Naguère menacée par l’acharnement politique, notre cohésion sociale est encore écorchée par une querelle sans intérêt sur le port du voile à l’école. Des plaidoyers belliqueux sont largement diffusés et accentués, de part et d’autre part, par des partisans incapables de faire la part des choses et des parangons de vertu qui se croient investis par Dieu. Mais puisque Dieu tout puissant est au contrôle et reconnaîtra les siens, sachons raison garder et soyons sereins plutôt que de jouer à se faire peur.
Entre le voile et le foulard, la djellaba et la soutane, il n’est pas nécessaire d’instaurer un débat pour mettre en évidence la foi. Comme dit l’adage: « l’habit ne fait pas le moine »
A force de vouloir régenter la tenue de l’autre en fonction des croyances, on tombe facilement dans le subjectivisme susceptible d’entraîner des aspérités. Musulmans, chrétiens ou juifs, il ne nous revient pas de juger, à fortiori vouloir imposer à son prochain une camisole de force. Les croyants qui tirent leurs forces spirituelles des livres saints (la Bible, le Coran et la Torah) s’accordent sur la pudeur et le respect des différences qu’il ne faut surtout pas assimiler au désamour qui frise l’incompréhension voire la haine. Que Dieu nous en préserve.
Il est du devoir de tous de transcender les passions issues de notre orgueil. Si tant est que nous concevons l’école et son environnement comme un rempart contre le fanatisme et l’obscurantisme, nous devons veiller à son climat social qui doit être empreint de sérénité et convivialité.
Mbagnick Diop
Par Henriette Niang KANDE
LA KERMESSE DES VANITÉS
Depuis peu, ce pays succombe à un singulier manichéisme qui sape les fondements de notre vivre-ensemble. On ne peut dégager un avenir en s’imaginant que gouverner c’est passer son temps à dénoncer les autres et fixer sa propre histoire en dogme
La première génération de notre élite nationale, très largement promue grâce à une logique socioprofessionnelle initiée par la France, était essentiellement constituée à partir du mouvement syndical largement dominé par les enseignants et «les médecins africains». La deuxième génération est arrivée avec sa vague d’administrateurs civils, mettant en œuvre les politiques de développement exigées par l’aide bi-ou-multilatérale ou les organismes internationaux
Puis, elle s’est mise à faire de la politique. Avec la troisième génération constituée de techno-économistes, c’est la transnationalité qui devient signe et repère de l’excellence, tout en n’ayant pas les moyens d’investissements économiques et financiers des politiques qu’ils prônaient. Ce fut une période de « leurres et lueurs » durant laquelle l’élite dirigeante ne disposait que d’un pouvoir virtuel, avec des sens et des postures plus exogènes qu’endogènes. Une troisième alternance arrivée en mars 2024, propulse des inspecteurs des Impôts et des Domaines entrés en politique, opposants farouches puis vainqueurs de l’ancien régime, monopolise tous les débats, des plus graves aux plus futiles sur une scène politique qui ressemble de plus en plus à un vaudeville, une grande kermesse des vanités.
De ces vagues générationnelles il ressort que notre élite politique, depuis l’indépendance, a toujours été confrontée à des crises profondes qui ne sont pas seulement économiques puisqu’elles affectent y compris les ressources imaginaires de son identité, du fait qu’elles n’ont jamais disposé à proprement parler, des moyens de leurs promesses. Les crises sont souvent des moments de basculement. C’est le cas de notre vivre ensemble. Il est est en train d’être très dangereusement menacé. Des fragilités éclatent au grand jour, des innovations s’accélèrent, des mouvements de fond émergent soudain en surface. Sans doute sommes-nous à l’un de ces tournants. Dans de nombreux domaines, les évolutions s’exacerbent, et observateurs ou analystes s’accordent à reconnaître que l’hérésie est au fondement et à l’origine de ce nouvel ordre sociopolitique, économique, culturel, idéologique. C’est dans ce cadre, que notre commun vouloir de vivre ensemble est de plus en plus mis à l’épreuve. Il apparaît comme une remise en question radicale de sens et/ou postures jusque-là plus ou moins efficaces, dans l’espace social sénégalais. De ses effervescences surgissent individuellement ou en masse, des troupes, composées d’incendiaires bas de gamme. Ils jettent leur huile sur le feu, dont on finit par se demander s’il cela ne les réjouit pas. D’autre part, il y les incendiaires de luxe, qui, certains de leur importance, emblèmes médiatiques contestables, mais perçus irremplaçables projettent une réalité qu’ils divisent sciemment : les lumières pour leur camp, les ombres contre les autres, considérés comme un soufre dévastateur. C’est le côté fascinant et quelques fois horrible de la politique.
Les diverses réactions suscitées la semaine dernière par la sortie du Premier ministre devant ses hôtes-cracks qu’il invitait pour magnifier leurs performances scolaires en sont une preuve. « On n’acceptera plus que le voile soit interdit dans certaines écoles ». Ce week-end, tout s’est accumulé : l’arrivée légitime du nouveau régime aux affaires, l’implication présidentielle minimaliste, les phrases provocatrices, des attitudes frôlant l’arrogance du Premier ministre et une étrange atmosphère de cour où il semble qu’une solitude impérieuse dissimule quelque dessein, dont il n’arrive pas à se défaire parce qu’il tient plus à ce qu’il est qu’à ce qu’il accomplit ou non. Peut-être faut-il chercher à appréhender l’influence de ses obscurités et le poids de son histoire personnelle pour comprendre la foudre et la violence de cette personnalité qu’on dit brillante mais vindicative, où se glisse un récit d’offenses intimes et de frustrations personnelles ? Dans un article publié dans les colonnes de Sud Quotidien le 19 septembre 2019, suite à ce qu’il est convenu d’appeler «l’affaire Jeanne D’arc», Vieux Savané fait observer que « sur un effectif de plus de 1700 élèves, 23 d’entre elles sont d’origine libano-syrienne, d’obédience chiite, soutenue par le Hezbollah et l’Iran». Ces élèves, passant outre le règlement intérieur de l’institution, avaient décidé qu’elles ne partageraient plus le même table-banc avec des camarades garçons et n’iraient plus au cours de gymnastique pour cause de présence masculine. C’était la raison essentielle de leur renvoi.
Le Premier ministre ignorait-il qu’un accord avait été trouvé, qui réintégrait en classe les élèves voilées à condition de porter l’uniforme obligatoire assorti d’un voile qui ne le cacherait pas et suivre tout autant obligatoirement tous les cours. Cet accord, obtenu après un dialogue pour dégager toute confusion et toute manipulation, est la preuve du respect à la fois de la liberté religieuse, et d’un vivre-ensemble, malgré les différences. Comme pour dire que c’est à l’école qu’on apprend le vivre-ensemble, que la cohésion et le lien social vivent en son sein. Cet environnement, telle une éponge naturelle, absorbe le savoir-vivre et s’en nourrit inlassablement. Car la vie a toujours été assise sur les bancs scolaires, même si l’école est marquée par le temps, les époques, les crises, les générations, les controverses, les polémiques. C’est cette approche qui a rendu féconde notre école.
Que s’est-il donc passé entre 2019 et le week-end dernier pour que le pays tremble ou fait mine de trembler face au voile ? La « question du voile », qui fait tant s’agiter la société, témoigne à n’en plus douter de ce nouveau phénomène qu’est le délitement de notre vivre-ensemble, particularisme si sénégalais ! Les polémiques donnent à voir une inquiétude nouvelle sur le devenir collectif au sein d’un Sénégal lui-même incertain de son identité.
C’est quand une élite est au pouvoir que le peuple se rend compte que derrière l'apparence des conduites et des décisions se cache l’humus des caractères, la subjectivité souvent débridée et perturbée de certaines personnalités. Comment peut-on croire qu’en interdisant l’expression d’idées différentes, ou en « interdisant d’interdire », dans une brutalité atavique un certain port vestimentaire qu’on se mettra à l’abri du pire ? Depuis un certain temps, ce pays succombe à un singulier manichéisme qui sape les fondements de notre vivre-ensemble qui est son identité. On ne peut dégager un avenir en s’imaginant que gouverner c’est passer son temps à dénoncer les fautes des autres et fixer sa propre histoire en dogme. Malgré de nombreuses promesses, une grande frange de la population est au bord du gouffre à pauvreté, dans un Etat dans l’angoisse de ce qui l’attend, face à des identités imaginaires bâties à la hâte pour exiger une reconnaissance comme un dû, dans un climat de crispations et de méfiance qui rejoint, chez certains le sentiment d’une accélération de leur marginalisation.
Pour gouverner un pays, il faut connaitre au minimum sa conscience historique et sa moralité communes. Parce qu’on ne peut réaménager une conscience collective, ceux qui nous gouvernent ne sauraient être ignorants du travail de la mémoire, du dialogue continué avec le passé qui est indissociable de notre vivre ensemble, de l’exercice de nos libertés (je ne parle pas de licence). Dans le cas contraire, ce sont la liberté, le civisme, la vérité qui sont perdants, pasteurisant ainsi, la démocratie gagnée suite à des luttes épiques face à des élites politiques de toutes sortes qui se sont accordé le droit de penser, de parler, d’écrire, de choisir et d’exclure, quelque fois dans un délire si ce n’est des hérésies et des partialités assumées avec bonne conscience, qui sont loin d’expliquer les coups de dés erratiques, prenant des préjugés favorables ou pas pour des vérités révélées donc absolues.
