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2 avril 2025
Opinions
par Saliou Ngom
LES ENSEIGNEMENTS D’UN SCRUTIN
Entre justice manipulée, restrictions des libertés et répression des opposants, Macky Sall aura finalement payé le prix de sa dérive autoritaire. Majorité absolue dès le premier tour, le message de sanctions des urnes est sans appel
Après plusieurs rebondissements et incertitudes dans le processus électoral, le Sénégal a tenu ce 24 mars 2024 l’élection présidentielle. En passant par l’Assemblée nationale puis par un « dialogue national », le président de la République avait tenté d’annuler la convocation du corps électoral, avant d’être contredit par le Conseil constitutionnel.
À l’issue de cette élection, les résultats confirment la victoire dès le premier tour du candidat de l’ex-Pastef, Bassirou Diomaye Faye, membre de l’opposition (54,28%). Cette victoire est inédite à plusieurs titres. D’abord au sens arithmétique avec la majorité absolue dès le premier tour ; ce qui n’était jamais arrivé dans l’histoire politique sénégalaise pour un parti d’opposition.[1] Ensuite parce que le candidat est sorti de 11 mois de détention (avril 2023-mars 2024) après le démarrage de la courte campagne présidentielle, suite à une accusation d’ « outrage à magistrat ». Enfin, parce que le parti qui arrive au pouvoir, le Pastef, créé en 2014, a subi pendant ces trois dernières années diverses formes d’injustice et accusations (arrestation de ses militants, intimidations, accusation de terrorisme ou de séparatisme etc.) ayant justifié, selon les autorités, sa dissolution par le ministre de l’intérieur en juillet 2023.
Au-delà de Bassirou Diomaye Faye et du Pastef, la sociologie de cette élection permet de tirer plusieurs enseignements sur la nouvelle configuration politique sénégalaise ayant permis cette consécration. Des élections législatives aux locales de 2022, le parti/coalition au pouvoir (APR-BBY) était confronté à une sérieuse tendance d’affaiblissement électoral, d’essoufflement politique et de querelles de leadership. Cette dynamique était déjà bien marquée dans les zones urbaines en 2022 (législatives et locales) et se sont confortées dans les zones rurales, qui ont majoritairement voté pour le candidat Bassirou Diomaye Faye en 2024.
Dès l’ouverture de la courte campagne présidentielle, l’importante implication des jeunes, malgré le ramadan et le carême, a attiré l’attention des observateurs. Leur forte participation, ainsi que la perspicacité de la communication du Pastef[2], n’ont laissé aucune marge aux autres candidats dans la campagne. Cette configuration a contribué à étouffer la visibilité du discours et les propositions des autres candidats, tout en renforçant la bipolarisation de l’électorat. De fait, l’élection présidentielle est devenue un referendum pour ou contre la continuité (le système contre l’antisystème). L’opposition significative (Coalition Diomaye Président) s’est attelé à accentuer cette bipolarité entre le système (Macky mooy Amadou[3]) et l’antisystème (Sonko mooy Diomaye[4]). La libération d’Ousmane Sonko et de Bassirou Diomaye Faye, suite à la loi d’amnistie, a renforcé cette dynamique, rendant presque invisible l’action des autres candidats.
Cette configuration électorale bipolarisée a fortement tourné à l’avantage du nouvel élu, au détriment des candidatures de troisièmes voies (Khalifa Sall, Thierno Alassane Sall, Anta Babacar etc.), qui comptaient sur l’invalidation des candidats du Pastef pour s’affirmer. Cette configuration bipolarisée, en plus de la courte durée de la campagne, a davantage étouffé les discussions/débats thématiques ou programmatiques entre les candidats. Les rares propositions discutées, à propos de la politique monétaire, tournaient à l’avantage du Pastef et de sa position souverainiste. Pour accentuer cette bipolarisation, comme lors des élections législatives, les jeunes et leaders du Pastef n’ont pas hésité à insinuer que certaines candidatures faisaient le jeu de la majorité présidentielle. Ainsi les petites attaques de ces candidats (Anta Babacar, Khalifa Sall etc.) contre Diomaye Faye n’ont fait que les isoler davantage : les résultats montre qu’après ce dernier (54,28%) et Amadou Ba (35,79%), les 17 autres candidats se sont partagés les 10% de l’électorat, avec des scores très faibles. Sur ces 17 candidats dont une femme (Anta Babacar Ngom), seuls deux ont pu dépasser la barre symbolique de 1% (Aliou Mamadou Dia avec 2,80% et Khalifa Sall avec 1,56%). Ces faibles scores ne traduisent pas forcément le niveau réel de leur (im)popularité, mais surtout la forte bipolarisation de l’électorat et la force du vote utile dans un contexte politique inédit.
Bien conscientisés par les nouveaux mouvements sociaux[5], nombre d’électeurs issus des grandes villes ont considéré que le candidat Amadou Bâ, peu soutenu par celui qui l’avait désigné (le président de la République), n’était rien de moins que le candidat d’une France soucieuse de renforcer sa mainmise politique et économique. L’exploitation prochaine du gaz et du pétrole par le Sénégal a contribué à renforcer cette idée auprès des jeunes électeurs. Face à cette continuité supposée d’Amadou Bâ, la proposition de « renégocier les contrats pétroliers , gaziers » et de pêche, a particulièrement séduit ces jeunes électeurs. Bref, la question postcoloniale, particulièrement celle de la présence des multinationales (Aucun, Eiffage, Total etc.) a été au centre de cette campagne présentielle.
Le résultat de l’élection montre aussi que la page du mécontentement populaire, dont les manifestions depuis février 2021 ont été l’expression, n’est visiblement pas tournée. Les électeurs ont ainsi sanctionné un système de répression et de restriction des libertés qui n’a fait que renforcer le mécontentement populaire. La libération de plus de 400 détenus politiques avant la campagne, avec la loi d’amnistie, a permis à ces jeunes de dénoncer tout au long de la campagne « les tortures » qu’ils auraient subies. Ainsi, au-delà de la personne d’Amadou Bâ, ce vote traduit surtout une sanction contre le régime et la gouvernance de Macky Sall, qui a remis en cause nombre d’acquis démocratiques (liberté d’expression et d’association, ouverture politique etc.).
La place des diasporas a été plus que déterminante dans l’affaiblissement politique du régime de Macky Sall et la défaite d’Amadou Bâ. Ce furent surtout les contributions qualitatives (lives des activistes, soutien aux familles de victimes, diffusion de vidéos de tortures, etc.) et financières des Sénégalais de l’étranger qui ont permis à l’opposition de faire face à la restriction des libertés des activistes et des acteurs politiques, ces trois dernières années.
Enfin, l’un des enseignements de ce processus, menant à la victoire de l’opposition, est le danger de l’hyper-présidentialisme et l’importance d’une justice libre pour consolider la démocratie : du tribunal de Ziguinchor au Conseil constitutionnel, en passant par la Cour suprême et avec les différents recours des candidats, la justice n’a jamais été aussi sollicitée dans l’arbitrage et la régulation du processus électoral afin d’aboutir à la tenue d’une élection libre et transparente. Tous ces enjeux montrent les défis du nouveau président élu, Bassirou Diomaye Faye, pour le rétablissement de la confiance dans les institutions politiques (Assemblées, justice, Gouvernement, etc.), mais surtout pour une sérieuse réforme des institutions que la société civile appelle de ses vœux.
[1] Abdoulaye Wade (2000) comme Macky Sall (2012) étaient passés au second tour.
[2] Qui a permis de mettre Ousmane Sonko au centre de l’élection (avec le Slogan Diomaye mooy Sonko), alors qu’il n’était pas candidat.
Il n’est pas trop tard pour rejoindre, dès maintenant, un vaste front pour la mise en œuvre de ruptures fondamentales dans la manière de gérer l’Etat, et de mettre leur expertise avérée au service de la Nation
Nous ne laisserons rien, ni personne, nous gâcher l’immense joie que nous procure la cinglante défaite électorale subie par la Coalition Benno Bokk Yakaar ! En attendant d’être édifié sur le fait de savoir s’il s’agit d’une simple alternance, la troisième de notre histoire politique ou d’une véritable alternative sociopolitique, réjouissons-nous, au moins de la fin du régime antidémocratique de Macky Sall !
Certains esprits malintentionnés parlent déjà d’un soi-disant deal entre le président sortant et les dirigeants du Pastef. En fait de deal, il pourrait simplement s’agir de négociations finales (comme celles entre l’ANC et les tenants du système d’apartheid sud-africain, en 1991) entre un régime en fin de course et des forces politiques émergentes censées être porteuses de changements sociopolitiques venus à maturité. Il faudra seulement éviter de passer, par pertes et profits, tous les crimes économiques et de sang ainsi que les innombrables forfaitures politiques commis par le régime du Benno-APR, ces dernières années. Le faire, c’est courir le risque, que les mêmes causes (absence de reddition de compte, clientélisme politique, transhumance…) produisent les mêmes effets, à savoir une nouvelle caste de prédateurs, peu soucieux des droits et libertés.
