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27 novembre 2024
Femmes
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CULTUR'ELLES-MENT, LES FEMMES PEUVENT LE FAIRE
Beat-maker, accessoiriste ou encore éditeur…, ces métiers de la culture et des arts ne doivent pas être l’affaire des seuls hommes. La scénariste Amina Seck veut les arracher aussi pour les femmes grâce à Cultur’Elles, qui prépare les femmes à cette fin
Il est «cultur’Elles-ment» inacceptable que les femmes restent à la traine en matière d’entrepreneuriat dans le domaine des arts et de la culture, qui pourtant restent une niche fort inexplorée et potentiellement pourvoyeuse d'emplois. C'est le constat de la romancière Amina Seck, incitatrice du premier salon du livre féminin au Sénégal.
Scénariste et romancière, Amina Seck a lancé «Cultur’Elles », une agence qui vise à promouvoir l’entrepreneuriat des femmes dans le domaine des arts et de la culture et à favoriser l’accès des femmes à certains métiers comme l'édition (littérature) le beat-making (musique) ou encore "l'accessoirisme" dans le secteur du cinéma, domaines où elles sont absentes.
L’autre objectif que poursuit Cultur’Elles c’est la visibilisation des femmes qui même si elles produit des œuvres littéraires de qualité, ne sont pas vues, mais restent dans l’anonymat total. Le projet du salon du livre féminin est dédié à elles.
Pour Amina Seck, ce n'est pas impossible, il faut juste sensibiliser et former. C’est pourquoi le renforcement des capacités des femmes occupe une place dans les activités de son agence.
Amina Seck a été interviewée à Dakar, en marge de la journée mondiale de l’entrepreneuriat, à la Place du Souvenir
Regardez son entretient sur AfricaGlobe Tv
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BU KO SAX JEEM
Cette œuvre entre dans le cadre de la campagne BU KO SAX JÉEM lancée le 10 octobre 2022 par le mouvement Y'en a marre.
Cette œuvre entre dans le cadre de la campagne BU KO SAX JÉEM lancée le 10 octobre 2022 par le mouvement Y'en a marre.
Elle réunit une dizaine d'artistes rappeurs de différentes générations, et engagés.
La campagne vise à dissuader le président Macky Sall de toute tentative de violation de la Constitution du Sénégal en se présentant une troisième fois.
C'EST LA CULTURE DU VIOL VERSION FÉODALE QUI PRÉVAUT AU SÉNÉGAL
Le code de la famille contient d'innombrables dispositions discriminatoires contre les femmes. Les mariages de mineur.es, les mariages forcés se poursuivent. Le patriarcat s’enracine avec l’onction religieuse - ENTRETIEN AVEC NDEYE KHAIRA THIAM
Psychologue clinicienne et criminologue, Ndeye Khaïra Thiam est avant tout une fervente militante féministe qui vit entre le Sénégal et la France. Elle intervient régulièrement auprès des instances nationales et internationales comme consultante. Elle était présente lors du Forum génération égalité qui s’est tenu à Paris du 30 juin au 2 juillet 2021.
Même si le dernier rapport de la CEDEF (Convention sur l’Élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des Femmes) a salué en février dernier des avancées dans le traitement des salaires, l’accès à l’éducation et à des postes à responsabilité ainsi qu’à une parité au niveau politique avec une représentativité féminine accrue dans les institutions électives et semi-électives, l’égalité reste extrêmement loin d’être acquise. Certaines villes du Sénégal comme Touba se déclarant « ville religieuse » résistent obstinément à l’application des différentes règles de droit national et aux accords ratifiés par l’Etat.
Au Sénégal, République laïque, démocratique et sociale ainsi que le proclame encore l’article 1er de sa Constitution, le religieux tend à surpasser les pouvoirs institutionnels et le patriarcat s’enracine de plus en plus avec l’onction religieuse. L’inégalité entre les femmes et les hommes est à ce point ancrée dans les mentalités et institutionnalisée que les femmes peinent à accéder à leurs droits fondamentaux et principalement aux droits reproductifs. Le code de la famille n’est toujours pas remanié alors qu’il contient un nombre incalculable de dispositions discriminatoires contre les femmes. Les mariages de mineur.es, les mariages forcés et la polygamie pratiquée, au mépris même des règles islamiques, conduisent régulièrement à des problèmes de santé physique et psychique, notamment de santé mentale, allant jusqu’au suicide ou tentatives de suicides. L’avortement est toujours interdit et, seules, les femmes sont poursuivies pour néonaticide alors que l’article 14 du protocole de Maputo a été signé et ratifié par le Sénégal et n’est toujours pas appliqué en raison du véto des religieux et par manque de courage du gouvernement. Les chiffres de l’excision, des violences conjugales ou des viols n’ont toujours pas diminué voire, ont augmenté depuis la pandémie de Covid. En 2020, une loi a été adoptée criminalisant les actes de viol et de pédophilie. Néanmoins, les affaires présentées devant le juge sont très souvent correctionnalisées afin d’en minimiser les peines.
Comment expliquez-vous ces résistances dans l’application des lois nationales et supra-nationales, des recommandations de la Convention sur l’Élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des Femmes (CEDEF) et des différents accords internationaux en faveur de l’égalité F-H ?
L’ancienne ministre de la femme, l’ancienne directrice du genre et l’ancienne directrice de la famille ont toutes les trois soutenu l’idée que la polygamie n’était pas une forme de violence. Toutes les trois sont des secondes épouses. L’experte onusienne de l’Egypte a failli s’étrangler lors de la dernière réunion de la CEDEF quand celles-ci ont justifié la polygamie par la religion et la culture, sans aucune distance et sans égard pour toutes les femmes, première, seconde, troisième ou quatrième femme qui souffrent dans nos hôpitaux ou dans nos prisons. Sans non plus prendre en considération toutes celles issues de ces familles polygames qui ne veulent pas reproduire ce modèle ou d’autres encore qui ne partagent pas ces pratiques.
