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22 novembre 2024
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BIDEN VOIT GRAND
René Lake, éditorialiste et analyste politique à Washington, analyse le plan d’infrastructures de 2.000 milliards de dollars présenté par le nouveau président américain
Le président américain Joe Biden a présenté son plan d’infrastructures. Il compte investir, quelque 2.000 milliards de dollars au cours des huit prochaines années. Il veut augmenter les impôts des entreprises. René Lake, éditorialiste et analyste politique à Washington, en fait une analyse.
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DE L'INDISPENSABLE RÉVOLUTION DE L'ÉCOLE
C'est un Abdou Fall très en verve qui tire les leçons des émeutes sanglantes qui ont secoué le pays ces derniers jours - L'éditorialiste de SenePlus est l'invité du dimanche de la RTS
C'est un Abdou Fall très en verve qui tire les leçons des émeutes sanglantes qui ont secoué le pays ces derniers jours - Il est l'invité du dimanche de la RTS.
Il s'exprime sur ce que devrait être le débat national pour sortir le Sénégal de l'impasse et créer les conditions d'un véritable renforcement de ses institutions. Il met en garde ceux qui pensent qu'une révolution peut renforcer la démocratie. "Toutes les révolutions mènent à la dictature", affirme avec véhémence l'ancien ministre d'Etat, aujourd'hui PCA de l'Apix.
Très animé, Abdou Fall, un des éditorialistes de SenePlus, confirme dans cette perestation qu'il est certainement l'un des rares cadres de l'APR en mesure aujourd'hui d'articuler un discours qui puisse être entendu et éventuellement discuté par tous les acteurs de l'espace public sénégalais quelle que soit leur opinion sur son contenu.
Regardez cette vidéo.
Par GU ZHONGYANG ET YU JINGXIAN
COMMENT LA TECHNOLOGIE CHINOISE JUNCAO AIDE L'AFRIQUE A SORTIR DE LA PAUVRETE
La coopération dans la lutte contre la pauvreté entre le Fujian et la région autonome Hui du Ningxia a permis à la technologie mycorhizienne de contribuer à la réduction de la pauvreté mise en œuvre avec succès dans le Ningxia
GU ZHONGYANG ET YU JINGXIAN |
Publication 08/03/2021
Je suis né dans la campagne pauvre du comté de Liancheng, dans la province du Fujian (sud-est de la Chine). J'ai donc une profonde compréhension de la vie difficile des agriculteurs. Je souhaite depuis longtemps changer le visage de la pauvreté rurale. Aux yeux des gens ordinaires, l'herbe est ordinaire, voire insignifiante. Cependant, la puissance de la technologie chinoise Juncao (littéralement « champignon et herbe ») est énorme. Elle peut non seulement faire pousser des champignons que l’on vend pour se débarrasser de la pauvreté, et contrôler les tempêtes de sable, mais aussi produire de l'électricité et du papier. Elle est devenue une « merveille » mondiale de lutte contre la pauvreté apportant l'espoir d'un développement durable à un grand nombre de pays en développement.
La coopération dans la lutte contre la pauvreté entre le Fujian et la région autonome Hui du Ningxia a permis à la technologie mycorhizienne de contribuer à la réduction de la pauvreté mise en œuvre avec succès dans le Ningxia. À cette époque, le camarade Xi Jinping, alors secrétaire adjoint du comité provincial du Parti du Fujian, était le chef du groupe dirigeant pour la lutte contre la pauvreté conjointe entre le Fujian et le Ningxia. Il a éclairé la direction et le ‑l de la pensée pour soutenir le Ningxia par la technologie Juncao, ce qui nous a beaucoup inspirés. Le désert aride du Gobi du Ningxia ne peut même pas retenir la pluie, sans parler des cultures. En revanche, la technologie Juncao peut non seulement remplace les arbres pour cultiver toutes sortes de champignons comestibles, mais permet également de développer des racines, qui sont capables de freiner le vent et fixer le sable, et devenir le meilleur choix pour la lutte contre la pauvreté.
Grâce à la promotion du camarade Xi Jinping, la technologie Juncao est continuellement sortie de la Chine et a été mise en pratique dans de nombreux pays et régions sous-développées. Avec l'aide de l'expérience réussie de la coopération FujianNingxia, nous envoyons des experts chinois aux pays en développement dont la population pauvre est prioritaire dans le service d’aide. En Afrique du Sud, au Lesotho et dans d'autres pays, nous avons également créé un modèle de « champignonnière de 10 mètres carrés » pour les petits agriculteurs. Avec seulement 10 mètres carrés de terrain, nous pouvons produire 1,2 tonne de champignons frais par an. Les agriculteurs sans terre et les citadins pauvres ont également la possibilité de participer à la production. La technologie Juncao a construit des ponts d'amitié entre la Chine et les pays étrangers dans la coopération pour la lutte contre la pauvreté, avec les programmes chinois et la sagesse chinoise apportant ainsi leur contribution à la réduction de la pauvreté dans le monde.
La lutte contre la pauvreté grâce aux sciences et technologies a permis de passer de la réduction de la pauvreté par « transfusion sanguine » à la réduction de la pauvreté par « fabrication de sang », stimulant de manière efficace la force endogène de la lutte contre la pauvreté des ménages pauvres et minimisant le phénomène du retour à la pauvreté. La technologie Juncao est étroitement liée à la « lutte ciblée contre la pauvreté par l'industrie » et est devenue la « source d'eau » de la lutte contre la pauvreté. Si nous considérons la technologie Juncao comme du « poisson », nous fournissons non seulement du « poisson » dans le cadre de l'aide étrangère, mais également toute l'industrie de l'élevage du « poisson », de la capture du « poisson » à la transformation du « poisson ». En Afrique du Sud, nous avons mis en place la filière de l'industrie des pleurotes pour permettre aux femmes locales de « comprendre, apprendre et réussir dès qu'elles essaient de faire ». Ainsi, de nombreuses femmes peuvent produire des champignons en sept jours et les vendre. Avec leurs propres eorts, elles gagnent non seulement de l'argent, mais créent également une belle vie à sa famille. Lorsque les femmes locales ont récolté des champignons pour la première fois, elles ont chanté et dansé. Ce genre de bonheur sincère nous a rendus profondément conscients de l’importance de la réduction de la pauvreté.
