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25 novembre 2024
Politique
Par Vieux SAVANÉ
EN ATTENDANT LA RUPTURE SYSTÉMIQUE
A moins de vouloir bâtir un « Etat pastéfien », le ministre Ibrahima Sy n’est assurément pas à sa place. A plusieurs niveaux s’expriment des préoccupations aux antipodes de l'espérance de rupture. Le sillon de la désinvolture s'élargit
L’animateur Boubacar Diallo allias Boub’s, racontait hier mercredi, lors de l’émission « xew xewu jamano » sur Iradio, une anecdote vécue. Un jeune homme de ses connaissances qui lui a demandé s’il ne connaissait pas une personne en besoin de rein à acheter après que ce dernier lui ait demandé de patienter jusqu’au lendemain pour qu’il puisse répondre à sa sollicitation. Il était donc prêt à se livrer à une telle transaction après avoir vu des émissions de télévision s’épancher sur l’existence de ces pratiques. Cette demande glaçante, qui rend compte d’une désespérance dont la survenue correspond à une période d’embrouille où l’on ne sait plus où donner de la tête. A l’image de cette série macabre de pirogues migratoires qui continuent d’embarquer les rêves de nombre de jeunes escomptant échouer sur la terre ferme des Iles Canaries assimilée à un eldorado. Si d’aucuns y arrivent, un grand nombre bascule dans un cauchemar, engloutis dans les profondeurs océanes suite à un naufrage. Ainsi vit-on au Sénégal, depuis quelques jours, au rythme insoutenable de corps régurgités par la mer, repêchés et ramenés sur les plages. Ce sont de jeunes hommes et femmes, de toutes conditions sociales, qui se livrent à cet exercice où même les bébés ne sont pas épargnés.
« Barça ou Barsax », lancent-ils en chœur portés par une sorte de loterie qui tutoie la vie ou la mort. A jeu égal. Même si l’on se demande pourquoi se risquent-ils à cela plutôt que de tenter tout ce qu’il est possible pour s’en sortir chez eux, tels l’auto-entreprenariat, l’investissement dans l’agriculture, il demeure que cela interroge nos chercheurs, nos sociologues, pour expliquer ce qu’il se passe jusqu’à libérer autant de pulsions suicidogènes.
Un questionnement d’autant plus nécessaire que l’on se souvient qu’en 2000, avec l’avènement de la première alternance politique, 40 ans après l’indépendance, il y avait une grande respiration démocratique avec une libération fulgurante de poumons longtemps comprimés et qui pouvaient se réoxygéner enfin. Il y avait une forte espérance qui s’est déversée avec une vague de jeunes diplômés qui ont pris le pari de quitter un travail bien rémunéré en Europe, à l’appel d’un opposant historique qui les avaient entraînés dans ses promesses de transformation du visage du Sénégal et de leurs quotidiens respectifs.
Un espoir structuré autour d’un slogan mobilisateur : « Travailler. Toujours travailler. Encore travailler » leur a été proposé comme catalyseur. Avec en arrière fond les promesses d’un changement institutionnel : Une justice ; des organes de contrôle qui font leur travail ; un Etat protecteur et non partisan. Très rapidement, la désillusion a douché les espoirs lorsque les propos de jour de victoire de l’opposant historique ont été étalés sur la place publique. « Nos problèmes d’argent sont maintenant terminés », avait-il confié à son directeur de campagne, s’inscrivant ainsi dans la perpétuation d’un Etat vache à lait et nourricier. Le désenchantement s’en était suivi. Comme un chat échaudé craignant l’eau froide de la désillusion, nombre de gens aux préjugés favorables sont dans l’attente de voir que cette nouvelle alternance portée par la jeunesse va dans le bon sens.
Loin d’être prometteurs, les premiers signaux laissent d’ailleurs penser que les promesses de campagne ne valent que pour celles et ceux qui y croient. Les appels à candidature et la rationalisation des agences mis en berne, on continue de nommer aux postes de direction comme si de rien n’était, sous prétexte qu’il y a des préalables administratifs qui ne sont pas encore au rendez-vous. Les fonds politiques naguère décriés sont toujours de mise. La rupture ensevelie, la continuité s’éternise. Un surplace incroyable bercé par un regard politicien qui tourne le dos à l’intérêt général. L’obsession partisane en lieu et place de l’empathie pour autrui. Le patriotisme de parti au-dessus de la patrie. Avec une telle vision, il va de soi que l’on ne s’en sortira pas facilement.
A-t-on d’ailleurs idée de voir un ministre de la République, celui de la Santé, affirmer à ses partisans « donner systématiquement sa priorité aux candidatures issues du parti Pastef lorsqu’il reçoit des CV ». Tout à essayer de trouver des propos de langage censés le dégager de ce sable mouvant, Ibrahima Sy n’a fait que s’enfoncer encore plus en expliquant que dans son cabinet ministériel « il n’y a aucun profil politique ». A l’en croire, il privilégie toujours les compétences, l’expérience et le savoir-faire pour qu’en définitive, les résultats priment sur toutes les autres considérations. Et de s’égarer dans l’indéfendable en affirmant : « A compétence égale, je ne pense pas que cela soit un délit de promouvoir un cadre de Pastef qui est aussi un Sénégalais bien méritant ». Là n’est surtout pas la question puisque la nomination doit être « aveugle », c’est-à-dire basé exclusivement sur la compétence comme le souhaiterait la tradition républicaine. A moins de vouloir bâtir un « Etat pastéfien », force est de constater que le ministre Ibrahima Sy n’est assurément pas à sa place. Il devrait plutôt se retrouver au niveau des instances du parti et laisser la place à une personne autre dont l’obsession est le Sénégal.