Une véritable réconciliation nationale devra reposer sur le socle de la justice et de la vérité. Il faudra éviter que des préoccupations politiciennes et électoralistes comme celles observées lors de nos deux premières alternances viennent parasiter l’exaltante œuvre de justice sociale, de libération nationale et de reconquête de nos souverainetés confisquées.
Certes, les contextes de 2012 et de 2024 ne sont pas superposables et les prémisses semblent, cette fois, plus propices. Le président Macky Sall venu accidentellement au pouvoir, suite à l’éclatement de la coalition Benno Siggil Sénégal, était parti d’un score de 26,58% au premier tour. Cela l’avait conduit à user de combines et de stratagèmes politiciens pour maintenir la cohésion de sa coalition, aux dépens de son propre parti, l’APR, non structuré jusqu’à ce jour. De plus, les ruptures nécessaires identifiées par les Assises nationales avaient été sacrifiées sur l’autel de la désastreuse continuité néocoloniale.
Le duo présidentiel Sonko-Diomaye du Pastef, quant à lui, proclamant urbi et orbi, sa volonté de détruire le système (néocolonial), accède au pouvoir, dès le premier tour, avec un score flatteur, devançant son adversaire et suivant immédiat de près de 20 points, auréolé d’un parcours prestigieux voire héroique et bénéficiant d’une adhésion populaire sans précédent.
De fait, tout observateur sérieux se doit de reconnaître, en toute objectivité que le Pastef a joué les premiers rôles, fait preuve de résilience, de constance et a payé un lourd tribut dans cette confrontation politique épique avec le régime du Benno-APR, qui a abouti à l’éclatante victoire électorale du 24 mars 2024 ! Cela est dû aussi à la clarté des positions de ce parti, qui vient de célébrer ses dix ans, sur le fléau de la mal-gouvernance illustrée par de multiples scandales à répétition et sur les méfaits de la dépendance néocoloniale.
A tel point que son leader Ousmane Sonko, dont le charisme ne fait pourtant l’objet d’un doute, a, depuis toujours, mis en avant une démarche collective, basée sur un projet commun, visant une véritable alternative au système néocolonial et reposant sur une pleine participation des masses populaires. Cela lui a permis, quand il a été arbitrairement évincé de la compétition électorale, de se faire remplacer, au pied levé, par son camarade de parti, Bassirou Diomaye Faye. A contrario, la plupart des autres candidatures se réclamant, à tort ou à raison, de l’opposition, reposaient sur des approches individualistes, selon la fameuse formule mystificatrice, de « rencontre d’un Homme (providentiel ?) avec son peuple » et n’ont récolté que des scores lilliputiens, qui ne reflètent très certainement pas la valeur des postulants.
Il n’est pas trop tard pour rejoindre, dès maintenant, un vaste front pour la mise en œuvre de ruptures fondamentales dans la manière de gérer l’Etat, et de mettre leur expertise avérée au service de la Nation. Cette unité des forces patriotiques autour de l’essentiel devra privilégier les convergences programmatiques sur la massification tous azimuts et surtout sur les déplorables marchandages autour de quotas et de strapontins. C’est à l’aune de ces critères, que le peuple vigilant saura si nous entrons dans l’ère d’une véritable alternative sociopolitique ou d’une simple alternance.
Par Madièye MBODJ
ADMIRABLE PEUPLE AFRICAIN DU SENEGAL !
La présidentielle du 24 mars 2024 a pris la forme d’un referendum pour ou contre la continuité du système néocolonial vermoulu de domination, de servitude volontaire, de prédation et d’autocratie.
La présidentielle du 24 mars 2024 a pris la forme d’un referendum pour ou contre la continuité du système néocolonial vermoulu de domination, de servitude volontaire, de prédation et d’autocratie. Le peuple sénégalais, en toute souveraineté et maturité, a voté NON et a choisi massivement la voie de la rupture incarnée par le candidat Bassirou Diomaye Faye. Ce dès le premier tour, avec un score de plus de 2 400 000 voix, soit plus de 54 %, loin devant Amadou BA, le candidat du pouvoir, qui a obtenu environ 1 050 000 voix, soit 35,7%, pour un taux de participation légèrement supérieur à 61%, avec un total de 19 candidats en lice. Par ce vote clair, les électeurs ont entendu couper court à toute incertitude, à tout mauvais calcul, à tout faux prétexte pour un éventuel coup fourré. Et cerise sur le gâteau, le tout dans la paix et la sérénité : admirable peuple du Sénégal ! Un fait inédit pour un opposant face à un candidat au pouvoir, un authentique tsunami- selon le mot du doyen des doyens Alla KANE, repris en quelque sorte par la presse internationale qui parle de «tremblement de terre», de «razzia», de «raz de marée» ou de «séisme» politique. Même Macron de la république de France s’est résolu à envoyer au Président démocratiquement élu, Bassirou Diomaye Faye, un message de félicitations en français et même … tenez- vous bien, en wolof !
C’est une loi de l’histoire : aucune révolution, ni même aucun changement significatif dans aucun pays au monde, n’a jamais pu se produire, dans l’histoire contemporaine des luttes des peuples, sans que n’aient été réunies les trois conditions suivantes i) le peuple ne veut plus être dirigé comme avant ; ii) le pouvoir ne peut plus gérer comme avant ; iii) des pans entiers du camp du pouvoir (‘’le système ’’) basculent peu ou prou, à un moment déterminé de l’exacerbation des antagonismes de classe, dans le camp opposé au pouvoir (‘’l’antisystème’’)-CF na contribution : De la Gauche qui se meurt à la Gauche qui vit, in Le Quotidien, du 9 septembre 2021. Dans ce cadre, il est essentiel qu’à toutes les étapes, le noyau dirigeant de la lutte sache garder le cap, «en restant stratégiquement ferme sur ses orientations de base, et en même temps lucide, ouvert et vigilant dans la conduite politique, autour d’objectifs pertinents, clairement définis et aptes à faire avancer réellement la lutte des masses populaires» (Idem, Ibidem). Sous ce rapport, aucune mauvaise querelle, aucun reproche hypocrite, ne sauraient être opposés à la démarche de la Coalition Diomaye Président, laquelle a su rallier à sa cause et unir autour d’elle l’essentiel des forces vives nationales décidées à en finir avec le régime de régression politique et sociale de l’APR-BBY.
D’un côté, le scrutin du 24 mars consacre, dans une osmose militante intergénérationnelle avec des segments importants parmi leurs devanciers, la montée en puissance de nouvelles générations de patriotes révolutionnaires, souverainistes, anti-impérialistes et panafricanistes, opposés au diktat du dogme néolibéral mondialisé. En même temps, le 24 mars signe l’enterrement de première classe ou, en d’autres termes, la descente aux enfers de certains ténors de ce que l’on appelle abusivement ‘’classe politique’’, que ce soient les tenants de la politique politicienne de ‘’la droite classique’’ et ses fragments épars, ou les personnages balafrés de ‘’la gauche plurielle’’ capitularde.
Le 24 mars marque une importante victoire d’étape dans la lame de fond ou la dynamique politique de révolution démocratique, sociale et citoyenne amorcée plus nettement depuis le 23 juin 2011, prolongée et amplifiée depuis mars 2021. Ni hasard ni miracle spontané, la lutte prolongée d’un peuple debout, uni autour d’un leadership de progrès, de convictions fortes, tenaces et partagées, constitue la clé de la victoire contre le système, ses injustices et ses violences de toutes sortes, tant il est vrai que, sous nos tropiques, la république, l’état de droit et la démocratie restent encore largement un combat de tous les jours et une conquête permanente ; tout comme d’ailleurs la bataille contre le socle économique, social, culturel et idéologique du système, ses valeurs ou contre-valeurs, ses mécanismes de reproduction et de perpétuation, les mentalités et comportements secrétés par lui et sédimentés dans le corps politique et social. Fort heureusement, soutenant la dynamique de la révolution politique enclenchée, une véritable révolution culturelle est en train de s’opérer à grands pas sous nos yeux, pour le changement positif des mentalités et des comportements, en rupture avec le mimétisme et l’élitisme complexé hérités de l’occident capitaliste. C’est pourquoi quand le président élu Bassirou Diomaye Faye oublie sa personne et déclare : «Le héros de la journée du 24 mars, c’est le peuple sénégalais», il se montre parfaitement en phase avec cette exigence de rupture paradigmatique. Il en est de même quand, armé symboliquement d’un balai tout au long de la campagne, il déblaie la voie du JubJubël-Jubbënti (Incarner soimême la droiture -Amener chacun et chacune à pratiquer la droiture - S’employer à corriger tout comportement non conforme à l’esprit de droiture), selon la pédagogie par l’exemple et par le haut. Pareillement quand lui-même et le président Sonko s’engagent publiquement devant le peuple, non à distribuer ou à partager des privilèges ou prébendes, mais plutôt à travailler dur en vue de la réalisation collective des objectifs et engagements du Projet pour un Sénégal souverain, juste et prospère, dans une Afrique de progrès.