A côté de cela, de la police au juge, le taux d’attrition est une catastrophe car tout est fait pour que les victimes n’obtiennent jamais justice puisque c’est la culture du viol version féodale qui prévaut au Sénégal. Certaines associations féminines s’en défendent en arguant des formations ou des actions de sensibilisation qu’elles ont menées avec ces fonctionnaires. Il n’en demeure pas moins qu’au quotidien, on doit slalomer entre les services pour éviter aux personnes que l’on accompagne d’être revictimisées par des propos extrêmement violents ou une désinvolture dans le traitement des plaintes ou demandes des justiciables. Au surplus, les victimes n’ont pas d’aide juridictionnelle, tout est à leur charge alors que les présumés auteurs, eux, l’obtiennent. Rajoutons à cela, le traitement médiatique réservé aux affaires de viol qui est scandaleux ! L’intimité des victimes est étalée partout y compris au mépris du secret médical ou du secret de l’instruction. Devant la CEDEF, l’ancienne ministre avait dû reconnaitre qu’en deux ans il n’y avait que 14 dossiers de viol recensés devant les cours criminelles. Un juge nous a sorti lors d’un atelier de juristes sénégalaises « qu’on ne distribue pas des peines criminelles comme on distribue des bananes » alors que les dénonciations pour viol y compris sur mineures ne font que grimper. Rien qu’au mois d’octobre 2022, il y a eu une série de meurtres plus atroces les uns que les autres. En une semaine, il y a eu quatre féminicides, sans que cela n’émeuve le gouvernement sénégalais.
Une partie de la société civile est sous emprise de l’Etat voire simultanément à la tête de certaines associations travaillent pour l’Etat. Ce dernier les contrôle et ne présente que les rapports partisans de ces groupes aux instances internationales. Celles-ci ferment bien les yeux sur les réalités de terrain et font le jeu du gouvernement pour sécuriser d’autres intérêts. L’ancienne directrice d’ONU femmes est devenue, au dernier remaniement, ministre de l’Économie du gouvernement sénégalais.
Les défenseuses des droits des femmes comme les féministes sont régulièrement la cible d’agressions dans la réalité comme sur les réseaux sociaux. Rien n’est prévu de rapidement fonctionnel pour elles. Sans compter qu’elles subissent des pressions familiales énormes. Et rien n’est prévu non plus pour les aider à prendre soin de leur santé physique et surtout mentale.
La Sénégalaise n’a pas toujours été soumise. Il existait des matriarcats. Y a t’il actuellement un travail de recherche pour réhabiliter l’histoire des femmes en Afrique ?
Le matriarcat n’était pas un gage de liberté des femmes telle qu’elle est aujourd’hui réclamée. La parole des femmes était soumise à celle du frère ou du père, et l’exercice du pouvoir, s’il était bien d’origine matrilinéaire, l’attribuait en priorité aux hommes. Dans le royaume du Waalo, il a fallu un coup d’Etat d’une Linguère au 17/18e siècle pour que ses filles Njeumbet Mbodj et Ndaté Yalla Mbodj prennent le pouvoir.
Des recherches sur l’apport des femmes dans le matrimoine existent mais manquent parfois de rigueur scientifique ou sont totalement partisanes. L’histoire de l’Afrique noire a été remaniée pour des raisons politiques, par les colons qui se sont succédé. Nombre d’archives sont manquantes ou bien sont conservées en France et restent ainsi peu accessibles aux chercheuses et chercheurs sénégalais. C’est compliqué de reconstituer nos histoires en se soustrayant à celle imposée par les colons ou même à l’ethnologie coloniale qui fait encore recette de nos jours et qui nous encombre. Spécialement quand des Européen.nes viennent nous parler de nos histoires ou de nos cultures et cherchent à nous imposer une vision surréaliste de nos pays.
Les Sénégalaises ont toujours lutté pour leurs droits. Il y a eu des mouvements féministes dans les années 70 et 80 qui ont permis de mettre en débat certaines problématiques. En 2018, le #balancetonsaïsaï (pervers) a-t-il eu l’effet d’un raz de marée ? La société sénégalaise a-t-elle pris conscience des violences faites aux femmes ou continue-t-elle dans le déni ?
#balancetonsaïsaï n’a pas pris du tout au Sénégal. On a eu en revanche « l’affaire Songhé » qui a provoqué un énorme scandale. Pendant des jours et des jours, il y a eu des torrents de témoignages sur les viols. Ensuite, un petit groupe de femmes ont maintenu la pression sur les médias. Cependant, j’ai fini toute seule avec cette histoire, mes consœurs s’étant désistées par peur. On a continué à parler régulièrement des viols dans les médias jusqu’en 2019. Cette année-là, une série de viols suivie de meurtres ont été commis et tout le monde est descendu dans les rues pour crier notre ras le bol que ce soit à Dakar comme dans les autres régions du Sénégal. C’est officiellement cette dernière mobilisation qui a conduit à l’adoption de la loi contre les violences faites aux femmes. Mais en réalité, c’est surtout la personnalité de la dernière victime, fille d’un ami du chef de l’état, qui a fait que la loi a été rédigée et adoptée dans la précipitation. Malgré de nombreuses imprécisions, cette loi a le mérite d’exister… Mais à cette période, le mouvement féministe mort dans les années 80, n’était pas encore revenu de ses cendres. Il a fallu attendre 2020 pour qu’il y ait de plus en plus de femmes se déclarant féministes et 2021-2022 pour qu’elles commencent à s’organiser.
