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25 novembre 2024
Culture
L’UNESCO OUVRE SES CIMAISES A FATOU KINÈ DIAKHATÉ
L’artiste sénégalaise Fatou Kiné Diakhaté expose à l’UNESCO, à Paris, ses œuvres créées dans sa chambre médicalisée qu’elle a transformée en atelier pour vaincre sa souffrance. Quelle force ! Quelle résilience ! Quel talent ! Quelle résilience !
L’artiste sénégalaise Fatou Kiné Diakhaté expose à l’UNESCO, à Paris, ses œuvres créées dans sa chambre médicalisée qu’elle a transformée en atelier pour vaincre sa souffrance. Quelle force ! Quelle résilience ! Quel talent ! Quelle résilience !
La plasticienne sénégalaise, atteinte d’une maladie handicapante et alitée depuis bientôt 10 ans, a réalisé une cinquantaine de toiles semi-abstraites dont elle espère qu’elles l’aideront à guérir et à démontrer que la peinture peut être une thérapie.
Les nouvelles œuvres de Fatou Kiné Diakhaté avait fait l’objet d’une exposition virtuelle prévue pour un mois et dont le vernissage avait été organisé le 6 juillet 2021 au centre médicalisé Robert Doisneau, situé dans le 18e arrondissement parisien. Cette exposition intitulée "Rencontre d’âme d’art" ou "Daje Ruu Ak Fentt", en langue nationale wolof, est le fruit d’une collaboration avec la peintre et psychothérapeute française Sophie Vincendeau.
Sa tenue en juillet, "mois du handicap", avait une portée symbolique qui se mesure à la volonté de l’artiste de "marquer un nouveau départ" et d’en finir avec une maladie "handicapante et douloureuse" depuis plusieurs années.
REFLEXION SUR LA CREATION CONTEMPORAINE AFRICAINE
Associer la production artistique et la réflexion sur cette production : c’est l’un des objectifs du colloque de trois jours qui se déroule depuis lundi, à l’auditorium du Musée des Civilisations noires de Dakar
Associer la production artistique et la réflexion sur cette production : c’est l’un des objectifs du colloque de trois jours qui se déroule depuis hier, à l’auditorium du Musée des Civilisations noires de Dakar. Commissaires d’expositions, historiens de l’art, universitaires posent ainsi un discours théorique et analytique sur le thème de la Biennale.
Devenue un rendez-vous ¬culturel de premier ordre depuis plusieurs décennies, la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar, le Dak’Art, met en scène la vitalité de la création contemporaine africaine en art plastique et la promeut. Comme pour les précédentes éditions, le colloque de la 14ème édition s’inscrit dans le thème général du Dak’Art 2022 «I Ndaffa». Un concept qui en langue sérère invite à forger et interpelle les imaginaires africains. Selon Felwine Sarr, président du Comité scientifique de cette 14ème édition, le terme énonce aussi bien la liberté de transformer que les multiples possibilités de créer. Aussi, dit-il, l’édition 2022 de la Biennale de Dakar, invite à la transformation des concepts et à la fondation de nouveaux sens. «Forger renvoie à l’acte de transformer une matière, le plus souvent métal. Et dans plusieurs langues, il eut le sens aujourd’hui tombé dans l’oubli de créer, d’imaginer et d’inventer», a expliqué Felwine Sarr, hier lors de l’ouverture du colloque scientifique de la Biennale. D’après lui, il s’agit donc de construire de nouvelles écritures plastiques, de nouveaux savoirs et savoir-faire, qui intègrent les lectures africaines, aux fins de forger des regards et outils susceptibles d’aider à relever les défis contemporains et aboutir ainsi à la construction sans cesse renouvelée d’un sens permettant de mieux appréhender la complexité du monde.
Ce colloque de trois jours regroupe des commissaires d’expositions, des historiens de l’art, des universitaires et intellectuels venant d’Afrique et d’Europe. Ces derniers ont profité de ce cadre pour alimenter la réflexion en explorant la thématique sur les grammaires de la création contemporain africaine. «Forger de nouvelles approches de l’histoire de l’art au 21ème siècle, c’est reconsidérer les contextes d’émergence du savoir qui le fonde», analyse Felwine Sarr qui estime que les histoires culturelles africaines n’ont pas suffisamment informé l’appréciation des objets esthétiques de l’art contemporain. «Il s’agit aussi de repenser et donc de réorganiser les temporalités traditionnelles liées à l’histoire de l’art, en y intégrant des temps composites et non linéaires de l’historiographie africaine», poursuit-il tout en précisant que demain (aujourd’hui), la question du patrimoine et celle de l’archive surtout, celles qui viennent du continent africain sera à l’ordre du jour des tables rondes. «Mais la question que l’on va se poser c’est : est-ce qu’on peut constituer une archive pour le présent et le futur ?» Et en se posant la question, comment peut-on réinventer le patrimoine, le débat sur la restitution des biens culturels refait surface mais la question centrale, dit-il, ce sont les liens avec les droits de l’Homme, avec l’histoire, la lutte contre le racisme et toutes les questions sociétales.
