce n’est pas ce qui se passait avant », rappelle Mme Fall. Des commissions mixtes, comme celle entre le Sénégal, la Gambie et la Guinée-Bissau, ont été initiées pour renforcer la coopération économique. La ministre insiste également sur la diversification des partenariats internationaux : « Je suis allée en Russie, au Japon, en Chine, aux États-Unis », soulignant une volonté de sortir des circuits classiques. Elle met aussi en avant la volonté de professionnaliser le corps diplomatique, renforcer les représentations consulaires à l’heure où les flux migratoires augmentent, et affirmer le Sénégal sur la scène multilatérale. « Nous avons condamné ce qui se passe à Gaza et nous continuons de le faire », a-t-elle ajouté.
PARTENARIAT RENFORCE AVEC LA RUSSIE
Revenant sur sa récente visite à Moscou, elle a salué des échanges « très riches » avec Sergueï Lavrov, son homologue russe. Les discussions ont porté sur l’éducation, l’énergie, le commerce et la coopération technique. « Nous avons pu obtenir la possibilité d’importer directement du blé, des hydrocarbures et de l’engrais depuis la Russie », a-t-elle précisé. Une relance de la commission intergouvernementale entre les deux pays est en préparation. Une visite du président sénégalais en Russie est envisagée « en 2025 ou 2026 ».
SOUVERAINETE SECURITAIRE ET DEPART DES TROUPES FRANÇAISES
À propos du départ des forces françaises du territoire sénégalais, Mme Fall est catégorique : « Le Sénégal est un pays souverain [… ] Il est temps que le Sénégal décide qu’il n’a plus besoin de troupes étrangères. » Elle évoque un processus en cours avec la libération de plusieurs emprises militaires. Évoquant les événements de 2024, la ministre a souligné l’importance de ne pas oublier « les 80 et quelques victimes » des violences politiques. « Nous voulons réconcilier le peuple sénégalais avec la justice », a-telle affirmé, dénonçant son instrumentalisation passée.
SECURITE AU SAHEL ET AMBITION MULTILATERALE
Face à la crise au Sahel, jugée « très virulente », elle prône la coopération régionale. Le Sénégal agit au niveau bilatéral et sousrégional pour sécuriser les frontières et partager les formations. Elle a rappelé la contribution sénégalaise au maintien de la paix en Afrique et au-delà. La ministre a renouvelé l’appel du Sénégal à une réforme du Conseil de sécurité de l’ONU : « Nous demandons quatre sièges pour l’Afrique, deux avec droit de veto. » Elle a également exprimé l’intérêt du Sénégal pour les BRICS, saluant « une alternative pour les pays du Sud ». Ancienne économiste ayant travaillé 13 ans à l’ONU à New York, Yassine Fall affiche une volonté claire : renforcer l’intégration régionale ; diversifier les partenariats, notamment avec le Brésil et Cuba ; repositionner l’Afrique dans les institutions multilatérales ; dénoncer l’injustice du système financier mondial et des agences de notation ; établir des ponts avec la diaspora africaine ; promouvoir la coopération technologique, notamment avec la Russie. « La diplomatie sénégalaise est désormais une diplomatie de rupture, enracinée dans les priorités africaines et résolument tournée vers un monde multipolaire », a conclu Mme Fall. .
LA FRANCE S'APPRÊTE À RECONNAÎTRE L'ÉTAT PALESTINIEN
Le président Emmanuel Macron a annoncé mercredi que la France pourrait reconnaître un État palestinien dès juin 2025, à l'occasion d'une conférence internationale coprésidée avec l'Arabie saoudite à New York
(SenePlus) - Selon l'AFP, le président français Emmanuel Macron a annoncé mercredi que la France pourrait franchir le pas de la reconnaissance d'un État palestinien "en juin", à l'occasion d'une conférence internationale qu'elle coprésidera avec l'Arabie saoudite à New York.
"On doit aller vers une reconnaissance et donc dans les prochains mois on ira", a déclaré le chef de l'État dans une interview à l'émission "C'est à vous" sur France 5, donnée à son retour d'Égypte et diffusée mercredi.
Cette initiative s'inscrit dans un cadre plus large visant une reconnaissance réciproque entre Israël et plusieurs pays. "Notre objectif c'est, quelque part en juin, avec l'Arabie saoudite de présider cette conférence où on pourrait finaliser le mouvement de reconnaissance réciproque par plusieurs", a précisé Emmanuel Macron.
Le président français a justifié cette démarche en soulignant qu'elle permettrait d'amener certains pays défendant la Palestine à reconnaître à leur tour l'État d'Israël. "Je le ferai [...] parce que je pense qu'à un moment donné ce sera juste et parce que je veux aussi participer à une dynamique collective, qui doit permettre aussi à tous ceux qui défendent la Palestine de reconnaître à leur tour Israël, ce que plusieurs d'entre eux ne font pas", a-t-il expliqué.
Dans une région marquée par des tensions croissantes, Emmanuel Macron a également souligné l'importance de cette initiative pour "être clair pour lutter contre ceux qui nient le droit d'Israël à exister, ce qui est le cas de l'Iran, et de nous engager sur une sécurité collective de la région".
LE GOUVERNEMENT CONFIRME LE SCANDALE À LA SÉCU
Selon le ministre du Travail Abassi Fall une instruction judiciaire est en cours concernant des détournements estimés à plus d'un milliard de francs CFA à la Caisse de Sécurité sociale. Plusieurs personnes inculpées sont déjà en détention
(SenePlus) - Dans une réponse officielle adressée au président de l'Assemblée nationale, le ministre du Travail, de l'Emploi et des Relations avec les Institutions (MTERI), Abassi Fall, a confirmé qu'une instruction judiciaire est en cours concernant les allégations de détournement à la Caisse de Sécurité sociale, estimé à plus d'un milliard de francs CFA.