La polémique née depuis le week-end dernier doit nous faire savoir raison garder pour revenir à cette intelligence qui nous unit au lieu de nous confronter à cet ébranlement conjoint dans lequel nous pensons aujourd’hui, les rapports du privé au public, de l’individuel au collectif, du corps et des croyances de chacun, au corps social. Là est notre salut.
LES DÉFIS DE PAPE ALÉ NIANG
EXCLUSIF SENEPLUS - Représentation inéquitable des langues et des communautés, agenda orienté par le pouvoir, la RTS, un héritage de l'ère coloniale, peine à se défaire de ses vieux démons
La RTS, initialement ORTS, est à l’origine un avatar françafricain de l’Office Radiodiffusion Télévision Française (ORTF) comme toutes les radiotélévisions des anciennes colonies françaises d’Afrique. Elle a été conçue comme un instrument de contrôle et de domination des populations, au service des pouvoirs néocoloniaux.
Sa raison d’être, est non pas le peuple comme son slogan le proclame, mais la défense et l’illustration du pouvoir en place, et particulièrement de la personne et de l’institution du président de la République. Elle fait peu de place aux Sénégalais ordinaires et aux « nouvelles » qui les affectent et excluent carrément les citoyens ordinaires en particulier les ruraux, les femmes, les enfants et les minorités ethniques.
M. Pape Alé Niang qui vient d’en être nommé Directeur Général, par décret discrétionnaire du président de la République, pourra-t-il faire de la RTS un véritable média de service public ?
Un média dont la mission première sera d’informer véritablement les Sénégalais, dans leurs langues, d’assurer leur représentation médiatique dans leur diversité et de permettre l’expression de leurs cultures ? Un média ouvert sur l’Afrique et le monde. Informer véritablement.
Rien Tous Les Soirs, le sobriquet colle encore à la RTS
C’est que la radiotélévision nationale actuelle n’informe pas véritablement les Sénégalais. Elle fait plutôt de la propagande politique, si ce n’est de la promotion institutionnelle et de l’annonce évènementielle.
Regardez les contenus qu’elle diffuse deux fois par jour à travers ses bulletins d’information à la radio et son « journal parlé » en wolof et en français à la télévision. Il s’agit essentiellement d’une mise en son et images des activités du président de la République, du gouvernement et des autres institutions de l’Etat.
On couvre ainsi toujours longuement la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres depuis la traversée des jardins du palais présidentiel par les ministres jusqu’à leur installation autour de la table, en s’attardant sur chacun d’entre eux, sur leurs tenues vestimentaires jusque sur leurs expressions de visage.
Selon Jacques Habib Sy, c’est « le président Senghor (qui) avait inauguré ce type de couverture journalistique en voulant imprimer dans la perception collective, le mouvement d’une nation en voie de construction et d’un président de la République au service de la nation à tout moment »[1].
Quoi qu’il en soit, la valeur informationnelle d’une telle couverture est nulle, on en conviendra. Tout comme l’est celle de ces audiences du président de la République et ces cérémonies de présentation de lettres de créances.
Que dire de ces comptes rendus de séminaires et de colloques dans les décors feutrés d’hôtels de luxe ? Il y a aussi ces cérémonies de signature de conventions et de remise de dons, tribunes de promotion de première classe d’organisations internationales et d’ONG.
Quid de ces manifestations religieuses des différentes « tarikhas » musulmanes et de l’Eglise catholique couvertes longuement alors qu’on pourrait laisser leur couverture aux nombreuses radios et télévisions privées ?
Déterminer l’agenda public
Une autre information est pourtant possible : elle part de l’actualité, concerne les événements courants ou accidentels qui surviennent tous les jours et affectent les citoyens ordinaires.
Que n’a-t-on pas ouvert le JT par exemple sur cette spectaculaire érosion côtière observée récemment à Djifer, ou sur cette hécatombe d’oiseaux observée sur les rives de la Falémé, indicateur probable d’un empoisonnement des eaux par des produits chimiques rejetés par les exploitations aurifères en amont ?
Ou encore sur un de ces naufrages récurrents de pirogues de candidats à « l’émigration clandestine » ?
Une hiérarchisation adéquate de la programmation permettrait de traiter ces informations de manière à en faire, non pas des « faits divers » mais de véritables « nouvelles », dignes de l’attention des citoyens téléspectateurs et auditeurs et des pouvoirs publics.
On inscrirait ainsi dans l’agenda national de manière plus marquée des sujets tels que l’avancée de la mer, le réchauffement climatique, l’exploitation minière, la dégradation de l’environnement, l’émigration de masse des jeunes etc.
N’est-il pas de la mission des médias, notamment des médias de service public, de déterminer régulièrement l’agenda public, en mettant en avant les sujets dont la conversation des citoyens s’empare et qui sont portés ainsi à l’attention des pouvoirs publics ?
Malgré le slogan « Encore, plus proche de vous » et la création de stations régionales (RTS3 pour Tambacounda et Kedougou, RTS4 pour Ziguinchor, Sédhiou et Kolda et RTS5 pour Matam), la RTS est encore loin de « refléter le pluralisme et la diversité de notre pays […] sur les plans politique, culturel et social’’ souhaité par son nouveau directeur général.
C’est ainsi que des associations communautaires dénoncent depuis longtemps « le temps d’antenne ‘insuffisant’ réservé aux autres langues par rapport à celui accordé au wolof » et le fait qu’une « langue, en l’occurrence le wolof, est mise au-dessus des cinq autres langues nationales » et revendiquent « l’égal accès aux médias de toutes les langues de notre pays », mettant en garde même contre « un chemin qui mènera tôt ou tard à des tensions communautaires ».
En fait la « télévision nationale » devrait être le support privilégié de la promotion harmonieuse et du dialogue de toutes les langues nationales.
On pourrait s’inspirer ici de la Société Suisse de Radio et de Télévision (SSR) qui diffuse ses émissions de radio et de télévision dans les quatre régions linguistiques du pays (le français, l’italien, l’allemand et le romanche) tout en en assurant leurs transmissions dans l’ensemble du pays.
La RTS pourrait émuler cette bonne pratique suisse, en accordant l’autonomie à ses stations régionales qui disposent déjà de studios et en les dotant de capacités de production et de diffusion pour couvrir l’ensemble du pays.
Couvrir l’Afrique à partir du Sénégal
L’Afrique et les pays voisins du Sénégal, ne sont pas des sujets d’information privilégiés et ne sont couverts le plus souvent qu’à travers les télévisions françaises et occidentales.
Il est pourtant possible d’en assurer une couverture professionnelle avec des productions innovantes et à moindre coût, grâce à une organisation adéquate et en tirant profit des nombreux outils numériques disponibles, de WhatsApp aux logiciels de traduction basés sur l’IA.
Obtenir une interview d’une personnalité au Niger par un journaliste local par WhatsApp, commander une vidéo de deux minutes d’un événement à Nairobi, produire même des documentaires télé et des podcasts audio aux quatre coins du contient … La RTS pourrait ainsi devenir une radiotélévision continentale à peu de frais.
L’engagement de M. Pape Alé Niang
M. Pape s’est engagé dès l’entame de son mandat à « rétablir les liens entre la RTS et le peuple sénégalais ». Il a déjà procédé à l’ouverture de la télévision aux oppositions politiques et à la société civile dans sa diversité. Pourra-t-il adopter la ligne éditoriale que nous préconisons ici ?
Pourra-t-il obtenir le budget autrement plus important que les quelques milliards qui sont affectés présentement à la RTS pour mettre en œuvre un programme ambitieux et novateur ?
[1] Jacques Habib Sy Crise de l’audiovisuel au Sénégal, Dakar, 2003.
Par Mamadou Ndiaye
SIGNES OSTENTATOIRES
Enfer et damnation ! Une gêne non feinte envahit les foyers à l’évocation d’un sujet qui irrite ou fâche : le port du voile à l’école.
Enfer et damnation ! Une gêne non feinte envahit les foyers à l’évocation d’un sujet qui irrite ou fâche : le port du voile à l’école. A une belle occasion dédiée à la célébration des meilleurs élèves des lycées du Sénégal, le Premier ministre Ousmane Sonko pointe l’indexe sur l’interdit dans des écoles de type confessionnel et promet de régler définitivement la question.
Le ton était ferme. Mais le chef du gouvernement, sans doute emporté par son élan et la solennité du moment, n’a pas dit comment il allait s’y prendre. En affichant ainsi ses certitudes, il n’ignore pas la résonnance et la portée de son propos devant une assistance venue à la fête avec un esprit somme toute léger.
Espérait-il une clarification ? Tenait-il à souligner l’intérêt qu’il accorde à cette lancinante équation, par ailleurs une préoccupation majeure et délicate dans notre pays si attaché à la cohabitation et à la tolérance ! Sonko fait-il sienne cette assertion : « écouter, c’est posséder l’esprit des autres. »
Ah les signes religieux dans nos établissements scolaires ! Toujours abordés, disons effleurés, en revanche jamais traités dans le fond et « avec le sérieux » requis contre lesquels avancent masqués certains poids lourds politiques quand d’autres en défendent le principe par un simple rappel des… principes.
La réplique presque instantanée de l’Abbé André Latyr Ndiaye jette un trouble en même temps qu’elle rend plus explicite le clivage sous-jacent. Les grandes voix du clergé catholique élèvent la voix pour se faire entendre. Ils n’ont pas tort dès lors que le choix est donné à tout Sénégalais d’opter pour le mode d’enseignement qui lui conviendrait.
Pourquoi s’en offusquer ? Après tout, ils ne dérangent personne. Au contraire, ils arrangent tout un monde qui serait désemparé s’il n’y avait cette offre d’éducation bien encadrée, organisée et efficace avec les bons résultats qu’elle présente d’année en année.