«Ce sont les commentaires esthétiques des Africains sur leur histoire qui en feront un art ¬universel»
Lors d’un premier panel ¬portant sur les grammaires de la création contemporain africaine, Mamadou Diouf, professeur d’histoire à l’université de Columbia, et spécialiste de l’Empire coloniale français, souligne que ce colloque est d’autant plus intéressant que les réflexions portent sur des projections et inscrivent l’Afrique dans des discussions globales. «Ce n’est pas seulement comprendre la production historique, artistique mais c’est aussi comprendre comment cette production artistique se présente dans le monde d’aujourd’hui», a ¬rappelé l’historien sénégalais. Mamadou Diouf d’estimer que dans la peinture, les arts plastiques, ce qui est important, c’est comment inscrire la production plastique africaine ou la sortir. «Est-ce qu’il y a des continuités et des discontinuités ? C’est dans ce jeu que le contemporain est confronté et qu’il est produit», a-t-il ajouté.
Pour le professeur de l’université de Columbia, ce sont les commentaires esthétiques des Africains sur leur histoire propre qui en feront un art universel. Cette première session a enregistré la participation de Gayatri Spivak, professeur à l’université de Columbia et ¬spécialiste indienne de la critique littéraire, de Malick Ndiaye, Secrétaire général de la Biennale, et Henry Nkoumo, directeur du Livre, des arts plastiques et visuels au ministère de la Culture et de la francophonie en Côte d’ivoire.
L'ACTRICE CHAFIA BOUDRAA N'EST PLUS
La célèbre actrice algérienne Chafia Boudraa, figure du cinéma et théâtre en Algérie qui avait notamment joué dans le thriller politique « Hors-la-loi » présenté en compétition au festival de Cannes en 2010, est décédée à l’âge de 92 ans
La célèbre actrice algérienne Chafia Boudraa, figure du cinéma et théâtre en Algérie qui avait notamment joué dans le thriller politique « Hors-la-loi » présenté en compétition au festival de Cannes en 2010, est décédée à l’âge de 92 ans, ont rapporté lundi les médias d’Etat.
Chafia Boudraa, née à Constantine en 1930 et veuve d’un combattant du FLN mort durant la guerre d’Algérie en 1960, était connue pour ses rôles dans des longs métrages cultes tels que El Hariq et L’Evasion de Hassan Terro. Elle est morte dimanche à Alger.
Lors d’une riche carrière de plus cinquante ans, elle avait aussi joué dans le film « Hors-la-loi » de Rachid Bouchareb, qui avait représenté l’Algérie au festival de Cannes en 2010. Dans ce thriller politique qui suit le destin de trois frères déchirés par la guerre d’Algérie, elle a interprété le rôle de la mère. Le film avait suscité une vive controverse en France, l’extrême droite et des associations de rapatriés d’Algérie l’accusant de « falsifier » l’Histoire.
Le décès de Chafia Boudraa est survenu quelques jours après celui, vendredi, d’un autre monument du cinéma algérien l’acteur et metteur en scène Ahmed Benaissa, qui avait joué le rôle du père dans « Hors-la-loi ». Ahmed Benaissa qui était à l’affiche de « Goutte d’Or », présenté à Cannes, y est décédé avant la projection du film dans le cadre de la semaine de la critique.
JOM OFFERT EN EXEMPLE
Le film "Jom" d'Ababacar Samb Makharam a été projeté dans le cadre de la saison culturelle 2022 de la compagnie théâtrale «Kaddu Yaraax». C’est sur initiative du Fonds d’archives africain pour la sauvegarde des mémoires que ce film a été projeté
Le film «Jom» de Ababacar Samb Makharam a été projeté dans le cadre de la saison culturelle 2022 de la compagnie théâtrale «Kaddu Yaraax». C’est sur initiative du Fonds d’archives africain pour la sauvegarde des mémoires que ce film a été projeté.
