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22 novembre 2024
International
UNE LONGUE NUIT ÉLECTORALE EN PERSPECTIVE AUX ÉTATS-UNIS
L'annonce du vainqueur de l'élection présidentielle américaine pourrait suivre deux scénarios radicalement différents, rappelant soit 2016 avec une victoire annoncée dès le lendemain matin, soit 2020 avec plusieurs jours d'attente
(SenePlus) - D'après le New York Times (NYT), l'annonce du vainqueur de l'élection présidentielle américaine pourrait suivre deux scénarios radicalement différents, rappelant soit 2016 avec une victoire annoncée dès le lendemain matin, soit 2020 avec plusieurs jours d'attente.
Le précédent de 2020 reste dans toutes les mémoires : il avait fallu attendre le samedi 7 novembre, soit quatre jours après le scrutin, pour que les médias confirment la victoire de Joe Biden. Sept États décisifs - l'Arizona, la Géorgie, le Michigan, le Nevada, la Caroline du Nord, la Pennsylvanie et le Wisconsin - étaient restés en suspens au lendemain du vote.
Le décompte des votes par correspondance avait particulièrement complexifié le processus en 2020, créant ce que les experts appellent des "mirages" rouges et bleus. Ces phénomènes s'expliquent par l'ordre de dépouillement : certains États comptent d'abord les votes par correspondance, d'autres les votes en personne, créant des tendances temporaires trompeuses compte tenu des préférences partisanes dans le mode de vote.
Pour 2024, quelques changements pourraient accélérer le processus. Le Michigan, notamment, a modifié sa législation pour permettre le traitement anticipé des bulletins par correspondance. De plus, l'écart partisan dans l'utilisation du vote par correspondance devrait se réduire, les républicains y ayant davantage recours qu'en 2020.
Les premiers indices significatifs tomberont dès 19h (heure de l'Est) en Géorgie, suivis de la Caroline du Nord à 19h30. Les États cruciaux du "Mur Bleu" - Michigan, Pennsylvanie et Wisconsin - ainsi que l'Arizona et le Nevada fermeront leurs bureaux de vote plus tard dans la soirée, entre 20h et 22h.
Le journal new-yorkais souligne qu'historiquement, le décompte complet n'a jamais été achevé en une seule journée. La nouveauté en 2020 résidait dans l'impossibilité de faire des projections fiables le soir même du scrutin, en raison de l'importance inédite du vote par correspondance.
HARRIS OU TRUMP, QUELS IMPACTS POUR L’AFRIQUE?
Ce mardi 5 novembre, les Américains votent pour désigner leur prochain président après quatre ans de mandat de Joe Biden, et les enjeux pour l’Afrique varient considérablement selon le futur élu.
Ce mardi 5 novembre, les Américains votent pour désigner leur prochain président après quatre ans de mandat de Joe Biden, et les enjeux pour l’Afrique varient considérablement selon le futur élu. Dans un entretien, le Dr Alioune Aboutalib Lô, chercheur au Centre AKEM d’Istanbul, décrypte les impacts potentiels d’une victoire de Kamala Harris ou de Donald Trump sur les relations entre les États-Unis et le continent africain. Entre continuité diplomatique, perspectives économiques et défis sécuritaires, les orientations possibles diffèrent profondément selon l’issue de cette élection.
Comment l’élection de Kamala Harris ou Donald Trump pourrait-elle influencer les relations diplomatiques entre les États-Unis et les pays africains ?
De façon générale, l’intérêt des États-Unis pour l’Afrique reste minime par rapport aux enjeux et aux attentes. Peu importe le choix des Américains, il ne devrait pas y avoir de grosse révolution dans la politique africaine des États-Unis, qui situent leurs priorités ailleurs depuis la fin de la guerre froide.
Cependant, on peut s’attendre à plus d’engagement de la part de la démocrate Kamala Harris, qui devrait rester dans la même lignée que Joe Biden. Lors de sa tournée en Afrique en mars 2023, notamment au Ghana, en Zambie et en Tanzanie, la vice-présidente américaine s’était dite « enthousiaste » concernant le futur de l’Afrique et la coopération américano-africaine.
Cela contraste avec Donald Trump, si l’on considère son premier mandat, durant lequel son intérêt politique pour l’Afrique était quasi inexistant, même s’il avait lancé en 2018 son initiative économique Prosper Africa pour renforcer les échanges avec le continent.