Le succès est tel que d’aucuns y voient la « poule aux œufs d’or… » qu’il faudrait à tout prix préserver. La sous-région n’est pas en reste qui duplique le modèle sénégalais ou l’acclimate. Des parents aisés s’installent même au Sénégal dans l’optique d’assurer à leur progéniture le meilleur enseignement qui soit.
Au plus fort de la crise ivoirienne, de nombreux élèves venus de Côte d’Ivoire ont été envoyés poursuivre leurs études au Sénégal dans des écoles présentant de frappantes similitudes avec leur environnement originel.
Ce pragmatisme séduit. Mieux, il est plébiscité, à l’image des inscriptions et des réinscriptions croissantes enregistrées. Il emporte l’adhésion de nombreuses familles (toutes confessions confondues) accueillies à bras ouverts avec la confiance comme socle d’une relation enthousiasmante qui épouse la durée. C’est dire que ce pragmatisme apaise.
La molle réaction de certaines figures musulmanes n’est pas pour ébranler l’édifice scolaire du clergé. Imagine-t-on l’imminence d’une collision entre les deux sphères que tout oppose dans l’approche d’éducation ? Personne n’y songe. Néanmoins, le temps est venu pour l’autre camp d’oser plutôt que de se calfeutrer dans l’indolence et l’invective.
Par le nombre et une addition de volontés, les musulmans, pour peu qu’ils s’organisent, peuvent à leur tour concevoir un modèle alternatif dans le strict respect de la laïcité. Le retard qu’ils accusent leur est imputable. Ils ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes.
Pour être prêts un jour, il leur revient de penser des stratégies, de n’être pas dans le « copier-coller », d’innover en s’inspirant des progrès scientifiques et (surtout) sans attendre un quelconque sauveur hypothétique.
A intervalles réguliers « des Messies » revenus ahuris d’Orient surfent sur la vague de la béatitude pour épater des compatriotes dépourvus de discernement. Ils distribuent de l’argent, beaucoup d’argent pour récolter quelque vif succès avant de disparaître en laissant les commérages prolonger les étonnements.
Ces largesses gaspillées ne pouvaient-elles pas servir à bâtir une école de type musulman susceptible d’enrôler ces milliers d’enfants « jetés » faute de mieux dans des daras insalubres, quelconques et parfois insécures du fait de prédateurs impénitents.
Bien évidemment toutes les daras ne sont pas logées à la même enseigne. Certaines donnent la pleine mesure de leurs ambitions pédagogiques et surtout de leur ingéniosité malgré la modicité des moyens mobilisés. La mise en scène sincère de leur lutte pour une image améliorée des daras se heurte toutefois à des réticences difficiles à vaincre. Autrement dit, elles ont du chemin à faire… avant de terrasser le mur des soupçons ! Pour çà, il faudra des hommes et des femmes avertis qui ont le « sens de l’histoire ».
L’école est certes une affaire d’époque (conjuguée à tous les temps). Elle obéit néanmoins à des logiques d’éclairage, de lumière et surtout de rupture avec le bourrage des crânes, l’aveuglement, l’embrigadement ou la mystification.
Pour sortir gagnant (et non vainqueur, entendons-nous bien) le modèle musulman d’une école de la République ne doit nullement s’écarter de l’efficacité en privilégiant un contenu éprouvé, distinctif et attractif. Déjà le retard de l’effet sur la cause plombe les initiatives que des bonnes volontés tentent d’entreprendre pour rectifier la trajectoire.
A l’évidence, l’Etat dispose de moyens dédiés à l’école dans le strict respect de critères d’attribution ou d’allocationconformément à l’esprit laïc et républicain. Ces instruments de soutien et de financement peuvent appuyer les enseignementssans aucun prisme partisan, sans faiblesse coupable.
Au lieu de se morfondre dans une complaisance ruineuse, les appuis aux écoles feraient l’objet de contrôles réguliers afin de vérifier les usages finaux et leurs impacts positifs en termes d’avancées réelles. A cet égard, la longueur d’avance prise par l’enseignement catholique dans l’utilisation des fonds injectés ou des crédits affectés pourrait inspirer la version musulmane sans édulcorer son propre projet. Le paysage scolaire s’en porterait mieux. Puisque ce qui ne tue pas engraisse. Pourvu que la bonne graine soit semée…
Le Premier ministre peut s’apercevoir que son laïus de l’autre jour n’indiffère pas l’opinion sénégalaise même si d’autres priorités s’alignent ou s’amoncellent sur son bureau. Lui seul connaît l’ordre qu’il imprime à ses actions publiques. Il s’est vu ou cru l’inspirateur des mutations à venir.
L’école serait-elle avec ses avatars une nouvelle ligne de front pour lui ? Sa vigilance ne doit pas pour autant s’émousser au risque de provoquer des débats de société qui ouvriraient béante une fracture sociale.
Jusque-là sa carrière politique reste fulgurante. Des gens réjouis de ses initiatives caressent le menton. Le vent gonfle leur voile. Ils s’enhardissent des coups de pied dans la fourmilière. Mais attention aux effets inverses. La politique combine contexte, prétexte et circonstances. Une remise en selle est vite propulsée, contre toute attente du reste.
Par Abdou SAKHO
DU DÉBAT RELIGIEUX À LA POLÉMIQUE POLITICIENNE
Quand j’ai fini de lire la tribune de l’Abbé André Latyr Ndiaye, j’ai voulu remonter à la source (la cérémonie de réception des lauréats du Concours général) pour comprendre ce qui fondait sa sortie spectaculaire envers la personne du Premier ministre ...
Quand j’ai fini de lire la tribune de l’Abbé André Latyr Ndiaye, j’ai voulu remonter à la source (la cérémonie de réception des lauréats du Concours général) pour comprendre ce qui fondait sa sortie spectaculaire envers la personne du Premier Ministre (PM) et les musulmans du Sénégal.
Nous sommes mardi 30 juillet 2024. le PM Ousmane Sonko reçoit les lauréats du Concours général. Au cours de la cérémonie, l’élève Ndèye Bousso Diatara, « fille voilée » et lauréate du grand prix du Chef de l’État pour le récital du Saint Coran, pose une question au PM en Ouolof : « Après avoir rendu grâce à Dieu et prié sur Son Prophète (SWS) et Ses Compagnons, je salue respectueusement le Président Bassirou Diomaye Faye et son Premier Ministre à qui je voudrais demander, au nom des daaras du Sénégal, d’exposer le programme qu’il a pour eux. J’ai vu récemment une vidéo où vous parlez des daaras et je suis convaincue que ces daaras peuvent compter sur vous quant à la prise en charge de leurs problèmes ».
Le PM remercie l’élève pour sa question et explique que le Sénégal es un pays de croyances et cite les principales religions, en commençant d’ailleurs par la religion chrétienne. Il affirme que la majorité de ces croyants est musulmane et rappelle l’importance du Saint Coran dans le comportement et la vie du musulman. Il revient sur la nécessité et le désir de tout sénégalais d’éduquer ses enfants selon les prescriptions coraniques, à l’image de l’élève Ndèye B Diatara. A cet effet, il cite l’exemple du Président Bassirou D Faye et rappelle que sa maison abrite un daara. Il souligne le besoin de spiritualité du sénégalais qui est aussi prégnant que les besoins de santé et d’alimentation. Il revient sur les fondements du modèle de laïcité choisi par le Sénégal qui promeut la coexistence, la concertation, la cohabitation et l’acceptation mutuelle. Il invite « ceux qui prônent une laïcité fondée sur une opposition systématique ou une confrontation entre l’État et la société religieuse d’aller voir ailleurs ». Il affirme que cette conception de la laïcité se retrouve à la fois dans le projet du Président de la République et dans son livre « Solutions » publié en 2019. Il soutient la nécessité de rompre d’avec l’informalité qui a caractérisé, jusqu’ici, le traitement des questions religieuses au Sénégal, au nom d’une certaine conception de la laïcité ». Dans cet ordre d’idée, il annonce que « dans la LFI 2025 des crédits seront votés pour le culte, au même titre que la santé, l’éducation et l’agriculture. Ces crédits budgétaires viendront en appui aux différents cultes, notamment aux mosquées, aux églises, aux daaras et à l’éducation religieuse». Prenant à témoin le Ministre de l’Éducation nationale, présent à la cérémonie, il affirme que le Gouvernement travaille également à faciliter l’insertion des jeunes issus des daaras dans la vie professionnelle, une fois leur formation achevée.
Sur cette base, il affirme que certaines pratiques ne sont pas compatibles avec le modèle de laïcité du pays à majorité musulmane et le style de vie de ses habitants. Il concède aux pays occidentaux le droit de légiférer et de réglementer le port vestimentaire dans leurs propres écoles. Il argumente que dans un pays comme la France, qui se réclame de la démocratie, de la liberté, des droits de l’homme et de la tolérance, l’exclusion des jeunes filles voilées des écoles doit être déplorée. Mais il explique « qu’au nom des principes de liberté de démocratie et de tolérance rappelés ci-dessus, le Sénégal ne saurait accepter que des jeunes filles soient exclues de l’école pour le simple motif de port du voile. Cela n’est pas conforme aux lois. ». Il relève que les filles voilées constituent la majorité des récipiendaires et appelle à la nécessité de respecter rigoureusement l’égalité de traitement entre les élèves dans un système qui garantit à chacun la liberté de choix de son style de vie, dans une société de tolérance religieuse».
