SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
24 avril 2025
International
par Jacques Habib Sy
QUELQUES REPÈRES DANS LA PENSÉE POLITIQUE DE CHEIKH ANTA DIOP
EXCLUSIF SENEPLUS - Pendant 40 ans, cette figure du terroir bawol bawol a ramé seul à contre-courant de la machine de destruction de l'impérialisme culturel occidental. Sa pensée-action reste encore un continent largement en friche (1/5)
Cheikh Anta Diop peut être considéré comme l'anti-héros du monde politique de l'Afrique contemporaine. Pendant quarante ans cette forte figure du terroir bawol bawol a ramé parfois seul à contre-courant de la formidable machine de destruction de l'impérialisme culturel occidental.
Malgré la grande classe qui caractérise sa pensée et son action politiques et l'impact qu'ils ont eu sur la scène politique africaine et africaine-américaine des trente dernières années, l'héritage politique considérable légué par ce grand homme d'État à la postérité reste largement méconnu d'une grande partie du public. C'est à lui restituer le formidable potentiel qu'il présente pour l'action immédiate et la bataille stratégique pour la construction des États Unis d'Afrique en un ensemble fédéré, réellement indépendant, démocratique, prospère et non-aligné que s'emploient modestement les pages qui suivent.
On peut dire sans peur d'être démenti que l'œuvre de Cheikh Anta Diop comme ses idées charnières ont exercé sur le développement de la pensée politico-culturelle africaine l'impact le plus considérable qu'il ait été donné à un théoricien et un praticien du changement social d’avoir sur l’Afrique contemporaine.
C'est en reconnaissance de ce fait qu'il a été honoré en même temps que le Négro-Américain Du Bois par les leaders culturels et politiques Africains et de la diaspora noire durant le Premier Festival Mondial des Arts Nègres tenu à Dakar en 1967. Les Africains-Américains réunis en une conférence mémorable sur les Civilisations de la Vallée du Nil à Atlanta, en Géorgie lui ont décerné en 1986 les plus hautes distinctions honorifiques tout en le reconnaissant comme le géant des études égypto-nubiennes.
* Communication copubliée et coproduite la première fois en 1989 par le Centre National de Lettres, le Conseil Régional de la Martinique et Carbet, Revue Martiniquaise de Sciences Humaines et de Littérature dans une livraison spéciale intitulée « Sciences et Civilisations Africaines, Hommage à Cheikh Anta Diop » in Carbet, N° 8, 1989, Fort-de-France. Cette livraison coordonnée par Alain Anselin a enregistré la participation de nombreux auteurs de renom comme Théophile Obenga, James Spady, Charles S. Finch, Ivan Van Sertima, Oscar Pfouma, Frédéric Okassa, Maurice Caveing, Bruce Williams et Clyde Ahmad Winters.
** Ce texte a été rédigé en 1989, au moment où l’auteur enseignait les sciences de la communication à Howard University (Washington, D.C.) et collaborait activement aux initiatives africaines-américaines et africaines sur l’Afrique.
Je me rappelle encore combien, en me montrant les titres qu'il avait ramené des Etats-Unis, il paraissait ému de tant d'attention vigilante et militante de la part des frères Africains des Etats-Unis. Il dit alors : "Le flambeau a pris ailleurs que sur le continent africain. Nos cousins d'Amérique ont désormais pris une avance sur leurs frères du continent dans le domaine de la prise de conscience culturelle !". Dans le langage dépouillé de Cheikh Anta cela signifie que les voies les plus sûres de la libération nationale africaine sont en train d’être balisées par les différentes composantes de la diaspora nègre tout en prenant une efficacité décisive encore inédite sur le continent africain.
Ferments du Panafricanisme
Vilipendée par certains idéologues dogmatiques ou immatures, ignorée de manière feinte par la plupart des gouvernements et chefs d'État de la période post-coloniale, taxée de raciste par libéraux et radicaux occidentaux et même des Africains noirs dont la naïveté est exploitée par des projets politiques savamment camouflés en vue de détruire l'Afrique, la pensée-action de Cheikh Anta reste encore un continent largement en friche. Seule une cécité criminelle a pu tenir éloigné de ce rivage théorique si vaste et fertile des patriotes africains disponibles pour la lutte anti-impérialiste mais encore trop confus sur leur identité et la contribution attendue d’eux par les masses africaines pour la construction d’une Afrique solidement plantée sur ses deux jambes et centrée sur elle-même. C’est que l’enjeu d’un tel objectif auquel Cheikh Anta Diop a si intimement mêlé sa vie est colossal. C'est en reconnaissance de ce fait qu'il a été honoré en même temps que le Négro-Américain Du Bois par les leaders culturels et politiques Africains et de la diaspora noire durant le Premier Festival Mondial des Arts Nègres tenu à Dakar en 1967. Les Africains-Américains réunis en une conférence mémorable sur les Civilisations de la Vallée du Nil à Atlanta, en Géorgie lui ont décerné en 1986 les plus hautes distinctions honorifiques tout en le reconnaissant comme le géant des études égypto-nubiennes.
