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24 novembre 2024
Opinions
par Yoro Dia
MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE, DITES À VOTRE AMI CHGUEL MAÏGA DE BALAYER D'ABORD DEVANT SA PORTE
C’est insulter le Sénégal que de cautionner que Choguel Maïga nous donne des leçons de démocratie. Notre devoir est d’aider le Mali à retrouver sa démocratie, non de se lancer dans des compromissions comme le fait Sonko pour plaire aux activistes
Devant notre Premier ministre Ousmane Sonko, son homologue malien Choguel Maïga a osé qualifier le Sénégal de «démocratie théorique». Dans une démocratie théorique, on ne perd pas le pouvoir par les urnes, comme cela se passe souvent chez nous où l’alternance est devenue la respiration de notre démocratie et une banalité politique. Dans une démocratie théorique, l’élection est un simple mécanisme de légalisation du pouvoir (Corée du Nord) et pas de remise en jeu du pouvoir (Sénégal, Etats-Unis, France, Bénin, Ghana). Ni les extravagances de Choguel Maïga ni le silence coupable de Sonko ne sont des surprises pour moi. L’essence du patriotisme est de se dire mon pays d’abord, le fameux «right or wrong, my country». Donc un patriote, au sens vrai du terme, ne peut accepter qu’on dénigre, qu’on salisse son pays de façon aussi injuste et fausse. Le silence de Sonko confirme ou son manque de courage ou ses convictions profondes, témoignant ainsi de son projet de négation du Sénégal et de ses valeurs. Et comme son ami Choguel, il regrette que l’insurrection n’ait pas réussi pour que le Sénégal perde son statut d’exception qui hante certains, comme son ami et homologue malien.
Heureusement pour le Sénégal, que les Forces de défense et de sécurité ont vaincu l’insurrection, sauvé la République et poussé ainsi nos frères égarés de Pastef à retrouver le chemin de l’opposition légale. Le seul chemin qui, chez nous, permet d’accéder au pouvoir. Au Mali, l’Armée intervient souvent pour arbitrer des conflits politiques, ce qui est le contraire chez nous. C’est pourquoi le Sénégal n’a jamais connu de rupture anticonstitutionnelle, alors que «suspendre la Constitution» est devenu la mode dans la sous-région. Un Premier ministre véritablement patriote aurait invité Choguel Maïga à balayer devant sa propre porte. C’est insulter le Sénégal que de cautionner que Choguel Maïga nous donne des leçons de démocratie. Le Sénégal préfère les alternances démocratiques aux coups d’Etat. On n’a pas à culpabiliser parce que notre vieille démocratie fonctionne. En 2022, le Sénégal a organisé trois élections suivies d’une autre en 2024 qui se sont soldées par une multitude d’alternances, alors que le Mali a connu deux coups d’Etat en six mois et les élections n’y sont pas organisées depuis 10 ans. On voit nettement où se trouve la démocratie théorique. Le discours souverainiste et panafricaniste de Choguel Maïga et de ses acolytes n’est que du vernis idéologique pour légitimer la forfaiture des coups d’Etat.
Nous sommes tous des panafricanistes, mais nous préférons le panafricanisme démocratique à celui des putschistes. Jamais une aussi belle cause n’a eu des avocats aussi illégitimes. Le discours sur le souverainisme et le panafricanisme n’est que de la poudre aux yeux pour masquer la forfaiture des coups d’Etat et pour les activistes, un «soutien mercenaire» à la Russie. Le souverainisme ne saurait être un simple changement de maître blanc ou passer de supplétif français à supplétif russe, ou reprocher à Macron de ne pas s’être ingéré dans la crise politique au Sénégal comme l’a fait le Premier ministre Sonko en recevant Mélenchon. Le souverainisme commence par la souveraineté du peuple, et au Mali, elle est confisquée par une junte qui renvoie les élections aux calendes grecques. Le Mali a été une grande démocratie, et comme la Gambie, elle va retrouver ses réflexes et mécanismes normaux de démocratie dès que le virus kaki sera balayé par la vague démocratique qui s’annonce et qui emportera des dinosaures politiques comme Choguel dans les poubelles de l’histoire. Sonko, lui, au moins, est légitime parce que son parti a été élu démocratiquement, alors que Choguel Maïga est un passager clandestin qui pense instrumentaliser les militaires alors qu’il ne pèse rien politiquement et démocratiquement, si ce n’est servir de faire-valoir politique et idéologique. Le réveil a toujours été brutal pour les hommes politiques qui ont pensé utiliser les militaires comme voiture bélier sur le plan politique. Le Sénégal est viscéralement lié au Mali, mais nos régimes sont différents. Notre devoir est d’aider le Mali à retrouver sa démocratie, non de se lancer dans des compromissions comme le fait notre Premier ministre pour plaire aux activistes panafricanistes.
Monsieur le Premier ministre, avoir le sens de l’histoire, c’est comprendre que le printemps des coups d’Etat en Afrique de l’Ouest ne peut être qu’un intermède militaire en attendant la vague démocratique. C’est le Sénégal, avec ses alternances démocratiques et sa marche vers l’émergence, qui est dans le sens de l’Histoire. Dites-le à votre ami Choguel. Le retour à la démocratie est la seule voie de salut pour le grand peuple du Mali que les putschistes tirent vers le bas, alors que ce pays était dans l’avant-garde démocratique et historique. Le Sénégal restera dans l’avant-garde malgré la fascination de notre Premier ministre pour l’arrière-garde putschiste, alors que les élites et les peuples de ces pays sont fascinés par l’avant-garde démocratique sénégalaise qui bat en brèche les thèses fallacieuses des putschistes. La preuve en est que d’alternance en alternance, le Sénégal marche vers l’Emergence, alors que le Mali va de transition en transition et de recommencement en recommencement. Choguel Maïga a au moins compris que notre Premier ministre est tellement narcissique qu’il préfère qu’on dénigre le Sénégal aussi longtemps qu’on joue des notes de kora politiques à sa gloire personnelle.
PAR Fatoumata Sissi Ngom
PROPOSITION POUR LA CRÉATION, DANS LE PROJET, D’UN INDICE NATIONAL COMPOSITE POUR LA MESURE DU PROGRÈS ÉCONOMIQUE AU SÉNÉGAL
Ce "Teranga Index" ou "Diomaye Index" ambitionne de capturer la réalité multidimensionnelle du développement sénégalais, englobant le bien-être des citoyens, la cohésion sociale et la vitalité des territoires
Le Projet du président Diomaye Faye est attendu dans une certaine fièvre par le peuple sénégalais. Il devra porter en lui la tenue (ou non) des nombreuses promesses électorales pour l’amélioration de la vie des populations, le respect de l’environnement, et la bonne gouvernance. Mais aucun projet politique ne sera efficace sans les bons indicateurs d’évaluation et de suivi, et ce selon un maillage territorial et urbain. Je propose, dans le cadre du prochain référentiel de politiques publiques qui composera le Projet, la création d’un indice économique national composite, qui pourrait s’appeler “Teranga Index”, “Diomaye Index”, ou comme le prototype que je développe, “Ngom Index”, qui va au-delà du PIB, et qui s’appliquera aussi localement. Un tel Index permettra une connaissance plus fine du progrès économique et social au Sénégal, tout en mettant l’humain, les territoires et le monde vivant au coeur des priorités. Cela permettra également un financement du développement local plus efficace et une coopération internationale maitrisée. Les individus vivent dans des villes et non dans des pays.
Cet indice économique, qui devrait être élaboré par le ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération du Sénégal, agrégera aussi bien le Produit intérieur brut, que d’autres indicateurs de bien-être et de cohésion sociale. Il est tout à fait possible d’estimer des PIB régionaux et à un niveau plus granulaire. Il est heureux de voir que la Direction Générale de la Planification et des Politiques Économiques (DGPPE) du ministère de l’Économie a débuté des réflexions scientifiques et innovantes pour l’estimation des PIBs régionaux à l’aide des données satellitaires d’intensité lumineuse nocturne.
La définition, l’élaboration et la mesure d’un tel Index nécessitera de collecter des données. L’État sénégalais pourrait utiliser le levier du digital et de l’économie numérique, et également impliquer les populations locales qui deviennent ainsi actrices du changement dans les contours de la décentralisation. Une condition subsiste cependant : une application rigoureuse de la régulation en matière de sécurité et protection des données notamment personnelles, et c’est rassurant de voir que le Ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique inscrit ces enjeux dans ses priorités. Avec un tel indice économique composite, le Sénégal sera précurseur en la matière en Afrique sur cette question de la mesure du bien-être et de son intégration dans la mesure du progrès économique.
La nécessité d’un déplacement de perspective économique et politique : pourquoi la mesure du PIB ne suffit plus
Dès les années 70, des économistes et experts du développement sonnent l’alerte contre la surexploitation des ressources de notre planète, et la nécessité d’avoir une nouvelle approche à l’environnement, le développement et la croissance des villes. The Limits To Growth (Meadows et al.), paru en 1972 ou encore le rapport Brundtland, Notre avenir commun, paru en 1987 constituent des catalyseurs d’initiatives mondiales sur la redéfinition du progrès économique et social. En Afrique, Cheikh Anta Diop ou encore Joseph Ki-Zerbo prônaient déjà un modèle holistique de développement durable et écologique, adapté au contexte africain.
Le rapport Stiglitz-Sen-Fitoussi (Commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social), paru en 2009, recommande l’élaboration d’un nouveau cadre de mesure du progrès et de la prospérité, au-delà du PIB et du Seuil de pauvreté ((à 1341 FCFA par jour, prix 2022, taux d’échange moyen USD EUR : 0,951).