J’ai écouté et réécouter l’intervention du PM. J’ai cherché en vain un mot évoquant une « impolitesse », une menace envers une communauté religieuse. Une telle menace est inconcevable dans un pays de tolérance comme le Sénégal. En revanche, le texte est un « best of » d’attaques éculées, personnelles discourtoises et insolentes pour un religieux.
Le PM rappelle une évidence : Il n’est pas tolérable que dans un pays à majorité musulmane, qu’on renvoie des filles pour port du voile. La grande majorité des Sénégalais (toutes croyances confondues) est d’accord avec ce point de vue. L’Abbe lui-même confirme que l’Église est d’accord et rappelle que « LE VOILE FAIT PARTIE DE SON PATRIMOINE, DE SA LITURGIE, DE SA PARAMENTIQUE (de son habillement). ELLE A CONNU LE VOILE, IL Y A DE CELA PLUS DE 2000 ANS, BIEN AVANT BEAUCOUP DE RELIGIONS (cf première lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens : 1Cor 11, 2-16) ». Il martèle que « l’Église n’a pas peur du voile ». Mais de quelle peur parle-t-il. L’esprit de confrontation religieuse qui transparait dans la tribune de l’Abbe dénote avec celui du PM, apaisant et consensuel. Cette peur renvoie peut-être à la décision administrative prise en 2017, de fermer le Groupe scolaire Yavuz Selim. A l’évidence une telle décision n’est plus possible en dehors des tribunaux, dans ce Sénégal nouveau. Et on imagine mal le Président ou le PM initier une telle décision.
Je doute d’ailleurs que ce texte soit partagé par le Clergé catholique dont l’Abbe se dit membre. Cette instance a joué un rôle essentiel dans la survenue de l’alternance, dans le sillage de guides exceptionnels comme les Cardinaux Thiandoum, T A Sarr ; l’évêque de Dakar B Ndiaye, L’Abbé J Seck, etc. La libération de Mamadou Dia, dont se réclament le PM et son parti, doit beaucoup aux interventions répétées du très regretté Cardinal Thiandoum auprès du Président Senghor.
A la réflexion, le texte de l’Abbe procède d’une inimitié compulsive envers la personne du PM, longtemps contenue et qui a fini par déborder, à son corps défendant. En effet, on se demande bien de quoi l’Abbé se plaint, s’il écrit lui-même que « l’Église accepte le voile depuis 2000 ans bien avant beaucoup de religions ». Sous-entendu l’Islam qu’il n’a pas eu le courage de citer. Mais c’est une évidence acceptée par tous les musulmans. Ce n’est un sujet de débat que dans l’esprit de l’Abbé
L’argument religieux écarté, le texte tombe dans le terrain de la polémique politicienne que l’Abbé refuse d’assumer. L’inimitié envers la personne du PM qui gicle de sa plume, l’aveugle au point de l’amener à se trahir en assumant des défauts qu’il reproche au PM.
A propos de la politesse, il dit : « La politesse est l’apanage, le langage des rois et des princes. Elle est une clef en or qui ouvre toutes les portes » (proverbe tunisien)
« Soyez polis, écrivez diplomatiquement, parlez poliment. Même une déclaration de guerre doit observer les règles de la politesse » (Otto von Bismarck) »
Pense-t-il faire preuve de politesse, lui en tant qu’homme de Dieu en traitant le Pm de « jeune politicien nouvellement promu à un haut poste de responsabilité ». Respecte-t-il le Peuple Sénégalais qui a répondu à l’invite de Ousmane Sonko, en élisant le candidat qu’il a désigné, avec une majorité de plus de 54%. Le cas est unique dans l’histoire du pays et rare dans le monde. De plus, son jugement est excessif et haineux, s’agissant surtout d’un homme de Dieu comme lui. « Ô les croyants ! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Allah et (soyez) des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injustes. Pratiquez l’équité ! cela est plus proche de la piété. Et craignez Allah. Car Allah est certes Parfaitement connaisseur de ce que vous faites. »
[Al-Ma’ida v.8] ». La discourtoisie est également perceptible lorsqu’il reproche aux musulmans, de croire en un « fuyard qui aurait échappé à la souffrance et à la mort ». J’y reviendrai plus loin.
Quant à son invite à s’inspirer de Bismarck, elle est simplement provocatrice et indue vis-à-vis de son propre Peuple africain, lui qui prétend donner des leçons de panafricanisme au PM. Quels échos Abbé espère-t-il de cette invite insensée à s’inspirer de Bismarck, l’organisateur de la Conférence de Berlin, qui a abouti au dépeçage du continent africain le 15 novembre 1884. Il est l’initiateur des génocides des peuples de Namibie, de Tanzanie, du Togo. Le rapport Whitaker PUBLIÉ par l’ONU en 1985, fait état de 65 000 Herero (80 % de la population) et 10 000 Nama (50 %) exterminés entre 1904 et 1907. C’est le premier génocide du XXème siècle. C’est un très mauvais exemple qu’on donne à la jeunesse panafricaine. Rien ne saurait le justifie. Pas même l’hostilité aveuglante envers un adversaire politique (il s’agit bien de cela) ! L’Abbé serait bien avisé de puiser des modèles à proposer à la jeunesse de son pays, parmi les hommes de Dieu, penseurs et philosophes dont le Sénégal regorge (S Touba, EL M Sy, S Limamou Laye, C I Niass, Cardinal Thiandoum, Kocc Barma, S. Moussa Ka, etc.). Les constructions littéraires et les allusions à Bergson ou Montaigne n’ont aucune prise sur les populations.
Vous reprochez au PM d’avoir utilisé le pronom personnel « On ». A l’évidence, en s’adressant aux lauréats, le PM parlait, non pas en son nom propre (comme vous l’avez cru), mais au nom du Gouvernement c’est-à-dire es qualité. Il ne s’est donc pas « caché ». En revanche, dans votre texte, vous vous êtes gardé de citer nommément Ousmane Sonko. Vous n’avez même pas eu l’élégance ou la courtoisie d’évoquer son titre de PM. Vous vous êtes borné à l’appeler dédaigneusement « jeune politicien nouvellement promu ». Alors qui se cache ? Derrière qui ou quoi. Le courage est un trait caractéristique de la personnalité du PM. Tous ses adversaires le reconnaissent.
Dans le même ordre d’idée et parlant de la crucifixion de Jésus (PSL), vous lancez des invectives contre les musulmans qui « auraient cru en un fuyard qui aurait échappé à la souffrance et à la mort » (Astakhfiroulah !!). Plus loin, vous dérapez et délirez complètement en parlant de « Dieu comme d’un éternel mineur (…) ». Le musulmans que je suis pardonne ces injures. Le reste est entre Dieu (SWT) et toi. Lorsque la haine envers le PM te laissera un moment de lucidité, médite ce magnifique passage du Saint Coran : »Dites « nous croyons en Allah, en ce qui nous a été révélé, et en ce qu’on a fait descendre vers Abraham et Ismaël et Isaac et Jacob et les tribus, et en ce qui a été donné à Moïse et Jésus, et en ce qui a été donné aux Prophètes venant de leur Seigneur : nous ne faisons aucune distinction entre eux. Et à Lui nous sommes Soumis » (S2/V136).
Dans sa quête insensée et éperdue d’une vocation de martyr, l’Abbé martèle qu’il n’a pas peur . Mais peur de quoi ? A part la rigueur de la loi en cas de transgression des valeurs pénalement protégées de la République laïque ?
Après sa sortie largement ignorée et méprisée, l’Abbé achève de faire son marché lexical dans les étals les plus nauséabonds, les plus fétides des ennemis du PM. Les provisions qu’il ramène de ce marché singulier pour un « homme de Dieu », achève de convaincre que son texte est éminemment politique. Rarement on aura vu de la part d’un homme de Dieu, une haine aussi crue, une hostilité aussi primaire. Jugez-en : « Gatsa-Gatsa, arrogance, inélégance, précipitation, « Dandy » en guerrier comme Goliath suffocant et étouffant dans son armure de guerre en bronze, « prendre Dieu comme un éternel mineur (…) », probité morale », et autres insanités indignes d’un homme d’Église et que je m’abstiendrai de rapporter par respect pour mes frères chrétiens. Avant de promettre au PM la perte prochaine du pouvoir. En attendant cette échéance lointaine, l’Abbé gagnerait à rejoindre les hommes de Dieu (SWT), sur le chemin de l’équilibre et de la mesure. La haine, la malveillance et l’hostilité envers son prochain confinent à l’animalité dans une société qui transcende les races, les religions et les sexes et où la seule race qui vaille est la race humaine.
Soyez en paix Abbé, le cœur léger !
par Ibrahima Traoré
RÉPONSE À L'ABBÉ ANDRIEN LATYR NDIAYE
Le voile n’a nullement besoin de notre approbation pour exister. Comme vous, nous pensons que notre société gagnerait à permettre que tous les segments, toutes les sensibilités aient droit au chapitre
*"La douceur n'a jamais accompagné une chose sans l'embellir, et elle n'a jamais été ôtée d'une chose sans l'enlaidir."* Hadith
Cher Abbé André Latyr Ndiaye,
La bienséance exige que je vous traite avec déférence eu égard à votre rang et à ce que vous représentez pour l’église et la communauté chrétienne pour laquelle nous n’avons que respect et considération. C’est vrai que notre culture et notre éducation nous inculquent la conception du rapport que nous devons avoir avec vous. Celle-ci nous impose de vous traiter avec une certaine révérence. Permettez-moi cher Abbé, le temps d’une réponse, de différer ce principe car le citoyen que je suis ne peut pas et ne doit pas faire l’économie d’une réflexion sur le sujet qui fait l’objet de nos débats. Votre sortie est une invite à prendre position par rapport à un sujet d’une importance capitale car questionnant un des fondements du vivre-ensemble. Une telle invitation ne doit pas rester lettre morte : elle se doit d’être honorée. Ainsi, je vous prie d’avance d’excuser mon impertinence si tant est que mes propos puissent passer pour telle. Cependant, je tâcherai de m’exprimer de la manière la plus respectueuse qui soit.
