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27 novembre 2024
Opinions
L’ÉPURE DU DROIT ET LA PRÉSIDENTIELLE
À la veille du scrutin de février 2024, les mensonges du Droit sont légion. La transformation de la DGE en juge électoral renseigne sur l’Etat féodal au Sénégal depuis 2012. L'élection à venir a pour enjeu la fin de l’Etat colonial sénégalais
Plaidoyer pour une présidentielle transparente, apaisée et inclusive
Questionner l’état du Pacte républicain sénégalais à l’aune du Droit est une mission naturelle de l’universitaire. Chevillé à la temporalité du corps social, le savant, telle une ascèse, porte en lui le poids d’une exigence : celle de rétablir la vérité du Droit dans sa pureté lorsque celui-ci fait l’objet d’assauts répétés et de violations politiciennes assumées.
L’universitaire, quand le contrat-social se déchire au gré de logiques d’appareils et d’enjeux de pouvoir ou de risques de confiscation de la volonté générale, doit inlassablement faire profession de vérité : assumer sa vocation sociale, scander sa part de vérité, s’ériger en voix de la vérité brute du Droit, constituer un rempart contre les contre-vérités, les mensonges, les élucubrations, les interprétations fourbes pour flatter le Prince. L’universitaire cesse d’être fonctionnaire pour faire mission de société. Le savant organique est l’ennemi de la vérité sociale.
La neutralité axiologique, rabattue telle une antienne par ceux dont la vérité du Droit dérange, n’est point une impartialité du scientifique universitaire. Elle n’est pas non plus une forme lâche de neutralisme ou d’impartialité devant les atteintes du Droit. Elle ne signifie pas davantage l’absence d’engagement. Le savant est celui qui prête sa science au service de la société. Il est celui qui façonne le réel et construit les imaginaires autour d’une identité nationale ou d’un récit collectif.
Le savant dit le Droit lorsque la communauté des gens du droit, à l’instar des universitaires, détourne le regard sur un mal-démocratique innommable ou transforme le Droit, par une magistrature politisée, en instrument de conspiration (Mamadou DIA en 1962) ou de liquidation (Omar Blondin Diop en 1973). Que de coups de boutoirs au Droit depuis les indépendances !
Que d’interpellations de la communauté du savoir juridique !
La posture neutrale est la négation même du chercheur. L’existence d’un chercheur neutre est aporétique ; cela relève du non-sens et de l’opportunisme intellectuel des serviteurs dociles du pouvoir. La neutralité axiologique du chercheur postule, à rebours, une fidélité à toute épreuve à l’épure du Droit et aux valeurs qui le subsument, le définissent et l’essentialisent.
Dans toutes les communautés politiques, l’élection présidentielle ne saurait être la panacée : elle prépare au consensus national par des opérations inclusives et sincères. Paradoxalement, elle porte les germes irrédentistes d’une fracture sociale lorsqu’elle trahit la volonté populaire. L’élection présidentielle de 2024 au Sénégal ne fait pas exception à la règle et interroge sur la vitalité du contrat de société sénégalais, ses ressorts profonds, sa pérennité dans le temps long, son existence selon qu’il se réhabilite par une élection juste ou qu’il périclite par une élection sélective. Les élections au Kenya en 2007, en Côte d’Ivoire en 2010, au Gabon en 2023 démontrent qu’un scrutin présidentiel peut participer à la montée de la conflictualité sociale lorsqu’il est frappé d’insincérité.
Dire le droit, le penser et l’expliquer, dans notre temporalité politique, ne relève pas d’une entreprise d’interprétation. L’interprétation, érigée en technique de fabrique d’un droit sous commande politique, pratique des juristes-politiciens, des courtisans ou des militants alimentaires, est une atteinte à l’épure du Droit. Interpréter lorsque le droit ignore toute niche d’insécurité, tout interstice douteux, c’est mentir sur le Droit. Au sortir des actes préparatoires à l’élection présidentielle du 25 février 2024, les mensonges du Droit sont légion.
Mentir sur le droit, c’est entretenir un amalgame sur l’état de contumace en violation de la lettre et de l’esprit de l’article 307 Code de procédure pénale : distinguer là où la loi ne distingue pas, considérer que le contumax doit être arrêté pour les mêmes motifs pour cesser d’être recherché, opérer une divisibilité entre la personne arrêtée et la personne qui continue d’être recherchée etc.
Mentir sur le droit, c’est caporaliser l’administration d’Etat, la DGE en l’occurrence. La transformation de la DGE en juge électoral de recevabilité des candidatures n’est pas seulement un dépassement de compétences, une atteinte à la séparation des pouvoirs ou une immixtion dans le champ des attributions du Conseil constitutionnel. Elle renseigne sur l’Etat féodal au Sénégal depuis 2012. Le mensonge est constitué par le détournement de sens des articles L. 47 al 4 du Code électoral et 36 et 74-2 de la Loi organique sur la Cour suprême relativement au caractère non-suspensif du pourvoi en cassation en la matière.
Mentir sur le droit, c’est cautionner le pourvoi en cassation introduit par l’AJE alors même qu’il n’en a pas les compétences aux termes du décret n° 70-1216 du 7 novembre 1970 portant création d’une agence judiciaire de l’Etat et fixant ses attributions. Dans l’orthodoxie de ses attributions, l’AJE n’a pas intérêt à introduire un pourvoi contre l’ordonnance du Tribunal de Ziguinchor rendue le 12 octobre 2023. Ses compétences de représentation de l’Etat sont strictement limitées aux décisions ou jugements avec une incidence financière manifeste. La matière au titre de laquelle il intervient, les problématiques avec une excroissance financière, ne saurait profiter d’une interprétation libérale ou dynamique attentatoire aux libertés individuelles.Au demeurant, l’AJE est rattaché organiquement au ministère des Finances et des Affaires économiques (Article 1er du décret précité). L’article 2 circonscrit son intervention aux actions dans lesquelles l’Etat peut être créancier ou débiteur. Les poursuites qui lui sont échues sont celles relatives au recouvrement des créances de l’Etat notamment. On est loin de la contestation de la radiation qui ne présente aucune proximité, même indirecte, avec l’état des finances de l’Etat. L’AJE a agi ultra-vires en la matière. La matière des droits fondamentaux (liberté d’expression, droit au suffrage, compétition électorale…) est d’interprétation stricte en ce que les droits fondamentaux de l’individu ne sauraient souffrir d’une interprétation dérogatoire consubstantiellement attentatoire aux droits des individus. La puissance publique, débitrice de la réalisation des droits fondamentaux reconnus aux administrés et aux citoyens-électeurs, ne peut profiter d’une interprétation libérale au détriment des individus.
Mentir sur le droit, c’est procéder à la dissolution-nomination de nouveaux membres de la CENA. Le décret du 3 novembre 2023 n’a pas respecté les formalités substantielles nécessaires de consultation des institutions, des associations et des organismes (barreau, société civile, universitaires…) prévues à l’article L. 7 du Code électoral. Il a procédé, en toute illégalité, au renouvellement de l’intégralité des membres de la CENA. De surcroit, il vise des membres pourtant connus pour avoir participé à des initiatives politiques en faveur de la réélection du président de la République en même temps qu’il viole l’article L. 9 du Code électoral qui dispose qu’ « Il ne peut être mis fin, avant l’expiration de son mandat, aux fonctions d’un membre de la C.E.N.A que sur sa demande ou pour incapacité physique ou mentale, dûment constatée par un médecin désigné par le Conseil de l’Ordre, après avis conforme de la C.E.N.A ». A ce titre, et sans être exhaustif sur les nombreuses illégalités constatées, Monsieur Seydou Nourou BA, nommé comme membre de la CENA par le décret n° 2018-1930 du 9 octobre 2018, ne voit son mandat expirer qu’au mois d’octobre 2024. Le président de la CENA, Abdoulaye Sylla, fut nommé membre du Conseil constitutionnel par le décret n° 2018-2126 du 6 décembre 2018. Il ne pouvait donc légalement être nommé dans cette nouvelle CENA de circonstance politicienne.