La saison culturelle de la compagnie Kaddu Yaraax se poursuit. Après le grand oral des frères Guissé, place à la projection du film Jom, de feu Ababacar Samb Makharam. Une projection de plus d’une heure à laquelle a assisté un public venu nombreux au pôle théâtre Kaddu Yaraax. Jom, qui signifie en wolof «dignité, honneur», est le titre de ce film de Ababacar Samb Makharam, qui campe son décor sur «l’opposition entre deux groupes de grévistes d’une grande fabrique, l’un mené par le radical Madjeumbe, l’autre par le modéré N’Dougoutte». Ce long métrage réalisé en 1981 met en avant l’incarnation de la mémoire africaine dans ses multiples facettes de résistance face à l’oppression. Une résistance affichée autant par le colonisé face au colonisateur, le domestique face au maître, que par le travailleur face au patronat.
«L’endurance, dans toute sa noblesse et sa splendeur, est ainsi représentée», peut-on lire à travers une note de presse. Les comédiens de renom, comme feu Abou Camara, ont pris part à ce film où Babacar Mbengue, maire de Hann Bel Air, a joué comme figurant dans une séquence. Enfant jouant avec ses camarades, un ballon entre les mains, cette scène a replongé l’édile dans son royaume d’enfance.
Le maire de Hann Bel Air, qui se souvient comme si c’était hier du tournage de ce film, a partagé ces moments avec le public. «40 ans après, on profite d’une nouvelle leçon», déclare Babacar Mbengue, étreint par l’émotion. Ce film est ainsi entrecoupé par une parenthèse historique relatant les hauts faits d’armes de Diéry Dior Ndella, dont la résistance face au colon est offerte en exemple. Dans l’histoire du Sénégal, les liens d’amitié entre Diéry et son ami, Sarithia Diéye, sont restés dans la postérité. Et c’est cette histoire que le griot rapporte à ces ouvriers en pleine grève et confrontés aux manœuvres de leur employeur.
Face à ceux qui trahiront la cause, ceux qui ont violé le pacte consistant à se montrer solidaires avec leurs camarades licenciés et dont la réintégration avait été un des motifs de la grève, le griot ramène la figure historique de Diéry Dior qui incarne l’honneur et la loyauté.
La projection de Jom est organisée en collaboration avec le Fonds d’archives africain pour la sauvegarde des mémoires dont l’objectif est la valorisation et la préservation du patrimoine culturel sénégalais et panafricain. Ce fonds a également pour parrain Ababacar Samb Makharam, pionnier du cinéma africain, co-fondateur du Fespaco et de la Fepaci, disparu en 1987.
DES ARTISTES AFRICAINS PARTAGENT LEUR VISION DU MONDE
Entre l’excision, les éléments, l’esclavage ou l’exploration de nos imaginaires, les 6 artistes béninois et la gabonaise, qui prennent part à l’exposition «Essence et Résilience» qu’abrite le siège d’Innov Africa, ont donné leur contribution à «I Ndaffa #
Entre l’excision, les éléments, l’esclavage ou l’exploration de nos imaginaires, les 6 artistes béninois et la gabonaise, qui prennent part à l’exposition «Essence et Résilience» qu’abrite le siège d’Innov Africa, ont donné leur contribution au thème de cette année, «I Ndaffa #» (Forger).
La scène se passe de mots. En pleine forêt tropicale, deux jeunes femmes sont assises à même le sol, jambes écartées. Une matrone officiant entre celles-ci pour leur faire subir une excision. L’image a été découverte par l’artiste gabonaise, Owanto, dans des affaires appartenant à sa famille. Choquée et interpellée par cette pratique, elle s’empare de ces images d’un autre temps certes, mais qui documentent une pratique encore en cours, pour la déconstruire et la dénoncer. «En tant que femme et mère, et en tant qu’artiste, je comprends que ces choses qui sont tombées dans mes mains ne sont pas là par hasard. Au lieu de les retourner dans le tiroir de l’oubli, je décide de les révéler au grand public», raconte l’artiste dont la participation à l’exposition Essence et Résilience qu’accueille le siège d’Innov Africa, sur une initiative de la fondatrice de la chaîne Edan, tourne autour de ce fléau qui touche encore 200 millions de femmes à travers le monde. Pendant le temps de la biennale, ce parcours off réunit, en un même lieu, 6 artistes béninois et une gabonaise. Cette dernière a axé son travail sur la dénonciation de l’excision. Des installations visuelles et sonores et des tableaux pour apporter plus de forces à toutes ces voix qui disent «Non à l’excision» en 24 langues.