Quelles conséquences les résultats des élections américaines, qu’il s’agisse de Kamala Harris ou de Donald Trump, pourraient-ils avoir sur les politiques commerciales et d’investissement des États-Unis en Afrique ?
Le plus important sera l’AGOA dont le renouvellement devra être décidé en 2025. Il faudrait préciser que l’AGOA reste d’abord un outil de diplomatie économique coercitive (Economic Statecraft) puisque les pays africains qui ne s’alignent pas sur la vision américaine des droits de l’homme et de la démocratie peuvent en être retirés, comme ça a été le cas du Rwanda en 2018 (sous Trump) ou encore du Niger et de l’Ouganda en 2023. Cette politique devrait continuer.
S’agissant des investissements, le Sommet US-Africa de 2022 avait permis de restaurer la volonté américaine d’investir davantage en Afrique, avec notamment la promesse d’une manne financière de 55 milliards de dollars. Kamala Harris, qui avait annoncé aussi l’accompagnement de la digitalisation et de l’innovation en Afrique lors de sa tournée, devrait donc s’inscrire dans ce même registre.
Les Etats-Unis gardent un œil aussi sur l’expansion chinoise en Afrique et veulent notamment concurrencer Pékin dans ce secteur, avec des investissements dans des infrastructures stratégiques. On peut citer déjà le soutien américain au projet du Corridor de Lobito de l’Angola qui sera essentiel aussi pour le commerce des matières premières en Afrique australe.
Cependant, on peut s’attendre à la même stratégie d’endiguement de la Chine par les Etats-Unis en Afrique, avec Donald Trump. La concurrence avec la Chine sur le terrain économique étant une obsession chez le républicain, son initiative Prosper Africa, lancée pour promouvoir les investissements et le commerce avec l’Afrique, était notamment à mettre dans le cadre de cette concurrence avec la Chine et une réponse à son projet « des nouvelles routes de Soie (Belt and Road Initiative) ».
Comment Kamala Harris et Donald Trump abordent-ils les questions de sécurité en Afrique, et quel impact cela pourrait-il avoir sur la coopération américaine dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale ?
Pour le moment, ce volet sécuritaire de la politique américaine en Afrique reste bien relégué au second plan dans la campagne américaine. Comme précisé plus haut, l’Afrique n’est pas forcément la question prioritaire actuellement dans cette phase électorale américaine.
Mais la lutte contre le terrorisme reste toujours d’une certaine importance pour Washington. Et dans cette perspective, les Etats-Unis ont spécialement des soucis à se faire notamment par rapport à leur présence militaire au Sahel et la concurrence de la Russie. Les troupes américaines ont été forcées de quitter le Niger où elles disposaient d’importantes bases militaires entre Niamey et Agadez. Aujourd’hui, l’enjeu est de rester dans la région. La Côte d’Ivoire et le Bénin pourraient accueillir ces troupes, mais dans un climat ouest-africain de plus en plus hostile à la présence militaire occidentale.
La Russie a surtout gagné en légitimité dans cette région avec désormais sa présence au Mali, au Niger et au Burkina Faso, via ses forces de l’African Corps qui est destiné à mettre les forces de Wagner sous l’aile du Kremlin. La nouvelle administration, qu’elle soit sous Trump ou Harris, devrait avoir des réponses géopolitiques face à cette nouvelle donne.
En quoi les priorités diplomatiques et économiques de Kamala Harris ou Donald Trump pourraient-elles façonner la coopération des États-Unis avec les pays africains en matière de développement, d’aide humanitaire et de gouvernance ?
De façon générale, Trump qui porte moins d’attention sur l’Afrique, devrait probablement être moins regardant sur certaines choses, notamment la gouvernance ou les droits de l’homme. Les républicains sont moins critiques sur ces questions aussi, même si Bush avait bouleversé cela.
Sur la question de l’aide humanitaire en revanche, Trump qui a une perception mercantiliste des relations internationales, avait souhaité couper plusieurs financements y étant destinés lors de son premier mandat. Un sujet qui pourrait revenir sur la table du Congrès et remettre en question certains projets en Afrique. Les investissements annoncés aussi lors du dernier Sommet US-Afrique pour accompagner le développement du continent, pourraient être revus par l’administration Trump s’il revient au pouvoir.