Félicitations appuyées et méritées à l’ensemble des composantes du peuple sénégalais des villes comme des campagnes, femmes comme hommes, jeunes comme personnes âgées, avec un accent particulier à l’endroit de nos exemplaires compatriotes de la diaspora. A présent, le plus dur, le plus difficile, restent à faire et pour relever le défi, nous nous devons de changer nous-mêmes pour changer le Sénégal et l’Afrique. Ceux ou celles qui disent : «nous avons renversé la bourgeoisie, c’est maintenant à notre tour de nous servir», rendent un bien mauvais service à la cause ! En reconnaissance des énormes sacrifices consentis et à la mémoire de l’ensemble des martyrs de notre lutte commune, nous avons l’obligation et la lourde responsabilité de ne décevoir ni les attentes immenses ni le formidable espoir de tout un pays, de tout un continent, de tout un peuple, notamment de sa frange la plus vigoureuse, sa vaillante jeunesse. Des chantiers prioritaires, divers et nombreux, sont à prendre à bras le corps par le président Diomaye et son équipe, comme : lutte contre la vie chère et le chômage ; réconciliation nationale, vérité et justice, non à l’impunité ; refondation des institutions, fin de l’hyper-présidentialisme néocolonial ; rationalisation et diminution de la dépense publique, lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite ; état des lieux et concertations ciblées avec les divers secteurs pour la prise en charge efficiente de leurs préoccupations ; construction nationale, retour définitif de la paix en Casamance, développement endogène et souveraineté alimentaire ; éradication de l’analphabétisme, culture et communication du changement pour la promotion d’une citoyenneté nouvelle de discipline et de responsabilité ; mise en place du nouveau gouvernement pour faire face efficacement et sans retard aux urgences, entre autres.
Dans tous les cas, la mobilisation populaire et citoyenne pour la promotion du Projet politique porté par le Président Diomaye et, en toutes circonstances, pour la défense du nouveau pouvoir face à toutes manœuvres éventuelles de déstabilisation ou de retour en arrière, d’où qu’elles viennent, doit faire constamment l’objet, à tous les niveaux, de toute l’attention requise. Puisse le 4 avril 2024, dédié à la jeunesse et aux forces armées, constituer le coup d’envoi d’une authentique campagne de SET SETAL NATIONAL : setal suniy gox, sellal suniy jikko !
Madièye MBODJ
Membre de la Conférence des leaders de la Coalition Diomaye Président
Par Amadou SANO
TEMPS DE CHOIX
Le temps est venu de choisir les collaborateurs qui auront la lourde charge de vous accompagner dans la conduite des affaires de l’Etat. En cette occasion, nous vous conseillerions de mettre en avant 3 critères : la compétence, l’engagement et la vertu
Le temps est venu de choisir les collaborateurs qui auront la lourde charge de vous accompagner dans la conduite des affaires de l’Etat. En cette occasion, nous vous conseillerions de mettre en avant trois (3) critères : la compétence, l’engagement et la vertu. La compétence regroupe l’ensemble des connaissances et expériences pertinentes aux domaines d’exercice de la responsabilité à exercer. Quant à l’engagement, il est nourri par la foi inébranlable que la mission confiée relève du sacerdoce et la motivation constamment renouvelée à donner le meilleur de soi pour améliorer la qualité des services à offrir au peuple sénégalais.
Les personnes qui démontrent ces qualités sont passionnées par la réalisation de la vision que vous portez et à laquelle les Sénégalais ont adhéré dans leur grande majorité. Elles sont capables de penser de manière créative et d’aborder sous une perspective large les nombreux et multiformes problèmes qui assaillent au quotidien les populations. Elles sont pragmatiques, savent faire preuve d’initiative et sont orientées résultats. Elles savent remettre en question, de manière constructive, le statu quo, prennent des décisions courageuses et assument la responsabilité des actes qu’elles posent.
Ces personnes savent créer un environnement qui attire les talents d’ici et de la diaspora. Elles savent valoriser la diversité et les bagages culturels différents. Elles sont ouvertes d’esprit, cultivent les relations transversales et recherchent la synergie. Ces personnes sont celles qui ont compris que la réussite de votre mandat relève de leurs propres responsabilités et que l’échec n’est pas une option. Enfin, le candidat à la responsabilité d’Etat a prouvé, dans son parcours, qu’elle est digne de confiance et a fait preuve d’honnêteté dans ses relations avec ses semblables et dans la gestion des ressources à lui confiées. Nous nous permettons de vous rappeler les termes sublimes du Coran, au verset 26 de la sourate 28 (Le récit) : «… le meilleur à engager est celui qui est fort et digne de confiance».
Vos plus proches collaborateurs et vous-même serez assaillis de demandes directes et indirectes provenant des membres de votre propre parti et plus généralement de la coalition qui a porté votre candidature à la magistrature suprême. Quand vous opposerez un niet à certains, les germes de la division naîtront. En ce moment-là, vous vous rappellerez que vous n’avez pas été élu pour un partage de gâteau. La confiance du peuple est sous-tendue par votre capacité à engager des ruptures dans le choix des hommes d’Etat et la conduite des affaires du pays.
Par Mamadou Omar NDIAYE
VIATIQUE POUR NOS JEUNES NOUVEAUX MAITRES
il faudra tenir un langage de vérité aux populations dès le départ pour leur faire accepter d’inévitables sacrifices. C’est dès maintenant qu’il faut poser des actes forts pour la réussite du quinquennat
Vox populi, vox dei. Voix du peuple, voix des dieux. Le peuple souverain sénégalais s’est donc rendu massivement aux urnes dimanche dernier et, dans son écrasante majorité, a porté à la magistrature suprême de notre pays Bassirou Diomaye Faye.
Venu de Ndiaganiao, en pays sérère, issu d’un milieu extrêmement modeste mais propulsé dans la haute administration sénégalaise grâce à de brillantes études rendues possibles par l’école publique avant d’accéder à la présidence de la République, Bassirou Diomaye Faye est un pur produit de l’ascenseur social sénégalais. Lequel fonctionne à merveille 64 ans après l’indépendance de notre pays, ce dont il convient de se féliciter.
Les Sénégalais doivent conserver jalousement ce modèle social de méritocratie républicaine qui donne leurs chances à tous les citoyens de ce pays d’accéder aux responsabilités les plus élevées et à toutes les charges indépendamment de leur fortune ou de leur naissance. Pourvu que l’on travaille dur, à la force du poignet on peut y parvenir aux plus hautes cimes. De ce point de vue, la success story de Bassirou Diomaye Faye et celle de son prédécesseur Macky Sall sont à inscrire en lettres d’or dans la saga de notre jeune Nation. Sans écouter les Cassandres mais aussi les sarcasmes de ceux qui raillaient voire parlaient avec mépris de ce « petit Sérère », de ces « aventuriers » et autres « inexpérimentés », les Sénégalais ont choisi parmi les 19 candidats en lice celui qui leur semblait le meilleur sous tous rapports c’est-à-dire le plus intègre, le plus humble, le plus sincère étant donné que de sa compétence ainsi que sa capacité à bien diriger ce pays, ils n’en ont jamais douté.
Personnellement, c’est les yeux fermés que j’ai voté pour le nouveau président parce qu’il m’a convaincu et parce que le combat mené par son parti depuis sa création, sous la houlette d’Ousmane Sonko, m’était sympathique. Il me rappelait en tous points celui qu’en 1988, des idéalistes comme moi (mais aussi Me Cheikh Koureyssi Ba, Me Ousmane Ngom, Pape Samba Mboup, Cheikh Tidiane Touré, feu Abdoulaye Faye, Mody Sy, Clédor Sène et autres) avions mené dans les années de braise du « Sopi » contre le pouvoir socialiste.
L’injustice subie par ce parti (Pastef), les complots contre son principal dirigeant, la répression sanglante dont il a été l’objet, sa dissolution pure et simple…tout cela a contribué à me révolter.
Bassirou Diomaye Faye a été élu et bien élu mais c’est maintenant seulement que le boulot commence pour lui. Il n’aura pas droit à un état de grâce tellement les attentes sont nombreuses, pressantes et les urgences multiples. Au premier rang de ces problèmes, l’économie qui se trouve presque en cessation de paiement malgré les belles statistiques sans cesse exhibées par le régime sortant.
