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23 avril 2025
Société
AYIB DAFFÉ VS AÏSSATA TALL SALL, LE JEUNE LOUP ET LA VIEILLE GARDE
La présence simultanée des deux personnalités à la tête des principaux groupes parlementaires promet des débats d'une rare intensité. De quoi révolutionner la pratique parlementaire sénégalaise ?
Sous la 15e législature, deux figures politiques marquantes se dessinent au sein de l'Assemblée nationale : Mohamed Ayib Salim Daffé, à la tête du groupe parlementaire Pastef les Patriotes, et Aïssata Tall Sall, présidente du groupe Takku Wallu.
Mohamed Ayib Salim Daffé, à la tête du groupe parlementaire Pastef les Patriotes, incarne un leadership forgé par une riche expérience politique. Élu député pour la première fois en juillet 2022, il s’est rapidement imposé comme une figure incontournable du mouvement, surtout après avoir succédé à Birame Souleye Diop à la présidence du groupe Yewwi Askan Wi en avril 2024. Aujourd'hui, sous la 15e législature, son parcours symbolise la montée en puissance d’une génération qui prône la rupture avec les anciennes pratiques politiques. Juriste spécialisé en droit de l’environnement, formé à l’Université Bordeaux-IV, M. Daffé a d'abord fait ses armes au sein du Parti démocratique sénégalais (PDS), où il gravit les échelons, notamment au sein du Mouvement des élèves et étudiants libéraux (Meel) et de l’Union des jeunesses travaillistes et libérales (UJTL). Après la défaite de 2012, il quitte le PDS pour rejoindre Bokk Gis Gis avant de créer, en 2017, son propre mouvement citoyen, Idéal Sénégal. Son parcours éclectique témoigne d’une capacité à s’adapter et à construire des alliances stratégiques.
À l'Assemblée nationale, Ayib Daffé s’impose comme un débatteur redoutable, notamment en wolof, maîtrisant les subtilités juridiques et politiques. Il devra affronter une opposition aguerrie, représentée par des figures telles qu’Amadou Bâ ou Barthélémy Dias, mais il pourra compter sur une majorité solide pour faire avancer les projets du Pastef. Son premier grand défi sera de défendre le projet de loi sur l’amnistie, une question cruciale qui pourrait façonner la législature.
Il sera assisté dans ses tâches par Mme Marie Angélique Diouf, élue vice-présidente du groupe parlementaire du Pastef. Elle incarne une nouvelle génération de leaders engagés, prête à accompagner Ayib Daffé dans ses responsabilités stratégiques au sein de l'Assemblée nationale. Résidant à Keur Massar, le bastion politique du Pastef, Mme Diouf est l'une des premières femmes à rejoindre ce mouvement politique, marquant ainsi une étape importante dans l'intégration de la femme dans la sphère politique sénégalaise, notamment dans des positions de leadership. Sa présence aux côtés d’Ayib Daffé dans la direction du groupe parlementaire Pastef renforcera, sans aucun doute, la représentation de la voix féminine dans les débats parlementaires et permettra à son groupe d’avoir un leadership dynamique, inclusif et tourné vers l’avenir.
Aïssata Tall Sall, l’expérience et la fermeté
À la tête du groupe parlementaire Takku Wallu, Aïssata Tall Sall incarne l’expérience et la fermeté. Avocate chevronnée, ancienne ministre de la Justice et des Affaires étrangères, elle dispose d’une maîtrise parfaite des rouages politiques et juridiques sénégalais. Députée et maire de Podor de 2009 à 2022, elle est reconnue pour sa combativité et son éloquence. Son parcours au sein du gouvernement, notamment dans la défense de la loi d’amnistie, lui confère une légitimité indéniable dans les débats parlementaires.
Elle devra mobiliser ses compétences pour guider une opposition diverse, mais déterminée à contrer les initiatives du Pastef. Aux côtés de son vice-président, Djimo Souaré, elle constitue une force capable de challenger la majorité, en particulier sur des dossiers sensibles comme l’amnistie. Sa déclaration incisive sur ce sujet témoigne de sa volonté de défendre les acquis de l’ancien régime face à ce qu'elle perçoit comme des menaces potentielles pour la stabilité juridique.
La 15e législature s’annonce comme un terrain d’affrontements intenses entre ces deux personnalités marquantes. Ayib Daffé, porteur des idéaux de rupture et de changement, devra s’imposer habilement pour maintenir la cohésion de la majorité Pastef, tandis qu’Aïssata Tall Sall, forte de son expérience et de sa rigueur juridique, représente une opposition solide et stratège. Leurs échanges, en particulier sur des questions brûlantes comme l’amnistie, promettent de marquer profondément l’histoire parlementaire du Sénégal.
LE BUREAU DE L'ASSEMBLÉE FAIT MÂLE
Pastef et Takku Wallu s'opposent sur la présence de deux hommes aux plus hauts postes du bureau. La loi sénégalaise sur la parité, adoptée en 2010, continue de susciter des interprétations divergentes
L'application de la loi sur la parité a fait l'objet de vives controverses, à l'Assemblée nationale entre les groupes Pastef et Takku Wallu. Décryptage.
Le respect de la loi sur la parité a encore été au centre des débats lors de l'installation de la 15e législature, le 2 décembre 2024. Les deux groupes parlementaires se rejettent la balle, chacun accusant l'autre d'avoir violé les dispositions de la loi – du 28 mai 2010 sur la parité. Face au refus du groupe Pastef de leur laisser mettre un homme au poste de 8e vice-président qui leur revenait, la présidente du groupe Me Aissata Tall Sall s'indigne après avoir boudé la session avec certains de ses collègues. “Ce que j'ai vu est inédit. Je n'aurais jamais imaginé que cela pourrait se passer dans cette assemblée nationale du Sénégal. Le président Malick Ndiaye a décidé que le poste qui nous revenait de droit, il va le prendre et l'attribuer au Pastef. C'est tout simplement inédit et en violation de toutes les règles”, accuse-t-elle très en colère. L'ancienne ministre de la Justice estime que Pastef a violé la parité en choisissant comme premier vice président un homme alors que le président est aussi un homme. Elle a promis que son groupe va saisir les juridictions pour être rétabli dans ses droits.
Mais d'où vient la polémique ? Il ressort en effet de l'article 13 du Règlement intérieur de l'Assemblée nationale citée en référence par Me Sall, que le bureau de l'Assemblée nationale est composée, outre le président, de 8 vice-présidents qui se suivent dans l'ordre protocolaire, du premier au huitième, de six secrétaires et d'un premier et deuxième questeur. A la suite de cette disposition, l'article 14 a précisé les modalités de désignation des préposés à ces différents postes. En ce qui concerne le président, il n'y a aucun problème majeur. Le texte précise qu'il “est élu au scrutin uninominal à la majorité des suffrages exprimés. Si cette majorité n'est pas atteinte au premier tour, il est procédé à un second tour, pour lequel l'élection est acquise à la majorité relative”. Le problème qui revient souvent à l'Assemblée nationale, c'est celui des autres membres du Bureau. Il ressort de la même disposition que : “Les vice-présidents, les secrétaires élus et les questeurs sont élus au scrutin de liste pour chaque fonction respectant la parité homme-femme, conformément aux dispositions de la loi 2010-11 du 28 mai 2010.”