La rupture dont il est question consiste à s’engager à ce que plus jamais, le parti ne soit mis au centre de la gouvernance étatique. Au regard de tout ce que l’on observe, malheureusement il faut se résoudre à l’idée que cette éventualité n’est pas pour demain. A plusieurs niveaux s’expriment en effet des préoccupations aux antipodes de cette espérance. Aussi est-on en droit de s’inquiéter en constatant que s’élargit le sillon de la désinvolture.
Ainsi en est-il du ministre Oumar Diagne et son engagement à ériger une mosquée à la présidence. Pays de croyants, de brassages culturels, ethniques comme on se plait à le rappeler, surtout en cette veille de Maouloud, il y a donc à traiter les Sénégalaises et les Sénégalais avec une égale dignité, en évitant de s’inscrire dans une logique de majorité et/ou de minorité confessionnelles. Dans la perspective qu’il dessine, Oumar Diagne nie les autres à moins de les considérer comme des citoyens de seconde zone. Qu’il penche pour la construction d’une mosquée en lieu et place de salles de prières aménagées l’oblige à penser à celle d’une chapelle pour les fidèles chrétiens, d’un autel pour les adeptes des religions traditionnelles. Le palais de la République faut-il le rappeler, appartient aux Sénégalaises et aux Sénégalais quelles que soient leurs origines et aucune exclusion n’y est tolérable.
La perpétuation du système, c’est encore cette chose incompréhensible qui voit un pan de l’avenue Léopold Sédar Senghor barricadé, interdit à la circulation piétonne. De telles dispositions n’avaient pas cours sous Senghor ni sous Abdou Diouf ni sous Abdoulaye Wade, à part une gestion ponctuelle de manifestations dans cet espace sensible. C’est sous Macky Sall qu’un tel dispositif a été mis en place. Il est donc à déplorer que les nouvelles autorités s’installent dans ce sillage, privant les populations et les touristes comme naguère de continuer à admirer la devanture du Palais et de se faire photographier avec les gardes rouges. Il est plus que temps de s’investir dans ce qui répond aux attentes urgentes des populations et enrichir son système démocratique.
Démystifier le pouvoir, c’est en domestiquer les apparences en déroulant une simplicité subversive toute tournée vers l’amélioration des conditions de vie des populations, en se positionnant comme un serviteur soucieux de leur bien-être. Les enjeux sont dans l’effectivité des réponses apportées et non dans les effets d’annonce, encore moins dans les foucades.
Une manière de rappeler que le bail de cinq ans qui a été contracté avec le nouveau pouvoir est de transformer le pays autour des urgences que sont l’emploi, l’agriculture, l’école, la santé. Et parce que le temps presse, il est important de prendre exemple sur des expériences concluantes à l’image de Singapour qui a montré que le possible est le chemin, à condition de s’en donner les moyens avec détermination et rigueur. Aujourd’hui, il est le premier pays au monde en enseignement des mathématiques et des sciences, le troisième pays le plus riche au monde. Toutefois, s’il est vrai que les tenants du pouvoir sont aux manettes depuis quelque six mois, il est prématuré de juger sauf à dire que l’on ne sent pas frissonner des pratiques prometteuses. En attendant l’impatience sourde
Par Fadel DIA
ET SI NOUS-MÊMES NOUS NOUS CHANGIONS (SYSTÉMIQUEMENT) ?
Il n’y a pas eu le moindre sursaut de civilité ou de civisme pour accompagner le nouveau gouvernement. Changer, pour les nouveaux gouvernants c’est aussi « réactualiser » leurs promesses d’opposants car ils avaient à la fois trop promis et mal promis
C'est l’un de ses plus illustres théoriciens, et peut-être même l’inventeur de la notion, qui nous a enseigné que la démocratie ce n’était pas seulement gouverner, c’est aussi être gouverné. Etre gouverné est une vraie compétence et aucun gouvernant ne peut atteindre ses buts sans la participation de ceux qu’il gouverne.
