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1 décembre 2024
Opinions
Par Khady GADIAGA
LE TEMPS DES GRANDES MANŒUVRES
En annonçant une série de réformes constitutionnelles, Macky Sall a montré qu’il ne comptait pas attendre cette échéance, qui marque la fin de son deuxième et théoriquement, dernier mandat de président, pour lancer ce processus périlleux.
L’heure des grandes manœuvres pour la transition de 2024 a sonné au Sénégal. En annonçant une série de réformes constitutionnelles, Macky Sall a montré qu’il ne comptait pas attendre cette échéance, qui marque la fin de son deuxième et théoriquement, dernier mandat de président, pour lancer ce processus périlleux.
La stratégie est un système d’expédients. Elle est plus qu’une science : elle est la transmission du savoir dans la vie pratique, le perfectionnement de la pensée capable de modifier l’idée directrice primitive conformément aux situations sans cesse modifiées. C’est l’art d’agir sous la pression des circonstances les plus difficiles.
Ainsi la stratégie générale apparaît-elle, dans son essence, comme l’application de la politique avec une intention de contrainte, face à une volonté adverse suscitant obstacles ou menaces. Il ne peut donc y avoir de stratégie authentique sans qu’ait été au préalable définie une politique, et il ne subsiste pas le moindre doute sur la constante subordination de la première à la seconde qui constitue sa raison d’être.
L’urgence de choix kafkaïen
A mesure que se rapproche l’échéance présidentielle de 2024, marquée par le renoncement retentissant du Président Macky Sall à un troisième mandat, se dressent devant lui l’urgence de choix kafkaïens:
- Désignation d’un dauphin consensuel à même de cristalliser l’unité de Benno malgré les velléités des ambitions des uns et des autres...
-L’adoption des conclusions du dialogue national ouvrant la compétition aux opposants politiques frappés d’inéligibilité que sont Khalifa Sall et Karim Wade. Ce n’est point un secret de polichinelle de dire que le fameux dialogue a été mis au point par le président et ses affidés pour barrer la route à leur principal rival politique, Ousmane SONKO, crédité par voix non officielle par les sondages des plus grandes intentions de vote.
Cette grâce présidentielle accordée aux préposés à la candidature est sous-tendue par une révision de la constitution portant sur la révision de l’art 87 sur la dissolution de l’Assemblée nationale, prévue ce lundi 17 juillet 2023 et qui précède celle du code électoral afin de sécuriser le vote des députés karimistes et khalifistes. Une révision de la constitution qui survient à quelques mois de la fin du mandat du Président est révélateur de toute la dimension de calcul politicien qui anime le chef de l’État. Une véritable opération de neutralisation de ses alliés circonstanciels qui a pour objectif de leur couper les ailes et les soumettre à sa volonté de domination. Ils seront bâillonnés comme des malpropres et rabaissés à des soutiens de fait, leur état de concurrents intégraux ramené à sa plus simple expression. En cela, le prince reste fidèle au principe de base qui a caractérisé ses relations avec l’opposition tout au long de son magistère.
Toutefois, la démarche se heurte à un manque d’élégance et de transparence du pouvoir qui privilégie moult contorsions et autres pirouettes de haute voltige, poussant nombre d’observateurs à risquer des pronostics sur le futur héritier du trône en faisant appel aux bonnes vieilles recettes des kremlinologues.
Une verticale du pouvoir pour perdurer
Une gouvernance qui se voulait sobre et vertueuse qui a fini par reléguer les nobles espérances démocratiques au rang d’instruments de mystification, d’informations fallacieuses et de pressions psychologiques, utilisés contre nos populations pour protéger les intérêts de quelques groupuscules et aventuriers de la politique qui en ont fait un métier devenu aussi complexe que dans le crime organisé parce ce qu’un politicien honnête ne fait pas long feu s’il ne marche pas dans l’illégalité. Situation paradoxale, mais qui peut expliquer une incapacité presque congénitale à réformer.
Macky a institué «une dynastie KGB appelée à perdurer après lui». Et de potentiels Medvedev, acteurs intermittents du spectacle politique, des étoiles filantes sont prêts à chauffer le fauteuil du boss et celui-ci fera d’un d’entre eux peut-être Premier ministre quand il sera revenu au pouvoir... Disons que ce ne sont que des élucubrations mais, le prince n’a pas placé tous ces coups sans se donner la marge de revenir dans le jeu politique, en témoignent les projets de modification des conditions de la dissolution de l’assemblée nationale, permettant de procéder au couplage des élections présidentielle et législatives » au mois de février 2024.
La construction d’une « verticale du pouvoir » avec l’exécutif comme centre de décision caractérise le processus déroulé par le président sortant. Depuis qu’il s’est placé hors de la compétition électorale, le système Macky se crispe paradoxalement davantage cherchant à prévenir tout risque de déstabilisation : interdiction systématique de toutes manifestations publiques, pressions sur les leaders de l’opposition, renforcement du contrôle des médias, branle-bas dans les États-majors des forces de défense et de sécurité...
Les structures de forces ont été dotées de pouvoirs étendus, notamment en matière de poursuites judiciaires. Le recrutement des élites semble donc privilégier des critères de loyauté, ainsi que les liens personnels ou familiaux, tant au niveau que régional et local.
Ce type de système favorise le népotisme, les relations informelles, la concurrence entre clans et l’impunité des principaux protagonistes.
Les élites politico-économiques gagnent à rester fidèles au système, et seront de toute évidence tentées de le faire perdurer au-delà même de Macky pour préserver leurs positions.
L’impérieuse nécessité de capter les aspirations populaires
Les observateurs sénégalais comme étrangers se perdent en conjectures pour savoir quelle solution sera finalement privilégiée par Macky Sall pour conserver le pouvoir. Plus grand monde ne doute de la nature crypto-autoritaire du régime et du fait que le président sénégalais n’a aucune intention de quitter la scène politique. Il est en cela représentatif de la plupart des sénégalais qui n’ont pas encore atteint l’âge légal de la retraite : après tout, Macky Sall n’a que soixante - un ans et sa carrière politique n’en est qu’à la fleur de l’âge...
Ce regain d’intérêt des experts et spin doctors pour les coulisses de la vie politique sénégalais n’est pas sans faire penser au temps des grandes manœuvres quand les spécialistes étrangers des élites soviétiques, les « kremlinologues », rivalisaient d’ingéniosité pour récolter et analyser des indices à priori sans intérêt, allant de la disposition des membres du Politburo sur les photos de la Pravda aux modulations à peine perceptibles des brèves de l’agence TASS sur la nomination aux plus hautes fonctions de quelque obscur apparatchik.
Si l’on croit que la société sénégalaise contemporaine est de plus en plus celle du «rien en commun », une société sans repères et doutant d’elle-même, peut-il y avoir d’autre solution que de réfléchir à un mode d’exercice du pouvoir qui œuvre à des solutions jaillissant de là où les questions se posent etse réservant, au terme du débat, de fixer un cadre général de régulation largement accepté, car fruit de l’expérience. Il y a bien urgence à revitaliser l’action politique. Les civilités ne sont d’aucune utilité si nous devons courber l’échine devant les plus tortueux et les plus forts. Le pacifisme face aux requins: la voilà, l’éternelle tragédie.
Il s’agit d’être en résonance avec le peuple, afin de capter les aspirations populaires pour leur donner pleinement droit de cité. C’est une stratégie politique de longue haleine qui demande constance et cohérence. Cela ne peut se réduire à des stratagèmes électoralistes de circonstance.
Rien ne se fera sans le citoyen rétabli dans sa pleine souveraineté. C’est cette aspiration à recouvrer la souveraineté qui a guidé les sénégalais un fameux 23 juin 2011 à se dresser comme un seul homme, se rendant compte qu’ils étaient devenus dans l’ordre social et politique sujets au-dessous de l’ordinaire. Cette reconquête de la démocratie et de l’intérêt général constitue le signal de la nécessaire révolution citoyenne.
Les sénégalais aiment la politique mais cette année plus encore qu’auparavant rejettent les politiques. Si rien ne change, l’enfarinage a encore de beaux jours devant lui.
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LES FAITS CONTRE LE SUBTERFUGE
EXCLUSIF SENEPLUS - Je réaffirme ma candidature à la candidature de BBY à la présidentielle. Si Macky pense pouvoir user d'un subterfuge pour imposer au pays une affiche, il se trompe lourdement et risque de compromettre son départ du pouvoir
« La démocratie sénégalaise n'est pas fille des temps modernes ; elle est enfant légitime de nos traditions démocratiques sublimées dans des luttes historiques. Ceux qui tentent de lui substituer le produit altéré de leur alchimie politicienne oublient que les faits sont têtus et font, seuls, l'Histoire. » Mamadou Dia, Lettres d'un vieux militant (Compte d'auteur, 1991)
Suite à l'adresse à la nation, le 3 juillet 2023, du président Macky Sall, décidé de ne pas briguer un nouveau mandat de 5 ans le 25 février 2024, trois faits saillants et on ne peut plus têtus empêchent définitivement le chef de la grande majorité présidentielle (Alliance pour la République, coalition Benno Yaakaar et divers alliés) d'user d'un subterfuge pour imposer au pays une affiche dégradante pour la démocratie sénégalaise dont le président Mamadou dressa de son vivant le portrait juste et vrai.
