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17 avril 2025
Politique
LEVÉE DE L’IMMUNITÉ DE FARBA NGOM, LA COMMISSION AD-HOC INSTALLÉE
Il s’agira de constituer les membres de la commission qui doit entendre le député. À la suite de cela, le vendredi 17 janvier, une plénière se tiendra en vue de ratifier cette commission.
À l’issue de la réunion du bureau de l’Assemblée nationale et de la conférence des Présidents, il a été retenu la mise en place d’une Commission ad-hoc ce jeudi 17 janvier 2025. Il s’agira de constituer les membres de la commission qui doit entendre le député. À la suite de cela, le vendredi 17 janvier, une plénière se tiendra en vue de ratifier cette commission.
Levée de l’immunité parlementaire : Comment ça marche ?
Saisi par le Parquet du Pool judiciaire financier, le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, a, à son tour, adressé une lettre au président de l’Assemblée nationale demandant la levée de l’immunité parlementaire du député Farba Ngom, suite à un rapport de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif).
Retour sur la levée de l’immunité parlementaire, qui est une procédure strictement encadrée par la loi.
Le Bureau et la Conférence des présidents de l’Assemblée se sont réunis, ce mardi, pour aborder la question relative à la levée de l’immunité parlementaire du député Farba Ngom.
Il convient alors de préciser que le Règlement intérieur encadre la procédure de levée de l’immunité parlementaire d’un député dans ses articles 51 et 52. Le premier stipule qu’« aucun député ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions ». En d’autres termes, c’est le principe de l’irresponsabilité : l’immunité absolue soustrait le député de toute poursuite pour les actes commis dans l’exercice de son mandat. Cette disposition est énoncée par la Constitution dans son article 61, par la loi organique portant Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, dans l’alinéa premier de l’article 51 précité, qui la complète et apporte des détails supplémentaires sur les principes de subsidiarité.
En outre, un député bénéficie de l’immunité dès le début de son mandat, qui prend effet dès la proclamation des résultats de l’élection législative par le Conseil constitutionnel. En conséquence, « aucun député ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu’avec l’autorisation de l’Assemblée ».
Cependant, un député « pris en flagrant délit ou en fuite après la commission des faits délictueux » peut être arrêté, poursuivi et emprisonné sans l’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale. « Aucun député ne peut, hors session, être arrêté qu’avec l’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale, sauf en cas de flagrant délit tel que prévu par l’alinéa précédent ou de condamnation pénale définitive ».
Toutefois, « la poursuite d’un député ou sa détention du fait de cette poursuite est suspendue si l’Assemblée le requiert ».
C’est ce principe d’inviolabilité qui vise à éviter que l’exercice du mandat parlementaire soit entravé par des actions pénales visant des actes commis par le député lui-même en tant que simple citoyen. Ainsi, « le député qui fait l’objet d’une condamnation pénale définitive est radié de la liste des députés de l’Assemblée nationale sur demande du ministre de la Justice ».
Concernant la demande de levée de l’immunité parlementaire ou de suspension des poursuites déjà engagées à l’encontre d’un député, l’article 52 prévoit la constitution, pour chaque demande, d’une Commission ad hoc composée de onze membres, nommés selon la procédure définie à l’article 34.
La Commission ad hoc « doit entendre le député intéressé, lequel peut choisir un de ses collègues comme défenseur ». Lors des débats en séance plénière à l’Assemblée nationale, seuls le président, le rapporteur de la Commission, le gouvernement, le député ou son défenseur et un orateur contre peuvent prendre la parole.
Si la majorité des députés adopte la levée de l’immunité, le parlementaire concerné est de facto « livré » à la justice.
LE SÉNÉGAL PRÊT À RAFFINER SON PÉTROLE
Dans quelques semaines, les premières gouttes de brut de Sangomar seront traitées dans les installations de la SAR à Mbao. Un moment historique qui marque la fin de la dépendance du pays aux raffineries européennes
(SenePlus) - Une page importante de l'histoire pétrolière du Sénégal est sur le point de s'écrire. Selon les informations de Jeune Afrique, le pays s'apprête à franchir une étape décisive en raffinant localement son propre pétrole dès le premier trimestre 2025, une avancée majeure pour son indépendance énergétique.
La Société africaine de raffinage (SAR), dirigée par Mamadou Abib Diop, est en train de finaliser les derniers ajustements techniques dans ses installations de Mbao, en banlieue de Dakar. D'après JA, les équipes techniques procèdent actuellement aux ultimes réglages après avoir minutieusement analysé les échantillons du gisement de Sangomar pour déterminer avec précision la teneur en soufre du brut.
Ce virage stratégique marque une évolution significative pour la SAR qui, jusqu'à présent, ne raffinait que du pétrole brut nigérian. Comme le révèle un cadre de l'entreprise cité par Jeune Afrique, la décision initiale de ne pas raffiner le brut de Sangomar était "un choix technique et stratégique", justifié par la nécessité d'attendre une stabilisation de la qualité du brut. Cette prudence explique pourquoi les premières cargaisons extraites par l'australien Woodside ont été dirigées vers des raffineries allemandes et néerlandaises.
Dans le cadre de l'accord de partage de production conclu entre la Société pétrolière du Sénégal (Petrosen) et Woodside, Dakar dispose de 20% d'une production totale estimée à 100 000 barils par jour. Cependant, rapporte le magazine, un défi majeur se profile : la capacité de la SAR à traiter l'ensemble de cette production nationale.