La promotion réussie de la technologie Juncao dans les zones pauvres aide les gens à se débarrasser de la pauvreté, également ouvre une nouvelle voie pour la protection de l'environnement et le développement durable. L’utilisation de la technologie Juncao dans la culture peut fournir suffisamment de matières premières pour la culture des champignons, mais aussi atténuer efficacement le problème du manque de fourrage en saison sèche, favoriser le développement de l'élevage et faire une démonstration pour le contrôle de l'érosion des sols au niveau local. Au Rwanda, un pays aux milliers de collines, où la végétation forestière diminue fortement et où l'érosion des sols est grave, la technologie Juncao est intercalée avec des arbres fruitiers, du maïs et du soja pour conserver le sol et l'eau, ce qui a été vigoureusement encouragé par la Commission agricole rwandaise à travers le pays.
Au cours des 20 dernières années, la technologie Juncao chinoise s'est diusée à l'étranger, répandant les graines de la richesse dans plus de 100 pays et régions du monde, aidant à résoudre les problèmes de survie et de développement humains grâce aux sciences et technologies, qui est devenue pour la Chine, une pratique vivante dans la construction d'une communauté d'avenir partagé pour l'humanité.
GU ZHONGYANG ET YU JINGXIAN journalistes au Quotidien du Peuple
(L'auteur est Lin Zhanxi, inventeur de la technologie Juncao et scientique en chef du Centre national chinois de recherche sur la technologie Juncao)
LE RAS-LE-BOL GÉNÉRALISÉ DES POPULATIONS
Un collectif d’artistes et universitaires sénégalais lance un appel pour que cessent la répression que mène actuellement le régime du président Macky Sall et l’impunité internationale dont il bénéficie. Macky installe un climat de terreur au Sénégal
Un collectif d’artistes et universitaires sénégalais lance un appel pour que cessent la répression que mène actuellement le régime du président Macky Sall et l’impunité internationale dont il bénéficie.
Depuis le 3 mars, et l’arrestation de la principale figure de l’opposition Ousmane Sonko, le Sénégal est le théâtre de manifestations populaires massives. Le président du parti PASTEF (Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité), accusé par une employée d’un salon de massage de « viol et menaces de mort », avait vu son immunité parlementaire levée en fin février après le vote d’une commission ad-hoc principalement composée de députés de la majorité. Alors qu’il se rendait au tribunal pour répondre à la convocation du juge d’instruction, Sonko fut arbitrairement arrêté et placé en garde à vue pour « troubles à l’ordre public ». La goute de trop qui embrasa le pays.
Les manifestations vont cependant bien au-delà du cas d’Ousmane Sonko. Dans la rue et sur les réseaux sociaux, l’on entend aussi bien « Libérez Sonko » que « Macky dégage » et « Libérez le Sénégal ». Chômage massif des jeunes, accroissement des inégalités, scandales de corruption, le tout accentué par une gestion répressive de la crise sanitaire : il s’agit bien d’un ras-le-bol généralisé d’une population qui désavoue la gestion du pays par sa classe politique dirigeante.
Un climat de terreur
Depuis plus d’un mois, pas un jour ne passe sans que les forces de l’ordre n’arrêtent des opposants au régime, aussi bien militants du PASTEF, membres du mouvement FRAPP (Front pour une révolution anti-impérialiste populaire et panafricaine) que divers citoyens engagés. La torture, legs de l’administration coloniale maintenu par tous les régimes depuis l’indépendance, est également utilisée comme arme de renseignement. Le 4 mars, la directrice de la maison d’arrêt et de correction du Cap Manuel, Khadidiatou Ndiouck Faye, déclarait ainsi que les prisonniers politiques récalcitrants étaient parqués dans des cellules punitives. « Là-bas, dit-elle, la règle est que le détenu se suicide ».
De nombreuses organisations de défense des droits de l’homme comme Amnesty International ont d’ailleurs appelé les autorités sénégalaises à « cesser les arrestations arbitraires d’opposants et d’activistes, respecter la liberté de réunion pacifique et la liberté d’expression, et faire la lumière sur la présence d’hommes armés de gourdins aux côtés des forces de sécurité ». En plus des restrictions d’accès aux réseaux sociaux, confirmées par l’observatoire numérique NetBlocks, elles ont en effet procédé à couper le signal de plusieurs chaines de télévisions et radios privées. Et, pour mater les immenses foules regroupées à travers le pays, de nombreux miliciens en civil, munis de gourdins et d’armes à feu, ont été mobilisés pour terroriser les manifestants. De nombreuses vidéos diffusées sur les réseaux sociaux font état de véritables chasses à l’homme. Dans certaines régions, l’État sénégalais a même fait appel à l’armée. Le bilan macabre est déjà d’au moins sept morts et des centaines de blessés graves.
Ce 5 mars, après une troisième journée de mobilisation, à laquelle avait notamment appelé le collectif Y’en a marre plusieurs jours auparavant, la déclaration face à la presse du ministre de l’Intérieur Antoine Felix Diome n’a fait que confirmer la détermination du régime du Président Macky Sall à ne reculer devant rien. M. Diome est allé jusqu’à qualifier les manifestants de « terroristes », manipulés par des « forces occultes ». Idrissa Seck, ancien opposant à Macky Sall arrivé deuxième à l’élection présidentielle de 2019, et qui a rallié le gouvernement en fin 2020, a renchéri en dénonçant des supposés « intérêts encagoulés, nationaux comme internationaux ».
Impunité internationale
Depuis son indépendance, le Sénégal a toujours trouvé des alliés à l’international, à commencer par la France. La création de l’image d’un « modèle de démocratie », îlot de stabilité dans le tumulte sahélien, par son premier président Léopold Sédar Senghor, lui-même à la tête d’un régime au parti unique réprimant l’opposition, a toujours la peau dure. Le pays s’est ouvert au multipartisme dans les années 1980 et a organisé deux alternances de parti au pouvoir, en 2000 et en 2012, mais, jadis opposants, les nouveaux hommes forts, Abdoulaye Wade (2000-2012) et Macky Sall (depuis 2012), s’inscrivirent tous deux dans la continuité de leurs prédécesseurs.
En cause, un système hyper-présidentialiste hérité d’une part de la 5ème République française de 1958, et d’autre part de la Constitution sénégalaise de 1963 qui supprima le poste de Premier ministre après l’éviction du chef de gouvernement d’alors, Mamadou Dia, concentrant ainsi les pouvoirs dans les mains de l’exécutif. Une pratique confirmée par Macky Sall lui-même, dans une intervention en wolof à la télévision nationale le 31 décembre 2020 : « Si jamais le Président sait que l’arrestation d’[une] personne [impliquée dans une affaire de corruption] entrainera la mort de personnes, est-ce qu’il va tout de même l’arrêter ? Peut-être y a-t-il un autre chemin à emprunter [pour régler le problème] ».