Mon cher Abbé, je pense sincèrement que votre lettre empreinte de prétention et de pédanterie, est une démonstration éclatante d’une certaine arrogance déguisée en sagesse. Vous brandissez des maximes latines et des citations érudites comme des boucliers, espérant peut-être dissimuler derrière ce vernis de culture votre incapacité à comprendre pour ne pas dire votre refus d’être à la hauteur des véritables enjeux de notre temps.
Vous commencez par rappeler l'adage latin "qui bene amat, bene castigat", mais j'aimerais vous inviter à considérer un autre principe cher aux humanistes de la Renaissance : "In necessariis unitas, in dubiis libertas, in omnibus caritas" (Dans les choses nécessaires, l'unité ; dans les choses douteuses, la liberté ; en toutes choses, la charité). Cette maxime souligne l'importance de l'amour et de la tolérance dans tous les aspects de notre vie, y compris dans le discours politique.
Vous évoquez la politesse comme une clé en or, mais oubliez que celle-ci n’ouvre que les portes qui sont dans les dispositions. En pareille circonstance la tentation de parler sous l’effet de la colère est grande, la passion peut supplanter le reste mais nous savons que vous êtes assez sage et éclairé pour ne reconsidérer que ce qui doit l'être.
Mon cher Abbé, vous citez Bismarck et Montaigne sur la politesse, de grandes figures historiques connues pour leur pragmatisme et leur sagacité. Cependant, l'histoire nous enseigne également que la politesse ne doit jamais être un masque pour l'injustice. Le discours politique, bien que nécessitant une certaine forme, ne doit pas sacrifier la vérité et la justice sur l'autel de la politesse.
Votre référence à l’éducation catholique et son ouverture d’esprit est louable, mais permettez-moi de rappeler que cette même ouverture doit s’étendre à toutes les formes de diversité, y compris religieuse. L'Évangile selon Matthieu (5:9) nous enseigne : "Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu." La paix, chère Abbé, réside dans l'acceptation et la célébration des différences, et non dans la contrainte de l'uniformité.
Nous musulmans savons que certains de nous pouvent faire preuve de régression et de simplisme sur certains aspects et c’est en cela que nous trouvons salutaire tout discours ou critique qui nous permet de réinterroger nos paradigmes et nos pratiques à la lumière d’une démarche exigeante et objective. Cependant, votre Église, que vous érigez en bastion de vertu et Dieu sait qu’elle a beaucoup apporté à la civilisation et à l’humanisme, ne saurait effacer des siècles d’obscurantisme et de domination culturelle si bien que personne n'a à avoir une condescendante. Le voile, symbole de foi et de respect pour beaucoup, n’a nullement besoin de notre approbation pour exister. Votre attitude semble être celle qui manifeste une peur déguisée en mépris.
Vous évoquez la nécessité de dialogue et de respect des institutions. À ce propos, je me permets de rappeler les paroles de Martin Luther King Jr. : "La vraie paix n'est pas simplement l'absence de tension ; c'est la présence de justice." Le dialogue doit être ouvert et sincère, mais il doit aussi être fondé sur un respect mutuel et une véritable recherche de justice.
Mon cher Abbé, nous devons attendre de vous que vous travaillez à faire de telle sorte que vos écoles soient capables de s’adapter à la diversité qui compose notre nation car votre grande culture et votre fine intelligence font de vous une des personnalités les plus outillées pour cette mission. Oui, mon cher Abbé, Dieu vous a donné des bienfaits sur le plan intellectuel et culturel et cela exige de vous certaines missions au premier rang desquels celle-ci.
Mon cher Abbé, de grâce évitons tout discours qui peut être clivant, évitons d’importer un problème franco-français dans notre pays le Sénégal qui est un exemple de vivre-ensemble et de fraternité entre chrétiens et musulmans.
Mon cher Abbé, vous faites mention du livre de l'Ecclésiaste, un texte riche en sagesse, mais n'oublions pas les paroles de l'apôtre Paul dans sa lettre aux Galates (3:28) : "Il n'y a plus ni Juif ni Grec, il n'y a plus ni esclave ni libre, il n'y a plus ni homme ni femme ; car tous, vous êtes un en Jésus-Christ." Cette affirmation radicale de l'égalité et de l'unité humaine doit nous guider dans nos actions et nos politiques.
Mon cher Abbé, vous critiquez l'emploi du pronom "on", le qualifiant d'indéfini. Cependant, il est parfois utilisé pour représenter une communauté ou un groupe, ce qui peut être un acte d'humilité plutôt que de lâcheté. L’amoureux des lettres que vous êtes si je m’en fie au niveau de langue et au style de votre lettre, n’êtes pas sans savoir que le moi est haïssable en littérature. En sus, en politique, comme en rhétorique, chaque mot porte un poids, et le choix d’un pronom indéfini peut parfois servir à être plus dans l’humilité que de rester dans une certaine imprécision.
Mon cher Abbé, enfin, vous terminez sur une note de mise en garde contre les déclarations de guerre et les rhétoriques belliqueuses. Merci pour ces sages conseils, nous sommes en total accord avec vous. La politique doit être l'art de la conciliation et de la recherche du bien commun même si
Victor Hugo nous rappelle que : « La guerre, c'est la guerre des hommes ; la paix, c'est la guerre des idées.
Mon cher Abbé, comme vous, nous pensons que notre société gagnerait à permettre que tous les segments, toutes les sensibilités aient droit au chapitre. Aucune voix ne doit être étouffée car il y va de la vitalité de l’équilibre de notre société. Nous pensons également qu’une vraie démocratie ne veut pas dire la dictature de la majorité mais le respect des minorités et c’est dans ce cadre que je pense qu’il appartient à chaque musulman d’être le défenseur et le garant des chrétiens. D’ailleurs, nous avons la chance de ne pas faire de distinction entre musulmans et chrétiens et c’est une obligation à nous tous (à vous, à Ousmane Sonko et à nous autres) de préserver cela.
La rancœur, le ressentiment, l’excitation des instincts de la foule n’ont jamais rien construit. Au contraire, ils détruisent comme Pastef a su le faire en 2021 et 2023. Pour l’instant, le duo Diomaye-Sonko est dans le populisme
Le grand avantage des douceurs de l’opposition est le fait de prendre le recul pour réfléchir sur les alternatives mais surtout de prendre des vacances. Pour ces premières vacances post-gouvernement, rien de tel qu’un tour à New York. New York si aristocratique et si démocratique, à l’image de Alexis de Tocqueville qui était «aristocratique par instinct, par classe sociale et démocrate par raison». Tocqueville était attaché à la démocratie mais supportait péniblement la médiocrité de ceux qui l’incarnaient par moments. J’ai le même sentiment quand je vois ce qui se passe dans mon pays. Tocqueville est resté plusieurs mois aux Etats Unis pour une étude comparative des systèmes carcéraux français et américain, mais ce sera son chef d’œuvre De la démocratie en Amérique qui en sortira.
Moi, je n’ai que deux semaines à New York pour partager avec vous mon sentiment sur le «fonctionnement de l’Amérique» que Tocqueville voyait comme l’avenir du monde. Tocqueville a surtout comparé l’Amérique à son pays la France. Moi je vais comparer l’Amérique et mon pays, qui sont les deux plus vieilles démocraties d’Amérique et d’Afrique. Il n’est pas étonnant que l’Amérique soit la plus grande puissance du monde, parce qu’il est le premier pays à avoir «constitutionnalisé» la poursuite du bonheur comme un droit inaliénable. C’est dans cette poursuite du bonheur que se trouve l’optimisme américain incarné par la fête du Thanksgiving. Cet optimisme qui a permis à Franklin Delano Roosevelt de sortir l’Amérique la crise de 1929 dans les 100 premiers jours de son mandat. Si l’Amérique a constitutionnalisé la poursuite du bonheur, le duo Diomaye-Sonko veut «constitutionnaliser» le ressentiment contre les élites, les riches, contre les entrepreneurs et créateurs de richesses, qu’ils jettent à la vindicte populaire afin de détourner le regard sur l’échec des 100 jours. Le plus NewYorkais des présidents américains est sans doute Franklin Roosevelt, qui était aussi la fois si aristocrate et si démocrate, comme New York et comme Tocqueville. Par un discours (la seule chose dont nous devons avoir peur est la peur elle-même qui nous paralyse) et une causerie au coin du feu, diffusée à la radio, il a redonné confiance aux Américains en proie au doute profond et les a réconciliés avec l’optimisme. Le lendemain de sa première causerie au coin de feu, les Américains se sont rués sur les banques, non plus pour retirer mais pour y ramener leur argent qu’ils gardaient chez eux, parce qu’ils ne faisaient plus confiance au système bancaire. On est loin de la médiocrité du duo Diomaye-Sonko qui est en train de casser notre dynamique d’émergence comme le dit bien cette Une de Walf du 31 juillet sur les «germes de la désindustrialisation» et «le privé se perd dans la stratégie de l’Etat». Ce n’est pas seulement le secteur privé mais c’est tout le monde qui s’y perd parce qu’il n’y a point de stratégie.