Voilà pourquoi la nouvelle équipe qui dirige notre pays depuis près de cinq mois et qui nous avait promis, un peu imprudemment peut-être, des changements « systémiques », aurait dû aussi nous rappeler que ceux-ci ne sont possibles que si nous-mêmes acceptions de changer. Ses chefs, dont on vante la piété, auraient pu appeler en renfort ce précepte du Coran selon lequel Dieu ne change pas un peuple tant que celui-ci ne fait pas lui-même l’effort de se changer. Quand on a l’ambition de bouleverser de fond en comble la gestion de la « chose publique » (puisque c’est la définition de « république ») il faut garder à l’esprit que la « chose publique est la chose du peuple », qu’on n’y peut rien changer sans sa participation, que ce ne sont pas les bonnes lois qui font les bons citoyens, mais les bons citoyens qui font les bonnes lois. Enfin, après nous avoir appelé à notre responsabilité, et en se fondant sur l’évaluation qu’ils avaient dû faire de l’État de la nation, les nouveaux maitres du pays auraient pu s’inspirer, de Winston Churchill cette fois, et nous avertir que les sacrifices auxquels nous aurons à consentir ont un coût et qu’avant de connaitre des jours meilleurs, nous vivrons probablement des jours difficiles …
Aucune de ces précautions n’a été prise et c’est peut-être faute d’avoir été appelés à la rescousse, faute d’avoir été mis face à leurs responsabilités, que les Sénégalais se comportent comme si rien ne s’était passé. Ils avaient pourtant vécu une élection sans bavures, ils avaient porté au pouvoir un homme encore vierge des tares des politiciens professionnels et qui était en prison quelques jours avant le scrutin, ils avaient assisté à l’avènement de la première vraie alternance politique qu’ait connue leur pays, pour ne pas dire à un changement de régime, et pourtant ils n’ont pas été en mesure de faire éclore une sorte de « printemps (un pré-hivernage ?) du peuple » … et, surtout, ils n’ont renoncé à aucune de leurs mauvaises habitudes. Ce n’est pas seulement qu’ils ne les ont pas changées, c’est à se demander s’ils ont conscience qu’il faut les changer pour que change la gouvernance du pays. Ils ne sont donc pas sortis dans la rue pour proclamer solennellement que plutôt que de demander ce que leur pays pouvait faire pour eux, ils demanderont désormais ce qu’ils pouvaient faire pour lui, afin de le sortir des terrains minés dans lesquels il s’est embourbé depuis des décennies. Il n’y a pas eu, dans tout le Sénégal, le moindre sursaut de civilité ou de civisme pour accompagner le nouveau gouvernement, et plus que jamais les Sénégalais se battent pour conserver des privilèges ou des passe-droits, pour solliciter des récompenses ou des prébendes !
Les accidents de circulation se sont multipliés, à une fréquence jamais atteinte et pour les mêmes raisons qu’auparavant, et pourtant il n’y a eu nulle part de mouvement de foule pour boycotter les bus surchargés, aux pneus usés ou simplement crasseux. Le dernier accident en date, et sans doute le plus monstrueux (16 morts calcinés, 16 blessés graves…) n’a même pas fait le principal titre du journal télévisé de la RTS qui, au moins dans ce domaine, n’a pas non plus changé : elle était en Chine !
L’exode des jeunes ne s’est pas tari, il s’est même accéléré, avec quelquefois le soutien des familles, par des voies encore plus périlleuses. Jamais il n’a fait autant de victimes en si peu de temps, le dernier naufrage en date qui s’est fait à notre porte, a paru si banal qu’il n’a suscité aucune manifestation à portée nationale. C’est, d’une certaine, manière, une forme de camouflet pour le nouveau pouvoir, comme si notre jeunesse doutait qu’il puisse tenir ses promesses de campagne, alors que c’était elle qui avait le plus contribué à sa victoire et qu’elle en a payé le prix.
Tout comme autrefois, la moindre mesure de salubrité et d’hygiène provoque la colère des populations … et fait reculer l’autorité chargée de la garantir. Une des illustrations les plus symboliques de cette apathie générale, c’est que l’idée de Journée nationale du set setal est une décision de l’Etat alors qu’elle aurait dû être, comme il y a quelques années, une initiative citoyenne et populaire, elle a des relents de corvée et notre passé colonial nous a enseigné que les corvées sont sans avenir.
Nous avons continué à penser que le trottoir était un lieu de commerce ordinaire, ou le prolongement de notre maison et que nous pouvions nous l’approprier, y installer des barrages, voire de petits bois sacrés ou toutes sortes d’obstacles qui obligent les piétons à disputer la chaussée avec les véhicules ou à marcher dans la fange…
On ne peut pas clore cette liste, loin d’être exhaustive, des actes et comportements qui traduisent notre incivisme et notre penchant à violer les lois qui fondent ce que Senghor appelait « notre commun vouloir de vie commune », sans évoquer un de ses grands regrets : notre manque de ponctualité. Contrairement à nous, le président poète avait compris que l’exactitude n’est pas seulement la politesse des rois, mais qu’elle est la botte secrète du développement de certaines démocraties avancées.
Mais, me dira-t-on, véniel que tout cela ! Les vrais changements, c’est ailleurs qu’il faut les chercher, il faut aller aux principes que diable ! C’est vrai, mais outre que cela nous conduirait très loin, et qu’ils se font attendre, on ne peut pas nier que ces petits « riens » que j’ai évoqués sont non seulement ceux qui pourrissent notre vie quotidienne mais aussi ceux dont la solution est à notre seule discrétion. C’est parce que nous les prenons à la légère que tous nos espaces sensoriels se rétrécissent comme une peau de chagrin ,à commencer par notre espace visuel qui se réduit de jour en jour par le surgissement inopiné dans notre proche environnement, sur des espaces qui n’y étaient pas préparés et au mépris des règles d’hygiène et des lois de l’architecture, d’immeubles, voire de tours, qui nous cachent le soleil ou la mer, nous privent de la fraicheur des vents, obscurcissent ou rendent étouffant notre espace vital. Notre espace auditif est quant à lui pollué par des bruits qui ne sont pas de doux chants d’oiseaux, mais des disputes de passants, voire de nos voisins, les klaxons des voitures, les bêlements de moutons affamés, les micros de marchands ambulants ou des cérémonies familiales qui squattent les chaussées et dont on ne sait pas toujours si elles célèbrent un évènement heureux ou malheureux, où ceux des lieux de culte qui donnent à croire que Dieu serait dur d’oreille ! Notre espace olfactif est envahi par les mauvaises odeurs, celles des eaux usées, des dépôts d’ordures clandestins, des canalisations éventrées ou utilisées à contre-emploi, celles des mares stagnantes. Même notre espace tactile est menacé, et en ces temps de Covid rampant, il est devenu dangereux de frôler de ses mains les rampes des escaliers dans les lieux publics ou sur les passerelles qui enjambent les autoroutes !