A la vue des caméras du monde entier, la « vitrine démocratique » du Sénégal est aujourd’hui en éclats. Et il faut que cesse l’impunité internationale du régime de Macky Sall. En 2018, la cour de justice de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) avait condamné l’État du Sénégal pour la violation des droits de Khalifa Sall, ancien maire de Dakar et prétendant à l’élection présidentielle de 2019, dans son procès pour détournement de fonds. Face à la crise politique que traverse le pays actuellement, les Nations Unies ont quant à elles appelé « tous les acteurs à la retenue et au calme ». Mais de simples déclarations ne suffisent plus face à l’ampleur de la répression. Comme l’exhorte Seydi Gassama, directeur exécutif d’Amnesty International Sénégal : « L’usage excessif de la force, et un usage contraire aux normes internationales des armes létales et le recours aux milices privées seraient inacceptables. […] Toute personne mise en cause, civile ou militaire, fera face à la justice. Au Sénégal ou devant des juridictions internationales ».
Signataires (49) :
Maky Madiba Sylla, artiste ;
Dip Doundou Guiss, artiste ;
Fou Malade, artiste ;
Khadim Ndiaye, historien ;
Moussa Sene Absa, artiste cinéaste ;
Wasis Diop, musicien ;
Thiat Kër Gui, artiste ;
Demba Moussa Dembele, économiste ;
Kilifa Kër Gui, artiste ;
Xuman, artiste ;
Simon, artiste ;
El Hadj Samba Ndiaye, professeur assimilé agrégé des facultés de droit (UCAD) ;
Hamidou Dia, chercheur (IRD) ;
Babacar Faye, professeur d’anglais ;
Khady Tamba, maitre de conférences titulaire en linguistique anglaise (UCAD) ;
Khalil Diallo, écrivain sénégalais ;
Abdoul Aziz Diouf, professeur assimilé agrégé des facultés de droit (UCAD) ;
Bathie Samba Diagne, historien ;
Sun Sooley, artiste ;
Ndiouga Benga, maitre de conférence titulaire d’histoire moderne et contemporaine (UCAD) ;
Nitt Doff, artiste rappeur ;
Sidy Alpha Ndiaye, professeur assimilé agrégé des facultés de droit (UCAD) ;
Alpha Oumarou Ba, maitre de conférence titulaire de littérature orale (UASZ) ;
Dread Wone, artiste ;
Big D, artiste ;
Ass Malick, artiste ;
El Hadj Abdoulaye Sall, maitre de conférences assimilé en lettres modernes (UCAD) ;
Binou Ndoye, analyste financière ;
Malick Diagne, professeur assimilé de philosophie (UCAD) ;
Alune Wade, musicien ;
Pape Ibrahima Ndiaye, danseur ;
Alioune Gueye, inspecteur vérificateur, secrétaire national à la vie politique et administrative du parti R3D (Regards différents pour un développement durable) ;
Ombrezion, artiste ;
Tchiko, artiste ;
Mamadou Coulibaly, enseignant-vacataire en physique (UCAD) ;
Djibril Keïta, sociologue ;
Boc’s Amandla, artiste ;
Dread Maxim, artiste ;
El Hadji Malick Sy Camara, maitre de conférences titulaire de sociologie (UCAD) ;
Bamba Diop, cinéaste ;
Stefane Kabou, artiste ;
Max Barry, artiste ;
Alioune Ndiaye, ex-inspecteur d’académie, secrétaire général du parti R3D (Regards différents pour un développement durable) ;
Abel Proença, artiste ;
Amilcar Barsely, écrivain.
AUDIO
PREMIÈRES FISSURES AU SEIN DE L'APR
L'ex-député Coumba Ndiaye Kane, membre de l'APR dénonce Macky et sa gestion de l'affaire Sonko - Elle affirme avec fermeté et clarté son soutien au leader de Pastef qu'elle appelle son fils
Comme il fallait s'y attendre, les premières dénonciations du côté du camp présidentiel sont en train de tomber.
A l'occasion de la journée internationale de la Femme de ce 8 mars 2021, dans un réquisitoire au vitriol contre le président Macky Sall dans sa gestion de l'affaire du leader de Pastef, l'ex-député Coumba Nidaye Kane membre de l'APR de Ziguinchor affirme avec fermeté et clarté son soutien à Ousmane Sonko qu'elle appelle son fils.
Écoutez son message sans ambiguïté.
GARDE À VUE LEVÉE, SONKO TOUJOURS ARRÊTÉ
Le procureur de la République vient d’ordonner la levée de sa détention. Seuls, son garde du corps et son cameraman sont libérés et rentrent chez eux
Fin de la garde à vue pour Ousmane Sonko. Le procureur de la République vient d’ordonner la levée de sa détention. L’information est confirmée par son avocat, Me Bamba Cissé. Il précise toutefois que le député reste à la Section de recherches. Seuls, son garde du corps et son cameraman, arrêtés en même temps, sont libérés et rentrent chez eux.
Le leader de Pastef est arrêté depuis mercredi pour trouble à l’ordre public, participation à une manifestation non autorisée. Toutefois, les charges de viols et de menaces de mort pèsent toujours sur lui. Il devra répondre à la convocation du doyen des juges, demain lundi, 8 mars.
Ce dénouement survient après plusieurs médiations de religieux, de politiques et de la société civile suite aux nombreux appels à manifestations demain lundi. Des magasins, des banques ont été saccagés et pillés depuis son arrestation.
PAR ABDOULAYE WADE
MACKY NE DOIT PAS CHERCHER À DÉTRUIRE SONKO
Mon devoir de patriarche est de lancer un appel au calme et d’aider à ce que cette question soit résolue de manière démocratique dans le respect de la présomption d’innocence - Diouf a eu la possibilité de me détruire...
Dans l’affaire Sonko mon parti s’est déjà prononcé et pris la défense de Sonko en proclamant notre solidarité agissante et en s’opposant à la levée de son immunité parlementaire.
Sonko a été appelé par le Doyen des juges d’instructions dont il peut sortir du cabinet avec un non-lieu, un mandat de dépôt ou une mise en liberté provisoire, ou encore une mise en liberté surveillée.