Tout le monde est d’accord avec la reddition des comptes, l’audit qui est un mode normal de gestion, mais il est urgent de fixer un cap pour le pays et de substituer la confiance, l’optimisme à la culture du ressentiment qui est le moteur de Pastef. Cette vague de ressentiment sur laquelle surfe Pastef et qui nous fait détester nos milliardaires, le voisin qui réussit, le frère qui excelle alors que les Américains sont si fiers de leurs milliardaires et célèbrent leurs entrepreneurs. Une autre leçon que nous pouvons tirer de la comparaison avec l’Amérique : la politique extérieure est le prolongement de la politique intérieure, comme le pense Kissinger. L’Amérique, grâce à son soft power, exporte ses valeurs grâce entre autres à Hollywood, à sa littérature, à ses Gafam. Le Sénégal aussi avait un soft power qui lui permettait d’exporter sa littérature, ses créateurs, ses soldats de la paix, son modèle démocratique. Dommage, aujourd’hui notre cher pays exporte de la vulgarité et de la brutalité, à l’image de Guy Marius Sagna se comportant comme un gladiateur brandissant des muscles au Parlement de la Cedeao. Cette politique intérieure qui use de la terreur contre les médias et les activistes de l’opposition pour imposer l’autocensure, comptant sur une surdité sélective de la Justice afin de masquer un échec si flagrant. Cet échec qu’on cherche à masquer avec de la diversion politicienne comme l’annonce de la création d’un ministère du Culte par notre Premier ministre. Un ministère à la fois inutile et dangereux. Les Etats-Unis sont probablement avec le Sénégal les deux pays où il y a le plus de vitalité religieuse grâce à des formes de laïcité locales et originales. Il y a trois formes de laïcité. La laïcité américaine : freedom of religion, liberté totale de religion, la laïcité française : freedom from religion, se libérer de la religion et la laïcité positive sénégalaise qui est un juste milieu entre ces deux extrêmes et qui se fonde sur la nécessité d’éviter la «querelle des allégeances» entre l’Etat et les confréries. Cette querelle des allégeances qui a été à l’origine des longues guerres de religion en Europe. Notre modèle fonctionne très bien. Donc Monsieur le Premier ministre, ne nous créez pas des problèmes dans le domaine où nous n’avons aucun problème. Un ministère du Culte n’a aucun sens parce que l’Etat n’a aucune compétence en matière religieuse. La compétence de l’Etat est de garantir la paix civile et la sécurité pour une pratique libre et normale de la vie religieuse.
Avec le président de la République, réorientez votre énergie sur une politique de défense que nous attendons impatiemment car le feu djihadiste s’approche dangereusement de nos frontières et une politique économique qui est l’essentiel et dont le fondement ne peut être que le retour de la confiance comme l’a montré Roosevelt. L’économie se fonde sur la consommation, découlant de la confiance que vous avez remplacée par un ressentiment généralisé devenu un cancer qui ronge le pays. Depuis 1789, entre deux élections, une aristocratie bâtit l’Amérique en tirant la classe moyenne par le haut. Dans le Sénégal de Diomaye-Sonko, on attise le ressentiment de la classe moyenne et des plus pauvres contre l’aristocratie, comme l’arrêt arbitraire et unilatéral des travaux sur la corniche. Dans un pays qui veut émerger, on doit se réjouir que Yerim Sow ait pu sortir le Radisson des grottes de la corniche où il n’y avait que des marginaux fumeurs de yamba quand nous étions étudiants à l’Ucad.
La rancœur, le ressentiment, l’excitation des instincts de la foule n’ont jamais rien construit
Au contraire, ils détruisent comme Pastef a su le faire en 2021 et 2023. Les pères fondateurs des Etats-Unis l’ont tellement bien compris qu’immédiatement après la révolution et l’indépendance, ils ont canalisé les foules avec une Constitution où il n’est pas mentionné une seule fois le mot démocratie, parce qu’avant tout l’Amérique est une République qui s’inspire plus de l’aristocratique Rome que de la très démocratique Athènes.
Pour l’instant, le duo Diomaye-Sonko est dans le populisme en attendant le despotisme s’ils gagnent leur guerre contre les médias, que les pères fondateurs des Etats-Unis ont protégés dès le 1er amendement car ils avaient compris que la liberté de presse conditionnait toutes les autres libertés. Donc pour la démocratie, mieux vaut les excès de Fox news que l’autocensure institutionnelle de la Pravda soviétique. Donc Monsieur le Premier ministre votre guerre déclarée contre la presse et les réseaux sociaux est perdue d’avance parce que la liberté de presse n’est pas un don ou une libéralité du gouvernement, mais lui est consubstantielle. C’est pourquoi aux EtatsUnis, le journaliste Bob Woodward a fait tomber Nixon avec le Watergate. Au Sénégal, Latif Coulibaly a fait tomber le gouvernement du Premier ministre Idrissa Seck par un livre. Dans un tel pays, vouloir terroriser la presse est un rêve et il n’y rien de plus démocratique que le rêve. On aurait préféré que le président et le Premier ministre aient de grands rêves comme Kennedy avec sa nouvelle frontière sur la lune, mais pas de si petits rêves de mettre la presse au pas. Nixon a essayé et a lamentablement échoué. Vous aussi, vous échouerez.
Le temps ne chôme pas. Comme Jack Kerouac, il est temps de se remettre «sur la route» et reprendre la marche vers l’émergence au lieu de nous créer un évènement, une distraction quotidienne comme aux Galeries Lafayette.
La grande question que pose la passionnante campagne électorale qui se déroule actuellement aux USA, avec ses divisions et ses dérives, trouve sa réponse dans le grand livre de John Sperling The great divide : Retro versus Metro America. Ce livre qui relate le grand schisme entre Metro America (l’Amérique moderne et ouverte sur le monde) et le Retro America (l’Amérique fermée des conservatismes). Le retro America constitue la base de l’électorat de Trump alors que le Metro America qui a élu Obama, un noir dont le père n’est même pas Américain, veut, cette fois encore, aller beaucoup plus loin en donnant les clés de la Maison Blanche à une femme noire et indienne. Toute chose étant égale par ailleurs, chez nous, c’est le retro-Sénégal qui a triomphé le 24 mars 2024, avec un souverainisme désuet et anachronique parce que l’émergence est consubstantielle à l’ouverture au monde.
God bless Senegal. God bless America
Dr Yoro Dia est politologue, ancien ministre.
Par Hamidou ANNE
DIEU SAURA RECONNAITRE LES SIENS
Nous avons hérité de la République de nos pères fondateurs. Elle ne nie aucune composante socioculturelle ; elle n’a pas de religion ni d’affiliation politicienne, mais elle fonde le socle commun à partir duquel nous bâtissons une histoire
«N’obéis pas à ceux qui crient en mensonge, ils aimeraient bien que tu transiges avec eux afin qu’ils transigent avec toi. Et n’obéis à aucun grand jureur, méprisable, grand diffamateur, grand colporteur de médisance.» Le Noble Coran (68 : 8-11)
Je racontais à un proche ma récente visite à Joal puis à Fadiouth, sur les terres de mes esclaves sérères, qui ont tous les défauts mais gardent une qualité : celle d’être les parents de sang et de terroir de l’illustre Léopold Sédar Senghor. Mon interlocuteur me fit remarquer que les Sérères de Fadiouth ont un autre mérite : ils ont eu le bon goût d’avoir donné au Sénégal deux cardinaux. D’abord, le regretté Monseigneur, le Cardinal Hyacinthe Thiandoum, archevêque de Dakar pendant quatre décennies. Ensuite, Son Eminence Monseigneur Théodore Adrien Sarr, créé Cardinal par la Sainte-Eglise de Rome en 2007.
La chrétienté sénégalaise a toujours joué un rôle d’avant-garde malgré son statut de minorité. C’est un fervent chrétien, lecteur attentif du prêtre jésuite Teilhard de Chardin, qui a fondé notre Etat. L’Eglise a accompagné la formulation de politiques ambitieuses dès les premières heures de l’indépendance. Le Père Lebret, prêtre dominicain, a conçu avec Mamadou Dia le premier plan quadriennal de développement du Sénégal. Mgr Sarr rappelait dans une interview, il y a 15 ans, le souci de l’Eglise de proposer aux hommes «un salut global» conformément au message du Christ de sauver l’homme dans son «être total». A côté des églises, sont érigés des dispensaires, des écoles, des centres de promotion et de renforcement de la dignité humaine. L’Eglise a formé des millions d’enfants du Sénégal. Elle ne leur a pas offert comme horizon indépassable l’insulte et la calomnie sur les réseaux sociaux.
Je tiens à rappeler le travail des Spiritains de Ngazobil, qui ont ouvert au savoir un petit enfant devenu Père de la Nation.
Je pense aux différents ordres des Sœurs de l’Immaculée Conception, de Saint-Joseph de Cluny, les Bénédictines et les Bénédictins, les Frères Carmes, Caritas, Présence Chrétienne, Clairafrique...
Tous ces ordres, toutes ces initiatives, toutes ces personnalités contribuent à la formation des esprits et à l’épanouissement social et humain des Sénégalais. Ceux qui les menacent ne sont pas à leur hauteur en termes de qualité et de hauteur. Sont-ils dans la continuation du projet de la «Dahwa» ? C’est peine perdue car le Sénégal est un peuple sans couture. Par surcroît, si le caractère sensible de la question ne nous interdisait d’en rire, il aurait été savoureux de voir ceux qui ont déchiré le voile de pudeur au Sénégal et promu l’injure à l’encontre de nos guides religieux s’ériger en musulmans modèles, en se présentant en défenseurs du foulard.