Cela fait donc plus de 50 années que les discussions autour de la nécessité de mesurer le progrès avec des indicateurs liés au bien-être individuel et collectif, et les talents, foisonnent. Les rapports et autres ouvrages se succèdent et se ressemblent. Malheureusement, par manque d’impulsion organique, en Afrique, nous en sommes toujours au stade circulaire et répétitif des panels, conférences et tables rondes. Il est temps de passer à l’action et de mettre en place des cadres concrets et de les appliquer avec rigueur. Le choc du Covid-19 n’a vraisemblablement pas été assez secouant. Le Projet du nouveau bureau présidentiel sénégalais, tant attendu par les citoyens sénégalais et la diaspora, offre une formidable opportunité pour l’émergence d’idées nouvelles et la créativité organique en matière de mesure du progrès économique et social dans chaque territoire.
Un tel indice permettra d’informer la définition des politiques publiques et leur évaluation à partir d’un faisceau d’indicateurs qui reflètent véritablement la vie des citoyens. Il pourrait intégrer des indicateurs de capital humain, de bien-être et de bien-vivre. Aussi, et c’est une conclusion que j’ai personnellement menée, un tel indice permettra d’éclairer véritablement sur les contours des responsabilités de l’État, puis des communes et mairies, et de redonner ensuite au citoyen le pouvoir sur sa propre vie et de lui rappeler à quel point il doit prendre les commandes de son véhicule. Je reste persuadée qu’un tel Index illuminera, avec des données et évidences tangibles, le rôle fondamental de la famille dans le tissu national, la prospérité individuelle et collective, et la transmission intergénérationnelle. Malgré l’hémorragie de promesses électorales, compréhensible en tant d’élections, il est important de conscientiser que l’État et ses démembrements, et ce dans tous les pays du monde, ne peuvent pas tout.
Sur ce dernier point, s’il y a une chose qui m’a agréablement surprise dans le gouvernement Sonko, c’est le ministère de la Famille et des Solidarités. J’ai été extrêmement satisfaite de voir le libellé “femmes” disparaître du nom de ce ministère qui a trop longtemps été utilisé pour assigner à la femme une position de victime et de demandeuse d’égalité, qui donc voudrait absolument travailler de la même façon que les hommes, et qu’un gouvernement central doit sauver. Même s’il est fondamental de mettre en place des politiques pour réduire les inégalités structurelles entre les hommes et les femmes, et les masculinités toxiques, - je suis la première à défendre cela - il est urgent de prendre de la distance avec la pensée féministe contemporaine. Celle-ci, de mon point de vue, utilise une colère non traitée, sème malheureusement le chaos dans notre société, opposent les hommes et les femmes et pulvérise les noyaux familiaux. Le ministère de la Famille et des Solidarités est un puissant signal envoyé sur l’importance d’avoir un gouvernement qui domine - au sens de prise de responsabilités, ce qui est son rôle - et qui déploie sa volonté selon les valeurs de notre société.
Propositions concrètes pour la création d’un indice économique composite sénégalais
D’abord, le nom, on pourrait penser, comme annoncé plus haut, à un “Diomaye Index”, ou “Ngom Index”, ou encore “Teranga Index” pour éviter sa suppression lorsque Bassirou Diomaye Faye ne sera plus président de la République.
Puis, sa composition : Produit intérieur brut, complété par le Capital Humain et le Bien-être objectif et subjectif, et même d’autres aspects à définir : on peut faire preuve de créativité organique.
PIB - Produit intérieur brut
Le PIB est le principal indicateur de croissance économique. Il vise à mesurer la production de richesses d'un pays, dans les secteurs publics et privés. Selon l’ANSD, le Produit intérieur brut est calculé en partant d’un regroupement des branches de la Nomenclature d’Activités des États membres d’AFRISTAT, qui est l’Observatoire Économique et Statistique d'Afrique Subsaharienne. Il est évalué en valeur aux prix courants et en volumes chaînés (avec une année de référence). Nous pouvons voir - et c’est une économiste qui dit - que la définition du PIB est vraiment ennuyeuse et son utilisation est assez limitée, au-delà de l’élaboration des comptes nationaux. Il est temps d’aller au-delà des statistiques pures. Clairement, il est urgent de compléter le PIB avec d’autres indicateurs plus concrets reflétant la réalité de notre économie, comme l’informel et l’économie des soins, souvent prodigués par les femmes, et non rémunérés.
Capital Humain
Le capital humain correspond à “l’ensemble des connaissances, compétences et conditions de santé que les individus accumulent tout au long de leur vie et qui leur permet de réaliser pleinement leur potentiel” (Banque Mondiale). De sorte que le développement du capital humain permet aux individus d’être qui ils sont vraiment, et de contribuer en même temps et de façon productive à l’économie et au développement de leur pays. Les secteurs où il faudrait élaborer des indicateurs et ensuite des politiques publiques ainsi améliorées sont l’éducation, l’alimentation, l’acquisition de compétences, la formation continue, l’accès à un emploi durable. Un indicateur de capital humain pourrait se baser sur des données collectées dans les familles, quartiers, lieux de travail. Des exemples existent déjà au niveau international et il n’est pas nécessaire de réinventer la roue. Il suffit d’adapter ces cadres, de les remodeler, et de les compléter avec des spécificités purement sénégalaises. Nous sommes tous des humains avec les mêmes besoins essentiels. Il n’y a rien de tel que l’Africain spécial qui doit se décoloniser : ce sont des illusions - l’Africain, qui est constitué de la même matière que les autres êtres humains de la planète, a les mêmes besoins essentiels que l’Européen, l’Asiatique ou encore l’Américain : l’accès aux connaissances, informations et compétences qui l’intéressent, une maison plus grande, des machines qui permettent de gagner du temps, et du confort. Parmi les cadres qui existent à l’international et pour lesquels des Africains ont contribué à leur définition, nous pouvons citer le Human Development Index, développé par l’UNDP, et le Human Capital Index, préparé par la Banque Mondiale.
Bien-être objectif et subjectif
Selon le Larousse, le bien-être est un “état agréable résultant de la satisfaction des besoins du corps et du calme de l’esprit”. Mais en considérant le bien-être et le bien-vivre dans sa globalité dans un contexte de politiques publiques, cette définition peut s’appliquer aussi bien au niveau des individus et des familles, qu’au niveau des institutions, entreprises, et du gouvernement. En effet, les familles, les institutions et le gouvernement peuvent être considérés comme des corps et des esprits dont il faut prendre soin et qui ont un impact dans le tissu national plus large.
Le bien-être objectif englobe la santé, la situation financière, la qualité de l’environnement naturel, l’accès à l’énergie, le logement, la mobilité, mais aussi la sexualité, pour ne citer qu’eux.
En plus du bien-être objectif, il y a le bien-être subjectif qui est une composante clé du bonheur. À cela, chaque sénégalais devra répondre à la [terrible] question : êtes-vous heureux ? L’estime de soi, la confiance en soi et le niveau de confiance entre les individus, dans les institutions et administrations publiques constituent également des dimensions du bien-être subjectif, et il est possible d’en élaborer des indicateurs basés sur des données collectées et des calibrages définies. En cela, il convient d’innover en se basant sur les réalités et connaissances nationales, et de s’inspirer de ce qui se fait à l’internationale également, notamment avec l’OCDE.
Le bien-être des enfants, qui seront les adultes de demain, devra également être une priorité de tous les ministères concernés.
Quelques options sur comment procéder pour créer cet indice composite
Constituer un groupe d’économistes experts, de statisticiens et de spécialistes en matière de politiques publiques pour s’emparer de la question de la création d’un Diomaye Index ou Teranga Index. Le “Ngom Index” pourrait être mise à disposition pour inspirer, contribuer.
Choisir une ville pilote (par exemple Mboro)
Procéder à une première phase d’application
Généraliser progressivement et pertinemment à d’autres villes
En réalité, un indice territorial suffirait (exemple Teranga Index - Mboro ou Kaffrine). Il pourrait être agrégé au niveau national, mais ce ne sera pas pour se comparer à d’autres pays. Cela n’empêche pas de mettre à jour les indicateurs existants qui s’alignent à l’internationale, car le multilatéralisme et la coopération ont de très beaux jours devant eux. C’est cela l’endogénéité et je pense que c’est en ligne avec la vision endogène du nouveau président sénégalais et de son gouvernement. Encore une fois, les gens habitent dans des villes et non dans des pays. Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko peuvent faire des territoires des lieux de création politique et de créativité économique, conditions sine qua non pour une transformation réussie et une guérison nationale, ce que je souhaite sincèrement à mon cher pays.
Fatoumata Sissi Ngom est analyste de politiques à l’OCDE, écrivaine, ingénieur, présidente fondatrice de l’ONG Alchimie et Morphose Africaine : https://www.alchimieafrique.org/.
Par Marem KANTE
PRESSE ET MEDIA SENEGALAIS : SOLUTIONS POUR UNE INDEPENDANCE FINANCIERE ET JUTEUSE
Qu’attendez-vous pour mettre en place un grand consortium des médias et industries culturelles et créatives du Sénégal regroupant tous les organismes représentant les acteurs économiques du secteur ?
Tout d’abord, suite à la réussite totale de la grève de la presse sénégalaise, saluons la décision du gouvernement Diomaye Faye d’avoir annoncé lors du Conseil des ministres, d’ouvrir «un dialogue rénové» avec la presse pour trouver ensemble des solutions de redressement fiscal appropriées pour le paiement des impôts et pour le bon fonctionnement des entreprises. Au-delà de cette décision et l’accompagnement qui a toujours été déployé à travers des subventions et conventions octroyées par l’Etat du Sénégal à la presse et aux médias, il est grand temps pour l’ensemble du monde médiatique sénégalais de se mobiliser pour opérer ensemble un grand pas vers l’indépendance financière et juteuse. L’adage populaire dit : «Aide-toi et le ciel t’aidera.» Si la «journée sans presse» a été une réussite totale, suite à la pression fiscale du gouvernement, c’est parce qu’il y’a une force collective qui a porté le mot d’ordre de grève, y compris les acteurs et la population. Certes la presse et les médias auront toujours besoin du soutien indéfectible de l’Etat et des pouvoirs publics mais la presse et les médias doivent comprendre que cette force collective qui a permis de réussir une «journée sans presse», constitue une grosse opportunité pour ouvrir d’autres perspectives économiques pour le secteur. En quoi faisant ? Je partage ici quelques éléments de réponse.