L’artiste Owanto propose ainsi une démarche en plusieurs actes intitulée Flowers. Sur Flowers V, une toile monochrome en rose, au centre de laquelle une belle fleur attire l’attention. «Ces fleurs en porcelaine froide représentent la beauté, la fragilité et la renaissance de la femme. C’est une invitation à regarder et résoudre ce problème», souligne-t-elle. «Flowers est une excursion sensible dans le monde féminin de l’excision. Elle transcende l’expérience douloureuse de l’ablation, en magnifiant le corps soustrait de la femme avec ces fleurs en porcelaine posées sur le visage en souffrance ou sur les parties génitales mutilées. Ces fleurs délicates incarnent la beauté́, la douceur, la renaissance et la résilience», écrit à ce propos l’initiatrice de l’exposition, Eveline Diatta-Accrombessi.
A côté de cette proposition de l’artiste gabonaise, 6 artistes béninois, Julien Sinzogan, Dominique Zinkpe, Eliane Aisso, Eric Mededa, Soniart et Tchif, ouvrent leur imaginaire sur des tableaux ou sculptures. Sur la série que Zinkpe présente, entre sculpture et proposition picturale, l’artiste a axé son travail sur des questions existentielles. «L’âme et l’esprit ressembleraient à quoi ? Sur mes peintures, je cherche à m’approcher de cela puisqu’une photographie ne pourrait pas le faire. Mais moi, avec mes peintures, je cherche à accéder à cela», explique l’artiste en face d’une de ses toiles.
Cette réflexion sur l’identité africaine se retrouve dans chacune des œuvres présentées dans cette exposition. Quand Tchiff propose une symphonie de couleurs dans un travail axé sur les éléments, la jeune Soniart documente sa vie quotidienne, tandis que Sinzogan remonte le temps pour évoquer cette blessure encore béante qu’est l’esclavage. Au total, ces 7 artistes proposent un parcours authentique et diffèrent sur l’identité africaine, mais installent également des ponts entre les pays.
LES ARTISTES RUFISQUOIS MONTRENT LEUR «KADDU»
La ville vit au rythme de la Biennale depuis vendredi dernier. Le centre culturel Maurice Gueye accueille une exposition intitulée «Kaddu» dans le cadre des rencontres Off de laBiennaleDak’art 2022.
Le centre culturel Maurice Guèye de Rufisque abrite une exposition Off, dans le cadre de la 14e édition de la Biennale de Dakar. Le vernissage des œuvres de huit artistes, pour la plupart venus du département, sous le thème «Kaddu» a été une occasion pour ces artistes de se révéler au grand public. L’exposition a été ouverte vendredi dernier, en présence des autorités et des artistes de la ville.
L a ville de Rufisque vit au rythme de la Biennale depuis vendredi dernier. Le centre culturel Maurice Gueye accueille une exposition intitulée «Kaddu» dans le cadre des rencontres Off de laBiennaleDak’art 2022. Elle présente les œuvres d’artistes rufisquois invités à l’initiative de la Fondation Sococim. Les œuvres de huit artistes plasticiens sont offertes aux visiteurs, notamment aux férus des arts. Une exposition qui s’inscrit dans le cadre général et du thème choisi cette année, «INdaffa» qui signifie forger. Afin de rester dans le sujet de la Biennale, les organisateurs ont choisi le thème de «Kaddu» pour cette rencontre Off. «Kaddu» pour dire que la parole qui revêt une dimension importante dans la culture africaine avec sa puissance fondatrice ou sa dimension ontologique. A l’origine de la création, il y a la parole.
Ainsi, l’expo de Rufisque est en phase avec l’idée exprimée par le Président de la République dans son discours à l’ouverture de la 14ème édition de la Biennale. «Forger nous plonge dans la création, c’est-à-dire la capacité d’un individu ou d’un groupe à imaginer ou à construire et donner forme à un concept neuf, un objet nouveau ou à découvrir une solution originelle à un problème».
Expliquant le choix du thème, l’administratrice de la Fondation Sococim, notera que le «Kaddu» ou la parole tient un rôle important dans la dynamique de la refondation et de la réinvention d’un développement centré sur les valeurs culturelles africaines. «Kaddu, s’inscrit dans le thème général de cette Biennale pour dire que nous avons, les africains en général, besoin d’un travail de recréation, de réflexions pour aboutir à une autre forme de développement. Donc, tout cela s’inscrit dans cette perspective là et Kaddu, ça correspond aussi, puisqu’on dit aussi qu’au début de la création, il y a la parole, le verbe», a expliqué Patricia Diagne. Ainsi, diverses expressions artistiques ont été soumises à l’appréciation d’un public de connaisseurs et de profanes, avec les œuvres.