Si nous avons tourné une page de notre histoire, cela n’a pas encore modifié notre mode d’existence, sans doute parce que notre refus de changer est l’expression la plus parfaite de notre refus du progrès et du développement, comme nous le faisait observer une des nôtres il y a bien longtemps. Est-ce que ceux qui nous gouvernent ont conscience qu’eux aussi doivent se remettre en cause ? Car hier, ils étaient dans l’opposition, ils pouvaient donc promettre de changer le monde, mais maintenant qu’ils gouvernent, il leur faut désapprendre leur ancienne fonction et apprendre la nouvelle. C’est peut-être ce que notre Premier ministre a voulu démontrer en faisant ami-ami avec son homologue malien dont le gouvernement use en matière des droits de l’homme de pratiques dont il avait été lui-même victime il y a quelques mois. Il lui sera en revanche plus difficile de reconnaitre que si, hier, il était libre de faire des critiques, aujourd’hui il lui faut accepter d’être l’objet de critiques, et ce n’est pas facile sous nos cieux car nos dirigeants ont une fâcheuse tendance à refuser toute contrariété. Les évènements récents semblent indiquer que les nouveaux maitres du pays n’échappent pas à cette règle.
Changer, pour les nouveaux gouvernants c’est aussi « réactualiser » leurs promesses d’opposants car ils avaient à la fois trop promis et mal promis. Une réforme « systémique » c’est une réforme qui privilégie les composantes du système sur les causes, c’est une réforme globale qui va au fond des choses et évite de s’égarer dans l’accessoire et dans les fantasmes des réseaux sociaux, et force est de reconnaitre qu’ils se sont trop attardés sur des détails. Car c’était un détail que cette querelle sur le voile, survenue au pire moment, qui n’a fait que réveiller des rancœurs et des suspicions. C’est encore un détail que cette publicité autour d’une forme de spoil system inédite, précipitée, d’une ampleur sans précédent au Sénégal et qui, en moins de cinq mois, a opéré près de 500 nominations de nouveaux responsables dans notre administration et dans nos institutions. Outre le reproche porté sur cette opération, accusée d’être le reniement d’une promesse et une forme de discrimination, elle est loin d’être conforme à l’usage qui en est fait dans le pays qui l’a inventée. A titre de comparaison, aux Etats-Unis ce sont seulement 0,002% des fonctionnaires fédéraux qui sont éligibles à cette procédure (soit 4000 sur 2.000.000 !), et pour un tiers d’entre eux, l’avis favorable du Congrès est nécessaire.
Enfin, et pour conclure, avons-nous les moyens d’une réforme « systémique » ? L’histoire a montré que ce genre de réformes mène généralement aux mêmes paradoxes et que ceux qui les ont promulguées et qui sont chargés de leur exécution sont souvent paralysés par l’ampleur de la tâche et sa complexité. Lorsqu’ils les mettent à l’œuvre ils courent le risque de tomber dans des excès de pouvoir et dans des aveuglements qui dressent contre eux, quelquefois inutilement, la majorité de leurs concitoyens. Alors, changement pour changement, pourquoi ne pas préférer un changement, un vrai, profond et salutaire, mais qui se ferait étape par étape, de proche en proche et qui ferait l’économie de querelles inutiles et de règlements de comptes. C’est une façon de reconnaitre cette réalité : rien n‘est plus difficile à gouverner qu’un être doué de raison !
LE TEMPS DE DIOMAYE
L'Assemblée nationale est suspendue à la décision du président de la République concernant une éventuelle dissolution
La dissolution de l’Assemblée nationale, qui est sur toutes les lèvres, sera-t-elle entérinée aujourd’hui par le régime en place ? On ne saurait donner de réponse que seul le régime en place détient. Celui-ci, sur la base de la Constitution, dispose de ce droit après les deux ans d’existence de cette XIVème législature. Une dissolution qui, si elle intervient, annule de fait tout simplement la Déclaration de politique générale du Premier ministre et suscitera un débat sur la légitimité du président Bassirou Diomaye Faye à la tête du pays.
L’heure de la dissolution de l’Assemblée nationale a sonné. C’est aujourd’hui que cette dissolution doit intervenir comme le stipule la Constitution. Le président de la République Bassirou Diomaye Diakhar Faye avait posé un acte légal allant dans le sens de mettre fin à la XIVème Législature, après ses deux ans d’existence. C’est sous ce rapport qu’il avait saisi le président de l’Assemblée nationale, Amadou Mame Diop, d’une correspondance référencée n°313/Pr en date du 9 septembre (avant-hier mardi) pour une demande d’avis, conformément à la Constitution. En réponse à la lettre du chef de l’Etat, le président de l’Assemblée nationale, Amadou Mame Diop, a tranché. «J’ai l’honneur de porter à votre haute attention que je n’ai pas d’objection à une procédure de dissolution dans les termes indiqués par le Conseil constitutionnel», détaille le président Diop.
Ce dernier a tenu à rappeler courtoisement au chef de l’Etat : «A la date du 6 septembre 2024, vous nous avez notifié par courrier n°000493/Pr, la date arrêtée pour la Déclaration de politique générale, soit le 13 septembre 2024.» Pour finir, souligne L’Observateur, Amadou Mame Diop a réaffirmé que «l’Assemblée nationale, institution de la République, demeure disposée à effectuer toutes les tâches au programme de sa présente session extraordinaire tant qu’elle sera habilitée à le faire».
