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22 avril 2025
Société
MEURTRE DE SOUADOU SOW, LE MINISTRE DE LA FAMILLE APPELLE À L’APPLICATION STRICTE DE LA LOI
Elle a rappelé que le Sénégal avait adopté en 2020 la loi 2020-05 du 10 janvier, qui criminalise le viol et la pédophilie. Cette législation vise à éradiquer de tels actes dans une société encore trop souvent marquée par ce genre de tragédies.
Le Sénégal est de nouveau frappé par un tragique événement. Souadou Sow, une fillette de 12 ans, a été victime d’une tentative de viol suivie de meurtre, un fait qui suscite une vive émotion et une indignation générale dans le pays.
Dans un communiqué, Maimouna Dieye, ministre de la Famille et des Solidarités, a exprimé sa « très grande peine » face à cet acte odieux. « Nous condamnons fermement cet acte et demandons que la loi soit appliquée avec la plus grande rigueur », a-t-elle affirmé.
Elle a rappelé que le Sénégal, sous l’impulsion du ministère de la Famille, avait adopté en 2020 la loi 2020-05 du 10 janvier, qui criminalise le viol et la pédophilie. Cette législation vise à éradiquer de tels actes dans une société encore trop souvent marquée par ce genre de tragédies.
Le ministère a également rappelé l’existence d’un outil clé dans la lutte contre les violences faites aux enfants : la ligne gratuite de signalement « Allô 116 », disponible 24 heures sur 24 pour dénoncer toute forme de violence, d’abus ou de négligence.
Dans un élan de solidarité, Maimouna Dieye a présenté ses plus sincères condoléances à la famille de Souadou et a assuré que le gouvernement offrira tout son soutien.
Le principal suspect dans cette affaire, El Hadj Modou Fall, un homme d’une trentaine d’années, a été arrêté par la police à Tivaouane Peulh après une courte fuite. Ce dernier est le père de l’amie chez qui Souadou avait passé la soirée du 31 décembre.
Surnommée Diary, Souadou Sow avait été invitée à une fête dénommée « lait » dans l’appartement de son amie. Elle devait y passer la nuit, mais son corps sans vie a été retrouvé le lendemain matin, le 1er janvier.
Selon les premières investigations, El Hadj Modou Fall aurait tenté de violer la jeune fille pendant la nuit. Face à la résistance de Souadou, il l’aurait frappée avant de l’étrangler. Des traces de violences ont été constatées sur son corps.
LE GOUVERNEMENT EXIGE L’IMMATRICULATION DES DEUX-ROUES
L’immatriculation des véhicules en question se fait gratuitement, selon un communiqué du ministère des Infrastructures et des Transports terrestres et aériens.
Le ministère des Infrastructures et des Transports terrestres et aériens a mis en demeure les conducteurs des deux-roues dont la cylindrée est supérieure à 49 centimètres cubes de procéder à leur immatriculation au plus tard le 13 mars prochain.
L’immatriculation des véhicules en question se fait gratuitement, selon un communiqué du même département ministériel.
En attendant le délai indiqué, les motifs de contrôle des deux-roues restent en vigueur, à l’exception de l’immatriculation, précise le ministère.
Il annonce que ‘’le démarrage des immatriculations gratuites sera effectif à partir de la semaine du 6 janvier 2025’’.
‘’Passé ce délai, toute moto non immatriculée sera immédiatement mise en fourrière’’, prévient le ministère.
Selon le communiqué, cette mesure a été prise à la suite d’une séance de travail du même département ministériel, de celui chargé des Finances et du Budget, et hauts responsables des forces de défense et de sécurité.
L'ÉCONOMIE VERS DE NOUVEAUX SOMMETS
Le PIB bondit de 8,9% au troisième trimestre 2024, dont 6,8 points grâce au pétrole, tandis que le secteur industriel progresse de 32,1%. Cette performance pourrait être remise en cause par la volonté gouvernementale de revoir les contrats
(SenePlus) - Dans une analyse publiée par Jeune Afrique (JA), l'impact significatif du géant pétrolier australien Woodside sur l'économie sénégalaise se dévoile à travers des chiffres impressionnants. Le troisième trimestre 2024 marque un tournant historique pour le pays, avec une croissance remarquable du PIB de 8,9%, propulsée principalement par l'exploitation pétrolière.
L'exploitation du gisement Sangomar, inaugurée en juin 2024, représente une étape cruciale dans le développement économique du Sénégal. Selon les données de l'Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), citées par Jeune Afrique, le secteur pétrolier contribue à lui seul à hauteur de 6,8 points dans cette augmentation spectaculaire du PIB.
Le secteur industriel connaît une expansion particulièrement notable, avec une progression de 32,1%. Cette croissance s'accompagne d'une évolution positive dans les autres secteurs, comme le révèle JA : le secteur primaire enregistre une hausse de 4,6%, tandis que le tertiaire progresse de 1,3%.
En termes financiers, les résultats sont éloquents. Le PIB nominal atteint désormais 4 815 milliards de francs CFA, soit plus de 7,3 milliards d'euros. Le secteur industriel voit sa contribution augmenter significativement, passant de 899,3 milliards à 1 164,3 milliards de F CFA. Plus impressionnant encore, la valeur des activités extractives a plus que triplé, atteignant 371,4 milliards de F CFA au troisième trimestre 2024, contre 106,9 milliards au trimestre précédent.
Woodside Energy, décrite par Jeune Afrique comme la plus grande entreprise pétrolière et gazière indépendante d'Australie, vise une production ambitieuse de 100 000 barils par jour depuis le gisement Sangomar, situé à environ 100 kilomètres au sud de Dakar. Cependant, cette success story connaît quelques zones d'ombre : l'entreprise fait face à un redressement fiscal contesté de plus de 41 milliards de francs CFA.
L'avenir s'annonce encore plus prometteur avec l'exploitation prochaine du méga-gisement gazier Grand Tortue Ahmeyim (GTA) par BP, prévu pour 2025. Toutefois, comme le souligne le site d'information, les nouvelles autorités sénégalaises, sous la direction du président Bassirou Diomaye Faye et du Premier ministre Ousmane Sonko, souhaitent renégocier les contrats existants. Leur objectif est clair : "rééquilibrer les termes" des accords précédents pour maximiser les bénéfices pour le Sénégal.
Les projections initiales établies sous la présidence de Macky Sall estimaient les revenus combinés de Sangomar et GTA à environ 700 milliards de francs CFA annuels sur trente ans. Ces perspectives pourraient évoluer avec la nouvelle approche du tandem Faye-Sonko, déterminé à redéfinir les termes de la collaboration avec les opérateurs étrangers.
SETAL SUÑU GOX, CITÉ LAMY DE THIÈS REMPORTE LE PREMIER PRIX
Le deuxième prix a été attribué au quartier Diokoul Ndiouréne de Rufisque, tandis que le troisième prix revient au village de Taiba Niasséne.
Le quartier Cité Lamy de Thiès a remporté le premier prix de la compétition « Setal Suñu Gox » dans le cadre de la journée nationale de mobilisation citoyenne « Setal Suñu Reew ».
Cette initiative a pour objectif de distinguer les quartiers les plus propres et les meilleures initiatives citoyennes en faveur de l’amélioration du cadre de vie.
L’annonce a été faite par Moussa Bala Fofana, ministre de l’Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l’Aménagement du territoire.
Le deuxième prix a été attribué au quartier Diokoul Ndiouréne de Rufisque, tandis que le troisième prix revient au village de Taiba Niasséne.
Une cérémonie de remise des prix sera organisée le vendredi 3 janvier 2025, à Thiès, au quartier Cité Lamy.
LE CRI D’ALARME DES CONTRÔLEURS AÉRIENS
Entre vétusté des équipements techniques et manque criant d’effectifs, les contrôleurs aériens du Centre Régional de la Navigation Aérienne de Dakar déclarent ne plus pouvoir garantir une gestion sûre et ordonnée du trafic aérien.
Entre vétusté des équipements techniques et manque criant d’effectifs, les contrôleurs aériens du Centre Régional de la Navigation Aérienne (CRNA) de Dakar et de la Tour de contrôle de l’aéroport de Diass déclarent ne plus pouvoir garantir une gestion sûre et ordonnée du trafic aérien. Face à cette situation critique, ils interpellent les autorités et menacent de prendre des mesures restrictives
Le Centre Régional de la Navigation Aérienne (CRNA) de Dakar et la Tour de contrôle de l’aéroport international Blaise Diagne de Diass sont confrontés à de graves difficultés, notamment liées à la vétusté avancée des équipements techniques indispensables à la fourniture des services de navigation aérienne. Cette situation, déjà préoccupante, est exacerbée par un déficit chronique d’effectifs qui persiste depuis plusieurs années.
L'association professionnel des contrôleurs de la Circulation Aérienne au Sénégal (APCCAS) et le syndicat des aiguilleurs du Ciel du Sénégal (SACS déplorent le manque d’agents qualifiés, dénoncé depuis 2019 par les contrôleurs aériens, faisait déjà partie des revendications soulevées lors de la grève générale de septembre 2022. Un mouvement mené par l’ensemble des contrôleurs aériens de l’ASECNA (Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar).