Des œuvres telles que la peinture acrylique sur toile de l’artiste Fatou Mandoye Mbengue ou encore les sculptures en bois de Ndimb de Maïmouna Ndoye et de Balla Niang. Pour sa part, l’artiste Kadidiatou Kanté originaire de Bakel a séduit avec ses œuvres en céramiques. Marie Ndione Cissé, Ibrahima Cissé Debs, Séverine Costes, et Samba Ndoye Ndiour, ont également marqué de leurs empreintes l’exposition avec leurs œuvres en technique mixte sur toile. Une belle mosaïque pour colorer la ville, le temps d’une exposition qui se poursuit jusqu’au 20 juin prochain. L’orchestra Baobab a joué également une belle partition avec un concert offert au public qui s’est poursuivi jusque tard dans la soirée du vendredi dernier.
JE COMBATS L'ASSIGNATION IDENTITAIRE
Avec « Marianne face aux faussaires », l’écrivaine Fatou Diome dénonce à la fois le racisme et les formes radicales d’antiracisme dans une langue acérée
Jeune Afrique |
Clarisse Juompan-Yakam |
Publication 22/05/2022
En 2017, en pleine période électorale, Fatou Diome publiait Marianne porte plainte !, un poème en prose qui interrogeait le concept d’identité nationale, son omniprésence dans le débat politique et les excès de ses défenseurs. Cinq ans plus tard, dans un contexte similaire, l’écrivaine franco-sénégalaise de 54 ans revient avec Marianne face aux faussaires, un essai incisif et inquiet sur la défense des valeurs républicaines, dans une France prise en tenailles entre identitaires xénophobes brandissant la menace du « grand remplacement » et militants antiracistes prisonniers d’un passé colonial qui dévoient la lutte qu’ils prétendent mener. Une France qui doit supporter leurs discours amers, tristes et déclinistes.
Dans une langue acérée, l’autrice, entre autres, du Ventre de l’Atlantique et de Celles qui attendent, qui dit écrire pour réparer son chaos intérieur, s’interdit de regarder sans broncher les loups dépecer la Constitution et la transformer. Forte de sa double identité, elle tente de dessiner une autre France, la vraie, qui véhicule des valeurs humanistes et lui donne envie de se sentir pleinement française et sénégalaise.
Jeune Afrique : Qu’est-ce qui justifie ce nouveau rendez-vous avec Marianne ? Votre coup de gueule de 2017 contre la cristallisation du débat autour de l’identité, l’islamophobie et l’instrumentalisation de la laïcité a-t-il échoué à apaiser le climat politique ?
Fatou Diome : Il y a cinq ans, l’extrême droite, déjà fort inquiétante, n’avait encore qu’une branche. Aujourd’hui, elle s’est ramifiée, et sa progression dans les urnes apparaît absolument effrayante. Marine Le Pen s’est « normalisée » aux yeux de nombreux Français alors même que ses thèses n’ont pas changé. Je pensais naïvement que la période agitée qui avait motivé la rédaction de Marianne porte plainte ! disparaîtrait. La situation s’est plutôt envenimée, un discours violent et identitaire décomplexé a envahi l’espace médiatique. Je veux marquer ma désapprobation. Comme disait mon grand-père, l’inertie hâte le naufrage, même à terre. Alors, je fais ce que je peux pour tirer la sonnette d’alarme.
Vous dressez le portrait des faussaires qui, selon vous, menacent la cohésion de la République. Qui sont-ils ?
Ils appartiennent à deux camps opposés, mais s’entretiennent et s’alimentent mutuellement. D’un côté, les loups de l’extrême droite qui hurlent fort leur détestation de l’altérité. Ils désignent sans vergogne des boucs émissaires – forcément Noirs ou Arabes – qu’ils tiennent pour responsables de tous les maux, et n’aspirent qu’à les voir chassés hors du territoire. Face à ces loups, les faux bergers. Piètres activistes, ils détournent le militantisme des causes honorables qu’il défend pour l’installer dans l’invective, la haine et l’agressivité, lesquelles sont dirigées non seulement contre les loups, mais aussi contre toutes les personnes qui ne partagent pas leurs points de vue ou leurs méthodes – et qu’ils considèrent comme des traîtres à la cause noire. Ces faux bergers s’accommodent tellement de l’idée d’être des victimes désignées qu’ils ne peuvent plus se départir de leur posture victimaire.