Le règlement intérieur, toujours à son article 14, indique que : ''Tous les scrutins sont secrets et ont lieu à la représentation proportionnelle selon la méthode du quotient électoral, calculé sur la base du nombre de députés inscrits dans chaque groupe, avec répartition des restes selon le système de la plus forte moyenne. Les postes de vice-présidents et de questeurs dans l'ordre fixé à l'article 13 en donnant la priorité au groupe ayant obtenu le plus de voix.” Il en a résulté, selon les deux blocs, que Pastef devait prendre les sept premiers postes de vice-président. Le 8e devait ainsi revenir à Takku Wallu. Ayant le privilège de choisir en premier, Pastef a proposé un homme comme vice-président, puis une femme, puis un homme jusqu'au septième vice-président qui est donc un homme.
Pour Takku Wallu, le 8e leur revenant, il leur était loisible d'y mettre qui ils veulent. Cependant tout en veillant que le candidat soit une femme, pour respecter la parité. Mais, dira la présidente du groupe, Pastef ne s'est pas conformé à la parité en mettant un homme comme premier vice-président. Finalement, Pastef a désigné un autre de ses membres comme 8e vice-présidente. S'accaparant ainsi de tous les postes de vice-président.
Il faut noter que ce débat sur la parité revient très régulièrement à l'Assemblée nationale. Les majorités ayant tendance à soutenir que le président de l'Assemblée ne doit pas être pris en compte pour ce qui est de la parité. Selon les arguments souvent avancés, c'est qu'il est lui élu pour toute la législature, alors que les autres ne sont pas élus pour la durée de la législature. Entre autres arguments.
Pour sa part, Me Mamadou Diouf, Doctorant en droit public, estime que “c’est une erreur de penser que la parité ne s’applique qu’à partir l’élection des vice-présidents.” Le président de l’Assemblée nationale, étant membre du bureau, doit avoir une première vice-présidente à la place du sieur Ismaila Diallo, a-t-il tenu à éclairer dans une tribune publiée dans les médias. A en croire le juriste, cette mauvaise interprétation qui voudrait écarter le chef de l’institution de l’application de la parité est balayée constamment par la jurisprudence sénégalaise. Il justifie : ”A la lecture de l’article 1er de la loi de 2010, le bureau de l’Assemblée nationale y compris le Président (voir l’article 13 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale), doit être intégralement et alternativement composé d’un homme et d’une femme. Mieux, le décret n°2011-819 du 16 juin 2011 portant application de la loi sur la parité, en son article 02, énumère l’Assemblée nationale, son bureau et ses commissions parmi les institutions dans lesquelles la parité doit être respectée.”
Revenant sur la posture du juge sénégalais par rapport à cette lancinante et récurrente question, il a rappelé qu'une jurisprudence constante tant à comptabiliser le président. Mais cette jurisprudence a souvent porté sur les élections des bureaux municipaux au niveau des collectivités territoriales. C'était le cas notamment en 2022 avec beaucoup de décisions rendues par les cours d'appel. “La question de l’application de la loi sur la parité a fait couler beaucoup d’encre lors des élections territoriales de janvier 2022. La cour d’appel de Dakar a annulé toutes les élections dans lesquelles un Maire ''Homme” n’avait pas une première adjointe (voir les arrêts n°29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37 du 19 avril 2022).”
A ceux qui sont tentés de relever la durée des mandats, il rappelle cette jurisprudence de la cour suprême, qui précisait : “ La cour d’appel de Kaolack, qui avait fait une mauvaise interprétation de cette loi en arguant que le Maire, étant élu au suffrage universel n’était pas concerné par l’application de la parité, a vu son arrêt cassé et annulé par la cour suprême du Sénégal. En effet, dans l’arrêt n°47 du 27 octobre 2022, Cheikh Biteye et autres contre le Maire de Fatick, la chambre administrative de la Cour suprême a déclaré que le Maire, étant le premier membre du bureau municipal (comme le Président de l’Assemblée nationale), est soumis à l’exigence de la parité absolue et que même son élection au suffrage universel, ne saurait constituer un obstacle à l’application de la loi sur la parité.”
En ce qui le concerne, Ngouda Mboup, dans une télé de la place, a souligné que, depuis 2012, le président de l’hémicycle n’est pas comptabilisé dans le décompte, lorsqu’il s’agit de mettre en pratique la loi sur la parité. Il reconnait, cependant, que cette ‘’pratique parlementaire’’ est sujette à interprétation. Mais, précise que le Conseil constitutionnel a déjà été saisi sur cette question. La réponse de la haute juridiction a été, dit-il : ‘’s’agissant de l’Assemblée nationale, tout ce qui concerne le fonctionnement de son bureau, je ne m’en mêle pas, parce que, ce sont des mesures d’ordre intérieur’’. ‘’Le Conseil, poursuit-il, considère que c’est une cuisine interne et a déclaré la requête irrecevable.’’
Quel sort sera donc réservé au recours des députés de Takku-Wallu, annoncé par Me Aissata Tall Sall ?
LES PRÉVISIONS DE L'ANACIM
Dans ses prévisions pour les prochaines 24 heures, l'Anacim prévoit de la poussière et des températures peu élevées sur Dakar et le littoral.
Dans ses prévisions pour les prochaines 24 heures, l'Anacim prévoit de la poussière et des températures peu élevées sur Dakar et le littoral.
Persistance de la couverture nuageuse
Durant les prochaines 24 heures, le ciel sera nuageux à couvert avec des risques de traces de pluies par endroits sur la moitié ouest du territoire. Ailleurs, il sera passagèrement nuageux.
Températures peu élevées sur le littoral
Une légère baisse de températures sera notée sur les régions proches du littoral. Toutefois, sur le reste du pays, la chaleur sera plus ressentie notamment sur la partie Est avec des températures maximales qui tourneront autour de 33°C.
Fraîcheur relativement ressentie
La fraîcheur nocturne et matinale sera plus ou moins ressentie avec des températures minimales qui varieront entre 19°C à Fatick et 24°C à Dakar.
Couche de poussière sur une partie du pays
Les visibilités seront dégradées par des particules de poussières au cours de la journée de Vendredi sur la majeure partie du pays particulièrement sur les régions est.