Candidats à la candidature…
Le mercredi 5 juillet 2023, le président de l'Alliance Pour la République (APR), le président Macky Sall, présida, à la salle des banquets du Palais de la République, la réunion du Secrétariat exécutif national (SEN) de l'APR à laquelle j'ai participé en tant que membre. L'ordre du jour de ladite réunion n'a porté, pour l'essentiel, que sur un point : « Comment assurer à l'APR et à la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY) la conservation du pouvoir après la décision du président de la Grande majorité présidentielle - le président Macky SALL - de ne pas briguer un nouveau mandat ? »
L'ordre du jour adopté à l'unanimité avait été suivi - comme c'est toujours le cas - du message introductif du président de l'APR qui a demandé à celles et ceux des membres présents du SEN qui désirent être candidats à la candidature unique de BBY à l'élection présidentielle du 25 février 2024 de se manifester avant d'ouvrir la liste des intervenants à la réunion.
Le président Macky Sall maintint sa demande en dépit de la proposition de certains intervenants du Parti qui ont demandé qu'il choisisse seul le candidat à la candidature de l'APR. Je dois dire que le président de l'APR avait été sensible à la proposition, faite lors de son intervention par le frère Luc Sarr, au président Macky Sall, de ne pas se donner un dauphin et d'enregistrer les candidatures à la candidature pendant la réunion. Quand la parole m'a été donnée, je me suis déclaré, le premier, candidat à la candidature unique de BBY à l'élection présidentielle du 25 février 2024. Le frère Abdoulaye Diouf Sarr avait été le deuxième et le dernier participant à la réunion à avoir déclaré, comme moi, sa candidature à la candidature de BBY à l'élection présidentielle du 25 février 2024.
À la clôture de la réunion du SEN, le président de l'APR, de BBY et de la grande majorité présidentielle, le président Macky Sall, demanda une dernière fois, avant de lever la séance, aux frères de l'APR candidats à la candidature à l'élection présidentielle du 25 février 2024 de le lui dire clairement. Voilà, sur la candidature à la candidature à l'élection présidentielle du 25 février 2024, les « faits têtus qui font seuls l'Histoire ».
Pour avoir lu par la suite plusieurs choses inexactes dont les contenus sont libres, j'ai tenu à faire les précisions ci-dessus. Pour ma part, je mets au défi quiconque d'apporter des précisions contraires aux miennes. S'agissant des frères de l'APR dont les noms sont souvent cités dans les médias, je n'ai pas, à ce stade des déclarations de candidatures à la candidature à l'élection présidentielle du 25 février 2024, d'opinion sur leur liberté de se déclarer candidats ou pas.
BBY dans le sillage de l'APR
Le communiqué de presse de BBY, daté du 10 juillet 2023, est - chose étonnamment rare ces derniers mois - très bien écrit. Ledit communiqué est responsable, rassurant et fédérateur. La direction indiquée par le communiqué mènerait à la victoire si la « poursuite (...) des consultations avec les potentiels candidats » - point n°2 dudit communiqué - consacrait l'égalité des chances... Il ne fait aucun doute que le moment est enfin arrivé pour que l'itinéraire bénévole de chacun, le fardeau désintéressé porté par chacun, la générosité attestée, le don de soi et le choix des mots, inspirés par plusieurs sources indépassables pour le retour de la confiance dans le pays, l'emportent sur des considérations dont nous avons déjà payé les prix forts...
Tout indique que le président de la grande majorité présidentielle (APR, BBY et alliés) n'a plus d'autre choix que d'user de son flair politique, comme du reste le 3 juillet 2023, pour garantir au pays, au cours des cinq prochaines années, la paix, la sécurité et l'émergence dans la solidarité. Dans un pays, un continent et un monde gravement percutés, seules de très bonnes qualités d'homme d'État permettent de surmonter les difficultés et de maintenir le pays dans sa marche résolue vers toujours plus de démocratie et de bien-être pour les couches les plus défavorisées, jeunes ou moins jeunes, et les plus nombreuses du Sénégal.
Conversations secrètes ?
Le frère Macky Sall aurait bouclé ses « conversations secrètes » sur les candidatures à la candidature de BBY à l'élection présidentielle du 25 février 2024 sans son conseiller spécial Abdoul Aziz Diop (Lire la Une de Les Échos datés du samedi 15 - dimanche 16 juillet 2023). Je signale que le frère Macky Sall m'a personnellement promis, le mercredi 5 juillet 2023, après la clôture de la réunion du Secrétariat exécutif national (SEN) de l'Alliance pour la République dont je suis membre, de me recevoir pour un entretien en tête-à-tête sur ma candidature à la candidature de BBY à l'élection présidentielle du 25 février 2024. Si le frère Macky Sall discriminait les cadres de l'instance régulière de notre parti, je n'aurais d'autre choix que de le renvoyer à la conclusion de mon livre intitulé « Gagner le débat... » (Éditions L'Harmattan & Universitaires européennes, février 2023). Je rappelle que le mercredi 5 juillet 2024, j'ai offert et remis en main propre au frère Macky Sall un exemplaire en langue française dédicacé de mon essai « Gagner le débat... » et 6 autres exemplaires correspondant aux versions anglaise, allemande, espagnole, portugaise, italienne et russe de l'essai. Je réaffirme ici ma candidature à la candidature de BBY à l'élection présidentielle du 25 février 2024 avant que ne soit désigné le candidat officiel.
Du subterfuge (de trop)
Le droit de se présenter à une élection présidentielle est un droit civil et politique pour toute personne remplissant les conditions prévues par la loi. Qui suis-je, moi Abdoul Aziz Diop, pour dire que ma candidature est bonne et une autre mauvaise ? Personne n'a le droit de choisir pour le peuple souverain les candidats à une élection. C'est la loi, qui, en dernier ressort, désigne les candidats. Si le président Macky Sall - je n'ose pas le croire - pense pouvoir user d'un subterfuge pour imposer au pays une affiche, il se trompe lourdement et risque de compromettre un départ du pouvoir qu'il veut tranquille comparativement aux départs des présidents Diouf et Wade.
A titre de rappel, voici, selon le grand savant et érudit musulman, Cheikh Ahmed Tidiane Sy Al Maktoum, comment Dieu déjoue le subterfuge de celui dont l'équité est attendue par la collectivité tout entière :
1. Celui qui ne vit que par le subterfuge range ses chiffres sur une table ;
2. Il se félicite du résultat obtenu ;
3. Dieu lui donne l'illusion d'avoir réussi grâce aux premiers résultats encourageants qu'il obtient ;
4. Tout d'un coup, il s'aperçoit qu'un chiffre manque dans le dispositif ;
5. Commence une panique indescriptible.
Pourquoi la panique de l'alchimiste ? Parce que le chiffre manquant est entre les mains de Dieu qui punit de la sorte une vie par le subterfuge. C'est Cheikh Ahmed Tidiane Sy Al Maktoum qui nous gratifia de ce qui précède. Son éclairage est un faisceau de lumière pouvant éclairer la voie par où passe celui qui sait bien partir quand arrive le moment.
Abdoul Aziz Diop est ingénieur pétrolier (1985), environnementaliste (1989), politologue (2005) et lexicométricien (recherches en textologie politique depuis 2005).
par Ibra Pouye
A NOS MARTYRS DE PASTEF LES PATRIOTES, MORTS POUR QUE RENAISSE UN SÉNÉGAL NOUVEAU
Sénégalais debout, battez le macadam, battez le tambour, faites battre vos cœurs. A une loi inique, nul n’a ce désir de rester esclave, ce désir inassouvi de liberté et des ailleurs
Je suis de nouveau écœuré et littéralement écorché vif face à la répétition de tant de drames absurdes !
Des jeunes à la fleur de l’âge,rêvant d’un avenir radieux,repoussés par le quotidien mesquin d’ici ou aveuglés par les mirages d’un ailleurs meilleur au point de perdre la notion de l’importance de leurs précieuses vies qu’ils jettent comme ça-aussi facilement et aussi massivement-à la loterie des vagues dévoreuses de l’Atlantique et de la Méditerranée !