Bien qu'un programme de modernisation lancé en 2020 vise à augmenter la capacité de raffinage de 1,2 à 1,5 million de tonnes annuelles, les installations actuelles ne peuvent absorber la totalité de la production locale. Celle-ci a dépassé les prévisions initiales, atteignant 16,9 millions de barils entre juin et décembre 2024, contre 11,7 millions anticipés, selon les chiffres rapportés par Jeune Afrique.
Face à ce défi, le journal révèle que Dakar envisage la construction d'une seconde raffinerie d'ici 2028. Ce projet baptisé "SAR 2.0" permettrait d'atteindre une capacité globale de 5,5 millions de tonnes par an, suffisante pour traiter les 5,3 millions de tonnes que Woodside peut extraire annuellement du gisement offshore de Sangomar.
Cette évolution marque une étape cruciale dans la stratégie énergétique du Sénégal, qui passe ainsi du statut de simple producteur à celui de pays capable de transformer sa propre ressource pétrolière.
LES PERSONNALITÉS ET ENTREPRISES CITÉES PAR LA CENTIF
Dans son édition de ce mardi 14 janvier, Libération souligne qu’au moins onze (11) entreprises et personnes physiques sont citées par la CENTIF dont Tahirou Sarr, déjà impliqué dans l’affaire des 94 milliards.
Après le communiqué du Parquet financier publié dimanche soir, le journal Libération est revenu ce mardi sur le rapport transmis par la CENTIF au Pool judiciaire financier. Selon nos confrères, les “mécanismes sophistiqués de blanchiment de capitaux” mis à nu ont été actionnés entre 2021 et 2023. Et pour les déceler, la Cellule nationale de traitement des informations financières s’est appuyée sur au moins huit (8) Déclarations d’opérations suspectes (DOS) transmises par les banques et impliquant des entreprises et des personnes physiques.
Le journal affirme que globalement, le rapport cible des fonds reçus par Tahirou Sarr du Trésor, suivis de virements effectués par la suite à des sociétés ou personnes physiques comme Farba Ngom. Ces montants seraient des rétrocommissions versées au député en contrepartie de son implication pour faciliter des marchés et paiements à Tahirou Sarr.
Dans son édition de ce mardi 14 janvier, Libération souligne qu’au moins onze (11) entreprises et personnes physiques sont citées par la CENTIF dont Tahirou Sarr, déjà impliqué dans l’affaire des 94 milliards et de l’achat de la Résidence du président de l’Assemblée nationale, Farba NGOM, son frère Ismaïla Ngom, Serigne Khadim Niang, SOFICO, SCI Haba, SCP Doworo, Kantong investment SASU, SCP Tidiania, SCI Diamalaye, Groupe immobilier suisse (GIS).
LE JUGE DÈME REDOUTE UNE POLITISATION DU POOL JUDICIAIRE FINANCIER
“L’obligation de redevabilité et l’impératif de recouvrer nos deniers publics spoliés ne doivent cependant pas entraîner la justice à faillir à ses obligations d’une justice indépendante et impartiale, seule pouvant garantir un procès équitable”, dit-il.
Dans un texte qu’il a publié ce mardi sur sa page Facebook, l’ancien juge, Ibrahima Dème s’est attaqué au Parquet financier qui a sorti un communiqué dimanche soir pour annoncer l’ouverture d’une information judiciaire contre plusieurs personnes, après des plaintes de la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF).
Selon le magistrat, qui a démissionné en mars 2018, le Pool Judiciaire Financier est en train de se laisser politiser comme la CREI en 2012. “L’histoire est entrain de bégayer. Il y a une dizaine d’années, après la deuxième alternance de 2012, une juridiction très utile contre la corruption et l’enrichissement illicite a été pervertie par son instrumentalisation par l’exécutif. Actuellement, le pool judiciaire financier, qui a corrigé certaines imperfections de la CREI, semble suivre le chemin d’une justice dévoyée par sa politisation”, a-t-il affirmé.
Avant d’ajouter: “L’obligation de redevabilité et l’impératif de recouvrer nos deniers publics spoliés ne doivent cependant pas entraîner la justice à faillir à ses obligations d’une justice indépendante et impartiale, seule pouvant garantir un procès équitable”
A noter que le nom du député Farba Ngom, proche de l’ancien Président Macky Sall, a été cité dans cette affaire de blanchiment de capitaux de plus de 125 milliards CFA, qui a atterri sur la table du PJF. La procédure de levée de son immunité parlementaire va d’ailleurs être enclenchée ce mardi à l’Assemblée nationale.
LE PRESIDENT SOUDANAIS REÇU EN AUDIENCE CHEZ DIOMAYE FAYE
Le président Bassirou Diomaye Faye a échangé lundi à Dakar avec le chef du Conseil souverain de transition du Soudan, le général Abdel Fatah al-Burhan sur les développements liés à la situation politique et sécuritaire dans ce pays du nord-est de l’Afriqu
Le président Bassirou Diomaye Faye a échangé lundi à Dakar avec le chef du Conseil souverain de transition du Soudan, le général Abdel Fatah al-Burhan sur les développements liés à la situation politique et sécuritaire dans ce pays du nord-est de l’Afrique, a annoncé la présidence sénégalaise.
Le président Faye en a profité pour réaffirmer le soutien du Sénégal au peuple soudanais tout en appelant au dialogue pour un retour à la paix au Soudan en proie à un conflit armée mettant aux prises l’armée régulière à un de ses groupes supplétifs des forces paramilitaires de soutien rapide (RSF), dirigé par le général Mohamed Hamdan Dagalo dit Hemedti.