Ces derniers n’ont cessé d’alerter les autorités de l’ASECNA, de l’ANACIM (Agence Nationale de l’Aviation Civile et de la Météorologie) ainsi que le ministère de tutelle.Selon un communiqué, "aucune réponse concrète n’a été apportée, et la situation s’est aggravée au cours des deux dernières années".
Les contrôleurs aériens, qui assurent la gestion de l’espace aérien sénégalais couvrant près de quatre (4) millions de kilomètres carrés, portent une responsabilité cruciale. Leur mission consiste à garantir la sécurité des avions civils et militaires en vol comme au sol, y compris celle de l’avion présidentiel. Cependant, ces professionnels estiment ne plus être en mesure de gérer efficacement et en toute sécurité le trafic aérien avec les moyens techniques et humains actuellement à leur disposition.
Réunis en assemblée générale extraordinaire le jeudi 12 décembre 2024, les contrôleurs aériens du Centre ATS de Dakar ont décidé à l’unanimité de tirer une nouvelle fois la sonnette d’alarme. "Nous ne sommes plus en mesure de garantir une gestion sûre, régulière et ordonnée du trafic aérien qui nous est confié", ont-ils déclaré. Ils demandent à l’ASECNA de mettre en œuvre un plan de mesures d’exception, également appelé plan de contingence, afin de pallier les insuffisances actuelles.
À défaut de l’activation de ce plan, les contrôleurs se réservent le droit de restreindre la circulation aérienne. Ces mesures viseraient à réduire la charge de travail à un niveau raisonnable, permettant de préserver la sécurité des voyageurs, la santé des agents et la pérennité de leur outil de travail.
Face à cette situation critique, les contrôleurs aériens appellent les autorités à prendre leurs responsabilités pour éviter une crise majeure qui pourrait affecter non seulement le secteur aérien sénégalais, mais aussi la sécurité des millions de passagers transitant par l’espace aérien national.
ARRESTATION DU TUEUR PRÉSUMÉ DE LA PETITE DIARY SOW À MALIKA
Emmené au commissariat, l’homme âgé de 37 ans a rapidement avoué les faits, renseigne L’Observateur. Il a décrit en détails la manière dont il avait piégé l'adolescente.
Le meurtre de Diary Sow, une fillette de 12 ans, à Malika, fait encore couler de l’encre et de la salive. En effet, après l’acte ignoble, le tueur présumé qui avait pris la poudre d’escampette, a été rattrapé par la police. Celle-ci a usé de tous ses moyens pour le mettre hors d'état de nuire.
La cavale du tueur présumé de la la petite Diary Sow n'aura duré que quelques heures. Mais, celles-ci auront été marquées par une traque sans relâche. A peine les constats d'usage effectués sur le lieu de la découverte macabre, les hommes de la brigade de recherches de la police de Malika se sont lancés à la poursuite d'E. M. Fall.
Les enquêteurs avaient pour alliés l'identification de leur cible et une connaissance précise des endroits où le présumé meurtrier pourrait se cacher. La traque, discrète et méthodique, s'est déployée sans lever le moindre soupçon. La vigilance des policiers de Malika a fini par porter ses fruits : E. M. Fall a été localisé et interpellé avant qu'il ne puisse disparaître.
Emmené au commissariat de Malika, l’homme âgé de 37 ans a rapidement avoué les faits, renseigne L’Observateur. Il a décrit en détails la manière dont il avait piégé l'adolescente D. Sow.
La rapidité de son arrestation, grâce à la perspicacité des policiers, lui a peut-être sauvé la vie. En effet, sur les réseaux sociaux, des voix s'élevaient, réclamant la publication de sa photo pour lancer la traque contre lui.
Les policiers de Malika ont devancé cette frénésie, évitant ainsi un déchaînement de colère populaire.
DANGOU DECLINE SES ORIENTATIONS ET AMBITIONS
Situé au cœur de Rufisque Nord, le quartier, qui célèbre cette année ses 120 ans, veut définir un cadre de référence pour un développement harmonieux et durable de son cadre de vie.
Situé au cœur de Rufisque Nord, le quartier, qui célèbre cette année ses 120 ans, veut définir un cadre de référence pour un développement harmonieux et durable de son cadre de vie.
Le quartier Dangou Nord, implanté dans la commune de Rufisque Nord, veut faire sa mue pour s’affirmer comme une localité porteuse de développement. L’ambition a été matérialisée à travers un Document d’orientation stratégique (Dos 2025-2035) élaboré pour marquer les 120 ans d’existence du quartier.
La cérémonie officielle, tenue samedi à l’esplanade de la Grande mosquée, a été l’occasion de présenter au public le document, fruit de plusieurs mois de labeur. «La mission de ce document d’orientation stratégique consiste à définir un cadre de référence pour un développement harmonieux et durable du quartier. Cela sert à orienter les actions des différents acteurs locaux, qu’ils soient publics, privés ou issus de la Société civile, en alignant leurs efforts vers des objectifs communs», ont fait savoir les auteurs du document, fruit d’un travail d’équipe. «Il sert de feuille de route pour orienter les efforts et les ressources vers la réalisation d’une vision commune, tout en répondant aux besoins spécifiques des habitants et en anticipant les défis futurs», a encore mentionné le document de 134 pages. «Ce document d’orientation stratégique vient définir une vision claire, des objectifs spécifiques et des axes d’intervention prioritaires qui permettront de transformer Dangou en un quartier modèle, en tenant compte des défis actuels et des opportunités futures», a assuré, en préface du Dos, Diatta Ndoye qui avait dirigé le comité d’organisation de la célébration du centenaire de Dangou en 2004.
Le Dos remis au Préfet du département Maguette Diouck et au maire de Rufisque Nord Assane Kassé s’adosse à une étude convoquant les contextes national et local pour tenter de trouver une voie alliant tradition et modernité pour asseoir un développement du terroir. «Avec ce document, Dangou ne tâtonne plus. Le quartier a décelé ses problèmes, mais aussi les voies pour les résoudre», a ainsi posé Blaise Niang, coordonnateur du comité scientifique. La réfection de la route menant au cimetière et l’extension du cimetière datant de 1904 sont deux surpriorités auxquelles les autorités doivent trouver des réponses, selon le comité scientifique.
Les questions ayant trait au cadre de vie, au renforcement des infrastructures existantes, à l’autonomisation et à la formalisation des structures de femmes et de jeunes, au sport ou à la culture ont aussi été consignées dans le document que les auteurs espèrent faire l’objet d’une appropriation par les autorités et les populations pour sa mise en œuvre effective. C’est en 1904 que les aïeuls des habitants actuels de Dangou ont quitté Keuri Guedj (emplacement actuel du Cnfa et ses alentours), sur requête de l’autorité coloniale, pour venir s’installer sur l’actuel site fief de Lébougui, une des plus grandes Asc du pays.
LA CIRCULATION SANS LES ASP
Les agents de sécurité de proximité (ASP) sont officiellement retirés des missions liées à la régulation de la circulation, au contrôle des véhicules et à toutes autres activités sur la voie publique.
Les agents de sécurité de proximité (ASP) sont officiellement retirés des missions liées à la régulation de la circulation, au contrôle des véhicules et à toutes autres activités sur la voie publique. Cette mesure a été actée le 31 décembre 2024 par une note adressée aux commissariats centraux, urbains et spéciaux par Ndiaré Sène, directeur de la Sécurité Publique (DSP).
Selon la directive, cette interdiction concerne l’ensemble des services relevant de la Direction de la Sécurité Publique. Les ASP, qui jouaient auparavant un rôle visible dans la régulation de la circulation et dans d’autres tâches administratives, devront désormais se limiter à des missions spécifiques en dehors des espaces publics.
Cette décision marque un tournant dans l’utilisation des ASP au sein des services publics sénégalais. Si ces derniers étaient souvent déployés dans des rôles divers, notamment dans les services administratifs et de sécurité, leur présence sur la voie publique, en particulier dans les missions de régulation de la circulation, suscitait dans le passé des interrogations quant à leur compétence et leur formation pour ces tâches.
La mise en œuvre de cette mesure vise à renforcer la sécurité routière et à recentrer les ASP sur des fonctions adaptées à leur cadre d’emploi. Les autorités policières espèrent ainsi améliorer l’efficacité des opérations de contrôle et de régulation confiées aux agents formés spécifiquement pour ces missions.
DANS L’ANTRE DU BATAILLON DES PARACHUTISTES SENEGALAIS
Présentée comme une Unité pionnière des corps de troupe de l’armée sénégalaise et dépendant directement du président de la République, le bataillon des parachutistes est appelé à intervenir dans des situations dites compliquées pour le maintien de l’ordre
Présentée comme une Unité pionnière des corps de troupe de l’armée sénégalaise et dépendant directement du président de la République, le bataillon des parachutistes est appelé à intervenir dans des situations dites compliquées pour le maintien de l’ordre et de la paix, au Sénégal et même au-delà de nos frontières. Discipline, rigueur et force, sont les traits de caractères de ce corps d’élite dans lequel une équipe de l’Agence de presse sénégalaise (APS) s’est spécialement embarquée.