Nation pétrie dans la foi, le Sénégal s’est toujours honoré d’être une société détribalisée, où les polémiques entre les diverses composantes religieuses n’existent pas. Les musulmans et les chrétiens «font mélange» pour ne se définir que Sénégalais, renvoyant à notre devise nationale. Dans nos foyers, les imams côtoient les prêtres dans une parfaite ordination. De temps à autre, comme en ce moment, quelques zélés tentent de briser le cycle vertueux du vivre-ensemble. Ces derniers sont des rentiers de l’obscurantisme et de la disharmonie. Les cours des maisons et les médias responsables ont refusé d’entendre et de relayer leurs saillies. Ils ont pris le chemin des réseaux sociaux, là où l’insulte et l’outrance octroient célébrité fugace et fortune sans lendemain. Malgré les errements et les velléités transgressives propres aux hommes politiques, nous avons eu la chance, depuis le président Senghor jusqu’au président Sall, d’avoir des dirigeants intransigeants sur la laïcité, responsables et soucieux de la préservation de ce qui fonde notre pacte national : le respect de la différence des confessions, la diversité culturelle et surtout l’allégeance des hommes et femmes qui incarnent le pouvoir politique à la République. Nous avons hérité de la République de nos pères fondateurs. Elle ne nie aucune composante socioculturelle ; elle n’a pas de religion ni d’affiliation politicienne, mais elle fonde le socle commun à partir duquel nous bâtissons une histoire, un destin commun et une ambition économique et sociale.
Comme l’école, la laïcité est un fondement de notre République. Elle permet aux Sénégalais de vivre en harmonie sans se jauger, ni se juger. Elle est garante de l’équilibre des relations entre le centre politique et les pôles de foi qui rayonnent dans tout le Sénégal et au-delà. Le choix de maintenir la laïcité malgré les harangues de ses ennemis, dans la Constitution, honore notre pays. Car elle seule garantit la liberté de croire ou de ne pas croire sans que cela ne soit un débat public. L’Etat respecte tous les cultes, mais reste équidistant pour jouer son rôle de rempart et de recours dans le jeu démocratique et social. La foi des gens ne saurait constituer un débat public ni une source de paroles médisantes.
Revenons-en à la polémique stérile, à l’agitation démagogique, qui n’ont leur place ni dans le moment ni dans le lieu, censés être ceux de la célébration de l’excellence. Je dois confesser que quand la médiocrité est invitée à célébrer l’excellence, un biais cognitif s’instaure. Je pense aux pauvres enfants, qui ont travaillé d’arrache-pied une année durant, et qui espéraient être célébrés devant leurs parents, leurs familles et leurs amis. On devait les montrer en exemple comme la future élite de la République. Hélas, un adulte aussi incompétent qu’encombrant a décidé de gâcher la fête, de parasiter la célébration de l’école républicaine et des écoliers pour se mettre en scène. Les meilleures blagues sont pourtant les plus courtes.
Je suis convaincu, au nom de la liberté, qu’on ne saurait accepter l’interdiction du port du voile dans les écoles de la République. Et selon ma compréhension, les établissements visés ne le souhaitent pas. Pire, l’Etat du Sénégal, en concertation avec le Diocèse a réglé cette question depuis 2019. A quoi sert-il alors de réveiller avec désinvolture des polémiques inutiles sinon à montrer que le culte du travail, dans le silence et la solitude, n’est pas sa plus grande qualité. Le costume d’Etat est décidément trop grand pour des épaules rompues à l’outrance verbale et au radotage sans fin.
Les menaces proférées vis-à-vis d’écoles confessionnelles mais ouvertes à tous les enfants du Sénégal sont aussi à mettre au crédit de l’ignorance, de l’incompétence et de l’incapacité à s’élever. Dans ses Mémoires d ’ o u t r e - t o m b e , Chateaubriand avait prévenu : «Une ambition dont on n’a pas le talent est un crime.»
Je suis d’ailleurs peu surpris par ces menaces grossières, qui relèvent davantage de la pollution sonore que de la déclaration générale d’une politique pour le quinquennat à venir. Elles sont surannées et demeurent inopérantes, car nous sommes un pays de démocratie et de liberté, où l’expression des citoyens est garantie par les textes fondamentaux.
Depuis quelques années, de nombreux compatriotes, qui n’ont pas cédé à la tyrannie verbale, alertent sur l’affaissement de la République et les pulsions velléitaires d’individus mus par le besoin de tout conflictualiser pour récolter des dividendes électoraux sur l’autel du face-à-face permanent entre les Sénégalais.
Des dirigeants incompétents et incultes fondent leur ascension politique sur l’instrumentalisation de la violence verbale et physique. Le sectarisme, le régionalisme et l’islamisme sont des instruments au service d’un projet dont l’Adn est le populisme.
Je suis rassuré, car souvent un homme qui parle trop lit peu. Or le refus d’apprendre, conformément à la première parole du Coran, précipite la chute. La vie chère, les drames de l’émigration, l’insécurité sur les routes, la guerre à nos frontières commandent de retourner à la lecture de l’Ecclésiaste : «Il y a un temps pour jeter des pierres et un temps pour les ramasser.»
Au travail ! Dieu Lui saura reconnaître les siens.
Par Vieux SAVANÉ
LA LAÏCITÉ À LA SÉNÉGALAISE, UN IMPÉRATIF VITAL
La question du voile à l’école se pose non point en se couvrant la tête mais en promotion du vivre-ensemble. Si derrière tout ce tintamarre s’exprimait un désir d’émancipation vis-à-vis de l’ancienne puissance coloniale, elle est d’une paresse confortable
Alors même qu’il s’entretenait la veille avec les lauréats du Concours général qu’il avait conviés à une réception, le Premier ministre Ousmane Sonko avait « immédiatement arrêté le discours qu’il faisait sur la laïcité et la religion au Sénégal », lorsque l’appel du muezzin pour la prière du crépuscule a retenti aux alentours, rapporte « Le Témoin » de mercredi dernier. Selon toujours le journal, « à la fin de l’appel de la prière », le Premier ministre « a eu droit à un tonnerre d’applaudissements » de la part de nos futures élites. « Et si des cloches avaient retenti d’une église voisine » s’interroge le Témoin ? Bien que la question posée soit pertinente, il n’en demeure pas moins que Barthélémy Dias avait adopté la même attitude lors d’une réunion politique. Lui aussi, avait été ovationné. C’est dire ! Il ne reste donc plus qu’à souhaiter qu’en cas d’urgence dans leurs futurs domaines de compétences, cette promotion de cracks n’ait pas un cas de conscience entre l’appel à la prière d’un muezzin ou celui du bedeau qui sonne les cloches de l’Eglise. Gageons plutôt qu’en bons apprenants, ils s’inscrivent dans une logique de vénération du travail en faisant leur cette sentence de Cheikh Ahmadou Bamba, à savoir : « Travaille comme si tu ne devais jamais mourir, et prie comme si tu devais mourir demain ».
Il est surtout à se désoler que cette séquence quelque peu déroutante a eu lieu dans un contexte qui s’est voulu vindicatif, prévenant de sa volonté de ne pas cautionner que le port du voile puisse ne pas être accepté dans une quelconque institution scolaire. Une prise de position affichée dans un brutalisme qui vient s’agréger à tous ces bruits et fureurs qui polluent les sujets religieux et qu’il convient de contenir au plus vite avant qu’ils ne développent des antagonismes inappropriés.
Musulmans, chrétiens, animistes, athées entretiennent pourtant de bonnes relations tout en laissant à l’Autorité Suprême le soin de reconnaître les Siens. Cela se manifeste quotidiennement dans la mixité de nos familles mais aussi lors de différentes fêtes religieuses symbolisées notamment par la distribution de la viande de mouton aux voisins catholiques lors de la fête de Tabaski , ou alors celle de la distribution de « ngalax » par la communauté catholique aux frères et sœurs musulmans.
Dans ce pays, faut-il le rappeler, un fervent catholique a été porté à la magistrature suprême contre Lamine Guèye, un adversaire politique de confession musulmane. La Grande mosquée de Dakar a été inaugurée en 1964 en présence du président Léopold Sédar Senghor, sa majesté le Roi Assane II du Maroc et El Hadj Abdoul Aziz Sy Dabakh. Le chef de l’Etat assistait lui-même à la prière de l’Aïd par une présence remarquée à la mosquée. On a eu dans une même famille recomposée un archevêque catholique et un imam. Qui ne souvient par ailleurs de ce qu’il s’est passé en 2006 lors de la profanation de la Cathédrale en plein Vendredi Saint par des policiers qui cherchaient à interpeller Jean Paul Dias ? A la Cathédrale on se rappelle encore avec une vive émotion de la présence des dignitaires musulmans venus massivement en soutien contre cette ignominie. Lorsque en 2012, la Zawiya d’El Hadj Malick Sy de Dakar a été l’objet à son tour de profanation avec des tirs de grenades lacrymogènes sur des manifestants du M23 protestant contre un 3e mandat de Abdoulaye Wade, on a assisté à ce même mouvement de solidarité avec la présence remarquée des dignitaires catholiques. C’était un des grands moments de communion et d’unité nationale dont le Sénégal a le secret.