Avant le Parlement, le chef de l’Etat sénégalais avait recueilli l’avis du Conseil constitutionnel, lui donnant le feu vert à partir du 12 septembre (aujourd’hui). Il y a beaucoup d’agitation autour de cette question.
Les députés de Benno bokk yaakaar (Bby), à travers le président de leur groupe parlementaire, Abdou Mbow, avait annoncé une proposition de loi visant à retirer au Président Diomaye Faye les prérogatives de dissoudre l’Assemblée nationale pour s’afficher contre cette volonté du chef de l’Etat. Lui reprochant ainsi de n’avoir rien fait pour obliger son Pm Ousmane Sonko à se présenter devant eux pour faire sa Déclaration de politique générale (Dpg) après la mise à jour du Règlement intérieur. Se pliant ainsi à la condition fixée par le Pm pour venir dérouler sa Dpg.
Après le rejet du projet de loi du président de la République visant à dissoudre le Cese et le Hcct par les députés de la majorité, ces derniers verront le chef de l’Etat prendre un décret pour limoger les présidents de ces deux institutions que sont respectivement Abdoulaye Daouda Diallo et Aminata Mbengue Ndiaye, issus du régime sortant.
La motion de censure des députés de l’opposition pour «destituer» le gouvernement du Pm Ousmane Sonko fait réagir le Président Bassirou Diomaye Faye, qui convoque l’Assemblée nationale en session extraordinaire.
Faisant partie des points à examiner durant la session extraordinaire, la Dpg a fini par être fixée pour demain, vendredi 13 septembre, par le président de la République. Ce dernier a eu le dernier mot sur la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale, qui avait voulu qu’elle se tienne hier 11 septembre, veille de la dissolution du parlement. Le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye passera-t-il à l’acte ? On n’en est pas certain pour dire ce qui adviendra de cette XIVème législature. Mais s’il ne dissout pas l’Assemblée nationale, on pourrait dire que le chef de l’Etat reste sur sa ligne, qui est que son Premier ministre tienne sa DPG. En tout cas, ce dernier avait donné l’assurance qu’une motion de censure ne sera pas déposée par les députés de l’opposition avant le 12 septembre (aujourd’hui). Affirmant que ceux qui s’acharneraient à déposer une telle motion «auront autre chose à faire que d’être députés à l’Assemblée nationale».
HYPOTHÉTIQUE DPG
À 48 heures de la date fixée pour la Déclaration de Politique Générale et à la veille d'une éventuelle dissolution de l'Assemblée nationale, l'incertitude règne. Le Premier ministre Ousmane Sonko fera-t-il face à la représentation nationale ?
À 48 heures de la date fixée par le président de la République pour la DPG et à 24 heures de la date fatidique du 12 septembre annoncée par le Premier ministre Ousmane Sonko comme le dernier jour de la présente législature, la polémique enfle et les Sénégalais ne savent toujours pas si le PM va faire face à la représentation nationale, encore moins si l’Assemblée sera dissoute demain ou pas.
Le Premier ministre Ousmane Sonko fera-t-il sa déclaration de politique générale ? La question suscite pas mal de débats au sein de la classe politique. Si, au départ, beaucoup d’observateurs étaient très pessimistes, les tendances ont été renversées depuis quelque temps, avec l’intervention du président de la République. Alors que les députés s’entredéchiraient autour de la date de la DPG, Diomaye est monté au créneau pour fixer, en des termes non équivoques, que la DPG aura lieu le 13 septembre.
Et c’est le ministre chargé des Relations avec les institutions, Yankhoba Diémé, qui a livré la bonne nouvelle à l’Agence de presse sénégalaise (APS). "Le président de la République, conformément à ses prérogatives constitutionnelles et à l’histoire du Sénégal, a informé l’Assemblée nationale dans une lettre en date du 6 septembre 2024 de la tenue, le vendredi 13 septembre, de la DPG, conformément au règlement intérieur de l’institution parlementaire en son article 97", avait annoncé le ministre du Travail, de l’Emploi et des Relations avec les institutions.
Dans la foulée, l’Assemblée nationale est montée au créneau pour réajuster son calendrier pour la session extraordinaire, en vue de se conformer au vœu du chef de l’État.
Malgré ces actes posés par les uns et les autres, ils sont encore nombreux les Sénégalais à s’interroger sur la tenue de la déclaration de politique générale. La plupart se fondent sur la sortie d’Ousmane Sonko annonçant, dans une allusion à peine voilée, que l’Assemblée sera dissoute le 12, c’est-à-dire demain.
Dans une de ses récentes sorties, l’ancien député responsable au Parti démocratique sénégalais, Doudou Wade, prévenait : ‘’Le président ayant la priorité a dit que ce sera le 13 ce sera le 13 (septembre). Maintenant, vous me demandez si Sonko sera à l’Assemblée nationale pour faire sa DPG ; je le pense. Si le président de la République reste l’autorité suprême qui a nommé Ousmane Sonko comme Premier ministre, Ousmane y sera. Si maintenant c’est Ousmane le chef, il peut décider de ne pas y aller.’’
L’Assemblée sera-t-elle dissoute demain ?