Il est 06h45. Nous arrivons à bord de notre véhicule devant la porte principale du Camp lieutenant Amadou Lindor Fall qui abrite le bataillon des parachutistes, la première unité de réserve générale. Il est surplombé par le lycée de Thiaroye à gauche. Un peu à droite, on aperçoit l’hôpital de Pikine, dans la banlieue dakaroise.
A peine le temps de marquer un arrêt, un jeune soldat, arme en main se rapproche de notre véhicule à pas soutenus. De loin, il nous fait un salut militaire, avant de jeter un regard furtif sur la portière où sont inscrits les initiales de l’Agence de presse sénégalaise.
D’une main levée, et comme pour montrer qu’il avait été informé de notre visite, il fait signe à un autre militaire, cette fois-ci beaucoup plus âgé, la cinquantaine, de venir, avant d’aller rejoindre dans la même dynamique, sa position initiale au checkpoint.
Il s’agit de l’adjudant Saidou Diallo. C’est lui notre guide du jour, détaché pour la circonstance par l’Etat-major. ‘’Soyez les bienvenus dans l’antre des parachutistes ! Nous-dit-il d’un ton courtois avant de monter avec nous dans le véhicule.
A l’entrée du camp, notre regard se pose sur une drôle de créature, la statue d’un soldat à la posture fière et résolue, aux ailes largement déployées, comme pour nous accueillir, positionnée devant le bâtiment abritant le poste de commandement, à quelques mètres du monument dédié aux morts.
‘’C’est Saint-Michel, l’ange protecteur des parachutistes. Il est bien plus qu’un symbole religieux. Il représente la bravoure, le sacrifice, la foi, la protection, le combat juste et la résilience’’, explique l’adjudant Diallo.
Nous prenons ensuite la direction du parking. Mais notre progression est vite ralentie par le passage de soldats, des jeunes recrues en phase de formation de qualification d’arme, “FQA” dans leur jargon. Ils s’apprêtent à quitter le camp pour une journée d’entrainement intense.
Dans la lumière naissante du matin, habillés de leur tenue de sport impeccablement ajustée, ces soldats aux visages à la fois marqués par la fraîcheur de la jeunesse et le sérieux, empreint de leur détermination, avancent en colonne, leurs chaussures “training” en frappant le sol laissaient entendre un rythme régulier et obéissant aux ordres de l’instructeur.
Rigueur, discipline et respect du l’œil de l’ancien qui voit tout
Dans le camp militaire, les premières activités s’organisent avec rigueur et discipline, orchestrant un ballet précis qui marque le début de la journée.
Tout autour du terrain de football synthétique où s’est déroulée, le premier décembre dernier, la cérémonie de commémoration du 80e anniversaire du massacre des tirailleurs sénégalais, gravitent les bâtiments des cinq compagnies qui composent ce bataillon.
De loin, on aperçoit des soldats en déplacement dont les pas raisonnent sur le bitume, sous le regard d’un ciel teinté d’or et de vermeil. Tous convergent vers la place d’arme pour la levée traditionnelle des couleurs. C’est le premier grand rassemblement de la journée.
Alignés avec une précision géométrique, ils saluent le drapeau hissé qui, caressé par le vent, s’élève au rythme de l’hymne national.
Sur place, l’officier de permanence lit aux soldats, le rapport de place, sous le regard aiguisé du commandant de bataillon, scrutant chaque détail de ce rituel exécuté dans une rigueur, fruit d’un esprit de discipline et de préparation constante.
La matinée se poursuit par une séance d’entrainement dirigée par le moniteur chef du bataillon des parachutistes. L’adjudant Jean-Marie Huchard capitalise à son actif trente et un an de service au sein de l’armée, dont seize au bataillon des parachutistes.
Sur la pelouse synthétique, des hommes en tenue de sport font leurs étirements pour se préparer à la course matinale. Au menu, un circuit de quatre kilomètres à exécuter en 20 minutes à travers les grandes artères de Thiaroye, ce quartier mythique de la banlieue dakaroise.
‘’Ce n’est pas une course de vitesse. Mais un simple exercice de routine. Pour ce faire, nous avons choisi la troisième compagnie, la Kanack. Et c’est tout le monde qui part’’, précise l’adjudant Huchard, avant de quitter le camp avec ses protégés dans une foulée soutenue.
Au même moment, l’officier de permanence nous invite à le rejoindre au mess où on nous sert un petit déjeuner simple mais nourrissant, composé de pain assaisonné, du café, du lait, des fruits et de la boisson énergisante. Un moment de calme relatif ou l’on échange brièvement avec le maître des lieux. Mais la conversation est vite interrompue par des chants qui résonnent au loin.
‘’Ils sont de retour ! s’exclame un officier, s’adressant à son commandant. Il s’agit de la Kanack. On les croise à l’allée du défilé pile à l’heure. Leurs uniformes sont humidement marqués par les efforts physiques intenses qu’ils viennent d’accomplir. Sur leurs fronts, des gouttes de sueur perlent, traçant de fines lignes le long de leurs trempes.
Ils terminent leur parcours au point de départ, la pelouse synthétique où ils enchaînent leurs efforts par des exercices d’assouplissement, de gainage, de renforcement des jambes, des abdominaux, de la ceinture scapulaire et de la ceinture pelvienne.
‘’Ces exercices à faire au quotidien sont essentiels pour un militaire parachutiste qui en plus du combat doit aussi combiner avec les éléments naturels que sont principalement l’air et l’eau dans certaine circonstance’’, renseigne l’adjudant Jean-Marie Huchard dont le visage fatigué porte l’expression d’une satisfaction silencieuse.
Le temps pour lui et ses hommes de s’étirer, l’officier de permanence nous invite à la piscine du camp qui porte le nom de l’athlète paralympique, double champion d’Afrique en canoé-kayak, Edmond Sanka, un ancien militaire parachutiste, amputé d’une jambe, des suites d’un accident survenu en 2007, alors qu’il était en service.
Nous y retrouvons la septième promotion d’élèves instructeurs, moniteurs et chuteurs. Au nombre de trente-trois, on les voit sauter systématiquement, à tour de rôle, dans le grand bassin, bras et jambes légèrement écartés en arrière, après un petit déplacement latéral exécuté en deux temps.
Ils s’exercent à la sortie avec le saut en ouverture automatique, la SOA qui est effectué à hauteur de 1200m, avec une sangle accrochée dans l’avion qui provoque l’ouverture du parachute, après deux ou trois secondes de chute’’, explique le capitaine à la retraite Moussa Kambaye, instructeur de parachutistes et commando.
Appelé communément Baba (père) Moussa par ses éléments, le capitaine Kambaye a fait ses premiers pas à l’armée de l’air. Par la suite, il a fait le concours de l’Ensoa où il est sorti sous-officier, avant d’être envoyé au Togo en 1989 pour y effectuer un stage de moniteur-para et de moniteur-commando.
Une unité d’élite qui a fêté ses 65 ans
‘’J’ai fait ce stage de moniteur-para et de moniteur-commando au Togo. Une fois au Sénégal, les anciens qu’on a trouvés sur place, nous ont entraînés, nous ont montrés ce qu’il fallait faire, ainsi que certains partenaires avec lesquels on sortait’’, nous confie-t-il.
‘’Ces gens m’ont entraîné au fur et à mesure qu’ils sont partis à la retraite. J’ai continué à maintenir le flambeau haut. Jusqu’à la retraite, j’ai continué avec les paras, parce que pour moi, le para, c’est dans le sang’’.
‘’Et maintenant, tous ceux qui font la chute, je les accompagne, c’est moi qui les entraîne, à la sortie, à la position de chute, au travail sous voile’’, ajoute ainsi le sexagénaire à la corpulence toujours athlétique, signe qu’il prend toujours soin de son corps.
C’est sur ces mots empreints de passion que nous le quittons avec ses auditeurs, le temps pour regagner Place Dina, du nom d’un célèbre parachutiste, le capitaine Dina Ndiaye décédé en 2004 au Libéria. Deux maquettes d’avion, la Fokker F27 et la Casa C-200 pour l’entraînement au sol sont installées dans les lieux.
Sur place, l’adjudant Mamadou Diaw, instructeur en équipée, explique minutieusement aux jeunes recrues, l’équipement et les différents systèmes de déploiement des parachutes.
Dans un discours bien huilé, forgé par plusieurs années de pratique, il est revenu largement sur le rôle du harnais, du parachute principal et de secours, de la cordelette d’extraction, du conteneur, du casque, des lunettes de protection, de la combinaison de saut, des bottes, de l’altimètre, du système de flottaison, des gants et des poignées de commande.
Non loin de nous, le major Assane Diop, président des anciens parachutistes, observe la séance avec nostalgie. Instructeur chef issu de la deuxième promotion des moniteurs de para commando du Sénégal, formé au Togo et surnommé “Dialtaabé”, a consacré la grande partie de sa vie à ce bataillon qu’il chérit toujours.
‘’Ça me manque. Tout à l’heure, je suis allé là-bas pour lui dire de me plier mon parachute. Moi, j’avais le numéro 3. J’étais ici le moniteur en chef des parachutistes. Beaucoup d’anciens me connaissent’’, se remémore cet ancien parachutiste qui a participé aux plus grands faits d’arme de cette unité d’élite.