Promouvoir le vivre-ensemble
Quel intérêt y a-t-il donc à exacerber des tensions inutiles, si l’on sait que la question du voile à l’école se pose autrement. Non point en se couvrant la tête mais en promotion du vivre ensemble. Dans les règlements intérieurs de l’enseignement catholique, il est en effet question de ne pas accepter le refus de serrer la main d’un camarade de sexe opposé, de partager un même table-blanc avec un camarade de sexe opposé. Qui peut défendre que dans une institution privée, de surcroit religieuse, une personne de confession différente puisse s’y inscrire en toute connaissance de cause et exiger au nom de sa religion de ne pas serrer la main de garçon, de ne pas se mettre en short pour la gymnastique. C’est assurément fort de café d’autant plus que rien ne s’oppose à ce qu’elle s’inscrive dans une institution privée en accord avec ses attentes.
Alors qu’il est question d’un état des lieux sur la situation du pays, il importe de rappeler qu’il est attendu du président de la République et de son gouvernement de veiller à trouver des solutions aux problèmes que traversent les populations. Ces derniers poussent notamment nombre de jeunes à continuer de risquer leurs vies en s’embarquant pour l’Europe tant décriée, à la recherche d’un avenir dont ils se sentent exclus chez eux. La semaine dernière un internaute vivant aux Etats-Unis a informé ses followers que 40 000 Sénégalais avaient foulé le sol américain via le Nicaragua. Pendant ce temps, dans la nuit du vendredi 2 au samedi 3 août, cinq enfants talibés sont morts calcinés dans un violent incendie, dans un village rattaché à la commune de Tivaouane. Ce sinistre a réveillé le souvenir funeste d’il y a 11 ans , où par une nuit du dimanche 3 au 4 mars 2013, il a été constaté la mort atroce de 9 jeunes talibés à la suite d’un incendie dans un bâtiment insalubre de la Médina. En dépit de tout cela, le problème des enfants talibés demeure toujours aussi poignant.
En tout état de cause, si derrière tout ce tintamarre s’exprimait un désir d’émancipation vis-à-vis de l’ancienne puissance coloniale, disons-le tout net, la voie choisie est celle d’une paresse confortable. La souveraineté tant chantée ne saurait en effet se résumer à une posture déclamatoire. Elle est un comportement, un combat qui consiste à se donner concrètement les moyens de son autonomie et de son indépendance. Et cela ne pourra se faire que par une exaltation de la valeur travail, de l’éthique et de la morale. Elu pour exécuter le programme qu’il a « vendu » à ses compatriotes, le président de la République et le gouvernement qu’il a mis en place sont au service de leur pays. Ils ne sont pas la République mais ses serviteurs. En ce sens nulle arrogance et surtout l’humilité de celui qui se sait en mission commandée tant les tragédies qui explosent sous nos yeux obligent à se mobiliser autour des véritables enjeux. Il faut donc avancer, promouvoir la laïcité à la sénégalaise, cette façon bien originale de rendre effectif l’exercice de toutes les croyances tout en entretenant un rapport apaisé avec elles, refusant ainsi de patauger dans le poto-poto des polémiques inutiles qui sonnent comme l’expression d’une incapacité à saisir les problèmes à bras le corps
Par Vieux SAVANÉ (Septembre 2019)
PAR-DELÀ LE VOILE
La polémique autour du port du voile, remise au goût de l’actualité par une sortie quelque peu malheureuse du Premier ministre Ousmane Sonko, n’est pas nouvelle dans l’espace public.
La polémique autour du port du voile, remise au goût de l’actualité par une sortie quelque peu malheureuse du Premier ministre Ousmane Sonko, n’est pas nouvelle dans l’espace public. En septembre 2019 déjà, le vivre ensemble qui lie depuis toujours les communautés religieuses au Sénégal avait été mis à rude épreuve par l’affaire dite Sainte Jeanne d’Arc. En temps utile, nous avions affirmé que cette affaire-là ne saurait se réduire à une simple question de voile, ne serait-ce que parce qu’elle dévoile des problèmes qui vont bien au-delà. Raison suffisante pour mettre en avant une alerte qui s’impose encore à nous, dans toute son acuité, cinq années après, en vous soumettant de nouveau cet article daté du 19 septembre 2019. Bonne lecture.
C’est aujourd’hui, jeudi 19 septembre, qu’entre en vigueur l’accord conclu, mercredi 11 septembre, entre le ministère de l’Education nationale et l’administration de l’Institution Sainte Jeanne d’Arc, préconisant une réintégration des élèves voilées, sous condition de se conformer aux réaménagements exceptionnellement édictés, à savoir : « porter l’uniforme assorti d’un foulard, de dimensions convenables, fourni par l’établissement et qui n’obstrue pas la tenue ». A cette occasion, Sud publie dans la rubrique Forum des articles reflétant différents points de vue, invitant ainsi à se faire sa part de vérité. Pour ce qui nous concerne, il importe de rappeler que « l’affaire Jeanne d’Arc » ne saurait se réduire à une simple question de voile, ne serait-ce que parce qu’elle dévoile des problèmes qui vont bien au-delà. Comme nous le faisait remarquer un observateur averti de la scène socio-politique sénégalaise, elle révèlerait plutôt le dessein non avoué de quelques activistes tout à l’idée d’ “introduire subrepticement les germes d’une déstabilisation propice à certaines aventures”.
A l’entendre, “les non-dits et les arrières pensées peuvent cacher des enjeux autrement plus importants, avec le projet de mettre en échec l’Etat laïc, les confréries considérées comme une hérésie et d’instaurer une République islamique “. Cela est d’autant plus plausible que, faisait-il observer, « sur les 26 élèves concernées par l’affaire du voile, sur un effectif de plus de 1700 élèves, 23 d’entre elles sont d’origine libano-syrienne, d’obédience chiite, soutenues par le Hezbollah et l’Iran ».
Une manière de mettre le doigt sur une possible instrumentalisation de la religion au profit de projets politiques. Et cela va dans le sens des propos énoncés, il y a déjà quelques années, par le Pr Abdoul Aziz Kébé ( Voir Sud Quotidien du 13 août 2012 ). A l’époque, chef du département d’arabe à l’Université Cheikh Anta Diop , responsable du Centre de Recherche Islam Sociétés et Mutations, alors qu’on l’interrogeait sur le fait de savoir s’il était possible que des mouvements salafistes puissent se déployer au Sénégal, il avait répondu que ce pays ne pouvait être un îlot replié sur lui-même, loin des soubresauts du monde alentour.
Faisant observer qu’ “il y a des gens qui croient que l’islam est religion et politique” et qui “ont un projet d’instaurer un Etat théocratique”, il relevait qu’ il y a “aujourd’hui ce qu’on appelle une structure dans le sens de l’appel islamique, “la da’wa”. Et cette dernière, avait-il indiqué, « consiste à se mobiliser pour une soidisant réislamisation de la société. Dans leur entendement, le Sénégal est un pays musulman mais la société n’est pas islamisée.
Pour ce faire, il faut alors, selon eux , ajuster les propos tout autant que les comportements à la lettre de la shari’a”. Le Pr Kebe de souligner alors que “les partisans de cette option veulent s’appuyer sur l’idéologie salafiste, sur le wakhabisme, pour contrer l’islam des confréries et promouvoir un rigorisme littéral”. Relevant que c’est ce qui était en train d’être appliqué à cette époque à Tombouctou et à Gao (Mali), et que si cela parvenait à « investir la conscience d’une majorité de Sénégalais qui ont assimilé cette idéologie exclusiviste, il est à craindre que nous puissions connaitre ces mêmes problèmes ». Il se trouve précisément, avait-il souligné que “le salafisme est une doctrine qui voit l’avenir de l’humanité dans le passé. Il dit que nous devons calquer notre vie sur celle des “ancêtres vertueux”. C’est un radicalisme théologique qui combat la modalité soufie des confréries. En somme, ils prennent les ancêtres (Salaf) comme modèles. Pour eux, tout ce qui est symbole de la vie moderne contemporaine est contraire à l’Islam pur”.
Soulignant que le danger est à nos portes, le Pr Kébé avait tenu à rappeler que “toutes les religions ont été capturées à un moment donné par ceux qui ont des projets politiques », lesquels « ont choisi la facilité en investissant l’émotion et l’affect plutôt que l’intellect”. Se prononçant sur le port du voile, tout en y décelant une recommandation du Coran aux femmes, à ne « pas exposer leurs charmes », cela lui apparaissait toutefois comme « une injonction de respect, à savoir ne pas considérer la femme comme une chair à prendre ». Aussi avait-il précisé, à l’école comme partout ailleurs, « ce qui conviendrait le mieux, c’est que la modalité soit à l’africaine et que ce ne soit pas forcément à la Saoudienne ou à l’Arabe”. Ne serait-ce que parce que, « le port vestimentaire est partie intégrante et constitutive de notre culture ».
Ayant naguère enseigné dans une école catholique avec une prédominance d’élèves musulmanes, le Pr Abdoul Aziz Kebé faisait par ailleurs remarquer que “si dans le port du voile, il y a le rejet de l’autre, l’enfermement sur soi-même, si le voile est un ghetto, alors cela peut être dangereux pour l’espace scolaire, Espace de dialogue, d’intégration”. Pour lui, « si le port du voile empêche de s’asseoir à côté d’un garçon, il y a un problème”. Et d’ajouter : “ Si quelqu’un ne peut pas se plier aux règles qui régissent l’école, il peut aller dans un autre espace qui reflète ce qu’il désire”. Pour le Pr Abdoul Aziz Kébé, cette affaire “n’a rien à voir avec la religion”, même si, précisait-il dans cette même interview, “le voile ne doit être un prétexte, ni pour exclure ni pour s’exclure”.