Nous sommes à l’ère du numérique. Et qui dit numérique dit presse et audiovisuel. Et qui dit numérique dit également industrie culturelle et créative. C’est maintenant ou jamais pour le monde des médias et de la presse au Sénégal de se donner la main, de surpasser les différences d’égo, d’assainir le milieu et de le réorganiser pour créer plus de richesses pour eux-mêmes et pour l’économie sénégalaise. Car aujourd’hui, il est inadmissible que des patrons de médias et les acteurs culturels et créatifs ne puissent pas mettre ensemble leur pouvoir entrepreneurial et capitaliste pour la souveraineté économique du Sénégal. Quand je vois tous ces talents et ces innovations dans le monde culturel et créatif (télévision, presse, cinéma, musique, sport, dance, livre, spectacle vivant, arts graphiques et plastiques, jeux vidéos, créateurs d’accessoires, etc., chacun se débrouillant dans son petit coin pour réaliser son projet artistique et créatif, c’est là où je me rends vraiment compte que nous n’avons toujours pas saisi le sens profond de la citation «l’union fait la force». Car il faut le dire, malgré le talent et l’innovation, la rémunération reste faible pour la plupart des acteurs du secteur et également pour la distribution équilibrée des dividendes les droits d’auteurs et les droits voisins. Sans compter les difficultés pour la protection sociale.
Pourquoi l’industrie audiovisuelle occidentale ou asiatique est-elle si puissante ? Qu’est-ce qui fait la réussite et la force de la créativité Hollywoodienne ? Pourquoi le Nigeria est le seul pays représenté au classement de Spotify pour l'Afrique subsaharienne ? Pour ceux qui ne connaissent pas Spotify, c’est un service numérique qui propose de la musique, des podcasts et des vidéos, et qui offre un accès à des millions de titres et à d'autres contenus de créateurs du monde entier. C’est parce que tout simplement, ailleurs, ils ont mis en place un dispositif structurant qui prend en charge toutes les compétences culturelles et créatives pour créer plus de valeur ajoutée et offrir aux consommateurs des produits créatifs diversifiés. Vous acteurs du monde médiatique sénégalais ! Avez-vous compris que non seulement la presse est la première source d’information mais également le premier vecteur et la première niche de l’industrie culturelle et créative ? Et grâce au numérique, la presse a devant elle dans un océan d’opportunités incommensurablement à saisir pour fournir de multiples services de qualité aux consommateurs selon les goûts et le pouvoir d’achat.
Alors qu’attendez-vous pour mettre en place un grand consortium des médias et industries culturelles et créatives du Sénégal regroupant tous les organismes représentant les acteurs économiques du secteur ?
C’est bien beau que chacun parvient à gagner individuellement ses petits milliards ou millions de FCFA. Pour ma part, je considère cela comme une goutte d’eau devant l’océan d’opportunités en face de vous. Votre secteur deviendra aussi puissant que Orange Telecom si vous décidiez à collaborer ensemble pour donner plus de visibilité à la créativité sénégalaise et ainsi participer à la compétitivité économique du pays. En vous donnant la main pour mettre en place un grand consortium des médias et des industries culturelles et créatives, non seulement vous allez capitaliser toutes les productions artistiques, cinématographiques, culturelles, musicales, littéraires et autres du Sénégal, mais également aucun acteur parmi les deux secteurs, n’aura des difficultés pour la réalisation de ses projets. Car le consortium sera là pour l’accompagnement sur le plan technique, matériel et financier ainsi que la promotion sur le plan national et international.
La joint-venture est la force d’une vraie industrie. Car une seule abeille ne peut produire du miel. Il faut un essaim d’abeilles pour produire ce liquide si juteux et précieux. Imaginez combien de millions d’emplois directs et indirects et de milliards de chiffres d’affaires que vous pourriez réalisés avec ce consortium ?! Alors s’il vous plaît, go pour une grande industrie audiovisuelle, culturelle et créative structurante qui va regrouper tous les métiers et activités c’est-à-dire toutes les compétences liées à la création, la production et la diffusion/distribution dans le secteur. Acteurs de la presse et des médias, ne vous sous-estimez pas. Car vous êtes à la fois un terrain d’expression non pas pour le politique mais pour toutes les couches de la société. Parce que tout simplement vous êtes une source essentielle de richesse économique, culturelle et sociale. Donc une solution au défi de développement que tout le monde veut pour le Sénégal.
Je vous encourage à le faire avec l’appui du gouvernement Diomaye Faye. Je ne suis pas de la presse ni des médias, juste une amoureuse de l’écriture, qui aime partager ses idées pour servir.
One love.
Par Babacar MBAYE
LE SENS D’UN SYMBOLE
En célébrant le Débarquement de Provence, la France a été inspirée de rendre hommage appuyé aux soldats africains qui ont permis sa libération.
Le président Bassirou Diomaye Faye était attendu en France pour la célébration de la 80ème édition de la Libération en 1944, sur invitation de son homologue français. Finalement, il a décidé de se faire représenter par une délégation à la tête de laquelle figure le général Biram Diop, ministre des Forces armées. Cette cérémonie importante a revêtu un cachet particulier pour le Sénégal au regard de ses relations avec la France ; relations tumultueuses si l’on se fie aux positions enflammées de certains et aux discours dégagistes d'autres.
Mais en tout état de cause, les relations entre Paris et Dakar demeurent solides dans le fond au regard des intérêts stratégiques entre nos deux pays. Ce n’est pas pour rien que le Président Faye a consacré son premier déplacement hors d’Afrique en Paris avec un tête-à-tête avec le Président Macron. Il y est retourné quelques semaines plus tard dans le cadre de son agenda international.
En célébrant le Débarquement de Provence, la France a été inspirée de rendre hommage appuyé aux soldats africains qui ont permis sa libération. En effet, parmi les 450 000 hommes qui ont pris part au Débarquement en Provence, 250 000 étaient venus d’Afrique. Mieux, selon un chiffre relayé par le média francophone TV5, la majorité d’entre eux des Africains ayant libéré le Sud de la France foulait « la terre de la métropole pour la première fois ». L’ancien député de Guyane, Gaston Monnerville, en 1945 avait lancé « Sans son empire, la France ne serait qu'un pays libéré. Grâce à son empire, la France est un pays vainqueur ». Les tirailleurs sénégalais, nom commun dans lequel on met tous les jeunes tunisiens, sénégalais, soudanais, marocains, ont permis à la France de sortir du joug de l’occupation allemande et de sortir vainqueur avec les Alliés de la Seconde Guerre mondiale.
L’histoire de la relation entre la France et le Sénégal est vieille et elle va infirmer les prévisions des Cassandre. Elle a été ponctuée par des moments de victoire comme celle sur l’hydre nazie mais elle a aussi ses pans tragiques. C’est avec amertume et révolte qu’une partie des Sénégalais rappellent le « Massacre de Thiaroye » en 1944, quand après leur engagement, les tirailleurs, qui réclamaient leur dû, ont été tués. Le bilan est sujet encore à de nombreuses polémiques, en attente de l’accès des autorités sénégalaises aux archives de la colonisation. Cette année d’ailleurs, le Sénégal va commémorer le 80ème anniversaire de ce massacre. Il serait opportun qu’une fois que la victoire historique établie de panser les plaies et de saluer les efforts entrepris depuis pour faire de l’axe Dakar-Paris un axe dynamique et fertile en succès politiques, économiques et diplomatiques.
« La paix est l’œuvre de la Justice » disait un grand penseur français. Et la justice est rendue quand les responsabilités historiques sont établies afin d’avancer vers les défis contemporains, nombreux et urgents, comme le climat, la coopération sécuritaire, le partenariat économique, etc.
Le geste des autorités françaises de mettre le Sénégal au cœur de ce 80ème anniversaire du Débarquement est un pas en avant dans l’achèvement de la réconciliation et en vue de redonner un nouveau souffle à l'axe Dakar - Paris conformément au communiqué conjoint Macron-Faye signé en juin dernier. Il montre aussi qu’au-delà des États, des hommes et des femmes nourrissent la relation et la rendent dynamique et pérenne. Car ce 15 août, dans la région Provence, sur un bâtiment de la marine, la délégation sénégalaise a été honorée pour rendre justice à l’histoire des Tirailleurs sénégalais et rappeler leur contribution immense à la libération du peuple français. Cette délégation était composée des anciens tirailleurs sénégalais Yoro Diao, Ousmane Badji, Ousmane Sagna et Ndongo Dieng pour rappeler que l’histoire surplombe toujours nos actions présentes. Étaient aussi présents des étudiants et des professeurs du lycée de Thiaroye pour mettre au cœur de ces festivités l’urgence de transmettre aux générations futures le sens du devoir, du sacrifice et du courage d’hommes qui se sont battus pour libérer la France du nazisme. Parmi les invités aussi, des descendants de tirailleurs et des membres de l’association « Fondation pour la mémoire de l’esclavage ». Ces hommes, ces femmes et ses enfants étaient sous l’ombre tutélaire d’un héros du Sénégal, Oumar Diémé, ancien tirailleur ayant également été porteur de la flamme le 25 juillet dernier pour les Jeux Olympiques de Paris 2024.