Mentir sur le droit, c’est apprêter une vertu pédagogique aux décisions de la CJCEDEAO. Juridiquement, une décision de la CJCEDEAO favorable à Monsieur Ousmane Sonko le rétablit définitivement dans ses droits et ce, quelle que soit la décision rendue par la Cour suprême ce jeudi 17 novembre 2023. Les décisions de la CJCEDEAO sont immédiatement exécutoires et ne sont pas susceptibles d’appel. Le statut de la Cour étant un traité international, il intègre le champ des Conventions prévues à l’article 98 de la Constitution. Dans sa décision du 8 novembre 2010, la CJCEDEAO avait ordonné la libération de l’ancien Président Mamadou Tandja considérant que sa détention était illégale et arbitraire. La Cour considère que « les Etats membres de la CEDEAO ont l'obligation d'exécuter les Décisions de la Cour conformément aux articles 22 du Traité Révisé et 24 du Protocole Additionnel relatif à la Cour.
Qu'à ce titre les Etats doivent prendre toutes les dispositions nécessaires pour se conformer à ces dispositions ; qu'ainsi la Cour n'a point besoin d'ordonner l'exécution immédiate de ses propres décisions qui sont exécutoires à l'égard des Etats dès leur notification ». Est-il besoin d’ailleurs de rappeler que le Sénégal a installé auprès du ministère de la justice l’autorité chargée de suivre l’exécution des décisions judiciaires de la CJCEDEAO ?
Mentir sur le droit, c’est transformer l’Etat républicain en Etat-policier (dissolution de parti politique, interdictions administratives de manifester, étouffement de la liberté d’expression, rafles policières, arrestations pour délit d’opinion, barricades de domiciles…). En somme, l’état du Droit, corrélé à l’élection présidentielle à venir, n’a jamais autant été l’objet de luttes sociales et politiques, avec en creux, l’idée de la fin d’un cycle ou d’un paradigme passéiste de gouvernance néo-féodale ou coloniale. L’élection présidentielle à venir a pour enjeu la fin de l’Etat colonial sénégalais avec à sa tête ses derniers pions politiques vassalisés. L’Etat de droit n’étant pas une délibération décrétale mais sociale, notre ère démocratique est celle de la contestation protéiforme après que naquirent, difficilement, et dans un autre contexte, le multipartisme limité à quatre, le multipartisme intégral, l’alternance de 2000 et celle trahie de 2012.
L’enjeu est la réhabilitation du Droit confiée aux cinq juges de la Cour suprême que le destin a propulsés comme porte-étendards d’un souffle démocratique qui demande à éclore. Ce qui reste de la démocratie, pas grand-chose, est suspendu à la décision de la Cour suprême. En quelque sorte, ces juges feront l’histoire, ou, selon, la déferont. Ils la feront en ne participant pas à la transformation du droit en outil de conspiration politique, en disant NON à un Etat-policier tout entièrement organisé pour la déchéance des droits civils et politiques d’un citoyen-électeur.
par DIOP Blondin Ndèye Fatou
LETTRE AUX PARTENAIRES ET AMIS DU SÉNÉGAL
Dans ce Sénégal de 2023, un signal de média peut être coupé comme un robinet. Sommes-nous sous le régime du flagrant délit continu ? Entendez nos alertes quand nous disons que c’est maintenant qu’il faut agir
Chers amis et partenaires du Sénégal au moment où je vous adresse ces propos, Ousmane Sonko, tête de file incontestable de l’opposition, est sous liens de la détention depuis le 28 juillet ; les motifs et conditions de sa détention lui ont fait observé plus de 40 jours de grève de la faim et deux séjours en réanimation. C’est le seul mode de résistance qui lui reste face au rouleau compresseur judiciaire que le régime de Macky Sall a enclenché depuis mars 2021 pour l’empêcher de briguer le suffrage des sénégalais.
D’un autre côté nous apprenions il y’a une petite semaine que le titre de « Envoyé spécial du Pacte de Paris pour la Planète et les peuples » est la mission que le président du pays partenaire stratégique du Sénégal voudrait confier au nôtre dès la fin de son mandat en cours. Cela ressemble à s’y méprendre à un satisfecit pour sa décision de renoncer à une 3ème candidature.
Passons sur tout ce que cet acte symbolise de la part de l’émetteur comme du receveur et sa résonance auprès des peuples dits francophones, pour entrer dans le fond du sujet qui nous préoccupe aujourd’hui.
Il s’agit d’interpeler ceux qui ont des intérêts au Sénégal mais aussi les nombreux citoyens du monde qui aiment ce pays à l’hospitalité légendaire et jadis havre de paix.
De fait, le pays traverse des moments critiques et a plus que jamais besoin de voir ses partenaires et amis s’impliquer dans la restauration de la justice, de la paix et de la démocratie.
Chers partenaires institutionnels, nous sommes sûrs que vos représentations diplomatiques vous tiennent régulièrement informés de tout ce qui se passent sous nos cieux. Permettez-nous tout de même de mettre en lumière un certain nombre de faits regrettables qui cristallisent notre inquiétude à quatre mois de l’élection présidentielle.
Au moment où nous parlons des milliers de jeunes hommes et femmes mais aussi des enfants et même des nourrissons empruntent des voies dangereuses pour quitter le pays. On nous dit qu’au moins 2000 d’entre eux sont morts de froid, de faim ou par noyade; des villages entiers sont endeuillés et des secteurs d’activité sinistrés suite à cet exode sans précédent. Parmi eux, certains ont perdu l’espoir de voir leur leader libre de participer à la prochaine élection présidentielle. Jusqu'ici aucune solution sérieuse n’a été mise en place par le gouvernement.
Nous sommes le 16 novembre et la prestigieuse université UCAD ne dispose pas de locaux adaptés aux cours en présentiel suite aux dégradations occasionnées par les manifestations de juin dernier ; la proposition de cours en ligne n’intègre pas le défaut d’électricité dans certaines zones sans compter les restrictions du réseau internet en cas de trouble politique.
Dans ce Sénégal de 2023, un signal de média peut être coupé comme un robinet et un journaliste cueilli devant ses collègues pour un post qui date de 2 ans. Sommes-nous sous le régime du flagrant délit continu ?
Etes-vous informés que la DGE, dans l’impunité la plus totale, a refusé d’exécuter une décision de justice réputée favorable à Ousmane Sonko ?
Savez-vous qu’un décret est venu fouler aux pieds le règlement, arraché après d’âpres négociations entre pouvoir et opposition en 2005, d’une institution indépendante ? Nous parlons de la CENA. De surcroît, le régime actuel a catégoriquement refusé de nommer une personnalité neutre pour organiser l’élection de février, revenant par ce geste sur un acquis obtenu de haute lutte.
Savez-vous que depuis le 12 mai toutes les manifestations politiques de l’opposition sont interdites sans motif constitutionnel.
Avez-vous remarqué les nombreux effectifs des FDS surarmés et pré positionnés comme si nous étions dans un pays en insurrection alors que des activités sportives et de loisir rassemblent régulièrement des milliers de jeunes dans une ambiance festive et que le parti au pouvoir draine des centaines de militants mobilisés pour accueillir le président de la république durant sa tournée dite économique ?
Savez-vous que depuis mars 2021 des milliers de jeunes sont en prison (étudiants, vendeurs ambulants, enseignants, journalistes, activistes, humoristes). Et que depuis cette date, les manifestations ont occasionné une cinquantaine de morts sans qu’il y ait enquête et je ne parle pas des blessés.
Leur seul tort : une supposée appartenance ou sympathie à un parti stigmatisé, le Pastef. Ce parti a d’ailleurs été dissout par décret présidentiel en dehors de tout processus judiciaire. Il faut réviser les annales des années 60 pour trouver une jurisprudence!
Savez-vous que son Leader, Ousmane Sonko, a été séquestré durant 55 jours sans aucune notification venant de la justice ? et qu’il a été jugé par contumace alors qu’il était sous les liens de la détention ?
Chers partenaires et amis du Sénégal,
A l’heure où nous parlons aucun candidat de l’opposition ne dispose du fichier ni de la carte électorale, contrairement à ceux du pouvoir qui, en plus, détiennent exclusivement le sabre du logiciel de parrainage ? Et on ne parle pas des milliers de primo votants qui n’ont toujours pas reçu leur carte d’électeur!