‘’J’ai participé à plusieurs missions, au Sénégal et à l’étranger, dont Fodékaba 2 et la Guinée-Bissau, d’abord en tant que soldat et ensuite comme chef de section. Mais pour rien au monde je ne reviendrais sur ce que j’ai fait, encore moins ce que j’ai vu là-bas car on nous a inculqué des valeurs qu’on applique à vie, même dans la vie civile’’, ajoute-t-il.
Il s’est permis tout de même de revenir sur son premier saut. ‘’Ça, c’est impressionnant. C’est très impressionnant. Le fait de quitter la porte de l’avion et aller au sol, il y a trois secondes que vous êtes entre la mort et la vie. Mais dès que tu réussis ce premier saut-là, vraiment, durant toute la formation, tu vas faire ça’’, s’est réjoui le major, le sourire aux lèvres.
La discussion est écourtée par le guide du jour. Toujours aux aguets par rapport au timing et à la programmation millimétrée du jour. Il demande respectueusement de regagner la salle de formation pour suivre une présentation sommaire sur l’historique de ce bataillon. C’est le sous-lieutenant Youssouf Diédhiou qui se chargera de cette tâche.
C’est en 1959, informe-t-il, que fut créée la première unité parachutiste à l’époque basée au camp Lat Dior. En 1962, l’unité devient un groupement paras avec deux compagnies et rejoint le camp Marchand en 1963, puis le camp Xavier Lelong à Rufisque en 1963, avant de s’installer en 1965 au camp Thiaroye, ajoute-t-il.
A l’en croire, c’est en 1981 que le groupement paras est érigé en bataillon avec deux compagnies et une de commandement auxquelles se sont ajoutées deux autres à savoir la troisième en 1984 et la quatrième en 2022.
Fils de Ngalandou Diouf, ancien député noir de la colonie du Sénégal, Mouhamed Moustapha Diouf, est passé à la postérité pour avoir été est le premier parachutiste sénégalais à avoir effectué un saut le 19 avril 1984. Tandis que chez les femmes, c’est l’élève médecin Maty Diagne qui a effectué le premier saut le 6 avril 1985, renseigne le sous-lieutenant Youssouf Diédhiou.
Beaucoup suer pour épargner beaucoup de sang
‘’Cette unité de réserve peut être sollicitée également pour affronter l’ennemi à l’extérieur du territoire si nécessaire pour mieux préserver la vie des populations’’, a-t-il poursuivi, en s’attardant sur les différentes missions assignées à ce corps d’élite.
De manière plus spécifique, le bataillon peut aller à la conquête d’une tête de pont, attaquer un point d’intérêt stratégique, contrôler une zone visant la paralysie d’une fraction de l’ennemi, s’emparer d’un point important ou encore combattre dans les arrières de l’ennemi, précise-t-il.
La visite tendant vers sa fin, l’officier de permanence nous propose une visite guidée du camp et de ses installations.
A notre sortie de la salle nous apercevons, non loin de la section d’entretien et de pliage des parachutes, cette fois-ci à la tour de synthèse, le capitaine Kambaye dont la voix porte encore, donnant des cours de simulation d’atterrissage à ses élèves, toujours avec la même énergie.
A pied, nous effectuons un long périple qui nous mène tour à tour au Centre d’entraînement des troupes aéroportés, célibatairium des sous-officiers, le camp des mariés, le domicile du chef de corps, la salle de musculation, le réfectoire, le parking des engins d’intervention et le fameux parcours d’obstacle situé à l’autre bout du camp.
‘’Une épreuve physique représentant des situations susceptibles d’être rencontrées sur le terrain où il faut beaucoup suer pour épargner beaucoup de sang’’, fait remarquer l’adjudant Jean-Marie Huchard que l’on retrouve encore à nouveau, cette fois-ci à côté de soldats enrôlés pour la formation en qualification d’arme.
C’est sous un soleil chauffant au zénith que les recrues se lancent un par un à l’assaut de ce parcours dit du combattant qui s’étend sur 500 mètres répartis en 20 obstacles.
‘’Il y a trois sortes de catégories d’obstacles qui sont les obstacles en hauteur, en ras et en profondeur’’, nous fait-il savoir. Il cite entre autres obstacles, l’échelle de corde, les poutres jumelées, ramping, l’espalier la poutre d’équilibre, l’échelle de rail, les poutres jumelées dessus-dessus et la table irlandaise, sans quitter de l’œil les coureurs.
On ne pouvait pas espérer mieux que cette épreuve d’extrême péril pour clôturer en beauté cette première journée d’immersion dans ce corps d’élite méconnu de l’intérieur.
Toujours avec le même calme olympien l’officier de permanence nous conduit au poste de commandement, à la demande du commandant chef de bataillon qui nous invite par la même occasion à assister, au deuxième saut des auditeurs de la septième promotion d’élèves instructeurs, moniteurs et chuteurs, prévue demain.
Avant tout, l’équipement de sécurité du para et la météo
Le rendez-vous est fixé à 6h30 à la base militaire de Ouakam où l’avion va décoller avant de larguer tous les éléments au-dessus de Kaniak, le site d’atterrissage situé au Lac Rose.
Comme convenu, nous arrivons dès l’aube au tarmac de la base aérienne de Ouakam où nous attendaient déjà les d’élèves instructeurs, moniteurs et chuteurs et leurs moniteurs, tous équipés et prêts à faire le grand saut dans le vide.
Après de brèves salutations, on nous enfile des parachutes de secours. Un dispositif composé d’un harnais ajusté à l’aide de sangles encadrant le torse et les cuisses. D’une main experte, le chef des opérations dénommé “Etincelle” vérifie et revérifie les harnais, avant de nous donner les consignes de base.
Le ciel quant à lui, s’étend clair et limpide, sans nuages menaçants, d’un bleu qui semble se fondre à l’infini. Le soleil levant enveloppe la scène d’une lumière douce et dorée, réchauffant juste assez la fraîcheur de l’altitude.
Tout autour de nous, l’air est calme, presque immobile, avec un vent léger qui caresse le greffage de ma collègue. Enlevez votre greffage madame pour éviter qu’il ne s’accroche quelque part, lui rétorque un des instructeurs. Elle s’exécute aussitôt faisant découvrir par la même occasion ses belles tresses traditionnelles.
Au sol, l’atmosphère est sereine. Les auditeurs répètent en attendant le bulletin météo, les gestes précis qu’ils ont exécutés des centaines de fois à l’entrainement. Chacun rejoue la scène dans sa tête. Soudain, l’ordre d’embarquer retentit et les parachutistes se mettent en mouvement suivant un ordre bien déterminé vers la direction de l’avion.
Deux instructeurs positionnés devant la porte de l’avion “Casa 221”, parcourent à nouveaux tous les parachutes, pour une énième vérification, donnant après chaque contrôle, une tape sur l’épaule du soldat, lui confirmant que tout est en ordre.
A l’intérieur de l’avion, l’air est saturé d’adrénaline. La lumière est tamisée et le grondement sourd des turbines de l’avion qui s’éloigne dans le ciel, hurle dans nos oreilles.
‘’On n’a pas voulu vous le dire pour ne pas vous effrayer, mais vous aller sauter avec nous nous’’, nous dit à haute voix un des instructeurs, pour nous charrier, sous le regard amusé de ses camarades.
Quelques minutes plus tard, la porte de l’avion s’ouvre à 1200 mètres d’altitude. L’air frais nous frappe le visage avec une force plus appuyée. Loin en dessous de nous, défile lentement un paysage presque irréel avec en toile de fond défilant, la banlieue de Dakar, la nouvelle ville de Diamniadio et les belles plages jonchant tout le long de la partie Atlantique menant vers Kayar.
A genou devant ce vide hypnotique, l’instructeur scrute le sol, la tête penchée, guidant à vue le pilote vers le point de saut par un gestuel relayé au micro par son assistant.
Tout d’un coup, il se met debout, toujours près de la porte béante et fait signe aux auditeurs de se rapprocher. Il effectue un dernier check rapide avant de leur demander de se mettre en position.
S’éloignant un peu de leur passage, il crie GO ! C’est le signal qu’ils attendaient tous. Sans aucune hésitation, les trente-trois élèves de la septième promotion d’élèves instructeurs, moniteurs et chuteurs se jettent, un par un, dans le vide, à intervalle régulière.
Après cet instant quasi irréel, la porte se ferme et l’avion s’éloigne au loin, cette fois-ci à 2000 m afin de permettre aux six instructeurs qui les accompagnaient, d’effectuer une sortie libre par la rampe.
Mais au moment où l’arrière de l’avion s’ouvre, notre curiosité est attirée par les bruits de voix qui s’élèvent de plus en plus au-devant de l’avion. De loin, on aperçoit debout, les six moniteurs en plein discussion pour calmer un des leurs, apparemment frustré.
Le capitaine Kambaye se rapproche d’eux pour s’enquérir de la situation. Une petite défaillance est décelée sur son équipement. ‘’Tu ne peux pas sauter ainsi. Il faut attendre la prochaine sortie’’, lui dit-il d’un ton ferme.