En mettant les Tirailleurs sénégalais au cœur des célébrations, autorités sénégalaises et françaises ont voulu rappeler aux citoyens des deux pays la mémoire d’Alioune Fall, fils de Thiès, mort en 2019. Il était le dernier survivant sénégalais recensé du débarquement de Provence avant son décès.
Les Africains ont joué un rôle de premier plan dans la libération de la France et de l’Europe de la barbarie nazie. La leçon que nous pouvons tirer de leur sacrifice est de promouvoir la paix, la tolérance, le dialogue entre les rives de la Méditerranée pour que la tragédie de la Guerre mondiale ne se répète jamais.
Par Mamadou KASSE & Mounirou FALL
REFORMULER LE PARADIGME DE LA PRESSE AU SENEGAL, SEULE ISSUE VIABLE
Feu Babacar Touré disait «que les journalistes fassent ce pour quoi ils ont été formés, c’est à dire traiter l’information … et laisser aux gestionnaires la latitude de gérer l’entreprise de presse»
Mamadou KASSE & Mounirou FALL |
Publication 17/08/2024
On se rappelle encore une boutade de feu Babacar Touré, alors président du Groupe Sud Communication, s’adressant aux jeunes journalistes (il y a 30 ans maintenant) en présence de Ndiaga SYLLA et Sidy Gaye, au détour d’une discussion, disait «que les journalistes fassent ce pour quoi ils ont été formés, c’est à dire traiter l’information … et laisser aux gestionnaires la latitude de gérer l’entreprise de presse»
Cette option a été salutaire pour le groupe multimédia sud communication qui s’était attaché les services de gestionnaires financiers à même d’assurer la viabilité commerciale du groupe, les journalistes se focalisant sur la gestion et le traitement de l’information. Le Soleil, en tant qu’entreprise de presse, a, lui aussi été soumis aux mêmes exigences de gestion au lendemain de la première alternance en 2000. Sur avis de ses conseillers, le président Abdoulaye Wade, fraîchement arrivé au pouvoir, voulait donner un nouveau souffle et une viabilité au quotidien national en créant un poste de directeur général adjoint (gestionnaire) pour seconder le mythique directeur général. Le passage des anciens patrons du Soleil avait convaincu les nouvelles autorités de l’urgence d’avoir des gestionnaires à côté des journalistes éditorialistes.
L’entreprise de presse, comme toute autre entreprise doit obéir à des critères de gestion et de rentabilité. La seule subtilité dans ce sens est qu’au Sénégal, la présence effective de la presse dans le champ public est consubstantielle à la vie démocratique. Depuis L’indépendance obtenue en 1960, l’évolution politique s’est Toujours accompagnée d’une expression des libertés dont celle de la presse.
D’où vient-on ?
Après une période de balbutiement d’une dizaine d’années où la presse était réduite aux organes officiels d’Etat: L’Office de Radiodiffusion Télévision Sénégalaise (ORTS) devenu la Radio-Télévision Sénégalaise (RTS), l’Agence de Presse Sénégalaise ; (APS) et le quotidien national Dakar Matin devenu Le Soleil. A partir de 1970, on assista à l’émergence d’une presse d’opinion animée par les militants des partis politiques de la gauche sénégalaise. Il s’agissait de journaux clandestins souvent distribués sous le manteau. Ce n’est qu’à partir de 1974 marqué par la création du premier parti d’opposition du Président Abdoulaye Wade que la presse privée d’informations générales fit son apparition avec notamment le journal satirique le Politicien du journaliste Mame Less Dia, Promotion de Boubacar Diop suivis d’autres petits journaux à durée de vie plus ou moins courte.
Certains d’entre eux duraient le temps d’une élection et étaient financés par les Politiciens. La chute du mur de Berlin qui consacre la fin de la guerre froide a entrainé le dépérissement des journaux de gauche jusque-là soutenus par les pays de l’Est. Cette rupture avec les pays socialistes consacre la fin des journaux d’opinion et le début de la professionnalisation de la presse avec l’arrivée des journalistes formés à l’Université.
Le Centre d’Etude des Sciences et Techniques de l’Information (CESTI) a fourni des jeunes journalistes qui, petit à petit, ont pris la place d’anciens instituteurs où agents n’ayant pas pu bénéficier d’une formation en journalisme. La qualité des journaux s’en trouvait améliorée en termes de contenus et de mise en page.
1987, année de l’éclosion
La naissance de ces journaux à partir de 1987 est facilitée par le fait que la liberté de presse et d’expression est garantie par la Constitution sénégalaise qui précise que «chacun a le droit d’exprimer et de diffuser librement ses opinions par la parole, la plume, l’image, la marche pacifique, pourvu que l’exercice de ces droits ne porte atteinte ni à l’honneur et à la considération d’autrui, ni à l’ordre public.» Et selon l’Article 11 de la Constitution, «la création d’un organe de presse pour l’information politique, économique, culturelle, sportive, sociale, récréative ou scientifique est libre et n’est soumise à aucune autorisation préalable. » La loi du 02 février 1996 va plus loin en soulignant que tout organe de presse peut être publié sans autorisation préalable et sans dépôt de cautionnement, après avoir procédé à un dépôt légal, avant distribution, au ministère de l’Intérieur. Cette disposition a permis la création de plusieurs organes de presse à partir de 1987 avec Sud magazine, walf hebdomadaire, Cafard libéré, le Témoin. Puis, à partir de de 1996, les groupes de presse tels que Sud et Walf constitués de quotidiens et de radios. La création des groupes de presse résulte, pour l’essentiel, de la déclaration de Windhoek prônant une plus grande liberté de presse et l’accès des populations à l’information.
C’est à partir de 2000 avec la première alternance démocratique au Sénégal qu’on assista à une explosion du paysage médiatique avec des dizaines de journaux et de radios démontrant ainsi la vitalité de la presse sénégalaise. La mutation vers de grands groupes de presse disposant de tous les organes s’est opérée à partir de cette première alternance et s’est accélérée avec l’arrivée de nouveaux investisseurs comme les hommes d’affaires, les capitaines d’industrie, les artistes dont le chanteur Youssou Ndour.
Leur business plan est basé sur une approche axée sur le multimédia (presse, audiovisuel, numérique) afin de capter le maximum de marchés et d’opinion. C’est dire que le paysage médiatique sénégalais est caractérisé ces dernières années par une croissance exponentielle de groupes et d’organes de presse. Cette situation a conduit le ministère de la communication, en charge de la presse, à initier, en 2011, des concertations pour faire l’inventaire des entreprises exerçant dans le domaine des médias (radiodiffusion- télévision, presse écrite, presse en ligne).
Vous avez dit « finances des organes de presse »
» Selon l’Agence nationale des statistiques, l’exploitation des statistiques financières des entreprises ayant déposé leurs états financiers au Centre Unique de Collecte de l’Information (CUCI) pourrait permettre de disposer de statistiques fiables sur le nombre d’organes et des éléments d’appréciation sur leur chiffre d’affaire, le nombre d’agents en activité dans ce secteur, leur capacité à générer de la valeur ajoutée, leur rentabilité, leur solvabilité et leur capacité à rembourser les dettes.
Cet atelier tenu en 2011 avait émis de nombreuses recommandations portant, entre autres, sur la publication régulière par les imprimeurs des informations sur les tirages des journaux, l’obligation aux journaux de se soumettre au dépôt légal, une campagne de communication sur le passage de l’analogique au numérique en 2015, une collaboration entre le ministère de la communication et l’ANSD pour établir des statistiques fiables sur les questions relatives au secteur des médias. La sincérité des chiffres de tirage et du classement des journaux sur la base d’un faisceau de critères acceptés pares professionnels aurait, en effet, permis de mieux assainir le secteur, mais aussi d’asseoir les conditions d’un octroi de la subvention annuelle à la presse. Cette subvention a fortement évolué au fil des ans, passant de 80 millions en 1990 à 700 millions en 2015 et 1,4 milliard de francs CFA en 2021. Quelques 200 organes de presse sont inscrits dans ce programme de subvention (presse écrite, radios, télévisions, presse électronique) ainsi que les écoles de formation en journalisme dont le CESTI. Cette école multinationale reçoit, depuis 2005, environ 10% de l’enveloppe et assure la formation d’une trentaine de journalistes venant des différentes rédactions.
Ainsi, en plus de la formation universitaire dispensée à des étudiants admis à la suite d’un concours très sélectif, une formation professionnelle est octroyée aux non-diplômés évoluant dans les médias. D’autres modes de formations sont également dispensées à travers les différents réseaux de journalistes Institut Supérieur des Sciences de l'Information et de la Communication (ISSIC) notamment (environnement, santé, sports, jeunes reporters, multimédias, etc…). Une autorité de régulation, le CNRA assure la veille, le contrôle et la régulation des médias et impose des sanctions sous diverses formes. Tandis que les Syndicat des Professionnels l’Information et de la Communication du Sénégal (SYNPICS) surveille le respect de l’éthique et de la déontologie à travers un organe d’autorégulation appelé le CORED. La carte professionnelle de journaliste est délivrée par cet organe qui, par cette option stratégique, tente d’assainir le secteur des médias et éviter ainsi qu’il ne soit gangréné par des non-journalistes qui discréditent la profession.
La convention collective en questions
Pourtant, en plus de la convention collective des journalistes et techniciens de la communication sociale qui détermine les conditions d’exercice de la profession depuis 1996 avec les modalités de paiement des journalistes, un nouveau code de la presse vient d’être élaboré, définissant le statut du journaliste et celui de l’organe de presse. Lequel, dans les dispositions nouvelles, n’est plus un simple organe de presse sans obligation comptable, mais plutôt une entreprise de presse ayant les obligations d’une entreprise commerciale. Mais ce nouveau code de la presse élaboré pendant une dizaine d’années, tarde à être appliqué dans toutes ses dispositions, même si la loi a été votée en 2020. Les journalistes attendent toujours les décrets d’application qui vont permettre de le rendre opérationnel.