Dette stratosphérique, recettes en berne, dépenses qui explosent, masse salariale exponentielle, subventions ruineuses…Le tableau est effrayant. Il faudra effectuer des coupes claires pour ne pas dire qu’à court terme, un ajustement structurel nous paraît inévitable. Pour cela, il faudra tenir un langage de vérité aux populations dès le départ en leur faisant une présentation sans fard de l’héritage en matière économique pour leur faire accepter d’inévitables sacrifices. Un des moyens de faire accepter la pilule, ce sera bien sûr de prêcher par l’exemple et de diminuer immédiatement le train de vie de l’Etat en supprimant des institutions budgétivores et inutiles comme le CESE, le HCCT, la Commission pour le dialogue des territoires et autres machins destinés à caser une clientèle politique parasitaire. Cela tombe bien et bonne nouvelle puisqu’il paraît que cela fait partie des priorités de nos nouveaux dirigeants. Il leur faudra aussi faire subir une cure d’amaigrissement au parc automobile de l’Etat en roulant modeste.
Fini, les véhicules 4x4 ou 8x8 à 60 millions, 80 millions voire 100 millions de francs ! Dans un pays parmi les plus pauvres au monde, rouler dans de tels carrosses, c’est assurément insulter le peuple. Pour le reste, c’est bien beau de vouloir réaliser la réconciliation nationale mais elle ne devrait pas se faire au détriment de la reddition des comptes et de la justice. Quelques têtes de voleurs du régime sortant devront donc absolument être offertes en offrande au peuple sous peine de voir les nouveaux dirigeants accusés de complicité avec des criminels économiques. Ce ne sont là bien sûr que quelques exemples de ce qu’il conviendra de faire dès les premiers jours étant donné que Pastef dispose d’un excellent projet sur la base duquel les Sénégalais ont plébiscité son candidat. Au vu de la maestria avec laquelle ce parti à mené son combat contre le régime maffieux de Benno Bokk Yaakar, de la manière admirable (à bluffer les old fashioned comme moi !) avec laquelle ses jeunes maîtrisent le numérique, principalement les réseaux sociaux, de la cohorte de cadres très bien formés dont il dispose, de son excellent programme sur lequel ont cogité de brillants cerveaux, je ne doute pas un instant que ce parti sache ce qu’il a à faire. N’étant pas moi-même un consultant de Pastef, je me contenterai donc de quelques généralités en guise de viatique.
Dream team et banquet de la République
Le président Bassirou Diomaye Faye devra démarrer au quart de tour. Pour cela, il lui faudra choisir des ministres immédiatement opérationnels car les Sénégalais ne leur donneront pas le temps d’apprendre. C’est au pied du mur qu’on reconnaît le maçon et ces ministres devront faire très vite leurs preuves. Il lui faudra donc choisir les meilleurs, constituer une dream team pour s’attaquer immédiatement à la résolution des problèmes des Sénégalais. Certes, des centaines voire des milliers de militants ont investi dans le « projet », que ce soit sur le plan intellectuel, sur le plan matériel ou surtout financier, s’ils ne se sont investis physiquement. D’aucuns parmi eux ont payé leur engagement par l’emprisonnement, la perte de leur emploi ou la privation de revenus. Je ne parle évidemment pas de ceux qui ont été tués. Tous ces gens veulent donc un retour sur investissement et leur part du gâteau. Ils exigent leur place au banquet de la République. C’est normal, légitime puisqu’ils ont misé et gagné. Ce n’est donc que justice qu’ils soient rétribués. Seulement voilà, il faudra faire la part des choses et trouver le juste équilibre entre la nécessité de récompenser les militants et les alliés, d’une part, l’impératif de produire des résultats au niveau de l’Etat de l’autre ! Une des choses qui ont le plus perdu le président Macky Sall c’est sa fâcheuse propension à politiser toutes les directions des ministères, toutes les directions générales de sociétés nationales et des agences, toutes les régies financières, toutes les ambassades…bref tout. Qu’importe que l’on soit incompétent pourvu que l’on ait la carte de membre de l’Apr ou que l’on soit estampillé Benno Bokk Yaakar ! Avec les piètres résultats que l’on sait. Si le président Bassirou Diomaye Faye pouvait systématiser l’appel à candidatures pour les fonctions les plus importantes, cela l’aiderait grandement à obtenir de bons résultats ! Mais là aussi pas de panique, ça figure dans son programme.
Encore une fois, cinq ans ça passe très vite et c’est dès maintenant qu’il faut poser des actes forts pour la réussite du quinquennat. L’on sait que généralement les présidents disposent des 100 premiers jours suivant leur accession au pouvoir pour mettre en œuvre les grandes réformes de leur magistère parce qu’après c’est très compliqué. Pour ne pas prêter le flanc à leurs adversaires de l’Apr-Benno, qui voudront très vite instruire leur procès en incompétence, les nouvelles autorités devront agir vite et donner des résultats. Ils devront démentir l’adage selon lequel il n’y a jamais deux sans trois. Après le désastre du passage au pouvoir des islamistes d’Ennahda chassés du pouvoir par les Tunisiens au vu de leur incompétence manifeste, de celui des Frères musulmans du Caire où la révolte du peuple égyptien contre le président Mohamed Morsi a entraîné la prise du pouvoir par les militaires, nos nouveaux maîtres taxés de salafistes par leurs adversaires devront avoir à cœur de réussir.
Créer des centaines de Sedima et ne surtout pas supprimer les fonds politiques !
Oh certes, encore une fois, en cinq ans il n’est pas possible de faire des miracles quand on sait le temps nécessaire pour réaliser un bon projet, de sa conception à sa mise en œuvre en passant par la recherche de financements (il faudra compter avec les procédures bureaucratiques des institutions ou organismes de financement !) surtout qu’au bout de la quatrième année il faudra déjà se mettre en campagne pour une éventuelle réélection. Créer des centaines de milliers voire un million d’emplois durant un quinquennat, ça relève de la légende et il faudra faire des promesses réalistes à nos compatriotes. Leur dire surtout que tout le monde ne pourra pas accéder à l’emploi salarié. C’est surtout dans l’agriculture — n’en déplaise au nouveau président de la République mais il lui faudra encourager la création de dizaines de Sedima à travers le pays car les Prodac ne sont que des variantes tropicales Sovkhoz, ces fermes d’Etat de l’ère soviétique. Autrement dit, des gouffres à milliards. Dans l’agriculture stricto sensu, donc mais aussi dans l’artisanat, la pêche, l’auto-emploi qu’il sera possible d’insérer les milliers de jeunes qui arrivent chaque année sur le marché de l’emploi. Encore qu’il faudra bien oser briser le tabou de notre démographie galopante dont aucun taux de croissance au monde n’arrivera à neutraliser les effets.
Pour le reste, Bassirou Diomaye Faye bénéficie d’atouts non négligeables dont le moindre n’est pas le fait d’avoir été élu sans le soutien des marabouts qui ne pourront donc pas prétendre que ce sont leurs prières qui l’ont porté au pouvoir. Il ne leur doit absolument rien et c’est tant mieux ainsi. Il devra aussi se méfier des griots, communicateurs traditionnels et autres courtisans — bref des « toog muy dokh — qui vont lui tisser une légende tellement dorée, changer ses louanges à un point tel qu’il pourrait croire être un demi-dieu ! S’il ne serait pas Dieu le Père lui-même. Sa porte devra être hermétiquement fermée aux transhumants qui ne pourront que polluer sa gouvernance et le fâcher avec le peuple qui l’a plébiscité. Avec le pouvoir arriveront de nouveaux amis, des lobbyistes de tout poil, des investisseurs tenant des mallettes remplies d’argent. Les signatures de quelques-uns d’entre nos nouveaux maîtres vaudront des milliards, tout le monde sera à leurs pieds, le tapis rouge sera déroulé partout au président Bassirou Diomaye Faye qui, par un décret, un acte, un coup de fil pourra changer radicalement la vie de ses sujets. Difficile de résister à toutes les tentations surtout à l’argent dans un pays où c’est le président de la République qui doit régler tous les problèmes avec des fonds politiques qui ne pourront même pas tenir un mois tellement les sollicitations sont nombreuses. De ce point de vue, je me demande si la promesse de supprimer les fonds politiques n’est pas un peu trop démagogique. Que le nouveau président de la République y réfléchisse à deux fois avant d’appliquer cette promesse ! Surtout, on est tenté de donner à son excellence Bassirou Diomaye Faye ce conseil que donna Mohamed Ali, le grand champion de boxe, à son adversaire Ken Norton qui lui avait cassé la mâchoire au cours d’un combat mémorable. Ce dernier étant venu le voir à l’hôpital les jours suivants, Ali lui avait dit en serrant les dents: « méfie-toi des croqueuses de diamants » ! Eh oui, Bassirou Diomaye, Ousmane Sonko et autres devront se méfier des putains de la République mais de toutes façons elles sont dans les allées de tous les pouvoirs du monde !