Cette réponse fait suite à une question écrite posée par le député Guy Marius Sagna le 6 mars dernier, qui s'inquiétait non seulement de l'illégalité des conseils d'administration de la Caisse de Sécurité sociale et de l'IPRES, dont les mandats ont expiré depuis 2016, mais également des soupçons de malversations financières.
"Le dossier sur l'affaire du détournement à la Caisse de Sécurité sociale a d'abord été confié au juge d'instruction du 3ème cabinet qui a déjà procédé à l'audition au fond de toutes les parties concernées", précise le ministre dans sa lettre. Il ajoute que "les inculpés sont, pour la plupart, dans les liens de la détention."
Un développement juridique important est survenu le 14 mars 2025, avec l'ordonnance de dessaisissement rendue par le Procureur de la République au profit du Pôle Judiciaire Financier (PJF), désormais compétent en raison de l'importance du montant en jeu.
Concernant la gouvernance des institutions de prévoyance sociale, le ministre a assuré que le gouvernement est "préoccupé par la question du renouvellement des mandats" et qu'un processus a été enclenché depuis plusieurs mois. Ce processus a abouti à la désignation de nouveaux représentants au sein des Collèges des représentants et des Conseils d'administration des deux institutions. Le renouvellement des membres des instances dirigeantes de ces institutions devrait être finalisé avant le 1er mai 2025.
PAR Makhtar Diouf
CES AGENCES DE NOTATION FINANCIÈRE ET NOUS
EXCLUSIF SENEPLUS - Les investisseurs directs étrangers et les bailleurs de fonds ont d’autres références que ces notes. On peut présumer que le Sénégal de l’après 24 mars 2024 est devenu plus attractif
Moody’s et Standard & Poors sont des Agences de Notation Financière (Anf) devenues familières aux Sénégalais depuis leur note (pas bonne) attribuée au nouveau régime. Est-ce la sanction d’une gestion catastrophique de ‘’ces incompétents’’ au pouvoir depuis près d’un an ? Des éclairages sont nécessaires.
J’avais écrit un article sur ces Anf (‘’ Euros, dollars, en veux-tu en voilà’’, 6/09/2021) dans ‘’Sud Quotidien’’. Il m’a paru opportun d’y revenir avec de nouvelles données.
Présentation des Anf
Les Anf (Credit Rating Agencies) sont créées aux Etats-Unis au début du 20èmesiècle avec la clientèle de grandes entreprises. Après la grande crise de 1929 leurs services sont orientés en direction des Etats. Les trois plus grandes Anf sont américaines : la pionnière Moody’s (de John Moody), Standard & Poors (de Henry Poors) qui interviennent en Afrique, et Fichte (de John Fichte). Elles contrôlent 95 pour cent du marché financier. Des Anf de moindre envergure sont présentes en Chine, en Inde, en Afrique du Sud, dont les clients sont des entreprises. Bloomfield opère à Abidjan avec représentation à Douala au Cameroun.
L’Anf intervient sur l’endettement sur les marchés financiers internationaux, surtout sur le marché des obligations. Elle se place entre l’emprunteur (une firme ou un Etat) et un prêteur potentiel appelé investisseur. Lorsqu’un Etat désireux de financer des projets émet une obligation sur les marchés financiers, l’Anf se base sur une évaluation de son degré de solvabilité : situation économique, financière, remboursement de dettes antérieures, stabilité politique. Elle donne une note censée indiquer son aptitude à rembourser le prêt sollicité, et à décider les investisseurs directs.
L’Anf est payée par l’émetteur d’obligation lorsque c’est une entreprise, parfois par l’investisseur qui cherche à placer ses liquidités dans un lieu sûr. Elle vend ses notes à la presse financière et à des institutions comme Bloomberg (agence d’informations financières et économiques) qui les publient.
Les notes des Anf sont données en lettres selon le système de notation en vigueur dans le système américain d’enseignement. Elles se présentent dans l’ordre décroissant, de ‘’excellent’’ à ‘’médiocre’’(en équivalent numérique à peu près de 20 à 1).
Bien des déboires ont jalonné le parcours de ces Anf dans leurs notations de grandes entreprises et de gouvernements.
En 2001, la firme américaine d’énergie Enron, après avoir reçu une bonne note tombe en faillite 4 jours après. En 2003, la banqueroute de World Com est précédée d’une bonne note. En 2003, Parmalat (société laitière italienne du groupe français Lactalis) est déclarée en faillite après une bonne note 18 jours avant. En septembre 2008, la banque américaine Lehman Brothers est en faillite après la bonne note A- de Standard&Poors. La même note est attribuée à la compagnie d’Assurance AIG qui n’est sauvée de la faillite que par un renflouement financier.
Certains financiers prêteurs sont actionnaires dans le capital des Anf, ce qui donne lieu à des conflits d’intérêts. Lorsqu’une firme paie les services d’une Anf, ce n’est pas pour recevoir une mauvaise note. Ce qui pose des doutes sur l’objectivité de ces notations.
Les Anf ont été accusées de grande responsabilité dans la crise financière des années 1990 ayant affecté des pays asiatiques (Corée Sud, Indonésie, Thailande). Les Anf sont aussi culpabilisées dans la crise financière de 2008-2009, en donnant de bonnes notes à des établissements financiers fautifs de la crise des ‘’subprimes’’ (crédits hypothécaires consentis à des personnes sans garantie).
Les Anf n’ont pas bonne presse en Europe, accusées d’avoir arbitrairement dégradé certains pays. La Commission économique de l’Union européenne envisage de créer sa propre Agence de notation financière.
Pourquoi alors le maintien de ces Anf ? Pour certains Européens, c’est parce qu’elles sont américaines. Elles font preuve d’un part pris flagrant en faveur des gouvernements américains. Leurs erreurs ne sont pas sanctionnées, car elles prétendent n’exprimer que des opinions, passibles de la liberté d’expression, comme le leur garantit le premier amendement de la Constitution.
S’y ajoute que bon nombre d’institutions financières (compagnies d’assurance, fonds de pensions, banques commerciales …) pour intervenir sur le marché des dettes sont tenues d’exiger de leurs clients d’être notés par les Anf.