Il convient de relativiser la viabilité des médias qui n’ont pas les mêmes statuts, les mêmes modes de financement, les mêmes formes de gestion. C’est la raison pour laquelle certains organes à financement unipersonnel ne vivent pas longtemps tandis que les groupes de presse disposant d’outils de gestion performants arrivent à tenir. C’est le cas des groupes SUD, WALF, Futur Média qui résistent à la concurrence des organes financés entièrement par l’Etat, à savoir la RTS, l’APS et le Soleil.
Il faut dire que certains journaux et radios créés et financés par des hommes politiques ont disparu avec la perte du pouvoir de ces hommes politiques. C’est le cas des organes créés par les membres du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) de l’ex-président de la République, Abdoulaye Wade (une dizaine) et de certains journaux individuels qui n’ont pas pu tenir faute de moyens. A cette situation s’ajoute le prix du journal jugé très faible par rapport au coût de réalisation (100 francs CFA et 200 francs CFA). La publicité aussi ne suit pas toujours.
Sans grand tirage, une vente insignifiante et très peu de publicité, les médias ne peuvent vivre très longtemps. C’est pourquoi certains d’entre eux migrent vers les médias électroniques car ils ne peuvent payer ni des salaires aux journalistes professionnels ni assurer les actes de gestion. Malgré les effacements les successifs des dettes des médias par l’Etat, les subventions et les aides ponctuelles pendant les campagnes électorales, la presse sénégalaise vit difficilement.
Certains disent même qu’elle survit avec des moyens dérisoires. Certains parmi les médias, malgré leur pluralité et leur diversité ne semblent pas capables de fonctionner indépendamment des politiques, du gouvernement, des entreprises et des pouvoir et autres influence religieuses. Les contenus et les orientations éditoriales parfois instables, sont déterminés par ces hommes politiques qui finances certaines publications.
Médias et Intelligence artificielle
En attendant, beaucoup de journalistes se rabattent sur l’Internet et les réseaux sociaux ou adhèrent à l’association des professionnels de la Presse en Ligne (APPEL) dirigée par un journaliste professionnel venu du Groupe SUD. D’autres font des piges dans les télévisions où profitent des plateformes YouTube, Facebook et autres. C’est dire que la presse sénégalaise est une presse dynamique, critique voire même agressive, mais elle manque de moyens et de soutiens de la part d’un secteur privé qui ne le juge pas rentable. Les hommes d’affaires ne sont pas convaincus de la viabilité des médias et ceux qui s’y aventurent disent le regretter du fait de la faiblesse de la publicité (l’économie et le marché sénégalais étant très étroits au niveau de la publicité).
Toutefois, des initiatives sont prises çà et là pour relancer le secteur et valoriser le travail des journalistes et des médias qui constituent une composante essentielle dans la promotion de la démocratie, de la bonne gouvernance et des droits de l’Homme.
Quid des impôts, taxes et cotisations sociales ?
La question des impôts, taxes et cotisations sociales met les patrons de presse entre le marteau de l'état et l'enclume des jeunes journalistes reporters dans les organes de presse. Si l'état est fondé à revendiquer des impôts et taxes sur les chiffres d'affaires avec la tva, les jeunes reporters et techniciens des organes affichent eux des inquiétudes quant au sort réservé à leurs salaires et autres cotisations sociales. Ces questions révèlent au grand jour les défis qui interpellent la presse et obligent les patrons de presse à une introspection pour envisager des solutions durables aux nombreux défis qui les interpellent.
Quel modèle économique pour la presse ?
Voilà des années qu'on alertait sur une mort programmée de cette presse dont certains ne vivaient que sous perfusion et de manière artificielle. Les médias ont toujours vécu ou survécu au-dessus de leurs moyens. Un journal à 100 ou 200 francs CFA ne peut être viable. Il l'est encore moins si la publicité ne suit pas. Depuis quelques semaines, les difficultés de la presse sont étalées au grand jour. La presse vit des jours sombres, pas du fait de son état de précarité structurelle, mais plutôt du fait que l'opinion nationale en fait son sujet de discussion. Tout le monde savait que la presse allait inéluctablement vers le mur. L'impasse était devenue incontournable.
Le pouvoir d'achat du Sénégalais moyen souvent invoqué n'y change rien. Sans vente conséquente et sans publicité, peut-on parler de presse? La presse était en train de mourir de sa belle mort malgré sa position stratégique de levier de la démocratie et des libertés. Ceux qui connaissent les réalités des médias voyaient venir car le modèle proposé n'ouvrait aucune perspective aux organes et aux journalistes. Les patrons de presse qui se sont lancés dans cette aventure périlleuse l'ont payé tandis que d'autres vivent d'expédients pour survivre. Pendant ce temps les jeunes reporters voient leurs conditions de vie et de travail se dégrader. Ni plan de carrière ni perspective d'avancement ne leur sont proposés. Même pas le minimum vital exigé par la convention collective des journalistes qui n’est n’en fait qu'un simple plancher.
Si en plus les impôts viennent accabler les organes pour des redressements des cotisations sociales, tva et autres, on mesure la précarité de la presse. Du point de vue de la loi et du code de la presse en particulier, les organes de presse sont des entreprises soumises aux mêmes exigences et obligations que les autres entreprises. Quelques rares médias arrivent tant bien que mal, à satisfaire ces exigences de la loi, grâce à l’intégration en leur sein de gestionnaires détachés de la gestion quotidienne de l’information et rompu à la gestion financière. La majorité ne le veut pas et ne le peut pas et doivent de déposer un bilan. A défaut de le faire, on s'expose à la sanction d'une administration sans état d'âme sur les exigences de la loi.
Repenser la presse
Que reste-t-il à faire? Engager des négociations, mettre en place des moratoires pour se pencher sur les misères de la presse, présenter la situation réelle sans faux fuyant, accepter que la presse a toujours vécu sous perfusion face à des lobbies politiques, économiques et idéologiques qui ont toujours tenté de l'utiliser.
Les négociations doivent porter sur toutes les questions présentes et futures qui, si l'on y prend garde, risquent encore d'entraver la vie des entreprises de presse. Les questions à adresser sont tellement nombreuses qu'une seule séance n'y suffirait pas. Mais fort heureusement les assises de la presse dont les conclusions sont en train d'être affinées peuvent servir de termes de référence pour engager de véritables négociations sans perdre du temps. Car le temps presse pour trouver des solutions définitives pour que la presse assume véritablement son rôle de levier de la démocratie sans entrer dans les compromis, compromissions et connivences.
PAR Ibrahima Thioye
ESPOIRS ET CRAINTES SUSCITÉS PAR LE DUO AU POUVOIR
De l’extérieur, nous n’avons pas d’échos sur le fonctionnement du parti Pastef. Quid des instances de base ? Sans un fonctionnement régulier, un parti risque de tomber dans un processus de léthargie et de personnalisation-patrimonialisation
Je disais dans un précédent article que « la marque Sonko s’est installée dans l’esprit des larges masses avec un positionnement qui correspond parfaitement à leurs aspirations ». En désignant Bassirou Diomaye Faye candidat à l’élection présidentielle de 2024, la marque mère a donné naissance à une marque fille qui a gagné, en peu de temps, une forte notoriété et un bon niveau de capital confiance qui s’est traduit par la victoire éclatante de Bassirou Diomaye Faye, avec plus de 54 % des voix. Globalement, j’ai le sentiment que ce nouveau régime mérite des encouragements. Sont décrits dans les lignes qui suivent les éléments (actes et mesures) qui renforcent mes espoirs, ainsi que ceux qui sont source d’appréhensions et qui méritent, de mon point de vue, un examen critique.
Éléments qui renforcent mes espoirs
– La paix et la stabilité retrouvées
Nous l’avons échappé belle. Ce qui s’est passé au Sénégal avec cette troisième alternance, survenue en douceur, relève du miracle.
– La composition du nouveau gouvernement
L’intégration d’éléments apolitiques dotés d’une forte expertise dans leur domaine et dont la seule mission consiste à relever les défis liés à leur Département est un motif de satisfaction. Le pragmatisme de nombreux ministres qui n’hésitent pas à investir le terrain est largement salué.
– Les mesures de diminution des prix des denrées de première nécessité
– La communication globale du gouvernement
Même s’il y a des ajustements à apporter, dans l’ensemble, j’apprécie positivement les sorties médiatiques du Président Bassirou Diomaye Faye et celles du Premier ministre Ousmane Sonko.
– Le calendrier de visites du chef de l’État et la vision panafricaniste et souverainiste de notre équipe dirigeante
Le calendrier de visites a d’abord privilégié nos pays limitrophes. La vision panafricaniste et souverainiste de notre équipe dirigeante est équilibrée et intelligente. La compréhension que j’en ai est qu’elle ne perd pas de vue la finalité, mais elle évite les ruptures radicales et la précipitation.
– La valorisation de nos costumes locaux
Le Président Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko n’hésitent pas à arborer nos costumes locaux partout où ils se déplacent, entraînant ainsi une bonne promotion de ceux-ci.
– L’esprit de pardon annoncé par le Premier ministre et le respect trempé de déférence du duo à l’égard des chefs religieux
– La posture d’indifférence face aux critiques acerbes, tendancieuses et excessives
– La posture de rigueur sur la question des dettes fiscales des entreprises de presse
– La volonté d’assainir le secteur du foncieretles mesures de suspension des travaux
– Les changements survenus au niveau des institutions judiciaires et la volonté de laisser la justice faire son travail sans intervention de l’exécutif
– L’harmonie et la complémentarité des deux personnalités du duo
L’un attire les jeunes et les galvanise par l’énergie et le charisme, l’autre rassure les adultes par son sens de la pondération, de la mesure et du discernement. Le Président Diomaye Faye a même expliqué qu’ils ont un moyen, à deux, de gérer les contradictions par de larges discussions ouvertes et authentiques.