Personnellement, tant qu’ils seront dans une ligne de défense absolue de la souveraineté nationale sur tous les plans, mais aussi de relative intégrité, je les accompagnerai inch’Allah tout en priant Dieu de veiller sur eux et de leur permettre de toujours garder leur lucidité afin de ne jamais dévier de leur cap ! Mes vœux de réussite accompagnent le président Bassirou Diomaye Faye et son équipe…
Mamadou Omar NDIAYE
Par Mody NIANG,
MONSIEUR LE PRESIDENT : DES ACTES DE RUPTURE URGENTS, FORTS ET ENTRAINANTS*
Le 29 mars 2000, soit dix jours après la victoire provisoire déclarée par la Cour d'Appel du candidat du Sopi, Sud Quotidien publiait ce texte de Mody Niang qui était une sorte de lettre ouverte au nouveau président de la République.
Le 29 mars 2000, soit dix jours après la victoire provisoire déclarée par la Cour d'Appel du candidat du Sopi, Sud Quotidien publiait ce texte de Mody Niang qui était une sorte de lettre ouverte au nouveau président de la République. Vingt-quatre années après, cette lettre garde paradoxalement une bonne partie de son actualité. Raison suffisante pour remettre au goût du jour cette adresse qui esquisse la gouvernance de rupture dont a besoin le Sénégal. Sud Quotidien reproduit le texte in extenso.
Maître, vous voilà enfin élu, et à une confortable majorité, Président de la République du Sénégal. Votre victoire est d’autant plus significative qu’elle a été acquise de haute lutte, contre un adversaire qui était adossé au départ sur des atouts substantiels, notamment sur un parti politique rompu à la manipulation des élections et sur des moyens humains, matériels et financiers colossaux. Les fraudes les plus sophistiquées, les importantes sommes d’argent utilisées pour acheter les consciences, les misérables tentatives de diabolisation, les ndigël de dernière heure, tout cela n’a eu aucun effet sur le vote des Sénégalais qui vous ont accordé leur confiance. C’est par le peuple et par le peuple seul que vous détenez le pouvoir. C’est donc par ce peuple et pour ce peuple seul que vous devez gouverner.
Ce brave peuple a longtemps attendu le Sopi et a tout sacrifié pour son avènement. Il est donc en droit d’attendre des actes forts qui indiquent sans ambages que le Sénégal vit une ère nouvelle. Il ne s’agira pas, bien entendu, dans le très court terme, d’augmenter les salaires, de diminuer le prix des denrées de première nécessité, de résorber le chômage, de recruter tous les volontaires de l’Éducation dans la Fonction publique, de donner des bourses à tous les étudiants, etc. Ce ne serait pas réaliste et aucun Sénégalais sérieux ne devrait s’attendre à de tels miracles. Les actes attendus peuvent ne pas être très coûteux sur le plan financier. Ce qu’il faut d’abord, après la réaffirmation sans équivoque de votre engagement à procéder aux réformes institutionnelles promises dans les tout prochains mois, c’est de redonner sans tarder confiance aux Sénégalais et de les remettre au travail. Le Gouvernement qui sera mis en place devrait y contribuer largement. Ce Gouvernement ne sera pas, comme ceux auxquels nous a habitués l’ancien Président de la République, une addition encombrante de 30 à 35 ministres, dont l’écrasante majorité est composée d’hommes et de femmes frileux, sans envergure et à la compétence et à la mortalité douteuses.
Monsieur le Président de la République, le gouvernement que vous mettrez en place devrait être, au contraire, une structure légère, efficace, formée de ministres choisis parmi les Sénégalaises et les Sénégalais les plus compétents, les plus entreprenants, les plus intègres et ayant un sens élevé de leurs importantes responsabilités. Monsieur le Président, un ministre de la République ne devrait pas être n’importe qui et il convient rapidement d’en restaurer les fonctions profondément altérées par votre prédécesseur. Dans le choix de ces ministres, ce dernier a souvent privilégié les critères subjectifs que sont la proximité sentimentale, l’ancienneté dans le parti, les liens de parenté, la recommandation d’un porteur de voix, les bonnes grâces de la première dame, etc. Ces critères ne devraient pas être déterminants dans la nomination d’un ministre. Je vous ai d’ailleurs entendu déclarer un jour, à propos de nomination de ministres dans un gouvernement “Il faut des gens compétents, audacieux, intelligents, efficaces, dûment sélectionnés et sérieux”. Vous avez donc le devoir de sélectionner des hommes et des femmes qui répondent rigoureusement à ce profil et d’exiger de vos alliés d’en faire autant.
Votre futur Premier ministre et vous-même devrez veiller à ce que les ministres nommés appliquent rigoureusement les critères d’excellence dans le choix de leurs collaborateurs immédiats (directeurs de cabinet et conseillers techniques) et dans les propositions de nomination de directeurs de services nationaux, de gouverneurs, de préfets, etc... Vous vous méfierez des ralliés des toutes dernières heures. En particulier, votre futur Premier ministre devra éviter de reconstituer autour de lui une sorte de PSbis. Après quarante ans de règne sans partage, Abdourahime Agne et ses camarades n’ont pas leur place dans le gouvernement que vous allez mettre en place, ni même dans aucune autre structure du nouveau système : ils devront apprendre à vivre dans l’opposition. En particulier, les ralliés de dernière heure ne devraient pas être à l’abri d’un audit des services qu’ils dirigeaient.
On pourrait espérer qu’un gouvernement, formé sur la base des seuls critères d’excellence et de bonne moralité, qui se mettrait tout de suite au travail, entraînerait petit à petit les Sénégalais dans son élan. En particulier, les premières mesures qu’il prendrait pourraient contribuer notablement à leur redonner confiance et à se dire : “Avec ce gouvernement, on est au moins sur la bonne voie”. L’une de ces toutes premières mesures consisterait à auditer les comptes de l’État et principalement les sociétés nationales et les collectivités locales. Votre Premier ministre et vous-même l’avez déjà annoncé et il faudrait y procéder dans les meilleurs délais. Cet audit n’a rien à voir avec la chasse aux sorcières. Et puis, s’il existe bel et bien des sorcières parmi nous (et Dieu sait qu’il en existe), ne nous rendrons-nous pas coupables de les laisser continuer impunément leurs œuvres destructrices ? Si des hommes ou des femmes sont convaincus de “sorcellerie”, il faut rapidement les débusquer et les mettre hors d’état de nuire, même si ce sont des proches de l’ancien président de la République. La lumière doit donc être faite sans complaisance sur la situation financière de notre pays. C’est le moins qu’on puisse attendre du nouveau régime qui va se mettre en place.
Oui, Monsieur le Président, nous avons besoin d’être édifiés sur la situation de nos deniers publics gérés sans contrôle pendant plusieurs années. Nous avons besoin d’avoir le cœur net sur les milliards dépensés dans le cadre du Projet de Construction d’immeubles administratifs et de Réhabilitation du Patrimoine bâti de l’État (PCRPE), de savoir ce qu’on a réalisé avec et comment les marchés juteux étaient distribués par les responsables de ce fameux projet, à qui ils étaient distribués et dans quelles conditions. Après que les rapports d’audit vous seront déposés, que la responsabilité des uns et des autres sera établie, vous pourrez alors pardonner si vous pensez que ce sera là la bonne décision. Cependant, le bon sens, la justice sociale et l’équité voudraient que les éventuels délinquants payent, et payent chèrement leurs forfaits. Si ce n’était pas le cas, leur impunité pourrait donner lieu à un dangereux précédent qui ne manquerait pas d’installer chez les nouveaux gouvernants le sentiment que, eux aussi, pourraient se donner à cœur-joie et impunément au détournement de nos deniers. Et ce serait alors dommage, vraiment dommage L’une des leçons que votre Premier ministre et vous-même devrez tirer des rapports de l’audit des comptes financiers de l’État, ce devrait d’accorder la priorité à la prévention. Ce qu’il faudra désormais éviter, c’est de placer les gestionnaires de deniers publics dans une situation où ils peuvent facilement s’adonner à des malversations. Á cet effet, le contrôle a priori doit être rigoureusement renforcé. Le fonctionnement de nos nombreux et presque inutiles organes de contrôle a intérêt à être profondément repensé. L’Inspection générale d’État (IGE) en particulier devrait être sans délai délocalisée de la Présidence de la République, bénéficier de moyens plus importants, jouir d’une plus grande autonomie, avoir la faculté de rendre périodiquement publics ses rapports et saisir, au besoin, directement la justice. Le laxisme dans la gestion des finances publiques auquel l’ancien régime nous a habitués doit être banni à jamais.