En juin 2010, Obama, décide d’introduire un peu de discipline dans le comportement spéculatif des institutions financières, dont les Anf. Son projet de loi introduit au Sénat par le député Barney Frank et le sénateur Chris Dodd, est adopté comme ‘’Frank- Dodd Act’ qui s’attaque aux conflits d’intérêt. Mais cette pratique ne concerne que les entreprises et non les gouvernements. Le Frank-Dodd Act reconnaît que les notations des Anf sont de nature commerciale sans rapport avec la liberté d’expression et que le chaos financier créé devrait relever de la responsabilité civile. Mais aucune mesure n’est prise à cet effet.
Une méthode de notation inadéquate
La méthode de notation utilisée par les Anf consiste à ne tenir compte que des seules caractéristiques économiques les plus stables, les plus permanentes du pays emprunteur. Ce qui néglige les changements les plus récents survenus dans le paysage économique et politique. C’est la méthode dite ‘’Notation étalée sur le cycle’’ (through the cycle rating)
La méthode différente est dite ‘’Evaluation ponctuelle’’ (Point-in time-rating) qui intègre les caractéristiques permanentes et les changements. Elle permet une notation basée sur une évaluation stable et exacte. C’est la méthode utilisée par les banques pour apprécier le degré de solvabilité de leurs emprunteurs. On comprend ainsi que le dernier eurobond du Sénégal en 2025 ait été souscrit entièrement par la banque américaine J P Morgan.
Il est reproché aux Anf de continuer à utiliser la première méthode, avec retard à l’allumage, ne tenant compte que des informations qui leur viennent des pays via le Fmi, la Bm et d’autres sources.
L’Afrique et les Anf
C’est à partir de 2000 que les gouvernements africains sont poussés vers les Anf. L’argument est que l’aide au développement et les prêts concessionnels (avec faible taux d’intérêt) ont fortement baissé, et dans la nouvelle situation de mondialisation, l’alternative pour le financement des projets est le recours aux marchés financiers des titres obligataires. Les prêteurs ne peuvent plus être seulement les banques, mais aussi d’autres intervenants, avec intermédiation des Anf.
es pays africains commencent à s’endetter en termes de euro-obligation, ou euro-bond mais en fait en dollars. L’euro-obligation est une dette remboursable avec une certaine maturité à un certain taux d’intérêt. Ce type de dette est plus flexible, moins contraignant que la dette des bailleurs traditionnels comme le Fmi et la Bm avec leur lenteur et leurs conditionnalités. Surtout qu’avec les réductions et annulations de dettes qui ont suivi la crise de la dette des années 1980, le niveau d’endettement ayant baissé, pour financer des infrastructures, les pays africains ont opté pour les euro-bonds jusqu’à 20 pour cent de leur endettement total.
L’Etat du Sénégal se lance sur le marché des euro-bonds en 2009 avec 7 opérations à ce jour : 2 sous Wade, avec un taux d’intérêt de 9,25 pour cent ; 4 sous Macky dont 1 avec un taux d’intérêt record de 5, 375 pour cent ; 1 sous Diomaye, au taux de 7,75 pour cent.
Les notes des deux Anf qui interviennent sur le Sénégal se présentent ainsi :
Avec Moody’s :
Sous Wade, une seule note B1 en 2011.
Sous Macky, les notes sont : B1 en 2014 ; Ba3 en 2017, 2020 et 2022.
Sous Diomaye, la note est B1 en octobre 2024, et B3 en février 2025.
Avec Standard & Poors :
Sous Wade (2000,2006,2009,2010) la note est B+
Sous Macky (2013,2018,2019) la note est B+
Sous Diomaye, la note est B+ en octobre 2024, et B en février 2025.
Le niveau d’endettement le plus élevé en eurobond est réalisé sous Macky, avec aussi le taux d’intérêt le plus bas en 2021. C‘est avec lui que les notes des Anf sont ‘’meilleures’’ (en fait moins mauvaises). Cela tient à la confiance due à deux raisons : le Sénégal est perçu comme un prochain exportateur de pétrole et de gaz ; les clignotants économiques conjoncturels présentés sont au vert, rassurants.
Le rapport de la Cour des Comptes en février 2025 révèle que les statistiques présentées sous Macky étaient faussées. Ce qui explique la dégradation de la note du Sénégal par les Anf sous le régime Diomaye qui a hérité de cette situation financière désastreuse.
Les pays africains sont mal notés par les Anf, abonnés à la tranche des B. Les notes du Sénégal se situent en moyenne entre 8 et 9 sur 20.
L’exception est constituée par le Botswana qui flirte avec la note A2, grâce à ses exportations d’or et de diamant.
Le Nigeria et le Kenya ont rejeté les notes qui leur ont été attribuées par Moody’s, estimant que ces agences n’ont pas une claire compréhension de leur situation économique qui n’est pas aussi alarmante.
La Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (Addis Abeba) reproche aux Anf de décourager les investissements étrangers en Afrique et recommande de mettre en place une Anf africaine.
La Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement (Cnuced, Genève) est aussi très critique à l’égard des Anf suspectées de discrimination à l’encontre des pays en développement.
Les institutions de Bretton-Woods ne figurent pas parmi les critiques des Anf. La Banque mondiale crée en 2002 le mécanisme ‘’Doing Business’’ avec l’objectif de comprendre et améliorer l’environnement réglementaire des affaires. Il s’agit d’attribuer des notes aux Etats et d’établir un classement annuel sur lequel se baseront des investisseurs. Comme le font les Anf. En 2021 la Banque mondiale met fin au projet ‘’Doing Business’’ qui faisait doublon et concurrence avec les Anf. La Banque mondiale est cliente de Moody’s pour ses levées de fonds. Le FMI suggère seulement aux Anf d’améliorer leurs procédures.