La société sénégalaise vit dans le déni de la gravité de sa violence de manière générale mais spécifiquement des violences vis à vis des femmes et des enfants. Les gens ne veulent pas se regarder en face et faire un travail individuel et collectif pour traiter l’Histoire et ses psycho-traumas mais aussi tous les autres psychi-traumas qui se transmettent d’une génération à l’autre dans les familles. Et ça il va falloir qu’on le fasse si l’on veut réguler d’abord les violences et faire de la place au cas particulier des violences faites aux femmes et aux enfants qui ont aussi des fondements patriarcaux (précoloniaux, arabo-musulmans et européens). De plus il va falloir faire un gros travail de déconstruction et c’est là aussi qu’on attend les féministes. Mais on va continuer à espérer…
Vous interviendrez à Paris les 26 et 27 novembre prochain à l’occasion de la 28ème université d’autonome de Ligue des droits de l’homme pour parler de féminismes africains. Quels sont ces féminismes et leurs défis ?
J’ai l’honneur de remplacer la Professeure Fatou Sow, une très très grande universitaire féministe. Je parlerai de ce que j’estime être un » malaise dans le féminisme sénégalais » actuel. Une manière d’abord, de parler de mon rapport au féminisme et à ce qui se fait ou pas au Sénégal et d’essayer aussi de pousser des féministes sénégalaises à intensifier sérieusement la lutte, à avoir le courage de prendre en charge certains sujets laissés en rade et à travailler de manière encore plus hargneuse à déconstruire les poncifs éculés qui tiennent la femmes sénégalaise esclave de l’homme sénégalais alors que l’esclavage est aboli au Sénégal depuis le 23 juin 1848. Il y a urgence aujourd’hui à changer radicalement le visage de la société sénégalaise. Des enjeux économiques et géopolitiques telles que la découverte du pétrole ou du gaz ainsi que la poussée islamiste qui est à nos portes menacent très sérieusement la stabilité du pays mais encore plus directement la vie des femmes sénégalaises.
Les mouvements féministes sénégalais reçoivent-ils l’appui de la diplomatie féministe, stratégie internationale luttant pour l’égalité F-H en appliquant les mesures adoptées par le G7 et le Forum Génération Egalité ?
Je ne sais pas ce que vous appelez la « diplomatie féministe ». Ce qui déjà est en soi signifiant de l’insignifiance de cette « diplomatie » dans nos pays. Il y a des institutions internationales qui gravitent autour de certaines féministes dans le but de capter leur énergie et de la mettre à profit de leurs propres objectifs. C’est-à-dire la schizophrénie diplomatique qui veut l’égalité sans la vouloir vraiment dans les faits en se cachant derrière le non-interventionnisme dans les politiques des pays concernés, qu’ils financent par ailleurs pour ces questions. Pffff ! Les féministes ont démarré leur lutte sans ces institutions et d’autres groupes sont morts à cause de ces mêmes institutions. Vous me permettrez donc d’étaler ma parano à la face du monde quand on me parle d’institutions internationales ou de « diplomatie féministe ». Au Sénégal, les diplomates femmes que nous avons tout comme les quelques rares femmes ministres par exemple, n’ont rien de féministes. Et je parle aussi à celles qui se revendiquent « plus féministes » que les féministes sénégalaises. A bon entendeur ! Elles sont les bonnes garantes du patriarcat qui les salue dès qu’il peut pour leurs bons et loyaux services et qui sont surtout en charge de faire rentrer les récalcitrantes dans le rang. A ma connaissance, il n’y a qu’une seule personne dans le gouvernement qui appuie réellement les féministes dans certaines de leurs actions. A elle seule, elle ne peut pas représenter toute la diplomatie. Il serait nécessaire que les femmes sénégalaises jouent davantage des coudes pour s’imposer comme un contre-pouvoir. Elles ont l’avantage numérique et le cuir plus dur au mal. Qu’elles rompent avec la peur d’être mal vues ! Evidemment que vous serez mal vue par ceux que votre liberté et votre leadership réel (pas celui des grands hôtels ou sommets internationaux) effraient car il risque de leur faire perdre leurs petits avantages de despotes.
Macky Sall a appelé hier à la fin de toutes les brutalités à l’endroit des femmes et des filles. Le président de la République présidait la 2ème édition de la Conférence de l’Union Africaine sur la masculinité positive dans le leadership pour éliminer la violence contre les femmes et les filles.
Les femmes et les filles du continent africain ont, en la personne du président Macky Sall, un avocat de taille. Devant un parterre d’invités comme le président de la Commission de l’Union Africaine, Moussa Faki Mahamat, mais surtout de dames d’une dimension internationale notamment Mmes Ellen Johnson Sirleaf, ancienne présidente du Libéria, Présidente d’honneur du Réseau des Femmes Leaders, Ameenah GuribFakim, ancienne présidente de Maurice, Catherine Samba Panza, ancienne présidente par Intérim de la République Centrafricaine, Macky Sall s’est fortement indigné de la brutalité exercée sur les femmes et les filles du monde et tout particulièrement de l’Afrique.
Selon lui, Dakar doit être le départ d’une prise de conscience contre un fléau qui n’a cessé de prendre une certaine ampleur. Après Kinshasa, qui a abrité la 1ère conférence sur la masculinité positive, Dakar a pris hier le relais « pour capitaliser cette dynamique pour que cette rencontre ne soit pas un effet de mode, qui s’évanouit avec la fin de ses travaux, mais le catalyseur d’énergies positives à l’échelle nationale et continentale, pour une tolérance zéro contre les violences faites aux femmes et aux filles » a martelé le chef de l’Etat. L’Afrique a connu des femmes héroïques qui continuent à servir d’exemples à travers le monde. « Souvenons-nous de Néfertiti en Egypte, des Amazones du Bénin, de la Reine Zingha d’Angola, de l’impératrice Taytu Betul d’Ethiopie, de la Reine Aminatu de Zaria, au Nigéria, et plus près de nous ici au Sénégal, des Linguères Ndieumbeut Mbodj et Ndaté Yallah Mbodj, sans oublier la résistante Aline Sitoe Diatta, entre autres figures historiques féminines du continent. Souvenonsnous que la première poétesse noire américaine est née ici même, au Sénégal, en 1753.