Ce vendredi 17 novembre, la Cour de justice de la CEDEAO rendra sa décision sur la réintégration de Ousmane Sonko sur les listes de électorales ; il se dit que la ministre de la justice a déjà donné sa position de ne pas obtempérer s’il advenait une décision favorable à Ousmane Sonko. Ce même jour, la Cour Suprême sénégalaise pourrait rendre une décision qui exclura le même Ousmane Sonko, qui porte l’espoir de millions de sénégalais, de la possibilité d’être candidat pour la prochaine élection ; la conséquence serait la perte définitivement tous ses droits civiques ! Excusez du peu !
Penchez-vous dans les dossiers judiciaires de Ousmane Sonko et vous y verrez des charges toutes plus fallacieuses et loufoques les unes que les autres ; vous y verrez la main du parquet qui parfois alourdit les charges, parfois fait appel alors qu’il n’est pas le plaignant ; vous constaterez une accélération ou un retard inexpliqué des procédures.
La liste des maux est longue et l’on se demande comment en est-on arrivé à ce niveau de déconfiture de nos institutions et de manque de fair-play politique ? Sans avoir les chiffres fiables, on peut aussi parier que ce climat délétère a un impact économique dans le pays qui figure parmi les 25 les plus pauvres du monde sans compter son attractivité.
Alors, la CEDEAO, l’UA, l’UE, l’ONU et ses agences mais aussi les centaines d’ONG vont-elles ignorer tout ce parcours subi par l’opposition, le traitement ignoble infligé à Ousmane Sonko, le mépris en amont des règles consensuelles du processus électoral et féliciter les organisateurs au soir du 25 février 2024 ?
Non, mesurez ce qui se joue ici et maintenant.
Entendez nos alertes quand nous disons que c’est maintenant qu’il faut agir et créer les conditions de retour de la justice et de l’état de droit. Il arrive un moment où le silence devient mensonge et complicité. Vous détenez en partie la solution. Les avocats sont sur le pied de guerre et usent de tous les recours judiciaires dont Ousmane Sonko peut se prévaloir. L’opposition et la société civile sénégalaise s’activent pour contrer tous les pièges tendus par le régime en place. Nous attendons de la communauté internationale qu’elle joue sa partition.
Madame Diop Blondin Ndeye Fatou Ndiaye est Coordonnatrice adjointe de la plateforme Avenir Sénégal Bii Ñu Bëgg, membre du LACOS.
PAR Tamsir Anne
LE COMPTE À REBOURS
EXCLUSIF SENEPLUS - Comment une élection apaisée pourrait-elle se tenir dans un climat de suspicion et de défiance entre principaux acteurs ? Fermer les yeux et se taire ne peut être une réponse à la détresse de plus des trois-quarts de la population
Au beau milieu d’une représentation théâtrale l’incendie un soir se déclara. Les acteurs pris de panique accoururent précipitamment sur la scène pour avertir le public que le théâtre avait pris feu. En cœur celui-ci à se mit rire de joie. Non ce n’est pas une blague reprirent les acteurs, le théâtre a bien pris feu, sauvez-vous dirent-ils en s’échappant de la scène. Les applaudissements fusèrent de nouveau. Cette histoire empruntée au philosophe danois Soeren Kierkegaard décrit bien malheureusement à peu près la situation actuelle du Sénégal. Depuis deux ans au moins le pays est plongé dans une crise qui a ouvert une grande brèche dans tout le corps social. Ni les alertes de toutes parts, ni les appels incessants au dialogue, ni même le sang versé ne semble impressionner outre mesure ceux dont la responsabilité est de préserver et de garantir la paix civile. Cette attitude répond-elle d’une volonté forcenée de rester à tout prix au pouvoir ou est-ce le signe que ceux qui ont laissé le malin génie s’échapper de la bouteille ne peuvent plus désormais le contrôler.
Tout ou presque est parti d’un pari on ne peut plus paradoxal dans une démocratie de réduire l’opposition à sa plus simple expression. Pourquoi et comment ce dessein a pu se former est une question fastidieuse à laquelle l’histoire politique du Sénégal trouvera peut-être un jour une réponse rationnelle. En attendant l’imbroglio politico-juridique née de cette volonté a fini de plonger le Sénégal dans une impasse politique dont il sera difficile de sortir. En effet à trois mois d’une élection plus que déterminante pour l’avenir du pays plusieurs graves questions restent encore sans réponse.
Quand et comment le thriller qui a fini de jeter le discrédit sur les deux piliers de notre architecture démocratique à savoir la justice et l’administration de se dénouera t- il ? Comment une élection apaisée pourrait-elle se tenir dans un climat de suspicion et de défiance instinctives entre les principaux acteurs ? Quelle serait la légitimité d’un gouvernement issu de telles élections et comment compterait-elle gouverner au-delà de février dans la stabilité et la confiance nécessaires pour relever les énormes défis qui attendent le pays ?
À toutes ces questions angoissantes vient s’ajouter le contexte tragique des départs massifs et suicidaires d’une jeunesse désemparée, désabusée et férocement désespérée qui cherche par tous les moyens à quitter la barque : au prix presque certain de leur vie. Tout sauf continuer de vivre dans son propre pays… même la mort vaut mieux à ses yeux que de rester. La tragédie de ces milliers de jeunes qui empruntent les chemins d’une mort certaine n’est pas une question de choix ou de convenance personnelle mais le symbole patent d’un formidable échec collectif. Ni la froide rationalité des chiffres qui tentent de prouver la réussite de la politique économique et sociale de l’état, ni l’indifférence ne pourront l’effacer. Ils sont bien là ces millions de jeunes qui pour paraphraser Mallarmé tètent le désespoir comme ils tétaient le rêve il y’a juste une douzaine d’années.
Fermer les yeux et se taire, fermer les yeux et sévir ne peut être une réponse à la détresse de plus des trois-quarts de la population sénégalaise ! Pour combien de temps encore pourra-t-on continuer de feindre l’indifférence, d’ignorer, voire de nier l’évidence du danger de désagrégation sociale qui menace le Sénégal. Ses signes avant-coureurs se manifestent dans des scènes de barbarie et de violence extrême allant jusqu’à la profanation des morts, des affrontements meurtriers sur fonds de discours sectaire, ... Tant de dérives ont mené le pays à l’impasse politique et au risque d’implosion sociale. L’urgence de trouver une issue commande d’aller au-delà des calculs politiques à court terme pour enfin briser le cercle vicieux des espoirs brisés et l’éternel apprentissage du b.a.-ba de la démocratie. Il faudra bien prendre le mal à la racine dont le diagnostic est connu de tous : la démocratie sénégalaise ou l’idée qu’il en reste souffre de l’hypertrophie des pouvoirs de l’exécutif notamment du président de la République qu’il urge de limiter et contrôler. Une réelle séparation des pouvoirs et des réformes conséquentes pour cimenter et pérenniser l’indépendance de la justice qui est l’épine dorsale de toute démocratie s’imposent plus que jamais. C’est à cela en priorité que tous ceux qui aspirent à diriger ce pays devraient solennellement s’engager. Sinon les mêmes causes produisant les mêmes effets on risque encore une fois de retraverser le désert de l’indifférence. Indifférence devant l’injustice, indifférence devant la destruction systématique de tous les acquis démocratiques que des générations de sénégalais ont conquises dans une longue et âpre lutte. Indifférence devant l’extrême souffrance du peuple qui a fini même de désespérer d’un discours d’apaisement et de réconciliation.
Mais peut-être est-il encore temps, dans un sursaut de lucidité et de grandeur, que ceux qui ont la lourde de responsabilité de mener le destin de ce pays se ressaisissent enfin. Le peuple sénégalais au nom de qui tout jugement est rendu n’attend ni plus ni moins que le droit prévale, que les libertés individuelles et collectives, notamment le droit de manifester, garanties par notre constitution à tous les citoyens sans discrimination aucune soient rigoureusement respectés. L’horloge tourne déjà… et à grand coups…
Par Ibou FALL
MACKY SALL, LA VIE APRES LE 2 AVRIL 2024
Quand Macky Sall, le prophète du Plan Sénégal émergent, remet à son successeur les clés de son ancien pied-à-terre de l’avenue Léopold Sédar Senghor, il n’a qu’une fixation : sa grasse matinée du lendemain. I
Quand Macky Sall, le prophète du Plan Sénégal émergent, remet à son successeur les clés de son ancien pied-à-terre de l’avenue Léopold Sédar Senghor, il n’a qu’une fixation : sa grasse matinée du lendemain. Il se voit déjà, le lendemain 3 avril, battre ses lourdes paupières vers treize heures, histoire de s’habituer à la lumière du jour, avant de s’étirer paresseusement et réclamer d’une voix ensommeillée, le petit casse-croûte gargantuesque qui le trouvera sur son lit…
A quoi bon surveiller sa ligne, dorénavant ?