Après la Seconde Guerre mondiale, les pays africains sont sous la férule européenne et américaine. Leur situation confine presque à l'esclavage. Elle en est le prolongement à peine maquillé. L'aventure coloniale est proprement inhumaine, ses ravages économiques foudroyants. Les masses africaines désemparées mais toujours prêtes à prendre d'assaut la citadelle coloniale voient leur élan saboté par les stratèges des officines impérialistes. C'est le temps de la promotion d'élites artificiellement créées à la mesure des ambitions des métropoles coloniales.
Et partout, cette monstrueuse tricherie contre l’histoire : les Négro-africains sont sans histoire, n'ont rien inventé, pas même l'écriture et surtout pas la moindre trace d’une civilisation digne de ce nom.
L'impérialisme est à pied d'œuvre. A l'image de son action barbare il lui faut créer le mythe du nègre inhumain, ahistorique, au stade évolutif gelé dans la nuit des temps. Et voici le nègre maudit, descendant de Cham, figure biblique vouée à la souffrance éternelle : une brute à l'état pur qu'il faut "civiliser". Le mythe est créé. Son énormité en renforce la prise sur les consciences vacillantes d'une intelligentsia africaine désemparée devant la brutalité de l'assaut. L'acculturation fait son chemin et l'impérialisme culturel en renforce les modalités d'intervention de Dakar à Khartoum et d'Alger au Cap. Aux Etats-Unis, dans les Caraïbes et aux confins du Pacifique, en Amérique du Sud et dans le Finistère malgache il atteint des proportions gigantesques.
C'est donc dire que l'Afrique et le nègre en général évoluent dans une posture de défaite presque totale bien que les résistances à l’esclavage et à la colonisation n’aient jamais été absentes de l’histoire mouvementée des peuples africains. L'espoir de survivre à la dérision coloniale représente un mince filet d’air par lequel l'Afrique évite la noyade. Une petite poignée de nationalistes africains tentent de mobiliser en vain une opinion occidentale repue de sa bonne conscience. Lamine Senghor, Garang et Kouyaté, nationalistes et internationalistes avant l'heure s'agitent à Paris autour de l'Association pour la Défense de la Race Nègre. A Londres, le Congrès de Manchester consacre les débuts foudroyants du Panafricanisme en tant qu’idéologie et programme d’action de la lutte anticolonialiste et anti-impérialiste.
Des géants de leur temps comme Padmore le Guyanais, Du Bois l'Africain-Américain, Nkrumah le Ghanéen, etc. cisèlent à partir de l’appareil conceptuel nationaliste les mots d'ordre pour le salut national et pan-régional africain. La prise de conscience s’amplifie à travers l'échappée politique splendide de Marcus Garvey aux Etats-Unis. Mais le mouvement est éparpillé. Il ne s'appuie pas encore sur une ligne de masse portée à son point d'incandescence maximale. La coordination panafricaine de la lutte anticoloniale manque de moyens à la mesure des taches colossales· à entreprendre. Les élites sont encore trop amarrées au char du maître colonial. La prise de conscience culturelle, assise quintessentielle de toute lutte de libération nationale, en est encore au stade du balbutiement.
Malgré tout, le Rassemblement Démocratique Africain, regroupement des élites et des masses africaines dans les pays essentiellement sous domination française, se mobilise avec succès au départ autour de la nécessité de l'indépendance à travers un ensemble fédéré.
Dans l'Afrique sous domination anglaise la stratégie de l’Indirect Rule porte ses fruits au sein de la petite poignée d'intellectuels friands de formules creuses sur l'African Personnality mais très peu enclins à aller jusqu'au sacrifice suprême pour se libérer de la botte britannique. Dans les colonies assiégées par le colonialisme portugais, la politique de la table rase est si bestiale que le mouvement de résistance populaire panse encore ses plaies et a besoin de plusieurs décennies avant de se radicaliser dans la guérilla militaire.
Malgré la somme déconcertante des insuffisances structurelles du mouvement de résistance nationale, les masses africaines intensifient la pression politique sur l'envahisseur européen. Les "tirailleurs" envoyés comme chair à canon dans les tranchées avancées de guerres mondiales engendrées par l'impérialisme rentrent dans leurs foyers nationaux le cœur rempli de frustrations. Ils ont vite compris au contact de leurs compagnons d'armes des autres colonies et devant l'arrogance de leurs encadreurs européens que la colonisation ne repose sur rien de tangible, qu'elle est la barbarie à l'état pur et que ses initiateurs sont de simples créatures dont ils connaissent dorénavant la mesquinerie, la peur et les faiblesses intimes, particulièrement durant les périodes d'accrochage armé, dans l'enfer des avant-postes militaires. C'est sans doute ici que le colonisateur cesse d'être perçu par le colonisé comme une sorte de surhomme, de sorcier omniscient dominant l'univers tout entier. Le colonisé sait désormais que l'inhumanité et l'arrogance du colon européen ne sont que la forme ultime de la peur. Peur d'être englouti par la marée irrépressible du nationalisme Noir. C'est alors le choc de Thiaroye où les tirailleurs sénégalais fraichement rentrés et revendiquant leurs droits sociaux sont massacrés par la soldatesque coloniale. C'est encore la fronde populaire malgache dans laquelle périssent plus de 100 000 insurgés. A Grand Bassam, en Côte d'Ivoire, les femmes descendent directement dans l'arène politique en une marche frontale contre l'appareil colonial.