GOXU MBATH, FASTES ET TUMULTES D’UN QUARTIER MYTHIQUE DE NDAR
Dans la langue de Barbarie, au nord de l’avenue Colonel Dodds, se trouve Goxu Mbath, un quartier mythique de la ville de Saint-Louis. Entouré par le petit bras du fleuve et la mer, Goxu Mbath est un melting-pot. En cet endroit, les rues sont animées
Situé au nord de l’avenue Colonel Dodds, dans la langue de Barbarie à Saint-Louis, Goxu Mbath est un quartier chargé d’histoire et de diversité culturelle. Créé en 1861, ce lieu emblématique a vu cohabiter plusieurs communautés, devenant un carrefour ethnique unique marqué par la solidarité de ses habitants. Cependant, Goxu Mbath a également traversé des épreuves, notamment durant le conflit sénégalo-mauritanien de 1989, qui a profondément affecté sa population et son économie. Aujourd’hui, ce quartier mythique fait face à de nouveaux défis, tels que l’érosion côtière et des pénuries d’eau récurrentes, compliquant le quotidien des habitants. Entre héritage historique et résilience face aux difficultés, Goxu Mbath continue d’incarner la richesse et les contradictions de la ville de Saint-Louis.
Dans la langue de Barbarie, au nord de l’avenue Colonel Dodds, se trouve Goxu Mbath, un quartier mythique de la ville de Saint-Louis. Entouré par le petit bras du fleuve et la mer, Goxu Mbath est un melting-pot. En cet endroit, les rues sont animées. Les cris stridents des chèvres errants se mêlent aux trots des charrettes. Sur les berges du fleuve, des pécheurs, bardas à la main et filets à l’épaule, s’apprêtent à prendre la mer. A proximité, des notables, assis sous un cabanon en face de l’île «Boppu Thior», discutent tranquillement dans une brise fraiche.
A quelques mètres, sur une rue sablonneuse, la maison du doyen Iba Diagne ne désemplit pas. Si ce n’est pas des demandeurs de certificats de résidence quis’y relaient, les habitants du quartier viennent régler leurs querelles. Président du Conseil de quartier, M. Diagne habite Goxu Mbathe depuis 1966. Une voix autorisée pour parler du quartier et de ses problèmes.
Un quartier métissé
Goxu Mbath a été créé en 1861, d’après un arrêté du gouverneur, selon M. Diagne. Maure d’origine, sa famille, l’une des doyennes de la localité, s’y est installée depuis plusieurs années. La signification du nom du quartier ne fait pas l’unanimité, plusieurs versions ont été évoquées, selon Iba Diagne. «Goxu, en wolof, veut dire lieu d’habitation. Pour « mbath », il y a trois versions. La première renvoie au fait que le lieu était un terrain d’entrainement des tirailleurs et en wolof « mbathe » veut dire « marche ». La seconde renvoie « bathie » « laver» car il y avait des métis qui étaient déplacés par les colons dans le quartier et qui avaient l’habitude de faire le linge sur les berges du fleuve.
La troisième version soutient que mbath signifie « Baag », c’est-à-dire de grands récipients que les maures utilisaient pour sécher les peaux de moutons après la Tabaski », renseigne le doyen Diagne. Il rappelle qu’au départ, Goxu Mbath était un quartier irrégulier et isolé du reste de l’île où vivaient plusieurs communautés. Celles ont été favorisées par la ségrégation en vigueur à Saint-Louis durant l’époque coloniale qui a poussé plusieurs indigènes à habiter dans les quartiers périphériques.
La position géographique de « « Goxu Mbath au fin fond de la langue de Barbarie, à quelques kilomètres de la frontière mauritanienne, lui conférait une attractivité. Au-delà de la toponymie, le quartier est un lieu de brassage de plusieurs ethnies, selon M. Diagne. Un brassage qui renforce la solidarité. « Beaucoup de personnes se sont mariées dans le quartier. Nous pouvons dire que tout le monde est presque parent. Nous sommes unis et indivisibles », dit fièrement M. Diagne. Une solidarité mise à rude épreuve durant les tensions entre le Sénégal et la Mauritanie.
Le conflit sénégalo-mauritanien, une période difficile
En effet, Goxu Mbath a fortement ressenti les impacts du conflit-sénégalo-mauritanien en 1989. Sur le plan économique, il y a eu d’énormes problèmes parce que les maures tenaient les commerces dans la langue de Barbarie, explique M. Diagne. « Il y a eu une période de flottement avant que les Halpulaar et les Guinéens ne viennent combler le vide. En effet, à Goxu Mbath, beaucoup de jeunes étaient partis monnayer leur talent en Mauritanie. Bon nombre d’entre eux s’y sont mariés avec des femmes mauritaniennes », détaille le doyen Diagne.
Plusieurs ressortissants de Goxu Mbathe ont été tués durant les événements sénégalo-mauritaniens. Et ceux qui ont pu en échapper étaient obligés de revenir au bercail. Un problème de logement s’est posé et le doyen Diagne de se rappeler que le délégué de quartier de l’époque avait trouvé un terrain à coté pour les loger.
Des difficultés qui s’accentuent
Ce problème réglé et bien loin derrière nous, Goxu Mbath fait face aujourd’hui à plusieurs défis. Hormis l’avancée de la mer, les populations sont confrontées à des pénuries d’eau fréquentes. Oumy Diop est étudiante. A un arrêt où elle attendait le bus en face du fleuve, elle dit avoir « ras-le-bol » des pénuries d’eau. Silhouette épaisse et teint noir d’ébène, cette jeune dame aux yeux enfoncés conte les difficultés des ménages pour se procurer le liquide précieux : « C’est une situation difficile. Nous sommes obligés de nous réveiller vers 6 h du matin pour avoir de l’eau. Parfois, on passe des nuits blanches. Les maisons à plusieurs étagées sont les plus affectés », affirme-t-elle. « L’État est resté longtemps sans investir dans les infrastructures de distribution d’eau potable. L’usine de Khor alimentait entièrement la ville en eau, mais aujourd’hui, elle est arrivée à ses limites. Les principales difficultés sont nées de l’université Gaston Berger.
Avec l’augmentation du nombre d’étudiants, nous avons assisté à une forte demande. Ce qui perturbe l’alimentation de Saint Louis », justifie le gouverneur de Saint-Louis d’alors Alioune Badara Samb. Selon lui, Goxu Mbath se trouve au bout du réseau d’où la fréquence des coupures d’eau. « La construction d’une nouvelle usine à Khor et le projet SERPP (Ndlr : Projet d’urgence et de résilience à Saint-Louis) vont renforcer la résilience de Goxu Mbath, lutter contre l’érosion côtière qui affecte la langue de Barbarie dans les prochaines années », renseigne-t-il.