Comment l’obsession identitaire s’est-elle progressivement installée en France ?
Depuis mon arrivée en France, en 1994, le champ sémantique du discours politique n’a cessé d’évoluer. On est passé de la « fracture sociale » de Jacques Chirac, lors de la campagne présidentielle de 1995, à « l’identité nationale » de Nicolas Sarkozy, en 2007 et en 2017, puis au « grand remplacement » en 2022. Au fil des ans, à cause du terrorisme, on a stigmatisé tous les musulmans et évoqué la déchéance de nationalité. Et, parce que quelques Africains ne parvenaient pas à s’intégrer – souvent faute d’emploi ou de logement –, on a dénié aux autres leur nationalité française. Comment voulez-vous que celui à qui on répète à longueur de temps qu’il est un étranger développe un réel sentiment d’appartenance à la nation ?
Au cœur de l’université Cheikh Anta Diop, l’attention des étudiants est attirée depuis quelques jours par la sculpture et l’installation de l’artiste sénégalais, Ousmane Dia, «Ni Barsa ni Barsak»
Au cœur de l’université Cheikh Anta Diop, l’attention des étudiants est attirée depuis quelques jours par la sculpture et l’installation de l’artiste sénégalais, Ousmane Dia, «Ni Barsa ni Barsak». Pour sa première participation à la Biennale de Dakar, il s’est approprié l’espace universitaire pour dialoguer avec la jeunesse du pays.
En choisissant de planter une sculpture au cœur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), Ousmane Dia a certainement atteint son objectif de discuter avec la jeunesse du pays. Depuis que la haute structure a émergé au rond-point de la Faculté de droit, le défilé est incessant. Les étudiants, curiosité en bandoulière, auscultent la structure métallique sous toutes ses formes. Certains sacrifient même au rituel du selfie. Et ce mercredi, nombre d’entre eux ont pu discuter de vive voix avec l’artiste. Après la discussion, une photo de groupe pour sceller l’entente ou plutôt la convergence des idées. Dans le cadre de la 14e édition de la Biennale de Dakar, le programme Doxantu ramène l’art au cœur des places publiques.
Et pour Ousmane Dia, ce sera dans l’espace universitaire où l’œuvre est destinée à rester, à en croire le Recteur, Amadou Aly Mbaye. Une appropriation qui prend son sens dans les mots et le texte qui l’accompagnent. «On a un socle qui fait 4m de diamètre, on a une pirogue qui est en train de sombrer. J’ai capté ce moment précis où la pirogue commence à s’immerger. Il y a le sauve-qui-peut, beaucoup de personnages autour qui vont dans tous les sens et, en haut de la pirogue, j’ai mis un enfant et un adulte. L’un pointant le doigt vers l’Occident et l’autre, vers l’Afrique. Et ce sont des doigts accusateurs», explique l’artiste. Cette œuvre d’une hauteur de 4m 65, évoque les noms de ces milliers de jeunes dont la vie s’est achevée tragiquement dans les flots de l’océan.
Parlant de l’œuvre, le commissaire Massamba Mbaye indique qu’elle explore le drame sans fin de ces mères dont les enfants sont partis à la recherche d’un ailleurs meilleur. «L’artiste saisit ainsi ce moment précis où la pirogue de migrants est à demi submergée. Par un jeu d’accumulations et d’entrelacs, il restitue, avec la puissance d’évocation du métallique maîtrisée, ce moment d’effroi. La clameur s’échappe de sa sculpture. Elle se prolonge en écho dans nos consciences. Aucun trait n’est visible et lisible. Ses personnages ont des têtes-chaises. La chaise est une symbolisation du pouvoir, du pouvoir de l’intellect sur la destinée du corps. A la place des chaises, des visages prennent forme, glacés de peur. Il ne reste plus que la stupéfaction après des jours de souffrance surmontés par l’espoir», écrit-il à propos de l’œuvre.
D’ailleurs, l’artiste ne cache pas sa colère dans cette œuvre. Il la proclame à la fois dans le métal figé de ces structures mais aussi par ses propos : «Je me dis que si on se retrouve dans cette situation qui perdure, c’est que nos autorités y ont une grande part de responsabilité. Mais l’Occident aussi.» A quelques encablures, l’installation des «343» ne passe pas non plus inaperçue. 343 est le résultat de l’opération 7x7x7 et renvoie à un article du texte fondamental de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.