Cependant, là où certains africains pourraient préférer le républicain à Kamala Harris malgré tout, est sur la question des LGBTQ contraires à nos valeurs traditionnelles et religieuses. Kamala Harris qui se dit être une grande défenseuse de cette communauté, pourrait arrimer davantage l’aide et les investissements américains à la promotion ou décriminalisation de l’homosexualité dans les pays africains. Sur cette question, il y a une divergence civilisationnelle fondamentale entre Harris et plusieurs pays africains, qui n’existera pas avec Trump qui est plutôt conservateur et même anti-LGBTQ. Comme dans la tradition plus critique ou plus « paternaliste » des démocrates, Kamala Harris devrait être plus regardante sur les questions de démocratie et sur le respect des droits humains.
YAKAAR-TERANGA SE CONCRÉTISE
Malgré le départ de BP, Petrosen et Kosmos Energy maintiennent le cap vers une décision finale d'investissement en 2025. Le projet, estimé à 6 milliards de dollars, promet une production annuelle de trois millions de tonnes de gaz
(SenePlus) - Selon des informations rapportées par Reuters ce mardi, le projet gazier Yakaar-Teranga au Sénégal franchira une étape décisive à la mi-2025 avec la décision finale d'investissement (FID), comme l'a confirmé le directeur général de Petrosen, Thierno Ly.
Ce projet d'envergure, développé conjointement par la société nationale pétrolière sénégalaise Petrosen et l'américaine Kosmos Energy, représente un potentiel considérable avec environ 25 billions de pieds cubes de gaz récupérable.
La première phase du projet, estimée entre 5 et 6 milliards de dollars, prévoit une production annuelle de trois millions de tonnes destinée à l'exportation. Le plan inclut également une provision de 150 millions de pieds cubes standard pour alimenter le réseau électrique national et d'autres projets domestiques.
Suite au retrait inattendu de BP fin 2023, Petrosen intensifie sa recherche de nouveaux partenaires. "Nous ciblons les compagnies pétrolières internationales, les sociétés nationales du Moyen-Orient et d'Algérie. Nous sommes également ouverts aux discussions avec les sociétés de trading", a déclaré Thierno Ly à Reuters.
Cette quête de nouveaux investisseurs survient à un moment crucial pour ce projet stratégique qui pourrait transformer le paysage énergétique du Sénégal et de la région ouest-africaine.
L’ANCIEN PRESIDENT BURKINABÈ DAMIBA RADIÉ DE L’ARMÉE
L’ancien président de la Transition a été radié des effectifs des Forces armées burkinabè, par décret signé du président du Faso, le Capitaine Ibrahim Traoré, le 30 octobre 2024
Le lieutenant-colonel Paul-Henri Damiba a été radié de l’armée burkinabé, accusé d’être à la tête d’un vaste complot visant le pouvoir en place.
L’ancien président de la Transition (janvier 2022 – septembre 2022), Paul- Henri Damiba a été radié des effectifs des Forces armées burkinabè, par décret signé du président du Faso, le Capitaine Ibrahim Traoré, le 30 octobre 2024.
Le lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba, est radié pour « faute jugée particulièrement grave consistant en une atteinte grave à la dignité militaire et au renom de l’armée, caractérisée par des actions d’intelligence avec une puissance étrangère et des terroristes, en vue de favoriser leurs entreprises contre le Burkina Faso », a indique le décret.
Sur la liste de radiations, figure également l’ex-Chef d’Etat-Major de la gendarmerie nationale, le lieutenant-Colonel Evrard Somda.
Il est reproché à Evrard Somda, une « faute jugée particulièrement grave consistant en une atteinte grave à dignité militaire et au renom de l’armée caractérisée par une intention de porter les armes contre l’État et de nuire à la défense nationale », selon le décret de radiation.
En plus des deux cités, le lieutenant-colonel Yves Didier Bamouni, ancien chef du Commandement des opérations du théâtre national (COTN) a aussi été radié, ainsi que le magistrat commandant Alphonse Pousbila Zouma.
Tous les radiés ont été cités dans des affaires présumées de « tentatives de déstabilisation » entre 2023 et 2024.
Dans une déclaration faite à la télévision nationale le 23 septembre 2024, le ministre de la Sécurité, Mahamadou Sana, avait annoncé le démantèlement d’un réseau de déstabilisation du Burkina Faso impliquant des personnalités comme l’ancien président Paul-Henri Sandaogo Damiba.