Les propositions de carrière internationale s’amoncellent sur sa table de chevet et il se donne un trimestre pour y jeter un premier coup d’œil ; pourquoi pas une petite croisière à travers l’Atlantique, loin des vicissitudes sénégalaises, pour y réfléchir durant un autre trimestre, avant de choisir le maroquin moelleux d’une institution internationale à pile ou face ?
Pour le moment, tout ce qu’il sait, c’est qu’à soixante-trois piges, il peut desserrer la ceinture et la cravate, passer la journée en pyjama et arrêter de se teindre les cheveux toutes les semaines.
Le stress, les angoisses, les réunions du matin au soir, sept jours sur sept, il a tout refilé à son successeur, lequel n’a pas l’air de savoir ce qui l’attend vraiment. Le nouveau Président est plutôt pressé de prendre ses aises au Palais, faire le décompte des fonds secrets et éponger les quelques dettes que sa longue traversée du désert le force à contracter alors que tout semble perdu, fors l’honneur.
Macky Sall ne compte pas se gêner pour rattraper ses centaines d’heures de sommeil en retard…
Et donc, quand il se couche, ce soir du 2 avril 2024, il n’y a dans sa chambre ni alarme ni réveil. Rien qu’un silence de cathédrale et quelques ronflements voisins. La prière du petit matin, s’il en a la force, c’est bien ; sinon, ben, ça attendra.
Il a tout faux, le pauvre !
Il est à peine six heures du matin lorsqu’un brouhaha de fin de monde le réveille en sursaut. Dans la rue, il y a comme des bruits de soulèvement populaire. L’ancien Président a à peine le temps de sortir du lit que Marième Faye Sall déboule dans la chambre, le foulard en bataille, l’air atterré. Il a intérêt à se secouer : dehors, il n’y a pas moins d’un millier d’âmes en peine qui retiennent leur souffle en attendant de revoir sa figure rassurante, entendre ses propos réconfortants. Certains menacent de s’immoler par le feu s’il ne sort pas ; d’autres, moins violents, arborent des pancartes qui demandent par où se trouvent les chemins du Nicaragua.
Il n’y a, dans cette petite foule amassée sous sa fenêtre à Mermoz, que des tronches familières. La veille, jusqu’à vingt heures, ce sont encore des ministres avec ou sans portefeuille, des secrétaires d’Etat, des présidents de Conseil d’administration, des directeurs généraux, des ministres-conseillers, des conseillers spéciaux, des conseillers techniques, des chargés de mission, des envoyés spéciaux, des Dage, des Sg…
C’est la Rts, dans son édition de vingt heures, qui balance la tuile dès l’ouverture du Journal télévisé : en un seul décret, le nouveau chef de l’Exécutif met une croix définitive sur douze années de bamboula, malheureusement trop courtes.
A vingt-et-une heures tapantes, des fonctionnaires à la mine patibulaire et la parole rare, débarquent chez ces malheureux nouveaux pauvres pour reprendre les clés de leurs bureaux et véhicules, assortis d’un préavis de déménagement des logements de fonction.
Ils ont une semaine pour vider les lieux de bon gré. Passé ce délai, des huissiers accompagnés de gendarmes harnachés de la tête aux pieds viendront défoncer les portes et jeter jusque leurs matelas dans la rue.
Quand l’Administration veut faire vite, son efficacité en devient redoutable…
Et donc, ils sont là parce qu’à part le Bon Dieu, ils ne peuvent compter que sur Macky Sall. D’ailleurs, tout ça est de sa faute : ils lui en veulent même, parce qu’il est fortement responsable de cette tragédie… On le lui ressasse depuis 2019, il a droit à un deuxième mandat de cinq ans, qui courrait de 2024 à 2029. Qu’est-ce qu’il a à lâcher l’affaire comme ça, sans prévenir : avec une rallonge de cinq ans, ils planqueraient de quoi voir venir sereinement, au moins une retraite méritée et paisible.
Certes, la majorité à l’Assemblée est perdue, de même que quelques grandes villes depuis 2022. Mais avec Macky à l’affiche, ça se retrouve au moins au deuxième tour, si ça ne passe pas par «coup Ko» au premier, en, euh, tripatouillant un peu. Un miracle, ça peut toujours survenir quand on s’y attend le moins, n’est-ce pas ? Quoi, sa parole d’honneur ?
Le parrainage, ils n’en feraient qu’une bouchée ; la caution également : au pire des cas, ça se puise dans les caisses à portée de mains… Qu’est-ce qui lui passe par la tête quand l’ancien ambassadeur du «Yonou Yokouté» décide de passer la main poliment au lieu de batailler le couteau entre les dents jusqu’au dernier bulletin de vote ?
On soupçonne un lobbying de sa famille, Marième Faye Sall en tête.
Ces gens-là ne pensent qu’à leur petit confort. Trop facile : lui, il est déjà casé avant même de rendre le tablier. Mais eux, les pontes du régime Bby, qui pense à leurs familles, leurs nouvelles habitudes, leurs obligations ?
De 2012 à aujourd’hui, il y en a qui muent entre-temps de monogames contrariés à polygames sans limites. Ils sont accros depuis à la climatisation permanente dans le salon, la chambre, la voiture, le bureau. Leur vie mijote depuis une décennie à basse température, dixsept degrés de préférence : ils font quoi maintenant ? Ça fait pas mal de temps qu’ils voyagent naturellement en business, se sapent et se chaussent sur les grands boulevards parisiens et exhalent des parfums haut de gamme…
Les plus âgés de leurs progénitures, qui connaissent les affres de fins de mois compliquées, et ont la mémoire courte, auront du mal à revenir à la vie frugale d’avant-. Ce sont les enfants de la âwo (mais dont ça se fout comme de son premier caleçon) qui connaissent ça dans une vie antérieure et y retourneront au besoin à grands coups de pieds dans le postérieur.
êl, les dôm’ou madame nés après la honte, sous la clim, en clinique et ne connaissent de vacances qu’à Dubaï, parlent fkhonçais avec l’accent wèsh-wèsh, on leur explique quoi ? Macky Sall gàddou na àkh !
CLIMAT BI
Kenn xamul lii lanla ! Des fois mu tang. Des fois mu sedd. Le climat de Dakar est comme celui qui a soufflé entre mars et juin derniers, entre Sonko et l’Etat.
Kenn xamul lii lanla ! Des fois mu tang. Des fois mu sedd. Le climat de Dakar est comme celui qui a soufflé entre mars et juin derniers, entre Sonko et l’Etat. Entre-temps, l’homme de Keur Gorgui est envoyé au frigo, très chaud de Sébikotane. Ce vendredi aussi, avec cette montée de la tension, on ne sait pas ce qu’affichera le thermomètre après les verdicts de la Cour suprême et de la Cour de justice de la Cedeao. Mais puisque ndox mu tang fait l’affaire de Woyofal, nasi Yalla sotti ndox mou sedd ! Amine !
par Bamba Thiobane
LA RECREATION EST TERMINEE, LE CHANTAGE NE PASSERA PAS !
Les sorties malencontreuses, infondées et injustifiées de tenants du régime en l’occurrence Souleymane Jules Diop et Abdoulaye Bibi Baldé relèvent de tentatives suicidaires de messieurs en mal de légitimité
Les sorties malencontreuses, infondées et injustifiées de tenants du régime en l’occurrence Souleymane Jules Diop et Abdoulaye Bibi Baldé relèvent de tentatives suicidaires de messieurs en mal de légitimité et qui, par le biais de ces élucubrations espèrent un repositionnement au sein de la taskforce « mackyste », maître d’œuvre de l’élection future d’Amadou Ba à la magistrature suprême!
Le Premier ministre Amadou Ba assure et rassure. Nul n’est mieux outillé que le Président Sall pour apprécier sa stature d’homme d’État, d’homme de valeurs, de consensus, très expérimenté car l’ayant pratiqué de 2012 à 2023!