Cette infinité de silhouettes assises à même le sol et ressemblant à des chaises est une interpellation sur l’inégalité des chances dans ce monde.
C’est à la veille du lancement de la biennale que le vernissage a eu lieu. Sous les notes d’un quatuor calebasse kora flute et guitare qui a enchanté l’assistance, le Recteur de l’Ucad a rappelé que la culture est indissociable de l’université. «C’est un cadre naturel d’expression de tous les talents, y compris les talents artistiques.» Bien après la fin de la biennale qui s’achève le 21 juin prochain, Ni Barsa ni Barsak continuera d’alimenter les réflexions et débats au sein de l’espace universitaire.
DECES DU CHANTEUR ABLAYE NDIAYE THIOSSANE
Les lampes se sont éteintes
Par Ndèye Fatou NIANG(Correspondante) |
Publication 21/05/2022
Ablaye Ndiaye «Thiossane», connu comme un brillant artiste, est décédé hier au Centre hospitalier régional El Hadji Ahmadou Sakhir Ndiéguène de Thiès des suites d’une longue maladie. L’auteur de Taal leene lamp yi, l’hymne du Festival mondial des arts nègres, stoïque jusqu’au dernier souffle, fait partie de ces illustres stars qui ont fait de la ville aux-deux-gares un grand foyer de l’art et de la culture. Et ce, dans les domaines de la peinture, la musique, la tapisserie, le théâtre et la mode.
«L’homme est une part de génétique et une part de culturel. Pour construire un pays, il faut ressouder cette part du culturel.» L’enseignement est du Président-poète, feu Léopold Sédar Senghor, grand admirateur de Ablaye Ndiaye Thiossane. Rien qu’à l’évocation du nom de ce célèbre «baobab» du monde de la culture, un géant multidimensionnel, les anciens se souviennent d’un Sénégal à peine sorti des griffes de la colonisation et qui cherche sa voie en convoquant la culture de ses glorieux ancêtres. C’était à l’occasion du Festival mondial des arts nègres. Adepte de l’art plastique, particulièrement du dessin et de la peinture, grand connaisseur de la musique classique française, arabe, indienne et soviétique, Ablaye Ndiaye Thiossane s’est éteint hier à Thiès, à l’âge de 86 ans, des suites d’une longue maladie. L’artiste prenait du plaisir à égrener, non sans fierté et avec précision, les différentes étapes de sa longue et riche carrière. L’homme, qui naquit un 3 février 1936 dans son paisible village de Sam, au cœur du département de Tivaouane, se découvre une passion pour le dessin dès l’adolescence. A peine ses 14 bougies soufflées, le «monument en herbe» commence à s’exercer en reproduisant des affiches de films. Il découvre les plus grandes vedettes du 7ème art et est séduit par la musique interprétée au cinéma. On est en 1962. L’homme rêve de se perfectionner en dessin et de devenir un artiste plasticien. Il finit par se résoudre à s’inscrire à l’Ecole nationale des arts. Parmi ses éminents professeurs, un certain Iba Ndiaye. Ablaye Ndiaye dévoile son talent au Théâtre national Daniel Sorano, à l’Ecole nationale des arts (Ena) et aux Manufactures sénégalaises des arts décoratifs de Thiès (Msad).
Il a marqué le 1er Festival mondial des arts nègres
Ablaye Thiossane avait une expérience de la vie et un vécu singulier. Chacun des chefs d’Etat qui se sont succédé à la tête du pays lui a laissé un souvenir qu’il égrène avec fierté. «Je salue l’amour et la considération que le chef de l’Etat d’alors, le Président-poète, Léopold Sédar Senghor, avait pour tout ce qui touchait à l’art et la culture. Le Président Senghor accordait une attention particulière à la culture sénégalaise. Il aimait dire que la culture est au début et à la fin du développement», avait confié le défunt. Quant au Président Abdou Diouf, l’artiste avait dit de lui : «C’est lui qui m’a intégré dans l’Orchestre national. Il m’a fait Chevalier de l’Ordre national du lion.» Parlant du Président Abdoulaye Wade, il avait souligné: «On s’est connus à Thiès, il habitait le quartier Aiglon. Il m’a reçu avec tous les honneurs. D’ailleurs, j’ai été impliqué dans le Fesman et élevé au rang de Commandeur de la Légion d’honneur.»