Partout s'élève la clameur anticoloniale. Chez le colonisé, le besoin sacré de liberté transcende l'esprit de soumission enfoncé par le glaive sanglant de l'oppresseur dans ses réflexes défensifs et offensifs. Désormais les jeux sont faits. La chute du bastion colonial n'est plus que question de temps. Mais par instinct, le colonisé sait que les incertitudes de l'histoire pourraient prolonger longtemps encore la mainmise étrangère sur l'ensemble de son patrimoine. Ils pressent donc qu'il lui faut redoubler de vigilance, travailler d'arrachepied, obstinément à l'organisation de la riposte. Il lui faut apprendre à rationaliser sa colère et à la canaliser dans des rouages organisationnels capables de contrecarrer l'infiltration ennemie au sein de ses rangs, l'hésitation et le manque de détermination absolue propre à la petite-bourgeoisie intellectuelle.
Le binôme AE-RDA/FEANF
C'est au cours de ces années turbulentes de l'après-guerre que se développent l'Association des Étudiants du Rassemblement Démocratique Africain (AE-RDA) et la Fédération des Étudiants d'Afrique Noire en France (FEANF). C'est parmi ces deux mouvements que s'élaborent les projets de radicalisation du mouvement d'indépendance de l'Afrique sous domination française. Les militants de ces mouvements juvéniles explorent avec passion et fougue les bienfaits stratégiques et tactiques de l'arme marxiste et du nationalisme tiersmondiste puissamment secrété par les succès foudroyants du Mahatma Gandhi, le chantre de la non-violence positive et par les réparties enflammées de Nasser, Ho Chi Minh, Jomo Kenyatta. Déjà, de redoutables débateurs comme Abdoulaye Guèye de la branche sénégalaise du Rassemblement Démocratique Africain, Sékou Touré du Parti Démocratique de Guinée, Félix Moumié et Ruben Um Nyobé de l’Union des Populations du Cameroun embrasent le mouvement démocratique et révolutionnaire africain d'analyses pertinentes nourries par l'humus si fécond du nationalisme unitaire.
Vers la fin des années 1950, le mot d'ordre d'indépendance immédiate agite les lames de fonds du mouvement pour l'émancipation totale de l’Afrique. La fracture est complète entre les intellectuels aux perspectives timides sinon d'un autre âge sur le destin des peuples africains et les activistes de l'indépendance totale, immédiate et contre la "balkanisation africaine". Il est vrai qu'alors le mouvement de la négritude, formule choc due au génie d'Aimé Césaire, ce démiurge de la poésie nationaliste négro-africaine, finit de se décomposer sous la houlette de leaders comme Léopold Sédar Senghor pour qui l'indépendance en dehors de la Communauté franco-africaine est impensable. Le Général De Gaulle sait déjà alors qu'il peut compter sur des figures de proue comme Senghor pour amorcer en douceur la phase néocoloniale de la domination française en Afrique. Car en stratège avisé, en prise avec les données immédiates d'une histoire prête à basculer en faveur des insurgés vietnamiens victorieux de Dien Bien Phu, des maquisards du Front de Libération Nationale Algérien qui déclenchent la lutte armée à Sétif, des manœuvres efficaces du Parti Africain de l’Indépendance au Sénégal et de l'Union des Populations du Cameroun en faveur de l'indépendance immédiate, De Gaulle sait qu'il n'a plus le choix.
La frange progressiste du mouvement anticolonialiste africain, à l'instar des mouvements politiques dans la plupart des colonies est alors séduite par le pôle extrême du bagage idéologique qu'il trouve dans les métropoles coloniales. Le marxisme est alors considéré comme l’arme suprême, la parade infaillible contre l’impérialisme occidental. Les Africains le découvrent souvent à travers des années d'activisme dans les rangs du parti communiste de la métropole coloniale. Face au capitalisme décadent, l'idéologie marxiste offre une alternative d'autant plus fiable qu'elle vient de faire ses preuves dans la Russie tsariste et à travers les prises de position de Lénine, puis Staline sur la question nationale et coloniale et la solidarité du camp socialiste face au capitalisme décadent.