Étant donné la tension qui règne dans le pays et la volonté des deux parties d’en découdre, mon devoir de patriarche est de lancer un appel au calme et d’aider à ce que cette question soit résolue de manière démocratique dans le respect de la présomption d’innocence.
C’est pourquoi je demande au Président Macky Sall de faire respecter la loi qui prescrit que tout citoyen est présumé innocent jusqu’à ce qu’il soit déclaré coupable par un tribunal équitable, à travers un procès public, contradictoire dans le respect absolu des droits du prévenu et ceux de la défense.
Je lui rappelle que plusieurs fois dans ma vie d’opposant mon adversaire le Président Abdou Diouf a eu la possibilité de me détruire parce que les jusqu’au boutistes qui l’entouraient ne connaissent que la force et le poussaient à me détruire pour m’empêcher à jamais de lui ravir le pouvoir dans des élections démocratiques.
S’il est vrai qu’Abdou Diouf m’a plusieurs fois arrêté et mis en prison, il n’a jamais voulu me détruire ; il a toujours refusé de suivre ses jusqu’au boutistes qui, avec l’ivresse du pouvoir, sont en général incapables de gagner honnêtement leur vie par le travail et ont choisi de profiter du pouvoir pour s’enrichir.
Je peux citer feu Mody Coumba Bâ qui a refusé d’exécuter la volonté du pouvoir de me condamner de sorte que, Président du tribunal, il m’a purement et simplement acquitté. A l’époque les marches devaient être autorisées et c’est moi qui, arrivé au pouvoir, ai fait adopter une loi déclarant que la marche pacifique participait du droit de la liberté d’expression et qu’elle n’avait pas besoin d’autorisation. J’ai supprimé l’autorisation de marche pour la remplacer par la liberté de marche qui avait tout juste besoin de la déclaration auprès du Préfet afin de permettre à l’exécutif de prendre les dispositions pour l’encadrer, non seulement prévenir les débordements mais aussi empêcher que des adversaires intolérants n’attaquent les marcheurs qui exerçaient un droit reconnu par la Constitution.
Monsieur le Président Macky Sall, vous avez aussi autour de vous des jusqu’au boutistes comme il en existe toujours autour de tous les Présidents. Vous avez le devoir de les écouter mais ne les suivez pas car eux, ils n’ont rien à perdre ; dès que ça va chauffer ils vous trahiront et se rendront à l’adversaire pour sauvegarder des intérêts.
N’écoutez pas des magistrats couchés comme Antoine Felix Diome dans l’affaire de Karim Wade. Certains magistrats tentent de deviner ce qui peut faire plaisir au Président et le font avec zèle mais ils manquent de sincérité. Abdou Diouf avait refusé de suivre ses conseillers qui voulaient me détruire. Moi-même j’ai refusé d’arrêter Abdou Diouf comme certains me l’ont conseillé. Dans le passé, des magistrats ont fait leur devoir en refusant de suivre l’exécutif pour arrêter des opposants. Je peux citer feu Mody Coumba Bâ, Président du tribunal a refusé d’exécuter la volonté de certains du pouvoir de me condamner. Il m’a purement et simplement acquitté.
J’espère être suivi par les deux parties qui, au-delà des prises de position passionnelles, auront à cœur, je l’espère, de privilégier le droit et d’éviter la confrontation avec son cortège de morts, de destructions de biens de l’Etat et de patrimoines de paisibles citoyens.
Vous aurez permis à notre pays de réussir une passe difficile et de montrer une fois de plus qu’il sait surmonter les épreuves les plus difficiles, notamment celles qui résultent de la passion de l’adversité politique.
Abdoulaye Wade est l'ancien Président de la République du Sénégal et le chef du Parti Démocratique Sénégalais, libéral.
PAR JEAN-LUC MÉLENCHON
LE SÉNÉGAL NOUS PARLE, SACHONS L'ENTENDRE
La contestation contre la dérive autoritaire du président Macky Sall est profonde. Il est connu pour avoir écarté plusieurs concurrents politiques, comme le Maire de Dakar Khalifa Sall, via des procédures s’apparentant à une guerre judiciaire en politique
Pour d’innombrables raisons qu’il serait trop long d’énumérer ici, les Sénégalais et les Français ont une relation singulière. Les députés des quatre grandes communes siégèrent aux États généraux de 1789. Les Sénégalais ont pris une lourde part cruciale aux souffrances subies dans les grandes guerres européennes, aux côtés des Français. La langue que nous avons en usage commun est désormais sans cesse davantage une œuvre sénégalaise et pas seulement à cause de l’académicien chef et fondateur de l’État, le poète Leopold Sédar Senghor.
Dans cette histoire, il y a une part peu glorieuse pour nous et une autre bien plus nette. Et beaucoup d’affects. C’est tout cela qu’il faut assumer tranquillement. C’est le meilleur qu’il s’agit de cultiver. Le Sénégal est dans l’épreuve. Nous devons nous y intéresser et voir comment nous rendre utile à son peuple, notre ami de longue main.
Depuis quelques jours, le pays, longtemps modèle démocratique africain, est en ébullition populaire. L’arrestation le 3 mars de l’opposant Ousmane Sonko, troisième de la présidentielle de 2019 et possible candidat à celle de 2024, a entraîné la plus grande vague de manifestations et émeutes depuis plusieurs années. Au moins un jeune manifestant a été tué dans des affrontements avec les forces de répression jeudi. Les autorités gouvernementales ont également suspendu pour soixante-douze heures deux télévisions privées, Sen TV et Walf TV, accusées de troubles à l’ordre public « de nature à constituer une menace sur la stabilité nationale ou la cohésion sociale ». On croirait lire un communiqué du préfet Lallement.
Évidemment, ces mesures répressives ont attisé la mobilisation. Elle n’est pas superficielle. Elle vient de loin. La contestation contre la dérive autoritaire du Président Macky Sall est profonde. Il est connu pour avoir écarté plusieurs concurrents politiques, comme le Maire de Dakar Khalifa Sall, via des procédures s’apparentant à du Lawfare, guerre judiciaire en politique. Les conditions de la procédure contre Ousmane Sonko, accusé d’un viol qu’il nie fermement, et finalement arrêté pour « trouble à l’ordre public », ont un goût évident d’instrumentalisation de la justice.