La lutte des deux hommes pour le contrôle du pouvoir a débouché sur le déclenchement à travers tout le pays d’une guerre civile meurtrière. Elle a provoqué des milliers de morts et le déplacement de centaines de milliers de Soudanais à travers le pays et à l’étranger.
L’ASSEMBLEE LARGUE SES AMARRES
Les choses semblent de plus en plus claires maintenant : Farba Ngom sera sans nul doute le premier ponte de l’ancien régime à passer à la guillotine dans le cadre de la reddition des comptes initiée par les nouvelles autorités étatiques.
Les choses semblent de plus en plus claires maintenant : Farba Ngom sera sans nul doute le premier ponte de l’ancien régime à passer à la guillotine dans le cadre de la reddition des comptes initiée par les nouvelles autorités étatiques. pour preuve, à l’Assemblée nationale, la conférence des présidents est convoquée aujourd’hui dans l’après-midi pour entamer le processus devant aboutir à la levée de l’immunité parlementaire du maire des Agnam.
A peine le communiqué du parquet financier a-t-il été rendu public que la majorité de Pastef met en branle sa machine. Les membres de la conférence des présidents de l’Assemblée nationale sont convoqués cet aprèsmidi avec comme motif : calendrier de travail pour examen d’une affaire en instance. Mais tout porte à croire que cette convocation est liée à la levée de l’immunité parlementaire de Farba Ngom réclamée par le Pool judiciaire financier dont le procureur El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla a, dans une note, expliqué qu’il envisageait d’ouvrir une information judiciaire dans le cadre d’une vaste enquête portant sur des activités suspectes de blanchiment de capitaux, estimées pour le moment à plus de 125 milliards de FCFA, où le chambellan de l’ex Président Macky Sall est cité. Une célérité suspecte pour bien des observateurs. Il faut dès lors signaler que dans le processus de la levée de l’immunité parlementaire, la conférence des présidents de l’Assemblée va d’abord être informé de la saisine du garde des Sceaux avant de se pencher sur l’agenda devant aboutir à la levée de l’immunité parlementaire du député maire des Agnam que le candidat de Pastef avait menacé en pleine campagne. Après examen, les membres du bureau vont confier le dossier à la commission des lois qui va mettre en place une commission ad hoc. Celle-ci va à son tour statuer sur la question et proposer en rapport qui sera ratifier en plénière.
Une fois cette étape franchie, la commission mise en place va convoquer le député. Celui-ci peut décider d’aller se défendre ou rester chez lui. Mais quoi qu’il en soit, la commission va produire un rapport qu’elle va présenter à la plénière. Et c’est à ce moment seulement que les députés pourront décider du sort de Farba Ngom
A noter qu’au regard des rapports que le mis en cause entretient avec le Président Macky Sall et la majorité écrasante de Pastef, la procédure de la levée de son immunité parlementaire devrait passer comme lettre à la poste, étant donné que le PASTEF est majoritaire dans l’hémicycle. Autrement dit, son destin est entre les mains de ses meilleurs ennemis, qui doivent décider s’il doit aller répondre à la justice ou s’il doit vaquer tranquillement à ses occupations sans être inquiété.
Il faudra plus que des prières pour tirer Farba Ngom d’affaire, car rien ne semble être en mesure de faire avorter la prédiction du tout puissant Premier ministre Ousmane Sonko. En campagne électorale lors des dernières élections législatives, ce dernier avait déclaré à l’endroit de Farba Ngom : « Je sais qu’il y a un individu qui circule dans le département, armé de mallettes d’argent, pour acheter des voix. Je vous le garantis, ce sera la dernière élection au Sénégal à laquelle il participera. Ce qu’Agnam est devenu aujourd’hui, reflète bien l’homme qui le représente actuellement. Il n’a ni le niveau, ni les compétences, ni la formation nécessaire. Il a accédé à une place centrale dans la République uniquement par la volonté d’un Président qui l’a associé à toutes sortes de réseaux, fonciers, financiers ».
Birahime Seck s’interroge
L’affaire Farba Ngom a fait réagir le coordonnateur du Forum civil, Birahime Seck qui écrit dans son compte X : « Il faut faire attention dans les approches afin de préserver le Pôle judiciaire financier. La démarche du parquet doit être rigoureuse. Une information judiciaire est-elle ouverte sur les 1 000 milliards ? Pourquoi le Parquet n'a pas communiqué sur les autres affaires qu'il traite ? ». Comme Birahim Seck, beaucoup d’acteurs s’étonnent de la précipitation du parquet. Qui parlait de la revanche des vainqueurs ?
Par Mohamed GUEYE
LES FAUSSES BONNES IDÉES DE SERIGNE GUEYE DIOP
Ses projets d'usines de sucre en Casamance et sa volonté de restreindre les importations de friperie rappellent étrangement des initiatives passées qui n'ont jamais abouti, alors que le déficit commercial du pays ne cesse de se creuser
Le ministre du Commerce et de l’industrie, M. Serigne Guèye Diop, fait montre de beaucoup d’activisme dans les médias et sur les réseaux sociaux. Cet homme, qui gère des secteurs parmi les plus stratégiques du gouvernement, veut montrer qu’il est en mesure de régler les problèmes les plus cruciaux du pays. L’un de ses plus gros soucis semble être de redresser la balance commerciale irrésistiblement déficitaire du Sénégal. Plus le temps passe, plus elle se creuse en notre défaveur. Les données officielles montraient que le déficit commercial, en octobre 2024, était de 342,4 milliards, alors que le mois précédent, le même déficit était à 121,6 milliards de Cfa.