Phagocytés par les mécanismes de parrainage des partis communistes métropolitains, des étudiants négro-africains en France arborent le discours stalinien dont ils tentent d'appliquer sans discernement les inconsistances théoriques aux sociétés et à l'histoire africaines. L'héritage hégélien tenant que l'Afrique est hors de l’Histoire, qu'elle est plongée dans la barbarie depuis toujours et donc incapable de tout progrès notable est omniprésent dans la pensée marxiste. De Marx et Engels à Lénine et Staline, le marxisme occidental et les partis communistes qu'il crée sous la bannière d'un internationalisme prolétarien dirigé par la classe ouvrière du monde capitaliste avancé, c'est-à-dire l'ensemble occidental judéo-chrétien, a nié avec l'assurance la plus crâne que l'Afrique ait jamais puissamment participé à la marche forcée du monde vers le progrès.
Malgré le "dés-apparentement" entre le Parti Communiste Français et le RDA qui intervient en 1950-1951, il est difficile à la plupart des étudiants organisés à travers la FEANF et l'AE-RDA de débusquer les trébuchements conceptuels du marxisme et du Parti Communiste Français devant l'histoire africaine et le poids de l'acculturation dans la conscience anticolonialiste.
La formation que reçoivent les premiers communistes africains à Dakar d'abord dans les Groupes d'Études Communistes puis à Paris dans les mini-structures du PCF, ne tient absolument pas compte des spécificités africaines. Le marxisme ainsi enseigné est ossifié. La dialectique et le matérialisme historique, ne sont utilisés qu'à travers les trivialités du catéchisme dogmatique récité sans discernement. Dans ce corset idéologique, les Africains se perçoivent encore comme l'émanation de peuples "arriérés", à l'histoire engloutie dans les "siècles obscurs". A telle enseigne, qu'on peut encore lire en 1978, dans une tentative africaine de critique de l'expérience marxiste en Afrique Noire que "la majeure partie des lois scientifiques a été découverte dans les pays européens pour des raisons qui tiennent à des circonstances particulières qu'il serait très long d'expliquer" (cf. A. A. Dieng). Or les faits relatifs à l'histoire mondiale du progrès et scientifique et technologique sont en conflit avec cette description linéaire et européocentriste de l'innovation scientifique. Tout en reconnaissant le rôle capital joué par l'Occident dans le développement des sciences modernes, il faut ramener les choses à une juste mesure. L'Europe a puisé dans le patrimoine scientifique universel que lui ont fait redécouvrir les Arabes entre les 7ème et 8ème siècles de notre ère. Grâce à la révolution industrielle qui n'est vieille que de deux siècles, le progrès technologique et le développement sans précédent des forces productives (grace à l’esclavage notamment) font basculer l'initiative scientifique et le bénéfice politique et culturel qui s'ensuit du côté du monde occidental dont le niveau technologique, politique, scientifique et culturel au Moyen Age est comparable sinon inférieur dans bien des domaines à celui de l'Afrique Noire (cf. Ivan Van Sertima, Blacks in Science)
C'est contre cette vision timide de l'histoire et ce versant caché de l'aliénation culturelle que va s'insurger Amilcar Cabral en Guinée Bissau et aux Iles du Cap-Vert. C'est contre ceux-ci que Cheikh Anta Diop décide, bien avant Cabral, de partir en guerre dans ses années de fronde militante au sein de l'AE-RDA.
Bawol des origines
Parti de son terroir natal, un repli chargé d'histoire et enfoncé en plein cœur de la savane bawoloise, Cheikh Anta Diop reste à l'écoute du monde noir. La ville de Dakar où il prépare ses études secondaires et son baccalauréat est alors un carrefour privilégié de rencontres et de choc des idées. Cette particularité est intensifiée par le statut de capitale qui est conféré à la ville dans l'ensemble aoefien. Ici, Cheikh Anta est témoin de la lutte pour le pouvoir entre la SFIO, le B.D.S., les partisans de Galandou Diouf et ceux de Blaise Diagne, ce docile exécutant des manœuvres françaises en terre africaine. Dans le même temps, Cheikh Anta prend acte de l'impasse dans laquelle se trouve plongée la classe maraboutique parfois prise au piège de la manipulation coloniale.
Nourri par ses instincts de fils du terroir éduqué dans la tradition de l'islam mouridique, une idéologie religieuse au dynamisme socio-politique indéniable, Cheikh Anta Diop mesure les potentialités de l'islam africain en tant que composante majeure de la libération nationale. Bien qu'il en prenne conscience relativement tôt, il apprendra plus tard à son corps défendant que les centres de décision islamiques sénégalais ne sauraient tolérer, encore moins favoriser la promotion d'une idéologie libératrice et délibérément progressiste. Cette tendance générale des religions révélées au conservatisme dans le cadre africain est tout aussi vraie du clergé catholique sénégalais bien que Cheikh Anta Diop n'ait pas eu à en souffrir directement dans son action politique et compte tenu du niveau marginal de l'archevêché sénégalais sur le plan social, économique et politique.