Le Sénégal est loin d’être un cas unique. L’hybridation entre libéralisme économique et autoritarisme politique est la caractéristique la plus partagée par les différents régimes sur la planète. Ici, une fois de plus, tout a commencé à mal aller avec le tournant néo-libéral il y a plusieurs décennies, comme presque partout ailleurs dans le monde. Mais l’imaginaire de la population révoltée, composée majoritairement de jeunes, ne remonte pas toujours aussi loin. L’année écoulée suffit. Comme dans la majeure partie du monde, la pandémie a polarisé au Sénégal les positions sociales antérieures. Elle a exacerbé les inégalités préexistantes. L’oligarchie profite de la crise quand le peuple en pâtit. D’autant plus que 80 % de la population sénégalaise vit ou survit de l’économie informelle, comme ailleurs, mise à l’écart des (maigres) « filets sociaux » mis en place pendant la crise sanitaire. L’Union européenne a joué son rôle néfaste et prédateur avec des accords de pêche ruineux pour la réserve halieutique et pour les petits pécheurs côtiers sénégalais. Et depuis octobre, 480 jeunes gens sont morts en mer dans leur tentative de rejoindre l’Europe. De tout cela, les Sénégalais sont bien informés et révoltés. Ils savent que le gouvernement français ne fait rien pour aider le Sénégal dans sa relation à l’Europe.
C’est donc la masse de la population sénégalaise, et tout particulièrement de la jeunesse, qui se sent concernée de proche en proche par ces événements déclenchés par l’arrestation d’un opposant politique. Le collectif citoyen Yenamarre est d’ailleurs au rendez-vous. Créé par des rappeurs et des journalistes lors de la vague de révolutions citoyennes déclenchées en 2011, il dénonçait dans un premier temps les coupures d’électricité attribuées à la calamiteuse gestion des néolibéraux. Comme ailleurs, l’impossibilité d’accéder à tout ou partie des réseaux et ressources essentiels à la vie est un facteur majeur de soulèvement populaire. La situation n’a fait qu’empirer depuis 2011. La contestation s’est donc élargie au-delà des « seuls » partisans d’Ousmane Sonko. C’était prévisible. Tout comme il est prévisible que l’arrestation le 5 mars du rappeur Thiat, un des fondateurs de Yenamarre, ne fera que tendre davantage la situation.
En écrivant ces lignes je n’attise aucune contestation. Seul souverain au Sénégal, le peuple sénégalais sait ce qu’il a à faire. Je décris des faits et une situation qui ne peuvent nous laisser indifférents. Le Sénégal, pays phare de la francophonie en Afrique, et la France sont liés par une histoire commune. De nombreux Sénégalais ou Franco-Sénégalais vivent en France. De nombreux Français vivent au Sénégal. Comme dans de nombreux autres pays d’Afrique, l’intérêt du peuple français et l’intérêt du peuple sénégalais convergent vers le respect des principes démocratiques et des droits humains fondamentaux. Je tiens à l’affirmer pour qu’une autre voix française soit entendue que celle du gouvernement français. Ce dernier a pour seule seule ligne politique en Afrique le soutien aux oligarchies locales, dont les intérêts sont le plus souvent liés avec ceux de l’oligarchie française. D’une pierre deux coups.
Cette politique, concrétisée ici par le silence d’un gouvernement français pourtant prompt à donner des leçons de démocratie dans telle ou telle partie du monde, n’aura fait qu’alimenter les rumeurs. Y compris les plus folles et infondées, comme celle d’un soutien possible à Macky Sall de l’armée française, qui dispose d’une base au Sénégal. Cette politique à courte vue ne fait qu’alimenter la colère. Elle se tourne alors contre une France perçue comme le soutien indéfectible de dirigeants locaux de plus en plus détestés, au Sénégal comme dans le reste de l’Afrique francophone. Si 14 magasins Auchan ont été pillés, ça n’est pas seulement parce qu’ils symbolisent la cherté de la vie. C’est aussi parce qu’il s’agit d’une enseigne française. Incapables de la moindre inflexion sérieuse quant à la politique de la France dans la région, les autorités françaises dénonceront peut-être, comme elles ont pris l’habitude de le faire, l’influence de plus telle ou telle puissance concurrente pour expliquer la haine antifrançaise. Ces manœuvres existent parfois. Et je les condamne. Mais soyons clairs : telle ou telle propagande anti-française diffusée sur internet n’aurait aucune influence si elle ne rencontrait pas une colère préexistante contre la politique du gouvernement français. C’est bien cette dernière qui est le cœur du problème.
Patriote et internationaliste, je ne peux me résoudre à une telle situation. Dès mercredi j’ai tweeté mon inquiétude lors de l’arrestation d’Ousmane Sonko. Les ricanements n’ont pas manqués côté macroniste. À présent la situation a bien dérapé et les ricaneurs ne savent plus quoi faire. J’ai l’habitude. J’ai déjà vécu cette situation en appuyant le mouvement populaire au Mali. Le gouvernement et le correspondant de RFI ont tenu jusqu’au bout une ligne aveuglée qui a enfoncé notre pays dans une impasse lors du coup d’État militaire. Si je m’exprime de nouveau ici, c’est en premier lieu pour affirmer l’urgence d’une vision radicalement nouvelle des relations entre la France et l’Afrique. Et pour lancer un appel aux Sénégalais. Ne confondez pas la France avec son oligarchie. Mes compatriotes sur place aiment le Sénégal non pour le piller mais comme on peut aimer un lieu et une population. Comme en France, les binationaux français et sénégalais aiment la France. Ne soyons pas les marionnettes des puissants qui s’arrangent très bien du fait que les peuples se détestent et se battent Je souhaite entre la France et l’Afrique une relation basée sur la coopération mutuellement profitable entre des peuples souverains. Une relation qui corresponde aux intérêts communs des peuples, non à ceux des oligarchies. Et cela commence aujourd’hui même par notre respect et appui comme Français au mouvement populaire sénégalais. Et je forme le vœu qu’il en aille de même au Sénégal entre Sénégalais et Français qui y vivent ensemble.
«IL FAUT VIVRE DES EMOTIONS POUR POUVOIR LES PARTAGER»
Riche d’une carrière international, Naby Ibrahima Condé veut être prophète chez lui. Au Sénégal depuis un an, il a concocté un album de 15 titres.