Amadou Ba fait partie des hommes qui ont généré le PSE et participé à sa mise en œuvre. Quoi de plus logique que d’accompagner le Premier des ministres pour parachever l’énorme travail entamé depuis l’avènement de la seconde alternance qui, sans nul doute, vivra les dix glorieuses, une manière de qualifier cette période 2024-2034, une décennie qui verra le Sénégal quittait la zone des pays moins avancés (PMA) pour celui des pays émergents avec une croissance à deux chiffres matérialisée par un développement infrastructurel, technologique et industriel sans précédent avec un plein emploi au profit de cette jeunesse vaillante, désireuse d’un mieux-être.
Très loin des turpitudes et autres comportements malhonnêtes et inopportuns d’un trotskiste et autres responsables de l’Apr mal en point, le candidat Amadou Ba est résolument tourné vers l’accomplissement des missions à lui assignées par le chef de l’État à la tête du gouvernement et d’assurer la continuité de l’œuvre de construction nationale à la tête du Sénégal une fois élu au soir du 25 février 2024!
par Jacques Habib Sy
QUELQUES REPÈRES DANS LA PENSÉE POLITIQUE DE CHEIKH ANTA DIOP
EXCLUSIF SENEPLUS - La question coloniale en Afrique noire française est, quant au fond, une question paysanne. Le phénomène de l'aliénation culturelle est une donnée effroyable caractéristique des élites africaines de l'après-guerre (2/5)
Dans les colonies, ayant à peine formulé une ligne d'action toute tournée vers la satisfaction des "besoins matériels et moraux" de ses adhérents, le syndicalisme autochtone est pris au piège du réformisme qui gangrène la conscience de classe et la combativité des syndicats métropolitains. Les syndicats africains ne sont en général qu'une excroissance, plus précisément l'appendice des syndicats métropolitains dont ils épousent les mots d'ordre et les priorités stratégiques.
La Confédération Générale des Travailleurs (CGT) contrôlée par le PCF parraine la création d'unions territoriales syndicales qui lui sont affiliées. Presque immédiatement après, la Confédération Française des Travailleurs Croyants (CFTC) voit le jour. Force Ouvrière impose sur le terrain la création d'un syndicat (CGT-FO) qu’il contrôle étroitement. L'enjeu de ce formidable jeu de quilles sur l'échiquier syndical, c'est l'encadrement, autant dire la tentative de récupération et parfois de manipulation d'une centaine de milliers de militants en Afrique Occidentale Française. Sur ce total, et devant la faiblesse chronique de l'industrialisation légère mise sur pied dans les colonies, la classe ouvrière proprement dite ne représente qu'environ 25 000 personnes, cependant que les "fonctionnaires" ou employés de l'administration en constituent l'écrasante majorité. La perte de vitesse enregistrée par les partis politiques rend alors d'autant plus aiguë la nécessité de la radicalisation de la lutte et la question du rôle de l'avant-garde prolétarienne dans la lutte de libération nationale.
Dans les années 1950, les syndicats manifestent pour leur autonomie vis-à-vis des centrales syndicales métropolitaines. Sékou Touré se fait leur chantre avec succès non seulement en Guinée mais dans la plupart des territoires de l'Union. Convoquée en 1957, la Conférence syndicale de Cotonou consacre l'avènement de l'Union Générale des Travailleurs d'Afrique Noire (UGTAN).
Aux origines du panafricanisme
Sur le plan africain, la décennie des années cinquante est marquée par l'entrée en scène de nouvelles nations qui arrachent leur indépendance à l'hydre colonial. La Lybie est eh tête (1951), suivie par l'Égypte (1954), la Tunisie et le Soudan (1956), le Maroc (1956) et le Ghana dont l'année d'indépendance (1957) coïncide avec la tenue de la Conférence Afro-asiatique de Bandœng, un événement d'une portée considérable pour les peuples du Tiers monde.
Le non-alignement s'impose à l'échelle internationale comme une force imposante face à la montée des périls engendrée par la Guerre Froide et la bipolarisation de relations internationales désormais dominées par les Etats-Unis et l'Union Soviétique. La réalité du capitalisme et l'essor du camp socialiste deviennent les variables-clé à partir desquelles se définissent le développement économique et les alliances internationales contrôlées par deux géants du monde occidental. L'existence du Rideau de Fer consacre la fracture de l'Europe en deux entités satellisées à l'ombre des superpuissances.
Entre les années de l'après-guerre et la fin des années 1950, le schisme au sein du mouvement communiste international, particulièrement dans le mouvement ouvrier, s'aggrave. La Troisième puis la Quatrième Internationales sont profondément divisées au sujet des questions stratégiques relatives à la nature de l'impérialisme et des forces qui doivent en venir à bout. Staline et Trotski croisent déjà le fer avant la mort de Lénine. En Allemagne, Kautsky, déjà mis au banc des accusés du temps de Lénine, a eu le temps de jeter les germes de la discorde au sein du mouvement ouvrier. En Espagne, la guerre civile finit de consacrer la défaite du mouvement ouvrier espagnol qui joue perdant devant Franco et le fascisme décadent européen. En France, Marius Moutet, un socialiste, préside aux destinées du ministère de la France d'Outre-Mer et inscrit à l'ordre des priorités une forte reprise en main de la situation potentiellement explosive dans les colonies. Le conflit sino-soviétique met à nu les "contradictions au sein du peuple" et les relations entre partis communistes aux aspirations et aux stratégies fondamentalement différentes. Mao prêche l'encerclement des villes par les campagnes, une hérésie féconde qui sape les fondements du dogme stalinien basé sur l'affirmation intangible que le moteur de la révolution socialiste reste pour tous les pays la lutte des classes à l'initiative de l'avant-garde prolétarienne ouvrière unie à la petite-bourgeoisie des villes et des campagnes.
Au Sénégal, les chances de création d'un ensemble fédéral africain sont dilapidées dès octobre 1946 lorsque, se soumettant aux injonctions des socialistes et des forces réactionnaires de la métropole, Léopold Sédar Senghor et Lamine Guèye boycottent le Congrès de Bamako qui devait sceller l'unification des forces politiques en Afrique noire. Dans une "autocritique" rendue publique au Congrès constitutif de la Convention Africaine (janvier 1957), Senghor reconnait que son "tort a été d'obéir à des ordres qui (lui) étaient imposés de l'extérieur". La section sénégalaise du RDA s'active dans les rangs de l'Union Démocratique Sénégalaise (UDS) animée par Doudou Gueye, Abdoulaye Gueye et la délégation permanente du R.D.A. à Dakar que dirigent Gabriel d'Arboussier, Charles Guy Etcheverry, un Français propriétaire de l'hebdomadaire "Réveil" devenu par la suite l'organe officiel du RDA., et des communistes français comme Jean Suret-Canale qui s'opposera violemment par la suite aux thèses de Cheikh Anta.
Malgré son échec et en dépit des succès idéologiques incontestables parmi les jeunes surtout, l'UDS pose déjà dès 1948 les fondements d'une véritable doctrine politique s'inspirant des valeurs africaines. Dans un ouvrage intitulé "Forces politiques en Afrique Noire", Bakary Traoré souligne le rôle précurseur de l'UDS. qui affirme dans un Manifeste d'Union, "la justesse du principe selon lequel la lutte ne peut se mener efficacement contre le colonialisme qu'au sein d'une organisation spécifiquement africaine rigoureusement indépendante de tout parti métropolitain unissant toutes les couches de nos populations contre leur oppresseur commun".
Cette prise de position sans équivoque n'est pourtant pas vraiment originale. Elle émane après tout des structures du RDA qui s'est mobilisé durant ses années les plus combatives, et, à travers son aile la plus radicale, autour d'un programme similaire. Bakary Traoré identifie comme suit les prémices idéologiques à partir desquelles se développe le RDA :
"Du fait du retard économique considérable des territoires africains, le prolétariat de ces pays est extrêmement faible. Par conséquent, plus encore que dans les autres pays coloniaux, la question coloniale en Afrique noire française est, quant au fond, une question paysanne. De plus (...) toutes les classes, y compris la jeune bourgeoisie de nos pays, et les cadres traditionnels, supportent plus ou moins impatiemment le joug impérialiste qui pèse sur eux.
"D'où, en Afrique noire, les objectifs essentiels actuels sont communs à toutes les classes et couches de la société.