Moody’s comporte plusieurs divisions dont une collabore avec le Bureau d’Etudes Mc Kinsey qui a confectionné d’inutiles et coûteux Plans Emergents à 37 pays africains. Le Plan Sénégal Emergent avait permis à Mc Kinsey d’encaisser du Sénégal 2,5 milliards F cfa. Pour quels résultats ?
Et maintenant
Les Anf avec leurs notes ne doivent ni faire peur, ni alimenter la politique politicienne. Elles ne sont pas aussi importantes et décisives. Les investisseurs directs étrangers et les bailleurs de fonds ont d’autres références que ces notes. On peut présumer que le Sénégal de l’après 24 mars 2024 est devenu plus attractif.
La dette est inséparable de la vie des gouvernements et des entreprises. Les dettes souveraines des pays les plus développés sont de l’ampleur de leur produit intérieur brut, mais ils sont considérés solvables. Les plus grandes entreprises du monde affichent au Passif du Bilan des postes ‘’Dettes à long, moyen et court terme’’ qui financent des investissements dont la rentabilité figure au Compte d’Exploitation.
Les pays africains aussi sont solvables. Walter Wriston, un influent directeur de Citibank l’avait laissé entendre : Countries don’t go out of business (‘’Les pays ne tombent pas en faillite’’). Parce que les infrastructures, la productivité de la population, les ressources naturelles ne quittent pas le pays. Ainsi l’Actif excède le Passif. Les bailleurs de fonds ne perdent pas de vue les ressources naturelles des pays pour s’y engager.
La dette ne devrait financer que des opérations rentables, en rapport direct avec le développement. Ce qui doit aller de pair avec la rationalisation des dépenses publiques, la chasse aux ‘’faux frais’’ et la mobilisation autant que possible des ressources internes.
Dans leurs rapports avec l’extérieur, la sagesse africaine doit être en sentinelle de vigilance :
Lorsqu’on est tiré à la traîne pour marcher on ne choisit pas son chemin et sa destination.
Ou encore :
Lorsque quelqu’un te prête des yeux, tu ne peux regarder que dans la direction qu’il t’indique.
par Aminata Touré
MACKY SALL COOPTÉ PAR MO IBRAHIM, UN POISSON D'AVRIL ?
Soit la Fondation ignore la réalité de la gouvernance sous Macky, révélant une grave défaillance dans ses vérifications préalables ; soit il s'agit d'un arrangement entre élites qui compromet sérieusement la crédibilité de l'indice Ibrahim
Lorsque j’ai appris que Macky Sall siégerait au Conseil d’Administration de la Fondation Ibrahim qui a bâti sa renommée sur la promotion de la bonne gouvernance sur le continent, j’ai d’abord cru à un poisson d’Avril.
Pour rappel, la fondation Ibrahim créée par le milliardaire anglo-soudanais Mohamed Ibrahim (qui a fait fortune dans les télécommunications) a lancé avec succès l’indice Ibrahim de la Gouvernance en Afrique. Communément appelé IAG, il s’agit d’un outil théorique de mesure de la performance des 54 pays africains en matière de Gouvernance.
Alors que nous sommes en plein scandale de la dette cachée de 4000 milliards sans compter les nombreux scandales à milliards dont celui des fonds Covid que je ne me lasserai jamais de rappeler, le principal responsable de ces pratiques de mal-gouvernance maximales dans son propre pays, Macky Sall himself va attribuer bonus et des malus en matière de bonne gouvernance.
Nous sommes ici face à deux hypothèses :
1/ ou la Fondation Ibrahim ne connait absolument rien de la situation de la gouvernance sous Macky Sall, ce qui serait une faute grave dans son processus de “due diligence” et de vérification préalable.
2/ ou alors, tristement, il s’agit du fameux service-camarade entre riches qui porte sérieusement atteinte à la crédibilité de l’indice de bonne gouvernance Ibrahim.
En état de cause, shoking ! comme on dit au pays d’adoption de Sir Mo Ibrahim.
LA CEDEAO APPELLE LE MALI ET L’ALGÉRIE AU DIALOGUE
La Commission de l'organisation a fait part de sa préoccupation relative à tensions diplomatiques entre Bamako et Alger, consécutives à la destruction d’un drone malien par l’armée algérienne à la frontière entre les deux pays.
La Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a fait part mercredi de sa vive préoccupation relative à tensions diplomatiques entre Bamako et Alger, consécutives à la destruction d’un drone malien par l’armée algérienne à la frontière entre les deux pays.
“Au nom des Etats membres de la Cédéao, la Commission exprime sa profonde préoccupation face à cette situation” de tension suscitée par les échanges qui ont suivi la destruction, dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025, d’un drone des forces armées maliennes, peut-on lire dans un communiqué posté sur la page X de cet organe exécutif de l’organisation sous-régionale ouest africaine.
La Commission de la Cédéao dit suivre avec “inquiétude les récents développements qui ont affecté les relations entre la République du Mali et la République algérienne démocratique et populaire, tels qu’ils ont été communiqués à travers les différents communiqués publiés par les deux pays ces derniers jours”.
Lundi 7 avril, le Mali et l’Algérie ont fermé chacun son espace aérien à l’autre, après des rappels respectifs d’ambassadeurs, dimanche.
La Commission de la Cédéao, dirigée par le Gambien Omar Alieu Touray appelle les deux pays à privilégier le dialogue.
“Elle lance un appel au Mali et à l’Algérie pour qu’ils désamorcent la tension, favorisent le dialogue et utilisent les mécanismes régionaux et continentaux pour régler les différends”, selon le communiqué.
Le Burkina Faso et le Niger, qui forment avec le Mali la confédération de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), ont aussi rappelé pour consultations leurs ambassadeurs accrédités en Algérie, en signe de solidarité avec le voisin malien.
Dans un communiqué commun, les trois pays de l’AES ont dénoncé une “violation du droit international”, invitant Alger à avoir une “posture constructive” et à contribuer à “l’éradication du terrorisme” dans le Sahel.
De leur côté, les autorités algériennes, tout en admettant avoir abattu ce drone malien, ont rejeté “avec force” ce qu’elles considèrent comme une tentative de faire de l’Algérie “un bouc émissaire”.