Monsieur le Président, il faudra certainement contrôler, mais il conviendra également d’engager des mesures de nature à accroître rapidement et notablement les ressources de l’État. L’impôt peut jouer, à cet égard un rôle important. Jusqu’ici, les salariés des secteurs public et privé mis à part, peu de Sénégalais s’acquittent de ce devoir civique. Les bénéficiaires de revenus fonciers substantiels en particulier arrivaient toujours à emprunter les méandres sinueux des passe-droits pour payer très peu ou pour ne rien payer du tout. L’idéal serait d’identifier, de confondre ces fraudeurs et de leur faire payer les sommes dues à l’État au moins pendant les cinq dernières années. Il faudrait ensuite diminuer l’impôt, en élargir notablement la base et faire payer alors tous les Sénégalais et quelles que soient leurs conditions sociales.
Voilà, Monsieur le Président, quelques mesures qui pourraient être rapidement prises. De nombreuses autres viendraient d’ailleurs les renforcer : pour restaurer l’autorité bafouée de l’État et la discipline, faire retrouver à Dakar le visage d’une capitale moderne en commençant par la débarrasser petit à petit des vieux véhicules qui l’empoisonnent avec ses habitants, notamment les clandos sans aucun papier, diminuer nos ambassades et dégraisser certaines d’entre elles où se prélassent des protégés de l’ancien régime, etc. En particulier, la circulation devra être mieux réglementée et dans les meilleurs délais. Á Dakar, les gens conduisent n’importe comment.
Monsieur le Président de la République, les suggestions de mesures que je me suis permis de vous faire ici, pourraient déjà l’avoir été par d’autres citoyens sénégalais. Peu importe ! La répétition est une vertu pédagogique. Notre pays est peut-être en train de vivre les heures les plus importantes de son histoire. Chaque Sénégalais a le devoir d’apporter sa touche personnelle à l’histoire qui s’écrit sous nos yeux depuis le 19 mars 2000. Vous avez fait un parcours-marathon de vingt-six ans avant d’accéder à la magistrature suprême. Pendant cette longue période, vous avez beaucoup dénoncé, beaucoup condamné, beaucoup promis. Vous êtes maintenant aux affaires et le Sénégal, l’Afrique et la Communauté internationale tout entière ont les yeux rivés sur vous. Vous avez dit de votre prédécesseur qu’il a été perdu par son entourage. Ne tombez jamais dans le même travers. Méfiez-vous des flagorneurs, des larbins, des fainéants et de tous ces thuriféraires du pouvoir qui ont creusé la tombe de bien des Chefs d’État! Á cet égard, ayez toujours présent à l’esprit que le peuple seul vous a élu, qu’il a découvert, cet historique 19 mars 2000, une arme redoutable : l’alternance qui vous vaut aujourd’hui d’être le premier des Sénégalais et qui vaudra peut-être demain, si vos électeurs ne sont pas satisfaits de votre gouvernance, à un autre ou à une autre compatriote d’être élu(e) à votre place. Rappelez-vous sans cesse ces mots de l’homme considéré comme le plus puissant du monde, et de l’Africain le plus célèbre. Bill Clinton disait, en effet, qu’ “il s’inquiéterait le jour où tous ses conseillers auraient un même point de vue sur une question donnée. Le développement d’une organisation passe par sa capacité de générer des conflits positifs, c’est-à-dire d’adopter des positions contradictoires mais où chaque partie est motivée par un seul objectif : le succès et le progrès de l’organisation...
Le 20 décembre 1997, le célèbre prisonnier de Robben Island clôturait, quant à lui, le Congrès de l’ANC de Mafikeng, au Nord-Ouest du pays, en lançant à l’endroit de Tabo Mbeki, son futur successeur à la tête du parti et de la République d’Afrique du Sud, ces mots en guise de testament politique : “Ne t’entoure pas d’hommes prompts à dire toujours oui. Entouretoi, au contraire, de personnalités fortes et indépendantes qui critiquent les décisions prises”.
Monsieurle Président de la République, le très modeste citoyen que je suis n’a pas le toupet, l’outrecuidance d’indiquer au vieux routier de la politique sénégalaise que vous êtes, comment vous allez gouverner le Sénégal. Tout au plus, souhaite-t-il jouer sa modeste partition dans l’installation du nouvel ordre que les Sénégalais ont décidé de sortir des urnes lors du scrutin de ce fameux 19 mars 2000 et exprimer, en même temps, son ferme espoir d’être gouverné bien mieux qu’il ne l’a été pendant les très longues trente-neuf (39) dernières années.
Bonne chance Monsieur le Président et bon courage, car vous en aurez bien besoin !
MODY NIANG,
UN MODESTE CITOYEN
*(Sud quotidien du mercredi 29 mars 2000)
PAR Seydoux Barham Diouf
LA POIGNÉE D’ÉPAULE QUI DIT TOUT
Lors de sa rencontre avec Macky Sall, le langage corporel de Diomaye Faye a révélé une communication habile, empreinte de continuité. Au-delà des apparences, son attitude illustrait l'importance de la communication non verbale dans le monde politique
Par opposition à la communication verbale, la communication non verbale représente l’ensemble des interactions entre des interlocuteurs sans l’usage de mots. Et lorsque l'on parle de « non-verbal », il s'agit d'établir une relation avec autrui sans parole. Elle se construit alors de silences, de gestes, de positions, d'attitudes, passe par les expressions faciales et la tenue vestimentaire pour compléter le message auditif. Ce langage corporel peut être conscient ou inconscient, mais s’y attacher permet de mieux faire passer un message, de le crédibiliser, de lui apporter en puissance, et donc de l'influencer. Mais attention, si la communication non verbale peut engendrer un apport de sens positif, elle peut aussi bien produire le contraire et ainsi décrédibiliser les propos de son émetteur. Ce qui justifie son importance dans la communication.
Ainsi, ce chiffre va peut-être étonner plus d'un, mais Albert Mehrabian, chercheur en psychologie, conclut de ses études que seulement 7% de notre communication passe par le langage verbal. Selon lui, 55% de la communication entre individus est issue de l'expression de nos visages et de nos mouvements corporels. 38% de nos échanges dépendent de la voix, ajoute-t-il. On peut donc comprendre pourquoi il faut y prêter attention, et avoir une bonne lecture de la communication non verbale et des émotions.
Candidat élu dès le premier tour à l'élection présidentielle du 24 mars au Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, a été reçu jeudi au Palais de la République par le président sortant, Son Excellence Monsieur Macky Sall. Lors de cette rencontre, le nouveau président de la République s'est encore illustré de différentes manières dans sa communication, surtout verbale. Vêtu d'un beau boubou africain, Son Excellence Monsieur Bassirou Diomaye Faye s'est présenté à son prédécesseur avec une gestuelle bien maîtrisée. Posture, gestuelle et accoutrement ; tout était donc au rendez-vous.
Cependant, un geste a attiré toute mon attention : la main de Son Excellence Bassirou Diomaye Faye sur l'épaule de son prédécesseur, Son Excellence Macky Sall. Contrairement à ce que beaucoup auraient pensé, ce geste n'est pas anodin. En effet, lorsque quelqu'un serre la main de son interlocuteur, il lui arrive de placer une main sur son épaule. Un geste qui peut paraître anodin, et pourtant, la place de cette main peut permettre de définir la personnalité de la personne et de déterminer quels sont ses sentiments envers son interlocuteur.
Ici, Son Excellence Bassirou Diomaye Faye pose sa main gauche sur l'épaule de son interlocuteur, lui regarde droit dans les yeux avec un petit sourire aux lèvres. Ce geste est chargé de significations dans le contexte de la communication politique. Il exprime un profond respect et une affection sincère du président Bassirou Diomaye Faye envers son prédécesseur, marquant ainsi une continuité harmonieuse dans la transition du pouvoir. Ce contact physique entre les deux présidents, associé au regard direct et au sourire, symbolise également un soutien et un encouragement mutuels, renforçant ainsi les liens interpersonnels et favorisant une collaboration constructive.
De plus, ce geste peut être perçu comme une manifestation de confiance et de connexion émotionnelle, renforçant ainsi la crédibilité et l'authenticité de Son Excellence Bassirou Diomaye Faye aux yeux du public. Enfin, il pourrait également servir de stratégie de communication habile pour projeter une image de calme, de contrôle et de coopération, illustrant ainsi son aptitude à naviguer avec grâce et diplomatie dans les interactions politiques.