Dans cette tentative de déstabilisation, Paul-Henri Sandaogo Damiba installé depuis le Togo après son éviction par le capitaine Traoré, devait y jouer un rôle majeur. Il avait pour nom de code le « Patriarche » et devait diriger le volet militaire de ce projet de déstabilisation, avait affirmé le ministre Sana.
Lors d’un point de presse en date du 1ᵉʳ juin 2024, le parquet militaire avait annoncé l’interpellation du Lieutenant-colonel Evrard Somda et d’autres officiers pour des faits présumés d’atteinte à la sûreté de l’État
JOUR J POUR LES AMERICAINS
Des millions d’Américains se rendent aux urnes ce mardi pour choisir le successeur de Joe Biden à la tête des Etats-Unis d’Amérique.
Des millions d’Américains se rendent aux urnes ce mardi pour choisir le successeur de Joe Biden à la tête des Etats-Unis d’Amérique.
Les électeurs américains vont ainsi départager la vice-présidente Kamala Harris, du camp des Démocrates et l’ancien président Donald Trump, le candidat des Républicains.
L’issue du 60e scrutin quadriennal des Etats-Unis d’Amérique reste incertaine ; les enquêtes d’opinion sur les intentions de vote donnant la victoire à l’un ou l’autre candidat.
Au moins 78 millions d’électeurs sont attendus dans les bureaux de vote, tandis que 82 millions autres votants ont déjà accompli leur devoir citoyen en profitant notamment du vote par anticipation.
L’ouverture et la fermeture des bureaux de vote dans les différents Etats sont adossées aux six fuseaux horaires qui couvrent le pays et vont globalement de cinq heures du matin heure locale (10 : 00 GMT) à une heure du matin (06 : 00 GMT).
Les électeurs élisent d’abord des grands électeurs au nombre de 538, lesquels vont officiellement désigner le président. Il faut au moins 270 grands électeurs pour remporter la présidentielle.
Le président sortant, Joe Biden, a renoncé à se représenter et a apporté son soutien à la vice-présidente, Kamara Harris.
Par Vieux SAVANÉ
AUX ÉTATS-uNIS, LA DÉMOCRATIE À L'ÉPREUVE
La seule certitude est que nous avons affaire à une élection fortement polarisée et d’une violence inouïe avec le candidat Donald Trump complétement désinhibé, se livrant à toutes sortes d’outrances
Alors que plus de 75 millions d’Américains ont voté par correspondance et de manière anticipée, notamment dans les sept Etats-pivots (le Nevada, la Pennsylvanie, le Michigan, le Wisconsin, la Georgie, la Caroline du Nord, l’Arizona), c’est aujourd’hui que les électeurs et grands électeurs américains vont décider qui sera le prochain ou la prochaine présidente des Etats-unis d’Amérique. Si l’on en croit les sondages, le scrutin sera très serré.
La seule certitude est que nous avons affaire à une élection fortement polarisée et d’une violence inouïe avec le candidat Donald Trump complétement désinhibé, se livrant à toutes sortes d’outrances.
D’ores et déjà, Donald Trump affirme avec un étonnant aplomb que s’il perd l’élection, c’est tout simplement qu’il aura été battu par la triche. Rien d’étonnant du reste puisque, sans preuve aucune, il a refusé et refuse toujours de reconnaître sa défaite contre Joe Biden lors de leur confrontation en 2020 alors qu’il était président de la République. On est en face d’une posture noyée dans le complotisme et les «fake news» avec un candidat autoritaire qui donne l’impression d’être plutôt entouré par des groupies, en somme des gens tombés en fascination, installés dans une adhésion totale, bien loin du recul que nécessite l’usage de la raison.
En face, il y a Kamala Harris, une ancienne procureure habituée à se confronter aux faits, à les disséquer pour démêler le vrai du faux. Dans cette élection qui a lieu dans un pays dont on vante la force des institutions, il est surprenant de constater qu’il est rarement question de confrontations programmatiques mais de « fake news », de suspicions de fraudes non documentées.