De son nom d’esclave Phyllis Wheatley, elle surmontera ce statut handicapant pour publier son premier recueil intitulé «Poems on various subjects», à juste 20 ans, en 1773, trois ans avant le début de la Révolution américaine. Aujourd’hui, les femmes occupent de hautes fonctions sur le continent, dont certaines pionnières ici présentes. Elles sont nombreuses à exercer les mêmes qualifications que les hommes : ingénieurs, médecins, enseignantes, pilotes, militaires, sportives de haut niveau, et j’en passe. Elles sont nombreuses au bureau, à l’usine, au foyer et dans les champs ; femmes d’affaires prospères ou modestes vendeuses au marché ou au coin de la rue, mais toutes habitées par la même dignité et la même détermination de nourrir, loger, soigner, éduquer leurs enfants, entretenir leurs familles et contribuer à la prospérité nationale. Elles sont nombreuses, les filles, dans nos écoles, nos lycées et nos universités, à égaler ou dépasser les performances des garçons » a tonné Macky Sall devant un public attentif.
La brutalité envers les femmes, ça suffit !
Le président de la République a convoqué les nombreuses initiatives du Sénégal pour combattre les violences contre les femmes. Les exemples cités tournent autour de la loi criminalisant les actes de viol et de pédophilie, le guide spécifique de prise en charge des violences faites aux femmes et aux filles par les forces de l’ordre, le portail de la Cellule d’appui à la Protection de l’Enfance dédié au signalement d’images d’abus sexuels sur les enfants, le commissariat de police pilote de Mbao, qui intègre la spécificité féminine dans son organisation, son fonctionnement et l’accueil fait aux femmes et aux filles victimes de violences.
Ces mesures, selon le chef de l’Etat, s’ajoutent à d’autres en matière de soin de santé, de parité hommes-femmes dans les instances publiques électives et de transmission par la femme de la nationalité sénégalaise à son époux et à ses enfants. « Toutes ces mesures visent à combattre les violences faites aux femmes et aux filles, mais également à mettre fin aux discriminations qui les affectent dans une société qui se veut égalitaire, solidaire et inclusive. C’est d’ailleurs l’une des vocations principales de la Délégation à l’Entreprenariat rapide des Femmes et des Jeunes, DER/FJ. Mais finalement, ce qui comptera par-dessus tout, c’est l’évolution des esprits ; évolution des esprits des femmes et des filles envers elles-mêmes, et évolution des esprits des hommes envers les femmes et les filles, pour conforter l’égalité en droits et la complémentarité sociale homme-femme » a expliqué le chef de l’Etat. Et de tonner que la violence faite aux femmes et aux filles, ça suffit ! « Tous ensemble, pouvoirs publics, leaders religieux et traditionnels, membres de la société civile et citoyens, nous devons élever la voix et dire : ça suffit !
Ça suffit la brutalité, ça suffit la maltraitance, ça suffit le harcèlement, ça suffit les brimades, les insanités, le viol et autres sollicitations non désirées. Mais il ne suffit pas de dire, ça suffit. Il faut agir ; agir pour que cesse l’omerta du silence, en temps de paix comme en temps de guerre. Oui, il faut que ça cesse ! C’est ce que veut l’Agenda 2063 de l’Union Africaine. Il faut que ça cesse ! C’est ce que demande la Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, sur le sort des femmes dans les conflits armés » a conclu le président de la République.
LE HARO DE DAKAR CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES
Dans la capitale sénégalaise, Dakar, s’est tenue hier, jeudi 10 novembre, la Conférence africaine sur la masculinité positive.
La Conférence africaine sur la masculinité positive qui s’est tenue à Dakar hier, jeudi 10 novembre, a été l’occasion pour les participants d’appeler à l’arrêt des violences contre les femmes et les filles. Le président de la République, Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine (Ua) et la président de la Commission de ladite organisation, Moussa Faki Mouhamat, ont tous les deux dénoncé les préjugés qui maintiennent les femmes dans une violence injustifiée.
Dans la capitale sénégalaise, Dakar, s’est tenue hier, jeudi 10 novembre, la Conférence africaine sur la masculinité positive.
Venu présider la rencontre, le chef de l’Etat, Macky Sall, par ailleurs président de l’Union africaine (Ua), a plaidé pour un changement de comportement. «Nous sommes ici pour susciter une prise de conscience, mais aussi pour agir contre toutes formes de violences à l’endroit des femmes et des filles. N’oublions surtout pas que cette violence n’est pas que physique. Elle est aussi morale, par le harcèlement, des menaces, des insultes et autres propos désobligeants ou humiliants qui blessent autant sinon plus que les violences physiques. Lutter contre ces pratiques d’un autre âge est d’autant plus juste et légitime qu’aucune religion, qu’aucune loi, aucune règle sociale ne fait l’apologie de la violence contre un être humain», dit-il.
Selon toujours Macky Sall, «Il ne saurait y avoir de fondement légal ou moral à la violence, sous quelque forme». Il importe, dès lors, une implication de tous. «Tous ensemble, pouvoirs publics, leaders religieux, nous pouvons décentraliser jusqu’au niveau le plus de notre société, pour extirper cette forte conviction que l’homme doit être au-dessus de la femme», soutient-il. Donc les sévices doivent être bannis. «Ça suffit, la brutalité, la maltraitance, le harcèlement, les brimades, les insanités, les viols. Il faut agir pour que (cesse) cette omerta du silence, en temps de paix comme en temps de guerre», recommande-t-il. Parlant toujours de cette violence contre les femmes et les filles, le président Macky Sall d’affirmer : «Il faut une évolution des esprits, d’abord ceux des femmes et des filles envers elles-mêmes et ceux des hommes envers les femmes et les filles, pour conforter l’égalité en droit et la complémentarité sociale hommes femmes».