Déjà, avec ses camarades de classe du Lycée Van Vollhenhoven de Dakar et du Collège Blanchot de Saint-Louis et ses amis de l'École Normale William Ponty de Sébikhotane, il se forge une personnalité qui, tout en s'incrustant dans la mouvance anticoloniale de la jeunesse estudiantine du moment, se pose dès l'origine en un refus systématique de la domination culturelle et donc politique de son peuple.
C'est que Cheikh Anta passe ses onze premières années en plein cœur du système intellectuel et religieux du Bawol et du Kadioor. Au centre d'enseignement coranique de Kokki où il est envoyé par ses parents dès sa plus tendre enfance, il passe une année à étudier l'alphabet arabe et le Coran. Kokki est un sanctuaire important de la résistance nationale. C'est ici, dans ce Kadioor laminé par le harcèlement militaire colonial, que tombe, le 11 février 1875 Ahmadou Cheikhou, en un combat sanglant contre l'envahisseur français. Une année après Kokki, Cheikh Anta Diop est admis dans la cour privée du fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba. C'est dans ce bastion de la résistance anticoloniale où s'élabore pour la première fois peut-être en Afrique noire une doctrine islamique essentiellement nègre que Cheikh Anta passe cinq années, de l'âge de cinq ans à onze ans, à forger ses premières armes intellectuelles, morales et religieuses. L'enseignement est d'une rigueur à la mesure des ambitions du mouvement mouride aux prises directes avec l'envahisseur colonial, ce qui valut plus tard à son saint patron d’être emprisonné puis embastillé en exil dans les rigueurs de l'humidité équatoriale du bagne de Mayombe, au Gabon, en même temps que l'Almami Samori Touré, ce stratège politique et militaire le plus considérable de son temps. Ces années studieuses sont entrecoupées de rares séjours auprès, du foyer familial de Céytu où il retrouve les siens parmi lesquels figure son père adoptif, le second le plus estimé d’Ahmadou Bamba, Seex Ibra Fall, autre figure historique du mouridisme.
Issu du monde paysan sénégalais où il a passé une adolescence partagée entre la discipline des daaras coraniques, les rigueurs de la culture vivrière et le vitalisme culturel mouride, Cheikh Anta Diop exerce son jugement critique sur les problèmes de l'heure à partir de paramètres qui recentrent la place du monde paysan et des masses déshéritées dans le jeu politique africain. Pour avoir vécu parmi la masse paysanne de l'entre-deux-guerres, il porte en lui les cicatrices encore fraîches des rigueurs économiques du bassin arachidier, de la férocité de l'exploitation coloniale, du dénuement de paysans à la vie monotonement cadencée par le dur labeur, un labeur sans fin qui vieillit prématurément les bras actifs, de l'obscurantisme favorisé par la politique coloniale de la table rase dans les domaines de l'instruction et l'éducation.
Pour mesurer la contribution de Cheikh Anta à l'essor du mouvement anticolonial en Afrique noire sous domination française, il n'est pas inutile d'esquisser la toile de fond sociale et politique à partir de laquelle évolue le mouvement étudiant africain en France.
À suivre, mercredi 15 novembre 2023.
GUILLAUME SORO A DECIDÉ DE METTRE FIN À SON EXIL
L’ancien Premier ministre ivoirien Guillaume Soro, condamné à la prison à perpétuité en Côte d’Ivoire pour « atteinte à la sûreté de l’Etat », a affirmé qu’il met « fin » à son exil.
L’ancien Premier ministre ivoirien Guillaume Soro, condamné à la prison à perpétuité en Côte d’Ivoire pour « atteinte à la sûreté de l’Etat », a affirmé ce dimanche soir, dans une vidéo postée sur sa page facebook, qu’il met « fin » à son exil, entamé en 2019. « Il m’est pénible de vivre loin de ma terre ancestrale et natale d’Afrique », déclare-t-il dans une allocution de cinq minutes, publiée sur sa page.
De PremierBet à BetSafe en passant par SportPesa, les sociétés de paris inondent le continent de leur publicité agressive. Plongée au cœur d'une industrie qui fait main basse sur l'Afrique grâce à une manne fiscale juteuse mais au prix de dégâts humains
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 12/11/2023
Accoudé contre un mur dans la grisaille matinale, Brave Luhanga est désespéré par un coup de chance. Pour le deuxième jour consécutif, ce jeune Malawite de 15 ans se rend dans un bureau de paris de Lilongwe, la capitale, pour miser les 65 centimes gagnés en vendant des snacks à ses camarades sur des matchs de football européens sans même connaître les équipes. "Parfois ils me jettent dehors car je suis trop jeune", témoigne-t-il dans une enquête du site Bloomberg publiée le 2 novembre 2023.