Dans toute cette confusion où le souvenir de l’invasion du Capitole est encore vivace, ce jour d’élection est visité par la crainte de troubles voire de déferlement de violences incontrôlables. L’Amérique retient son souffle, tant l’issue de cette élection est incertaine et grosse de dangers. Redoutant le pire, la capitale Washington se barricade
PAR Fadel Dia
LE SYNDROME FAHRENHEIT 451
Dans son film intitulé « Fahrenheit 451 »; François Truffaut conte une société imaginaire, située dans un avenir proche, où le savoir et la lecture sont considérés comme un danger pour le pouvoir
L ’annonce de la présentation dans une librairie de la place d’un ouvrage consacré à l’histoire coloniale de la Casamance a provoqué une bruyante levée de boucliers, suscitée principalement par des membres de l’ancien parti au pouvoir, et avait poussé deux éminents professeurs d’histoire à s’élever contre ce qu’ils avaient appelé la « mise à l’index » d’un travail qui est, selon eux, le fruit d’une investigation scientifique.
Ils avaient donc pris la défense de leur métier commun, le « métier d’historien. Ils avaient porté un témoignage élogieux sur les qualités et le professionnalisme de son auteure et tancé vertement les responsables de la cabale montée contre elle, en s’en prenant directement à l’ancien parti au pouvoir et à ses dirigeants. Ils avaient enfin interpellé directement le président de la République et son Premier ministre et, se fondant sans doute sur l’engagement qu’ils avaient pris, avant d’arriver au pouvoir, de ne pas céder aux « pratiques d’un autre temps », ils avaient exprimé leur conviction qu’ils ne se laisseront pas entraîner dans ce qui ressemble à un bâillonnement de la recherche historique.
La réponse n’a pas tardé, vite relayée par la presse. Elle vient du Premier ministre qui s’est prévalu du soutien du président de la République. Ce n’était certainement pas la réponse qu’ils attendaient. Loin d’être rassurante, elle est même, d’une certaine manière, plus inquiétante que les prises de position des parties qu’ils avaient mise en cause !
Passons sur le fait que le Premier ministre ait servi sa réponse, sur une question aussi sensible, au cours d’un meeting électoral, qui n’est pas précisément le lieu le mieux indiqué pour délivrer un message empreint de sérénité et de mesure. Sa prise de position publique est d’autant plus surprenante que c’était probablement la première fois qu’il s’exprimait aussi clairement sur ce sujet brûlant et qu’il prenait le risque de se mettre à dos un mouvement qui en avait fait son dogme et, qu’à tort ou à raison, certains supposaient plutôt favorable à sa cause. Passons sur le fait que même si l’histoire n’appartient pas qu’aux historiens, il n’est pas la personne la mieux placée pour juger du contenu d’un livre d’histoire, surtout s’il n’a pas pris la peine de le lire méticuleusement. Sa réaction est en tout cas un désaveu de la qualité et des compétences des historiens sénégalais qui, en la matière, auraient dû lui servir de référents et de caution. On aurait mieux compris que, tenant compte de ses limites sur ce sujet et surtout du pouvoir que lui confère la loi, qu’il choisisse de faire appel à la justice pour qu’une enquête préliminaire soit lancée , s’il juge que l’auteure de l’ouvrage s’est « drapée dans une dignité qui n’est pas la sienne, celle de la science historique », comme Robert Badinter l’avait reproché au négationniste Robert Faurisson, que son livre est plus polémique que scientifique, qu’il occulte ou travestit la vérité, qu’il propage des thèses complotistes ou qu’il met en danger la cohésion nationale. Interdire la diffusion et la commercialisation d’un livre, sur la seule base d’une impression personnelle, est un acte de censure qu’on n’attendait pas de quelqu’un qui s’était retrouvé lui-même, il n’y a guère longtemps, sous la menace d’une telle mesure.
Passons sur l’accusation, gratuite jusqu’à preuve du contraire, portée sur l’auteure du livre, dont pourtant la probité et l’expérience avaient été vantées par ses collègues sénégalais, mais qui, selon le Premier ministre, ne serait qu’un maillon du réseau de manipulateurs dont se servirait la France, qui aurait saisi l’occasion pour se venger de sa déconvenue après le travail d’investigation mené par un autre historien.
Attardons-nous en revanche sur une autre partie de la péroraison du Premier ministre, celle où il affirme que l’auteure de l’ouvrage, par le seul fait qu’elle est de nationalité française, n’a pas « à écrire sur le Sénégal » et devrait consacrer son métier d’historienne à parler de la Corse ou de la Nouvelle Calédonie ! C’est faire fi de cette règle qu’un historien, un bon historien, n’est lié sérieusement que par les lois de sa discipline et qu’il est un juge juste et étranger à tous. C’est aussi suggérer que la Grèce ou l’Allemagne auraient le droit d’interdire à Souleymane Bachir Diagne de parler de Platon ou de Kant !