Comme pour en rajouter à la polémique et aux suspicions, le Premier ministre est encore revenu à la charge, récemment à Matam, pour annoncer une adresse à la nation du président de la République. Il affirmait : ‘’Nous avons trouvé ce pays dans un état critique ! Je l'avais déjà mentionné précédemment, mais certains ont choisi de mal interpréter mes propos. Le président s'adressera aux Sénégalais dès son retour et leur expliquera la situation dans laquelle nous avons trouvé ce pays.’’ Après cette intervention du président Diomaye Faye, ajoutait-il, ‘’les ministres prendront le relais pour approfondir les explications’’. Il est essentiel, selon le PM, de dresser un état des lieux. ‘’Nous entamerons ensuite une phase de redressement, suivie d’une phase de décollage, avant d'arriver à la stabilisation du pays’’, a-t-il relevé.
Autant d’actes contribuent à alimenter la polémique sur sa volonté de faire face à la représentation nationale.
Ce qui est sûr, c’est que tout ne tient qu’à la volonté du chef de l’État, patron d’Ousmane Sonko. Soit il rejoint son PM dans sa volonté de ne pas faire la DPG, soit il lui enjoint d’aller remplir cette exigence constitutionnelle que constitue la DPG.
Ne pas le faire, selon beaucoup d’observateurs, serait synonyme d’un grand manque de respect envers les institutions, la Constitution et sa propre parole. Cela voudrait dire que Diomaye s’est joué de tout le monde en donnant une date pour la DPG, tout en sachant, comme le révélait Sonko, qu’il va dissoudre l’institution parlementaire le 12 septembre.
Pour toutes ces raisons, c’est le fait de ne pas faire la DPG qui serait surprenante. Jusqu’à la preuve du contraire, le président de la République s’est toujours montré très sérieux et responsable dans ses différentes déclarations. Mieux, il a toujours affiché sa volonté d’être un président au-dessus de la mêlée. L’on se rappelle la sortie du PM menaçant d’aller faire sa déclaration de politique générale devant une assemblée populaire et tout ce qui s’en est suivi. Il aura fallu une intervention du chef de l’État pour décanter la situation.
Finalement, l’Assemblée n’a pas mis à exécution sa menace de faire réviser la Constitution. Ousmane Sonko a aussi sursis à faire sa déclaration devant une assemblée populaire.
Stabilité politique et institutionnelle du pays
Il faut rappeler qu’une dissolution de l’Assemblée nationale dans ce contexte va être lourde de conséquences. Au-delà du régime d’exception pour le budget 2025, cela entamerait sérieusement la bonne image des institutions sénégalaises et risque d’impacter les rapports avec certains partenaires techniques et financiers. Le chef de l’État semble être bien conscient des enjeux.
En Conseil des ministres, hier, il a réitéré sa volonté de ne pas affaiblir les institutions. ‘’Le président de la République, garant du fonctionnement régulier des institutions, a mis l'accent sur les relations entre le pouvoir Exécutif et le pouvoir Législatif’’, lit-on dans le communiqué du CM. Conformément à l’article 55 de la Constitution, il estime que ‘’le gouvernement est responsable devant le président de la République et devant l'Assemblée nationale dans les conditions prévues par les articles 85 et 86 de la Constitution’’.
Voilà pourquoi, explique le président Diomaye, ‘’il attache du prix au respect des prérogatives constitutionnelles, des compétences et missions de chaque institution de la République. Car la bonne qualité des rapports entre les institutions détermine fondamentalement la stabilité politique et institutionnelle du pays ainsi que la mise en œuvre optimale des politiques et programmes publics indispensables au bien-être de nos populations’’.
Le communiqué informe que le président de la République ‘’a fait valoir l'impératif de consolider, en permanence, un pouvoir Exécutif préventif et responsable et d'assurer, en toute circonstance, la continuité de l'État’’.
Les prochaines heures renseigneront peut-être sur ce que tout cela pourrait signifier.
HARRIS DOMINE TRUMP
René Lake fait le débriefing du débat présidentiel américain marqué notamment par la destabilisation du candidat républicain et le caractère offensif de son vis-à-vis démocrate sur de nombreux thématiques clés de la campagne
René Lake fait le débriefing du débat présidentiel américain marqué notamment par la destabilisation du candidat républicain et le caractère offensif de son vis-à-vis démocrate sur de nombreuses thématiques clés de la campagne.
L'invité de VOA Afrique estime que Kamala Harris a dépassé les attentes avec cette performance, à tel point que son équipe de campagne s'est dite prête pour un second round.
À 56 jours des élections, les stratégies se dessinent. Pour Trump, Lake conseille de rester focalisé sur l'économie et l'énergie. Quant à Harris, il recommande de continuer à mettre en avant l'avortement et l'inclusion, tout en soulignant le contraste avec "le chaos des années Trump".
QUAND LE FOUTA INVENTAIT LA DÉMOCRATIE
Une révolution oubliée refait surface sur les écrans sénégalais. Le docufiction de Moe Sow sur la révolution Toorodo de 1776 ébranle les consciences à Dakar et suscite un vif débat sur l'identité politique du pays
(SenePlus) - Le cinéma sénégalais s'apprête à offrir au public une plongée dans un pan méconnu de son histoire. Comme le rapporte Le Monde, le docufiction "1776, Thierno Souleymane Baal et la révolution du Fouta", réalisé par Moe Sow, a fait l'objet d'une avant-première très remarquée le 3 septembre au cinéma Pathé de Dakar.