Visiblement non content de son sort, le soldat regagne sa place et s’assoie. Le casque posé sur ses genoux, il regarde impuissant la rampe qui se referme lentement après le départ de ses frères d’arme de l’avion, restant ainsi silencieux et figé durant tout le retour.
’’Je comprends sa frustration, dit-il. Aucun para n’aime sortir de l’avion après l’atterrissage. C’est ce que nous détestons tous.’’
‘’Mais l’œil de l’ancien voit tout. Donc l’aspect sécuritaire, je veille beaucoup sur ça. C’est une passion pour moi. C’est la raison pour laquelle actuellement, je ne fais que suivre les moniteurs à l’instruction, la pédagogie et surtout l’aspect sécuritaire’’, nous explique ainsi Baba Moussa, à notre descente de l’avion marquant la fin de cette immersion.
par Kristian Laubjerg
LA VIOLENCE POLITIQUE COMME STRATÉGIE DE COMMUNICATION
Derrière l'utilisation systématique du terme 'terroriste' se cache une réalité bien plus nuancée, où les notions de résistance, d'occupation et de légitimité s'entremêlent
Cet article examine plusieurs questions essentielles concernant l’utilisation de l’étiquette de "terroriste". Les Palestiniens, représentés par le Hamas (1), auraient-ils disposé de moyens plus pacifiques lorsqu’ils ont attaqué les régions du sud d’Israël le 7 octobre 2023 ? Le Hamas a été inscrit sur la liste des organisations terroristes par les États-Unis en 1997. Cela fait maintenant plus de 23 ans que le président américain George W. Bush a lancé la « guerre contre le terrorisme ». L’objectif de cette guerre était de promouvoir la démocratie, la liberté et les droits humains afin de supprimer les causes du terrorisme international.
Les États-Unis ont souvent eu de grandes difficultés à respecter les conventions internationales pendant cette guerre. Ils ont fréquemment eu recours à des violences extrêmes et à la terreur, notamment en capturant des prisonniers qu’ils transféraient dans des lieux secrets, où ces derniers subissaient violences et tortures. Ce comportement reproduit aujourd’hui ce que l’on observe dans le conflit d’Israël contre les Palestiniens. Le récit véhiculé par les médias traditionnels occidentaux affirme qu’Israël est une démocratie. Par définition, Israël ne pourrait donc pas mener des actes terroristes ou prendre des otages et aurait au contraire le droit de se défendre contre des terroristes – une qualification pourtant validée à l'origine par son principal allié, les États-Unis.
Cet article montre comment le récit des médias traditionnels manipule le public afin de promouvoir des politiques favorisant les intérêts des États-Unis et des nations occidentales. La population ciblée par ces médias est conditionnée à associer systématiquement l’étiquette de "terroriste" à ceux qui s’opposent aux intérêts des États-Unis.
Contexte
L’origine du terme "terroriste" remonte à l’après-Révolution française, à la fin du XVIIIe siècle, lorsque Robespierre régna par la terreur entre 1792 et 1794. Les royalistes et les opposants au principe d’égalité – l’un des principes fondamentaux de la Révolution – étaient torturés et tués. Depuis, le concept de terreur a souvent été associé à des objectifs révolutionnaires et à la résistance contre l’ordre établi. Déclarer un ennemi "terroriste" permet de le transformer en monstre – ou, pour reprendre les mots du Ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, en "animal" – évoquant la peur et la panique rien qu’à la mention de ce terme.
Les récents épisodes de violence au Proche-Orient ont ravivé le débat sur la nécessité de définir universellement ce qui qualifie un acteur de "terroriste". Les États devraient-ils être exemptés de cette qualification, même lorsque la violence exercée par leurs agents, comme l’armée israélienne (IDF), dépasse largement celle du Hamas et du Hezbollah ? Le Hamas est une entité élue qui administre Gaza depuis 2006, théoriquement sous l’égide de l’Autorité palestinienne, laquelle a reconnu le Droit international humanitaire, ce qui implique des obligations tant pour Israël que pour le Hamas.
L’État d’Israël contrôle tous les aspects de la vie à Gaza. La population entière y est surveillée et soumise à un contrôle strict. Israël approuve toutes les marchandises entrant dans Gaza, et aucun Palestinien ne peut entrer ou sortir sans l’approbation des autorités israéliennes. Ces autorités contrôlent même les approvisionnements en nourriture et en eau. La rétention de ces biens essentiels constitue le fondement de l’accusation de génocide portée contre Israël.
Pour rendre justice aux crimes les plus graves commis dans le monde, la communauté internationale a créé la Cour pénale internationale (CPI)(2). En novembre 2024, celle-ci a émis des mandats d’arrêt contre un leader militaire du Hamas ainsi que contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le ministre de la Défense Yoav Gallant.
D’après les autorités juridiques internationales, Israël demeure une puissance occupante et, à ce titre, est tenu de garantir les besoins fondamentaux de la population qu’il occupe. Lorsque les moyens pacifiques échouent à mettre fin à une occupation étrangère, les peuples ont le droit de se battre pour leur liberté et leur indépendance. Le droit des Palestiniens à l’autodétermination est largement reconnu. De nombreuses résolutions de l’ONU ont confirmé ce droit, notamment la résolution 242 du Conseil de sécurité adoptée en novembre 1967.
Les médias traditionnels, en collusion avec les politiques dictées par quelques grandes agences de presse, se concentrent rapidement sur les atrocités commises par le Hamas tout en écartant leur justification et leur contexte. Un communiqué conjoint publié en décembre 2023 (3) éclaire pourtant les raisons derrière ces événements tragiques.
Les médias n'ont fait aucune référence aux nombreuses résolutions de l'ONU déclarant l'occupation israélienne des territoires palestiniens illégale et en conflit avec le droit international. L'attaque a été décrite avec un vocabulaire qui ne pouvait laisser personne indifférent. Les récits ont été amplifiés par la prise de deux cent cinquante otages par le Hamas. Le terme "prise d'otages" est généralement appliqué à un acte commis par des terroristes, tandis que le terme "prisonnier" est réservé aux États entreprenant des actes similaires. Depuis le 7 octobre 2023, Israël a capturé plus de 10 500 civils palestiniens en Cisjordanie. Ils sont détenus sans procès équitable et souvent soumis à la torture. Officiellement, ils sont appelés prisonniers mais ne sont pas différents des otages et pourraient faire partie d'un accord d'échange avec les personnes capturées par le Hamas.
Il est rapidement apparu que la contre-attaque d'Israël à l'insurrection du Hamas n'était pas seulement une question de vengeance. L'objectif est de chasser les Palestiniens de leur terre ancestrale par tous les moyens disponibles, y compris en ciblant les civils lors de raids aériens et terrestres, par la famine, la destruction d'hôpitaux et d'écoles, et en bloquant toute aide et nourriture entrant à Gaza depuis Israël.
L'argument
Suite aux événements spectaculaires du 11 septembre 2001, avec trois attaques terroristes contre les États-Unis, ce pays a pris la tête de la guerre mondiale contre le terrorisme. Il est vite devenu évident que cette guerre n'avait pas l'intention de cibler tous les terroristes, mais seulement ceux qui menaçaient les intérêts des États-Unis et de leurs collaborateurs. Nous soutiendrons que si un État ami de l'Occident politique applique des méthodes terroristes contre des terroristes non étatiques et des États parrainant le terrorisme, tels que définis par le Bureau du contre-terrorisme du Département d'État américain, ces États ne seront pas enregistrés comme terroristes, ni par l'Occident ni par l'ONU.
Cet article montrera que deux ensembles de vocabulaires sont utilisés pour décrire des actions identiques de deux parties belligérantes lorsque l'une est enregistrée comme terroriste. Ainsi, un point important de l'article est que les terroristes sont principalement ceux qui utilisent des actes incroyablement violents qui menacent l'ordre mondial existant tel que dirigé et servant les intérêts des États-Unis et de leurs alliés principalement occidentaux, ainsi que les valeurs présumées inhérentes aux démocraties libérales telles qu'elles ont évolué et été définies par les politiques de libre marché et les droits de l'homme.
L'utilisation des concepts dépend de leur contribution au soutien et au renforcement du pouvoir américain. Les États-Unis font souvent des déclarations de façade sur les valeurs démocratiques et les droits de l'homme. Ils appliquent un récit qui donne une image d'eux-mêmes comme leader des démocraties libérales, alors que la vérité est que les États-Unis ont des États clients parmi les monarchies médiévales, les juntes militaires, les autocraties présidentielles et les démocraties libérales.(4) Lorsque les États-Unis et leurs alliés catégorisent un acte comme terroriste, ils sont conscients de la connotation péjorative du terme et comprennent que son utilisation condamne et délégitimise tout motif politique que l'acte cherche à promouvoir, même lorsqu'un monde plus juste et égal pour tous fait partie des valeurs centrales de la mission du soi-disant terroriste.