Notre société est à coup sûr malade,atteinte d’une pathologie plus dramatique que celle du Coronavirus qui elle au moins a été vigoureusement prise en charge par aussi bien les décideurs que les spécialistes,avec des populations qui ont plus ou moins respecté les recommandations !
Qu’avons-nous réellement fait d’efficace depuis plus de quinze longues années que cela dure pour stopper ces suicides collectifs répétitifs ?
Ne devrions-nous pas tous ressentir la honte de voir les jeunes générations avoir en si grand nombre une seule envie: quitter ce pays au risque de braver les énormes vagues de l’immense océan ?
Que restera-t-il à terme de notre dignité et de ce pays multiséculaire ?
De grâce, ressaisissons nous tous pendant qu’il est encore temps !
La responsabilité des autorités est plus qu’engagée-aussi bien en amont qu’en aval-dans cet effroyable fléau des temps modernes.Nous devons cependant accepter que les responsabilités ne se situent pas exclusivement au niveau étatique.Toute notre société y a sa part.
Cette aventure est périlleuse parce qu’un nombre de plus en plus réduit de ceux qui la tentent arrive à bon port.Elle est devenue complètement insensée au regard du décompte des morts !
Méditons encore ces propos du Pape François soulignant que la mer Méditerranée était devenue le « plus grand cimetière d’Europe »,et demandons-nous combien de milliers de jeunes corps en provenance d’Afrique au sud du Sahara y ont été engloutis !
Par Mamadou Oumar NDIAYE
ABDOULAYE DAOUDA DIALLO, MEILLEUR CHEVAL DE LA MAJORITE PRESIDENTIELLE
Abdoulaye Daouda Diallo est imbattable. Depuis 2012, à toutes les élections, le département de Podor dont il est le patron politique, a toujours offert les meilleurs scores électoraux au président et a toujours occupé la plus haute marche du podium
Le Sénégal tout entier, et plus particulièrement la majorité présidentielle, attend avec impatience que le président de la République, à l’instar de la Pythie de Delphes, dans la mythologie grecque, rende son oracle. Il s’agit de savoir la décision que rendra non pas une prêtresse qui répéterait ce que lui inspireraient les divinités mais un chef d’Etat en fin de règne relativement au candidat qui défendra les couleurs de son camp. Après avoir fait savoir urbi et orbi qu’il ne sera pas candidat à la présidentielle du 25 février prochain, le président Macky Sall s’est vu décerner carte blanche par ses partisans afin de désigner celui qui aura le redoutable honneur de représenter la coalition Benno Bokk Yaakar (BBY) à cette mère des batailles électorales. C’est donc dire que tout le monde reste suspendu aux lèvres de l’homme qui a présidé aux destinées de notre pays ces 12 dernières années pour connaître le champion qu’il désignera à l’issue de sa très profonde introspection.
Bien évidemment, l’arbitrage ne sera pas facile puisque les candidats, même s’ils ne se déclarent pas ouvertement, n’en sont pas moins nombreux. Le Président n’ayant pas eu la sagesse — ou la générosité, c’est selon — de choisir à temps un dauphin qu’il aurait eu le loisir de faire accepter par ses partisans, sa décision sera donc forcément contestée. Dans ces conditions, le plus souhaitable ce serait qu’il sorte de sa manche ou de son chapeau de prestidigitateur le candidat susceptible de provoquer le moins possible de remous à défaut de pouvoir trouver un homme consensuel derrière lequel les autres candidats accepteraient de se ranger sagement. Pour l’heure, le quarté favori est constitué — dans le désordre ! — du président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), Abdoulaye Daouda Diallo, du Premier ministre, Amadou Ba, du ministre de l’Agriculture, Aly Ngouille Ndiaye, et de l’ancien Premier ministre Mahammad Boun Abdallah Dionne.
A l’aune de la technicité et de la compétence, tous ces quatre candidats se valent assurément, tous ayant fait leurs preuves à la tête des différents ministères qu’ils ont eu à occuper si ce n’est comme chefs du Gouvernement. Il est évident que, dans ces conditions, il faudra un plus pour les départager et faire pencher la décision du président de la République en faveur de l’un ou l’autre d’entre ces quatre poulains. Et si ce plus devait être constitué par la confiance, la loyauté, la fidélité à toute épreuve mais aussi et surtout, par la réalisation d’excellents résultats électoraux en plus de disposer d’une large base de militants, alors, à cette aune, nul doute que le fléau de la balance présidentielle pencherait incontestablement en faveur de l’actuel président du CESE. Lequel coche avec succès toutes ces cases.
Loyal, fidèle, compétent et… apporteur de voix !
Sans compter d’autres, sans doute. Car hélas, et pour ce qui est des exigences de confiance et de loyauté, on n’a que trop souvent vu dans le continent des dauphins qui ont trahi leur mentor avant de leur faire subir les foudres de la loi qu’ils incarnaient désormais. Juste à notre frontière Nord, on a vu comment le président Ould Ghazouani, après avoir été choisi par le président Mohamed Ould Abdel Aziz qui l’a imposé à son parti et a battu campagne pour lui, s’est retourné contre son mentor qu’il tente par tousles moyens d’emprisonner en l’accusant de tous les péchés de la terre. On a assisté au même scénario en Angola où le président Joao Lourenço, choisi par son prédécesseur Joao Dos Santos, afin qu’il lui succède à la tête du parti et du pays, s’est empressé de traquer les enfants de l’homme qui a fait de lui ce qu’il est. Des enfants qui, il est vrai, occupaient des positions clefs dansl’activité économique du pays. Les exemples de ce genre foisonnent. Tout le monde n’est pas l’actuel président nigérien Mohamed Bazoum qui couvre d’honneurs son mentor et prédécesseur Mahammadou Issoufou et Abdoulaye Daouda Diallo serait sans doute le seul de qui le président Macky Sall pourrait ne pas s’attendre à une mauvaise surprise. De ce quatuor de prétendants, il est celui qui a le pluslong compagnonnage avec le président de la République sortant aux côtés duquel il évolue depuis 2008. Ce sans discontinuer. Lorsque Macky Sall, pestiféré et débarqué de la présidence de l’Assemblée nationale, a entamé sa traversée du désert, il a démissionné de toutes ses fonctions politiques au Parti démocratique sénégalais (Pds) et l’a suivi dans ce qui apparaissait aux yeux de beaucoup comme une aventure sans lendemain. En compagnie d’une poignée d’autres apôtres, il a mangé le pain noir avec celui qui devait succéder plus tard au président Abdoulaye Wade et devenir le quatrième chef de l’Etat du Sénégal. Fidèle parmi les fidèles, Abdoulaye Daouda Diallo n’a jamais été pris en défaut de loyauté à l’endroit du président Macky Sall qu’il a toujours servi avec un dévouement sans faille. Et pour lequel il est prêt à mourir. Incontestablement, la meilleure assurance que pourrait prendre l’actuel président de la République pour couvrir ses arrières et protégersa famille pour ne pas dire la meilleure garantie, c’est auprès d’Abdoulaye Daouda Diallo qu’il devrait la souscrire. ADD qui est synonyme d’assurance tous risques, ce qui est plus qu’indispensable par ces temps incertains !