L’Histoire a certes ses faussaires, mais elle n’a pas de patrie
Dans son film intitulé « Fahrenheit 451 » François Truffaut conte une société imaginaire, située dans un avenir proche, où le savoir et la lecture sont considérés comme un danger pour le pouvoir. Leurs principaux vecteurs, les livres, ne sont pas seulement prohibés mais détruits systématiquement et le rôle des pompiers est de les brûler et non plus d’éteindre les incendies. On n’est pas dans la même situation et nous n’en sommes pas heureusement là, mais la décision prise par la deuxième personnalité de notre pays apparait, volontairement ou non, comme une manière d’empêcher les Sénégalais en général, et ceux d’entre eux qui ont accès à la lecture en particulier, de réfléchir, de juger par eux-mêmes sur un sujet qui est au cœur de notre vie politique et sécuritaire, et c’est sans précèdent dans notre histoire récente.
Les résistants de « Fahrenheit 451 » avaient trouvé comme solution pour sauver les livres de les apprendre par cœur, les Sénégalais que les propos du Premier Ministre ont mis en appétit se passent le livre dont il a interdit la vente par la toile, et gratuitement ! On peut dire que, par ses propos incendiaires, il n’a pas seulement fâché les défenseurs du droit à l’expression et les passionnés d’histoire locale, il a aussi fait à cet ouvrage qui, nous dit-on, a provoqué chez lui une colère noire, une énorme publicité dont on peut se demander si elle est méritée!
par Ndongo Samba Sylla et Peter Doyle
LES PROJECTIONS IMPOSSIBLES DU FMI CONCERNANT L’INflATION AU SÉNÉGAL
Des taux impossibles sont avancés pour 2025 et 2026, sans aucun fondement logique ou historique. Cette situation est d'autant plus préoccupante que le pays s'apprête à négocier un nouveau programme avec l'institution.
Financial Afrik |
Ndongo Samba Sylla et Peter Doyle |
Publication 05/11/2024
Le Fonds monétaire international (FMI) a récemment lancé en grande pompe ses Perspectives del’économie mondiale (World Economic Outlook en Anglais, WEO) à Washington. Compte tenu de l’influence majeure que cette institution exerce en matière de formulation des politiques publiques dans la plupart des pays du monde, il est important d’être vigilant quant à la qualité de ses analyses.
En effet, comme nous le savons tous, les vies de milliards de personnes sont affectées par les programmes du FMI et les conditionnalités et prescriptions politiques qui y sont attachées. Les erreurs d’analyse du FMI peuvent donc avoir des conséquences dévastatrices.
Au Sénégal, le FMI est revenu au devant de l’actualité à la faveur des débats en cours sur les finances publiques du pays. Un nouveau programme est en train d’être négocié avec les autorités sénégalaises.
Dans ce court article, nous souhaitons attirer l’attention sur les erreurs grossières dans les projections du FMI pour le Sénégal, notamment en ce qui concerne l’inflation.
Comme le montre la base de données du WEO, le FMI prévoit un taux d’inflation moyen d’environ 2 % chaque année entre 2025 et 2029. Ces estimations sont globalement conformes à la version d’avril 2024 du WEO (voir figure 1), bien qu’elles puissent être considérées comme optimistes pour la période 2024-2026, compte tenu de la réduction attendue des subventions à l’énergie. Jusque-là, tout va bien.
Cependant, les récentes projections du FMI concernant l’inflation en fin de période sont tout simplement impossibles. Le WEO d’octobre 2024 prévoit une inflation en fin de période (ou sur 12 mois) de -13,4 % en 2025 et de 41,9 % en 2026 (voir figure 2).
Ces projections ne reposent sur aucune base logique ou factuelle. Elles contredisent même les propres projections du FMI concernant l’inflation annuelle moyenne pour les années 2025 et 2026. La seule fois où l’inflation en fin de période a atteint plus de 20 %, c’était en 1994, l’année où le franc CFA a été dévalué de 50 % par rapport au franc français. L’inflation de fin de période s’est élevée à 37,5 % au cours de cette année exceptionnelle (voir figure 3). Et même alors, le taux d’inflation de fin de période de l’année précédente, c’est à dire 1993, n’était certainement pas un nombre négatif au-delà de 10 %.