Pourtant, les affaires de paris sportifs explosent sur le continent africain où l'industrie du gambling, peu régulée, a quasiment triplé ses revenus en 10 ans pour atteindre 7,3 milliards de dollars selon l'étude du cabinet H2 Gambling Capital citée par Bloomberg. Si 90% des Malawites vivent avec moins de 4 dollars par jour, les mises légales représentent déjà 0,59% du PIB contre seulement 0,3% en Allemagne indique la même source.
Parmi les acteurs majeurs, PremierBet compte des centaines de points de vente au Malawi selon l'enquête. "Quand le gouvernement a cette manne, il sera tenté de l'exploiter", analyse Tunde Adebisi, chercheur à l'université d'Ulster, interrogé par Bloomberg. Le football européen passionne les Africains et alimente les paris d'après le média américain. À Lilongwe, Pious Chirambo, gérant d'une boutique PremierBet, reconnaît "identifier facilement les joueurs accros" dans l'article.
Au Kenya également, la dépendance aux jeux ruine des vies comme celle d'Ezekiel Kimani rapporte Bloomberg. "Mon existence est totalement désorganisée, j'ai déçu mes amis et ma famille", témoigne-t-il auprès du journal.
La régulation demeure insuffisante sur le continent face aux dérives selon le média. Joseph Kamau, directeur de la clinique Primrose à Nairobi et pionnier du traitement de l'addiction aux jeux, a déjà soigné plus de 380 personnes dont des enfants de 8 ans précise l'enquête. "Le gouvernement ne mesure pas la gravité du problème", déplore-t-il dans l'article.
Malgré ses impacts sociaux préoccupants, de nombreux États africains continuent de promouvoir les paris sportifs, séduits par les recettes fiscales générées comme le souligne Bloomberg. Pourtant, ce business lucratif détourne une partie des profits vers l'étranger et pourrait, à terme, engendrer des coûts bien plus lourds pour les sociétés africaines d'après le média américain.
VIDEO
LES COULISSES DE LA COALITION BBY
Lamine Bara Gaye, directeur du SNEIPS et adjoint au maire de Mbacké, parle de sa transition de l'opposition à la coalition présidentielle. Il aborde également les défis actuels au sein de la coalition Benno Bokk Yakaar en vue des prochaines élections
Lamine Bara Gaye, directeur du SNEIPS et adjoint au maire de Mbacké, parle de sa transition de l'opposition à la coalition présidentielle. Il aborde également les défis actuels au sein de la coalition Benno Bokk Yakaar en vue des prochaines élections.
Mali, l'histoire d'une crise
VIDEO
LA GENÈSE
De Kidal à Bamako, Nathalie Prévost tend son micro à ceux qui ont vécu l’indépendance et la première révolte touareg puis sa maturation, sous l’effet des sécheresses et de l’exil en Libye, en mouvements armés rebelles de plus en plus organisés
De Kidal à Bamako, Nathalie Prévost tend son micro à ceux qui ont vécu l’indépendance et la première révolte touareg puis sa maturation, sous l’effet des sécheresses et de l’exil en Libye, en mouvements armés rebelles de plus en plus organisés. Militants politiques, chefs militaires et membres du gouvernement malien se racontent et livrent des témoignages de première main sur les grands bouleversements politiques de leur pays depuis l’indépendance, notamment le renversement en 1991 du régime militaire de Moussa Traoré – au pouvoir depuis 1968 – sous l’effet de la pression démocratique. Ces récits, enregistrés en 2022, esquissent à la fois l’histoire des personnages clé de la crise et ses racines profondes.
Intervenants : Fatimata Walet Sidati (†), Targuia de Kidal ; Mohamed Ag Aharib, ancien porte-parole d’Ansar Dine, membre du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), ami d’Iyad Ag Ghali – le chef de la galaxie d’Al-Qaïda au Sahel ; Adghaïmar Ag Alhousseini, combattant de la rébellion de 1990, intégré dans la Garde nationale malienne au grade de colonel puis rallié à la rébellion de 2012 au sein du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) ; Mohamed Ag Rhissa, chef d’état-major du MNLA, ancien officier de l’armée libyenne ; Tiébilé Dramé, ancien ministre malien des Affaires étrangères (2019), ancien secrétaire général de l’Union nationale des élèves et étudiants du Mali (UNEEM), Président du Parti pour la renaissance nationale (Parena) ; Bilal Ag Acherif, secrétaire général du MNLA ; Choguel Kokalla Maïga, Premier ministre du Mali.
VIDEO
QUAND ZIDANE RENCONTRE MESSI
De leur enfance dans la pure passion du jeu jusqu'à leurs plus grands exploits sous le maillot de leur sélection ou en club, les deux légendes vivantes ont replongé dans leurs souvenirs, évoquant aussi le rôle déterminant de leurs familles dans leur quête
Vendredi dernier, deux des plus grandes stars du football de ces dernières décennies se sont retrouvées pour une conversation passionnante : Zinédine Zidane et Lionel Messi. Les deux hommes ont évoqué leurs inspirations, leurs meilleurs souvenirs et leur vision du football.