L’homme détient aussi un record de longévité gouvernementale sous le régime du président Macky Sall où il a été de toutes les équipes ministérielles sauf de l’actuelle, faisant ses preuves à la tête de ministères aussi éminents et stratégiques — car de souveraineté — que l’Intérieur et les Finances mais aussi le Budget et les Infrastructures, les Transports terrestres et le Désenclavement. Autant de ministères où il a laissé sa marque de grand travailleur, de meneur d’hommes, de fin technicien et de bâtisseur. Des ministères qui lui ont permis d’acquérir une grande connaissance des défis qui se posent à notre pays, de s’imprégner des problèmes auxquelles les populations, surtout celles du Sénégal des profondeurs, sont confrontées. Mais aussi et surtout, en tant que grand argentier de l’Etat, de se familiariser avec les couloirs des institutions de Bretton Woods et d’acquérir l’’expérience des grandes négociations financières internationales. Avant d’entamer cette très riche carrière gouvernementale qu’il n’a quittée que pour occuper le poste ô combien prestigieux de ministre d’Etat, directeur de cabinet du président de la République, l’inspecteur des Impôts et Domaines de profession qu’il est, en plus d’avoir fait ses marques dans cette régie financière, a aussi eu l’expérience des sociétés nationales en évoluant aussi bien au sein de la société de transport public Dakar Dem Dikk que de la Loterie nationale sénégalaise (Lonase) où il a eu à occuper de hautes responsabilités. Son passage au Craes (Conseil de la République pour les Affaires économiques et sociales), en tant que secrétaire général, lui avait déjà permis de connaître de l’intérieur le fonctionnement de nos institutions. Bref, plus grand connaisseur de l’Etat qu’Abdoulaye Daouda Diallo, difficile d’en trouver. Autant dire que l’homme est fin prêt pour assumer les plus hautes fonctions étatiques — et pourquoi pas la magistrature suprême ? — pour autant que l’occasion lui en soit donnée. Son heure aurait-elle sonné ? Tout dépend, encore une fois, de l’oracle que rendra le président Macky Sall…
Le premier de la classe électorale
Mais surtout, s’agissant d’une élection présidentielle, le critère essentiel pour la gagner c’est de disposer d’une base électorale solide. Car on aura beau être le cadre le plus compétent, disposer du meilleur programme, avoir une excellente stratégie marketing et même disposer de moyens financiers conséquents, si on ne sait pas mobiliser les électeurs afin qu’ils votent pour soi, cela ne servira à rien ! Or, du point de vue de l’électorat, justement, Abdoulaye Daouda Diallo est imbattable. Depuis 2012, à toutes les élections, le département de Podor dont il est le patron politique, a toujours offert les meilleurs scores électoraux au président Macky Sall et a toujours occupé la plus haute marche du podium. Pour ne prendre qu’un exemple, le 11 février 2022, dans ces mêmes colonnes, nous rapportions la performance réussie par cette coordination modèle du parti présidentiel en étant le département qui a fourni le plus de voix à la coalition Benno Bokk Yaakar au niveau national lors des élections locales de janvier de la même année. Sous la conduite d’Abdoulaye Daouda Diallo, en effet, la majorité présidentielle avait obtenu 86.003 voix, ce qui la plaçait en haut du podium au niveau national. Le département de Dakar, malgré ses deux millions d’habitants, ne pointait qu’à la deuxième position avec 81.015 suffrages mis dans l’escarcelle de la majorité présidentielle. Le podium de l’excellence était fermé par le département de Mbour avec 77.119 voix
Quelques mois plus tard, lors de la collecte de parrainages pour les élections législatives, Abdoulaye Daouda Diallo et ses partisans pointaient encore en tête en versant plus de 100.000 parrainages dans l’escarcelle de la coalition présidentielle. Ce n’étaient là que les deux derniers exemples en date puisque, encore une fois, depuis 2012, le département de Podor a offert au président Macky Sall ses meilleurs scores électoraux. Vous voulez un cheval qui gagne ? Alors c’est ADD ! Qui donc serait mieux placé que le patron politique de ce département-grenier électoral, c’est-à-dire Abdoulaye Daouda Diallo, pour porter les couleurs de Benno Bokk Yaakar à l’élection présidentielle du 25 février prochain ? La réponse à la question coule de source
Par Yoro Dia
DES MURAILLES DE LA MEFIANCE AUX PONTS DE LA CONFIANCE
Bilan de la politique extérieure du président Macky Sall, Sur la scène internationale, un Etat n’a que deux acteurs : le diplomate et le soldat
Si je devais retenir qu’une seule réussite de la politique extérieure du Président Macky Sall en 12 ans, ce serait incontestablement et sans aucune hésitation : le départ de Yaya Jammeh. Jammeh a été une épine dans le pied du Sénégal pendant 23 ans jouant au pyromane la nuit et au sapeur pommier le jour dans la crise casamançaise qui est notre crise nationale la plus grave.
Sur la scène internationale, un Etat n’a que deux acteurs : le diplomate et le soldat. Et le fait pour le Président Sall de s’appuyer alternativement et harmonieusement sur le diplomate et le soldat pour chasser Jammeh sans un coup de feu est un coup de génie qui mérite d’être étudier dans les écoles de guerre et de diplomatie. Ce Coup de génie a eu un impact décisif sur la crise en Casamance en privant au MFDC de zone de repli mais aussi et surtout en rapprochant géographiquement la Casamance avec le pont de Farafégny. Le MFDC avait apporté une mauvaise réponse à une vraie question (l’enclavement), avec le Pont, de Farafegny entre autres (bateaux et les avions), le Président a apporté la bonne réponse à la vraie question rendant ainsi anachronique le MFDC. C’est pourquoi à mon avis, le départ de Jammeh et le pont de Farafegny sont plus importants que toutes les autres réussites car on dit « un pays fait son histoire mais subit sa géographie ».Notre géographie c’est ce que Senghor a appelé les cercles concentriques pour marcher vers l’unité africaine.
Dans son excellent ouvrage, le Sénégal et ses voisins, Momar Coumba Diop montre que le premier cercle autour du Sénégal était un cercle de feu avec une intervention militaire en Gambie ( Fode Kaba 2), une intervention militaire en Guinée Bissau ( Opération Gabou), un long conflit avec la Mauritanie de Ould Taya, sans oublier l’antagonisme entre Senghor et Sekou Toure et l’éphémère fédération du Mali. Entre le Sénégal et ses voisins, les 12 ans de Macky Sall peuvent se résumer de façon simple : abattre les murailles de la méfiance pour les remplacer par les ponts de la confiance. Un pont de la confiance sur le fleuve Gambie et un autre sur le fleuve Sénégal avec le Pont de Rosso. Ces ponts de la confiance désenclavent le Sénégal, la porte de l’Afrique de l’ouest qui était en fait un pays très enclavé car la porte n’était en fait ouverte en permanence que sur l’Atlantique. La politique extérieure du Président Sall a déconstruit cette hégémonie de la logique atlantiste qui remonte à la colonisation pour ouvrir la porte vers le continent.
En douze ans, le premier cercle qui était de feu est devenu un cercle de paix avec la volonté du Président de remplacer la méfiance par la confiance dans nos relations avec la Mauritanie avec le partage richesses énergétiques à la Frontière. C’est un vieux principe de Science politique qui veut que deux pays qui font du business se font rarement la guerre. Donc la Mauritanie par ce principe va devenir un des plus grands pays alliés du Sénégal, ce qui est à la fois une logique géographique et historique car le fleuve n’a jamais été une frontière et le pont de Rosso va le rappeler dans le béton. Un autre principe de la Science Politique enseigne aussi que les démocraties ne se font pas la guerre. Après le départ de Jammeh, la Gambie est redevenue rapidement la democratie qu’elle a toujours été et a donc aujourd’hui les meilleures relations avec le Sénégal. Il en est de même pour la Guinée Bissau depuis que la democratie est revenue dans ce pays avec le soutien du Sénégal. Ces deux principes (les démocraties ne se font pas la guerre, quand on fait du business, on se fait rarement la guerre) sur lesquels le Président Sall s’est appuyé pour transformer le cercle de feu en un cercle de paix et de coprospérité ont déjà montré leur pertinence en Europe car ce qu’on appelle le modèle européen n’est rien d’autre qu’une substitution de l’économie à la guerre comme mode de régulation des relations entre nations européennes les tragédies des deux guerres mondiales.
Le premier cercle concentrique qui est celui de nos voisins est passé du feu à la paix et à la coprospérité. Pour le deuxième cercle qui est celui du continent, le bilan est aussi très élogieux. Le bilan du Président Sall à la tête de l’Union Africaine est très positif. Tellement élogieux qu’il a échappé de peu à un second mandat que voulaient certains de ses pairs. Les milieux diplomatiques disent qu’il est l’un des plus grands Présidents de l’OUA/UA depuis un certain Président Abdou Diouf et sa croisade contre l’Apartheid qui l’avait menée jusqu’aux frontières et dans le ventre du Monstre avec tournée historique dans les pays de la ligne de Front. L’action du Président Sall à la tête de l’UA aura été à la fois politique et économique. Politique pour avoir décidé qu’il ne fallait plus seulement rester devant le mur des lamentations mais qu’il fallait aussi agir. Ce qu’il fit en allant voir le Président Poutine à Sotchi dès le début de la guerre en Ukraine pour faire entendre la voix de l’Afrique mais aussi défendre ses intérêts. C’était l’une des rares fois sinon la seule fois où notre continent était acteur dans un conflit mondial. Cette volonté politique va aussi avoir une déclinaison économique avec son combat pour la présence de l’Afrique au G20. Cette bataille a été une continuation du refus de rester devant le mur des lamentations car en intégrant le G20, l’Afrique sera présente là où se prennent les décisions qui structurent l’économie mondiale.