Riche d’une carrière international, Naby Ibrahima Condé veut être prophète chez lui. Au Sénégal depuis un an, il a concocté un album de 15 titres. En prélude à la sortie officielle de cet opus, il compte mettre dans les bacs un EP Extended Play de cinq titres. Entretien
Quelle est la dernière actualité de Naby?
Je suis très heureux de me retrouver au Sénégal. Je veux juste retranscrire et transmettre tout ce que j’ai vécu dans l’Art. Je comptabilise vingt ans de carrière musicale… Il y a un peu de vécu et de bagage derrière ce parcours. Je veux partager tout cela avec les jeunes artistes sénégalais. Je veux aussi faire plaisir à mon public qui demande tout le temps ce que je deviens et ce que je fais. Je suis toujours en quête d’inspiration pour pouvoir parler au public.
Depuis votre premier album, «Demna», publié en 2009 et le Prix découvertes RFI, vous avez disparu des radars
Après avoir remporté le Prix découvertes RFI, j’ai eu à gagner d’autres prix. C’est ainsi que j’ai reçu le « Prix Francophonie du Canada » et le « Prix Visa pour la Création ». J’ai aussi remporté un autre prix qui m’a permis de me produire en Asie, au Canada dans ses dix-huit régions, au Vietnam et au Cambodge. J’ai également fait un album avec Passi. Il s’agit de son dernier album, « Air Afrique ». Ce qui nous a permis de faire des concerts un peu partout et dans la sous-région. Après tout cela, je me suis mis en retrait pour pouvoir mieux travailler. Je voulais surtout avoir de l’inspiration et repartir sur de nouvelles bases et faire la paix avec moi-même. Le Prix découvertes RFI a un peu freiné mon inspiration. Parce que c’est venu trop vite et juste comme ça. C’est après la sortie de mon premier album solo que j’ai pu remporter tous ces prix-là. Il fallait que je me remette en place pour aller chercher de l’inspiration. Il me fallait aussi chercher un vécu, parce que tout ce que tu ne vis pas, tu ne peux pas en parler. C’est tout cela qui a fait que j’ai été en retrait pour un bon moment.
Certains disent que le succès a été très difficile à gérer et cela s’est particulièrement ressenti sur la suite de votre carrière…
Effectivement c’est vrai et je le concède. Je n’ai pas pu et su gérer tout ce qui m’est arrivé en 2009. C’était brusque. Ça m’a un peu fait peur. Ça a amené des problèmes dans mon groupe. On ne s’est pas compris sur beaucoup de choses. C’était trop intense. On avait trop de boulot.
N’avez-vous pas prêté le flanc ?
Non, pas du tout ! Je ne peux pas faire cela car je suis un talibé et un vrai Baye Fall
Des erreurs ?
Bien sûr ! Tout le monde fait des erreurs. Mais en ce qui me concerne, cela m’a servi énormément. C’est grâce à mes erreurs que je suis devenu ce que je suis aujourd’hui. J’ai commis des erreurs qui m’ont bien massacré et mis presque à terre. La vie quotidienne m’a bien éprouvé. La vie familiale aussi m’a vraiment causé du souci.
Issu du mouvement Hip Hop, vous avez par la suite continué dans le sillage du reggae…
J’ai librement opté pour le Reggae. C’est quelque chose qui est bien ancré en moi. J’aime bien le « One Drop » qui symbolise le battement du cœur. Le reggae est une musique qui aime user de paraboles et de devinettes. Il délivre des messages codés qu’il faut aller déchiffrer et c’est cela qui me plait dans ce genre musical popularisé par Bob Marley. C’est ce jeu de questions réponses qui force l’artiste à penser à celui qui écoute la musique. C’est pour cela que j’aime le reggae. C’est une musique vraie et de vérité.
Comment comptez-vous faire la promotion de cet album dans un contexte de crise sanitaire?
C’est une situation difficile qui a surpris tout le monde. Cette pandémie a perturbé énormément de choses dans le monde entier. Cependant elle nous a trouvé en pleine phase de création. On était donc assez éloigné de la scène. Nous étions plutôt confinés en studio pour travailler dur. Ce qui signifie que cette situation ne nous a pas trop affectés, car on était en phase de création et de labeur. N’empêche, c’est une situation dure pour nous tous. Quelque part, ça brise ton élan. En tant qu’artiste, tu es bloqué sur beaucoup de choses et tu ne peux plus maîtriser ton calendrier. Cela pose problème. Mais je trouve que c’est un mal pour un bien. Il faut s’adapter et surtout apprendre beaucoup de choses de cette situation. Je ne parle pas seulement du monde artistique, mais de tout le monde. Je pense que le Sénégal a besoin d’un artiste comme moi. Partout où je me rends, on me demande de revenir. Pour certains, je leur ai fait goûter quelque chose avant de les sevrer brusquement.
Qu’est-ce qui vous fait dire cela ? N’est-ce pas de la prétention ?
Pas du tout ! On ne peut pas du tout parler de quelque chose que l’on ignore. Le premier album « Demna », je l’ai fait en dix ans. Celui-ci aussi m’a pris dix ans de travail. Il faut vivre des émotions pour pouvoir les partager. La création ne se décrète pas. Cela prend énormément de temps. Si vraiment on veut proposer des œuvres intemporelles et de qualité, il ne faut pas que l’on se trompe. Je me rappelle les sages paroles de Djibril Diop Mambety qui disait qu’un tableau qui n’accroche pas pendant dix ans, n’est pas du tout un tableau. L’album « Demna » a fait plus de dix ans sur le marché et jusqu’à présent, on continue de l’écouter. C’est la même démarche que j’ai adoptée pour cet album. Je veux toujours produire des œuvres classiques que l’on peut écouter durant de nombreuses années.
Vous avez assuré des premières parties de grands artistes comme Tiken Jah Facoly et Angélique Kidjo. Qu’avez-vous appris à leurs côtés ?
C’était déjà grandiose d’assurer les premières parties de Tiken Jah Facoly et d’Angélique Kidjo. Nous avions tissé de très bons rapports. Ils sont devenus des amis et à chaque fois que l’occasion se présentait en Europe, on allait manger ensemble. Cela m’a donné de la « niac » et de trouver du tonus sur scène. Cela m’a permis d’être vrai. Tiken Jah est quelqu’un de très vrai. Angélique Kidjo est une très grande dame. Ces gens-là ne te disent que la vérité. Ils sont francs et très entiers. Ils te disent toujours comment tu dois être toi-même. Donc tu apprends énormément de choses avec eux. J’ai surtout appris la sagesse auprès d’Angélique. Cette dame est très sage. Après cela, il y a aussi beaucoup de choses à apprendre. Tu atteints un autre niveau. Tu vois une autre couleur. Il y a vraiment du professionnalisme à toutes les étapes.