Zidane n'a pas tari d'éloges sur Messi, le considère comme "l'un des plus grands joueurs de l'histoire". De son côté, Messi a expliqué que Zidane avait été une véritable source d'inspiration pour lui étant jeune.
Sans surprise, le mais le plus marquant de la carrière de Messi reste celui inscrit en finale de la Coupe du monde 2022 avec l'Argentin, synonyme de premier sacre mondial pour l'Albiceleste.
Les deux légendes sont également revenus sur le rôle crucial qu'ont joué leurs parents dans leur réussite. Entre les longs voyages pour les emmener à l'entraînement et les sacrifices financiers, Zidane et Messi ont constitué d'un soutien indéfectible.
L'échange s'est terminé de la plus belle des manières, avec un échange de maillots symbolique. Zidane a offert à Messi son maillot de la finale de la Coupe du monde 1998 remportée avec l'équipe de France. Messi lui a rendu la pareille en lui donnant l'un de ses maillots du PSG.
Malgré leurs magnifiques carrières respectives, Zidane et Messi restent avant tout des passionnés de football. Ils s'accordent d'ailleurs pour dire que le football a beaucoup changé ces dernières années, notamment tactiquement avec l'émergence de nouveaux systèmes. Mais une chose ne change pas : le talent et la magie que certains joueurs comme eux apportent sur le terrain.
LA BAD LEVE SES SANCTIONS FINANCIERES IMPOSEES AU GABON
La Banque Africaine de développement a décidé de lever, le 6 novembre, les sanctions financières imposées au Gabon après le coup d’Etat du 30 aout. L’annonce a été faite par le ministre gabonais de l’économie jeudi.
La Banque Africaine de développement a décidé de lever, le 6 novembre, les sanctions financières imposées au Gabon après le coup d’Etat du 30 aout. L’annonce a été faite par le ministre gabonais de l’économie jeudi.
La décision intervenue après des négociations entre l’institution bancaire continentale et les autorités gabonaises. Marrakech, Libreville et Brazzaville, , fin octobre, des rounds de négociations ont été nécessaires pour dissiper les zones d’ombre.
Le Gabon s’engageait dans la capitale congolaise, au plus niveau, à apurer ses arriérés de paiement auprès de l'institution panafricaine. Relançant dans la foulée, sa coopération avec la Banque Africaine de développement.
Au Gabon, la BAD finance un important projet d’adduction d’eau dans plusieurs villes dont Libreville la capitale. La Bad devient la première institution à lever les sanctions infligées au Gabon depuis le coup d'Etat contre Ali Bongo, il y a un peu plus de deux mois.
LES STARS AFRICAINES PORTENT LE FOOTBALL SAOUDIEN
Du Bayern à l'Arabie saoudite, la nouvelle vie de Sadio Mané. Focus sur les performances des Africains qui illuminent la Pro League
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 11/11/2023
Tel que rapporté par Le Monde dans son édition du 10 novembre 2023, le mercato estival spectaculaire des clubs saoudiens a permis d'attirer dans le championnat d'Arabie saoudite, dont Cristiano Ronaldo constituait jusque-là la principale attraction, "des joueurs africains de très haut niveau" tels que les Sénégalais Sadio Mané (Al-Nassr) et Kalidou Koulibaly (Al-Hilal), l'Algérien Riyad Mahrez (Al-Ahli), le Marocain Yassine Bounou (Al-Hilal) ou encore l'Ivoirien Franck Kessié (Al-Ahli).
Ces stars du football, évoluant auparavant "dans les meilleurs championnats européens", ont été séduites par "des salaires qu’ils n’auraient jamais touchés en Europe", note le journal. Alors qu'un tiers du championnat saoudien a été disputé, "le bilan des joueurs africains est largement positif, puisque onze d’entre eux font partie des vingt meilleurs buteurs", avec notamment Sadio Mané (6 buts) et Riyad Mahrez (5 buts).
Selon Marcel Tisserand, défenseur international de RD Congo évoluant à Al-Ettifaq, "Sadio Mané, Ryad Mahrez, Kalidou Koulibaly ou Franck Kessié, pour ne citer qu’eux, avaient encore largement le niveau pour jouer au plus haut niveau et disputer la Ligue des champions". Ces stars "sont arrivées en grande forme, motivées, et elles font partie de ceux qui tirent le championnat saoudien vers le haut", analyse-t-il.
L'entraîneur français Denis Lavagne, présent lors d'un match d'Al-Hilal, a également "été impressionné par le niveau affiché par Yassine Bounou et Kalidou Kouylibaly". Il ajoute ne pas avoir "l’impression de voir évoluer Sadio Mané dans un placard doré". L'attaquant Karim Benzema a lui expliqué avoir choisi l'Arabie saoudite pour des raisons religieuses, étant "important de vivre dans un pays musulman" en tant que "musulman".