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LA MAJORITÉ PARLEMENTAIRE SUR LE GRILL
Des pratiques "dignes d'un surveillant de camp" plutôt que de la deuxième personnalité de l'État. Dans une conférence de presse au vitriol, Thierno Alassane Sall a détaillé les entorses au règlement ayant conduit l'opposition à boycotter la venue de Sonko
(SenePlus) - Ce mercredi 9 avril, l'opposition parlementaire a annoncé sa décision de boycotter la séance prévue initialement demain à l'Assemblée nationale. Lors d'une conférence de presse, le député Thierno Alassane Sall a exposé les raisons de cette décision inédite dans l'histoire parlementaire sénégalaise.
"Par respect pour nos électeurs et pour l'opinion nationale, nous avons décidé de cette séance d'information afin que nul n'ignore le sens et le bien-fondé de notre démarche", a déclaré le leader de la République des Valeurs, entouré de ses collègues députés de l'opposition.
Selon lui, deux raisons principales motivent ce boycott. La première concerne "des violations répétées et délibérées du règlement intérieur" par la majorité sous l'impulsion du président de l'Assemblée nationale, qui agirait "comme le président du groupe parlementaire Pastef". L'opposition dénonce notamment le non-respect de la loi sur la parité dans la composition du bureau de l'Assemblée nationale.
Le député accuse également le président de l'institution de refuser "quasi systématiquement" la parole aux députés d'opposition lorsqu'ils font appel au règlement intérieur. "Le président de l'Assemblée nationale manque de la plus élémentaire courtoisie et se prend pour un surveillant de camp plutôt que pour la deuxième personnalité de l'État", a-t-il affirmé.
La seconde raison du boycott concerne l'attitude du Premier ministre lors des séances de questions d'actualité. D'après Thierno Alassane Sall, ces séances, au lieu d'être "de grands moments d'échange d'idées", se transforment en "séances d'invectives, de jurons et de menaces" contre les députés d'opposition.
L'opposition dénonce par ailleurs un déséquilibre dans le temps de parole, avec 8 minutes accordées au Premier ministre contre seulement 4 minutes pour les députés, et la suppression du "deuxième tour" qui permettait traditionnellement aux parlementaires de répliquer. "Cela constitue non seulement un recul par rapport à la tradition de l'Assemblée nationale mais une atteinte délibérée à l'équilibre des pouvoirs", a souligné le député.
Thierno Alassane Sall a conclu en affirmant que les députés de l'opposition restent "absolument disponibles à poursuivre l'exercice" à condition que "le Premier ministre respecte les règles du jeu et prenne en considération l'ensemble des députés, y compris de son propre camp, en tant qu'élus représentants du peuple sénégalais".
Cette crise parlementaire intervient dans un climat de tensions politiques croissantes au Sénégal, alors que la majorité Pastef, dirigée par le Premier ministre Ousmane Sonko, fait face à une opposition qui, bien que minoritaire, entend faire entendre sa voix.
SONKO-OUATTARA, LE FACE-À-FACE DES VISIONS RIVALES
La visite d'Ousmane Sonko en Côte d'Ivoire s'inscrit dans une période délicate où les critiques envers l'ancien président Macky Sall, proche d'Alassane Ouattara, ont refroidi les relations entre les deux pays
Le Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, s’apprête à effectuer une visite officielle en Côte d’Ivoire, prévue dans la première quinzaine d’avril 2025. Ce déplacement, le troisième à l’étranger depuis sa nomination, mais le premier en territoire ivoirien, revêt un caractère éminemment politique. Il s’inscrit dans un contexte de recomposition des rapports de force en Afrique de l’Ouest, marqué par la montée en puissance de l’Alliance des États du Sahel (AES), les tensions persistantes entre la Côte d’Ivoire et ses voisins sahéliens, et la méfiance croissante d’Abidjan vis-à-vis des nouvelles orientations diplomatiques de Dakar.
Ousmane Sonko, qui n’a jusqu’à présent jamais voyagé en dehors du continent africain depuis sa prise de fonctions, semble vouloir poser les jalons d’une nouvelle ère diplomatique, tout en tentant de rééquilibrer une relation ivoiro-sénégalaise fragilisée par les bouleversements internes des deux pays et les dynamiques géopolitiques régionales.
Des relations à réparer
La visite du chef du gouvernement sénégalais survient dans un contexte marqué par des tensions larvées entre Dakar et Abidjan. L’arrivée au pouvoir du tandem Bassirou Diomaye Faye – Ousmane Sonko a bouleversé les équilibres diplomatiques hérités de l’ère Macky Sall. En effet, selon Afrique Intelligences, les attaques de la nouvelle administration à l'endroit de Macky Sall et de son entourage ont particulièrement irrité Abidjan. Depuis son départ de la présidence, le patron de l'Alliance pour la République (APR) est resté très proche d'Alassane Ouattara, avec qui il est en contact régulier. Il avait discrètement séjourné à Abidjan au mois d'août 2024 et a encore été reçu à déjeuner par Alassane Ouattara dans sa résidence de Mougins, dans le sud de la France, le 28 mars, cette année .
D’après des sources diplomatiques, la Côte d’Ivoire aurait peu goûté aux attaques répétées contre l’ancien président sénégalais et ses proches. À Abidjan, certains considèrent que Dakar cherche à solder des comptes internes sur la scène régionale, ce qui pourrait nuire à l’esprit de coopération. Une autre source de crispation tient à l’absence de soutien ivoirien à la candidature d’Amadou Hott à la présidence de la Banque africaine de développement (BAD). Ouattara aurait préféré soutenir le Mauritanien Sidi Ould Tah, une décision interprétée à Dakar comme un signal politique, voire une manœuvre influencée par Macky Sall en coulisses, renseigne la même source.