Ce type d'étiquetage négatif s'applique au cas du Hamas, qui, au fil des années, est devenu le principal parti de résistance luttant pour la libération des Palestiniens dans la Gaza occupée et en Cisjordanie. Le Hamas est devenu un combattant contre une force d'occupation israélienne contrôlant la vie quotidienne des Palestiniens. En l'absence d'une définition générale du terrorisme, nous soutiendrons que ceux qui enregistrent un acte comme terroriste le font sur la base d'intérêts opportunistes et nationaux servant à préserver l'hégémonie américaine et à assurer le soutien aux alliés tout en brisant et en rendant difficile l'établissement d'alliances entre pays opposés à cette hégémonie.
La catégorisation de l'organisation Hamas comme terroriste conduit automatiquement à des attitudes négatives envers ses activités malgré sa base de popularité parmi le peuple qu'elle défend. Nous soutiendrons que les médias exploitent ce fait pour des raisons commerciales plutôt que de présenter l'acte dans son contexte politique, historique et socio-économique pour permettre au public de mieux comprendre l'importance de l'événement.
De plus, nous soutiendrons qu'il n'y a pas de différence entre le terrorisme commis par des acteurs étatiques et non étatiques en ce qui concerne le ciblage des civils et la cruauté des méthodes appliquées. S'il y a une différence, elle apparaît dans l'ampleur de la violence et le nombre de victimes touchées. Des États comme Israël ont accès à des armements modernes et avancés. Ce sont les méthodes, et non les acteurs, qui doivent déterminer si un acte doit être qualifié de terroriste. Nous pensons que les acteurs commettant un soulèvement violent contre un ennemi occupant sont justifiés, surtout en dernier recours lorsque d'autres approches plus pacifiques ont été épuisées.
Les acteurs étatiques commettant des actes similaires doivent être condamnés et sanctionnés, car un État comme Israël dispose des ressources et de la technologie pour protéger les civils. Cet article vise à refléter la compréhension d'une communauté qui a été opprimée et menacée dans son identité au point d'être convaincue que le seul moyen restant d'affirmer sa dignité est de commettre un acte violent contre la force occupante et ceux qu'elle représente, qu'il s'agisse de civils ou de représentants du régime. On dit parfois que la rébellion violente est justifiée, ou que son atrocité morale est rectifiée, par le manque d'alternatives.
Le 7 octobre 2023, une attaque violente a eu lieu contre les agences militaires et de sécurité israéliennes. Au moment de cette rébellion contre un ennemi occupant, certains civils ont été blessés, d'autres tués, tandis que d'autres encore ont été pris en otages. Il n'entre pas dans le cadre de cet article de déterminer l'innocence des civils impliqués dans l'attaque. Ces civils innocents étaient-ils des dommages collatéraux, comme les Américains appellent les victimes innocentes des guerres ? La conscience des atrocités de l'État d'Israël contre les Palestiniens rend-elle les civils complices ? Aucun Israélien ne peut ignorer que 750 000 Palestiniens ont été expulsés de leurs terres en 1948 pour être remplacés par de nouveaux arrivants juifs dans les territoires palestiniens. Depuis lors, les Palestiniens ont soit été occupés par Israël, soit vécu comme des citoyens de seconde classe dans un État d'apartheid. L'événement de 1948 a été nommé la Nakba - la catastrophe.
Le Hamas devrait-il s'abstenir de soulèvements violents en tant que seul parti de résistance de facto ? Ne serait-ce pas comme abandonner tout espoir de libération ? Le discours sur le droit d'Israël à se défendre dissimule la croyance que les actes terroristes commis par les États sont considérés comme moralement défensifs. Nous soutiendrons qu'une position similaire s'applique aux mouvements de libération luttant pour l'établissement d'une souveraineté et d'une libération nationale, comme le fait le Hamas. Nous pensons que la violence exercée par le Hamas est d'une nature différente de celle qui, par exemple, a été perpétrée par le groupe somalien al-Shabaab lorsqu'il a tué plus de 700 étudiants à l'Université de Garissa au Kenya en 2015.
Le poids de l'étiquette terroriste
Avec plus de 200 définitions du terrorisme, il n'est pas étonnant qu'aucun accord n'existe sur une définition générale. Par conséquent, les sentiments subjectifs et les motivations de l'agent enregistreur jouent un rôle essentiel dans la catégorisation des individus, des organisations et des États comme terroristes. Le terme "terroriste" devient une partie de l'arsenal pour combattre un ennemi. On peut douter de l'utilité d'enregistrer une entité comme terroriste lorsqu'on constate que les États-Unis sont le pays le plus actif pour proposer et décider qui est terroriste.
Lorsqu'ils enregistrent une entité comme terroriste, les États-Unis obligent leurs alliés à adopter et accepter cet enregistrement. Les États-Unis appliquent des sanctions négatives contre les pays qui ignorent la catégorisation terroriste. Les implications d'être enregistré comme terroriste ou sponsor du terrorisme ont un coût élevé. On estime que le revenu par habitant de Cuba est d'un tiers ou d'un quart de ce qu'il serait sans les sanctions américaines contre un État sponsor du terrorisme.
Le point de vue idéologique du Bureau du contre-terrorisme du Département d'État américain façonne la signification du terrorisme. Ce département enregistre un parti politique comme terroriste et ignore le contexte quand c'est le plus opportun pour les États-Unis. La guerre actuelle au Moyen-Orient entre le gouvernement démocratiquement élu du Hamas à Gaza et Israël ignore le fait que l'attaque du Hamas contre le sud d'Israël le 7 octobre 2023 était une réponse à l'occupation israélienne et au blocus de Gaza, qui est devenue la plus grande prison à ciel ouvert du monde sans issue pour les prisonniers.
Le Hamas a relancé une guerre de libération qui, selon le DIH, constitue une cause légitime de résistance violente lorsque toutes les autres options ont été explorées. Ainsi, le droit de résister à une occupation illégale est un droit protégé et essentiel des peuples occupés partout. Nous pensons que toutes les approches, y compris diplomatiques, ont été tentées depuis qu'Israël a occupé en 1967 ce qui restait de la Palestine après la création d'Israël en 1948.
Tous les efforts vers une solution permettant aux deux peuples de vivre côte à côte ont échoué. Avant le 7 octobre, la libération palestinienne de l'occupation israélienne avait progressivement perdu son urgence en tant que priorité politique au sein de la communauté internationale. La réponse d'Israël à l'événement du 7 octobre 2023 a suscité une sympathie mondiale pour la guerre de libération du Hamas, et les yeux du monde se sont concentrés sur Gaza et finalement aussi sur le Liban.
Pratiquement toutes les parties, acteurs étatiques et non étatiques, opposées à la domination mondiale des États-Unis et de leurs alliés, et particulièrement à la présence de ces puissances au Moyen-Orient, finissent par être enregistrées comme terroristes ou sponsors du terrorisme. Un tel enregistrement présente plusieurs avantages pour les États-Unis. Cela leur permet d'apporter un soutien indéfectible à l'ennemi du terroriste déclaré. La cible de l'État terroriste sera désormais moralement justifiée d'appliquer des moyens non démocratiques pour vaincre l'agent terroriste. Il s'ensuit également que le soutien des États-Unis à l'ennemi enregistré comme terroriste, tel que le Hamas et le Hezbollah, conduit à des demandes accrues de livraisons d'armes. Depuis le début du siècle, la guerre contre le terrorisme a signifié un profit important pour les fabricants d'armes transnationaux.
Les désaccords sur une définition internationalement acceptée du terrorisme vont probablement se poursuivre, principalement parce que cela donne un pouvoir considérable à l'acteur qui enregistre. Pour cette raison, il a été avancé que le terrorisme est un terme bien trop précieux pour les gouvernements des démocraties libérales pour être contrôlé et défini de manière adéquate.
Le privilège d'Israël de tuer
La réaction parmi les démocraties libérales occidentales se considérant comme alliées d'Israël a parlé d'une seule voix : Israël a le droit de se défendre. Cela implique en fait qu'Israël peut utiliser tous les moyens de la guerre moderne pour vaincre son ennemi. Une "démocratie" doit se protéger contre les terroristes, même lorsque l'étiquette est appliquée à un mouvement luttant pour la libération nationale.(5) À l'exception du gouvernement turc, aucun leader du monde politique occidental n'a parlé des droits des Palestiniens à résister à une occupation illégale.
Les dirigeants occidentaux et les médias qui les soutiennent nous ont fait croire que le Hamas, en entrant dans le sud d'Israël à pied ou à moto avec des armes légères, était une menace pour l'existence de l'État d'Israël. Le Hamas n'a pas d'armée moderne, pas de force aérienne, pas de marine, pas de systèmes de défense aérienne et pas d'armes nucléaires, contrairement à Israël. On a dit à la Palestine, y compris la bande de Gaza, d'accepter de vivre à Gaza dans des conditions de camp de concentration, d'accepter la marginalisation, les blessures, l'injustice et l'humiliation pour toujours. On a débattu pour savoir si Israël occupait Gaza puisqu'il n'y avait, jusqu'au 7 octobre 2023, aucune troupe israélienne sur le terrain. Israël a légalisé les colonies juives internationalement illégales en Cisjordanie avec l'objectif apparent de rendre finalement impossible une solution à deux États.