Des erreurs aussi flagrantes de la part du FMI pour le Sénégal, dans son analyse la plus récente et la plus en vue, sont très préoccupantes si, comme c’est souvent le cas, elles constituent la partie émergée de l’iceberg en termes d’erreurs ailleurs dans les projections du FMI dans lesquelles ces chiffres sont incorporés.
Dans ce cas, il existe un risque évident d’imposer au Sénégal des conditionnalités inappropriées. Et il ne s’agit pas d’un risque théorique. Des erreurs dans les conditionnalités résultant d’erreurs de calcul du FMI ont été constatées récemment dans d’autres programmes du FMI en Afrique, y compris dans la dernière revue du programme du FMI pour le Kenya. Là, non seulement les projections d’inflation du FMI en fin de période pour 2024 sont tout simplement impossibles, mais en plus, ses projections en ce qui concerne la dette publique ne parviennent pas à réconcilier les flux fiscaux (emprunts) avec les stocks fiscaux (dette).
Il est essentiel, ne serait-ce que par respect pour la souveraineté de ses pays membres, que le FMI s’assure que ses projections répondent aux normes professionnelles les plus élevées. Dans le cas des projections d’inflation au Sénégal, à l’heure actuelle, cette exigence n’est tout simplement – et manifestement – pas respectée.
Ndongo Samba Sylla est économiste sénégalais, Directeur de Recherche à l’International Development Economics Associates (IDEAs).
Peter Doyle est économiste américain, ancien cadre du FMI et de la Banque d’Angleterre.
LE PASTEF SEUL CONTRE TOUS
Le choix de faire cavalier seul aux législatives du 17 novembre soulève des questions cruciales sur l'avenir du mouvement. Il suscite par ailleurs incompréhension et colère au sein des membres de l'ancienne coalition victorieuse de mars
(SenePlus) - De la dissidence à la présidence, en passant par la clandestinité, le Pastef s'apprête à écrire un nouveau chapitre de sa jeune histoire. Dix ans après sa création dans une modeste salle de l'université Cheikh-Anta-Diop de Dakar, le parti d'Ousmane Sonko fait le pari risqué d'affronter seul les législatives du 17 novembre.
Selon Jeune Afrique (JA), l'annonce a été faite lors d'une réunion qui avait des airs d'oraison funèbre pour la coalition "Diomaye président". Face aux alliés réunis à l'hôtel King Fahd de Dakar le 21 septembre dernier, le Premier ministre a tranché : "Seule la liste de Pastef allait participer aux élections", relate Charles Ciss, qui dénonce un "procédé antidémocratique et discourtois".
Un virage stratégique assumé par les cadres du parti. "Après une élection, on n'a plus d'alliés. Tous ceux qui nous ont accompagnés retournent dans leur propre camp ou se fondent dans le parti", explique l'un d'eux à JA. Une position qui marque la volonté d'émancipation du mouvement : "Il est temps de revenir à nos fondamentaux. Nous avons un parti jeune, qui a besoin d'une majorité stable."
Le parcours de Pastef détonne dans le paysage politique sénégalais. Créé en 2014 par un groupe d'inspecteurs des impôts autour d'Ousmane Sonko, le parti s'est construit sans scission avec les formations existantes. Parmi les architectes de cette ascension fulgurante, Bassirou Diomaye Faye, devenu président de la République, a joué un rôle crucial dans l'élaboration du "Projet", le programme qui a séduit les Sénégalais en mars 2024.
L'histoire récente du parti est marquée par une période sombre. Le 31 juillet 2023, une dissolution par décret présidentiel, une première dans l'histoire récente du Sénégal, contraint le mouvement à la clandestinité. "Cette période-là a été très compliquée, nous devions tenir nos réunions de manière presque clandestine", se remémore Madièye Mbodj, vice-président et conseiller spécial du chef de l'État, interrogé par Jeune Afrique.
La renaissance officielle intervient le 27 mars 2024, quelques jours après la victoire présidentielle, par un décret d'abrogation signé par Macky Sall "dans un souci d'apaisement". Aujourd'hui fort de près de 10.000 membres, le parti a temporairement gelé les nouvelles adhésions dans l'attente d'un congrès prévu en 2025, selon le magazine panafricain.