Il faut donc noter que la communication non verbale joue un rôle crucial dans la façon dont les messages sont perçus et interprétés, surtout dans le contexte politique. Son Excellence Bassirou Diomaye Faye, par son geste délicat de poser sa main gauche sur l'épaule de son prédécesseur, Son Excellence Macky Sall, lors de leur rencontre au Palais de la République, illustre parfaitement cette notion. Ceux/celles qui le critiquaient lors de sa première sortie doivent donc garder le calme et rester silencieux.ses car il maîtrise bien l'art de la communication visuelle, ou non verbale si vous voulez.
Seydoux Barham Diouf est politiste en formation à l'UCAD.
Par Amadou Tidiane WONE
LA SANCTION DE L’ARROGANCE !
Qui ne sentait monter des profondeurs de notre nation une colère sourde, mais contenue, face aux dérives comportementales insoutenables de responsables de premier plan de la conduite de nos affaires publiques depuis 12 ans ?
Qui ne sentait monter des profondeurs de notre nation une colère sourde, mais contenue, face aux dérives comportementales insoutenables de responsables de premier plan de la conduite de nos affaires publiques depuis 12 ans ? Comme en apesanteur, les caciques du régime sortant ont fait preuve d’une surdité et d’une arrogance outrancière qui auront conduit à la débâcle électorale ayant sanctionné leur candidat.
Et ce n’est que Justice !
Au fil du temps et des VAR, chacune des personnalités concernées aura le temps de revisiter les moments de démesure, conscients ou inconscients, qui auront jalonné sa trajectoire. L’humilité de reconnaître ses erreurs, et d’agir sur soi pour se transformer, est le seul conseil à donner à ces personnes connues et reconnues.
Le peuple souverain a indiqué, clairement, ce qui lui paraît insupportable. Il a décidé de confier son destin à un courant politique jeune, énonçant des valeurs éthiques et morales comme le soubassement de son entreprise politique, et ayant fait preuve de courage et d’engagement au-dessus de la moyenne, pour renverser l’ordre établi. Pastef entre dans l’Histoire politique du Sénégal par la grande porte, seulement 10 ans après sa création.
En effet, Pastef-les-patriotes et la coalition Diomaye-Président viennent de porter au pouvoir, par plus de 2.000.000 de voix le plus jeune chef d’État jamais élu dans notre pays. Le plus inattendu aussi. Celui qui n’aura battu campagne, par substitution, que pour deux semaines. Tous les signes d’un destin qui se déroule envers et contre toute volonté simplement humaine sont réunies !
Le Président élu, Bassirou Diomaye Diakhar Faye symbolise l’expression courante de « la rencontre d’un homme avec son peuple « Il incarne la volonté pure de changement du peuple sénégalais qui, amoureux ( !) du leader charismatique Ousmane Sonko, n’a pas changé d’option au moment où celui-ci a été empêché ! C’est un message profond qui dit aussi que c’est le « PROJET » de Pastef-les-patriotes qui est la locomotive des aspirations au changement. Aussi, la générosité et le sens politique d’Ousmane Sonko, ainsi que la résilience des dirigeants du Parti, auront joué un rôle déterminant dans le contrat de confiance que vient de leur signer la majorité des électeurs.
Et c’est ici et maintenant qu’il faut mériter cet Amour et cette confiance !
Le Président Bassirou Diomaye Faye sera à la hauteur de la tâche ! Parce qu’il est une pousse authentique du cœur de notre nation. Homme de la terre, paysan, fils de paysan, comme il se définit lui-même, il a toujours participé aux cultures hivernales de son village. Aux côtés de ses parents, amis et alliés. Pur produit de la méritocratie sénégalaise, son authenticité est touchante et constitue sa force. Il n’est pas un politicien bling-bling. C’est un homme de devoir. Indifférent aux sarcasmes mondains, il sait le pouvoir du destin et la force de la foi. Il fera un excellent Président de la République du Sénégal. Inch’Allah !
C’est, pour moi, le temps de lancer un appel du cœur à toutes les forces vives de la nation. Surtout les hommes et femmes de ma génération. Nous les vieillissants… Pas encore vieillard ou à peine ! Soutenons le nouveau régime de toutes les forces qui nous restent ! Aidons nos enfants, nos jeunes frères, à réussir leur mission pour le plus grand bonheur de nos petits-enfants ! Sortons des clivages partisans artificiels qui sont autant d’occasions de bavardages à l’infini sans impact sur le réel. Notre peuple veut changer le cours de son destin. Il a voté deux alternances. Il aspire profondément à l’avènement d’une alternative transformationnelle ! Ce rêve est à notre portée si nous le voulons. Tous, ensemble. Que chacun mette la main à la pâte à son niveau. Car, pour changer le Sénégal, il va falloir changer les sénégalais ! Restaurer des valeurs de vivre-ensemble qui soient enracinées dans nos meilleures traditions culturelles. Incarner nos valeurs de civilisation fondamentales, Jom, kersaa, muñ, vivre de la sueur de son front…
Il faut que notre pays se lance dans une vaste campagne de réarmement moral afin de générer une ambition collective. Créer un nouveau contexte social qui épanouisse chacun d’entre nous. Dans l’humilité et l’ardent désir de servir et non de se servir !
Telle est ma foi. Telle est mon espérance ! La ligne d’horizon que je ne quitte jamais des yeux !
Na ñu jóg ngir Senegaal !
Par Ibou FALL
DU FOND DES URNES, LA REVOLUTION
Dimanche passé, le 24 mars 2024, le peuple du Sénégal, sans distinction de sexe, de race, de confession, est allé voter sans fanfaronner, comme il le fait régulièrement depuis 1848, en dépit de bien des émotions
Dimanche passé, le 24 mars 2024, le peuple du Sénégal, sans distinction de sexe, de race, de confession, est allé voter sans fanfaronner, comme il le fait régulièrement depuis 1848, en dépit de bien des émotions. Chacun, selon son intime conviction, exprime alors son sentiment sur ce que doit devenir notre République, le temple des futurs Sénégalais, c’est-à-dire nos enfants, nos petits-enfants et leurs descendances, qui sont les nôtres.
Sauf que, cette fois, parler d’alternance relèverait de l’euphémisme : quand bien même le sang ne gicle pas sur les murs, cette Présidentielle est une authentique révolution… C’est aussi cela, être Sénégalais : on ne fait rien comme tout le monde.
Rien de nouveau : chaque élection, comme à l’accoutumée, avant le jour fatidique, charrie son cortège d’incertitudes, de crises de nerfs, de clowneries et de tragédies. La route est longue, depuis le premier métis député du Sénégal, l’avocat François Carpot, né à SaintLouis en 1862 et élu en 1902, que remplaceront à la suite, Blaise Diagne, Galandou Diouf, Lamine Guèye, Léopold Sédar Senghor…
Comme une curieuse tradition, ils s’allient les uns aux autres, puis se séparent, s’affrontent, se combattent et se succèdent. Ils sont tous de la même engeance.
Malgré les apparences, l’alternance, au Sénégal, est une vieille tradition…
A partir de 1963, la principale élection n’est plus celle du député du Sénégal au Parlement français, mais celle du président de la République. Les alternances font une pause : Léopold Sédar Senghor rempile encore et encore, en 1963, 1968 (après avoir repoussé l’élection prévue en décembre 1967 quand le mandat était de quatre ans), 1973 avec des scores qualifiés de soviétiques.
Seul candidat possible, compte tenu des conditions légales de soumission d’une candidature à la Présidentielle, il finit par se faire une raison : à chaque élection qu’il remporte les doigts dans le nez, quand ce n’est pas le bain de sang, comme en 1963, c’est le séisme social. Les grèves de 1968 et 1973 mènent la République au bord du gouffre...
Il faudra toute la culture républicaine de l’Armée sénégalaise, à laquelle le pouvoir est proposé en 1968, pour que notre démocratie vogue à nouveau vers son destin si tumultueux. Pourtant, partout en Afrique, et même sur bien d’autres continents à travers le monde, guerre froide oblige, c’est la mode des putschs militaires et des forcings totalitaires.
Quand je vous dis que le Sénégal est une perle rare…
Certes, arrive le pluralisme démocratique après 1974, la création du Parti démocratique sénégalais, Pds, sous la houlette de Me Abdoulaye Wade, fait sensation. Mais cela relève plutôt de la cosmétique institutionnelle.
Le «parti de contribution» est bien trop gentil : il demande juste à entrer dans un gouvernement pour réparer les frustrations d’un ancien militant, Abdoulaye Wade, battu dans sa ville natale, Kébémer, par Djibril Ndiogou Fall. Mauvais perdant, Wade claque la porte de l’Ups quand, en plus, le ministère des Finances, sur lequel il fait alors une fixation, revient à Babacar Bâ, qui y remplace Jean Collin, ministre des Finances sept années durant.