Éléments source d’appréhensions
Ces éléments qui suscitent chez moi de l’appréhension sont ceux qui, de mon point de vue, peuvent entamer la réputation ou l’image des deux marques citées plus haut. Ils méritent, selon moi, un examen critique :
– Bad buzz issus des prises de parole du Premier ministre Ousmane Sonko
J’ai identifié deux bad buzz depuis l’arrivée au pouvoir de ce duo Diomaye-Sonko : celui suscité par la question de l’homosexualité et celui lié au thème du port du voile.
Suggestion : pour ce type de thèmes clivants ayant le pouvoir de brouiller le reste de la communication et celui de déclencher des contradictions à fortes charges émotionnelles, il est important de savoir quand et comment échanger à leur propos ; il serait utile de récupérer du feedback sur ce type de sujets auprès des citoyens et l’idéal serait de les gérer en amont, en les identifiant et en préparant les scripts de façon à éviter des bad buzz. Rappelons qu’en principe, ceux-ci ont le pouvoir de renforcer la notoriété, mais aussi celui d’éroder le capital confiance, entamant ainsi l’image de marque.
– Engagements non tenus (ou pas encore tenus)
Le Conseil supérieur de la magistrature n’est toujours pas affranchi de la tutelle du président de la République et l’on n’a pas encore mis en œuvre le principe de l’appel à candidatures pour certains postes de direction.
Suggestion : à défaut de pouvoir tenir les engagements dans l’immédiat, il serait judicieux de proposer au moins un échéancier de mise en œuvre ou d’expliquer les obstacles au non-respect de ces engagements.
– Absence de visibilité sur la mise en œuvre du programme Diomaye Président
Cinq axes ont été identifiés dans le programme Diomaye Président avec des chantiers pour chacun d’eux. A-t-on réellement lancé ces chantiers ? Y a-t-il des porteurs ? Qui s’occupe du suivi-évaluation ? Quels sont les niveaux d’exécution de ces chantiers ? Quel est le type de communication prévu pour vulgariser ces chantiers ?
Suggestion : une fois qu’on aura apporté des réponses aux questions précédentes, il faudrait vulgariser le projet avec des supports de communication adéquats ; il serait bien d’annoncer au moins les cinq plus gros projets prévus au cours du quinquennat.
– Le risque de disparition de nombreuses structures de presse
Même s’il faut assainir le secteur de la presse, une disparition complète des organes ne constitue pas une bonne nouvelle pour la démocratie.
Suggestion : faire le pari d’aider sans s’intéresser à la ligne éditoriale ; les citoyens sénégalais ont gagné en maturité et la critique au vitriol est de plus en plus mal perçue (il faudrait prendre soin de confirmer cela par des études).
– Réponses disproportionnées aux critiques adressées au duo
Suggestion : éviter les réactions systématiques (du style « 72 heures patriotes yi ak… ») à ceux qui adressent des critiques jugées acerbes et tendancieuses, car pour certains (qui n’avaient pas obtenu 1 % lors de l’élection présidentielle ou qui ont du mal à occuper totalement le terrain ACAPES), c’est le meilleur moyen d’accroître leur notoriété via les réseaux sociaux. Le respect du jeu démocratique exige d’accepter la contradiction et il est possible de rétablir la vérité de façon très courtoise même en face d’un adversaire qui utilise des moyens jugés malveillants.
– Menace de léthargie et de personnalisation-patrimonialisation du parti Pastef
De l’extérieur, nous n’avons pas d’échos sur le fonctionnement du parti Pastef. Malgré toutes les critiques émises à l’encontre du PS, on entendait souvent à la radio des annonces de tenue de réunion du bureau politique. Quid des instances de base ? Sans un fonctionnement régulier, un parti risque de tomber dans un processus de léthargie et de personnalisation-patrimonialisation.
Suggestion : redynamiser l’école du parti ou l’organe qui a cette mission de formation des militants, systématiser les rencontres au sein des structures du parti.
– La communication du PM est destinée essentiellement à une cible jeune
Suggestion : vous constituez une marque et elle gagnerait à déployer sa puissance auprès de tous les segments de l’électorat, en ajustant la communication de façon à s’appuyer à la fois sur les principes d’intégrité et de vérité et sur l’empathie.
De mon point de vue, le duo au pouvoir est sur une bonne voie. Les premiers actes posés confortent cette vue. En exposant ces éléments qui renforcent mes espoirs et ceux qui sont source d’appréhensions, je me suis placé sur le terrain des ressentis. Il aurait été intéressant d’organiser une étude sur ces sujets en interrogeant les différents segments de l’électorat. Au lieu de répondre systématiquement à ceux qui émettent de nombreuses critiques, si l’étude montre que personne ne fait attention à eux, peut-être qu’il faudrait demander à tous les militants et sympathisants de ne plus parler d’eux. Il faut cependant oser écouter et identifier les thèmes qui reviennent régulièrement. Le pari de cette équipe dirigeante devrait être également de s’entourer de personnes promptes à la faire sortir de sa zone de confort, car notre tendance naturelle (impulsée par nos biais cognitifs) nous pousse généralement à éviter ce type de personnes, très utiles pour nous éviter les glissements liés à l’usure du pouvoir.
Ibrahima Thioye est consultant.
Par DIAGNE FODE ROLAND
RESTAURER LA VISIBILITE MILITANTE DE PASTEF
Le mercenariat d’une certaine presse poursuit son travail de sape au profit des battus de la présidentielle du 24 mars dernier. Les désavoués par le peuple s’abritent derrière cette presse mercenaire qui s’était déjà révélée anti-Pastef ...
Le mercenariat d’une certaine presse poursuit son travail de sape au profit des battus de la présidentielle du 24 mars dernier. Les désavoués par le peuple s’abritent derrière cette presse mercenaire qui s’était déjà révélée anti-Pastef lors des répressions macabres, des tortures, des arrestations liberticides et de l’instrumentalisation de certains magistrats par l’autocratie libérale.
Dans le système néocolonial, au-delà du corporatisme inhérent, toutes les professions se divisent en privilégiés bénéficiant en toute illégalité des faveurs du pouvoir et en résistants préservant au nom de l’éthique et du professionnalisme la dénaturation scandaleuse de leur métier. S’acquitter de ses impôts est une obligation patriotique qui s’impose à tout corps de métiers, à toute entreprise et à tout citoyen imposable comme l’a rappelé fort justement le président souverainiste élu.
La liberté d’expression, d’opinion, de la presse et citoyenne exige la dépersonnalisation du débat politique, exclut la diffamation, la calomnie et les insultes, en d’autres termes tout ce qui tombe sous le coup de la loi. Il s’agit là d’un principe démocratique qui fait que personne, ni aucune profession, ni entreprise n’est au-dessus des lois même si demeure fondamental le droit citoyen de contester les lois liberticides.
Les libéraux néocoloniaux vaincus dans les urnes s’agitent à toute occasion pour polluer à travers une certaine presse l’espace politique en prêtant aux vainqueurs leurs propres turpitudes étalées tout le long de leur pouvoir autocratique surtout à partir de 2021 quand ils se sont rendus compte que leur sous estimation du camp patriotique a subi une brèche de plus en plus béante avec les près de 16 % du candidat O. Sonko en 2019.
Malgré la dictature imposée à Pastef par son interdiction dissolution, les tueries, les tortures, les milliers d’arrestations, la sonkorisation du pays et de la diaspora a fini par dissuader la troisième candidature projetée, a rendu impossible le report annulation de la présidentielle de février et a contraint à l’élection de mars 2024.
Le Parti Pastef et en son sein les partis fusionnants ont révélé une formidable capacité de résilience dans la résistance aux forfaits liberticides même quand les leaders Sonko moy Diomaye ont été confinés dans le silence de la prison. Initiatives collectives et adaptations agissantes contre la répression ont permis de maintenir le lien militant du parti, des associations anti-impérialistes et des députés souverainistes avec le peuple, notamment les jeunes, pour faire échec à la fuite en avant répressive de l’autocratie libérale néocoloniale jusqu’à la victoire.
Une fois la présidence conquise par la voie des urnes, le gouvernement constitué, le processus de souverainisation de l’appareil d’État néocolonial dont nous avons hérité est en cours. Le président ayant en vertu de la Constitution le pouvoir de « nommer aux emplois civils et militaires », les nominations se poursuivent au rythme des conseils des ministres à la tête des différentes directions, agences, de la police, de la gendarmerie, de l’armée, des conseillers à la présidence, à la primature, dans les ministères et des représentations diplomatiques, etc.
Les premières mesures urgentes ont été effectuées sur la baisse des prix de certaines denrées de premières nécessités, le blocage des accaparements fonciers, le renflouement fiscale des recettes de l’État, les Assises de la justice débouchant sur des nominations et des affectations, etc en attendant la reddition des comptes des crimes financiers épinglés par les rapports des corps de contrôles de l’État (OFNAC, IGE, IGF, Cour des Comptes, etc) et des audits centraux et sectoriels en cours et celle des crimes de sang et des arrestations arbitraires que réclament fort justement les victimes.
Les opposants des 35 %, des 1 à 2 % assommés par leur défaite cuisante restent fort divisés par les ambitions personnelles mais scrutent et affûtent leurs couteaux tout en tentant des coups d’essai pour pousser à la faute et sauver les milliards volés pour s’en servir dans une contre-offensive lors des élections législatives et locales prochaines.