Au cours de la dernière année, des manifestations de masse dans les grandes villes du monde ont commencé à faire évoluer le récit. Face à la destruction de zones résidentielles à Gaza au-delà de toute réparation, le droit d'Israël à se défendre sonne de plus en plus creux. La question a été soulevée quant à la raison d'être de l'attaque du Hamas le 7 octobre. "Pourquoi ont-ils sacrifié leurs vies, celles de leurs familles et amis, et celles du reste des Palestiniens à Gaza ? Pourquoi ont-ils décidé d'affronter l'une des armées les plus puissantes du monde, en utilisant les armes les plus élémentaires ?"(6)
La réponse la plus probable est que l'attaque contre Israël était un appel désespéré au monde pour obtenir de l'aide. Malgré de nombreuses résolutions de l'ONU ignorées par Israël et le gouvernement américain, l'occupation dure maintenant depuis 1967. L'acte du Hamas le 7 octobre devrait être considéré comme peut-être le dernier appel au monde pour attirer l'attention sur les conditions inhumaines dans lesquelles ils ont dû vivre pendant des décennies.
Pas de place pour deux États
L'application du terme "terroriste" au parti Hamas élu de Gaza exclut pratiquement la possibilité d'un État indépendant pour le peuple palestinien, puisque l'influence de l'Autorité palestinienne et du parti Fatah est presque inexistante et n'a aucun poids face à l'occupation israélienne. La résistance la plus importante à l'occupation israélienne est celle fournie par le Hamas. Il est donc devenu impératif pour le gouvernement israélien d'éliminer le Hamas et, avec lui, tous ses partisans de la population de Gaza et un nombre croissant de partisans en Cisjordanie.
Toute la carrière de Netanyahu a été consacrée à écraser les espoirs d'un État palestinien indépendant et à protéger les acquis du mouvement des colons de droite israéliens, sa base politique principale. Pour ce faire, il a dû repousser la pression de l'Europe occidentale. Il utilise l'héritage de l'Holocauste et joue les pays d'Europe de l'Est et centrale contre les vieux pays d'Europe occidentale, tels que la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne. Le Premier ministre hongrois a été parmi les premiers dirigeants européens à s'opposer à la décision de la CPI. Il a déclaré que Netanyahu serait le bienvenu à Budapest. Il n'aurait rien à craindre en s'y rendant. Le Premier ministre israélien est un grand héros dans certains de ces pays nationalistes et xénophobes qui ne veulent pas d'immigration musulmane. Netanyahu est un héros pour ces dirigeants d'Europe centrale parce qu'il ne se laisse pas bousculer par les autres.
Lorsque Netanyahu a été mis au défi de former un nouveau gouvernement en 2022, il a dû promettre à la droite religieuse qu'il serait, le moment venu, sous réserve du "timing" et des intérêts internationaux d'Israël, favorablement disposé à l'annexion de la Cisjordanie et de Gaza. Une autre étape cruciale vers l'annexion de la Cisjordanie a été le transfert du contrôle de l'armée israélienne à l'administration civile au sein du Ministère de la Défense. Le transfert de l'autorité en Cisjordanie du contrôle militaire au contrôle civil est considéré comme une étape d'escalade vers l'annexion.
Puisqu'une seconde Nakba est devenue impossible à mettre en œuvre, les pays voisins refusant d'accepter les réfugiés palestiniens, il s'ensuit que le meurtre de masse et le génocide offrent des solutions possibles pour éviter la création d'un État palestinien indépendant et permettre l'annexion de la Cisjordanie et de Gaza dans un Grand Israël aux frontières de la Palestine biblique. Le gouvernement israélien et ses porte-parole ont, à de nombreuses reprises après l'attaque du Hamas du 7 octobre, suggéré que les Palestiniens doivent quitter leurs résidences actuelles. Le Premier ministre israélien a même déclaré, dans une interview, qu'il est temps que les Palestiniens cessent de rêver à leur propre État.
Le Jewish Currents a souligné ceci : "Le fait est qu'Israël a une politique concertée pour avoir le plus de terres possible avec le moins de Palestiniens possible - on y arrive de deux façons : le nettoyage ethnique et le meurtre. Et principalement, il a emprunté la première voie, avec des processus de coercition, pour pousser les gens à partir. Cependant, nous voyons maintenant la seconde ; il y a un effort délibéré pour au moins réduire la population à Gaza, pour 'liquider le ghetto'."(7) Dans la planification de la guerre, Israël officiel ne laisse aucune place à une solution à deux États. Par conséquent, il vise à chasser les Palestiniens par tous les moyens, même par des mesures terroristes et génocidaires, de Gaza et de Cisjordanie. Il est devenu évident que les Palestiniens paient le prix de l'Holocauste commis par les Européens.
Le moindre de deux maux
Les pays qui soutiennent des organisations terroristes sont souvent sanctionnés négativement par les puissances occidentales, généralement à l'initiative des États-Unis. L'enregistrement d'une nation entière comme sponsor du terrorisme sert l'impact voulu de bloquer les alliances contre les intérêts américains. Cette arme a été utilisée contre la Libye de Kadhafi, qui a été accusée à plusieurs reprises de financer le terrorisme international, en particulier les groupes luttant pour la libération de la Palestine. Aujourd'hui, l'accusation de parrainage du terrorisme international est le plus fortement adressée à l'Iran, considéré comme essentiel pour la survie et le fonctionnement du Hamas et du Hezbollah. Par conséquent, il a été enregistré comme un État parrainant le terrorisme.
Les États-Unis ont également inclus la Corée du Nord et Cuba sur la liste des quatre États parrains du terrorisme. À l'exception du Corps des Gardiens de la révolution islamique iranien (CGRI), la communauté internationale et l'ONU n'appliquent pas le concept de terroristes aux armées nationales, même lorsqu'une armée est issue d'organisations terroristes et continue de commettre des actes terroristes, comme c'est le cas de l'armée israélienne. Le CGRI a été classé comme organisation terroriste étrangère en 2019 par le président Trump. C'était la première fois que des agents de sécurité d'un État étaient déclarés terroristes. Le CGRI compte 190 000 soldats avec des liens en Afghanistan, en Irak, au Liban et dans les territoires palestiniens.
L'hypocrisie de l'enregistrement d'un ennemi avec un terme chargé de valeur comme terroriste devient apparente lorsqu'on examine d'autres guerres impliquant les États-Unis. Nous nous souvenons des atrocités commises par l'armée américaine au Vietnam, où elle a utilisé des bombes au napalm sur des villages soupçonnés de collaborer avec l'ennemi communiste du Vietcong. L'armée américaine a pulvérisé des champs entiers avec des agents orange - un pesticide - rendant ainsi impossible la culture de produits alimentaires. Le principe derrière ce type de terrorisme d'État commis par le leader du soi-disant monde libre semble être "le moindre de deux maux" - être communiste est un mal, et le moindre mal est d'être tué.
Le terrorisme d'État n'est pas nouveau pour les pays occidentaux. Considérez quand les forces alliées pendant la Seconde Guerre mondiale ont entrepris des raids aériens sur Hambourg (1943) et Dresde (1945), avec des victimes civiles de 40 000 et 25 000 respectivement. Ces raids terroristes ont été commercialisés comme nécessaires et jugés moralement justifiés. On supposait que l'objectif délibéré de tuer des civils allemands contribuerait à mettre fin à la guerre et ainsi réduire la souffrance globale. Les mouvements de résistance dans les pays occupés par l'Allemagne nazie ont toujours été considérés comme des combattants de la liberté, même lorsque des civils innocents étaient parmi les victimes. Peut-être que les générations futures jugeront l'acte du Hamas du 7 octobre 2023 d'une perspective différente s'il finit par aboutir à la libération des Palestiniens de l'occupation inhumaine et illégale d'Israël.
Les médias et le terrorisme
L'importance des médias dans la formation de nos opinions et positions politiques est souvent sous-estimée, en particulier par ceux qui sont sous leur influence. La plupart des individus aiment croire qu'ils ont une vision critique des nouvelles qui leur sont présentées. Après tout, la presse opère dans des communautés qui prétendent pratiquer le principe de la liberté d'expression. Cependant, les décideurs sont souvent prêts à agir sur la base d'informations non vérifiées. Ainsi, lorsque Reuters et d'autres agences de presse ont rapporté que des supporters de football israéliens avaient été brutalement battus par des groupes pro-palestiniens aux Pays-Bas, où un match avait été joué début novembre 2024 entre des clubs israéliens et néerlandais, les chefs d'État, des États-Unis au petit Danemark, se sont empressés de déclarer que cela leur rappelait les pogroms subis par les Juifs européens. Après quelques jours, il s'est avéré que les supporters juifs avaient provoqué les troubles.