CONVENTION SUR LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES : DAKAR TRACE LA VOIE… POUR «UNE TOLERANCE ZERO»
Cette rencontre de Dakar, espère-t-il, constituera un moment fort dans la lutte contre les violences faites aux femmes en Afrique. «Après la conférence de Kinshasa l’année dernière, dont la déclaration et l’appel à l’action ont été endossée par le sommet de l’Union africaine (Ua), en février dernier, la voie est tracée pour l’élaboration d’une Convention sur la lutte contre les violences faites aux femmes. Lors d’un prochain sommet, nous aurons déjà cette Convention sur la table des chefs d’Etats. Dakar doit capitaliser cette dynamique pour que cette rencontre ne soit pas un effet de mode, mais de catalyseur d’énergie positive à l’échelle nationale et continentale pour une tolérance zéro contre les violences faites aux femmes», a déclaré le chef de l’Etat. Le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mouhamat, est du même avis. «Dakar se veut être une occasion de revisiter les acquis de la conférence de Kinshasa», avance-t-il.
La lutte contre les violences faites aux femmes n’est pas un combat gagné d’avance. «Un défi est encore énorme. Nous devons travailler ensemble pour dire aux hommes d’arrêter leur façon humiliante de faire», conseille-t-il.
Moussa Faki Mouhamat est convaincu que «la situation de la femme africaine reste encore préoccupante, à cause des nombreuses violences qu’elles subissent, surtout en temps de conflits, mais aussi des préjugés». Et pourtant, dit-il, «les violences ne peuvent aucunement être justifiées par des croyances traditionnelles et religieuses», confirme-t-il, pour corroborer la position du président de la République, Macky Sall.
LE CONCEPT MASCULINITE POSITIVE MIS EN PLACE
Les violences exercées sur les femmes et les filles ont pris des proportions inquiétantes en Afrique, plus particulièrement au Sénégal
Les violences exercées sur les femmes et les filles ont pris des proportions inquiétantes en Afrique, plus particulièrement au Sénégal. Pour éradiquer ce phénomène, le Fonds des Nations Unies pour la Population (Unfpa) et l’Union Africaine (UA), en partenariat avec le gouvernement du Sénégal, ont organisé hier la consultation des jeunes de l’UA sur la masculinité positive. Ce concept va permettre d’inclure les hommes dans la lutte contre les violences faites sur les femmes et les filles.
Déconstruire les stéréotypes, promouvoir les femmes, laisser tomber les idées sexistes, les pesanteurs sociales, les normes du patriarcat revues et prises en compte... Ces éléments constituent le concept de masculinité positive mis en place par l’Unfpa, l’UA et l’Etat du Sénégal lors d’une rencontre présidée hier par le ministre de la Femme, Fatou Diané Guèye. «Nous disposons en Afrique et dans nos Etats respectifs d’un cadre juridique protecteur des femmes et des filles qui vient s’adosser à nos valeurs culturelles ancestrales qui accordent une place de choix à la femme et à la jeune fille, future épouse, mère et grand-mère. Malheureusement, la réalité quotidienne est encore marquée par des violences basées sur le genre avec des conséquences néfastes, souvent dramatiques pour les femmes et les filles. Nous devons alors, aujourd’hui plus que jamais, agir et réagir davantage pour éradiquer ces violences en Afrique, avec surtout l’implication des hommes, des jeunes garçons du continent, que vous avez l’honneur de représenter ici, à Dakar», indique la remplaçante de Ndèye Saly Diop Dieng.
Poursuivant, elle indique que le Sénégal se reconnaît parfaitement «dans cette démarche protectrice pour avoir reconnu la violence comme un obstacle majeur à l’épanouissement de la femme, et érigé l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes en objectifs prioritaires et transversaux du Plan Sénégal Émergent». Recommandant contre la masculinité toxique, Fatou Diané Guèye trouve que le changement des mentalités et des comportements est nécessaire.
Embouchant la même trompette, le ministre de la Jeunesse, Pape Malick Ndour soutient que le fait de faire subir une quelconque violence à la femme et aux enfants, de quelque nature qu’elle puisse être, constitue une atteinte grave à la société. «Quand on part du postulat que la famille est la cellule de base de toute société, ce concept de masculinité positive m’inspire beaucoup, car il promeut l’engagement des garçons ou des hommes dans ce combat pour l’éradication des violences basées sur le genre, qui était jusque-là exclusivement porté par les femmes elles-mêmes ou les organisations féministes chargées de la défense et de la protection des droits des femmes et des jeunes filles», affirme-t-il. Selon Pape Malick Ndour, les hommes ont un rôle capital à jouer dans ce combat afin de façonner à termes des attitudes et comportements respectueux et soucieux de l’égalité entre les sexes. «Je prends comme prétexte cette journée pour décrier et dénoncer toute cette violence dont sont victimes les femmes et les jeunes filles, tous âges confondus».
L'ITINÉRAIRE DE BOUBACAR BORIS DIOP
L'influence de Cheikh Anta Diop, les langues africaines et la littérature, le Prix Neustadt... L'auteur de "Murambi, le livre des ossements" répond à Eric Manirakiza de VOA Afrique - ENTRETIEN
VOA Afrique |
Eric Manirakiza |
Publication 08/11/2022
Boris Diop a reçu le 24 octobre 2022 le Neustadt, le prix international de littérature qui lui a été décerné dans l'Etat américain de l'Oklahoma. Dans un entretien exclusif à VOA Afrique, Boris raconte ce que le prix qu’il a reçu, équivalent du Nobel de littérature, représente pour lui.