L’entrée de l’Afrique au G20 est un pont économique entre le continent de l’avenir et le reste du monde mais montre surtout comme dit Shakespeare que « la fortune sourit aux audacieux ». Quand le Président Sall au début de son mandat avait commencé à poser le débat, à défaut de sourire, on riait diplomatiquement sous cape. Aujourd’hui c’est fait et l’Afrique doit s’inspirer de sa stratégie pour la bataille de la réforme du conseil de sécurité de l’ONU qui a besoin d’un véritable aggiornamento. Après la sous-région qui est le premier cercle, le continent qui en est le deuxième, le troisième est celui des questions avec une dimension mondiale comme la guerre en Ukraine. Sur ce plan, c’est le Président Poutine luimême qui fait le bilan en saluant la « démarche équilibrée » de la médiation africaine quand il a reçu les chefs d’Etat africains à Saint Petersburg. En parlant la démarche équilibrée des africains, le Président Poutine salue et confirme la vision et la pertinence du Président qui depuis son déplacement à Sotchi au début de la guerre a toujours insisté sur la nécessité de maintenir ouvert un « couloir de discussions » malgré la guerre. Au début la démarche et la méthode n’avaient pas été comprises mais aujourd’hui toutes les parties sont contentes que le couloir soit resté ouvert. La « politique des petits pas » que le Président propose notamment avec le commencement par les questions humanitaires (libération de prisonniers de guerre par exemple) connaitra la même trajectoire que l’idée de maintenir un « couloir de discussions » c’est-à-dire incomprise au début mais plébiscitée à la fin. Last but not least, toutes ses prouesses ont été possibles grâce à l’armée de l’ombre que sont nos diplomates qui aussi brillants qu’effacés et permettent au Sénégal de tenir son rang et de rayonner dans le monde.
Grace à la vision du Président et au talent de nos diplomates, le Sénégal, ce si petit pays sur une carte est et restera une puissance diplomatique qui rayonne sur le continent et dans le monde.
Dr Yoro Dia, Politologue
Par Félix NZALE
SENEGAL, UNE DEMOCRATIE DE LA HAINE
On attend de nos hommes politiques, en particulier, qu’ils soient à la hauteur des problématiques et des enjeux. Autrement, il y a risque que notre pays court à la perte de son âme
I ls sont déjà 45 inscrits sur la liste des candidats à la candidature pour la présidentielle de 2024. Et sur cette liste qui circule sur les réseaux sociaux, il y a du tout : du plus sérieux au plus farfelu. Prétendants crédibles, outsiders, fantaisistes, loufoques. Tous trépignent, se chauffent et se jaugent. De la séduction, de la flatterie, du semblant d’intelligence, un chatoiement de mirages, de promesses attrape-tout… sur le marché électoral, tous sont prêts à vendre leurs illusions. Parce qu’il en est ainsi chez nous : le spectacle des élections n’est rien moins qu’une foire d’empoigne plutôt qu’une politique logique fondée sur la question du sens, de la responsabilité et de l’éthique.
Tous ces messieurs et dames vont bientôt se dévoiler. Nous aurons alors droit à des propos teintés de mystifications obscènes et à des discours décalés des préoccupations des populations. Chaque camp s’emploiera à faire l’apologie de son candidat et à s’évertuer à déconstruire les autres. Une déconstruction qui ne sera sûrement pas centrée sur les manquements ou les approximations des programmes - puisque les débats programmatiques, je doute qu’il y en aura de sérieux - mais sur des aspects personnels, sur l’ad hominem.
Notre démocratie est saluée de partout comme un modèle d’excellence dans un contexte africain où c’est généralement la dictature des «je» transcendants et omnipotents qui ont fini de torpiller les règles du jeu (démocratique), de noyauter les institutions, et d’esclavager leurs populations.
Ce modèle serait disant et séduisant mais sur le seul critère, à mon avis, de l’alternance au sommet de l’Etat. Pour le reste, les autres n’ont pas tellement à nous envier.
Des causes internes mettent de plus en plus notre pays à mal. Les effets destructeurs du chômage de masse, la crise délétère des élites, un système scolaire sclérosé, des citoyens abandonnés par la République… tout un enchevêtrement de circonstances et d’occurrences a miné notre lien social. La machine sénégalaise à unir et à intégrer s’est cassée du fait de discours haineux et séparatistes.
Des Sénégalais, désormais nourris à des idéologies mortifères, prennent des armes contre d’autres Sénégalais au nom d’une vision dont on peine à trouver le qualificatif qui sied. Bref, notre fabrique citoyenne s’est enrayée .
On attend de nos hommes politiques, en particulier, qu’ils soient à la hauteur des problématiques et des enjeux. Autrement, il y a risque que notre pays court à la perte de son âme.
par Ndiaga Gueye
PLUS DE DEUX MILLIONS DE SÉNÉGALAIS DÉJÀ PRIVÉS D'EXERCICE DE LEUR DROIT DE VOTE
L’État n’établit pas de manière transparente les listes électorales en perspective de la présidentielle de 2024. L'organisation d'une révision exceptionnelle des listes électorales d’une durée de neuf jours est une violation des droits de l’homme
Que les mêmes prédictions de victoire soient à nouveau faites plus d’un an avant la présidentielle de 2024, révèlent que le parti politique au pouvoir est entrain de redéployer sa stratégie électorale de 2019. Cette dernière est fondée sur le suffrage censitaire, c’est à dire, sur le filtrage des électeurs pouvant voter selon l’opinion politique.
Cette stratégie électorale, qui rend possible à la fois une victoire au 1er tour et un taux de participation qui sauvegarde la pseudo démocratie du Sénégal, repose sur trois piliers :
Priver de vote à un nombre d’électeurs dont l’intention de vote est inconnue. A cet effet plusieurs techniques sont mises en œuvre telles que la mauvaise distribution des cartes d’électeurs, erreurs sur des cartes d’électeurs, et la modification de la carte électorale à l’insu des électeurs.
Fidéliser la clientèle politique par la satisfaction de la demande sociale de biens et de services et enfin mobiliser le parti le jour du scrutin pour faire voter les électeurs ciblés à 80 % au minimum.
Avec une telle stratégie électorale, plus besoin d'un parti politique à forte mobilisation militante pour gagner une élection. Le parti devient plutôt une entreprise électorale qui considère l’électeur comme un client et le candidat du parti un produit avec pour seul résultat la victoire. Depuis 2019, cette stratégie électorale est élaborée et son plan de mise en œuvre se définit avec le logiciel de stratégie électorale du conseiller en « Big data » de Macky Sall, la société Française « Spallian ». Une machine électorale issue d'une combinaison du numérique et du terrain qui permet de faire des prédictions sur les résultats d'une élection.
Sur le fondement de la projection de 3 000 000 de suffrages par le parti politique au pouvoir pour gagner la présidentielle de 2024, nous posons l’hypothèse que toute l’opposition réunie n’obtiendrait que 2 500 000 suffrages. Le nombre de suffrages exprimés sera ainsi de 5 500 000 sur des listes électorales de 7 400 000 électeurs. Ainsi, victoire au 1er tour à 54 % du candidat du parti politique au pouvoir avec un taux de participation de 74 %, soit un taux d’abstention de 26 %. Ces deux derniers chiffres seront largement utilisés dans leur campagne de communication pour magnifier une élection présidentielle démocratique et inclusive, eu égard aux législatives de 2022, ou le taux de participation était de 46,60%, mais surtout un taux d’abstention record de 53,4 %.
Plus de 45 jours après le délai pour le traitement des données issues de la révision exceptionnelle des listes électorales (Article 10 du décret n°2023-464), un bilan n’est pas encore présenté par l’État du Sénégal. De nombreuses questions se posent : Quel était le nombre total de commissions administratives fixes et itinérantes ? Leur répartition par commune et par représentation diplomatique ou consulaire ? Combien de commissions administratives supplémentaires ont été créées par commune, et de sous-commissions par représentation diplomatique ou consulaire ? Combien d’électeurs ont pu faire des demandes d’inscription sur le territoire national et à l’étranger? Quel est leur nombre par commune et par représentation diplomatique ou consulaire ? Combien de modification d’inscription, de changement de statut ? Quel est le nombre d’électeurs radiés des listes électorales, par commune et par représentation diplomatique ou consulaire ? Combien de demandes d’inscription ont été rejetées ? Enfin, quel est le nombre d’inscrits sur les listes électorales sur le territoire national et à l’étranger depuis la fin de la période contentieuse, le 15 Juin 2023 (Article 12.1 du décret n°2023-464) ?
Nonobstant, cette obligation légale, le bilan de cette révision n’est pas encore communiqué aux Sénégalais par les autorités ni par conférences de presse, ni par communiqués, ni publié en ligne sur les sites web de la CENA et de la DGE (Consultés, le 15 Juillet 2023). Les listes électorales, outils d’exercice de la souveraineté du peuple, constituent ainsi un mystère opaque pour les Sénégalais.
Les Sénégalais ont non seulement le droit de participer aux élections, mais ils ont aussi le droit de savoir pour eux-mêmes si le processus électoral en cours, en vue de la présidentielle de 2024, est valide. À cet effet, l’accès à l’information sur chaque phase du processus électoral, notamment, les données sur les listes électorales, est fondamental pour leur confiance dans le résultat du scrutin de 2024. Lorsque l’Etat du Sénégal ne publient pas les données, il ne démontre pas de la transparence. À défaut de la mise à disposition au public, des statistiques sur cette révision, il est à conclure que l’État du Sénégal n’établit pas de manière transparente les listes électorales en perspective de la présidentielle de 2024, et ce conformément à l’article 5.1 du protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance de la CEDEAO, qui dispose : « Les listes électorales seront établies de manière transparente et fiable avec la participation des partis politiques et des électeurs qui peuvent les consulter en tant que de besoin.