Le malaise AES-Abidjan en toile de fond
La réorientation diplomatique sénégalaise, marquée par un rapprochement affirmé avec les régimes militaires de l’AES (Burkina Faso, Mali, Niger), est un autre point de friction. Bien que Dakar maintienne officiellement une ligne de neutralité bienveillante, sa volonté de dialoguer avec les juntes et de relancer la coopération sécuritaire et commerciale avec l’AES inquiète Abidjan. En effet, la Côte d’Ivoire entretient des relations notoirement difficiles avec le Mali et le Burkina Faso.
Le souvenir de l’affaire des 49 soldats ivoiriens détenus à Bamako en 2022-2023 reste vivace. Ces militaires avaient été accusés de « tentative de déstabilisation » du gouvernement malien et condamnés à 20 ans de prison avant d’être graciés par le colonel Assimi Goïta. Cette crise, qui aura duré près de six mois, a laissé des traces profondes, d’autant qu’elle avait mobilisé plusieurs chefs d’État ouest-africains, sans pour autant apaiser les tensions entre Bamako et Abidjan.
Autre épicentre de crispation: la frontière ivoiro-burkinabè, aujourd’hui considérée comme l’une des plus inflammables de la sous-région. En l’espace de deux ans, plusieurs incidents ont renforcé la méfiance entre les deux capitales. Le dernier en date, en février 2025, concerne l’arrestation de trois agents ivoiriens des eaux et forêts par les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), des supplétifs civils burkinabè, sur un site d’orpaillage contesté à Kalamon. L’affaire a ravivé le spectre de l’incident de 2023, au cours duquel deux gendarmes ivoiriens avaient été détenus plusieurs mois à Ouagadougou.
Une visite stratégique à plusieurs niveaux
C’est dans ce contexte régional sous tension que s’inscrit la visite d’Ousmane Sonko. Pour les autorités sénégalaises, il s’agit à la fois de rassurer Abidjan sur les intentions réelles du Sénégal dans le Sahel, et de préserver les acquis historiques de la coopération ivoiro-sénégalaise. Sur les dossiers économiques, les deux pays entretiennent des relations denses, avec de nombreux échanges commerciaux, des investissements croisés et des communautés importantes de ressortissants installés de part et d’autre.
Mais cette visite sera aussi l’occasion pour Sonko d’envoyer un message politique clair : celui d’un Sénégal souverain dans ses choix diplomatiques, soucieux de son positionnement régional, mais décidé à sortir des tutelles implicites. Le Premier ministre, qui a fait de la refondation des relations internationales une priorité, souhaite replacer le Sénégal comme acteur pivot entre les blocs de l’Afrique de l’Ouest, à équidistance des alliances traditionnelles comme la CEDEAO et des forces émergentes comme l’AES.
Pour rappel, au lendemain de l'élection de Bassirou Diomaye Faye, le chef de l'État ivoirien avait été l'un des premiers présidents africains à s'entretenir avec lui par téléphone. Un échange qui avait été facilité par Macky Sall en personne. Dans la foulée, Bassirou Diomaye Faye avait effectué une visite officielle dans la capitale économique ivoirienne au mois de mai.
Franc CFA : une fracture monétaire entre prudence ivoirienne et rupture sénégalaise
Au-delà des sensibilités politiques et des repositionnements géostratégiques, la question monétaire cristallise l’une des plus profondes divergences entre Dakar et Abidjan. Depuis leur accession au pouvoir, le président Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko ont clairement affiché leur volonté de rompre avec le franc CFA, qu’ils considèrent comme un symbole persistant de domination postcoloniale et un frein à la souveraineté économique.
Le projet, encore à l’état d’intention, oscille entre deux options : rejoindre une monnaie unique régionale comme l’ECO, en gestation depuis plusieurs années, ou créer une monnaie nationale souveraine, arrimée à un panier de devises plus représentatif des échanges commerciaux réels du Sénégal. Lors de leur campagne électorale, les deux dirigeants ont répété que la souveraineté monétaire faisait partie intégrante de leur programme de rupture, au même titre que la réforme des institutions ou la refondation de la justice sociale.
Cette position tranche nettement avec la prudence – pour ne pas dire l’orthodoxie – adoptée depuis plusieurs années par la Côte d’Ivoire, pilier économique et politique de l’UEMOA. Le président Alassane Ouattara, fervent défenseur du franc CFA, n’a cessé de rappeler l’attachement de son pays à cette monnaie, qu’il considère comme un facteur de stabilité et de performance macroéconomique. Dans une déclaration restée célèbre, prononcée le 15 février 2019 à l’issue d’un entretien avec le président français à Paris, Ouattara – alors président en exercice de la Conférence des Chefs d’État de l’UEMOA – avait vertement tancé les détracteurs du franc CFA : « J’ai entendu beaucoup de déclarations sur le franc CFA (…) Je ne comprends pas ce faux débat (…) Le franc CFA est notre monnaie, c’est la monnaie de pays qui l’ont librement choisie (…) Cette monnaie est solide, elle est appréciée, elle est bien gérée (…) Les huit économies qui la composent sont parmi les meilleures en performance économique (…) Nous sommes très heureux d’avoir cette monnaie qui est stabilisante pour nos économies. »
Cette sortie, au ton ferme, illustre l’approche conservatrice d’Abidjan en matière de politique monétaire. Pour Ouattara et une partie des élites économiques ivoiriennes, le maintien dans la zone franc garantit un cadre macroéconomique stable, qui attire les investissements étrangers, limite l’inflation et facilite l’accès aux marchés financiers internationaux.
Du côté sénégalais, à l’inverse, les critiques se fondent sur l’argument selon lequel le franc CFA, arrimé à l’euro, prive les économies ouest-africaines de leviers d’ajustement, empêche toute politique monétaire proactive et consacre une dépendance vis-à-vis des institutions françaises, notamment via la présence du Trésor public français dans le processus de garantie.
Cette divergence n’est pas nouvelle, mais elle prend désormais une dimension plus aigüe, car le Sénégal est gouverné par une équipe politique qui fait de la souveraineté monétaire un marqueur idéologique fort. La Côte d’Ivoire, en revanche, entend préserver un statu quo jugé favorable à sa croissance.