PAR Amadou Lamine Sall
THIAROYE 44, LES MISÈRES DE LA FRANCE
EXCLUSIF SENEPLUS - Il y a beaucoup de Français au Sénégal, mais il n'y aura plus la France ? Que non. Souffler sans répit sur les flammes ne sert pas à venger des mémoires. L'impératif au sommet de l'État sénégalais indiquent, désormais, la voie
Notre cher frère, le bien nommé Malick Rokhaya Ba, nous a envoyé un message par WhatsApp, pour s'interroger ainsi qu'il suit : « …on attendait de toi un texte sur Thiaroye 44 pour avoir plus d'éclairages sur les écrivains et le massacre, le contexte de sortie du film de Sembene Ousmane, les perspectives culturelles ouvertes par la nouvelle attitude de la France, les biens culturels spoliés… »
Ma réponse et ce que j'en rajoute ici, est la suivante : « Vous lirez mon cher Malick Rokhy Ba, sous envoi séparé, par WhatsApp, suite à votre message, mon poème en hommage aux tirailleurs tombés à Thiaroye. Vous me faites sourire… Si vous aviez suivi de près ce que nous avons écrit et chanté sur les tirailleurs tombés à Thiaroye, vous m'auriez décerné ne serait-ce qu'un tout petit prix ! Les poètes, dont Senghor, ont écrit et chanté ces héros ! Mais c'est comme si rien n'avait jamais existé ! Peut-être que je ne suis pas bien informé, mais les poètes, les écrivains, les artistes ont été comme écartés et oubliés de cette touchante et si émouvante commémoration du massacre de Thiaroye ! Cette commémoration, depuis Senghor, a été toujours célébrée. Il faut se féliciter qu'elle ait pris une telle ampleur sous le président Diomaye ! On ne pouvait pas rêver mieux !
Quant à la pauvre France, il y a bien longtemps qu'elle a reconnu son forfait ! J'ai lu et appris qu'elle avait mis à la disposition du Sénégal ses archives ! Tout, tout se saura alors si ce n'est déjà fait ! Que nous reste-t-il encore à demander ou à exiger d'une France fatiguée, assiégée, humiliée ? Sur la tragédie de Thiaroye, elle a capitulé ! Elle a rendu les armes ! Faut-il encore et encore continuer et sans répit à l'acculer, la punir ? N'avons-nous pas d'autres combats plus pressants à mener ? Je crois que si ! Alors, sans tourner la page, mais en y laissant un signet, allons vers des combats plus urgents !
Rien, rien que nous ne sachions où ne devinons, ne sera une surprise ! Nos historiens, poètes, cinéastes, ont fait un solide travail il y a déjà bien longtemps Il faut rester avec l'histoire, dans l'histoire et la vérité de l'histoire ! Halte aux révisionnistes qui tentent de réinventer l'histoire pour mieux empoisonner et faire ferrailler les civilisations entre elles. L'heure est à la paix et non à la guerre. L'heure est à l'apaisement et à la sérénité, sans rien céder, et pas un seul pouce, de notre souveraineté, notre identité. Souffler, souffler sans répit sur les flammes, ne sert pas à venger des mémoires ! Personne, même les bêtes de la forêt, n'ignorent cette tragédie innommable ! Le Sénégal, c'est acté, défendra de mieux en mieux ses acquis, ses conquêtes, sa dignité, l'avenir de ses enfants !
Quelque chose s'est levée dans ce pays et cette chose bâtira, vaincra ou décevra et périra ! Mais nous gagnerons, car ce pays a toujours gagné et il a encore mieux gagné quand tout est devenu glauque, injuste et tragique ! C'est ainsi la marche des nations et des peuples. Il n'existe pas de génération spontanée. Il n'existe que des femmes et des hommes qui, au bout de toutes les épreuves, nourris par le vécu et la marche de l'histoire de leur peuple, s'engagent à grandir davantage leur pays, non en effaçant tout, mais en additionnant la volonté de construire de tous, pour gagner ensemble ! Il fallait bien que la cabane ait existé pour que la maison se fasse. Viendra le gratte-ciel au bout de l'effort, de l'exigence, du patriotisme, du civisme ! Le Sénégal est déjà grand, très grand ! Il faut continuer à le grandir dans l'ouverture et l'alliance des civilisations ! Chaque régime politique ajoute une page à l'histoire. Reste toujours à souhaiter que cette page soit noble, forte, inoubliable !
Ne perdons pas trop de temps à compter et à recompter caillou après caillou, les forfaits du colonisateur. Ce qui est fait est fait ! Nous ne ressusciterons pas les morts, mais nous pouvons les habiller d'un manteau royal dans toutes les mémoires. La jeune génération des Français de 2024 n'est en rien coupable de ce que leur pays a commis comme tragédie par le monde, à l'époque des conquêtes coloniales. La jeunesse sénégalaise n'a pas non plus pour mission de se venger à la hauteur des crimes et forfaits. Mais elle doit tout savoir, tout apprendre. Elle doit toujours se souvenir, rien oublier, mais avancer ! Commençons au plus vite par l'école pour protéger notre histoire et la mettre à l'abri de la seule version coloniale. Les « vaincus » doivent répondre aux « vainqueurs » pour que la vérité triomphe ! Ce n'est pas le combat de la jeunesse de rester scotchée au rétroviseur. D'ailleurs Diomaye comme Sonko, doivent également regarder devant, mais en sachant tout de l'histoire du rétroviseur !
Nous ne changerons pas tout en un jour ! Nous ne réinventerons pas un autre Sénégal dans la rage et la passion ! Mais ce pays doit changer, évoluer et il y faudra beaucoup d'autorité, de fermeté, d'échange sans compromission. Continuerons-nous à avoir le français comme langue officielle inscrite dans notre Constitution ou allons-nous vers une ou d'autres langues nationales ? Notons que près de 20% de notre population parlent et écrivent le français ! Si tous les Sénégalais parlent le Wolof, combien la lisent et l'écrivent ? Certains font de ce combat un combat d'avant-garde, mais la précipitation et le populisme viral conduiraient à l'irréparable ! Rien ne presse ! Pensons-y et travaillons-y ! Par contre, notre système éducatif doit déjà amorcer le combat des langues nationales à l'école ! Nous y arriverons mais pas en une génération ! L'Afrique est condamnée à vivre en partenariat avec le monde !
Notre identité culturelle et nos valeurs culturelles ne sont pas négociables mais nous continuerons longtemps encore, longtemps, à prendre des avions construits par Airbus, Boeing, le temps de construire nos propres avions, nos propres trains, nos propres voitures ! Que ceux qui disent et réclament de tout changer tout de suite et maintenant, de jeter la France à la mer et tous les autres compris, doivent commencer par eux-mêmes : ne plus parler, ni écrire le français. Ne plus prendre l'avion. Ne plus prendre le train. Ne plus conduire de voitures françaises, japonaises, américaines, allemandes, italiennes, et attendre les avions, les trains, les voitures africaines !