En l’absence de statistiques officielles, la source d’information sur le bilan des opérations de révision exceptionnelle des listes électorales sont celles publiées par la presse. Il y aurait ainsi 370 000 demandes d’inscription. Ce chiffre n’a pas été démenti par l’État du Sénégal, donc il peut être considéré comme plausible.
Les demandes d’inscription sur les listes électorales ne pouvaient être formulées que du 06 avril au 02 mai 2023 (Article 1.3 du décret n°2023-464). Et les commissions administratives disposaient d’un (1) jour de repos par semaine, soit 23 jours et fonctionnaient de 08h à 18h, soit 10 heures par jour (Article 3 de l’arrêté 006593 fixant l'organisation et le fonctionnement des commissions administratives). Ainsi donc, neuf (9) jours et 14 heures ont été en réalité accordés aux 2 407 176 Sénégalais en âge de voter pour faire des demandes d’inscription. Cette courte période explique pourquoi 2 037 176 Sénégalais n’ont pas pu le faire.
Le Comité des droits de l’homme des Nations Unis a indiqué que « les États doivent prendre des mesures efficaces pour faire en sorte que toutes les personnes qui remplissent les conditions pour être électeurs aient la possibilité d’exercer ce droit. Lorsque l'inscription des électeurs est nécessaire, elle doit être facilitée et les obstacles à cette inscription ne doivent pas être imposés. » (Comité des droits de l’homme, observation générale no 25 (1996), par. 11). À cet effet, un délai suffisant doit être alloué à l’inscription sur les listes électorales afin de donner aux électeurs toutes les chances de s’inscrire.
L’État du Sénégal en organisation une révision exceptionnelle des listes électorales de neuf (9) jours et 14 heures, n’a pas donné un délai suffisant à 2 037 176 Sénégalais pour s’inscrire sur les listes électorales. Plutôt que de leur faciliter l’inscription conformément aux normes internationales, l’État du Sénégal a dressé un obstacle déraisonnable qui les en a empêché. Ainsi, 2 037 176 Sénégalais sont privés d’exercer leur droit de vote à l’élection présidentielle de 2024.
« L’exercice du droit de vote ne peut faire l’objet que de restrictions raisonnables, comme la fixation d’un âge minimum. » (Comité des droits de l’homme, observation générale no 25 (1996), par. 10). Toute autre restriction du droit de vote constitue une discrimination qui facilite la manipulation de l’électorat, compromettant la possibilité de tenir des élections libres et honnêtes.
Le droit de vote est un droit de l’homme protégé par les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Il est ainsi garanti par les instruments juridiques internationaux suivants :
Article 13 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples : « Tous les citoyens ont le droit de participer librement à la direction des affaires publiques de leur pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis, ce, conformément aux règles édictées par la loi. » ;
Les articles 3.7, 4.2 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance qui disposent respectivement que les États parties s'engagent à promouvoir « la participation effective des citoyens aux processus démocratiques et de développement et à la gestion des affaires publiques » ; « Les États parties considèrent la participation populaire par le biais du suffrage universel comme un droit inaliénable des peuples. » ;
Les droits de l’homme et la démocratie sont étroitement liés, et leur respect est essentiel pour que la volonté du peuple s’exprime dans le cadre des processus électoraux. Les élections sont au cœur de la démocratie et elles demeurent le principal moyen pour les citoyens d’exercer leur droit de participer aux affaires publiques. Aussi, la décision de l’État du Sénégal d’organiser une révision exceptionnelle des listes électorales d’une durée de neuf (09) jours et 14 heures (Article 1.3 du décret n°2023-464) qui entrave ce droit est une violation des droits de l’homme.
Il urge, dès lors, pour tout Sénégalais victime de cette décision et les potentiels candidats à l'élection présidentielle de 2024 mais aussi les partis politiques pour protéger les intérêts de leurs militants de saisir la cour de justice de la CEDEAO d’une requête pour être rétablis dans leurs droits.
Au regard du délai de sept (7) mois qui nous séparent du scrutin de février 2024, la requête est à soumettre à la procédure accélérée sur le fondement de l'article 59 du règlement de procédure de la Cour : « A la demande soit de la partie requérante, soit de la partie défenderesse, le président peut exceptionnellement, sur la base des faits qui lui sont présentés, l’autre partie entendue, décider de soumettre une affaire à une procédure accélérée dérogeant aux dispositions du présent règlement, lorsque l’urgence particulière de l’affaire exige que la Cour statue dans les plus brefs délais ».
Il sera ainsi sollicité de la Cour :
Une déclaration selon laquelle en organisant une révision exceptionnelle des listes électorales du 06 avril au 06 mai, en vue de l’élection présidentielle du 25 février 2024, l’État du Sénégal a violé ses obligations en matière de droits de l'homme en vertu du droit international des droits de l'homme, notamment, le droit de vote ;
Une déclaration selon laquelle l’État du Sénégal a manqué à ses obligations en établissant pas des listes électorales de manière transparente en vue de l’élection présidentielle du 25 février 2024 ;
Une ordonnance mandatant et obligeant l’État du Sénégal à prendre toutes les mesures nécessaires afin que les victimes soient rétablies dans leurs droits ;
Une ordonnance mandatant et contraignant l'État du Sénégal à établir les listes électorales de manière transparente ;
Une ordonnance d'injonction perpétuelle interdisant à l’État du Sénégal d'imposer illégalement en vertu du droit international des décisions qui constituent une atteinte au droit de participer à une élection.
La modification du code électorale en juillet 2021 pour y insérer des dispositions problématiques tout en rejetant tous les amendements de l’opposition, l’organisation d’une révision exceptionnelle des listes électorales sur une période très courte qui prive à plus de deux millions de Sénégalais l’exercice du droit de vote, l’absence de bilan sur la révision exceptionnelle des listes électorales, l’indisponibilité du fichier en ligne et du numéro vert qui permettent de vérifier aussi bien la présence de l’électeur sur les listes électorales et la conformité des données électorales, et enfin la collecte illégale de données personnelles d’électeurs au vu et a su de la commission de protection des données personnelles, et enfin la remise en cause par des procédures judiciaires du droit de participer aux affaires publiques de potentiels candidats, sont tous des violations des droits de l’homme relatifs aux processus électoraux en vertu du droit international des droits de l’homme. Elles permettent de soutenir que l’État du Sénégal n’est pas dans une dynamique d’organisation d’une élection présidentielle transparente, libre et honnête, le 25 février 2024.
Aussi, il faut se mobiliser pour pousser la CEDEAO à envoyer, dès maintenant, une mission d’information préélectorale pour constater et évaluer l'état de préparation de la prochaine élection présidentielle de 2024 : « A l’approche d’une élection devant se tenir dans un État membre, le Secrétaire Exécutif de la CEDEAO envoie dans le pays concerné une mission d’information. » ( Article 13.1 du protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance). Cette mission pourrait être élargie à l’Union Africaine et aux Nations Unis.
Tous les Sénégalais, la société civile, les partis politiques et les candidats potentiels ont un intérêt à agir et doivent sans délai débuter la phase du contentieux préélectoral par une contestation de la révision exceptionnelle des listes électorales, l’absence de bilan de la révision des listes électorales, l’indisponibilité du fichier électoral en ligne, et la collecte illégale de données personnelles d’électeurs par le parti politique au pouvoir.
À cet effet, en sus de la saisine de la Cour de justice de la CEDEAO, il faut dès à présent, d’une part signaler au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) les violations des droits de l’homme à l’approche de l’élection présidentielle de 2024, en particulier, les violations du droit à la participation aux élections, des droits à la liberté d’opinion et d’expression, de réunion pacifique et d’association qui sont autant de phénomènes que l’on est en train de constater, et d’autre part, demander au HCDH de mener des enquêtes ou des missions d’établissement à des fins d’alerte précoce et de prévention sur ces faits liés aux élections faisant craindre des violences.
Se mobiliser pour assurer l’inaltérabilité de la souveraineté du peuple Sénégalais qui s’exprime à travers des élections transparentes et démocratiques telle que proclamée dans le préambule de la constitution du Sénégal commence dès à présent, et sans délai.