L'ombre de la rencontre Sonko-Thiam
Par ailleurs, un autre élément, plus discret mais politiquement significatif, pourrait expliquer la prudence d’Abidjan face à la nouvelle posture de Dakar. En octobre 2024, Ousmane Sonko avait reçu à huis clos Tidjane Thiam, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), principal opposant au président Alassane Ouattara. Cette rencontre, qui n’a jamais été officiellement médiatisée, a néanmoins été perçue comme un geste d’ouverture à l’égard d’un acteur stratégique dans le paysage politique ivoirien, à quelques mois d’une présidentielle décisive.
Tidjane Thiam, ancien patron du Crédit Suisse et personnalité respectée dans les milieux financiers internationaux, est aujourd’hui le candidat naturel du PDCI pour la présidentielle d’octobre 2025.
Le lien entre Thiam et le Sénégal n’est pas que circonstanciel. Son père, Amadou Thiam, était un journaliste sénégalais de renom, né à Dakar en 1923, diplômé de l’Institut international de journalisme de Strasbourg, qui s’est installé en Côte d’Ivoire en 1947. Il bénéficiait de la nationalité française à l’époque coloniale, avant d’adopter la nationalité ivoirienne. Il est aussi le frère cadet de Habib Thiam, ancien Premier ministre du Sénégal sous les présidences de Léopold Sédar Senghor et Abdou Diouf. Ce pan d’histoire familiale renforce un ancrage affectif et symbolique fortentre Tidjane Thiam et le Sénégal, et pourrait expliquer en partie les affinités politiques actuelles.
Ce rapprochement, même s’il ne relève d’aucune alliance formelle, n’a pas manqué de faire sourciller le palais présidentiel ivoirien. Dans un contexte où chaque geste diplomatique est scruté, la rencontre Sonko–Thiam, combinée à la montée en puissance du discours souverainiste à Dakar, alimente une forme de méfiance croissante chez certains proches d’Alassane Ouattara, soucieux de préserver l’équilibre politique interne à l’approche d’échéances électorales déterminantes.
Pourtant sa candidature est menacée, elle est récemment contestée en justice. Une militante de son parti remet en cause sa légitimité. Mercredi 2 avril, des députés et militants du PDCI ont manifesté devant le palais de justice d’Abidjan. Ils dénoncent une manœuvre politique visant à l’empêcher de se présenter.
Depuis quelques semaines, un débat sur la nationalité de Tidjane Thiam agite la scène politique de la Côte d'Ivoire. En février, il avait annoncé renoncer à sa nationalité française, qui lui avait été accordée en 1987. Une mesure qui a pris effet par décret le 20 mars dernier. Mais, pour ses détracteurs, Tidjane Thiam a entre-temps perdu sa nationalité ivoirienne.
La diplomatie de proximité comme priorité
Il est également notable que Sonko, depuis son arrivée à la primature, n’a effectué aucune visite hors du continent africain. Ses priorités sont régionales. Après une première tournée discrète dans les capitales voisines, puis un passage à Addis-Abeba pour les réunions de l’Union africaine, c’est vers Abidjan qu’il dirige maintenant son attention. Une diplomatie de proximité assumée, cohérente avec la vision panafricaniste qu’il défend depuis des années.
Pour beaucoup d’observateurs, la rencontre prévue avec Alassane Ouattara sera donc lourde de symboles. Elle permettra de tester la capacité des deux hommes à dépasser les différends récents, à retrouver une base de confiance et à poser les bases d’un partenariat rénové.
Dans une Afrique de l’Ouest à la croisée des chemins, où les lignes diplomatiques se déplacent vite, cette visite pourrait être l’un des marqueurs les plus significatifs de la nouvelle ère sénégalaise. À condition que les non-dits soient mis sur la table, et que les susceptibilités politiques cèdent la place à une logique de coopération pragmatique.
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REBAPTISER POUR DÉCOLONISER
Entre "colonial, décolonial et incolonisé", Michel Ben Arrous décortique la stratégie du Sénégal qui redessine sa cartographie urbaine, révélant comment la toponymie devient un "instrument politique international" dans les relations avec l'ancien colon
(SenePlus) - Le Sénégal s'engage dans un processus de renomination de ses rues portant des noms français, rejoignant ainsi le Mali, le Niger et le Burkina Faso dans cette démarche de réappropriation mémorielle. À Dakar, le boulevard Général-de-Gaulle devient boulevard Mamadou-Dia, un changement hautement symbolique. Michel Ben Arrous, géographe et chercheur associé aux universités de Genève et de Saint-Louis du Sénégal, analyse ce phénomène et ses implications pour RFI.
"C'est un symbole et c'est une boucle qui se referme," explique Ben Arrous. Mamadou Dia, opposé au général de Gaulle lors du référendum de 1958, représentait la rupture avec la France tandis que Senghor soutenait la participation à la communauté française.
Ce changement s'inscrit dans une tendance régionale. "Au Niger, le nouveau régime a rebaptisé le boulevard Charles de Gaulle, boulevard Djibo Bakary," rappelle le chercheur. La place de la Francophonie à Niamey est devenue "place de l'AES" (Alliance des États du Sahel).
Ces renominations constituent-elles une véritable décolonisation symbolique? "Oui, certains vont même jusqu'à parler de décolonisation symbolique," reconnaît Ben Arrous. "L'histoire des sociétés colonisées qui avait été occultée par cette toponymie coloniale... revient au-devant de la scène."
Paradoxalement, le principe même de nommer des rues est "une importation totalement coloniale" qui rompt avec les pratiques traditionnelles. "Ce qu'on peut décoloniser maintenant, c'est seulement ce qui était colonisé autrefois," souligne-t-il, rappelant que seul le plateau de Dakar (3% de l'agglomération) possédait véritablement des noms de rues à l'époque coloniale.