L’écart entre nos exportations et nos importations est causé principalement par l’achat à l’extérieur de ce que nous consommons. Très peu nombreux sont les produits du cru qui nourrissent les Sénégalais. Même dans les secteurs où le Sénégal pourrait se passer des importations, nous sommes obligés de recourir à l’extérieur. Comme beaucoup de ses prédécesseurs, Serigne Guèye Diop a sans doute la volonté de renverser la tendance. Faute de s’en donner les moyens, il ne fait pas mystère de ses priorités. Il veut sans doute reproduire au niveau national, l’expérience positive qu’il a eue en tant que président du Conseil départemental de Sandiara, où il a pu implanter une Zone franche qui a réussi à attirer divers investisseurs et entreprises industrielles.
Ainsi, on l’a entendu sur la chaîne nationale de télévision, la Rts1, déclarer que bientôt deux unités de production de sucre devraient voir le jour en Casamance naturelle, à travers la région de Kolda et celle de Ziguinchor. Le ministre a même affirmé que les études du projet auraient déjà été bouclées et les documents soumis au Premier ministre pour approbation. Sans présumer de ce qui pourrait en sortir, on ne peut que noter que ce n’est pas la première fois qu’il est question d’implanter une usine de production de sucre en Casamance. Déjà, en 2012, à l’arrivée du président Macky Sall, son ministre de l’Agriculture de l’époque, Benoît Sambou, «drivé» par un Grand architecte spécialiste en éléphants blancs dans plusieurs pays d’Afrique, avait annoncé avoir mobilisé 50 milliards de Cfa pour la création d’une usine de sucre, d’une capacité de production, à l’époque, d’au moins 100 000 tonnes. Ces chiffres, s’ils avaient été basés sur une quelconque réalité, auraient permis, dès l’époque, d’en finir avec le déficit du Sénégal en matière de sucre. Le plus drôle, si l’on peut dire, est que Benoît Sambou, en migrant de l’Agriculture à la Jeunesse, a emporté avec lui le dossier de la compagnie sucrière, et on n’a plus entendu parler de l’affaire. Par contre, on a mis en avant un autre projet agricole, qui a donné naissance au Prodac…
La friperie, remplacée par la poussière du textile national
Plein de ressources, et surtout pas à court d’idées, le ministre du Commerce a annoncé un jour, plus vite que son cerveau, sa volonté d’en finir avec les importations de habits de seconde main, la friperie. On ne sait pas ce qui peut le motiver. Le Sénégal n’a plus d’industrie textile digne de ce nom, et les différentes politiques gouvernementales à travers des décennies, ont porté un coup mortel à la filière textile sénégalaise, qui était l’une des plus dynamiques d’Afrique. Peut-être que Serigne Guèye Diop pense-t-il que le blocage des vêtements de seconde main pourrait permettre de relancer l’industrie textile dans le pays, permettre de recréer des emplois et aider à peser sur la balance commerciale. L’ennui est que, très peu de jours après sa sortie fracassante, il a été obligé de rétropédaler et revenir, non pas sur ses déclarations, mais sur la manière dont elles auraient été rapportées. Ce qui explique tout simplement que, si la volonté y est, les moyens et les dispositions à mettre en place ne sont pas encore là.
Il faut tenir compte du fait qu’en 2021, ce sont plus de 17 000 tonnes de «feug jaay» (fripes), qui sont entrées de ce pays. Malheureusement, Le Quotidien n’a pu obtenir de chiffres concernant les droits d’entrée de ces produits au pays. Néanmoins, les informations concordent pour reconnaître que si les petits revendeurs de marchés ou de certains coins de quartiers s’en sortent juste avec de quoi entretenir leurs familles, les gros négociants n’ont pas matière à se plaindre de ces produits. Un moment concurrencée par les habits bon marchés en provenance de Chine, la friperie occidentale a maintenant le vent en poupe. Et les importateurs d’Amérique et d’Europe ne sont pas les derniers à se frotter les mains, car le marché comprend une très grande partie de pays africains. On se rappelle que lors du premier mandat du président américain Donald Trump, son «administration» (gouvernement) était entré en conflit avec des pays comme le Rwanda et l’Ouganda, qu’il a menacés de sanctions commerciales, et même de la cessation de certaines aides américaines. Le tort de ces pays ? Avoir annoncé leur intention d’interdire l’entrée de habits de seconde main sur leurs territoires, parce qu’ils contribuaient à tuer la production locale. L’argumentaire américain avait été de dire que les pauvres de ces pays pauvres n’avaient pas d’autre moyen pour se vêtir décemment, que de recourir au «feug jaay». On n’a plus entendu Museveni ou Kagame tenter de revenir sur cette affaire. On peut imaginer que parmi les préalables à la mise en œuvre éventuelle de cette décision, Serigne Guèye Diop et son gouvernement essaieront, s’ils en ont le moyen et la volonté, de relancer la filière cotonnière du pays.
Cela demandera de ne plus laisser aux seules mains de la Sodefitex, qui a été nationalisée, ne l’oublions pas, l’appui aux paysans de la zone sud-est du pays, où se cultive le coton. Revalorisée et mieux rémunérée, elle pourrait éventuellement intéresser les derniers producteurs textiles du pays, notamment Serigne Mboup qui veut relancer son usine de Kahone avec Domitexka, ou Ibrahima Macodou Fall, qui avait promis de relancer les Nsts de Thiès. Avec la disparition de la Sotiba Simpafric et d’autres producteurs textiles, on ne pourrait compter mettre en place, du jour au lendemain, une usine textile. Mais cet embryon d’industrie pourrait peut-être aider à la renaissance de la jadis dynamique industrie de confection du Sénégal dont seuls les vestiges qui restent sont les couturiers, qui sont vantés à travers l’Afrique pour leur talent et leur imagination
La Casamance, c’est bien. Mais pourquoi pas la Css ?