Pouvez nous parler un peu de cet album ?
C’est un album dans lequel j’ai tout mis. J’ai vraiment utilisé toute ma force, tout mon cœur et toute mon âme pour le confectionner. J’ai sorti tout ce que j’avais appris sur le tas. C’est tout ce que j’ai vécu sur la route que j’ai voulu transmettre à mon public. Nous avons décidé de partager car c’est un travail d’équipe. Même si on reste dans le reggae, il y a beaucoup de couleurs dans ce disque. Pour l’EP qui va sortir en premier, nous allons publier cinq titres avant de mettre sur le marché l’album complet avec quinze morceaux…
Durant vos nombreux voyages qu’avez-vous appris au niveau des pays visités ?
C’était souvent trop rapide et le rythme était infernal. Cependant, j’ai appris beaucoup de choses au Congo Brazzaville. Au moment de notre passage, il y avait la guerre. Mais les jeunes avaient décidé de tout prendre en main. J’y ai rencontré un vieux qui m’a dit que l’Afrique est bancale. On devait reconstruire notre continent. J’ai vraiment appris cela auprès de ce vieux et c’était au Congo. Même notre clip avec Passi on l’a fait à Dolisie, la troisième ville du Congo, là où il y a eu la guerre. Je les ai trouvés en train de revivre et de reconstruire le pays. Au Vietnam aussi, j’ai trouvé que malgré la guerre, les gens refusaient de baisser les bras. Cela m’a beaucoup marqué.
Est-ce qu’être Baye Fall constitue un refuge pour toi ?
La religion n’est pas un refuge. C’est quelque chose qui m’appartient et je l’accepte. C’est un legs de mes parents que j’ai trouvé sur place. Comme je suis musulman, je me vois bien dans la peau d’un Baye Fall. Le concept du Baye Fall est trop profond. C’est « Degeul », »Joubeul », »Leral », »Souk ». C’est juste se prosterner et accepter la Toute-Puissance divine. Je crois que c’est ce qui me plait le plus dans cette vision. Il ne faut surtout pas oublier que j’ai un très grand nom : je m’appelle Naby. Le Prophète des musulmans.
Avez-vous été soutenu par les autorités culturelles de votre pays.
Non ! Non et non ! Je le dis haut et fort. Je n’ai jamais été soutenu par qui que ce soit dans ma carrière. Je n’ai même pas été reçu par une autorité du ministère de la Culture après avoir gagné le Prix découvertes RFI et tous les autres. Malgré mon parcours et tout ce que j’ai fait, je n’ai jamais été reçu ou félicité par un agent du ministère de la Culture ou une autorité étatique. Pourtant au Gabon, j’ai eu à rencontrer le ministre de la Culture. J’ai eu à rencontrer l’ancien Président Abdou Diouf bien après son départ du pouvoir. Nous étions dans le même hôtel. Il n y a que l’institut Français qui était à mes côtés.
N’est-ce pas frustrant ?
Bien sûr ! A la limite, c’est révoltant... Au Sénégal chacun ne pense qu’à sa propre personne et c’est vraiment dommage. Il y a trop de copinage et de favoritisme dans la musique et cela tue notre Art. C’est pour cela que ça ne marche pas.
Que pensez-vous de cette nouvelle tendance des jeunes rappeurs à travers des histoires de clash ?
(Rires) Je trouve qu’ils sont perdus ! Ces clashs n’apprennent rien à personne. Toi qui n’as aucun vécu, comment peux-tu te permettre de raconter ta connerie ? C’est du n’importe quoi. Il faut être généreux et avoir le souci de partager son savoir. Ce n’est pas parce que tu as un audimat et que tu es suivi sur les réseaux sociaux, que tu dois te permettre de toiser ton monde et de faire du n’importe quoi. Ce n’est pas cool du tout. On ne devrait même pas les montrer à la télévision. Ils n’apportent rien au public. Nous n’avons pas besoin de faire comme les Américains. Eux, ils ont tout ce qu’il faut. Nous, on n’a rien. Nous avons besoin d’être un peu plus civilisés. On manque de civisme. C’est pourquoi tout ce qu’on fait, c’est vraiment un peu bancal et cela ne nous apporte rien. Ils ont besoin d’apprendre encore. Comme moi aussi j’ai besoin d’apprendre encore, car je ne sors pas du lot. Je n’ai pas atteint les sommets, mais eux ils n’ont pas encore atteint ce niveau et ils font leur malin…
Êtes-vous alors disposé à travailler avec eux ?
Je suis très ouvert. Je suis disposé à travailler avec eux, mais ça ne sera pas pour faire ce qu’ils font. Mais il y a aussi un autre mal pernicieux dans ce pays. Il suffit qu’un artiste plaque quelques accords, apparaisse à la télé pour qu’on en fasse une star. C’est vraiment des choses à éviter. On a tendance à encenser trop et très vite nos artistes. Cela leur rend un très mauvais service. Pour que les choses puissent marcher, il faut que chacun reste à sa place. Il faut éviter de toujours se focaliser sur l’argent car cela ne fait pas avancer les choses. Il faut que les stars du moment se remettent en question et partagent leur savoir. Si on continue de ne rien faire pour la jeune génération, notre musique ne pourra jamais aller de l’avant.
NDEYE ASTOU THIAM, PREMIERE FEMME CHAUFFEUR DE BUS TATA
Autrefois réservé aux hommes, le transport en commun n’est plus la chasse gardée de la gent masculine. Il tend à se féminiser puisque des femmes battantes ont fini d’investir le secteur.
Arfang Saloum SANE, (correspondant à Rufisque) |
Publication 16/02/2021
Si les femmes ont investi des secteurs autrefois typiquement masculins comme l’Armée ou la Police, elles restent encore fortement minoritaires dans certaines professions, notamment celui des transporteurs. Zoom sur une pionnière dans un secteur jusque-là exclusivement masculin. Ndèye Astou Thiam, femme de la banlieue dakaroise, fait tomber de nouvelles barrières.