par Doc Gynéco born Juliette Ba
WOLOF’HOLLYWOOD, MAREME DIAL EN FORCE ET MARODI CHEZ NETFLIX
je suis pétrifiée de jalousie, je répète, je me consume littéralement de jalousie. L’aigreur et l’amertume qui m’habitent, n’ont d’égal le sentiment extrême de frustration et d’envie qui me rongent lorsque je me pose devant une série sénégalaise…
Doc Gynéco born Juliette Ba |
Publication 04/11/2022
Bon. Vous le savez (ou pas). Votre esclave dévouée, jadis journaliste est Coach (avec « C » majuscule) en Mieux-Être depuis 2010. En tant que coach, mon travail est donc d’accompagner les personnes sur le chemin de l’harmonie et du développement personnel, sachant que charité bien ordonnée commence par soi-même…
Je suis donc dans l’obligation incontournable de procéder avant toute chose, à l’observation, la réflexion, l’introspection, la remise en question et le travail sur soi qui sied à tout coach en mieux-être…
Et c’est là que le bât blesse. Parce que, oui, aujourd’hui je vais vous l’avouer : je suis pétrifiée de jalousie, je répète, je me consume littéralement de jalousie. L’aigreur et l’amertume qui m’habitent, n’ont d’égal le sentiment extrême de frustration et d’envie qui me rongent lorsque je me pose devant une série sénégalaise…
Petit flashback. Nous sommes en 1994, je viens d’avoir le bac et je suis inscrite au département de philosophie à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Un chouïa désœuvrée et déçue de voir qu’il n’y a pas grand-chose en commun entre mes cours passionnants de terminale A3C à Yalla Suuren, dispensé par Monsieur Macodou Diop et la foultitude de cours magistraux que je dois ingurgiter du matin au soir… Mon prof de terminale me faisait rêver… Mes professeurs à la fac me confirment que j’adore réfléchir mais me mettent le doute : ai-je vraiment envie de devenir professeur de philosophie ? Vais-je passer le cap de cette première année ? Miroir, mon beau miroir …
Bref…
Au milieu de ce trop-plein de philosophie, mes pas vont me porter vers le département voisin, celui de lettres modernes. Je rencontre le chef du département de l’époque, nous échangeons. Quelques discussions agréables. Il me parle de théâtre, je réponds passionnément… Il n’en faut pas plus pour me retrouver membre de l’Atelier des recherches et pratiques théâtrales, animé par le coupme Jacqueline et Lucien Lemoine. J’y resterai 3 ans. Assez pour découvrir les plaisirs de l’improvisation, de la narration. Assez pour ne jamais oublier la bienveillance extrême de Lucien, sa diction extraordinaire, son jeu d’acteur tellement balsamique et les conseils avisés de Jacqueline, sa douceur et la nostalgie de sa terre : Haïti.
À l’occasion du 100e anniversaire de la mort de Jean de La Fontaine, nous avions donné une représentation au Centre culturel français de Dakar. Je n’oublierai pas ce moment magique ou la « Scène » fut toute à moi et où je récitais à ma manière et avec énormément d’humour « le Corbeau et le Renard ». J’aimais déjà beaucoup la comédie lorsque j’étais à l’école j’étais connue et reconnue pour mes talents de clown et d’agitatrice, mais là je me découvrais une vraie passion pour la scène, le jeu d’acteur et quelques années plus tard le cinéma.
Le Collectif des féministes du Sénégal a envoyé une lettre au chef de l’Etat pour dénoncer leur situation , avec des mots-clés qui montrent la gravité du moment : «Alerte, on nous viole et on nous tue ! Le Sénégal en guerre contre ses femmes !»
Face au «silence» des autorités, le Collectif des féministes du Sénégal a envoyé une lettre au chef de l’Etat pour dénoncer la situation des femmes dans le pays, avec des mots-clés qui montrent la gravité du moment : «Alerte, on nous viole et on nous tue ! Le Sénégal en guerre contre ses femmes !»
Comme une épitaphe, les noms des dernières victimes de féminicide se suivent ainsi : Woury Mané, Yoba Baldé, Ndioba Seck, Khady Sèye, Aminata Ka, Yacine Sané, Bineta Camara, Lobé Ndiaye, Fatou Kiné Gaye, Khady Badiane, Athia Ba, Léna Gomis, Dieynaba Déme… Et la liste est encore longue. Le Collectif des féministes du Sénégal, qui a envoyé une lettre au président de la République, a utilisé des mots durs et aussi évocateurs du drame auquel les femmes font face : «wóoy walloo! Président noo ngi jeex ! Wallu ñu ! (Au secours Président, on nous extermine)».
Le constat du collectif de la situation actuelle est accablant : «Alerte, on nous viole et on nous tue ! Le Sénégal en guerre contre ses femmes !» Que faire ? Il demande au chef de l’Etat de prendre des mesures contre la culture d’impunité masculine. «La lutte pour le respect des droits de la femme est une composante essentielle de la bonne gouvernance et de la démocratie. On ne peut pas continuer à bafouer les droits de 52% de la population et espérer être pris au sérieux par nos pairs dans le monde. Nous ne voulons plus être célébrées, chantées, fêtées le 8, mars puis tuées les 364 jours qui restent dans le silence le plus total», note le collectif dans sa lettre.
Pour les femmes, angoissées par les derniers crimes, «il est primordial de mettre en place un fonds d’appui pour les victimes de violences sexuelles et sexistes et leurs familles. Souvent, les familles des défuntes ne peuvent ni payer un avocat ni élever correctement les orphelins (es) que ces femmes laissent derrière elles». «Par ailleurs, il est nécessaire de renforcer le dispositif d’accueil, d’orientation et d’appui aux victimes de violences sexuelles et sexistes sur toute la chaîne et de documenter régulièrement les cas de violences sexuelles et sexistes et de féminicide. Des mesures adéquates pour leur diminution et in fine leur arrêt devraient s’en suivre. Cela passe sans nul doute par l’application de la loi dans toute sa rigueur et une politique zéro clémence pour les auteurs de tels crimes», poursuit le collectif. Il est surtout interloqué par le silence présidentiel. «Réagissez Monsieur le Président ! Votre silence renforce la discrimination et l’impunité envers les femmes et les filles de ce pays face aux violences masculines. Que l’âme des victimes repose en paix. Que Justice leur soit rendue», poursuit le collectif. Lequel regrette aussi que le ministère de la Femme «soit très souvent aphone devant le nombre important de femmes tuées».