Thomas Sankara était charmant ! Il avait le génie de la répartie et de la moquerie : « Si nous ne payons pas, les bailleurs ne mourront pas. Mais si nous payons, nous allons mourir ! »
Pour revenir à Thiaroye 44, il s'est toujours agi, depuis Senghor, de réhabiliter nos morts et qu'au tribunal de l'histoire, les génocidaires soient reconnus et que ces derniers acceptent et assument leur imposture. Son poème sur Thiaroye est entré dans l'histoire ! C'est le 06 septembre 1988, que Thierno Faty Sow et Ousmane Sembene réalisèrent leur film « Camp de Thiaroye ». Le film obtiendra le « Grand Prix du jury de la Mostra de Venise, Silver Lion » ! Les deux fabuleux réalisateurs sénégalais auraient pu refuser ce Prix décerné par les « Grands Blancs », comme les appelait Senghor. Qui connait Sembene Ousmane, sait de quoi il était capable comme homme de refus et intraitable ! Mais, ils acceptèrent de recevoir ce Prix !
Réinventons une nouvelle alliance avec la France et qui commence par le respect mutuel. À elle, surtout, d'y travailler, d'y veiller dans de nouvelles approches dictées par l'humilité, l'écoute, l'échange, l'ouverture, la fraternité et non l'arrogance. La France est restée toujours belle et grande à chaque fois qu'elle a regagné la lumière. Il s'agit pour elle de restaurer une nouvelle grandeur dans un monde qui semble cruellement lui échapper ! Les journalistes qui allument des incendies sur les chaînes de télévisions françaises en fusillant ces jours derniers le Sénégal et le peuple sénégalais face à la rectification du pouvoir politique sénégalais sur la tragédie de Thiaroye et courageusement validé par le mea-culpa de la France, sont ceux-là mêmes, français d'adoption de surcroît, qui demandent à ce que la France ferme ses frontières aux Sénégalais et à ceux qui viennent pour s'y soigner !
Ces Français d'adoption qui constituent désormais la majorité en France, ou presque, - les Français de souche, de génération en génération, se font rares- et dont la France est devenue, tout naturellement, avec générosité, leur pays avec leurs pleins droits, sont ceux-là, qui, dans la presse de droite et d'extrême droite, dans le milieu faisandé de la politique et des partis fiévreux, ajoutent le feu au feu partout où la France est chassée, mise dehors !
L'impératif, la fermeté, l'inflexibilité au sommet de l'État sénégalais indiquent, désormais, la voie à suivre. Et personne n'y pourra rien.
De Senghor à Bassirou Diomaye Faye, ce n'est pas le peuple qui a changé, c'est la jeunesse Sénégalaise qui a changé, évolué et qui dicte sa feuille de route ! Gare à ceux qui s'en écarteront ! Cette jeunesse, osons le dire, ne s'est jamais véritablement adressée à Macron, Biden, Poutine, Xi Jinping, mais plutôt à Senghor, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade, Macky Sall. On ne l'a pas vu venir dans sa masse, son nombre, ses armes, ses cris, sa témérité. Un certain Ousmane Sonko, lui, l'a vue, pesée, soupesée et s'est préparé en chamane et gourou, à l'hypnotiser, la conquérir. Rester à la dompter et elle ne se dompte pas. Attention à la dissipation de l'hypnose, au réveil !
C'est cette admirable et exigente jeunesse qui a ouvert les portes de tous les pouvoirs à Pastef ! À Pastef de gagner le combat ou rendre les armes ! Mais le combat sera gagné, car tous nous voulons qu'il soit gagné pour continuer à bâtir un pays et un grand pays. Rien n'est impossible au peuple sénégalais. Mais il demande le respect et ce respect à un nom et une demeure : bienien vivre et chez soi ! ! La jeunesse, c'est le destin du Sénégal et de l'Afrique ! Tout ce qui est en face d'elle, n'est que de la politique et des «combinaisons» !
Aujourd'hui, l'Afrique face à la France et la France face à l'Afrique, nous apparaissent comme le théâtre douloureux d'une concurrence de souffrances ! L'Afrique a décrété que l'injustice, l'humiliation, l'exploitation, l'inacceptable déséquilibre des « termes de l'échange », sont terminés ! Elle en a trop, trop longtemps souffert et ce depuis les indépendances africaines. La France, humiliée, « déshéritée », souffre également, au regard de son rejet et de son expulsion brutale de l'Afrique. Le Sénégal, fidèle à sa délicatesse sans faiblesse, a trouvé les mots et pris les décisions qu'il lui fallait prendre. Sans violence. « Rester soi-même, coûte moins cher », disait étrangement d'ailleurs le plus grand des Français et des colonisateurs : Charles de Gaulle !
Une histoire se termine. Une autre commence.
« Le petit Nègre avec le coeur bleu, blanc, rouge » a tourné les pages de tout le livre maudit ! Cela n'a jamais été facile d'être longtemps à la fois bête, soumis et muet !
Il y a beaucoup de français au Sénégal, mais il n'y aura plus la France ? Que non ! Il y en aura encore et encore des Français au Sénégal, dans plus de 50 ans et toujours. Ils sont des nôtres. Nous avons fondé des familles avec eux. La France sans la « France », n'est qu'une formule ! La France ne disparaitra pas. Elle ne disparaitra jamais, mais elle aura beaucoup, beaucoup appris de son histoire et de ses « conquêtes » en payant le prix !
Amadou Lamine Sall est poète, lauréat des Grands Prix de l’Académie française, lauréat du Prix international de poésie 1573 Golden Antilope Tibétain 2025, Chine.
par Abdoul Aziz Diop
L’ESPRIT D’ANTHOLOGIE NOUS LIAIT AU DRAMATURGE ALIOUNE BADARA BÈYE
EXCLUSIF SENEPLUS - Celui auquel Nous étions liés - Alioune Badara Bèye - par la parole et l’écrit n’est pas mort. Il est « dans l’Ombre qui s’éclaire ». « Et dans l’ombre qui s’épaissit »
Dans une longue interview accordée au quotidien Le Populaire, daté du vendredi 14 avril 2011, l’écrivain et éditeur Elie Charles Moreau disait sans détour ce qu’il pense, entre autres, de la gestion de l’Association des écrivains du Sénégal (AES) par son président, le dramaturge et éditeur Alioune Badara Bèye. Pour l’ami Elie, l’ami Bèye « devrait se libérer et libérer Keur Birago – le siège de l’AES – qu’il gère comme une maison sans portes ». Elie Charles Moreau déplorait le fait que Keur Birago soit devenu un « bunker » et que tous les écrivains ne puissent intégrer l’Association pour bénéficier des opportunités qu’elle est censée offrir à ses adhérents. Il n’en fallait pas plus pour que le président de l’AES, depuis 17 ans, opposât un cinglant démenti à son « contempteur ».