Un exemple de l'impact silencieux mais constant des médias apparaît dans deux enquêtes menées sur 75 ans. Un échantillon de citoyens français a été interrogé à la fin de la Seconde Guerre mondiale sur qui, selon eux, avait principalement contribué à la chute de l'Allemagne nazie. En 1945, 57% ont répondu que la défaite allemande était due à l'Armée rouge de l'URSS, et seulement 20% l'ont attribuée aux armées des États-Unis et de leurs alliés. Lorsque la même question a été posée en 2024, 60% ont répondu que c'était grâce à l'armée américaine, et seulement 25% ont reconnu la contribution de l'URSS.(8)
Lorsque les médias racontent l'histoire d'un groupe qui, selon le Bureau du contre-terrorisme américain, a été enregistré comme terroriste étranger, cela conduit rarement à comprendre les motifs de ceux qui commettent l'acte. La plupart des descriptions laissent le public dans un état émotionnel d'horreur et de panique. La position de la population générale se retourne presque automatiquement contre les agresseurs, qui ne peuvent que réagir à une agression en cours, comme une occupation illégale de leur terre patrimoniale. Cette attitude exclusivement négative envers ceux qui commettent des actes violents affecte également les politiciens qui sont censés chercher des solutions mais échouent à cause des préjugés créés par les médias. La même presse décrit en termes horrifiques les actes du Hamas mais dresse une image glamour de l'armée israélienne comme défenseurs de l'État démocratique d'Israël.
Le rôle trompeur des États-Unis
Depuis le 7 octobre 2023, les événements n'ont fait que renforcer l'image des États-Unis comme une nation aux doubles standards. Les mandats d'arrêt émis par la CPI contre un leader du Hamas, le Premier ministre israélien et son ancien ministre de la défense le 21 novembre 2024 impliquent les États-Unis et l'UE. Les États-Unis n'ont à aucun moment montré une volonté de retenir l'aide ou la livraison d'armes à Israël lorsqu'il est devenu apparent pour tout observateur de la guerre qu'Israël visait à diminuer le nombre de Palestiniens.
Au lieu de cela, ils ont opposé leur veto à quatre résolutions de cessez-le-feu au Conseil de sécurité de l'ONU pour permettre à Israël de poursuivre ses interventions génocidaires. Le secrétaire d'État américain a entrepris de nombreuses missions au Moyen-Orient pour convaincre la communauté internationale des intentions pacifiques et qu'il était un médiateur impartial. La vérité est qu'il agissait comme l'avocat et le porte-parole d'Israël auprès des voisins arabes d'Israël, les encourageant à recevoir des réfugiés palestiniens de Gaza.
Le rôle des États-Unis et de leurs soutiens occidentaux est pire que la complicité. Ils ont été activement impliqués avec les États-Unis aux commandes. Les États-Unis et la Grande-Bretagne ont fourni des informations de renseignement essentielles, tandis que d'autres, comme les Pays-Bas et le Danemark, ont fourni du matériel militaire. Ainsi, les mandats impliquent, par exemple, ces deux derniers gouvernements pour violation de leurs lois nationales, qui interdisent les exportations d'armes vers des pays impliqués dans des activités de guerre criminelles. Ce soutien a permis à Israël de poursuivre sa guerre génocidaire en toute impunité. On peut donc conclure avec une grande certitude que le gouvernement américain a activement soutenu Israël dans sa guerre génocidaire contre les Palestiniens. Les mandats de la CPI vont très probablement perturber le discours sur le droit d'Israël à l'autodéfense parmi ses partisans indéfectibles des pays de l'UE.
Briser l'identité terroriste avec le rêve américain
Pour mieux comprendre comment les États-Unis perçoivent leurs relations avec Israël dans le contexte de leur guerre commune contre le Hamas, nous devons identifier les valeurs sous-jacentes de la guerre américaine contre la terreur telles qu'elles ont été reconnues par la Commission du 11 septembre établie par l'ancien président américain George W. Bush.(9) Jusqu'à aujourd'hui, c'est la tentative la plus complète d'analyser les causes du terrorisme. Le rapport suggère que les enfants et les jeunes du monde entier, en particulier dans le monde musulman, devraient être éduqués sur l'excellent exemple des États-Unis, régis par la dignité et les valeurs démocratiques.
Les conclusions ont ignoré l'inégalité caractérisant les pays dominés par les politiques de libre marché. Le libre marché est la solution pour la paix et le développement et surtout l'instrument par lequel le terrorisme et la violence politique devraient être combattus. Une nouvelle génération grandira reconnaissante envers les États-Unis pour leur avoir donné espoir et opportunités. Les résultats et conclusions de la Commission du 11 septembre nous informent également sur les raisons pour lesquelles le Bureau du contre-terrorisme est plus enclin à rechercher des terroristes dans les pays musulmans, que l'Occident politique considère comme autoritaires. Les musulmans individuels et les organisations islamiques sont surreprésentés dans le registre tenu du Bureau.
Dans cet essai, nous avons montré que l'étiquette terroriste appliquée à un parti comme le Hamas et à un peuple comme les Palestiniens ne contribuera pas à jeter les bases d'une coexistence pacifique avec les Israéliens. Au contraire, le terme a encouragé Israël et ses alliés à appliquer des moyens disproportionnés et génocidaires pour exterminer les Palestiniens, qu'ils fassent partie ou non du Hamas. Comme nous l'avons montré ici, le terme terroriste est utilisé à des fins politiques pour indiquer qui est apprécié et qui est l'ennemi. Nous pensons qu'aucune solution finale n'apparaîtra tant que les mouvements de libération, comme le Hamas, ne seront pas mentionnés sans l'épithète de "terroriste".
L'OLP de Yasser Arafat et l'ANC de Nelson Mandela étaient initialement tous deux enregistrés comme organisations terroristes. Lorsque ces groupes ont été dissociés de l'étiquette terroriste, ils ont pu dialoguer d'égal à égal avec leurs voisins et ennemis. Le seul vestige du parti Fatah d'Arafat est l'Autorité palestinienne, qui a aujourd'hui été réduite à une agence d'exécution des forces israéliennes occupant la Cisjordanie. C'est contre cette organisation mourante que le Hamas a pu obtenir le gouvernement de Gaza. Nous pensons qu'il ne sert à rien pour un règlement pacifique de l'avenir des Palestiniens de les chasser de leur terre ancestrale sur la base de l'étiquette terroriste.
L'obstacle le plus critique à cette déclassification est l'attitude agressive de la superpuissance mondiale, les États-Unis, qui continuent de croire qu'ils doivent fixer les normes pour la planète entière. Plus important encore est la capacité et la volonté d'agir selon les valeurs qu'ils prétendent promouvoir. L'intervention violente du Hamas entreprise avec d'autres groupes de résistance dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023 a mis la question de l'avenir de la Palestine au premier plan de l'attention de la communauté internationale. Ce faisant, elle nous a tous amenés à mieux comprendre ce que représentent les États-Unis et leur acolyte, Israël. Pendant la présidence de G.W. Bush, le terme "États voyous" est apparu.(10)
Initialement, il était principalement appliqué à la Corée du Nord, à Cuba, à l'Iran, à l'Irak et à la Libye, qui étaient considérés comme des menaces pour les politiques et économiques des États-Unis et de leurs alliés. Si nous élargissons le groupe et définissons un État voyou comme celui qui menace la paix mondiale, nous serons obligés de mettre les États-Unis et Israël en tête de la liste des États voyous.
Notes
1 Hamas est l’acronyme de Harakat al-Muqawama al-Islamiya (« Mouvement de résistance islamique »). En 2005, Israël s’est retiré de Gaza. L’Autorité palestinienne a convoqué des élections l’année suivante et le Hamas a remporté la majorité des sièges au parlement, battant ainsi le Fatah, le parti de l’Autorité palestinienne, qui a continué à gouverner la Cisjordanie.
2 La CPI, basée à La Haye, cherche à enquêter sur les responsables de crimes graves tels que le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre et à les poursuivre.
3 Le 28 décembre 2023, plusieurs factions de la résistance, dont le Hamas, le FPLP (Front populaire de libération de la Palestine), le JIP (Mouvement du Jihad islamique palestinien), le FDLP (Front démocratique de libération de la Palestine) et le FPLP_GC (Front populaire de libération de la Palestine – Commandement général), ont publié une déclaration commune à Beyrouth.
4 Imperium Uncloaked, critique de Grey Anderson dans NLR n° 147 (mai/juin 2024) de Someone Else's Empire : British Illusions and American Hegemony de Tom Stevenson, Londres et New York, 2023.
5 The Cant about Israel's Right to Self Defense , par M. Reza Behnam, 23 août 2024, dans Z-Network.
6 An Essential Question Still Unanswered, par Cesar Chelala dans Counterpunch, 11 novembre 2024.
7 Arielle Angel : Leaving Zion, dans une interview à New Left Review, n° 148, 2024 (elle est la rédactrice en chef du magazine juif-américain Jewish Currents).
8 L'histoire face aux manipulateurs, par Benoît Bréville (Le Monde diplomatique, n° 847, octobre 2024).
9 Rapport de la Commission du 11 septembre. Rapport final de la Commission nationale sur les attaques terroristes aux États-Unis, juillet 2004.
10 Certains théoriciens internationaux utilisent le terme « État voyou » pour décrire les États qu'ils considèrent comme une menace pour la paix mondiale. La définition d'un État voyou est déterminée exclusivement par le gouvernement américain et inclut principalement les pays qui soutiennent le terrorisme.