Pour ces dames, «aller visiter les familles des victimes ou les survivantes ne règle pas vraiment le problème. Les cas de viol et de meurtre de femmes sont devenus des faits anodins et ne semblent émouvoir personne, surtout la classe dirigeante sénégalaise dont vous êtes le chef de file». Pour le collectif, sur la période de janvier à novembre 2019, 14 cas de meurtre de femmes ont été répertoriés par le Comité de lutte contre les violences faites aux femmes. «Une liste qui ne cesse de s’allonger. Depuis le début de l’année 2022, nous avons recensé plus de dix (10) meurtres de femmes et de filles, tuées sauvagement. Rien que les deux dernières semaines du mois d’octobre, nous avons enregistré les meurtres d’au moins quatre femmes. Il est malheureux de remarquer que ces féminicides n’ébranlent que les femmes», regrette le collectif. «Que leurs noms ne tombent point dans l’oubli», dit-il.
par Texte Collectif
NON À LA PROMOTION DE LA CULTURE DU VIOL DANS LE CINÉMA AFRICAIN
Nous dénonçons avec la dernière énergie les organisateurs du salon du cinéma au feminin qui laissent concourir un court métrage propageant de fausses informations sur le viol et nourrit la culture du viol au Togo
Quoique nous soyons toutes favorables au développement d’initiatives visant à promouvoir le travail des femmes dans tous les secteurs de la vie économique et sociale, il n’est pas question de cautionner des travaux qui portent atteinte directement aux lois que nous avons adoptées, dans nos pays respectifs, pour protéger les femmes et les filles des violences sexistes et sexuelles. Cela d’autant plus lorsque ces mises en images attentent à la dignité humaine en faisant porter aux victimes de crime de viol la charge de la faute.
À ce jour, le monde dénombre 205 230 viols déclarés, pour la seule année 2022. Selon ONU femme, une femme sur trois est victime de violences physiques et/ou sexuelles dans le monde tous les jours. Ce phénomène criminel n'est donc pas un enjeu mineur que l’on peut se permettre de traiter avec légèreté ou par des personnes n'en ayant manifestement aucune connaissance. C’est pourquoi nous dénonçons avec la dernière énergie les organisateurs du salon du cinéma au feminin qui laissent concourir un court métrage qui propage de fausses informations sur le viol et nourrit la culture du viol au Togo.
Nous avons été stupéfaites de constater ce jour, la mise en circulation dans les réseaux sociaux, du trailer d’un film dont le titre est Mea culpa. Il s’agit de la bande annonce d’un film dans lequel une jeune fille victime de viol fait son mea culpa auprès de ses parents pour avoir été violée du fait de ses agissements sur les réseaux sociaux, jugés non conforme à l’attendu social. Il est explicitement fait mention d’un lien de causalité entre sa présence sur les réseaux sociaux et son travail d’influence et le viol qu’elle a subi de deux hommes, de nuit, en extérieur.
Au Togo, l’article 211 et suivants disposent que : Le viol consiste à imposer par fraude, menace, contrainte ou violence des relations ou pénétrations sexuelles à autrui. (Art 212) : Toute personne auteur de viol est punie d’une peine de réclusion criminelle de cinq (05) à dix (10) ans et d'une amende de deux millions (2 000 000) à dix millions (10 000 000) de francs CFA. S’agissant de la relation sexuelle imposée par la violence, la contrainte ou la menace par un conjoint à un autre, elle est punie d’une amende de deux cent mille (200 000) à un million (1 000 000) de francs CFA ou de sept cent vingt (720) heures de travail d’intérêt général. En cas de récidive, la peine est de dix (10) à douze (12) mois d’emprisonnement et d’une amende d’un million (1 000 000) à cinq millions (5 000 000) de francs CFA. (Art 213) : Les peines prévues à l’article précédent sont la peine de réclusion criminelle de dix (10) à vingt (20) ans et une amende de cinq millions (5 000 000) à vingt millions (20 000 000) de francs CFA si : 1) les relations sexuelles ont été imposées par plusieurs auteurs à une même victime ; 2) le viol a occasionné une grossesse ; 3) les violences exercées ont occasionné une maladie ou une incapacité de travail excédant six (06) semaines ; 4) le viol est commis par une personne agissant en état d'ivresse manifeste ou sous l'emprise manifeste de produits stupéfiants. 5) par une personne qui a abusé de l’autorité que lui confèrent ses fonctions. (Art 214) : La peine prévue à l’article précédent est également appliquée lorsque le viol a été commis : 1) sous la menace d’une arme ; 2) par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la victime ou les ascendants directs de ceux-ci ; 3) par une personne ayant autorité sur la victime ; 4) par une personne qui a abusé de l’autorité que lui confèrent ses fonctions. (Art 215) : Lorsque le viol est commis sur une personne particulièrement vulnérable, en raison notamment de sa minorité, son âge avancé, un état de grossesse, une maladie, une infirmité ou une déficience physique ou psychique, l’auteur est puni d’une peine de vingt (20) à trente (30) ans de réclusion criminelle. (Art 216) : Toute personne coupable de viol est punie du maximum de la réclusion criminelle à temps lorsque le viol est précédé, accompagné ou suivi d'actes de torture ou de barbarie ou a entraîné la mort de la victime.