Dans les colonnes du même journal, en date du vendredi 22 avril 2011, Bèye se défend de fermer des portes. « L’Association, avait-il laissé entendre, est réservée uniquement aux écrivains de fiction, les essayistes n’en font pas partie, mais ils peuvent se retrouver au sein du Pen – Poètes, Nouvellistes, Essayistes – qu’on n’a jamais interdit à personne ». Cette façon de recadrer le débat sur l’AES était à elle seule révélatrice du malaise à l’origine de la querelle entre les deux hommes par presse interposée.
« Le Sénégal écrit »
Le 9 octobre 1975, le poète-président Léopold Sédar Senghor signait l’avant-propos de l’Anthologie de la Littérature Sénégalaise d’Expression Française éditée par Gisela Bonn. « Le Sénégal écrit ». C’est le beau titre de l’ouvrage dont Bonn introduisit les 508 pages. Pas moins de 186 pages – la poésie, les contes, les récits et le théâtre se contentant du reste - furent réservées à l’essai, permettant ainsi à des essayistes de renom de figurer dans le même livre : Léopold Sédar Senghor, Alioune Diop, Alioune Sène, Souleymane Niang – auteur de Négritude et mathématique – Gaston Berger – dans Civilisations et cultures, Gabriel d’Arboussier, Cheikh Anta Diop, Maurice Sonar Senghor, Bakary Traoré, Lamine Diakhaté et Mohamadou Kane. Alioune Badara Bèye ne les aurait pas admis à l’AES si ces figures emblématiques de notre littérature d’expression française tapaient à la porte de « son » association. Il aurait exigé de Léopold Sédar Senghor une œuvre de fiction au risque de se faire rabrouer par un grand écrivain pour qui essai, poésie, conte, roman, récit et théâtre ne font qu’un. Senghor lui-même s’en explique dans l’avant-propos susmentionné. Pour rendre à la littérature sénégalaise de langue française sa « saveur de métissage », Senghor demanda à Madame Gisela Bonn de « retrancher la Légende de Samba Guéladio Diégui, qui n’a pas été directement écrite en français, mais traduite du peul, et d’y ajouter un texte du philosophe Gaston Berger, Fondateur de la Prospective comme science ». Il faut avoir lu la contribution de Berger à l’anthologie pour comprendre l’esprit d’assortiment cher à Senghor. Planchant sur les « Rapports de l’Occident avec le reste du monde » (Prospective N°3), Gaston Berger écrit : « On n’achète jamais l’amitié des hommes ; on la mérite, et une des meilleures manières d’y parvenir est encore d’être attentif à leur manière de sentir et de vivre ». On ne dénombrera jamais assez le nombre d’œuvres de fiction qu’inspira cette réflexion. C’est sans doute pourquoi « aux poètes et aux romanciers – de l’Anthologie – se sont ajoutés des conteurs et des dramaturges, mais aussi des professeurs et essayistes. Sans parler des savants comme le mathématicien Souleymane Niang, dont les articles sont, de l’avis de Senghor, des modèles de précision, (...) de concision, d’élégance ». Invoquant pour sa part l’« interpénétration insoluble entre le poète et l’homme d’État », Gisela Bonn considère qu’« à côté d’oppressantes images d’une beauté magique, il y a des vers d’une force politique explosive ». Et Bonn d’ajouter : « Dans le poème on trouve les mêmes thèmes que dans l’essai, le discours politique, l’allocution devant le Parlement ou devant le Parti. »
Au moment où elle écrivait ces lignes, Gisela Bonn serait stupéfiée d’apprendre qu’un jour une association sénégalaise d’écrivains ne compterait pas un seul essayiste. Le dernier mot revient à l’essayiste Mohamadou Kane. Parlant du groupe de Paris comprenant entre autres, Senghor, Ousmane Socé, Birago Diop, Kane dit que « ce groupe n’a pas séparé la littérature de la politique et, à l’effort de théorisation, a joint un remarquable souci de création ». Effort de théorisation par l’essai qui inspire la fiction.
Bèye n’est pas mort…
Nous nous souvenons avoir étalé sur une table des coupures de journaux qui nous servirent de pièces pour reconstituer un puzzle. A chaque fois que nous relisons le chapitre de l’essai Une succession en démocratie (L’Harmattan, 2009) qui en est issu, nous pensons au dramaturge, romancier et scénariste à succès Alioune Badara Bèye pour une adaptation au théâtre ou au cinéma. Et si le Grand théâtre de Dakar devenait sous peu le réceptacle de toutes les adaptations des protubérances du magistère de l’ancien président Abdoulaye Wade…
« Je l’ai dit, la culture est action. J’ajoute qu’elle est action révolutionnaire, action de l’homme, c’est en effet le propre de l’homme que de pouvoir exercer consciemment, librement, une activité créatrice », insiste Léopold Sédar Senghor. Pourquoi donc enfermer l’homme dans un genre ? Il suffit enfin d’un esprit d’anthologie pour qu’Elie Charles Moreau rende par la parole et l’écrit un vibrant hommage à l’ami Alioune Badara Bèye. Birago s’en réjouirait car « ceux qui sont morts ne sont jamais partis ». « Ils sont dans la Demeure » (Souffles).
Celui auquel Nous étions liés - Alioune Badara Bèye - par la parole et l’écrit n’est pas mort. Il est « dans l’Ombre qui s’éclaire ». « Et dans l’ombre qui s’épaissit » (Souffles).
Abdoul Aziz Diop est essayiste traduit en 6 langues.
L'homme politique et homme d’affaires est accusé de diriger un réseau d’escroquerie visant plus de 9 000 victimes, selon Libération. Promettant des logements sociaux fictifs, il est poursuivi pour association de malfaiteurs et blanchiment de capitaux.
Homme politique connu sur la landerneau et homme d’affaires, Abdoulaye Mamadou Guissé a été arrêté et déféré au parquet de Pikine-Guédiawaye ce 3 décembre. Il est poursuivi pour association de malfaiteurs, escroquerie et blanchiment de capitaux.
Libération indique que le monsieur est au cœur d’un réseau d’escrocs qui promet des logements sociaux à des GIE et associations féminines.
En compagnie de personnes qui sont un peu partout sur le territoire, ils perçoivent une somme d’argent, 5.500 FCFA en guise d’adhésion à une coopérative dénommée Omart City.
Cependant, cette coopérative n’est que de la poudre aux yeux puisque Abdoulaye Mamadou Guissé ne détient aucune parcelle pour construire des logements sociaux.
Mieux, il ne détient ni comptabilité ni ne fournit de décharge après versement de l’argent.