"De plus, il ne serait pas juste de vouloir imposer au Mouvement de libération anticolonialiste une organisation ferme et une discipline stricte.
"Ces considérations justifient pour la réalisation des objectifs actuels des masses africain :
"a. L'organisation de l'union de toutes les classes, et non d'un parti politique, expression de telle ou telle classe ;
"b. La création d'un mouvement de masse très large qui soit à la fois l'expression de la masse et la masse elle-même et non d'un parti politique d'avant-garde.
« La finalité de la lutte anticoloniale réside dans l'émancipation des divers pays africains du joug colonial par l'affirmation de leur personnalité politique, économique, sociale et culturelle, et l'adhésion librement consentie à une union de nations et de peuples, fondée sur l'égalité des droits et des devoirs".
Cette prise de position programmatique constitue en soi déjà une source potentielle de rupture avec le Parti Communiste Français auquel est apparenté le RDA pendant quelques années. Elle constitue un regard lucide posé sur l'avenir africain dans une arène internationale marquée par la domination bipolaire des Super-Grands et la montée des égoïsmes nationaux.
Instruit par les échecs de la plupart des partis communistes dans les pays anciennement sous tutelle coloniale, et face au dogmatisme marxisant, le RDA fonde son analyse sur les réalités profondes du terroir africain. L'importance de la paysannerie comme force principale du mouvement de libération nationale est affirmée sans compromission.
La jonction des masses et des cadres des villes constitue l'autre axe de la tactique de lutte du RDA Toutes les classes ont intérêt au changement dans la phase de lutte pour le Salut national. Dans ces conditions, il est parfaitement illusoire de vouloir rééditer en Afrique la création de partis politiques rigides, dirigés selon les principes organisationnels d'un autre âge et d'un contexte socio-culturel fondamentalement différent.
La problématique de la lutte des classes et son corollaire, la nécessité de la création de l'avant-garde prolétarienne révolutionnaire, est en fait au cœur du débat. Les marxistes africains de cette période érigent le problème ainsi posé en un axiome, une donnée intangible, une notion irréfragable. Le Parti Africain de l'indépendance, créé en 1957, et l'un des partisans du "Non" au référendum organisé par le Général de Gaulle, hérite de cette maladie infantile du communisme qu'est le dogmatisme sous forme de gauchisme.
Aujourd'hui encore, plus d'une génération après ces instants privilégiés de l'histoire anti-impérialiste africaine, le débat reste posé dans son principe mais selon de nouveaux termes instruits par le virage chinois dans la voie du capitalisme, la décrispation albanaise, la politique de "restructuration" et d’« ouverture » des nouveaux maîtres du Kremlin, l’essoufflement du modèle Nord-coréen enlisé dans un culte prononcé de la personnalité, etc.
Quoi qu'il en soit, le RDA reste marqué, sur la notion de lutte de classes ainsi d'ailleurs que sur celle d'indépendance des territoires d'Outre-Mer, par le parlementarisme petit-bourgeois de leaders comme Félix Houphouët Boigny. Après la rupture avec les communistes français, le discours du RDA est franchement hostile au principe de la lutte de classes en tant que moteur de la révolution. En outre, la question de l'indépendance nationale ou dans le cadre d'une fédération africaine totalement indépendante de la France reste une pomme de discorde dont l'impact ira s'élargissant au fil des ans.
Partisan de l'union avec la France et ouvertement hostile au principe de l'indépendance en dehors de l'ensemble fédéré aoefien et aefien, le RDA reste encore confus sur des problèmes aussi graves pour le destin des peuples africains. Mais le caractère progressiste du Rassemblement et son impact organisationnel dans les différents territoires de l’“Union” en fait une force politique majeure sinon la plus importante de son temps.
C'est vers lui que vont tourner leurs regards les jeunes étudiants africains en France. Ce faisant, le RDA va assister à la radicalisation de sections importantes de ses militants sur l'indépendance immédiate, l'analyse des contradictions de classe au sein de la société coloniale et le projet de fédérer sur des bases solides les territoires africains morcelés sous toutes les formes possibles depuis leur partage par les puissances coloniales réunies à Berlin.
Le phénomène de l'aliénation culturelle est une donnée effroyable caractéristique des élites africaines de l'après-guerre. En ce sens, on peut dire que la capitulation du mouvement de la négritude senghorienne devant les problèmes centraux de la libération nationale africaine favorise sinon annonce une recrudescence de l'aliénation culturelle parmi les "évolués".
Les manifestations de cette infirmité culturelle chez I' Africain sont l'absence de confiance en soi et dans la culture négro-africaine, le scepticisme sur la capacité de dompter les forces de la nature de manière autonome et avec le secours avisé de la science et de capacités organisationnelles supérieures, la croyance dans le fait que l'Afrique aurait toujours été absente du mouvement culturel mondial et n’aurait qu'une histoire du néant dominée par des siècles obscurs, l'acceptation du présupposé que sans l'Occident, l'Afrique ne pourrait rien entreprendre de tangible dans le domaine de l'industrialisation et de la recherche de pointe et finalement, le manque de foi dans l'unité culturelle africaine doublé d'un manque de perspectives historiques claires sur l'origine du peuplement africain et les bases historiques de l'intégration du passé africain à son présent.
Restaurer la conscience historique
C'est dans ces circonstances que Cheikh Anta Diop arrive à Paris après de solides études sanctionnées par le Baccalauréat, une sorte de rite de passage imposé par le système colonial en vue de créer au compte-goutte une élite francisée à souhait et loyale aux intérêts du maître colonial. Nous sommes en 1945. Le jeune étudiant est âgé de 23 ans. Il s'investit immédiatement dans un militantisme réfractaire à l'aliénation culturelle sous quelque forme qu'elle soit. Muni d'un Bac de la série scientifique et d'un Bac littéraire, il projette de se spécialiser dans les sciences exactes, une aspiration presque impensable parmi les étudiants de l'époque davantage portés sur les études en sciences humaines, l'enseignement des mathématiques et des sciences exactes étant jugé hors de portée de la "mentalité prélogique africaine" (cf. Lévy-Bruhl).
Plongé dans l'univers parisien fait d'asphalte et de béton, de monuments anciens et d'hymnes muséologiques à la gloire du triomphe occidental, Cheikh Anta Diop reste branché sur les réalités socio-culturelles dont il est issu. Il reste hanté par l'image de la Médina, un quartier populaire de Dakar, sorte de microcosme des contradictions nationales, un réceptacle de l'exode rural où s'activent dans une promiscuité presque générale ouvriers des huileries avoisinantes et mendiants occasionnels, lumpen prolétaires et Maures commerçants, marabouts et dignitaires lébous, etc. Avant son aventure parisienne c'est dans cette Médina qu'il habite avec sa famille, et c'est d'ici que sa mère lui adresse des lettres pleines de bons conseils et l'informant des tournures de la vie quotidienne.
Il a suffi de quelques mois à ce jeune talent pour éclore d'une personnalité politique fermement rattachée au substrat culturel nègre. Il se forge surtout une vision culturelle nouvelle dans le paysage politique africain de l'époque.
Combattre l’aliénation culturelle
A ses yeux, le politique se définit et ne s'épanouit qu'au travers du culturel. Le culturel ne rejoint le politique pour en constituer le vivier central qu'à travers la réhabilitation culturelle africaine, non pas une culture morte, une délectation sans discernement sur le passé, mais un regard viril, sans complexe sur la culture vivante, la langue notamment et tout le génie créateur dont elle est la matrice naturelle.
Il faut donc « s'armer de science jusqu'aux dents » pour accomplir la mission prométhéenne de décoloniser les mentalités asservies par le recours à l'autorité des faits. Ces faits se confondent pour l'heure en une gerbe de contradictions, où se diluent les meilleures volontés. Pourtant les matériaux de recherche sont là, omniprésents. Là n'est pas le problème. Pour que s'opère la rupture avec les catégories d'analyse et de comportement de l'idéologie dominante, il convient d'abord de se déterminer par rapport aux faits. Il faut les maîtriser en étant capable de débusquer les pièges subtils, les mensonges énormes, le jeu de dupes auquel se livre la puissante machine coloniale.