Autrefois réservé aux hommes, le transport en commun n’est plus la chasse gardée de la gent masculine. Il tend à se féminiser puisque des femmes battantes ont fini d’investir le secteur. C’est le cas de Ndèye Astou Thiam vue comme la première femme à manœuvrer le volant d’un bus Tata. Pionnière dans le domaine des transports en commun, la seule femme de l’Aftu (Association pour le financement du transport urbain) arbore fièrement ce statut qui lui confère beaucoup plus de responsabilités. « C’est bien mieux que d’être serveuse à talon haut dans un restaurant ou un bar », estime d’emblée la jeune femme face à notre interpellation sur sa singulière situation.
Native de Yeumbeul (banlieue dakaroise), cette femme de taille moyenne arpente tous les matins les routes sablonneuses du quartier Cheikh pour rejoindre son poste de travail. Le regard émerveillé des autres, elle dit en avoir pris l’habitude. Pour cause, le regard « stigmatisant » de son entourage, comme de la société, l’a beaucoup aidée, insiste-t-elle, à en arriver là où elle est aujourd’hui. Elle a bravé tous les préjugés et les railleries pour se retrouver au volant de ces cars de transport en commun qui sillonnent dans tous les sens la capitale. Puis, elle a su gagner en galon et en respect dans son milieu de travail.
Mon ambition, ce n’est pas rivaliser avec les hommes
Férue de mécanique et de transport depuis sa tendre enfance, la trentenaire, mariée et mère d’un garçonnet, n’est pas entrée dans le métier par une porte dérobée. Sa situation matrimoniale ne l’empêche pas outre mesure de progresser. Permis catégorie poids lourd en poche, cette banlieusarde au physique juvénile n’a jamais voulu que les choses lui soient servies sur un plateau. Débrouillarde depuis toute petite, cette femme de son temps rit sous cape quand elle est étiquetée garçon manqué. « J’adore tout ce qui a trait à la mécanique et au transport. Toute petite, je courais derrière les voitures conduites par les dames. A défaut de pouvoir les rattraper, je suivais ces voitures du regard »,se souvient fièrement l’ancienne pensionnaire du Gie Thiaroye-Yeumbeul qui ne compte pas pour autant rivaliser avec les hommes. Des souvenirs, elle en a gardés dans un coin de sa tête. « La première fois que j’étais au volant d’un bus Tata, les clients étaient abasourdis. Certains étaient conquis à l’idée de savoir qu’il y avait une dame aux commandes. D’autres sont rassurés une fois qu’ils s’aperçoivent que la conduite respecte les normes édictées par le code de la route », confie-t-elle, ajustant d’un geste féminin, par moments, sa coiffure. « Je n’hésite pas à me retrousser les manches, de sortir les béquilles et de tourner la manivelle à cric en cas de crevaison d’un pneu », confie-t-elle, avouant au passage ne pas hésiter à poser des questions pour améliorer ses notions en mécanique.
Son assiduité au travail lui a valu de recevoir le 11 décembre 2020 le prix du meilleur chauffeur de l’Association de financement des transports urbains (Aftu). Ce jour-là, elle est montée sur les marches de la salle des fêtes de Rufisque pour recevoir sa distinction. Une première dans sa jeune carrière. Depuis lors, elle voit l’avenir en grand après le trophée qu’elle a reçu des mains de son président Fallou Samb, responsable en chef de la gare routière de Rufisque. « Cette distinction de mon syndicat constitue un réel motif d’encouragement pour moi », estime Ndèye Astou Thiam. Le 11 décembre, elle a retenu toutes les attentions lors de la cérémonie de remise de diplôme aux chauffeurs les plus assidus au volant. L’assistance n’avait d’yeux que pour elle. La consécration de la seule femme chauffeur de « Tata » avait même bousculé le protocole de l’interview des journalistes avec son patron Fallou Samb. « Arrêtez l’entretien. Il y a Ndèye Astou Thiam qui doit recevoir son attestation ! », s’était même écrié au micro le sieur Kébé l’homme à tout faire du syndicat. Une injonction qui a eu le mérite d’embarquer presque tout ce monde qui constituait peu avant le décor derrière « le chef Fallou Samb » pour le besoin des images de la télévision.
Quand l’AFTU donne l’exemple par le genre
La stigmatisation ayant cessé, la conduite des bus communément appelés Tata n’est plus une affaire réservée exclusivement aux hommes qui constituent l’écrasante majorité des chauffeurs. Cet état de fait Astou et ses camarades du syndicat n’en veulent plus. En réalité, malgré la loi sur la parité qui prescrit l’égalité professionnelle, et les discours politiques lénifiants sur l’égalité homme femme, la typologie des métiers reste encore trop souvent déterminée par le genre. Une chose que le président du syndicat professionnel des transports routiers SPTR compte déconstruire. Car, pour le président Fallou Samb, c’est notre méthode de faire dans le genre. « Nous avons décoré une des nôtres. Un chauffeur de l’Aftu. C’est normal de l’encourager et de montrer une direction pour les autres femmes. Nous aussi à notre niveau nous encourageons le genre », indique Fallou Samb trouvé dans son bureau.
Une surprise encourageante, selon le sociologue Aly Khoudia Diaw
Selon le sociologue Aly Khoudia Diaw, la conduite des véhicules de transport par les femmes est une surprise encourageante. « Ce n’est pas trop courant de voir une femme conduire et cela donne un effet de surprise. Une femme conduisant un car de transport en commun laissant son mari et ses enfants. Cela donne une image drôle parce qu’on n’imagine pas une femme au volant d’un car de transport en commun », confie notre interlocuteur qui met cet état de fait dans le cadre des progrès et de la mutation de notre société. « Aujourd’hui il est de moins en moins drôle de voir des femmes exercer des métiers qui étaient dédiés aux homme. On a vu une femme directrice de la Police nationale, elles sont dans l’Armée, elles occupent des stations ministérielles et des postes de responsabilité », a ajouté le sociologue Aly Khoudia Diaw à l’autre bout du fil. Les secteurs les plus en retard en termes de féminisation se trouvent être ceux de l’automobile et du bâtiment qui requièrent des qualités présupposées à chaque genre. Aujourd’hui, les femmes se retrouvent de plus en plus au volant des bus de transport, secteur qui était jadis l’apanage des hommes. A titre d’exemple, il y a Massata Cissé dite Mama Africa du Mali, conductrice de camion poids lourd, et la fille du conducteur Pathé Dioum qui exerce ce métier. Des dames qui ont beaucoup inspiré Ndèye Astou Thiam de la banlieue de Dakar.