Le film, qui doit sortir en salles en octobre au Sénégal et en novembre en Mauritanie, retrace un épisode historique d'une grande portée symbolique : la révolution Toorodo dans le Fouta, région à cheval entre le Sénégal et la Mauritanie. Cette révolution, menée par Thierno Souleymane Baal vers 1776 à la création de l'Almamiyat, est une forme de théocratie islamique dotée de garanties démocratiques avant-gardistes.
Le réalisateur Moe Sow explique sa démarche dans les colonnes du Monde : "Ce que je voulais, c'était rétablir une vérité : nos sociétés n'ont pas attendu une modernité occidentale pour accoucher de systèmes politiques précurseurs de nos démocraties." Cette volonté de réappropriation historique a trouvé un écho favorable auprès de nombreuses personnalités politiques et intellectuelles présentes à l'avant-première.
Parmi les spectateurs de marque, on notait la présence de l'ancienne premier ministre Aminata Touré, du conseiller mémoire du président Dialo Diop, et même du Premier ministre Ousmane Sonko. Le député panafricaniste Guy Marius Sagna a réagi avec enthousiasme, désincarné sur sa boucle WhatsApp : "Nous avons chez nous nos modèles qui n'ont rien à envier à personne", soulignant que cet épisode historique peut "constituer une boussole politique" pour l'avenir.
Le film mêle reconstitutions historiques et entretiens d'intellectuels, offrant différentes perspectives sur cet événement. Certains y voient un fait démocratique inscrivant le Sénégal dans une modernité globale, d'autres l'analysent comme un phénomène islamique et abolitionniste.
Cheikh Tidiane Gadio, député et descendant d'un dirigeant de l'Almamiyat, affirme : « Il y a une fierté qui s'exprime lors de la découverte par le grand public d'un événement comme la révolution Toorodo."
Malgré son importance historique, cette révolution reste peu connue au Sénégal. Absente des manuels scolaires, elle commence elle cependant à susciter l'intérêt, selon Le Monde. Ousmane Kane, président de l'Association Thierno Souleymane Baal, a appelé lors de l'avant-première à "célébrer nos héros" et a proposé l'érection d'une statue à Dakar en l'honneur du leader révolutionnaire.
Le film pourrait bien jouer un rôle éducatif important. Le ministre de l'éducation, Moustapha Mamba Guirassy, s'est engagé à le diffuser dans les écoles du pays, ouvrant ainsi la voie à une meilleure connaissance de cet héritage historique et démocratique.
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DUEL ÉLECTRIQUE HARRIS-TRUMP
Dans un contexte politique incertain, les deux candidats ont croisé le fer sur tous les sujets brûlants de la campagne. À 50 jours du scrutin, ce face-à-face pourrait bien rebattre les cartes de la course à la Maison Blanche
Dans la nuit du mardi 10 au mercredi 11 septembre 2024, à seulement 50 jours du scrutin présidentiel américain, Kamala Harris et Donald Trump se sont livrés à un duel électrique sur le plateau d'ABC News à Philadelphie. Ce face-à-face, tant attendu par les électeurs, a tenu toutes ses promesses en matière d'intensité et de confrontation.
Dès les premières minutes, l'atmosphère s'est électrisée. La vice-présidente Harris, visiblement bien préparée, a adopté une posture offensive, martelant son programme et n'hésitant pas à qualifier son adversaire de menteur à plusieurs reprises. Face à elle, Donald Trump, inhabituellement sur la défensive, a tenté de contre-attaquer en accusant l'administration actuelle d'incompétence et de mener le pays au désastre.
Les échanges ont couvert un large éventail de sujets brûlants, de l'économie à l'immigration, en passant par l'avortement et la politique étrangère. Chaque thème a été l'occasion d'une passe d'armes féroce, révélant deux visions diamétralement opposées pour l'avenir des États-Unis.
Particulièrement remarquée, l'intervention de Harris sur l'avortement avec un Trump en difficulté, ce dernier peinant à clarifier sa position. De son côté, l'ancien président a tenté de reprendre la main sur les questions économiques, martelant le thème de l'inflation.
Au terme de ces 90 minutes d'affrontement, les deux camps ont, sans surprise, revendiqué la victoire. Cependant, de l'avis de nombreux observateurs, Kamala Harris semble avoir marqué des points précieux dans cette première manche cruciale de la course à la Maison Blanche.
Alors que les sondages annoncent un examen serré, ce débat pourrait bien s'avérer décisif dans la dernière ligne droite de la campagne.
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LE FRÈRE D'ISSA SALL ET L'ODYSSÉE FATALE
L'ancien directeur général de la Caisse de dépôt et consignation a révélé que son frère, loin d'être dans le besoin, était aux commandes de l'embarcation qui a sombré au large de Mbour, faisant au moins 26 morts
(SenePlus) - Le naufrage d'une pirogue au large de Mbour le 8 septembre 2024, qui a coûté la vie à au moins 26 personnes, a pris une tournure inattendue avec les révélations d'Issa Sall, ancien directeur général de la Caisse de dépôt et consignation et actuel maire de Mbour. Lors d'une intervention sur la chaîne TFM le 11 septembre, il a dévoilé un lien personnel bouleversant avec cette tragédie.
"Le capitaine présume du bateau, récemment arrêté, est mon propre frère", a déclaré Issa Sall. Cette révélation jette rappelle la complexité du phénomène de l'émigration clandestine au Sénégal, montrant qu'il ne touche pas uniquement les plus démunis.