Les demandes ne cessent de s’exprimer des réparations sociales des travailleurs victimes de la mal gouvernance et de la complicité avec des patrons véreux qui fraudent le fisc et laissent de nombreux travailleurs impayés durant des mois, voire des années et des populations victimes de spoliation foncière. Ces urgences sociales exigent du nouveau pouvoir souverainiste une diligence urgente de la reddition des comptes pour réparer ce passif social causé par l’autocratie déchue. Les victimes de la répression et les victimes du passif social, tout en dénonçant les patrons et l’État néocolonial voyous renversé, attendent avec impatience les réparations dues que le nouveau pouvoir souverainiste doit s’acquitter à prendre en charge.
Si il apparaît clairement que l’opposition libérale néocoloniale déclarée (APR/BBY), puis du PDS et les francs tireurs individualistes quasiment tous libéraux n’ont aucune crédibilité dans l’opinion populaire, il n’est pas du tout souhaitable que ces passifs sociaux restent trop longtemps sans réponses budgétaire à l’instar des 25 milliards ajoutés aux 100 milliards prévus initialement pour la campagne agricole et judiciaire pour la reddition des comptes.
Nous invitons notre présidence et notre gouvernement souverainiste à prendre à bras le corps cette question le plus vite possible, de même qu’il est important que le peuple soit largement informé des audits centraux et sectoriels.
Tous les esprits responsables de notre camp souverainiste comprennent que la marge de manœuvre du gouvernement pour appliquer les engagements de campagne dépend de l’ampleur de « caisses vides » et que l’actuelle phase de transition sera dans un premier temps marquée par les réparations à opérer pour rétablir les finances publiques et la capacité à assainir l’État en le déconstruisant de l’intérieur.
Mais il doit être dit clairement que l’actuelle phase de transition est aussi une préparation à la « transformation systémique », c’est-à-dire à la rupture souverainiste promise.
Pour ce faire, il nous semble fondamental de sortir de l’apparente inertie et de remettre notre parti Pastef dans sa fonction décisive de lien avec le peuple, véritable force motrice de l’histoire.
Disons le nettement, tout se passe comme si notre parti est soumis à notre État, il apparaît attentiste et non plus collectivement comme une force d’initiative, d’espace de réflexion, d’échanges, de débat et d’action de la base au sommet pour contribuer à la marche vers la « transformation systémique » et donc la rupture souverainiste. Dans cette marche, notre parti et notre État ont à jouer chacun une partition différente dans une unité de but. Nous devons marcher différemment dans la même direction mais frapper ensemble. Le parti doit avoir la principale fonction de préparer les masses, le peuple à la rupture souverainiste.
Certaines interrogations, voire colères sur les nominations, mêmes perçues comme l’expression d’une incompréhension en rapport avec la notion du « don de soi » et parfois malheureusement d’un carriérisme (ce qui justifie l’arrêt temporaire de la vente des cartes), reflètent aussi la nécessité de clarifier les rapports entre notre parti Pastef et la coalition en plus du fait qu’il faut absolument faire collectivement la lumière sur la stratégie pour les législatives et même pour les locales à venir : Va-t-on seul ou en coalition étant entendu que le lieu démocratique approprié pour y répondre demeure notre parti, voire même le premier congrès et de fusion dans Pastef des partis signataires du protocole de 2021 ?
Pour toutes ces raisons, il est impératif de faire revivre le parti.
Par Assane Guèye
JOURNEE SANS PRESSE NI PARESSE
Comment parler de la presse avec détachement ? Depuis le premier journal sénégalais «Le Réveil» fondé vers la fin du 19ème siècle à nos jours, beaucoup d’encre a eu le temps de sécher.
Comment parler de la presse avec détachement ? Depuis le premier journal sénégalais «Le Réveil» fondé vers la fin du 19ème siècle à nos jours, beaucoup d’encre a eu le temps de sécher. Les larmes et souffrances des acteurs n’ont pas suivi le même processus. De l’eau a pourtant coulé sous les ponts depuis plus de 130 ans. Les médias traditionnels ne coulent pas des jours heureux. Ce n’est pas juste de dire que la descente aux enfers commence seulement aujourd’hui. Les coups de boutoir viennent de loin et de partout. La conjoncture, la crise de confiance et surtout internet. Ce bijou de technologie aux fonctionnalités foudroyantes a dicté de nouveaux usages, de nouveaux modes de consommation. Rien ni personne ne lui résiste. Il a ringardisé au-delà des médias classiques. Les cabines téléphoniques ont été les premières à perdre le fil. Non contents d’être sophistiqués, les nouveaux médias, bourreaux des anciens, sont un des rares secteurs au monde à ne pas connaître de régulation. Les hébergeurs dont on pointe la responsabilité semblent hors de portée des États. Mais le coupable est commode à désigner. L’enfer, c’est toujours les autres. La vérité est que les victimes expiatoires d’aujourd’hui n’ont pas su négocier les virages décisifs. La presse a péché peut-être pas par paresse mais par manque d’intuition. Elle s’est divisée au lieu de se regrouper dans l’optique de mettre sur pied des groupes forts et compétitifs. La spécialisation pointue des journalistes n’a pas non plus été amorcée. La production a disparu et on a du mal à aller au-delà des simples faits évanescents. Bref, le métier n’a pas été réinventé. Il est à présent le plus perméable de tous.
Les nouveaux dirigeants ont ajouté de la crise à la crise
Un procès d’intention peut viser les nouveaux dirigeants. Ils l’auront cherché. Ils ont ajouté de la crise à la crise. Des comptes bloqués ne sont pas que de simples comptes bloqués, c’est la respiration des titulaires de ces comptes qui est en fait bloquée. Tout de même, les imposables devront se moraliser. Il faut aussi des moratoires voire un plan Marshall pour sauver les meubles et surtout les emplois-jeunes qui restent les plus menacés. Car, contrairement à ce qu’on pense, ce sont les jeunes reporters qui pâtissent le plus de cette situation. Tout le monde a intérêt qu’une solution soit vite trouvée. La presse n’est pas seulement celle qui porte la plume sur la plaie ou fait du tort. Elle n’est pas l’empêcheuse de tourner en rond. Elle aide les citoyens à regarder avec des yeux tout ronds la manière dont le pays marche. Plus que cela, elle est une vitrine culturelle. C’est manquer de sensibilité que de ne pas le savoir. Vite un juge de paix.
Magistrats, des fonctionnaires qui onctionnent partout
Sur le dossier concernant les magistrats, il faut aussi se rappeler que ce sont des fonctionnaires. Ils sont appelés à fonctionner sur toute portion du territoire. Le transfert de tel ou tel pour nécessité de service ne doit pas susciter l’émoi. Des centaines voire des milliers d’agents publics anonymes sont mutés tous les ans sans que personne ne s’en aperçoive. Ce qui provoque la gêne, c’est plutôt cette image de purgatoire qu’on voudrait coller à une partie du pays. Quiconque voudrait-on déboussoler est vite envoyé à l’Est. En 1962 déjà, le Président du Conseil a écopé d’une déportation perpétuelle pendant 11 ans à Kédougou. L’actuel maire de Dakar, un dur à cuire de l’opposition d’antan, a été éloigné de la capitale pour aller purger une peine à Tamba. L’éloignement est un facteur naturel. Le bagne est le fait des hommes qui se rendent coup pour coup. Quelle est donc cette idée pas si originale d’infliger la double peine à une région si excentrée quand elle aurait mérité de recevoir plus et mieux que les autres? Toute discrimination positive pour ces localités est la bienvenue pour lutter contre les déserts économiques. Question d’équité territoriale, ce programme de l’Etat qui est le PUMA, idée géniale et généreuse, doit monter en puissance. Son efficacité sur le terrain est aussi à évaluer. Rendre à toutes les parties reculées du Sénégal leur attractivité est une autre manière de sauver Dakar, ville infernale dont l’habitabilité commence à poser sérieusement problème. Quelles que soient les disparités, personne ne doit s’offusquer d’être bougé dans un coin ou un autre d’un pays un et indivisible. Heureusement que les magistrats ne s’épanchent pas. Le devoir de réserve les éloigne de la cohue ambiante. Leur silence n’est pas un mystère. C’est une richesse.
Par Mamadou KASSÉ
REPENSER LE MODELE ECONOMIQUE DE LA PRESSE
Depuis quelques semaines, les difficultés de la presse sont étalées au grand jour. La presse vit des jours sombres, pas du fait de son état de précarité structurelle, mais plutôt du fait que l’opinion nationale en fait son sujet de discussion.
Depuis quelques semaines, les difficultés de la presse sont étalées au grand jour. La presse vit des jours sombres, pas du fait de son état de précarité structurelle, mais plutôt du fait que l’opinion nationale en fait son sujet de discussion. Tout le monde savait que la presse allait inéluctablement vers le mur. L’impasse était devenue incontournable. Et voilà des années qu’on alertait sur une mort programmée de cette presse dont certains ne vivaient que sur perfusion et de manière artificielle. Les médias ont toujours vécu ou survécu au-dessus de leurs moyens. Un journal à 100 ou 200 francs ne peut être viable. Il l’est encore moins si la publicité ne suit pas. Le pouvoir d’achat du Sénégalais moyen souvent invoqué n’y change rien. Sans vente conséquente et sans publicité, peut-on parler de presse? La presse était en train de mourir de sa belle mort malgré sa position stratégique de levier de la démocratie et des libertés. Ceux qui connaissent les réalités des médias voyaient venir car le modèle proposé n’ouvrait aucune perspective aux organes et aux journalistes. Les patrons de presse qui se sont lancés dans cette aventure périlleuse l’ont payé tandis que d’autres vivent d’expédients pour survivre. Pendant ce temps les jeunes reporters voient leurs conditions de vie et de travail se dégrader. Ni plan de carrière ni perspective d’avancement ne leur sont proposés. Même pas le minimum vital exigé par la convention collective des journalistes qui n’est en fait qu’un simple plancher.