Lorsqu'il était maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko avait débaptisé cinq avenues aux noms français, déclarant qu'"en France, vous ne verrez jamais une rue Hitler." Pour Ben Arrous, cette comparaison révèle deux aspects: "Il utilise la toponymie comme un instrument politique international" et cette démarche s'inscrit dans une évolution administrative complexe.
Le projet actuel prévoit une commission nationale associant pouvoir central et collectivités locales. "Ces questions sont trop sensibles... pour être confiées soit simplement aux collectivités locales, soit simplement aux pouvoirs centraux," explique le chercheur.
Cette entreprise mémorielle se heurte parfois à des résistances, comme à Saint-Louis où la statue de Faidherbe demeure, mais révèle surtout la persistance d'une mémoire incolonisée: "Il y a le colonial, il y a le décolonial, mais il y a l'incolonisé aussi sur lequel on n'insiste pas toujours assez."
Par Baba DIENG
LE PARTI PASTEF, LE RASSEMBLEMENT NATIONAL ET LEURS JUGES
Pastef au pouvoir, comme dans l’opposition, ne cesse d’attaquer et d’affaiblir la Justice. Les roquets et leurs maîtres clament à tue-tête qu’elle est le talon d’Achille du «Projet»
La cheffe de file du Rassemblement national, Marine Le Pen, a été condamnée, ce 31 mars 2025, dans l’affaire des assistants parlementaires européens, à une peine de cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire. En effet, on reproche à la grandissime favorite de la présidentielle de 2027 d’avoir organisé un système de détournement de fonds publics (le préjudice est évalué à 4, 1 millions d’euros par les juges) entre 2004 et 2016. Pendant douze ans, elle a fait supporter au Parlement européen, les salaires de ses propres collaborateurs. Avec cette condamnation, sa marche vers l’Elysée semble s’éterniser davantage. Somme toute, c’est l’avenir politique de cette théoricienne assumée du racisme, de la xénophobie, du grand remplacement… qui est en train d’être chamboulé.
Elle dénonce une «décision politique» prise par des «adversaires politiques», c’est-à-dire les juges et leurs alliés, pour l’empêcher de se présenter à l’élection présidentielle. Cette affaire, qui est juste un «désaccord administratif avec le Parlement européen», est instrumentalisée par des magistrats sans aucune légitimité populaire, qui «s’ingèrent dans le choix des Français». «Aucun juge, argue-t-elle, ne peut décider d’interférer dans une élection aussi importante que la Présidentielle.» Une vaste campagne de dénigrement de la Justice a été entreprise par ses collaborateurs, qui martèlent qu’elle a été broyée par un système judiciaire au service de l’élite corrompue et contre le Peuple pur. Le Rassemblement national s’indigne contre ce qu’il considère comme la «tyrannie des juges».
Avec les populistes, c’est toujours la même rhétorique victimaire devant une décision judiciaire qui leur est défavorable : ils ne sont jamais responsables des faits qui leur sont reprochés. Le sociologue allemand Max Weber écrit, dans Le savant et le politique (La Découverte, 2003), qu’un bon homme politique doit avoir le sens de la responsabilité. Les populistes n’ont pas cette qualité. C’est toujours une machination dirigée contre eux, fomentée par des institutions scélérates et surtout non élues. Celles-ci, illégitimes, dans l’imaginaire populiste, ne doivent nullement remettre en cause la volonté populaire. Il faut donc procéder à un travail de délégitimation des corps intermédiaires -la Société civile, les magistrats, les syndicats, les journalistes…- pour établir un contact direct entre le Peuple -entendu comme un bloc monolithique et épuré- et ses représentants.
Au Sénégal, l’hydre populiste n’a fait que torpiller la Justice des années durant. Pastef s’est principalement opposé par bravades envers les institutions judiciaires. Celles-ci étaient aux ordres et contre leur projet politique. Les magistrats, stipendiés, et dénués de tout sens du patriotisme, n’étaient là que pour faciliter les forfaitures de l’ancien satrape. L’actuel Premier ministre, qui s’opposait comme un hors-la-loi, a toujours refusé de se présenter dignement devant les magistrats pour être jugé comme tous les citoyens. Après avoir consommé une passade avec une jeune femme et diffamé un ministre de la République, il a refusé, sous prétexte que son sort était déjà scellé, de se livrer à la Justice. Ses procès qu’il a transformés en «mortal kombat» ont coûté la vie à plusieurs de nos concitoyens. L’antienne sacrificielle a tout de même assuré à sa chair à canon la certitude et l’honneur de mourir comme des martyrs. Pastef au pouvoir, comme dans l’opposition, ne cesse d’attaquer et d’affaiblir la Justice. Les roquets et leurs maîtres clament à tue-tête qu’elle est le talon d’Achille du «Projet», qu’elle freine les grandes ambitions de transformation systémique du pays en laissant les hétérodoxes vaquer librement à leurs occupations. Le Premier ministre, après avoir traité certains juges de «lâches» et de «corrompus», s’est ouvertement rebellé contre une décision de Justice concernant un de ses pourfendeurs, car, dit-il, la clémence du juge a été excessive. Le chef du gouvernement, comme tous les populistes, estime qu’il doit incarner l’institution judiciaire du fait de sa légitimité populaire. A cela s’ajoute le manichéisme entre les bons juges, ceux du «Projet», et les mauvais juges, qui sont les produits abjects du «système». Epurer la Justice de fond en comble est donc une nécessité pour respecter la vox populi -sacrement du populisme.
Les dangers de la méthode populiste (le populisme est plus une méthode qu’une idéologie) rappellent à ceux qui ont une certaine idée de la République, la nécessité de protéger les institutions républicaines. Dans ce pays, même l’institution militaire, qui a toujours bénéficié de la sollicitude de nos hommes politiques, n’a pas été épargnée par les ravages de Pastef. Mais l’histoire est facétieuse : les tenants du pouvoir, et toujours opposants, à l’occasion de la célébration grandiose de la fête de l’indépendance, ont célébré cette armée dont le Pmos a récemment accusé un Général de fomenter un coup de force…