Ndiaga Gueyeest Doctorant en Sciences de l'Information et de la Communication, Recherche en Marketing politique, Big data, Élections et Démocratie. Laboratoire: LARSIC, École Doctorale: ED-ETHOS, Université Cheikh Anta Diop de Dakar Sénégal .
par Mamadou Abdoulaye Sow
L’OCCASION DE CORRIGER LES IMPERFECTIONS DE LA CONSTITUTION
Nous nous demandons si les pouvoirs exécutif et législatif ont un peu d’égards envers le juge constitutionnel ?
A la suite d’un travail de recherche sur les mises à jour de la Constitution de 2001, le Service d’Études et de Documentation du Conseil constitutionnel a produit une note explicative postée sur le site web de la juridiction constitutionnelle depuis 2018. Il est reproduit ci-après un extrait de cette note explicative.
« À l’épreuve du temps, la Constitution, adoptée lors du référendum du 7 janvier 2001, promulguée et publiée au Journal officiel n° 5963 du 22 janvier 2001, présente un nouveau visage, en raison des nombreuses lois constitutionnelles qui ont modifié, abrogé ou remplacé la plupart de ses dispositions.
Ces différentes lois ont introduit des changements majeurs tant dans l’esprit que dans la lettre des dispositions concernées.
Cependant, malgré ces importantes modifications, aucune action concertée des autorités compétentes permettant aux citoyens de disposer d’un texte unique, consolidé et officiel de la Constitution, reflétant exactement la volonté du pouvoir constituant, n’a été entreprise.(nous mettons en gras).
L’absence de ce travail officiel de consolidation et de mise à jour fait naître des incertitudes juridiques quant à la bonne version de la Constitution (nous mettons en gras). En effet, on peut constater que plusieurs versions de cette Constitution, avec parfois des différences majeures, circulent et sont diversement appréhendées par les différents acteurs. Cette approche multiple et différenciée dans la présentation du texte de la Constitution, qui conduit à l’existence d’autant de versions de notre loi fondamentale qu’il y a d’éditeurs, chacun apportant à sa manière les corrections qu’il juge appropriées, est nécessairement source d’insécurité.
Face à cette situation caractérisée par beaucoup d’incertitudes sur le contenu des articles de la Constitution ayant fait l’objet de modifications, le Conseil constitutionnel a pris le parti, au nom du principe de sécurité juridique tel qu’il a été dégagé dans sa décision n° 1/C/2016 du 12 février 2016, d’entreprendre un travail de compilation et de consolidation.
L’objectif d’une telle entreprise est, d’une part, de recenser les lois constitutionnelles adoptées jusqu’ici et, d’autre part, d’intégrer les modifications qu’elles ont apportées afin de disposer d’un texte à jour et strictement conforme à la volonté du Constituant.
(….)
Le Conseil constitutionnel, au regard de l’objectif qu’il s’est fixé, s’est évertué, dans cette entreprise de mise à jour, à intégrer, par ordre de date, sans en rajouter ni en retrancher, les modifications édictées par les lois constitutionnelles telles qu’elles ont été publiées par le Journal officiel de la République du Sénégal, et a pris soin, pour chaque modification intégrée, d’indiquer, à l’article contenant les dispositions concernées, le numéro et la date de parution du Journal officiel qui la publie.
La mouture obtenue à l’issue de cet exercice de mise à jour de la Constitution est l’expression fidèle de la volonté présumée du Constituant telle que celle-ci résulte tant des dispositions de la Constitution du 22 janvier 2001 que de celles des différentes lois constitutionnelles postérieures.
À la lecture de cette mouture, on ne peut s’empêcher de relever les nombreuses imperfections contenues dans les lois constitutionnelles ci-dessus citées. Mais, le Conseil constitutionnel, conscient des limites de ses compétences, n’a pas entendu se substituer au Constituant et s’est, en conséquence, délibérément gardé de corriger ces imperfections.
Celles-ci prennent la forme, notamment :
d’accents omis :
de ponctuations omises ou inappropriées …
de fautes d’orthographe ou de grammaire … de survivance de certains mots ou groupes de mots après abrogation des dispositions ou suppression des institutions auxquelles ils se rattachent…
d’erreurs dans les renvois …
de problèmes de répartition des articles entre les différentes rubriques, les titres et sous-titres n’étant pas toujours en adéquation avec le contenu des articles qu’ils renferment ….
La liste n’est pas exhaustive.
La méthode, qui a été suivie par le Conseil constitutionnel, outre qu’elle lui permet d’éviter de s’arroger des prérogatives qui ne sont pas siennes, présente l’avantage de mettre en relief les problèmes d’accès intellectuel au texte de la Constitution, problèmes dont la solution passe soit par l’intervention du Constituant au moyen de l’adoption de textes de mise en conformité, soit, plus simplement, dans certains cas, par celle de la Direction du Journal officiel sous la forme d’insertion d’errata. ».
Comme précisé dans la note du Conseil constitutionnel, la liste des imperfections constitutionnelles n’est pas exhaustive. En effet, nous avons constaté l’absence de mise en conformité de certaines dispositions à caractère financier de la Constitution avec celles de la loi organique relative aux lois de finances du 26 février 2020 (LOLF) [1].
L’alinéa 4 de l’article 68 : le recours à une session extraordinaire ne se justifie pas, cet alinéa doit être supprimé
Le quatrième alinéa de l’article 68 de la Constitution prévoit le prolongement immédiat et de plein droit de la session budgétaire jusqu'à l'adoption de la loi de finances lorsque « par suite d'un cas de force majeure, le président de la République n'a pu déposer le projet de loi de finances de l'année en temps utile pour que l’Assemblée dispose, avant la fin de la session fixée, du délai prévu à l’alinéa précédent ... ».
Avec la révision constitutionnelle du 7 août 2008 ayant instauré la session unique de l’Assemblée nationale, qui court de la première quinzaine du mois d’octobre jusqu’à la fin de la deuxième quinzaine du mois de juin de l’année suivante, la rédaction de cet alinéa aurait dû être revue. En effet, la procédure prévue dans cet alinéa allait de pair avec l’hypothèse de l’examen du budget au cours de la seconde session ordinaire qui se terminait au plus tard le 31 décembre.
Sur le plan constitutionnel, l’Assemblée nationale n’a pas la possibilité d’allonger le temps de discussion du projet de loi de finances de l’année par l’ouverture de plein droit d’une session extraordinaire puisque la session ordinaire unique n’est pas close au 31 décembre. Le maintien de l’alinéa 4 de l’article 68 de la Constitution actuelle est illogique. Ainsi, cette procédure n’est pas retenue dans l’article 57 de la LOLF.
L’alinéa 6 de l’article 68 continue de faire référence au concept de services votés alors que cette notion est supprimée dans la LOLF de 2020
En lieux et place de la notion de services votés, l’article 57 de la LOLF de 2020 retient la notion d’autorisations budgétaires. Celles-ci sont définies comme étant « le volume de crédits nécessaires pour reconduire, à périmètre constant, les actions publiques dont les crédits ont fait l’objet de vote l’année précédente » [2]. Le dernier alinéa de l’article 57 de l’actuelle LOLF n’est donc pas en conformité avec l’avant dernier alinéa de l’article 68 de la Constitution.
L’alinéa 6 de l’article 68 est muet sur l’autorisation de perception des impôts existants si la loi de finance de l’année n’a pu être mise en vigueur avant le début de l’année
Alors que l’article 57 de la LOLF prévoit que « le président de la République est autorisé, conformément aux dispositions de l’article 68 de la Constitution, à continuer de percevoir les impôts existants … ».
En définitive, admettre que la LOLF, qui est un texte d’application de la Constitution donc ayant une valeur juridique inférieure puisse prévoir des procédures distinctes, reviendrait en quelque sorte à reconnaitre qu’elle complète le texte constitutionnel mais sans respecter les formes prévues pour la révision de la Constitution.
Par ailleurs, on relève des imperfections au niveau de l’article 67 de la Constitution.
L’alinéa 3 de l’article 67 : l’expression « collectivités locales » est à remplacer par les termes « collectivités territoriales »
La loi constitutionnelle du 5 avril 2016 a oublié de modifier l’article 67 en remplaçant les mots « collectivités locales » par les mots « collectivités territoriales » dans l’expression « La loi détermine les principes fondamentaux …de la libre administration des collectivités locales... ».
L’alinéa 4 de l’article 67 : le maintien des créations et transformations d’emplois publics par les lois de finances se justifie-t-il ?
L’alinéa 4 de l’article 67 de la Constitution donne compétence aux lois de finances pour opérer les créations et les transformations d’emplois publics. C’est ainsi que la LOLF de 2001 indiquait, dans son article 2, alinéa 2, que les lois de finances peuvent seules créer et transformer des emplois publics. Compte tenu du fait que le législateur organique financier de 2020 n’a pas senti la nécessité de prévoir que les créations et transformations d’emplois publics sont opérées par les lois de finances [3], on se demande quel est l’intérêt de maintenir la disposition constitutionnelle suivante : « Les créations et transformations d’emplois publics ne peuvent être opérées que par les lois de finances ».