Excusez du peu
Dans la foulée des réformes institutionnelles, le Sénégal ayant besoin de siéger aux tables des grandes familles idéologiques mondiales, le fameux concert des nations si cher au Président Senghor, d’autres courants sont tolérés
Le gauchiste repenti Majmouth Diop, revenu de son exil malien, ressuscite le Parti africain de l’indépendance, Pai, au prix d’une gentille pharmacie dans le centre-ville
Le tableau de famille politique sénégalais en est presque touchant lors des élections générales de 1978, qui combinent Présidentielle et Législatives : ça y distingue comme dans un vieux western, le bon, la brute et le truand…
Côté underground, bien sûr que ça grenouille dans la clandestinité…
Ça décompte dans cette sombre smala, un peu n’importe qui : de l’indigné gauchiste, de l’obtus islamiste, du simplet raciste, du terroriste borné, du crétin patenté.
Il faut de tout pour déconstruire une planète, n’est-ce pas ?
Senghor, le timonier de la barque Sénégal, ça fait bien des années qu’il n’en peut plus. L’âge, à n’en pas douter, certes ; la médiocrité ambiante, à mon sens, le pousse davantage à la retraite. Réélu en 1978, il a en tête de céder la place à mi-mandat, début 1981
C’est finalement fin 1980, le 31 décembre, qu’il rend le tablier, élégamment, avec cet art du beau geste que seul le savoir-vivre inspire. Ce n’est pas une alternance, juste une transition.
Son successeur, l’interminable Abdou Diouf, du haut de sa splendeur, croit avoir tout compris : Senghor, ce poète (comprenez, ce rêveur), est un coincé de la démocratie qui demande plus de hauteur. Deux mètres, sans doute. L’administrateur civil à l’esprit simplet, qui se croit démiurge, ouvre les vannes d’un art majeur et complexe que seuls les esprits supérieurs et raffinés devraient exercer : la politique…
Abdoulaye Wade, persuadé de n’en faire qu’une bouchée à la Présidentielle de 1983, ne comprend pas vraiment que le patron de l’époque se nomme Jean Collin. Grave erreur… Il s’y casse les dents en 1988 également.
Comme dit le Wolof, «balâ ngay khàm, khamadi khaw lâ rèy»… Traduction : à force de se planter, on finit par comprendre ce qui se passe.
Le 19 mars 2000, lorsque les chiffres du scrutin tombent, les Sénégalais sont soulagés : enfin, on change de monde… Wade n’est pas Diouf, le destin du pays empruntera donc une nouvelle trajectoire.
Ça fera illusion quelque temps…
C’est juste une nouvelle bande de profitards qui s’installe ; à la différence qu’ils ont plus faim que leurs prédécesseurs. Ceux qui grignotaient peureusement à coups de millions leur font pitié : eux, les nouveaux maîtres du pays, ils le dévorent à grands coups de milliards…
Il faudra douze interminables années pour que la supercherie de l’alternance, la première, soit démasquée. Le panache de Wade sur la scène mondiale, l’aventure des «Lions» en 2002, les rendez-vous planétaires comme l’Oci, le Fesman et autres rencontres mondiales, en plus des autoroutes, échangeurs, immeubles et autres faits glorieux, font croire que le Sénégal est un pays riche…
Sauf que le Sénégalais moyen se sent de plus en plus pauvre tout ce temps. Les milliards dont on parle, il n’en sent même pas l’odeur. Dans les chaumières, ça commence à parler «d’alternoce» dont jouissent les marabouts et pontes politiques.
Le 26 mars 2012, une nouvelle alternance survient.
Arrive un nouveau venu, qui promet d’être sobre et vertueux. Il a une bonne tête de Sénégalais sans aspérité, et son épouse est d’une convivialité touchante. Une «darling kôr» à la simplicité légèrement sophistiquée, dont la générosité est trop exubérante pour être innocente.
Après un calvaire de douze années à supporter des caprices, des lubies qui ne les ont pas rendus plus riches, ni plus heureux, en dépit des nombreux éléphants blancs du Plan Sénégal émergent, les Sénégalais ont décidé de tourner cette page que l’on a surnommée «une deuxième alternance».
Cette fois, ce n’est plus une «alternance», comprenez un acteur de la scène publique qui a fricoté avec tout le monde, selon les saisons, aux affaires comme dans l’opposition
Les Sénégalais ont voté sans trembler pour le candidat qui leur ressemble. Personne ne prend soin de lui, alors qu’il est depuis dix-sept ans dans la Fonction publique et qu’on ne lui reproche rien. Juste qu’il n’a pas le bras long. Comme tous ceux qui se disent qu’ils ont du mérite mais pas de «badiene».
Bassirou Diomaye Faye, banal inspecteur des Impôts, a le plus mince Cv de tous les candidats. Même pas directeur de quoi que ce soit… Il fait pitié, face à un candidat dont le cursus laisse penseur : directeur des Impôts, Dg des Impôts et domaines, ministre des Finances, ministre des Affaires étrangères, Premier ministre.
BDF, pour faire simple, n’a même pas de pédagogie pour expliquer le «Projet».
Ça tombe bien, les Sénégalais s’en foutent comme leurs premières couches.
Ils demandent juste de faire table rase de tout ce qui précède : des politiciens versatiles, qui s’arrangent avec leur bonne conscience tant que leurs privilèges sont saufs depuis une cinquantaine d’années
Dans les pays où les frustrations se règlent à coups de pistolets, ça s’appelle une révolution…
Mais nous sommes au Sénégal, une République pas comme les autres.
Par Danièle DARLAN
L’ESPOIR
Un nouveau président de la République a été élu à l’issue d’élections jugées libres et transparentes, encore une fois le peuple sénégalais a fait la démonstration de sa maturité, et de son sens de la République
Les événements qui se sont déroulés au Sénégal ces dernières semaines ont tenu en haleine l’Afrique entière et en particulier l’Afrique francophone : l’avenir de la démocratie au Sénégal était en train de se jouer et malheureusement certains ont souhaité la voir chuter et même disparaitre afin qu’elle ne soit pas un «mauvais exemple» pour les régimes autoritaires qui souhaitent s’affranchir de ce qui est pour eux un obstacle à leurs intérêts : la démocratie !
Beaucoup d’autres, en revanche, et j’en étais, ont tremblé de voir le Sénégal, terre d’exemple en la matière, reculer et peut être même chuter ! C’était sans compter sur le Peuple sénégalais et surtout son Conseil Constitutionnel qui ont joué pleinement leur rôle et ont préservé la démocratie au Sénégal.
Un nouveau Président de la République a été élu à l’issue d’élections jugées libres et transparentes, encore une fois le peuple sénégalais a fait la démonstration de sa maturité, et de son sens de la République.
Le Président élu, a trois missions principales : il est garant de l’unité nationale et de l’intégrité du territoire ; il a une mission de protection des populations ; il veille au respect de la Constitution, tout ceci sous l’œil vigilant du Peuple et de ses Représentants. Ce qui s’est passé au Sénégal est source de fierté mais aussi de leçons pour l’Afrique mais par dessus tout, source d’espoir pour l’Afrique. La première leçon est l’importance de la culture démocratique dans un Etat, le peuple sénégalais en a fait la démonstration ; il a fait la démonstration de son attachement aux principes démocratiques, de son attachement à son pays le Sénégal, et de sa maturité. La deuxième leçon est l’importance de la justice. Une justice indépendante est le cœur de la démocratie ; sans justice, sans respect des textes et en particulier de la Loi Fondamentale, la démocratie est une coquille vide : le Conseil Constitutionnel sénégalais a rempli cette exigence d’indépendance et a ainsi rempli sa mission. La troisième leçon est l’importance d’une Institution constitutionnelle forte mais également d’Hommes forts au sein de cette Institution, forts dans le sens noble du terme c’est-à-dire, des hommes et des femmes courageux, compétents, intègres et dotés d’une grande sagesse. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’on a coutume d’appeler les membres des juridictions constitutionnelles «les Sages» !
Par-dessus tout, ce qui s’est passé au Sénégal, est source d’ESPOIR pour tous les peuples Africains afin que ceux-ci s’approprient leur souveraineté et comprennent ainsi que les pouvoirs que détiennent leurs dirigeants n’ont qu’une source en démocratie : le mandat que leurs peuples leur ont donné, de gérer et administrer l’Etat en leur nom et selon leur volonté exprimée dans la Constitution. Et c’est pour cette raison qu’ils ont institué un gardien chargé de veiller au respect des termes de ce mandat: la Juridiction Constitutionnelle.
Bravo au peuple sénégalais et à son Conseil Constitutionnel, nous en sommes fiers !