Sall a exprimé son incompréhension face à l'implication de son frère dans cette traversée périlleuse. "Il gagne des millions", a-t-il affirmé, décrivant son frère comme un pêcheur expérimenté depuis 1998, possédant un équipement moderne et une pirogue de grande valeur. "Il exerce régulièrement dans des pays voisins comme la Guinée-Bissau et la Gambie, voire jusqu'à Dakar. Il a même réussi à construire sa propre maison", a ajouté le maire de Mbour.
Le drame prend une dimension encore plus tragique lorsque Sall révèle que son frère avait embarqué avec ses quatre enfants et 12 de leurs neveux et nièces. «Je m'apprête à assister à l'enterrement de l'un d'entre eux», a-t-il confié, soulignant l'étendue du deuil qui frappe sa famille.
Malgré l'ampleur de la tragédie, Issa Sall a exprimé un soulagement partiel : "Deux des enfants de mon frère ont été retrouvés vivants", a-t-il annoncé. Cependant, la famille reste dans l'attente d'informations concernant les autres passagers, dont plusieurs sont toujours portés disparus.
LA JEUNESSE ENTRE CHÔMAGE ET NAUFRAGE
26 vies fauchées en mer, c'est le prix cruel d'un système qui peine à offrir des perspectives. Ce nouveau drame jette une lumière crue sur les défis auxquels fait face le pays. Il rappelle que derrière les statistiques se cachent des destins brisés
(SenePlus) - Le phénomène de l'émigration clandestine continue de faire des victimes au Sénégal, malgré l'alternance politique et les promesses du nouveau gouvernement. Le dernier naufrage en date, survenu le dimanche 8 septembre 2024 au large des côtes sénégalaises, a coûté la vie à au moins 26 personnes qui tentaient de rejoindre l'Europe à bord d'une pirogue.
Dans une interview accordée à DW Afrique, Momar Ndao, président de l'Association de consommateurs du Sénégal, analyse les raisons profondes de la persistance de ce phénomène. Selon lui, le manque de perspectives professionnelles est au cœur du problème : "Beaucoup de jeunes ici n'ont pas de métier ou de formation qui leur permettent de trouver un emploi facilement", explique-t-il.
Le faible niveau d'éducation des candidats à l'émigration est également pointé du doigt. "Ce ne sont pas des personnes qui ont un niveau d'instruction élevé, souvent supérieur au secondaire", précise Ndao. Cette situation les pousse à sous-estimer les risques encouragés lors de la traversée : "Ils n'ont pas une idée précise du danger qu'ils courent en prenant une embarcation pour plusieurs jours dans des conditions effroyables."
Malgré les promesses de campagne du nouveau gouvernement, le phénomène persiste. Momar Ndao explique cette situation par l'absence de solutions immédiates : "Il n'y a pas de solution immédiate pour les jeunes sans métier, sans éducation ou sans compétences. Il n'y a pas non plus de marché de l'emploi pour ceux qui ont des compétences." Face à ce manque de perspectives, l'émigration clandestine apparaît comme la seule option pour de nombreux jeunes : "Les gens se disent que la seule option est de jouer au loto ou de risquer leur vie pour trouver une situation meilleure de l'autre côté."
Le phénomène touche particulièrement les régions côtières du Sénégal, où la proximité avec la mer et la tradition de la pêche ont facilité l'essor de ces départs. "À l'origine, beaucoup de départs avaient lieu dans le nord du Sénégal, vers Saint-Louis, Louga, etc. Il y a eu aussi de nombreux départs du côté de Mbour, et ensuite également du côté de Ziguinchor", détaille Ndao.
L'évolution du profil des candidats à l'émigration est également notable. Si initialement, les départs concernaient principalement "des marins, des pêcheurs, des gens de la mer, qui n'ont pas peur de l'océan", le phénomène s'est progressivement étendu à d'autres catégories de la population.
BIRAHIM SECK DÉNONCE UNE DÉRIVE CLANIQUE DANS LES PROPOS DU MINISTRE DE LA SANTÉ
Le coordonnateur du Forum civil s'est opposé aux déclarations d'Ibrahima Sy concernant le recrutement dans son département. Il y voit une forme de violation des principes de bonne gouvernance.
Le coordonnateur du Forum civil aussi a tenu à s’inviter dans le débat suscité par les propos du Ministre de la Santé. Hier, Ibrahima Sy déclarait qu’en recevant les demandes d'emploi dans son département ministériel, ce qu’il regarde en premier c’est si le postulant est de Pastef.
«Ni les propos du Ministre de la Santé dans la vidéo ni les précisons de son communiqué n'entrent dans le cadre de la gouvernance de rupture prônée», martèle Birahim Seck. Pour le coordonnateur du forum civil, il ne s’agit là que d’une «apologie de la patrimonialisation du pouvoir et d'une gestion clanique».
Les propos du ministre de la Santé ont rapidement suscité une vague d'indignation. Face à l'ampleur prise par l'affaire, Ibrahima Sy a tenu à réagir sur les réseaux sociaux. Il a affirmé que ses propos ont été sortis de leur contexte, la vidéo ne reprenant qu'une portion de sa discussion avec des militants de Pastef à Kanel.
Dans sa mise au point, le ministre rappelle son parcours d'universitaire et de cadre sénégalais guidé par des valeurs transcendant les considérations politiques. Il a souligné que dans son cabinet, les recrutements reposent uniquement sur les compétences, l'expérience et les aptitudes des candidats.