Il en est de même des usines de sucre de la Casamance dont nous avons parlé plus haut. Depuis sa création, dans les années 1970, la Compagnie sucrière sénégalaise s’évertue à combler les besoins en sucre des Sénégalais. Ses dirigeants, Jean-Claude Mimran, son PDG, en premier lieu, ont toujours déclaré aux Sénégalais, qu’ils n’avaient pas peur de la concurrence. Dans leur entendement, il y a assez de place pour deux ou trois autres usines de production. La Côte d’Ivoire ne possède-t-elle pas cinq usines de production de sucre ? Le Sénégal pourrait faire de même. Par contre, il ne faudrait pas que l’Etat se mette à encourager la contrebande en accordant des autorisations d’importer à des négociants dont l’apport sur la balance des paiements est proche de zéro. Souvent, ces négociants importateurs de sucre n’ont pas les mêmes charges que la Css qui, elle, produit et transforme tout son sucre sur place.
L’usine de Mimran est la première industrie du pays et l’un des plus gros employeurs de la région Nord du pays. Dans la conurbation Richard TollDagana, elle emploie 8000 personnes et en fait vivre environ le double, à travers les métiers annexes et les boutiquiers et autres fournisseurs. Si elle monte en puissance dans sa production, elle est en butte, depuis plus de 10 ans, à une indisponibilité de terres dont elle dit qu’elle l’empêche d’augmenter ses récoltes. L’idée de transposer des usines dans les régions du Sud du pays sera bénéfique si lesdites unités parviennent à casser le monopole de la production de la Css. Cette dernière ne l’a d’ailleurs jamais revendiqué. Il faudrait d’ailleurs féliciter Serigne Guèye Diop d’avoir pu trouver, en cette période, des investisseurs désireux de mettre 50 milliards de Cfa par deux fois, dans cette entreprise. C’est une initiative qui créera de l’emploi dans le pays, permettra de redynamiser une zone économique, et contribuera à freiner l’exode rural et l’émigration, illégale ou légale. Mais s’il ne s’agit que d’un rêve éveillé, comme au temps de Benoît Sambou et de son architecte, pourquoi ne pas accorder à la Css les moyens de réaliser ses promesses et ambitions ? Avec Mimran au moins, on a pu voir du concret à ce jour.
Des boutiques pour vendre des vessies à la place des lanternes
Ce serait mieux que de nous faire rêver avec des «boutiques de référence». On a le sentiment, à écouter notre ministre du Commerce, que nos dirigeants ne retiennent rien des leçons du passé, et ne regardent pas le chemin parcouru par leurs prédécesseurs. Depuis les Sonadis, le Sénégal a connu plusieurs modèles de boutiques de référence. Même le président Abdoulaye Wade, en butte à la crise alimentaire mondiale de 2008, s’y était essayé. Le ministère du Commerce en son temps, a encouragé des initiatives privées d’installation de «magasinstémoins», qui devaient vendre à des prix planchers. Cela n’est pas allé au-delà de deux années. Les agents du Commerce intérieur, qui étaient en service en ce temps, devraient s’en rappeler et instruire leur chef. Ils lui diraient pourquoi ces initiatives n’ont pas prospéré, et ce qu’il faudrait faire pour éviter les échecs annoncés.
Autrement, on peut s’attendre que Serigne Guèye Diop nous sorte encore bientôt, une autre fausse bonne idée, qui va se révéler sans effet, et entamer encore plus la crédibilité de la parole gouvernementale. C’est vrai qu’autour de la table du Conseil des ministres, M. Diop ne doit pas se sentir isolé. Il voit régulièrement un autre de ses collègues, qui a voulu nous vendre des vessies à la place des lanternes, en nous vantant des chiffres de production agricole, «jamais atteints dans ce pays». Tout le monde a pu se rendre compte à quel point il avait raison. Heureusement pour tous que l’un d’eux a pu découvrir que la faute en était à cet hivernage, qui n’est pas (leur) hivernage…
L’ASSEMBLÉE NATIONALE ENTRE EN ACTION
Le bureau de l'institution et la conférence des présidents se réunissent successivement pour ce qui pourrait aboutir à la levée de l'immunité parlementaire de Farba Ngom, soupçonné dans une affaire de blanchiment de 125 milliards FCFA
Les membres du bureau de l'Assemblée nationale et de la conférence des présidents sont convoqués en réunion, ce mardi 14 janvier, respectivement à 16 heures dans la salle de conférence de la présidence (niveau 4) et à 17 heures dans la salle Marie Joséphine Diallo du nouveau bâtiment.
Selon des sources concordantes au sein de l’Assemblée nationale, cette convocation des députés entre dans le cadre de la procédure de reddition des comptes initiée par le Pool judiciaire financier (Pjf) contre les dignitaires de l’ancien régime dont le député maire de la commune d’Agnam, Mouhamadou Ngom dit Farba Ngom.
Dans un communiqué rendu public hier, lundi 13 janvier, le président de l’Assemblée nationale, Malick Ndiaye a convoqué les membres du bureau de l'Assemblée nationale en réunion, ce mardi 14 janvier à 16 heures dans la salle de conférence de la Présidence.
Dans le document dont Sud quotidien a reçu copie, le président de l’Assemblée nationale indique que l’ordre du jour porte sur des « informations » sans donner plus de détails.