Cheikh Anta réalise alors que seule une descente vertigineuse dans l'immensité du champ historique mondial et le rôle véritable qu'y a joué l'Afrique peut débloquer la recherche historique africaine, et donc la lutte de libération nationale. Dans cette perspective, il ne saurait y avoir de dichotomie ou antinomie entre l'histoire et l'action politique. L'un et l'autre se fécondent réciproquement. Leur symbiose constitue le socle naturel, le ciment logique de toute prise de conscience culturelle. La culture nationale désaliénée, purifiée des scories artificiellement greffées sur elle par l'impérialisme, retrouve ainsi sa fonction de moteur des changements de cap historiques et de catalyseur de la conscience de lutte contre l'oppression, quelle qu'elle soit, d'où qu'elle vienne.
Cette nouvelle vision de la lutte anti-impérialiste se fonde sur la relation du culturel au politique dans le développement de la conscience historique africaine.
Comme le reconnaît Cheikh Anta Diop dès le début des années 1950, la conscience de lutte d'un peuple, conscience inséparable du substrat culturel qui en constitue le soubassement, est déterminée par trois facteurs. Ceux-ci sont d'ordre psychique, historique et linguistique. Il y a, dit-il, un mouvement permanent de va-et-vient entre ces facteurs que cimentent la conscience historique d'un peuple. Lorsque l'un de ces facteurs est ébranlé par une variable externe en l'occurrence le colonialisme et l'impérialisme, il s'ensuit nécessairement l'apparition de leur antithèse : l'aliénation culturelle. Ainsi tout en se plaçant au pôle opposé des trois facteurs constitutifs de la conscience anti-impérialiste, l'aliénation culturelle représente aussi un puissant révélateur de l'oppression et de l’exploitation.
L'aliénation est toujours d’essence culturelle compte tenu de la prégnance des éléments de civilisation, de l'impact des traditions socio-culturelles à l'échelle de la conscience historique du peuple. Mais l'aliénation peut se manifester sur les plans psychique (voir l'œuvre de Fanon à cet égard), historique (par la négation de l'histoire du peuple colonisé et la tentative de destruction de ses assises historiques) et linguistique (par le dépérissement des langues nationales comme supports naturels des rapports sociaux, politiques et culturels à l'échelle de la nation, au sens large).
L'aliénation mot dérivé du latin alienus, "qui appartient à un autre", est défini par le Petit Robert comme un "trouble mental, passager ou permanent, qui rend l'individu comme étranger à lui-même et à la société où il est incapable de se conduire normalement". L'autre sens donné de ce terme dans son acception philosophique « est l’état de l'individu qui, par suite des conditions extérieures (économiques, politiques, religieuses), cesse de s'appartenir, est traité comme une chose, devient esclave des choses et des conquêtes même de l'humanité qui se retournent contre lui ». Dans les deux cas, le phénomène d'aliénation implique la destruction ou l'altération significative de tout ou partie des composantes essentielles de la culture autochtone, de la conscience historique, de l'être psychique, des racines linguistiques chez l'individu.
Autant donc dire que la conscience politique, religieuse et idéologique du colonisé est ébranlée par "l'impérialisme (qui), tel le chasseur de la préhistoire, tue d'abord spirituellement et culturellement l'être, avant de chercher à l'éliminer physiquement" (voir les pages introductives de Civilisation ou Barbarie, ouvrage de synthèse décrit par Cheikh Anta lui-même comme "un matériau de plus du travail qui a permis d'élever l'idée d'une Égypte nègre au niveau d'un concept scientifique opératoire").
Étant donné que le meurtre spirituel et culturel annonce le génocide africain et qu'il précède la destruction de l'espace physique du nègre colonisé, il faut d'abord restaurer la conscience historique du peuple, lui restituer l'appareil conceptuel idéologique dont il a besoin pour ressusciter en une conscience collective capable de résister victorieusement à la destruction.
Par conséquent, la conscience de classe dans la phase anti-impérialiste de la lutte est accessible à toutes les composantes sociales. La ligne de démarcation au niveau de cette conscience de classe va s'opérer sur le terrain de la lutte contre l'impérialisme entre les consciences aliénées (économiquement et culturellement, car l'aliénation économique est inséparable de l'aliénation culturelle) et celles qui rétablissent un équilibre satisfaisant entre les différents facteurs constitutifs de la conscience historique du peuple tout entier. Toute l'œuvre politique, culturelle et scientifique de Cheikh Anta est tendue vers cet absolu, l'équilibre culturel, un absolu toujours relatif à l'échelle du continuum historique et de l'interaction des règnes humain, végétal et animal.
Combien de fois avons-nous vu défiler devant nous d’innombrables correspondances administratives, commerciales et autres ? Ces correspondances, codées suivant un rituel séculaire, voire millénaire, immuable, ont fini par s’imposer à nous, parce que considérées comme politiquement et socialement correctes. Elles sont acceptées par la majorité, voire la totalité de l’humanité. Sans aucune critique. Et pourtant… le logiciel quasi immuable qui est à la base de la rédaction de ces missives officielles respecte très peu les codes et convenances socio-culturels unanimement acceptés par le monde. Il convient de faire remarquer que ces lettres débutent sans salutation. Or, le propre de tout échange humain exige avant toute chose cette salutation, cette civilité.
En effet, elles démarrent toujours par : «Monsieur le Président», «Monsieur le Directeur Général», Ou «Monsieur»… Et on enchaine directement par des développements sur le contenu de la correspondance. Je trouve ces enchaînements incorrects et ne comprendrai jamais les motivations à l’origine de tels manquements. On finit en saluant ou en exprimant nos sentiments et ce, à l’aide de formules stéréotypées, formatées souvent peu sincères et utopistes du genre : «Veuillez agréer, Monsieur, l’assurance de ma considération distinguée». Ou : «Je vous prie d’agréer, Monsieur le Directeur Général, l’expression de ma considération la meilleure.»
Cette façon de procéder, transgresse les règles de politesse et les codes culturels. Une autre situation singulière à remettre en cause, se trouve dans cette posture consistant à toujours nous dissuader d’éviter les répétitions dans nos correspondances. Pourtant… dans un monde en crise, caractérisé par de nombreuses divergences de vue et des problèmes réels de communication à l’origine des guerres et tensions de toutes sortes, la répétition a vocation de devenir un outil important de compréhension mutuelle. Ne dit-on pas que la répétition est pédagogique ?
Ces anomalies constatées dans les courriers officiels, renforcent notre certitude que les outils et objets de mesure des progrès de l’humanité, souvent d’inspiration occidentale et conçus dans des époques sans aucun rapport avec nos ères modernes, gagneraient à être repensés. Dans bien des réflexions et certitudes qui continuent de s’imposer à nous, des alternatives s’imposent. Les Parlements en Afrique et au-delà, du monde, devraient se saisir rapidement de cette question des correspondances officielles afin de procéder aux réformes nécessaires.
Par Guimba KONATE
PRESIDENTIELLE DE FEVRIER 2024 OU LE LAMBI GOLO NATIONAL
L’élection présidentielle de février 2024 n’a pas plutôt véritablement démarré que déjà on enregistre plus qu’une pléthore, une nuée de candidats déclarés
Bés Bi le Jour |
Guimba KONATE |
Publication 15/11/2023
L’élection présidentielle de février 2024 n’a pas plutôt véritablement démarré que déjà on enregistre plus qu’une pléthore, une nuée de Candidats déclarés. Ainsi, si Dieu leur prête vie et que le Conseil constitutionnel accepte leur dossier, ils seront donc plus de deux cents oui, vous avez bien lu, deux cents candidats à se lancer dans la course vers le Palais présidentiel. Plutôt que d’en rire, je préfère en pleurer tellement le ridicule dépasse l’entendement et insulte le simple bon sens des Sénégalais. Plus de deux cents candidats sur une population d’un peu plus de dix huit millions, Noon, le Sénégal est werement un charmant pays béni des dieux et des saints. Dans lequel chacun et chacune et tout le monde ne se voit qu’en Président de la République et rien d’autre. Bigre !