Des cours d’art dramatique, Ablaye Ndiaye Thiossane en avait suivi. C’est ce qui lui avait d’ailleurs permis de côtoyer des artistes de renom de la trempe de Abdoulaye Douta Seck, Doura Mané ou encore Djibril Diop Mambety. En 1964, il monte l’orchestre «Le Thiossane Club». Un groupe dynamique dont l’option sera de «valoriser le patrimoine immatériel sénégalais, notamment le wolof». Aussi avait-t-il fait les beaux jours du Royal Band. Le directeur de l’Ecole nationale des arts d’alors, M. Alioune Diop, ira le présenter au Directeur général de Radio Sénégal, Ibrahima Mbengue, au moment où le premier Festival mondial des arts nègres se préparait. Le fils du Cayoor gagnera le Prix de l’hymne du festival en interprétant Taal leene lamp yi. Une vieille chanson tirée des «Fanal» de la vieille ville de Saint-Louis. Une fois l’heureux succès assuré, Ablaye Ndiaye dut retourner à Thiès, sa région natale, en 1967. Là, il s’adonne à la peinture sur carton. Et ce sera le début d’une longue traversée du désert. Arrive, en décembre 2010, le 3e Festival mondial des arts nègres. Ndiaye Thiossane est «ignoré», «écarté de l’évènement». Profondément offusqué, il «range» la musique pour se consacrer à la peinture. Celle-ci, malheureusement, ne lui apporte pas de revenus substantiels. Juste de quoi subvenir à des besoins essentiels : nourriture, eau, électricité, éducation de ses neuf enfants (huit filles et un garçon).
Un itinéraire qui témoigne du génie de l’artiste
A la fois peintre et chanteur, Ablaye Ndiaye Thiossane ne manquait jamais de donner des conseils aux artistes de ce pays, à qui il avait demandé de faire leur autocritique. «J’exhorte la nouvelle génération à se forger davantage et à être créatif», indiquait le quadragénaire qui, passionné de ce cinéma qui lui a appris à lire, à écrire et à parler français, avait souhaité de tout cœur la fin des guéguerres, de la concurrence déloyale, et l’union des artistes. Il repose désormais dans sa ville de Thiès.
LE FILM "TIRAILLEURS" FAIT TACHE D'HUILE AU FESTIVAL DE CANNES
Le secrétaire permanent du Fonds de promotion de l’industrie cinématographique du Sénégal (FOPICA), Abdoul Aziz Cissé, s’est réjoui jeudi des "réactions positives" suscitées par le film franco-sénégalais "Tirailleurs" de Mathieu Vadepied
Cannes, 20 mai (APS) - Le secrétaire permanent du Fonds de promotion de l’industrie cinématographique du Sénégal (FOPICA), Abdoul Aziz Cissé, s’est réjoui jeudi des "réactions positives" suscitées par le film franco-sénégalais "Tirailleurs" de Mathieu Vadepied, lors de sa projection initiale à la 75e édition du Festival de Cannes (17-28 mai).
C’est à Cannes, en ouverture de la section "Un certain regard" du festival international, que le film sorti en 2019, fruit d’une coproduction entre Omar Sy et l’Etat du Sénégal, par le biais du FOPICA, a été présenté pour la première fois au public.
"Tirailleurs" a été tourné à Matam, la région sénégalaise d’origine de son acteur principal (Omar Sy), et en France. Il est consacré à l’histoire d’un tirailleur sénégalais engagé dans la bataille de Verdun, durant la Première Guerre mondiale.
Sy, un acteur français révélé au grand public par ses apparitions comiques sur la chaîne de télévision Canal+, incarne dans cette fiction l’histoire d’un père de famille, Bakary Diallo, qui va prendre part à la guerre.
"Nous continuons de recevoir des réactions toujours positives de ce film, qui a une manière originale de raconter l’histoire des tirailleurs", les milliers de soldats que la France faisait venir de ses colonies durant les deux guerres mondiales, a dit à l’APS le secrétaire permanent du FOPICA à la fin de la projection du film.
Outre ce film dont les acteurs parlent peul, avec un sous-titrage en français, des professionnels français et sénégalais du cinéma travaillent sur un projet de réactualisation des accords de coproduction et d’échanges cinématographiques, selon Abdoul Aziz Cissé.
Les deux parties ont "finalisé" des négociations relatives à ces accords, a-t-il dit.
Au terme de ces négociations, les films franco-sénégalais seront coproduits avec une contribution financière de 90 % venant de la France, le restant étant à fournir par le Sénégal, selon M. Cissé.
Auparavant, la partie française fournissait 80 %, contre 20 % pour le Sénégal.
Selon le secrétaire permanent du FOPICA, le ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop, prendra part au Festival de Cannes.