Dans un autre document, lui aussi signé par le président Malick Ndiaye, portant sur la convocation des membres de la conférence des présidents, ce même mardi 14 janvier à 17 heures dans la salle Marie Joséphine Diallo du nouveau bâtiment, l’ordre du jour annonce « un calendrier de travail pour l'examen d'une affaire en instance ». Il faut dire que la coïncidence de cette convocation des membres de ces deux instances clés, dans le fonctionnement de l’Assemblée nationale avec la sortie du Procureur financier, El Hadj Alioune Abdoulaye Sylla, annonçant l’ouverture d’une information judiciaire par le Pool judiciaire financier (Pjf) sur rapports de la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) n’est pas le fruit d’un hasard.
En effet, interpellées par Sud quotidien, plusieurs sources au sein de l’Assemblée nationale ont confirmé que cette convocation des députés entre dans le cadre de la reddition des comptes au niveau du Pool judiciaire financier (Pjf). Autrement dit, cette procédure viserait le déclenchement de la procédure de la levée de l’immunité parlementaire du député maire de la commune d’Agnam.
La procédure de la levée de l’immunité parlementaire serait liée à des allégations de « blanchiment de capitaux, escroquerie portant sur les deniers publics, corruption, trafic d’influence, abus de biens sociaux » comme indiqué dans un communiqué de presse du procureur de la République financier, publier le 12 janvier 2025.
Pour rappel, dans cette affaire de blanchiment de capitaux portant sur un montant estimé à plus de 125 milliards F CFA, révélée par le chef du parquet financier dans un communiqué officiel, le nom du député Mouhamadou Ngom dit Farba Ngom avait circulé dans un autre document non authentifié mais largement partagé sur les réseaux sociaux. Interpellé par nos confrères du quotidien « Source A », Farba Ngom avait indiqué : « Je n'ai aucune connaissance d'une telle procédure à mon encontre » avant de préciser. « Je n'ai pas été informé de quelconque démarche juridique me concernant ».
Si l’ordre du jour indiquant « le calendrier de travail d’une affaire en cours » concerne la demande de la levée de l’immunité parlementaire de Mouhamadou Ngom dit Farba, il marque une nouvelle étape dans un contexte où la question de la lutte contre la corruption est prônée par les nouvelles autorités.
Le gouvernement s’est souvent présenté comme un fervent défenseur de la transparence et de la bonne gouvernance. Cependant, les critiques fusent sur ce que certains considèrent comme une « justice à géométrie variable », car des dossiers susceptibles d’être examinés et antérieurs à celui-ci ne l’ont pas encore été.
Le député des Agnams, connu pour son franc-parler et ses déclarations polémiques, incarne une figure controversée du landerneau politique. Ses détracteurs voient en lui un symbole des privilèges liés à la proximité avec le pouvoir déchu, tandis que ses partisans défendent son engagement auprès des populations locales et son rôle dans le rayonnement de son parti, l’Alliance pour la République (APR) avant quand il était au pouvoir. Il a été élu député lors des élections législatives anticipées de novembre 2024.
La levée de l’immunité parlementaire de cette personnalité aussi clivante pourrait ainsi revêtir une importance politique majeure, au-delà de la simple portée judiciaire. Dans le un contexte actuel cette affaire risque d’être exploitée par toutes les parties pour renforcer leurs discours. L’opposition y voit une opportunité pour pointer du doigt des « dysfonctionnements systémiques », tandis que le pouvoir pourrait chercher à démontrer son impartialité face à la justice.
Pour autant, déjà, les réactions populaires sont partagées. Si certains applaudissent cette initiative comme une preuve de la volonté des nouvelles autorités de respecter les engagements qu’elles ont pris, d’autres y voient un acte de diversion visant à détourner l’attention des véritables problèmes du pays, tels que la montée du coût de la vie, le chômage et les tensions sociales. Et l’opinion publique elle, de plus en plus exigeante en matière de transparence, attend que la lumière soit faite sur ces allégations. Reste à savoir si cette affaire marquera un tournant dans la lutte contre la corruption ou si elle se révélera être un épisode supplémentaire dans une saga politico-judiciaire où la vérité peine souvent à émerger.
la chronique de Ndèye Dieumb Tall
MULTIPLE PHOTOS
LA CORNICHE DES INÉGALITÉS
EXCLUSIF SENEPLUS - Qu’il soit végétal, animal ou humain, la course au capital et au développement laisse le vivant sur le bas-côté. À combien de talibés avons-nous répondu cette semaine ? LA RUE SÉNÉGALAISE, CETTE ACTRICE OUBLIÉE
Comment Médina[1] et Fann Résidence[2] coexistent dans 83 km2 [3]? Comment les fàq-men[4] et les ministres se croisent-ils aussi régulièrement à tous les carrefours de l’une des anciennes quatre communes[5]? Tant de questions auxquelles les sociologues, responsables publiques et chercheurs doivent se pencher. À cette question, je propose mon humble réponse : la rue.
La société sénégalaise est constituée de multiples acteurs et actrices. Parmi elles, une me saute particulièrement aux yeux : la rue sénégalaise. Pensez-y. Bopp u koñ bi[6], tali bi[7], bunt u kër gi[8]… Tant d’expressions faisant référence à la rue.