Dans ce qui est censé être la compétition populaire la plus haute, la plus noble et la plus difficile, il s’est trouvé toute une faune de prétendants de tous les pédigrées possibles et imaginables. On y trouve pêle-mêle des avocats, des chanteurs, des marabouts, des commerçants des hommes d’affaires ou plutôt des «hommes à faire et de fer», des consultants, des experts sur TOUT, en TOUT et de TOUT, des quasi analphabètes ou semi-alphabétisés, c’est selon, des paysans, des pécheurs de poissons comme de chair fraîche (suivez mon regard), des «ndongosdaaras», des saltimbanques, des journalistes, des universitaires gradés et dégradés, des aventuriers évoluant loin du territoire national depuis belle lurette, pour ne pas dire depuis très, très longtemps et qui se voient TOUS en MESSIE pour venir au chevet de notre pays exsangue et dévasté par, disent-ils tous en chœur et à l’unisson jusqu’à la vendeuse de poulets (faut pas fâcher, nous s’amuser seulement) qui bande aussi son ARC pour dénoncer plus de soixante années d’impérities et d’échecs patents dans tous les domaines ! Rien que çà ?
Chacun y allant de son slogan ou chant de guerre, c’est selon. Entre la 3ème voie proposée par certains ou «Lenène» pour d’autres pour Tekki en nous disant que «Demain c’est maintenant» pour «Dundu» et autres professions de foi plus loufoques les unes, les autres, chacun S’engage. Faites vos jeux Messieurs, Dames, citoyens de Galsen, faites vos jeux, le tour de table est vaste et il y’en a pour tous les goûts, toutes les bourses et tout et tout et tout. Du candidat de l’espoir à celui de la sécurité, en passant par la continuité, le renouveau, la renaissance, et autres déclamations de foi fantaisistes et hilarantes, la panoplie des choix n’est pas seulement vaste, elle est énorme et… indigne et embarrasse et insulte l’intelligence des Sénégalais que nous sommes.
Pour l’heure, en attendant le top départ de ce raout de si mauvais goût, il est aisé de constater que les déchirures se font béantes et deviennent des crevasses infranchissables entre ex-frères et partenaires d’hier seulement. Déjà dans BBY, le choix du candidat désigné au forceps a révélé des ambitions cachées ou tues qui n’ont pas tardé à se dévoiler pour faire cavalier seul envers et contre tout, malgré tous les risques de sanctions encourus et brandies par le Maître du «Je». Il y’aura des étincelles !! Pour sûr. Toutefois, faudrait pas trop s’en faire, on se connait bien dans ce pays. D’ici au top départ des courses, certains et ils seront très nombreux, iront à Canossa pour se faire remorquer par plus dense afin de prétendre hériter d’un strapontin douillet lors du partage final. Les abandons, jets d’éponge et autres retraits…diplomatiques ont d’ailleurs commencé. On en verra de tout c’est certain et le spectacle est garanti. Et en Mondovision encore !!! A ne surtout pas rater.
Faites vos jeux, faites vos jeux… et que le meilleur ou, au pire, le moins mauvais gagne pour un Sénégal nouveau. En attendant Février 2024, on se gausse des gesticulations, fanfaronnades, jérémiades et autres contorsions physiques et intellectuelles des aspirants candidats pour se faire plus beaux que vrais afin de séduire le bon petit peuple du Sénégal. C’est juste un Avant-première. Le SPECTACLE, le VRAI, va bientôt commencer. Et pour faire comme au PMU, l’autre religion des Sénégalais, il y’aura des favoris, des outsiders, des jamais gagnant, des surprises, des non-partants, des couplés placés et… les autres, tous les autres…
A vos places… pour ne rien rater de ce Lambi Golo national du 25 février 2024, véritable «danse des singes».. Tristesse immense. Dieu nous garde et garde le Sénégal…
PAR Demain Sénégal
RÉVOLTE CONTRE LES ATTAQUES À L'ÉTAT DE DROIT
EXCLUSIF SENEPLUS - 83% des Sénégalais sont insatisfaits de la gouvernance. Une administration électorale qui refuse sans conséquence d'appliquer une décision judiciaire. La justice et la démocratie doivent prévaloir
À travers une étude menée depuis près d'un an par l'association DEMAIN SENEGAL (« DS »), couvrant l'ensemble du territoire national ainsi que la diaspora sur la base d'un échantillon représentatif, les Sénégalais ont exprimé que « l'État de droit et la bonne gouvernance » constituent leur principale priorité aux côtés de la Santé et de l’Éducation.
Cette étude a révélé qu'une très large majorité (83%) des Sénégalais sont insatisfaits de la situation de l'État de droit et de la gouvernance, qu'ils considèrent comme le socle de notre paix sociale et de notre développement. Elle a également mis en évidence des préoccupations liées à l'accès à des soins de santé et à une éducation de qualité, ainsi qu'à des opportunités d'emploi valorisantes et à des conditions d’habitat décentes.
En cette période critique pour la démocratie au Sénégal, cet attachement aux principes de l'État de droit et de la bonne gouvernance prend tout son sens face aux récents événements que nous traversons.
En effet, à cent jours d'une élection présidentielle décisive pour l'avenir du Sénégal, voir une administration électorale qui refuse sans conséquence d'appliquer une décision de justice et constater la nomination surprise dans des conditions discutables de nouveaux membres de la Commission Électorale Nationale Autonome (« CENA »), sont autant de faits qui nous interpellent en tant que citoyens soucieux de la préservation des valeurs démocratiques.
À l'image de la forte majorité des Sénégalais, nous affirmons avec force notre attachement au respect des lois de notre pays, condition indispensable pour préserver la stabilité et la paix sociale à la veille d'élections dont la régularité, la transparence et la fiabilité nous tiennent particulièrement à cœur.
Cela signifie également que nous devons aborder les maux profonds qui rongent notre société et parmi lesquels figurent les préoccupations liées à la situation de l'Université fermée depuis cinq mois et dont la rentrée d’Octobre 2023 a été repoussée à janvier 2024, les drames de la migration par voie maritime ou les différences dans le traitement et la liberté de mouvement des candidats déclarés.
La justice et la démocratie doivent prévaloir, et il est de notre devoir de veiller à ce que chaque citoyen ait le droit de participer librement au processus électoral, conformément aux lois de notre pays. C’est dans ces conditions que la liberté des citoyens de choisir librement leur Président sera garantie.
Nous rappelons à l'administration électorale son devoir d'impartialité, de respect des décisions de justice et de loyauté envers les citoyens sénégalais.
Nous appelons l'ensemble des citoyens sénégalais à se mobiliser pour défendre les principes démocratiques et garantir l'intégrité du processus électoral au Sénégal.
Enfin, nous invitons les leaders politiques de tous bords et en particulier les futurs candidats à l'élection présidentielle de 2024, à s'engager devant les Sénégalais, autour de la charte citoyenne de la démocratie issue des Assises nationales de 2009.
La Présidente : Thiaba Camara Sy
Le Vice-président : Meïssa Tall
La Secrétaire générale : Fatoumata Cissé
Le Trésorier : Ahmet Fall
Ont signé :
Liste des 84 signataires de la déclaration de l’Association DEMAIN SENEGAL
Membres du Comité consultatif de DEMAIN SENEGAL, signataires
DEMAIN SENEGAL est une Association non partisane de la société civile. Elle est fondée en décembre 2021 à Dakar par une trentaine de sénégalaises et sénégalais basés au Sénégal et dans la Diaspora (France, Etats Unis, Suisse, Côte d’Ivoire, Emirats Arabes Unis, ...).
Notre mission :
A l’image des Assises Nationales, DEMAIN SENEGAL vise à contribuer à sortir le Sénégal de la pauvreté, à reconstruire les fondements du bien-être et à améliorer la qualité de vie des Sénégalais, en particulier des jeunes.
Nous sommes motivés par les défis rencontrés par la population sénégalaise au regard de plusieurs piliers de développement identifiés :
1. Etat de droit et bonne gouvernance
2. Santé
3. Education et formation
4. Emplois et entreprenariat
5. Habitat et cadre de vie
Notre démarche :
DEMAIN SENEGAL souhaite porter la voix des citoyens à l’attention des futurs candidats à la présidentielle de février 2024. DEMAIN SENEGAL souhaite se donner les moyens pour que les engagements pris par les candidats soient effectifs dans la pérennité.
Pour ce faire, DEMAIN SENEGAL a mené une étude sur toute l’étendue du pays pour recueillir la demande citoyenne sur les 5 piliers.
DEMAIN SENEGAL a organisé 5 débats citoyens avec des experts sénégalais sur chaque pilier. Les résultats de ces débats et recommandations seront consignés sur un livre blanc qui sera vulgarisé et qui servira de base aux discussions avec les candidats.