La loi ne retient que la fraude, la menace, la contrainte ou la violence exercées sur la victime qui ne sont pas corrélatives à un comportement ou à un autre de celle-ci mais aux torts exclusifs de l’auteur. Elle sous-entend de plus le non-consentement de la victime peu importe le ou les comportements précédents qui ne valent pas consentement à être agressée quels que soient les liens qui unissent les deux personnes. Enfin, la loi considère que cette infraction a des conséquences sur la santé de la victime et des conséquences psychosociales avec la survenue d’une grossesse au décours de ce crime. Dès lors supposer que la victime aurait d’une manière ou d’une autre demandé à se faire agresser sexuellement ne repose sur aucun fondement juridique. Supposer que la victime par son comportement a incité l’auteur de viol à commettre sur sa personne un acte d’une telle gravité ne repose pas plus sur un fondement légal. Supposer que la victime devrait se sentir coupable d’une agression qu’elle a subi est donc d’une inanité sans borne.
Outre les effets susmentionnés concernant la santé physique d’une victime de viol, il n’est pas fait mention que ce crime enlève vingt (20) années d’espérance de vie à une victime. De plus les effets psychiques à long terme ne sont pas plus connus par la loi togolaise. Or le viol induit chez 80% des victimes des troubles psychiques graves pouvant aller d’un état de sidération mentale à l’éclosion de maladies mentales du registre psychotique, qui sont les maladies mentales chroniques les plus difficiles à traiter. Au surplus, le viol modifie les perceptions de soi et de l’environnement des victimes et conduit ces dernières à adopter des comportements allant de l’évitement et du repli social aux conduites à risque suicidaire voir au suicide.
Pour les personnes ayant vécu ce traumatisme grave, les suites psychosociales sont tout aussi graves car, dans nos sociétés ultra violentes avec les femmes, il est parfaitement connu et documenté que les victimes de viol sont discriminées, pointées du doigt et exclues du groupe social. Cela sous le prétexte qu’il leur revient de s’assurer que rien de fâcheux ne leur arrive. Comme si elles pouvaient être tenues responsables des actes posés par des agresseurs. Cet état de fait pèse comme un poids permanent sur la santé mentale de toutes les femmes togolaises et sa stabilité mais encore davantage s’agissant des victimes.
En conséquence, il est bien évident que lorsque des victimes de viol sont exposées à un environnement ultra violent à leur égard, véhiculant des représentations fausses, dégradantes et humiliantes à leur endroit, il existe des processus sociaux de re-victimisation qui obèrent leurs possibilités de sortie du trauma. En effet, cela met à feu la totalité des troubles dont elles souffrent voire fixe les traumatismes de manière quasi irréversible. Ces représentations erronées équivalent à une réédition de leur propre traumatisme pour certaines et/ou à des traumatismes cumulatifs pour d’autres. La prise en charge psychologique et psychiatrique s’en trouve particulièrement mise à mal. Nous sommes donc toutes et tous responsables par nos paroles, nos actes, nos pensées, nos représentations de l’aggravation ou non de leur état. Au surplus, on ne peut valablement pas leur demander de se sentir coupables d’un crime qu’elles ont subi ni dans la réalité ni même dans une fiction quel que soit l’angle que le cinéaste ait voulu adopter pour évoquer ce sujet. Ainsi il n’est pas pensable de laisser développer des supports cinématographiques qui ruinent les efforts de ces femmes pour se remettre de leurs traumatismes, pas plus que de ruiner les efforts consentis par le gouvernement et toutes les organisations des droits humains concernant cette question.
En derniere analyse, nos sociétés sont héritières de traumatismes graves dont l’exacerbation de la violence à l’égard des personnes vulnérabilisées est symptomatique. Il nous appartient de faire un travail urgent sur nous-mêmes et de freiner tout comportement visant à porter atteinte à notre dignité humaine et particulièrement à l’intégrité de nos corps. Pour ce qui concerne le viol des femmes, il est implicitement et explicitement autorisé par la permissivité de nos sociétés aux traitements dégradants à l’égard des femmes. Il est autorisé par l’idée de la domination d’un genre humain sur un autre genre humain lui octroyant des privilèges de droits divins. Il est autorisé par le rapport de force existant entre les hommes et les femmes glorifié et valorisé dans des productions culturelles (tel que le cinéma) ou des traditions qui tardent à disparaitre. Il est autorisé par l’idée généralement admise que le corps des femmes est à la libre disposition des hommes mais qu’elles sont responsables de ce qui leur arrive. Il est encore autorisé par l’idée répandue d’une pulsionnalité masculine conquérante, violente et sans limite au risque de l’homosexualité. Il est autorisé par l’idée qu’une jeune fille/femme par sa vêture, ses fréquentations, son travail ou tout autre velléité d’indépendance est responsable du viol qu’elle subit. Il est autorisé par l’indifférence réservé aux crimes et délits commis contre des femmes et des filles. Il est autorisé par le sensationnalisme des médias qui exposent les victimes plus que les auteurs. Il est autorisé par la clémence réservée à ces actes quand ils arrivent devant nos juridictions. Il est enfin autorisé parce que la sociologie, depuis les années 70, ne cesse de rappeler derrière le concept de culture du viol.
Si nous ne voulons pas assumer que nos sociétés promeuvent le viol, il nous faut travailler tous ensemble à éradiquer tout comportement, toute idée, toute croyance, toute norme sociale qui encourage implicitement ou explicitement le viol. C’est pour toutes ces raisons que nous demandons solennellement, nous toutes féministes africaines, le retrait du film Mea culpa du concourt du court-métrage de l’édition togolaise du salon du cinéma au féminin.
Naya Nakeba Yamina Goudiaby, étudiante en droit, féministe radicale
Elgas, journaliste et écrivain
Jean Noël Mabiala, PhD en sciences du langage – Président fondateur du centre de recherche et de formation FC-ONLY, spécialiste des questions d’interculturalité et du rapport à l’autre
Pour les Pays-Bas
Loes Oudenhujisen, doctorante en études africaines, Féministe