C’est le cas à Diourbel où le gouverneur a fermé son siège, à Saint-Louis où il est poursuivi par la Section de recherches.
Son réseau a porté préjudice à plus de 9000 personnes.
LE DIRECTEUR DE L’ENTREPRISE DES AÉROPORTS RÉGIONAUX ARRÊTÉ
Ilza Mazanek a été intercepté à la frontière mauritanienne après une tentative de fuite, selon Walfnet. Il est impliqué dans une enquête douanière sur des transactions suspectes évaluées à 70 milliards de FCFA.
Ilza Mazanek, directeur de l’entreprise tchèque qui est chargée de la construction des aéroports régionaux du Sénégal a été arrêté le 28 novembre à la frontière mauritanienne. Selon Libération, une enquête a été menée par les douaniers sur les activités qu’il mène au Sénégal.
Interpellé pour apporter des justificatifs sur certains dossiers, le directeur de Transcon electronic system a préféré fuir par voie terrestre.
Il a été appréhendé au poste de Diama grâce à une opposition émise contre lui par les services douaniers aux différents postes de frontière.
Ilza Mazanek a été conduit de suite à Dakar et doit être déféré au parquet financier.
Des activités douteuses découvertes par les enquêteurs de la Douane ont permis de mettre la main sur des transactions de 70 milliards.
LA FAMILLE INFLUE SUR LE MARIAGE
Selon le sociologue, docteur Pascal Oudiane, enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint Louis, dans les traditions, le mariage est consacré et dans le cadre des mariages précoces, le phénomène est suscité par des intérêts de famille
Selon le sociologue, docteur Pascal Oudiane, enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint Louis, dans les traditions, le mariage est consacré et dans le cadre des mariages précoces, le phénomène est suscité par des intérêts de famille car c’est elle qui donne en mariage. Il a aussi estimé que l’immaturité physique et cognitive doit exclure toute tentative de mariage avant l’âge légal pour éviter la déperdition scolaire des jeunes filles en mariage précoce. Entretien……
Quelle est l’explication donnée au phénomène grandissante des mariages précoce ?
L'explication passe d'abord par l'appréciation de la coercition du mariage qui est une institution socio-culturelle qui fonde les familles et crée par extension la parenté. Il est utilitariste à partir de la circulation des femmes qu'on donne en mariage entre les familles. Autrement dit, le mariage est suscité par des intérêts de familles. C’est la cellule familiale qui donne en mariage. L’individu seul ne se donne pas en mariage. Au pire en l’absence des membres de la famille, le candidat au mariage devra s’appuyer sur un témoin choisi de préférence parmi les proches amis ou connaissances qui par son aval permettra le mariage.
Donc la parenté influe gravement sur la précocité des mariages ?
Le mariage est créateur de lien notamment de parenté et celui-ci est créateur de lien notamment de société. Cependant pour le dernier lien cité, il n’est pas forcément mécanique car pouvant évoluer selon le niveau de modernisation industrielle de la société porté par l’individualisme et l’utilitarisme.
Aujourd’hui sur le fait observé, s’il y a une fréquence élevée de mariages précoces de jeunes filles âgées de moins de 18 ans, l’institution familiale est la première responsable. Encore une fois c’est la famille qui donne en mariage. Nul n’est sans savoir que les jeunes filles africaines et sénégalaises sont des filles 2.0 pour ne pas dire hautement connectées. Le rapport statistique « soutien-gorge » et smartphone est plus important que le rapport cigarette- smartphone. La technologie qu’elle soit mobile ou non n’est pas seulement un ticket d’entrée à la modernité, c’est un outil qui se conjugue aussi au féminin. Cette ouverture aux médias modernes donne accès à nos jeunes aux informations capables de modeler leur personnalité. Ceci explique que les changements de comportements choquent les milieux traditionnels et conservateurs.
Dans les traditions, le mariage est consacré ?
L’âge mature pour accéder à la vie conjugale n’est pas la même avec l’âge légal selon le droit moderne. Selon les usages coutumiers c’est le corps de la jeune fille qui pourra témoigner de sa maturité sexuelle. L’âge légalement autorisé peut ne pas être celui de la maturité physique. Il peut y avoir une précocité comme il est aussi possible qu’il y ait du retard dans le rapport maturité physique et âge.
Dans les deux traditions notamment moderne et coutumière, ce sont les adultes qui se marient et font des enfants. L’adulte n’est pas exclusivement un produit de l’âge mais c’est une personnalité, un rôle. C’est aussi une maturité physique.
De ce point de vue, la jeune fille peut se sentir adulte par son rôle en société, par sa personnalité, par sa maturité physique et par ses connaissances du monde grâce à la technologie. Ainsi inéluctablement, elle se sent individuellement prête pour le mariage sans devoir attendre la plénitude de l’âge légal. Désormais, ce qui va rester pour elle, c’est de chercher la caution familiale puisque c’est le lien légitime qui permet un mariage. Toute union qui ne reçoit pas l’onction familiale ou de la communauté de proches parents et amis n’est pas socialement légitime.
Ainsi peu importe le capital cognitif des jeunes filles qui est construit à partir de l’instruction scolaire ou de la technologie et des réseaux sociaux ou des coutumes et des traditions, la responsabilité des mariages dits précoces selon les perceptions de la société moderne, incombe à la famille qui est la source de leur légitimation sociale.
Pourquoi la famille cautionne le mariage précoce ?
Le rapport « famille et mariage » se lit à travers le prisme des intérêts. C’est parce qu’il y des intérêts que les familles offrent leur fille en mariage ou en reçoivent une en leur sein. Au-delà des ressources monétaires, il y a le capital symbolique à chercher ou à préserver. Toutes les familles cherchent la bonne famille à laquelle on peut offrir en mariage sa fille. C’est une question de fierté et d’honneur. En revanche, il faut rappeler qu’il faut réunir toutes les conditions précitées et qui ne relève pas de l’âge pour recevoir l’onction familiale du mariage. En revanche, en l’absence de la maturité physique, un mariage devient impossible au risque de compromettre l’état de santé et la vie de la jeune fille. Il faut donc n’ont pas sanctionner la jeune fille mais combattre les familles qui soutiennent de telles unions pour accéder ou entretenir un capital symbolique (fierté familiale). En effet, l’âge est moins important que le capital cognitif et la maturité physique de la jeune fille. L’âge légal ne doit pas être un baromètre pour lutter contre les mariages précoces et ses conséquences mais il faut s’intéresser au corps en question et au cognitif des jeunes filles ciblées. L’intérêt pour le corps permettra d’apprécier médicalement la maturité physique apte à la sexualité. L’intérêt pour le cognitif permettra de mesurer la capacité de responsabilisation de la jeune fille à la vie du ménage.