L'ambition législative du Pastef surprend par son audace. Dans un système où 105 sièges sur 165 sont pourvus au scrutin majoritaire, le parti qui n'avait obtenu qu'un siège en 2017, puis 26 en 2022, vise désormais la majorité absolue de 83 députés. Ousmane Sonko, désigné tête de liste, mène cette bataille décisive.
Le parti est désormais omniprésent jusque dans les détails du quotidien. Sa devise "jub, jubbal, jubbanti", prônant éthique et droiture, orne les timbres fiscaux, tandis que les visages du président et du Premier ministre s'affichent sur les cahiers d'écoliers.
Cette ascension fulgurante n'est pas sans soulever des questions sur la gestion du pouvoir. Comme le rappelle Jeune Afrique, en septembre, une polémique a éclaté suite aux propos du ministre de la Santé, Ibrahima Sy, évoquant une préférence pour le recrutement de militants du parti. Si Pastef a officiellement pris ses distances avec cette position, un conseiller présidentiel nuance auprès de JA : "Ce sont des choses à faire, pas des choses à dire. [...] Peut-on lui reprocher de favoriser un cadre expérimenté de son parti dans ces conditions ?"
Pour Madièye Mbodj, les législatives du 17 novembre représentent "la lutte du système contre l'antisystème". Un scrutin qui dira si le parti, né dans l'opposition et porté au pouvoir par une vague de changement, peut désormais gouverner seul tout en restant fidèle à ses principes fondateurs.
UNE PRÉSIDENTIELLE AMÉRICAINE SOUS TENSION
Dans sept États clés, le destin de la première puissance mondiale pourrait se jouer à quelques dizaines de milliers de voix près. Des tireurs d'élite sur les toits aux drones de surveillance, l'Amérique blindée attend dans l'angoisse le verdict des urnes
(SenePlus) - Une campagne électorale hors norme touche à sa fin aux États-Unis, où Kamala Harris et Donald Trump livrent leurs dernières batailles avant le scrutin présidentiel de mardi, rapporte l'AFP. Un duel historique qui pourrait voir l'accession de la première femme à la tête de la première puissance mondiale, ou le retour spectaculaire de l'ancien président.
À 60 ans, la vice-présidente démocrate Kamala Harris, qui a pris le relais de Joe Biden en juillet dernier, affronte Donald Trump, 78 ans, dans une course à l'issue incertaine. Une campagne marquée par une violence inédite, avec notamment deux tentatives d'assassinat visant le candidat républicain.
Sept États pivots concentrent toutes les attentions, avec la Pennsylvanie comme théâtre principal des ultimes tractations. Dans cet État crucial disposant du plus grand nombre de grands électeurs parmi les "swing states", les deux candidats multiplient les apparitions. Harris s'y rend notamment à Scranton, Pittsburgh et Philadelphie, soutenue par des célébrités comme Oprah Winfrey, Lady Gaga et Ricky Martin.
"Demain, ce sont les patriotes qui bossent dur comme vous qui vont sauver notre pays", a lancé Trump lors d'un meeting à Raleigh, avant d'entamer une tournée marathon en Pennsylvanie et dans le Michigan. À Grand Rapids, un jeune supporter de 19 ans, Ethan Wells, confie à l'AFP : "Quand Trump était président, personne ne déconnait avec l'Amérique."
La tension est palpable alors que près de 80 millions d'Américains ont déjà voté par anticipation. L'équipe Harris dit "s'attendre pleinement" à ce que Trump se déclare prématurément vainqueur, une manœuvre que Ian Sams, son porte-parole, qualifie de "signe de faiblesse et de peur de perdre."
Les craintes de violences post-électorales sont réelles : deux Américains sur trois les redoutent. Des mesures de sécurité exceptionnelles sont déployées : mobilisation de la Garde nationale dans l'État de Washington et le Nevada, agents électoraux équipés de boutons d'alarme en Géorgie, surveillance par drone et tireurs d'élite dans certains bureaux de vote. À Washington, des barrières métalliques protègent déjà la Maison Blanche, le Capitole et d'autres sites sensibles.
Le résultat, attendu dans la nuit de mardi à mercredi, pourrait se jouer à quelques dizaines de milliers de voix près dans un pays profondément divisé, où les deux camps ont déjà engagé de nombreuses actions en justice.