Cependant, cette rue est difficile à apprivoiser. La temporalité et la géographie jouent un rôle majeur dans l’approche que l’on a et que l’on devrait avoir de la rue et de nos interactions sociales en général. Médina, un premier jeudi de décembre à 7h du matin n’est pas les Almadies[9] un dimanche de fin de mois à 23h. Au milieu de tout cela, la corniche Ouest fait office de frontière. Surplombant l'océan Atlantique par son extrémité la plus à l'Est, la vue y est aussi faramineuse que les montants mobilisés par Karim Wade[10] pour sa construction. Exit la plage publique accessible à toutes et tous durant les longues journées ensoleillées. Désormais, pour en profiter, il faudra débourser au mieux 5.000 FCFA[11](fcfa note de bas de page), au pire 15.000 FCFA. Après tout cela, j’espère que vous n’êtes pas une femme musulmane et ne comptez-pas entacher les belles plages de sables fin du Terrou-bi[12].
Vous l’aurez compris, la rue joue un rôle de plus en plus accessoire dans la vie sociale et politique sénégalaise. Je crois qu’il y a là les symptômes d’un pays qui se perd. Ne vous y méprenez pas ! Je suis l'opposé d’une conservatrice. Par contre, vouloir l'émancipation et le progrès n'empêchent pas de se reposer sur un socle constant et stable.
Étudiante à New York, globe trotteuse devant l'éternel, les rues de Dakar possèdent un je-ne-sais-quoi que je n’ai retrouvé dans aucune ville ou bourg du monde. À vrai dire, je ne m'en étais pas rendu compte avant de quitter le cocon familial. Je me suis rendu compte de la chance que j’avais eu d’avoir pu grandir dans un tel joyau. Pour en revenir à notre histoire, j’avais décidé la semaine dernière, un matin à 10 heures, de me promener. De notre maison à Fann-Résidence à la librairie Les 4 vents de Ouakam. C’était l’occasion pour moi de jouer à la Mère Noël et de refaire mon stock de livres locaux. Sur le chemin, j’ai été frappée par les interpellations des gardiens des somptueuses villas d’ambassadeurs de mon quartier. Ils étaient étonnés qu’une inconnue disrupte leur petit quotidien. “Quel est ton nom de famille ?”, “Où habites-tu ?”, “Depuis combien de temps ? “Tu es étudiante ?”. Ah lala, s’il y a une chose qui ne m’avait pas manquée lors de mon exil volontaire c’est bien l'intrusivité de certains et certaines de mes compatriotes. C’est aussi le revers de notre légendaire chaleur[13].
Quelques foulées plus tard, je suis interpellée par un homme âgé, peut-être la soixantaine. Il tenait dans ses bras frêles un kilo de mburu[14] . Il demandait aux passants et passantes pressés d’être un énième rouage dans la machine capitaliste de quoi assaisonner son pain. Il est vrai que le pain blanc sec ne glisse pas très bien le matin lorsqu’on n’est pas sérère[15]. En discutant avec lui un peu, il m’est apparu que le vieil homme était déboussolé par mon intérêt.
Même scène avec les talibés[16] et femmes assises juste à côté du kiosque du primeur[17]. Au cours de cette courte promenade, j’ai pu croiser des personnes âgées, des enfants, des hommes, des femmes, des personnes à mobilité réduite, des personnes handicapées mentalement, des gens sur le chemin du travail, des gardiens, des animaux… J’ai eu à observer aussi l'état de la rue : le pavé, le goudron, le trottoir inexistant, le sable, les publicités et affiches.
J’ai été frappée par la particularité géographique et urbaine d’un quartier comme Fann-Résidence ou Fann Hock[18], comparée à la Médina ou à Colobane[19] par exemple. Le sable et la poussière de Dakar mériteraient presque d’en être les acteurs principaux. Sans oublier les embouteillages. Comment oublier les embouteillages à Dakar ?! À Fann-Résidence, l’absence de trottoirs et de zones de stationnement ne se font pas ressentir car les villas qui bordent la mer sont en général équipées de parkings. A l’inverse, la cité Mbackiyou Faye[20] et cité Avion[21] sont constituées de chemins exigus et sinueux que seules les siru-man[22] peuvent naviguer habilement.
Ces inégalités dans l’urbanisme ne se limitent pas seulement aux places de stationnement et à l'état des routes. Les bâtiments et immeubles n’occupent pas la même fonction dépendamment du quartier. Alors que le pôle Fann-Residence, Mermoz, Point E fait écho au quartier latin et au 5e arrondissement de Paris, abritant tous les deux l’Ecole Normale Supérieure (ENS) et de belles maisons, des quartiers comme Ñaari-Tali, HLM 5[23] sont des méli-mélo de bâtisses à moitié construites, de charrettes, dibiteries et mosquées. Là ou a Fann-Residence les habitations sont jalousement gardées par des gardiens et des bergers allemands, aux HLM 5 les portails, s’ils existent, sont grand ouverts. On y entend les conversations, bêlements de moutons et cris de siru-man. D’un côté, les restaurants huppés ou la bouteille Kirène[24] de 500 ml coûte 1.500FCFA, de l’autre les inondations et eaux usées décorent et parfument les rues.
La négligence du mobilier urbain s'étend au-delà des objets inanimés. La maltraitance animale est sous nos yeux tous les jours. Il suffit d’observer les moutons dans nos maisons, censés être des réceptacles de toutes les malédictions dirigées vers la famille, les chevaux, les chiens et chats errants. Les êtres humains sont eux aussi traités comme des objets inanimés. Lorsqu’ils ne sont pas méprisés, ils sont ignorés. La semaine dernière, à bord d’un Yango, le conducteur fait tout son possible pour éviter le chien errant qui traverse en catastrophe la rue. A peine dix minutes plus tard, une personne qualifiée de folle slalome sans objectifs entre les véhicules. Le chauffeur ne lui prêta aucune attention. De la même façon, une personne à mobilité réduite assise dans une impasse à côté de son véhicule me raconte comment régulièrement il est écrasé par les passants et les voitures.