L’âge est-il pertinent dans son rapport avec la déperdition scolaire des jeunes filles en mariage précoce ?
Dans le système scolaire actuel, les âges sont encadrés selon le nombre d’années requis pour valider les différents cycles de scolarité. De ce point de vue, les jeunes filles en mariage précoces sont désavantagées en perdant une partie importante de leur cycle d’instruction. En revanche, les progrès liés à la critique du modèle d’école à la jules ferry et l’avènement de l’enseignement à distance et de l’IA ( intelligence artificielle) vont à l’avenir probablement contribuer à raccourir le temps de scolarité afin d’imprimer beaucoup plus de pragmatisme au cursus scolaire des élèves. Les outils technologiques sont efficaces pour combler l’absence d’instruction des jeunes filles précoces en mariage. L’immaturité physique et cognitive doit exclure toute tentative de mariage avant l’âge légal
Par Babacar Justin Ndiaye
GOUVERNEMENT-PRESSE, SONKO ENTRE CRÊTE ET CUVETTE
"La presse m'emmerde, mais elle pourrait être utile aux petits princes." La phrase prophétique du roi Hassan II éclaire d'une lumière nouvelle les tensions actuelles entre les médias et le gouvernement au Sénégal
Les tensions persistantes entre les médias hautement précieux et les dirigeants très légitimes du Sénégal sont regrettables.
Voilà deux compagnons de route marchant séparément mais, chacun armé de sa truelle, se donnant la double vocation de cimenter la démocratie, d’une part, et de créer la prospérité, d’autre part !
Sous cet angle, la posture du gouvernement, les faits et les gestes du puissant Premier ministre et non moins plébiscité homme politique Ousmane Sonko demeurent essentiels.
Un jour, on a demandé au Roi Hassan II (Monarque absolu) ce qu’il pense de l’organisation Amnesty international. Réponse du Souverain : « Amnesty international m’emmerde, mais elle pourrait être, un jour, utile aux petits Princes ».
Réponse avisée d’un visionnaire ! Car, en effet, si le coup d’État des aviateurs de 1972 avait réussi, l’artisan du putsch aérien, le Général Mohamed Oufkir, aurait réservé un sort incertain (c’est un euphémisme) au Roi actuel Mohamed VI alors âgé de moins de dix ans.
Moralité : l’opacité du futur et les vicissitudes de la vie politique suggèrent voire recommandent la modération tous azimuts. La modération n’étant nullement la faiblesse. Bien au contraire ! Elle est la synthèse de la responsabilité assumée et de la souplesse opportune.
Indiscutablement, la presse (à l’instar de quelques segments tenaces de la Société civile) empêche de gouverner en rond sous tous les cieux. Aussi bien dans la cruelle dictature de Birmanie que dans l’enchanteresse démocratie de l’Ile Maurice où un Premier ministre aguerri a trébuché suite à la forte médiatisation d’un scandale.
En effet, le propre de l’homme politique et la caractéristique de l’homme d’État sont la peau cuirassée et le mental d’acier. Toujours dopé jamais démoli par les critiques et les persiflages.
Des qualités requises, singulièrement chez un Premier ministre (fusible devant l’Éternel) dont le pain quotidien est l’orage social en cours ou la tempête politique en perspective.
Tout réside donc dans l’art et la manière de faire face à la pugnacité normale et aux harcèlements habituels des médias. La panoplie des recettes est assez fournie à la lumière des expériences historiques et instructives. C’est une question d’ingéniosité et de finesse gouvernementales et non de débarquement de mammifères dans un magasin de porcelaines.
En décembre 1973, le très travailleur ministre de l’Intérieur français, Raymond Marcellin, ulcéré par l’avalanche d’informations secrètes régulièrement publiées par «Le Canard enchainé », décide de poser des micros dans les murs et sous les tapis des locaux de l’hebdomadaire satirique. Cette opération (ratée) menée par des policiers de la DST en tenues de plombiers donne une idée de la large gamme des moyens disponibles pour un État désireux de tacler, d’endiguer, d’infiltrer, de noyauter et même d’espionner la presse. Sans la neutraliser par des armes létales d’origines fiscale et légale.
Bien entendu, le droit à l’existence ne signifie pas que les entreprises de presse doivent faire litière de la loi qui induit la conformité. Une loi n’est jamais une contrainte arbitraire mais une contrainte…légale. Donc digne respect par tous. D’où son application sans restrictions troublantes ni géométrie variable.
Cependant, la gouvernance couvre et dépasse le champ étroit des lois. La trajectoire enviable, les acquis réels, l’image scintillante et le rayonnement croissant du Sénégal sont à porter au pinacle. Dans cette optique-là, qui mieux que le leader Ousmane Sonko, politiquement debout sur le toit du Sénégal, est conforté et outillé pour le faire ? Personne. L’homme qui a élu un Président de la république au premier tour puis meublé l’Assemblée nationale par une majorité écrasante et homogène doit camper sur la crête de la gloire.
Ousmane Sonko (bien conseillé) ne doit pas descendre dans la cuvette boueuse où se déroulent des bagarres picrocholines. Or son mutisme et son flegme, lui la dynamo de l’Exécutif, suggèrent sa bénédiction tacite dans le choc ministère-mresse.
Le Premier ministre Ousmane Sonko doit siffler la fin de la récréation. En le faisant, il évacue l’idée (fausse ou vraie) que les nouveaux dirigeants sont plus enclins à assassiner qu’à assainir la presse. L’immobilisme prolongé favorise évidemment les procès d’intention ou les procès en sorcellerie.
Faut-il rappeler encore que, du point de la genèse institutionnelle (contrôle démocratique du pays), le Projet pastéfien domine la Révolution de Thomas Sankara et surclasse la Révolution de Fidel Castro. Les « Ruptures » sankarienne et cubaine ayant été accouchées aux forceps par l’habituelle sage-femme de l’Histoire : la violence.
Au Sénégal, ce sont les urnes qui ont supplanté les armes ; ce sont les longues processions des citoyens-électeurs qui ont remplacé les vagues d’assaut des insurgés pour le triomphe du Projet.
La rue a certes bougé mais elle n’a pas vaincu l’armada du Général Moussa Fall. Ce qui a été fort heureux au demeurant. Sinon Diomaye Faye aurait été le chef d’un État évaporé.
En réalité, les leviers vecteurs de rapprochement bienfaisant et fécond entre l’État et les médias sont trouvables dans l’héritage légué et le génie trempé. Ils ont pour noms : volonté, intelligence et dialogue. Dans le respect de la Loi.
La discussion n’est pas synonyme de capitulation. Dans le dialogue, personne n’ira à Canossa. Le ministre de tutelle et journalistes iront tous vers le Sénégal, terre de concertation légendaire et, surtout, de quiétude propice pour la gouvernance performante et favorable à l’essor de la presse.