Si en plus les impôts viennent accabler les organes pour des impôts, cotisations sociales, tva et autres, on mesure la précarité de la presse. Du point de vue de la loi et du code de la presse en particulier, les organes de presse sont des entreprises de presse soumises à certaines obligations. Quelques rares médias arrivent tant bien que mal, à satisfaire ces exigences de la loi. La majorité ne le veut pas et ne le peut pas et sz doit de déposer un bilan. A défaut de le faire, on s’expose à la sanction d’une administration sans état d’âme sur les exigences de la loi.
Que reste-t-il à faire? Engager des négociations pour se pencher sur les misères de la presse, présenter la situation réelle sans faux fuyant, accepter que la presse à toujours vécu sous perfusion face à des lobbies politiques, économiques et idéologiques qui ont toujours tenté de l’utiliser.
Les négociations doivent porter sur toutes les questions présentes et futures qui, si l’on y prend garde, risquent encore d’entraver la vie des entreprises de presse. Les questions à adresser sont tellement nombreuses qu’une seule séance n’y suffirait pas. Mais fort heureusement les assises de la presse dont les conclusions sont en train d’être affinées peuvent servir de termes de référence pour engager de véritables négociations sans perdre du temps. Car le temps presse pour trouver des solutions définitives pour que la presse assume véritablement son rôle de levier de la démocratie sans entrer dans les compromis, compromissions et connivences.
Par Ibou FALL
LES RUINES DE LA RÉPUBLIQUE, LA PRESSE À L’AGONIE
Entre promesses de changement radical et spectre de poursuites judiciaires, le nouveau pouvoir joue une partition risquée. Parviendra-t-il à transformer sa rhétorique en actions concrètes sans déchirer le tissu social du pays ?
Ne prenons pas des airs de vierge effarouchée : au regard des résultats des dernières locales comme des Législatives, surtout après le cirque de l’installation de cette législature, il faut tout de suite comprendre que les périodes d’actualités ennuyeuses sont derrière nous.
La présidentielle, bien entendu, en est le surréaliste pompon. Sauf que l’on ne s’imagine alors pas à quel point…
Et donc, la semaine passée, c’est à l’occasion de la Journée de l’arbre que la salve retentit. Le Premier ministre Ousmane Sonko, toujours lui, le devoir de planter son végétal accompli, s’offre une sortie dans le style dont il a quasiment le monopole du secret : «Nous avons trouvé un pays en ruines !»
C’est presque téléphoné : quelques semaines auparavant, le nouveau patron de la Rts, Pape Alé Niang, manifestement ému de l’état du pays que le nouveau pouvoir semble avoir des scrupules à avouer, depuis les réseaux sociaux, allume la mèche : en résumé, il faudra que l’alchimie en fusion «Diomaye môy Sonko», enfin, parle vrai au Peuple… Aussitôt relayé par le frétillant Dg de la Caisse des dépôts, Fadilou Keïta, lequel ne cherche pas ses mots pour en désigner les responsables : les vandales du régime sortant laissent derrière eux un pays d’où même l’herbe ne pousse plus…
Certes, les partages de terres sur la Corniche dakaroise et à l’entrée de Thiès peuvent distraire l’opinion quelques jours et les vidéos des palaces d’anciens privilégiés qui circulent au même moment en rajoutent aux fureurs surfaites des énervés congénitaux.
Ça ne suffit pas, manifestement, à étancher la soif inextinguible de revanche du «peuple des 54%». Lequel commence à s’agacer prodigieusement, et pas seulement parce que l’on ne pend personne haut et court sur la place publique… Sur les grands boulevards, il assiste, incrédule, aux déguerpissements des vendeurs à la sauvette, à l’immobilisation des motocyclettes de la «Génération Tiak-Tiak» qui sont des siens : les votes du 24 mars 2024 semblent se retourner contre eux.
C’est limpide, il faut en urgence de gros poissons dans la nasse en attendant que le «Projet» sorte de la salle d’accouchement de l’administration Pastef pour distribuer les milliers d’emplois que tout ce beau monde attend. Enfin, sauf ceux qui continuent de prendre les océans pour se réfugier dans des pays où le rêve de bien-être est encore permis. Bref, les quelques sucettes qu’on saupoudre çà et là ne suffisent pas. Signe des temps ? On apprend dans la presse que la belle-mère du Président sortant, une adjaratou à la santé que l’on dit chancelante, devrait être entendue par la gendarmerie, quitte à aller la cueillir avec un panier à salade, en compagnie d’un de ses fils, pour de sulfureuses histoires de foncier.
Une arrestation retentissante piochée dans le camp présidentiel, comme celle de Karim Wade au début des années Macky ? Le «peuple des 54%» n’attend que ça pour se dérider.
Y’a peut-être mieux, ou pire, c’est selon.
Déjà, de folles et insistantes rumeurs invoquent des poursuites pour «crimes contre l’humanité» à l’encontre de Macky Sall, qui serait l’unique responsable de plus de quatre-vingts vies perdues. Et l’on ne vous parle pas des milliers de «prisonniers politiques», comprenez d’innocents citoyens sans défense, ramassés au petit bonheur la malchance, pour le crime odieux d’arborer des bracelets vert-blanc-rouge, entre 2021 et 2023.
Ça ne devrait pas précéder de beaucoup la traque de ses biens mal acquis. Déjà, on a du mal à digérer le pied-à-terre de Marrakech, ses voyages autour du monde en jet privé, le salaire indécent que le Président français, Macron, lui paye.
se demander si le nouveau régime ne va pas lui interdire finalement de poser les pieds au Sénégal en le menaçant d’emprisonnement. Saiton jamais ? Pour peu qu’il se voie de retour au Palais de l’avenue Senghor dans cinq ans alors que le «Projet» en a en principe pour un demi-siècle…
Trêve de rêveries, la horde des opprimés s’impatiente, et il lui faut du lourd. C’est vrai, entretemps, ça lève un lièvre avec ses grandes oreilles, qui fait du bruit : quarante milliards de francs Cfa de dettes fiscales pour une presse complètement corrompue par Macky Sall, et dont les patrons mènent jusque-là un grand train, à coups de subventions indues et de conventions complaisantes avec les établissements publics. Quand la nouvelle du blocage des comptes de ces vendus se répand en même temps que la résiliation des contrats tirés par les cheveux, ça fait des sauts de cabri dans le petit monde coloré du Pastef. Vous voulez mon avis sur cette affaire de bras de fer de la presse et du pouvoir ? Je vous le donne quand même…
C’est un esprit brillant, une dame distinguée, Fatima Simone Bâ, qui nous sort la formule imparable : «La presse s’est embarquée dans une économie de la pitié.» En effet, cela fait bien longtemps que la mécanique des médias est surannée, avec le passage au digital.
Qui disait que «Google a enterré Gutenberg» ? C’est bien de cela qu’il s’agit.
Les pleurnicheries annuelles sur l’aide à la presse, les larmoiements quinquennaux pour les amnisties fiscales, les suppliques semestrielles pour être reçus au Palais, les ententes cordiales avec les sociétés publiques, ça dure depuis plus de quarante ans et ne donne rien.
Et ça nous affuble, tout ce temps, nous autres de la presse, des haillons du pauvre qui vit du «charity business» des hommes de pouvoir, avec des grelots démocratiques autour du cou pour résonner en cas de tribulations électorales, et le certificat de bonne vie et mœurs selon que votre titraille du jour convient à votre bailleur de fonds.
Depuis, ça vit de la pitié que ça inspire à des gens qui regardent la populace des médias de haut. Or, le journalisme est tout sauf cela : sa déontologie tend en entier vers le respect dû à celui qui exerce ce métier, sans doute le plus beau du monde…
Revenons à la vraie vie, où un nouveau pouvoir, pour aider ses ouailles à patienter, repeint le tableau de la République aux couleurs de la catastrophe.
Et puisque les déclarations vont crescendo, du simple Dg au Premier ministre, il ne reste plus qu’au président de la République soi-même d’annoncer solennellement la banqueroute nationale…
Pour l’heure, ça se contentera de la déclaration du Premier ministre sur les décombres fumants que sont les ruines de la République.
Et sur ces paroles pleines de sagesse qui nous font redouter le pire dans les semaines qui viennent, Monsieur le Premier ministre embarque dans l’avion présidentiel à destination de Kigali, où le champion toutes catégories de la mise au pas d’un pays aux penchants sanguinaires s’apprête à entamer un quatrième mandat sans qu’un seul toussotement ne vienne semer le doute sur sa légitimité. Respect.
On s’imagine bien que pour honorer ce rendez-vous continental, la République doit casser la dernière des tirelires, celle retrouvée sous un tas repoussant de débris et que Macky Sall, dans son départ précipité, ne pense pas à emporter.
Et donc, le Premier ministre prend les airs. Sur la photo de la tribune d’honneur, il n’est certes pas aux premiers rangs, mais l’essentiel, puisque nous sommes en période olympique, n’est-il pas de participer ? Et puis, qui nous dit que pour le dixième mandat de Paul Kagame, Ousmane Sonko ne sera pas là, cette fois avec le rang de chef d’Etat, audevant de la scène ?
Calmez-vous, je blague !
Après le saut de puce de Kigali, escale à Bamako, pour une séance de travail avec l’homologue malien, qui se fend d’un discours pour saluer la fraternité sénégalo-malienne, en évoquant «les chantiers obliques» qu’on risquerait d’emprunter si ça ne tient qu’aux nouveaux colons.
Y’a du boulot à Bamako…
Comme il faut s’y attendre, il n’échappe pas à la question du panafricanisme exacerbé de Pastef avant le 24 mars 2024, qui a tendance à ramollir. Non, il reste le même, dit-il, en conseillant à ses frères de ne pas céder aux émotions fortes. Il sait sans doute de quoi il parle, ayant eu à souhaiter déloger Macky Sall du Palais et lui faire connaître le sort de Samuel Doe.