L’alinéa 6 de l’article 67 : la notion de lois de programme devrait être supprimée
L’article 67 alinéa 6 de la Constitution mentionne des lois de programme qui déterminent les objectifs de l’action économique et sociale de l’État alors que l’article 87.1 alinéa 2 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle n° 2012-16 du 28 septembre 2012, substitue le concept delois de programmation à caractère économique, social et environnemental à celui de lois de programme.
Le gouvernement a l’obligation, en concertation avec l’Assemblée nationale, de corriger les imperfections constitutionnelles en vue de donner un caractère officiel à la version consolidée de la Constitution du Sénégal. Au lieu d’effectuer ce travail de correction et de mise à jour de la Constitution le gouvernement s’est limité à reprendre in extenso sur le site web du Secrétariat général du gouvernement la note explicative et la mouture obtenue par le Conseil constitutionnel à l’issue de son exercice de mise à jour de la Constitution. Or, comme l’indique le juge constitutionnel, « la solution passe soit par l’intervention du Constituant au moyen de l’adoption de textes de mise en conformité, soit, plus simplement, dans certains cas, par celle de la Direction du Journal officiel sous la forme d’insertion d’errata » (nous mettons en gras).
En définitive, nous nous demandons si les pouvoirs exécutif et législatif ont un peu d’égards envers le juge constitutionnel ? Si la réponse est affirmative, la tenue de la session extraordinaire du 17 juillet 2023 leur donne une occasion de corriger ces nombreuses imperfections constitutionnelles et mettre fin aux incertitudes juridiques pouvant naître de cette situation ubuesque, à moins de considérer leur inaction comme une volonté délibérée d’entretenir la confusion sur la Constitution et sur la volonté du pouvoir constituant.
[1] Nous avons publié plusieurs contributions consacrées aux lacunes et imperfections constitutionnelles dont :
Celle publiée le 05 mai 2019 sous le titre « À la recherche de la version officielle de la Constitution : plaidoyer pour la correction des imperfections et des lacunes du texte constitutionnel » ;
Celle publiée le 17 mars 2021 sous forme de lettre ouverte adressée au ministre, Secrétaire général du Gouvernement avec comme objet « L’absence d’un texte unique, consolidé et officiel de la Constitution, reflétant exactement la volonté du pouvoir constituant » ;
Celle publiée le 09 décembre 2021 sous le titre « La révision de la Constitution : une occasion offerte au pouvoir politique pour combler les lacunes et corriger les imperfections relevées par le juge constitutionnel ».
[2] Comme indiqué dans le glossaire du Guide didactique de la Directive n° 06/2009/CM/UEMOA du 26 juin 2009 portant lois de finances au sein de l’UEMOA (page 94), l’article 45 de la Directive a procédé à « la suppression des notions de services votés et mesures /autorisations nouvelles en cohérence avec les nouveaux impératifs de budgétisation en base zéro (article 61 (de la Directive) ».
[3] On se demande ici comment le législateur financier compte résoudre la question de la détermination du plafond des autorisations d’emplois rémunérés par l’Etat telle que prévue à l’article 44 de la LOLF de 2020.
par Lamine Niang
BACCALAURÉAT : INJUSTICES D'UNE SÉLECTION
Le baccalauréat, une autre relique de l’héritage colonial dont on a encore du mal à se départir, illustre en réalité les limites d’un système éducatif inégalitaire
Chaque année, on revit la même tradition de sélection académique, rythmée par un festival de cris de bonheur et de larmes de déception. Un sort scolaire scellé en l’espace de quelques jours. Le baccalauréat, ce fameux sésame qui ouvre la porte des études supérieures aux plus chanceux et recale les malchanceux qui n’auront pas satisfait aux exigences de réussite dans les différentes disciplines administrées. Aux yeux des lycéens, décrocher ce diplôme c’est plus qu’une évaluation formelle, c’est une marque de distinction sociale, un rite de passage obligatoire qui honore ou sanctionne. On se souvient encore de ce moment d’angoisse et d’anxiété qui vient nous délivrer d’un fardeau social ou nous plonger dans le jugement négatif d’une société qui accepte mal l’échec alors qu’elle nous y prédispose très souvent.
Le baccalauréat, une autre relique de l’héritage colonial dont on a encore du mal à se départir, illustre en réalité les limites d’un système éducatif inégalitaire. Entre le fossé qui sépare les écoles publiques et les institutions scolaires privées d’un côté, et, de l’autre, le favoritisme entretenu par l’État de certaines écoles publiques dites d’excellence au détriment de la grande majorité des établissements scolaires persiste l’existence d’un système scolaire à plusieurs vitesses qui n’offre pas les mêmes chances de réussite à tous les élèves. C’est à l’image d’une société marquée par ses profondes inégalités à différents niveaux.
Les projecteurs sont toujours braqués sur les réussites et on oublie ceux qui ont été évalués négativement en l’espace de quelques jours. La famille, les proches et l’État s’approprient fièrement le mérite de chaque réussite. Tant mieux. En cas d’échec, un seul coupable est pointé du doigt : l’élève. On lui reproche très souvent de n’avoir pas travaillé suffisamment. Et pourtant…A-t-il été placé dans les mêmes conditions de réussite qu’un autre élève qui n’a vécu ni grève ni manque d’enseignants pendant toute l’année scolaire? A-t-il complété l’ensemble des jours de classe et étudié dans un environnement sain, sécuritaire et propice aux apprentissages? Dispose-t-il de toute l’aide nécessaire aussi bien humaine qu’académique en cas de difficultés scolaires? Les parents ont-ils été suffisamment outillés aux besoins d’encadrement éducatif de l’enfant? Il est injustice de poser un verdict scolaire final en trois jours lorsque l’élève patauge depuis plusieurs années dans un environnement scolaire défaillant sans aucun soutien.
En 2022, le directeur de l’Office du baccalauréat s’enorgueillissait d’un taux de réussite qui dépassait à peine 50%. Comme d’habitude, on a encore applaudi les plus méritants en oubliant l’autre moitié laissée en rade, contrainte de reprendre une année scolaire entière. Pour certains, c’est la deuxième ou troisième tentative. En comparaison, la France a enregistré au Bac 2023, un taux de réussite à 90,9%, selon le ministère de l’Éducation.
C’est une tare sociétale d’instituer l’échec comme une normalité. Pensez par exemple à l’université où reprendre une année ou une session pour un étudiant reste encore l’expérience la mieux partagée. Le culte de l’excellence s’accompagne de l’égalité dans le traitement de tous les citoyens pour laisser éclore les talents de chaque enfant quelle que soit son origine sociale. L’exposition médiatique à outrance des rares élèves doués ou du nombre de réussite au bac avec la mention d’honneur cache mal les nombreuses failles et injustices d’un système scolaire qui exclue plus qu’il ne participe à l’inclusion des plus vulnérables. En effet, il est d’abord attendu de la part d’un État moindrement sensible à l’égalité des chances et conscient de la très sérieuse mission de l’éducation pour un peuple de mettre en place toutes les conditions de réussite scolaire avant de se dédouaner. Sinon, il lui sera totalement imputable tous les échecs.
Il y a ainsi une indifférence sidérante proche d’un cynisme collectif volontaire à laisser toute la responsabilité d’un échec sur les frêles épaules d’un élève à peine sorti de l’adolescence, en pensant que de simples mots d’encouragements suffiront. Un jeune d’à peine 18 ou 20 ans qui commence sa vie d’adule par un cuisant échec, c’est un sacré coup pour l’estime de soi. On ne mesure pas souvent l’étendue psychologique de recevoir une première claque à l’aube d’une vie et d’être parfois la risée bien dissimulée d’une société. La confiance en soi d’un peuple dont on espère qu’il saura compétir plus tard avec le reste du monde se construit et se forge d’abord sur les bancs de l’école.
En plus des conséquences psychologiques qui pourrait entraîner une succession d’échecs, il y a une médiocrité étatique dans la gouvernance scolaire d’accepter de dépenser annuellement des milliards pour aboutir à des échecs…
Lorsque des pratiques institutionnalisées donnent les mêmes piètres résultats, il y a alors lieu de faire un temps d’arrêt et de questionner la pertinence de ces pratiques. Le lourd héritage colonial français, dans ses différentes ramifications, nous enferme dans un immobilisme atavique.
Ailleurs dans le monde, le baccalauréat, tel qu’il se vit et se déroule en France comme dans ses ex-colonies, n’existe pas. Les évaluations de fin de parcours, en plus de leur caractère plus humain, intègrent des dimensions plus représentatives du réel niveau de l’élève tout au long de sa scolarité.