Si Fann-Résidence, la Médina, Mermoz et les Almadies sont présentés comme acteurs principaux de ce premier épisode, ils ne sont en réalité qu’un prétexte pour mettre en exergue le plus important : le vivant. Qu’il soit végétal, animal ou humain, la course au capital et au développement les laisse sur le bas-côté de la route rocailleuse. À combien de talibés avons-nous répondu cette semaine ? Lorsque l’on donne l’aumône à ces braves gens, sommes-nous plus intéressé•e• par les monts et merveilles promis par notre marabout ou par comment cette offrande va améliorer leur conditions matérielles d’existence ? Ces questions nous concernent toutes et tous et devraient nous empêcher de dormir.
Ndèye Dieumb Tall est étudiante en sociologie et sciences sociales.
[15] Ethnie du Sénégal stéréotypé pour leur amour du pain. Léopold Sedar Senghor, premier président de la République du Sénégal, académicien, membre de la Négritude est sérère.
[16] Enfants mendiant, confiés à des serignes (guides religieux traditionnels) par des familles généralement démunies.
[17] Communément appelés Diallo, du fait de la prédominance des primeurs d’origine fulani, notamment venant de la Guinée.
"Il y a un an, au Gabon, au Sénégal, en Côte d'Ivoire ou au Tchad, le message consistait plutôt à nous demander de ne pas partir". Jean-Marie Bockel révèle comment la France a été prise à contre-pied par ses partenaires historiques
(SenePlus) - Dans un entretien accordé à Jeune Afrique ce lundi 12 janvier 2025, Jean-Marie Bockel, envoyé personnel d'Emmanuel Macron pour l'Afrique et ancien secrétaire d'État à la défense, livre une analyse approfondie des mutations radicales qui secouent les relations militaires entre la France et ses partenaires historiques africains. Son témoignage révèle les complexités d'une transition qui échappe au contrôle de Paris.
Une mission avortée par les événements
Nommé par Emmanuel Macron pour repenser la présence militaire française en Afrique, Jean-Marie Bockel a mené pendant neuf mois un travail de fond auprès de quatre pays clés : la Côte d'Ivoire, le Gabon, le Sénégal et le Tchad. Mais à peine trois jours après la remise de son rapport à l'Élysée, le 25 novembre, un premier coup de théâtre survient : le Tchad dénonce unilatéralement ses accords de défense avec la France, rapidement suivi par le Sénégal.
Cette rupture brutale contraste fortement avec le climat des discussions préalables. "Il y a un an, au Gabon, au Sénégal, en Côte d'Ivoire ou au Tchad, le message consistait plutôt à nous demander de ne pas partir. Aucun de ces pays ne nous a dit souhaiter le départ des soldats français et la fermeture, du jour au lendemain, de nos bases", souligne Jean-Marie Bockel dans les colonnes de JA.
Le cas tchadien, symbole d'une rupture inattendue
Le Tchad illustre particulièrement ce paradoxe. L'envoyé spécial détaille des négociations qui semblaient constructives : "Quand je suis allé au Tchad en mars dernier, les discussions se sont bien déroulées. Les autorités tchadiennes étaient d'accord avec l'idée d'une baisse importante de la présence militaire au profit d'un partenariat, dont nous avons commencé à définir les contours lors de réunions de travail."
Plus révélateur encore, ces discussions avaient progressé jusqu'à des aspects très concrets : "Nous sommes allés loin dans les détails, jusqu'aux attentes de nos partenaires en matière d'équipements militaires", précise-t-il. Début octobre, les discussions portaient encore sur une présence minimale sur les trois bases françaises, au moins à titre transitoire.
Une méthode qui questionne
La brutalité de la rupture soulève des questions sur la méthode. "Les responsables africains ont des susceptibilités légitimes. Chacun considère, à raison, qu'il a le droit d'être correctement traité. Mais c'est aussi vrai du côté français. Et quand, dans un contexte où la discussion semble bien se dérouler, vous apprenez une demande de fin de partenariat par voie d'un communiqué de presse, la méthode est discutable", déplore Jean-Marie Bockel.
Cette situation est d'autant plus surprenante que l'annonce tchadienne est intervenue quelques heures seulement après le départ du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, en visite à N'Djamena.
Vers un nouveau modèle de partenariat
Face à ces bouleversements, la France semble s'orienter vers une nouvelle approche. Jean-Marie Bockel note avec intérêt que "le président Macron a eu raison de préciser que la relation avec un certain nombre de pays anglophones se renforçait." Il souligne un avantage majeur de cette évolution : "D'une certaine manière, c'est plus simple, cela permet d'expérimenter une relation sans le soupçon d'un agenda secret ou d'une attitude néocoloniale."
Le rapport Bockel, bien que largement rendu caduc par les événements, proposait déjà une réduction significative de la présence militaire française, privilégiant la formation via "22 écoles déjà présentes dans plusieurs pays africains, ainsi que l'Académie d'Abidjan, spécialisée dans la lutte contre le terrorisme."
Un tournant historique
Cette séquence marque un tournant décisif dans l'histoire des relations franco-africaines. Après avoir quitté le Mali, le Burkina Faso et le Niger, la France voit son dispositif militaire traditionnel en Afrique francophone se réduire drastiquement. Cependant, Jean-Marie Bockel refuse de parler de déclin : "Il n'y a pas de déclin militaire de la France. Il y a en revanche un retrait, et c'est normal. Il était temps que cela soit assumé pleinement."