Ainsi, grâce aux stars africaines et malgré les préjugés, le football saoudien atteint un niveau qui force le respect, porté par des joueurs "très concernés" et désireux de performances sur le terrain.
QUAND L'HISTOIRE AFRICAINE DÉFIAIT LE RÉCIT COLONIAL
A travers son dernier essai fouillé, l'éminent historien sénégalais Mamadou Diouf dresse le portrait nuancé d'une discipline longtemps dénigrée et offre un éclairage essentiel sur la construction des identités postcoloniales en Afrique
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 11/11/2023
Dans son nouvel essai intitulé "L'Afrique dans le temps du monde", l'historien sénégalais Mamadou Diouf, professeur à l'Université Columbia de New York, opère un retour critique sur le rôle joué par l'histoire africaine depuis les indépendances, comme il le souligne dans le journal Le Monde du 11 novembre 2023.
Selon Diouf, à mesure que les centres de recherche se développaient en Afrique dans les années 1950-1960, "l'histoire africaine s'est affirmée comme revalorisation d'un passé déprécié par l'Occident impérial, mais aussi comme décentrement par rapport à lui". Elle s'est notamment appuyée sur "d'autres bibliothèques que la sienne, telles la bibliothèque islamique et celle issue de la réalité historique hybride que le sociologue britannique Paul Gilroy a appelé « l'Atlantique noir »". Ce concept visait, selon les termes de Mamadou Diouf, "la réinstallation de l'Afrique à une place pionnière dans le temps du monde".
Ces travaux historiques s'inscrivaient dans une tradition plus large visant à "relire le passé des peuples noirs pour « revendiquer au présent [leur] dignité", cite Diouf. Il ajoute que pour les Africains, "reprendre la main sur les écritures de son histoire, [c’était] réclamer une parité culturelle, créative, historiographique, et revendiquer un récit de l’universel enfin découplé de l’impérialisme occidental".
Dans son ouvrage, Mamadou Diouf passe en revue les principaux courants historiques africains comme ceux de Dakar, Ibadan et Dar es-Salaam. Il évoque également les figures marquantes de la discipline telles que l'historien sénégalais Cheikh Anta Diop. Il analyse aussi les grands débats, notamment sur la place de la colonisation et de la traite négrière ou sur l'importance de l'oralité.
En conclusion, Diouf estime que l'histoire africaine cherche désormais moins à raconter l'histoire de l'Afrique que celle de "l'humanité en Afrique". Inscrire le continent "dans le temps du monde" permettrait selon lui de "replacer des fragments de communautés culturelles dans une nouvelle tapisserie de la civilisation humaine".
LE REVIREMENT DE LA CEDEAO AU NIGER
L'organisation communautaire semble avoir pris conscience de l'inefficacité de l'approche militaire face à la détermination de la junte au pouvoir à Niamey, préférant désormais miser sur le dialogue et la médiation régionale
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 11/11/2023
Plus de trois mois après le coup d'État du 26 juillet au Niger, la CEDEAO semble avoir définitivement enterré l'option d'une intervention militaire sur le territoire nigérien pour renverser la junte au pouvoir. Pourtant, les chefs d'Etat ouest-africains avaient initialement fait preuve d'une grande fermeté face aux putschistes.
Dès les premières heures du coup d'Etat, qui a renversé le président Mohamed Bazoum et fait de lui un otage depuis plus de 100 jours, le Béninois Patrice Talon et le Nigérian Bola Tinubu avaient demandé le rétablissement de l'ordre constitutionnel par la force si nécessaire, à en croire les inforlations du magazine Jeune Afrique (JA). L'Ivoirien Alassane Ouattara militait également pour une action musclée de la CEDEAO, selon la même source.
Mais les positions ont clairement évolué avec le temps. Ouattara ne semble plus favorable à l'interventionnisme militaire aujourd'hui. De son côté, la junte multiplie les appels du pied en direction de médiateurs comme le Togo, cherchant visiblement à gagner du temps et éviter un affrontement armé.
Après plus de trois longs mois de statu quo, durant lesquels le sort du président Bazoum demeure dans l'ombre, la CEDEAO a tiré les leçons de son inaction initiale, indique JA. Privilégier désormais la négociation à la confrontation directe pourrait s'avérer plus judicieux, d'autant que la crainte de légitimer les putschistes en cas de force est réelle.
Avec ce revirement prudent, l'organisation ouest-africaine se refuse à envenimer la crise et mise sur une résolution pacifique de la tension, par la médiation d'Etats comme le Togo. Reste à voir si cette approche plus conciliante permettra enfin de voir le jour pour le Niger, toujours aux mains de militaires qui ne savent que faire de leur prise de pouvoir.